M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour la réplique.
M. Daniel Breuiller. Monsieur le ministre, en l’absence de réponse du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, je vous indique que nous prônons depuis longtemps la relocalisation, car elle est une condition de cette indispensable transition écologique.
Pour autant, l’industrie ne doit pas seulement être décarbonée, comme vous le revendiquez : elle doit être réellement verte, c’est-à-dire socialement utile, soutenable et économe en eau. Les arbitrages sur les prélèvements d’eau doivent être transparents, décidés démocratiquement, en exigeant qu’ils soient modérés pour préserver les milieux. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et CRCE. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
violences en marge des manifestations du 1er mai
M. le président. La parole est à M. Claude Malhuret, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Claude Malhuret. Après l’incendie des cars de gendarmerie il y a un mois à Sainte-Soline, le 1er mai, à Paris, ce sont les policiers eux-mêmes qui ont été transformés en torches vivantes. Semaine après semaine, l’ultragauche et les Black Blocs programment l’escalade, avec l’insurrection pour objectif.
Balayée la réforme des retraites, le guide suprême de la France soumise à Poutine, vêtu d’un manteau de cuir qui aurait fait fureur dans les années 1930 (Sourires sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.), nous a expliqué lundi, avec les gestes de la main et du menton en vogue à l’époque, qu’il fallait « mettre à bas la mauvaise République ».
Ce n’est pas un énième dérapage verbal.
Hier, à l’Assemblée nationale, l’un de ses sous-fifres s’est chargé de l’exégèse lors des questions d’actualité au Gouvernement. Il commence en s’adressant à vous, madame la Première ministre : « Policiers brûlés, les coupables, c’est vous ! » Il continue : « La Ve République permet d’agir sans le peuple et, contre lui, elle n’est plus légitime. À bas Macron et la mauvaise République. Vive la Constituante et la VIe République. Le 14 juillet, vous aurez votre prise de la Bastille. »
Cette névrose obsessionnelle de se croire chaque jour le 13 juillet 1789, comme d’autres se prennent pour Napoléon, pourrait sembler ne mériter qu’une consultation à Sainte-Anne. (Exclamations amusées et applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.) Méfions-nous, pourtant : les émeutes et parfois même les insurrections ont souvent été déclenchées par des dingues, et je conseille à ceux qui ne l’ont pas encore fait de se documenter sur la VIe République que nous propose la France irrécupérable. La Ve serait vite regrettée comme un modèle de démocratie.
Cette tenaille entre les violences dans la rue et la « zadisation » de l’Assemblée nationale, qui dure depuis des mois, est en train peu à peu de saper la confiance des Français dans leurs institutions et de dissoudre lentement le respect pour l’ordre républicain.
Dans ce contexte, je veux rendre hommage au jeune policier de 27 ans brûlé avant-hier et toujours hospitalisé, mais aussi aux 405 membres des forces de l’ordre blessés ce jour-là et aux 1 083 blessés depuis le début de l’année en accomplissant leur mission. Ma question est la suivante : comment adapter notre arsenal juridique pour mieux protéger nos forces de l’ordre face aux voyous organisés parasitant désormais toutes les manifestations avec pour seul but de casser du flic ? (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, RDPI, UC et Les Républicains.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le président Claude Malhuret, lundi, à l’occasion de la Journée internationale des travailleurs, de nombreuses manifestations ont eu lieu dans notre pays. Dans la très grande majorité des villes, grâce à la responsabilité des organisations syndicales et à l’engagement des préfets et des forces de l’ordre, les cortèges ont pu défiler sans heurts et les idées s’exprimer pacifiquement.
Malheureusement, vous l’avez souligné, monsieur le président, une fois de plus, dans plusieurs villes comme Paris, Lyon, Nantes ou Rennes, des casseurs décidés à en découdre avec les forces de l’ordre se sont infiltrés dans les cortèges et ont provoqué des violences parfois très graves.
En disant ces mots, je pense aux commerçants, aux élus, aux habitants, qui ont découvert hier matin les lourds dégâts sur leurs vitrines, leur mobilier urbain ou leurs voitures.
Je pense aux manifestants que ces casseurs mettent en danger sans hésiter.
Je pense aux parlementaires dont les domiciles ont été visés, aux militants dont certains ont été pris à partie.
Je pense enfin, et bien sûr, à nos forces de l’ordre attaquées dans plusieurs villes dans un déchaînement de violence. Plus de 400 policiers et gendarmes ont été blessés lundi dernier, certains gravement. La France entière a été choquée par les images du policier grièvement blessé par un cocktail Molotov.
