Sommaire
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Marie Mercier, M. Jean-Claude Tissot.
2. Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023. – Adoption des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur un projet de loi
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure pour le Sénat de la commission mixte paritaire
M. René-Paul Savary, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion
Texte élaboré par la commission mixte paritaire
Amendement n° 1 du Gouvernement
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 1 du Gouvernement (suite). – Adoption.
Adoption, par scrutin public n° 251, du projet de loi dans le texte de la commission mixte paritaire, modifié.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Alain Richard
3. Allocation logement et habitat non décent. – Rejet d’une proposition de loi
Discussion générale :
M. Jean-Louis Lagourgue, auteur de la proposition de loi
Mme Micheline Jacques, rapporteur de la commission des affaires économiques
Clôture de la discussion générale.
Amendement n° 1 rectifié de M. Jean-Louis Lagourgue. – Rejet par scrutin public n° 252.
Rejet de la proposition de loi.
Suspension et reprise de la séance
4. Lutte contre la désertification médicale des collectivités. – Rejet d’une proposition de loi dans le texte de la commission
Discussion générale :
M. Dany Wattebled, auteur de la proposition de loi
M. Daniel Chasseing, rapporteur de la commission des affaires sociales
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Pascale Gruny
M. Daniel Chasseing, rapporteur
Clôture de la discussion générale.
Amendement n° 1 du Gouvernement. – Rejet par scrutin public n° 253.
Rejet, par scrutin public n° 254, de l’article unique de la proposition de loi dans le texte de la commission.
Suspension et reprise de la séance
5. Mise au point au sujet d’un vote
7. Gestion différenciée de la compétence « Eau et Assainissement ». – Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission
Discussion générale :
M. Jean-Yves Roux, auteur de la proposition de loi
M. Alain Marc, rapporteur de la commission des lois
Clôture de la discussion générale.
Adoption, par scrutin public n° 255, de l’article unique de la proposition de loi dans le texte de la commission.
8. Fraudes en matière artistique. – Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Discussion générale :
M. Bernard Fialaire, auteur de la proposition de loi et rapporteur de la commission de la culture
Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture
Clôture de la discussion générale.
Amendement n° 2 rectifié de Mme Monique de Marco. – Rejet.
Amendement n° 3 rectifié de Mme Monique de Marco. – Rejet.
Amendement n° 1 rectifié de Mme Monique de Marco. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 4 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture
Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.
9. Objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Amendement n° 4 rectifié quinquies de Mme Sylviane Noël. – Retrait.
Amendement n° 201 rectifié ter de M. Jacques Fernique. – Rejet.
Amendement n° 2 rectifié quinquies de Mme Sylviane Noël. – Retrait.
Amendement n° 156 rectifié de M. Laurent Somon. – Rejet.
Amendement n° 213 rectifié bis de Mme Françoise Gatel. – Retrait.
Amendement n° 74 rectifié de M. Didier Mandelli. – Rejet.
Amendement n° 9 rectifié bis de M. Étienne Blanc. – Retrait.
Amendement n° 69 rectifié bis de M. Serge Babary. – Retrait.
Amendement n° 193 de M. Ronan Dantec. – Adoption.
Amendement n° 121 rectifié de M. Cédric Vial. – Rejet.
Amendement n° 176 de M. Christian Redon-Sarrazy. – Adoption.
Amendement n° 137 rectifié bis de M. Michel Canévet. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 174 de Mme Viviane Artigalas. – Rejet.
Amendement n° 136 rectifié ter de M. Michel Canévet. – Retrait.
Amendement n° 95 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Amendement n° 64 rectifié bis de M. Christian Bilhac. – Rejet.
Amendement n° 103 rectifié septies de Mme Christine Herzog. – Rejet.
Amendements nos 21 et 18 de Mme Frédérique Espagnac. – Non soutenus.
Amendement n° 217 rectifié bis de M. Didier Rambaud. – Retrait.
Amendement n° 229 rectifié de M. Jean-Marc Boyer. – Retrait.
Amendement n° 206 rectifié de M. Jean-Pierre Corbisez. – Rejet.
Amendements nos 130 et 129 de Mme Frédérique Espagnac. – Non soutenus.
Amendement n° 198 de Mme Cécile Cukierman. – Retrait.
Adoption de l’article.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires
Mme Valérie Létard, présidente de la commission spéciale
Amendement n° 160 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 127 rectifié de Mme Frédérique Espagnac. – Non soutenu.
Amendement n° 60 rectifié bis de M. Max Brisson. – Retrait.
Amendement n° 225 rectifié quater de M. Bernard Delcros. – Retrait.
Amendement n° 237 rectifié quinquies de M. Philippe Folliot. – Retrait.
Amendement n° 80 rectifié de M. Cédric Vial. – Adoption.
Amendements nos 183 et 184 de Mme Frédérique Espagnac. – Non soutenus.
Amendement n° 178 rectifié de M. Éric Gold. – Rejet.
Amendement n° 234 rectifié septies de M. Alain Marc. – Rejet.
Amendement n° 252 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 253 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 208 rectifié de M. Jean-Pierre Corbisez. – Rejet.
Amendement n° 30 rectifié bis de Mme Sylvie Vermeillet. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Amendements identiques nos 44 rectifié bis de M. Alain Cadec et 72 rectifié bis de Mme Brigitte Micouleau. – Retrait des deux amendements
Amendement n° 179 rectifié de M. Éric Gold. – Retrait.
Amendement n° 254 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 255 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 8
Amendement n° 145 rectifié de Mme Angèle Préville. – Retrait.
Amendement n° 123 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy. – Retrait.
Amendement n° 161 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 126 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy. – Rejet.
Amendement n° 75 rectifié bis de M. Jean-François Longeot. – Adoption.
Amendement n° 195 de M. Ronan Dantec. – Rejet.
Amendement n° 226 rectifié ter de M. Bernard Delcros. – Adoption.
Amendement n° 117 rectifié quinquies de M. Philippe Folliot. – Rejet.
Amendement n° 241 rectifié bis de Mme Jacqueline Eustache-Brinio. – Retrait.
Amendement n° 155 rectifié de M. Laurent Somon. – Retrait.
Amendement n° 146 rectifié de Mme Angèle Préville. – Retrait.
Amendement n° 20 de Mme Frédérique Espagnac. – Non soutenu.
Amendement n° 33 rectifié bis de M. Jean-François Longeot. – Rejet.
Amendement n° 31 rectifié bis de Mme Sylvie Vermeillet. – Rejet.
Amendement n° 138 rectifié quater de M. Michel Canévet. – Rejet.
Amendement n° 177 rectifié de M. Éric Gold. – Rejet.
Amendement n° 173 de M. Christian Redon-Sarrazy. – Rejet.
Amendement n° 222 rectifié de M. Jean-Pierre Corbisez. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 134 rectifié bis de M. Michel Canévet. – Retrait.
Amendement n° 152 rectifié de M. Laurent Somon. – Rejet.
Amendement n° 81 rectifié de Mme Sonia de La Provôté. – Rejet.
Amendement n° 153 rectifié de M. Laurent Somon. – Rejet.
Amendement n° 256 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 82 rectifié de M. Cédric Vial. – Retrait.
Amendement n° 257 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 83 rectifié de Mme Sonia de La Provôté. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 164 rectifié bis de M. Jean-François Longeot. – Retrait.
Amendement n° 197 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 112 rectifié de M. Fabien Genet. – Retrait.
Amendement n° 147 rectifié de Mme Angèle Préville. – Rejet.
Amendement n° 58 rectifié bis de M. Étienne Blanc. – Retrait.
Amendement n° 54 rectifié de Mme Daphné Ract-Madoux. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 87 rectifié de Mme Sonia de La Provôté. – Rejet.
Amendement n° 233 de M. Patrice Joly. – Non soutenu.
Amendement n° 57 rectifié de Mme Daphné Ract-Madoux. – Adoption.
Amendement n° 56 rectifié de Mme Daphné Ract-Madoux. – Retrait.
Amendement n° 55 rectifié de Mme Daphné Ract-Madoux. – Retrait.
Amendement n° 258 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 220 rectifié bis de Mme Martine Berthet. – Adoption.
Amendement n° 182 rectifié de Mme Amel Gacquerre. – Non soutenu.
Amendement n° 223 rectifié de M. Jean-Pierre Corbisez. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 259 rectifié de la commission. – Adoption.
Amendement n° 128 rectifié sexies de Mme Sylviane Noël. – Adoption.
Amendement n° 90 rectifié de M. Cédric Vial. – Retrait.
Amendement n° 91 rectifié de M. Cédric Vial. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 1 rectifié sexies de Mme Sylviane Noël. – Retrait.
Amendement n° 107 rectifié ter de M. Fabien Genet. – Retrait.
Amendement n° 148 rectifié de Mme Angèle Préville. – Devenu sans objet.
Amendement n° 165 rectifié bis de M. Franck Menonville. – Non soutenu.
Amendement n° 122 rectifié ter de M. Bruno Sido. – Devenu sans objet.
Amendement n° 102 rectifié quater de M. Philippe Tabarot. – Adoption.
Amendement n° 238 rectifié bis de M. Laurent Somon. – Rejet.
Amendement n° 239 rectifié bis de M. Laurent Somon. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 158 rectifié bis de M. Dany Wattebled. – Retrait.
Amendement n° 93 rectifié de M. Cédric Vial. – Rejet.
Amendement n° 150 rectifié de Mme Angèle Préville. – Retrait.
Amendement n° 245 rectifié de Mme Amel Gacquerre. – Non soutenu.
Mme Valérie Létard, présidente de la commission spéciale
Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.
10. Ordre du jour
compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Marie Mercier,
M. Jean-Claude Tissot.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Adoption des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte commun sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 (texte de la commission n° 436, rapport n° 435).
La parole est à Mme la rapporteure. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la commission mixte paritaire réunie hier pour examiner les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS) pour 2023 est parvenue à établir un texte commun.
Lors de ses travaux, René-Paul Savary et moi-même avons veillé à rester fidèles à l’esprit de la majorité sénatoriale. Cette réforme, qui, nous le savons, demandera des efforts aux Français, doit atteindre pleinement son but : ramener notre système de retraite à l’équilibre à l’horizon de 2030, afin de garantir sa soutenabilité financière au bénéfice des générations futures.