Je veux dire aux policiers et aux gendarmes ma solidarité et mon soutien, celui de mon gouvernement et, je n’en doute pas, celui de tous les élus dans cet hémicycle. Je le répète devant vous : les auteurs de ces exactions doivent être identifiés et traduits en justice.
Aujourd’hui, certains continuent à mettre en cause les forces de l’ordre, à excuser les casseurs, à occulter les violences. C’est l’honneur de nos policiers et de nos gendarmes de protéger la liberté d’expression, la liberté de manifester. Nous sommes et nous resterons à leurs côtés. Toutes les mesures susceptibles de renforcer leur protection dans le respect des libertés publiques seront étudiées.
Monsieur le président, vous évoquez également les nouvelles outrances du leader de La France insoumise. Celles-ci s’inscrivent dans une remise en cause permanente de nos institutions. Elles sont une nouvelle étape pour saper la confiance de nos concitoyens dans notre démocratie. « À bas la mauvaise République », dit-il. Chacun le sait bien, pour Jean-Luc Mélenchon, la seule bonne République, c’est lui. Pour notre part, nous sommes et nous resterons du côté de la République et de l’ordre républicain. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE et UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
opération du gouvernement à mayotte
M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. François-Noël Buffet. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Monsieur le ministre, vous menez depuis quelques jours à Mayotte une opération d’envergure de lutte contre l’immigration irrégulière. C’est un territoire un peu particulier, comme l’a rappelé notre collègue Thani Mohamed Soilihi. En effet, 50 % de la population est étrangère, et 50 % de cette population étrangère est en situation irrégulière.
Depuis de nombreuses années, nous constatons une augmentation du nombre des actes de violence de toute nature. Dans votre opération, vous vous heurtez à la non-réadmission d’une partie des personnes en situation irrégulière à Anjouan.
Où en êtes-vous dans la négociation d’accords de réadmission par les Comores des personnes que nous tentons d’expulser de Mayotte ? Sans les fameux laissez-passer consulaires, devenus beaucoup trop célèbres, l’opération sera en difficulté. Nous avons besoin de comprendre et de connaître l’état de la situation et des discussions avec les dirigeants des Comores. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur Buffet, Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères aurait tout à fait pu répondre à cette question.
Je tiens à vous rassurer : nous avons avec les Comores une coopération efficace depuis quatre ans. Par exemple, l’an dernier, nous avons effectué 25 000 reconduites à la frontière, et 100 % des personnes comoriennes condamnées par la justice française ont été renvoyées aux Comores. Vous qui connaissez très bien ces questions, avouez que nous aimerions obtenir les mêmes résultats avec d’autres pays !
Vous connaissez la revendication historique des Comores, rappelée par votre collègue communiste : « récupérer » l’île de Mayotte. Compte tenu des circonstances, électorales actuelles aux Comores, il n’y a plus d’échanges depuis cinq jours – officiellement, c’est pour des raisons techniques… – entre Mayotte et ces dernières, s’agissant non seulement des étrangers en situation irrégulière via les laissez-passer consulaires, mais même de personnes voyageant en situation régulière. Plus précisément, la situation concerne particulièrement les trajets vers Mayotte depuis Anjouan, qui n’a pas toujours la même position que Moroni…
Nous utilisons tous les moyens diplomatiques pour renouer le contact. J’ai eu moi-même trois fois au téléphone le ministre de l’intérieur comorien cette semaine. Je l’ai invité à venir me voir à Paris pour reprendre la coopération. Il a accepté cette invitation. Je le recevrai dans quelques jours.
Si nous continuons à effectuer 25 000 reconduites à la frontière chaque année, nous atteindrons notre objectif de lutte contre l’immigration irrégulière à Mayotte. Vous le savez, le problème n’est pas tant la reconduite aux frontières que l’arrivée des kwassa-kwassa. Mais la mobilisation de la Légion étrangère, des policiers, des gendarmes – il y a 1 500 policiers et gendarmes à Mayotte en ce moment – empêche quasiment toute arrivée de kwassa-kwassa. Nous sommes donc en passe de parvenir à limiter fortement l’immigration irrégulière à Mayotte.
J’en profite pour dire qu’il faut aussi changer le droit à Mayotte. Nous avons formulé des propositions. Nous en parlerons peut-être à l’occasion de l’examen d’un texte sur l’immigration que nous espérons bientôt soumettre au Parlement, mais aussi du débat constitutionnel que nous aurons demain et après-demain à la demande du Président de la République.
J’ai déjà dit que j’étais favorable à la modification du droit du sol à Mayotte pour limiter l’appel d’air sur le territoire mahorais… (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour la réplique.