C’est en ayant cet objectif en tête que, tout en inscrivant ses marqueurs dans le texte, le Sénat a veillé, en première lecture, à rester dans une épure financière proche de l’équilibre.
Mes chers collègues, René-Paul Savary vous détaillera certains choix de la commission mixte paritaire, qui se traduiront par des coûts supplémentaires pour le système de retraite par rapport à la version du texte adoptée par le Sénat.
Néanmoins, j’espère que vous serez en mesure de nous confirmer, messieurs les ministres, que le texte issu de la commission mixte paritaire permettra le retour à l’équilibre des comptes en 2030, moyennant peut-être un nouvel ajustement des taux de cotisations patronales des branches vieillesse et accidents du travail et maladies professionnelles.
En tout état de cause, mes chers collègues, vous retrouverez dans le texte qui vous est présenté les principales mesures que nous avons examinées et adoptées tout au long de la semaine dernière et même, pour certaines, depuis plusieurs années dans le cadre de différents PLFSS.
Je pense naturellement au décalage progressif de l’âge d’ouverture des droits à la retraite de 62 ans à 64 ans, ainsi qu’à l’accélération de la réforme Touraine, sur lesquels repose l’équilibre financier de ce PLFRSS.
Je pense aussi à la mise en extinction des principaux régimes spéciaux et à la clause dite du grand-père, aux termes de laquelle les personnes embauchées à compter du 1er septembre 2023 dans les entreprises et institutions concernées seront affiliées au régime général pour le risque vieillesse.
Je pense également à l’abandon du projet de transfert aux Urssaf de l’activité de recouvrement de l’Agirc-Arrco et de la Caisse des dépôts et consignations, qui a été confirmé par la commission mixte paritaire.
Enfin, je vous précise que la commission mixte paritaire a confirmé l’introduction dans l’annexe A du principe de compensation intégrale par l’État, dès 2023, des surcoûts entraînés par la hausse des cotisations patronales de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) pour les employeurs publics concernés.
Mme Sophie Primas. Très bien !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. En raison du maintien de ces nombreux marqueurs du Sénat et de l’adoption par la commission mixte paritaire des autres dispositions, que va à présent vous présenter René-Paul Savary, je vous appelle, mes chers collègues, à approuver les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et INDEP. – M. Didier Rambaud applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)
M. René-Paul Savary, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Mes chers collègues, je vous présenterai très rapidement les conclusions de la réunion de la commission mixte paritaire. Celle-ci fut particulière : l’Assemblée nationale ayant été empêchée de débattre du texte et de le voter, il nous appartenait de permettre le débat au sein de cette commission, dont la réunion a duré neuf heures et a permis des avancées.
Le compromis qui a été trouvé prend en compte les exigences du Sénat, les mesures auxquelles nous étions particulièrement attachées ayant été retenues. Sur les mesures destinées aux mères de famille ou portant sur l’usure professionnelle, la patte du Sénat a été nette.
Je vous remercie, monsieur le ministre du travail, d’avoir permis que l’emploi des seniors demandeurs d’emploi de longue durée fasse l’objet d’un accord national interprofessionnel. Cette mesure est importante et nous permettra de favoriser l’emploi des seniors.
Il nous appartenait également de prendre en compte des avancées et des propositions de l’Assemblée nationale qui n’avaient pu être débattues jusqu’au bout, en particulier sur les carrières longues. Le projet de loi prévoit à cet égard une avancée significative ; je pense aux 43 annuités minimum pour les bornes d’âge. La durée de cotisation pourra ainsi être prise en compte pour certains.
Au terme de cette réunion, nous pouvons voter cette réforme sans états d’âme. (Exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. Mickaël Vallet. C’est l’expression qui convient, en effet !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Elle a été considérablement adoucie (Mme Cathy Apourceau-Poly ironise.) par rapport à la version initiale qui nous avait été proposée par le Gouvernement.
Les mesures adoptées au Sénat, en particulier les dispositions sur l’usure professionnelle, auxquelles nous sommes attachées, ayant été conservées dans le texte final, je vous invite, mes chers collègues, à voter cette réforme. (Applaudissements nourris sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. – Mme Véronique Guillotin et M. Bernard Buis applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, un accord entre les deux assemblées a donc été trouvé, les deux chambres s’étant retrouvées sur l’essentiel.
Cet accord réaffirme sans ambiguïté l’attachement de la représentation nationale à notre système de retraite par répartition, hérité de l’après-guerre, et permet, enfin, de mettre aux voix un texte profondément enrichi, après plusieurs semaines de débats parlementaires.
Le texte qui est soumis au vote des deux assemblées conjugue le cœur de la réforme et des engagements du Président de la République avec les nombreuses améliorations portées par les parlementaires dans les deux chambres.
Les engagements pris au printemps dernier devant les Français sont tenus : il s’agit de progressivement travailler plus pour équilibrer notre système de retraite, de fermer les principaux régimes spéciaux dans le respect de la clause du grand-père et d’augmenter la retraite minimale pour une carrière complète.
Je pense aussi pouvoir dire que ce texte a été profondément enrichi jour après jour, au fil de nos discussions.
Ainsi, grâce à votre soutien, nous avons concrétisé des demandes formulées de longue date, par exemple pour les sapeurs-pompiers volontaires, les apprentis, les stagiaires, les étudiants, les sportifs ou encore les enseignants du primaire. Je suis certain que plusieurs de ces améliorations – ma liste n’est pas exhaustive – renforceront durablement la justice de notre système de retraite.
Il est difficile, quand on commente les conclusions d’une commission mixte paritaire, d’éviter l’effet d’inventaire, mais je suis convaincu que chaque avancée compte et mérite d’être reconnue en tant que telle.
Je pense à la création d’une surcote avant l’âge légal pour les mères ayant atteint la durée d’affiliation requise avant l’âge d’ouverture des droits, ainsi qu’à l’instauration d’un CDI senior, portée avec force et conviction par votre rapporteur René-Paul Savary, dans le respect de l’article L. 1 du code du travail, cher au président du Sénat.
Je pense également à la création d’une pension de réversion pour les orphelins, en particulier ceux qui sont en situation de handicap, sur l’initiative de Bruno Retailleau ; à la prise en compte des parents confrontés au deuil d’un enfant, sur l’initiative des groupes CRCE, RDPI et GEST ; à la perte de droits familiaux pour les parents violents, sur proposition d’Annick Billon.
Je pense enfin au renforcement des droits à la retraite des élus locaux, porté ici notamment par Mme la rapporteure pour avis Sylvie Vermeillet, ou à la revalorisation des pensions à Mayotte, sur l’initiative de Thani Mohamed Soilihi et d’Hervé Marseille.
Si je me livre à cet inventaire, c’est pour montrer que le texte a été enrichi et amélioré au fil des discussions. Je pense que, tel qu’il résulte de vos travaux, il reflète un équilibre politique.
Cet équilibre est également financier, car laisser filer les déficits serait injuste et irresponsable. Nous maintiendrons donc l’équilibre du système de retraite à l’horizon de 2030, tel qu’il était prévu dans le texte initial.
C’est la raison pour laquelle, dans un premier temps, le Gouvernement lève les gages restant à l’article 2 bis A et à l’article 8.
C’est surtout la raison pour laquelle nous prévoyons un transfert supplémentaire de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) pour assurer ce financement, tout en laissant cette dernière largement excédentaire. Mon collègue Gabriel Attal, ministre chargé des comptes publics, reviendra sur cette question.
Je ne nie évidemment pas les désaccords qui persistent, pas plus que je n’occulte l’expression de l’opposition à la réforme. Je suis sûr, à l’inverse, que personne ne contestera que le débat a eu lieu. (Exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Le débat a eu lieu avec les partenaires sociaux, après quatre mois de concertation qui ont permis de concrétiser des avancées que personne n’aurait pu imaginer voilà seulement quelques mois. Je pense en particulier à l’emploi des seniors et à la prévention de la pénibilité. Alors que nous pensions les positions des uns et des autres irréconciliables sur ce sujet, nous avons su, je pense, les rapprocher. (M. Rémi Cardon s’exclame.)
Après 74 heures de discussion à l’Assemblée nationale et 102 heures au Sénat, on peut également dire que le débat a bien évidemment eu lieu au Parlement. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.) Certains diront que c’est trop peu, mais la réalité est que cette réforme a été davantage discutée dans les assemblées que les deux précédentes réformes des retraites cumulées !
D’autres diront qu’ils reviendront sur cette réforme lorsqu’ils arriveront un jour au pouvoir. Mais qu’avons-nous constaté depuis trente ans de réformes des retraites ? Jamais – j’y insiste – une alternance politique n’a remis en cause les efforts demandés dans les réformes précédentes.
Au fond, nous avons suivi un seul fil rouge : celui du débat contradictoire et républicain.
L’opposition, moins ici qu’ailleurs peut-être, a choisi un autre fil rouge : celui de l’obstruction méthodique (M. Rémi Cardon proteste.), une obstruction qui sacrifie la mission même d’un parlementaire, qui abîme le débat chaque jour un peu plus, une obstruction, enfin, qui aura été assumée dans une confusion inouïe entre la légitimité du Parlement et l’expression de la rue. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
De manœuvres en blocages, d’attaques personnelles en comportements violents, nous avons assisté à une dérive, moins ici qu’ailleurs, certes,…
M. Éric Bocquet. Pas ici !
M. Guy Benarroche. Merci de vos encouragements !
M. Olivier Dussopt, ministre. Je veux le dire avec gravité devant vous : la République ne doit pas céder un pouce de terrain face à ces dérives. Nous les combattrons jour après jour, texte après texte.
Beaucoup parmi les opposants à cette réforme ont cité Victor Hugo, tout en foulant parfois au pied son sens aigu du républicanisme, lequel aurait fait honneur à nos débats. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
M. Mickaël Vallet. Dire cela ici !
M. Olivier Dussopt, ministre. Le Gouvernement a donc surmonté cette obstruction, pour assurer la clarté et la sincérité de nos débats.
Ainsi, en application de l’article 44, alinéa 2, de la Constitution, les amendements ou sous-amendements n’ayant pas été examinés par la commission des affaires sociales n’ont pu être présentés.
Ensuite, en application de l’article 44, alinéa 3, de notre belle Constitution, le Gouvernement a demandé au Sénat de se prononcer par un vote unique sur l’ensemble du texte, après présentation par leurs auteurs de l’ensemble des amendements restant en discussion.