M. François-Noël Buffet. Nous attendons avec impatience le projet de loi sur l’immigration pour essayer d’apporter une réponse effective. Pour l’instant, comme sœur Anne, nous ne voyons rien venir… (Sourires sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Peut-être finira-t-il par être déposé. Dans ce cas, nous y consacrerons le temps qu’il faudra.
M. François-Noël Buffet. Je suis convaincu qu’il faudra maintenir dans ce texte l’idée qu’il ne peut pas y avoir de visas s’il n’y a pas de laissez-passer consulaires. Tant que nous ne mettrons pas en place un rapport de force puissant avec les pays sources, nous aurons beaucoup de mal et la situation risquera de perdurer.
Mais il faut aussi donner un avenir à Mayotte, avec un projet économique et un investissement de long terme, qui sera seul garant, à terme, d’une vie normale pour nos concitoyens mahorais. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées du groupe RDPI.)
dégradation de la note de la france par l’agence fitch
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Stéphane Demilly. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Monsieur le ministre, vendredi dernier, l’agence de notation Fitch a dégradé la note de crédit de la France, en la faisant passer de AA à AA–.
Pour justifier sa décision, l’agence évoque notamment « des déficits budgétaires importants et des progrès modestes » dans la réduction de ces déséquilibres, après trois ans d’abondantes dépenses publiques destinées à amortir le choc de la covid-19 et de l’inflation.
La principale activité de Fitch, comme des deux autres agences de notation très connues, Standard & Poor’s (S&P) et Moody’s, consiste à évaluer la capacité des États à rembourser leur dette en leur attribuant une note matérialisée par des lettres.
La meilleure note est AAA, pour un crédit de qualité optimale ; c’est ce que nous avions avant 2012. La pire est C ou D, pour un pays qui s’approche du défaut de paiement.
La note de la France a donc été dégradée d’un cran vendredi dernier. Cette décision, comme l’a constaté l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), va à contre-courant du signal envoyé aux marchés par le Gouvernement avec l’adoption de la réforme des retraites, censée attester d’une volonté de maîtrise des équilibres budgétaires à long terme.
Mais, avec cette note, la réalité est aujourd’hui tout autre. Si notre pays perd de sa crédibilité sur sa capacité à rembourser sa dette, nous risquons d’être amenés à emprunter plus cher sur les marchés et donc à payer plus d’intérêts.
Cela grèvera les finances publiques et nos marges de manœuvre budgétaires, qui – nous le savons – sont déjà très contraintes. Rappelons que la charge de la dette publique est passée en quelques mois de 37 milliards d’euros à 50 milliards d’euros.
Monsieur le ministre, quelles mesures concrètes comptez-vous prendre pour que nous retrouvions sur les places financières internationales un label de confiance et de crédibilité rassurant pour nos prêteurs ? En d’autres termes, comment comptez-vous enrayer cette dégradation de la notation de la France ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Monsieur le sénateur Demilly, je connais votre attachement à la bonne tenue des comptes publics, et je sais pouvoir compter sur vous pour adopter dans quelques semaines la loi de programmation des finances publiques, qui nous permettra de fixer le cadre de leur rétablissement… (Exclamations amusées sur les travées du groupe UC.)
La France n’a pas de difficulté à lever de la dette sur les marchés. Deux agences se sont prononcées. Si Fitch a dégradé notre note, Moody’s n’a pas jugé bon de modifier la notation de la France. Nous attendons la troisième décision, qui sera celle de l’agence Standard & Poor’s, au début du mois de juin.
Je constate également que, sur les marchés, le spread avec l’Allemagne a peu évolué, passant de 50 à 59 points de base, preuve d’une véritable solidité de la France lorsqu’elle émet de la dette. Je rappelle que, pour l’Italie, ce spread est de plus de 180 points de base. Gardons donc notre sang-froid sur la crédibilité de la dette et de la signature française.
Je vous rejoins à 1 000 % : nous devons évidemment avoir une stratégie cohérente, stable, déterminée de rétablissement des finances publiques. Cela passe par trois décisions immédiates.
Premier rendez-vous, la revue des dépenses publiques. Elle a été engagée par la Première ministre et elle aura lieu – je tiens à le dire – non pas seulement en 2023, mais toutes les années à partir de 2023. Chacune des dépenses publiques sera examinée pour vérifier qu’elle produit véritablement le service que nos compatriotes sont en droit d’attendre.
Deuxième rendez-vous, les assises des finances publiques, pour nous engager sur la trajectoire que j’ai indiquée.
Troisième rendez-vous, la loi de programmation des finances publiques, qui gravera dans le marbre la trajectoire financière de la France et l’accélération du désendettement. Le programme de stabilité prévoit quatre points de désendettement supplémentaires par rapport à ce que nous avions envisagé.