Certains ont voulu faire croire à une procédure inhabituelle, voire totalement inédite, mais répéter le même mensonge n’en fait pas une vérité.
Les choses sont simples : les gouvernements précédents ont eu recours lors des trois précédentes réformes des retraites au même vote unique pour surmonter l’obstruction.
Lors de la réforme dite Fillon, l’examen en première lecture au Sénat a fait l’objet d’un vote unique en juillet 2003. Lors de la réforme dite Woerth, le vote unique a été utilisé en première lecture au Sénat en octobre 2010 sur un quart des amendements. Lors de la réforme dite Touraine, enfin, un vote unique a été utilisé en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale en novembre 2013.
En outre, je ne mentionnerai pas les nombreux votes uniques qui ont eu lieu au Sénat, hors réforme des retraites, sur des projets de loi de finances, des projets de loi de finances rectificative, des projets de loi de financement de la sécurité sociale ou encore des projets de loi ordinaires, comme la loi relative à la sécurisation de l’emploi en 2013.
Alors, oui, pour mettre fin à la négation du parlementarisme et garantir la clarté du débat, le Gouvernement a eu recours à l’article 44, alinéa 3, de la Constitution, et cela au neuvième jour de ralentissement, voire de blocage, des débats.
Avant que le texte ne soit mis aux voix dans sa totalité et, je l’espère, adopté par votre assemblée, avant que ne s’achève la navette parlementaire, je rappelle l’objectif fixé par le Président de la République, au cœur de ma feuille de route, à savoir le plein emploi.
Pour atteindre cet objectif, nous devons mobiliser tous les leviers à notre disposition. Nous l’avons fait il y a quelques mois avec l’assurance chômage, nous le faisons avec les retraites. Nous allons le faire, surtout, avec le projet de loi sur le travail et le plein emploi qui vous sera soumis dans quelques semaines.
Ce texte portera sur des sujets aussi cruciaux que la mise en place de France Travail, le compte épargne temps universel, le partage de la valeur, la suite des Assises du travail, en particulier pour les conditions de travail et de qualité de vie au travail, mais aussi sur de nombreux autres sujets. Il permettra d’aller vers le plein emploi et le bon emploi.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de votre travail et vous dis à bientôt, je l’espère,…
Mme Cathy Apourceau-Poly. À jamais !
M. Olivier Dussopt, ministre. … pour de nouveaux textes et pour de nouveaux débats. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains. – Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. David Assouline. Au revoir !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les sénateurs, le vote qui va intervenir ce matin conditionne les quinze prochaines années de la vie de notre pays, le quotidien de nos concitoyens et l’avenir de toute une génération : celle qui travaille et qui souhaite conserver son mode de vie une fois arrivée à la retraite, au terme d’une vie de labeur.
Ce vote, c’est aussi tout ce qui fait notre pays : son modèle social, sa vie politique et parlementaire, la cohérence de ses valeurs politiques, défendues par les représentants du peuple, sa capacité à continuer à aller de l’avant, mais aussi le choix qu’il fait entre le travail et l’impôt.
Ce vote ne vient pas seulement trancher un débat politique et médiatique de plusieurs mois. Il n’est pas simplement le point final d’une séquence difficile, qui, je suis parfaitement lucide, a angoissé et parfois divisé notre pays.
Ce vote, il est également et surtout la réponse à des questions aussi fondamentales que celles que je pose devant vous ce matin.
Voulons-nous, oui ou non, garantir à bientôt 20 millions de retraités qu’ils pourront compter sereinement sur une retraite financée et ainsi préserver leur mode de vie, qu’ils n’ont aucune envie de sacrifier ?
Pensons-nous que c’est le travail qui crée la prospérité d’une nation, ou bien que c’est l’impôt qui crée la richesse ?
Les valeurs et le projet pour lesquels les Français ont élu leurs représentants au Parlement doivent-ils être défendus par leurs parlementaires, au risque sinon d’une fissure encore plus profonde de la confiance entre le peuple et ses élus ?
Mesdames, messieurs les sénateurs, je pourrais m’appesantir sur les réponses que le Gouvernement souhaite apporter à ces questions.
M. Guy Benarroche. On les connaît, vos réponses !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Je pourrais vous redire que l’unique raison pour laquelle nous faisons cette réforme, c’est préserver le patrimoine de ceux qui n’ont que leur travail pour vivre et pouvoir leur dire, sereinement, les yeux dans les yeux : vos pensions ne baisseront pas, vos salaires ne diminueront pas,…
Mme Cathy Apourceau-Poly. Ils n’augmenteront pas non plus !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. … vos impôts n’augmenteront pas.
Je pourrais vous dire ensuite que la réponse du Gouvernement à la question de savoir s’il faut choisir entre le travail et plus d’impôt est claire : c’est le travail qui crée la richesse, pas les impôts supplémentaires ! (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. David Assouline. Vous instaurez un impôt sur la vie !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Ce choix nous guide et nous oblige. Choisir le travail plutôt que l’impôt, c’est certes choisir l’effort, mais c’est surtout choisir la prospérité.
Je pourrais vous dire enfin que, oui, le respect des engagements pris devant les Français est au cœur du pacte entre le peuple et ses représentants. Mais ce n’est pas à vous, ce n’est pas au Sénat que j’ai besoin de le dire : vous avez toujours respecté vos engagements.