J’aimerais simplement que tous ceux qui, ici, croient en la nécessité d’avoir des finances publiques bien tenues nous rejoignent dans cette détermination à accélérer le désendettement de la France. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
situation financière de la france (ii)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Monsieur le ministre, dans une France malheureusement en proie à des tensions sociales persistantes, la récente dégradation de la note de la France, qui devient AA–, décidée par une agence de notation, confirme, s’il en était besoin, nos inquiétudes sur notre incapacité à réduire notre endettement, qui atteint des sommets.
On pourrait évidemment espérer bénéficier d’une croissance soutenue. Mais les prévisions fournies par les économistes pour la période 2023-2027 sont bien moins favorables que celle du Gouvernement.
Cet écart aura nécessairement des effets sur l’évolution des recettes publiques et, par suite, sur les déficits. Pouvez-vous, monsieur le ministre, confirmer que ce camouflet financier – ou à tout le moins cette alerte – adressé au Gouvernement ne vous inspire pas d’inquiétude particulière et que nos comptes publics ne dérivent pas dangereusement ? Quelles conséquences en tirez-vous sur l’évolution des conditions de financement de la France et sur la charge de la dette ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Monsieur le sénateur Husson, je connais votre engagement s’agissant des finances publiques. Je suis là pour être non pas inquiet, mais déterminé dans le rétablissement des finances publiques, grâce à des décisions très structurantes, dont certaines ont d’ailleurs été votées par votre groupe, qui a fait preuve d’esprit de responsabilité.
Les premières décisions structurantes ont été la réforme de l’assurance chômage et celle des retraites, que vous avez votée. Je rappelle que, contrairement à ce que j’entends trop souvent dire, l’agence Fitch en a salué l’efficacité quant au rétablissement des finances publiques.
La deuxième série de décisions très concrètes comprendra la sortie du bouclier tarifaire, la fin du gel sur les prix du gaz, ceux-ci étant revenus à la normale, et la sortie progressive du plafonnement sur les prix de l’électricité. Nous voulons que, d’ici à la fin de 2024 ou au début de 2025, nous soyons sortis définitivement et totalement des boucliers tarifaires. Ceux-ci étaient utiles pour protéger nos compatriotes quand c’était nécessaire, mais ils ne le sont plus dès lors que les prix sont de nouveau orientés à la baisse. J’espère que vous nous soutiendrez aussi dans cette décision.
Enfin, la loi de programmation des finances publiques arrive. J’en ai parlé à plusieurs reprises avec le président de votre groupe. Je reste ouvert à toute amélioration qui permettra son adoption, afin de graver dans le marbre nos engagements.
Pourquoi est-ce important ? Non pas pour faire plaisir aux agences de notation ! Mais pour, je le répète, rétablir totalement et pleinement notre indépendance et notre souveraineté financières. En période d’augmentation des taux d’intérêt, laisser filer la dette, comme le proposent certains, c’est jeter l’argent par les fenêtres : un point de taux d’intérêt supplémentaire, ce sera, à l’horizon 2027, 15 milliards d’euros de charges supplémentaires sur la dette. C’est plus que le budget du ministère de la justice ! Je pense que M. le garde des sceaux et tous nos compatriotes préfèrent que l’on dépense de l’argent pour les policiers, pour la sécurité, pour les gendarmes, pour la justice, pour l’école, pour l’hôpital, pour les services publics, plutôt que pour le service de la dette.
C’est pour cela que vous pouvez compter, monsieur le sénateur, sur ma détermination totale à rétablir les finances publiques et à accélérer le désendettement. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour la réplique.
M. Jean-François Husson. Vous vous dites déterminé, monsieur le ministre ? Si j’en juge par les six années passées et par le résultat qu’on observe aujourd’hui, je constate que vous avez singulièrement manqué de détermination.
Autre élément inquiétant, les chiffres figurant dans le programme de stabilité que nous allons examiner ce soir montrent que les dépenses ont augmenté de 30 milliards d’euros par rapport à la loi de programmation que nous avons votée à la fin de l’année dernière. Encore une dérive !
Oui, monsieur le ministre, nous sommes déterminés, mais pour un temps de vérité, pas pour du camouflage ! Vous nous demandez de travailler sur la loi de programmation des finances publiques. Mais alors, pourquoi avez-vous continué à dépenser de l’argent que nous n’avons pas et qu’il faut aller emprunter, alors que nous vous avions proposé au mois de décembre des pistes d’économies que vous avez balayées d’un revers demain ? C’est regrettable. Je le redis, monsieur le ministre : il faut vraiment se mettre au travail. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
fermetures de services d’urgence et déplacement du personnel
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
Mme Nicole Bonnefoy. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, on ne compte plus les fermetures temporaires de services d’urgence ou hospitaliers aux quatre coins du pays.