Ce qui se joue aujourd’hui, ce n’est pas le Gouvernement qui en décide, ce sont les représentants du peuple par leur vote. Votre vote, c’est la démocratie. Celle-ci est à la fois encadrée et garantie par notre Constitution, sans laquelle rien n’est légitime.
Notre Constitution est le cœur même du pacte entre les Français et leurs élus, ce pacte qui existe depuis que la France et les Français votent, ce pacte qui a permis des avancées majeures pour les Français, ce pacte qui a conforté à plusieurs reprises la démocratie lorsqu’elle vacillait et que ses institutions ne parvenaient plus à œuvrer pour le pays.
Voilà ce que je tenais à vous dire en préambule de mon intervention, comme marque de respect du Parlement et du Sénat.
Je le disais, mesdames, messieurs les sénateurs, ma conviction, c’est que c’est le travail qui crée la prospérité et que c’est donc par le travail que nous devons financer les évolutions de notre modèle social.
L’une des évolutions majeures auxquelles notre pays est soumis, c’est l’évolution de sa démographie. Les faits sont implacables : notre pays vieillit et comptera plus de retraités qu’il n’en a jamais comptés. Notre modèle social devra donc financer plus de retraites que jamais.
En 2030, nous aurons à payer chaque mois la pension de 20 millions de retraités, soit un quasi-doublement en une génération. Il y avait 12 millions de pensions de retraite à verser chaque mois au début des années 2000. Aucun pays ne pourrait tenir ce choc sans rien faire ! D’ailleurs, presque tous les pays autour de nous ont réformé ou réforment leur système de retraite.
Pour notre part, nous faisons le choix de réformer notre système par le travail. Oui, c’est un effort, mais, non, il ne sera pas porté par tous de la même manière, indifféremment.
Mme Michelle Meunier. Ça, c’est sûr !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Ainsi, quatre Français sur dix partiront à la retraite bien avant l’âge légal, mais dix Français sur dix pourront continuer de bénéficier d’une retraite sans hausse d’impôt ni baisse de pension.
M. David Assouline. Quelle honte !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. L’autre choix qui a émergé au cours de plus de deux cents heures de débat à l’Assemblée nationale et au Sénat, c’est celui de l’impôt et des hausses de cotisations.
L’impôt toujours, l’impôt tout le temps, l’impôt pour tous : taxer, taxer, taxer, voilà l’autre projet ! (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Vous n’avez pas écouté notre projet !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Ce projet-là, nous l’avons combattu, et je remercie la majorité sénatoriale d’avoir contribué à le repousser, non pas par idéologie, je le sais, mais par bon sens. (M. Thomas Dossus s’esclaffe.)
Qui seraient les premières victimes des hausses d’impôts ? Les Français qui travaillent dur, qui se lèvent le matin, qui font vivre leur famille et tourner le pays. (Protestions sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
Taxer les plus riches ? Taxer les grands groupes ? Cela paraît toujours séduisant, mais l’impôt de trop commence par toucher ceux qui sont en haut et finit par frapper ceux qui sont en bas. (Exclamations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Vous plaisantez ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Voilà pourquoi, avec la majorité sénatoriale, nous avons repoussé avec détermination toute tentative d’instaurer de nouveaux impôts ou d’augmenter des cotisations.
Voilà pourquoi ce texte se fonde sur des valeurs communes : le travail comme condition de la prospérité et la retraite comme horizon bien mérité, après une vie de travail.
Voilà pourquoi, je le dis, le texte qui vous est soumis, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est aussi le vôtre.
Mme Laurence Cohen. Certainement pas !
Mme Céline Brulin. C’est le vôtre !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Cette réforme des retraites est aussi celle du Sénat et des sénateurs. Je l’ai dit, il prend ses racines dans des valeurs communes : le travail, la préservation de notre modèle social et le refus de tout impôt supplémentaire.
Ce texte, c’est aussi le vôtre parce que vous l’avez voté et adopté en première lecture.
Ce texte, c’est aussi le vôtre, parce qu’il est le fruit d’un compromis politique construit patiemment au fil de son élaboration, de sa discussion et de son vote en commission, puis en séance publique et, enfin, en commission mixte paritaire hier.
Ces compromis permettent des avancées importantes, que les Français devront aussi à cette majorité sénatoriale.
Mme Laurence Cohen. Ils ne s’expriment pas majoritairement en faveur de cette réforme !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Je pense notamment, et je le souligne alors que je m’y étais opposé, monsieur le rapporteur, à l’expérimentation durant plusieurs années d’un CDI senior recentré sur les demandeurs d’emploi de longue durée. C’est, je le sais, une idée à laquelle les rapporteurs du texte au Sénat étaient particulièrement attachés, comme d’ailleurs la majorité sénatoriale. Ce contrat figure dans le texte que nous vous proposons de voter.
Je pense aussi au compromis trouvé sur le sujet des carrières longues et à la reprise du dispositif proposé par le groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale. Je précise toutefois que nous avons eu des discussions nourries pour affiner ce dispositif.
Enfin, je dirai un mot du dispositif de surcote pour les mères de famille, introduit par la commission des affaires sociales du Sénat et bien sûr intégré à l’accord trouvé hier.