Le Sénat, par sa connaissance du quotidien de nos compatriotes, vous interpelle depuis des mois, voire des années, sur la désertification médicale à l’œuvre, qui se déporte à présent vers l’hôpital et les urgences.
Je vous interrogeais moi-même encore récemment sur le risque de fermeture du centre hospitalier de Ruffec ou de celui de Confolens, dans mon département, en Charente. C’est ainsi, en cascade, qu’arrivent les nouvelles fermetures de services que, par euphémisme, vous appelez « suspensions temporaires ».
Pas un territoire, notamment dans les zones rurales, n’est épargné par l’avalanche de défections de médecins, épuisés par la charge de travail, de nuit comme de jour. Des maternités ferment en pagaille, par manque de médecins, ce qui met en danger la vie des femmes.
Monsieur le ministre, je vous prie d’écouter les territoires. Attention à ne pas considérer un service fermé comme un service désengorgé ! À ce stade, la promesse d’Emmanuel Macron d’améliorer l’offre de soins d’ici à la fin de l’année est un mirage.
Vous devez ce mercredi faire un premier bilan des travaux du Conseil national de la refondation (CNR) sur la santé. Nous avons eu ce matin sur France Inter un aperçu peu convaincant de votre boîte à outils.
La situation n’est pas acceptable : vous le savez. Les Français, comme les élus locaux ont besoin de clarté sur les données du ministère en matière de fermetures. Le recours massif au 15 est-il l’alpha et l’oméga de vos moyens d’action ? L’urgence des urgences, c’est l’accès à la santé, et non les retraites. Où sont vos propositions de régulation de l’accès aux soins ? Où est votre vision de moyen terme pour assurer la continuité du service public de santé ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Madame la sénatrice Bonnefoy, le vrai mirage serait surtout, de faire croire aux Français que nous pourrons demain avoir 5 000 ou 10 000 médecins de plus. Ce n’est pas possible, et il faut le dire. C’est donc notre organisation globale qui doit être repensée.
Dans cette réorganisation, nous sommes en train tous ensemble de gagner le combat contre les dérives de l’intérim médical. Quand je dis « nous », je parle du Gouvernement, sous l’autorité de la Première ministre, des professionnels de santé et des élus, qui, territoire par territoire, nous permettent de gagner ce combat indispensable pour la survie de notre hôpital public. La dérive de l’intérim médical entraînait en effet la fuite des médecins hospitaliers de l’hôpital public.
Quelles solutions ont été mises en place ? Dans la Charente, pour l’hôpital de Confolens, qui a su rouvrir, en quelque sorte, son service des urgences, la solidarité territoriale a été portée par les agences régionales de santé (ARS), pour trouver une possibilité de travailler de façon plus intelligente à l’échelle d’un territoire, afin que les parcours de soins ne soient pas rompus et que la sécurité et la qualité des soins continuent à être garanties pour tous nos concitoyens.
D’une façon plus structurelle, nous souhaitons répondre à l’engagement du Président de la République sur les services d’urgence. Bien sûr, un service d’urgences fermé n’est pas un service d’urgences désengorgé. Cela semble une évidence. Mais nous avons les outils pour aboutir à ce désengorgement.
Cela passera d’abord par une meilleure gestion de l’amont. Le sas dont vous parlez est une des solutions. L’été dernier, pour la première fois, grâce à la mise en application du numéro 15, en demandant à nos concitoyens d’appeler le Samu, nous avons fait diminuer la fréquentation de nos services d’urgence, d’une manière pérenne.
Il y a également d’autres solutions, en aval des urgences, qui passent par une meilleure gestion des lits à l’échelle territoriale, avec le public et avec le privé. Enfin, la réorganisation de nos services peut les rendre plus fluides. Ce que vous qualifiez de « mirage » est loin d’être inatteignable. Nous atteindrons l’objectif, territoire par territoire, tous ensemble. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour la réplique.
Mme Nicole Bonnefoy. Monsieur le ministre, j’ai le regret de vous dire que, avec le Gouvernement, vous gérez la crise de l’hôpital à la petite semaine, sans vision d’ensemble, sans mesurer les conséquences de vos propres lois, comme celle sur l’intérim. (Mme la Première ministre le conteste.) Vous éradiquez la médecine de proximité et vous condamnez des territoires entiers à la rupture de soins. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
pouvoir d’achat et logement