Cet apport majeur du Sénat permettra aux femmes de bénéficier d’une revalorisation de leur pension pouvant atteindre 5 % au titre des trimestres liés à la naissance d’un enfant ou à leur éducation.
M. Loïc Hervé. C’est la moindre des choses !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Les derniers ajustements actés hier durant la réunion de la commission mixte paritaire doivent bien sûr faire l’objet d’une traduction financière.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a déposé un amendement à l’article 6 visant à actualiser l’annexe A du texte, c’est-à-dire la trajectoire financière pluriannuelle des régimes de sécurité sociale.
En réponse à la question de Mme la rapporteure, j’indique que, oui, à l’issue des travaux de la commission mixte paritaire et sous réserve d’un nouveau transfert de taux entre la branche AT-MP et la branche vieillesse, l’équilibre de notre système de retraite en 2030 est garanti par le travail du Parlement et par le compromis qui a été trouvé hier.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je tenais à vous dire, alors que vous vous apprêtez à voter une réforme importante pour l’avenir de notre pays et pour le mode de vie des Français, en particulier pour nos retraités.
Si je devais résumer ce moment en trois mots, je dirais que nous sommes à un rendez-vous important pour nos institutions, pour notre modèle social et pour notre prospérité.
Ce rendez-vous est important pour nos institutions, car elles garantissent à notre pays de continuer d’avancer. Nos institutions, c’est vous, c’est le Sénat, c’est le Parlement, tout le Parlement, rien que le Parlement. Nos institutions, c’est notre Constitution, toute notre Constitution, rien que notre Constitution.
Ce rendez-vous est important pour notre modèle social, car nous sommes les lointains héritiers, nous au Gouvernement, vous sur ces travées, des hommes et des femmes politiques qui ont eu le génie et la générosité de l’inventer. (Vives protestations sur les travées du groupe SER.)
M. Thierry Cozic. Vous devriez avoir honte !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. En être les héritiers, cela signifie tout faire pour le perpétuer et lui permettre de durer.
Mme Éliane Assassi. Pas comme ça !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Ce rendez-vous est important pour notre prospérité, enfin, car le choix que nous faisons est clair : créer de la richesse par l’activité, non pas par la fiscalité ; aller de l’avant par plus de travail, et non par plus d’impôt.
Nous sommes au rendez-vous de nos institutions, de notre modèle social et de notre prospérité, mais s’il est un rendez-vous qui compte plus que tout, un rendez-vous que nous ne devons pas manquer, c’est celui que nous avons avec nos compatriotes, avec les Français, ceux qui travaillent et qui veulent continuer de faire vivre leur famille et de faire tourner leur pays sans outrance et sans blocage, ceux qui travaillent et qui veulent continuer de penser à la retraite comme une période bien méritée de leur vie, au cours de laquelle on récolte enfin, sereinement, le fruit d’une vie de labeur.
M. Jacques Grosperrin. Très bien !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Ce rendez-vous, celui des promesses que nous avons faites aux Français, celui des engagements que nous avons pris et que nous devons tenir, ce rendez-vous, c’est maintenant !
Aussi, il faut voter ce texte, pour continuer d’aller de l’avant. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP. – MM. Pierre Louault, Olivier Cadic et Vincent Capo-Canellas applaudissent également.)
M. le président. Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, aucun amendement n’est recevable, sauf accord du Gouvernement ; en outre, le Sénat étant appelé à se prononcer avant l’Assemblée nationale, il statue sur les éventuels amendements, puis, par un seul vote, sur l’ensemble du texte.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Article liminaire
Pour l’année 2023, les prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques, les prévisions de solde par sous-secteur, la prévision, déclinée par sous-secteur d’administration publique et exprimée en milliards d’euros courants et en pourcentage d’évolution en volume, des dépenses d’administrations publiques, les prévisions de prélèvements obligatoires, de dépenses et d’endettement de l’ensemble des administrations publiques exprimées en pourcentage du produit intérieur brut, ainsi que les prévisions, pour la même année, de ces mêmes agrégats, telles qu’elles figurent dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, s’établissent comme suit :
(En % du PIB sauf mention contraire) |
||
2023 |
||
LFRSS pour 2023 |
PLPFP 2023-2027 |
|
Ensemble des administrations publiques |
||
Solde structurel (1) (en points de PIB potentiel) |
-4,1 |
-4,0 |
Solde conjoncturel (2) |
-0,8 |
-0,8 |
Solde des mesures ponctuelles et temporaires (3) (en points de PIB potentiel) |
-0,2 |
-0,2 |
Solde effectif (1+2+3) |
-5,0 |
-5,0 |
Dette au sens de Maastricht |
111,2 |
111,2 |
Taux de prélèvements obligatoires (y compris Union européenne, nets des crédits d’impôt) |
44,9 |
44,7 |
Dépense publique (hors crédits d’impôt) |
56,9 |
56,6 |
Dépense publique (hors crédits d’impôt, en milliards d’euros) |
1 573 |
1 564 |
Évolution de la dépense publique hors crédits d’impôt en volume (en %) (*) |
-1,0 |
-1,5 |
Principales dépenses d’investissement (en milliards d’euros) (**) |
25 |
25 |
Administrations publiques centrales |
||
Solde |
-5,8 |
-5,6 |
Dépense publique (hors crédits d’impôt, en milliards d’euros) |
647 |
636 |
Évolution de la dépense publique en volume (en %) (***) |
-1,4 |
-2,6 |
Administrations publiques locales |
||
Solde |
0,0 |
-0,1 |
Dépense publique (hors crédits d’impôt, en milliards d’euros) |
305 |
305 |
Évolution de la dépense publique en volume (en %) (***) |
-0,6 |
-0,6 |
Administrations de sécurité sociale |
||
Solde |
0,7 |
0,8 |
Dépense publique (hors crédits d’impôt, en milliards d’euros) |
722 |
721 |
Évolution de la dépense publique en volume (en %) (***) |
-1,0 |
-1,0 |
(*) À champ constant. |
||
(**) Au sens du projet de loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027. |
||
(***) À champ constant, hors transferts entre administrations publiques. |
PREMIÈRE PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2023
Article 1er
I. – Après l’article L. 2142-4-1 du code des transports, il est inséré un article L. 2142-4-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 2142-4-2. – Les salariés dont le contrat de travail est régi par le statut particulier mentionné à l’article L. 2142-4-1 et qui sont recrutés avant le 1er septembre 2023 sont affiliés à un régime spécial de retraite régi par l’article L. 711-1 du code de la sécurité sociale. »
II. – Après le troisième alinéa de l’article L. 142-9 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les agents titulaires régis par ce statut et recrutés avant le 1er septembre 2023 sont affiliés à un régime spécial de retraite régi par l’article L. 711-1 du code de la sécurité sociale. »
III. – Les deux premiers alinéas du paragraphe 2 de l’article 1er de la loi du 12 juillet 1937 instituant une caisse de retraite et d’assistance des clercs de notaires sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Par. 2. – Cette caisse a pour objet la constitution, au profit de l’affilié, d’une pension en cas d’invalidité prématurée, la gestion des risques maladie, longue maladie, maternité et décès, le versement d’indemnités en cas de chômage et, éventuellement, la création d’œuvres sanitaires et sociales, dans des conditions déterminées par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 5 de la présente loi.
« L’affiliation à cette caisse est obligatoire pour tous les clercs et employés, dès leur entrée en fonctions, selon des modalités définies par décret en Conseil d’État.
« Cette caisse a également pour objet la constitution, au profit des clercs et employés de notaire recrutés avant le 1er septembre 2023 et qui remplissent, sans aucune interruption à compter de cette date, les conditions d’affiliation à la caisse, d’une pension en cas de vieillesse et, en cas de décès, d’une pension au profit du conjoint et des enfants mineurs. »
III bis. – Le paragraphe 1er de l’article 3 de la loi du 12 juillet 1937 instituant une caisse de retraite et d’assistance des clercs de notaires est ainsi modifié :
1° À la deuxième phrase du 1°, après le mot : « activité », sont insérés les mots : « des clercs et employés de notaire mentionnés au troisième alinéa du paragraphe 2 de l’article 1er de la présente loi, » ;
2° Après le même 1°, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis Une autre cotisation obligatoire pour tous les notaires en exercice, les chambres, les caisses et les organismes mentionnés à l’article 1er de la présente loi. Cette cotisation est assise sur les revenus d’activité entrant dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale, en application de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, de l’ensemble des clercs et employés de notaire affiliés à la caisse. Le taux de cette cotisation est fixé par décret ; »
3° À la fin de la première phrase du 3°, les mots : « visés à l’article 1er » sont remplacés par les mots : « mentionnés au troisième alinéa du paragraphe 2 de l’article 1er de la présente loi ».
IV. – Le premier alinéa du I de l’article 16 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières est ainsi modifié :
1° À la première phrase, le mot : « vieillesse, » est supprimé ;
2° Après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le fonctionnement du régime d’assurance vieillesse prévu au même article 47, pour les personnels salariés recrutés avant le 1er septembre 2023 et qui remplissent, sans aucune interruption à compter de cette date, les conditions d’affiliation à ce régime, est également assuré par cette caisse. »
V. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la fin du deuxième alinéa de l’article L. 160-17, les mots : « assurés mentionnés aux articles L. 712-1 et L. 712-2 » sont remplacés par les mots : « fonctionnaires et des anciens fonctionnaires de l’État, ne relevant pas de la Caisse nationale militaire de sécurité sociale, ainsi que de leurs ayants droit » ;
2° L’article L. 200-1 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « articles », la fin du 2° est ainsi rédigée : « L. 411-1, L. 412-2 et L. 412-8 ; »
b) Après le 5°, il est inséré un 6° ainsi rédigé :
« 6° Au titre de l’assurance vieillesse, les assurés relevant de l’article L. 381-32. » ;
3° L’article L. 311-2 est complété par les mots : « ou la nature de leur statut » ;
4° La section 10 du chapitre Ier du titre VIII du livre III est ainsi rétablie :
« Section 10
« Membres du Conseil économique, social et environnemental
« Art. L. 381-32. – Les membres du Conseil économique, social et environnemental sont affiliés à l’assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale. » ;
5° À la fin de l’article L. 411-1, les mots : « salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise » sont remplacés par les mots : « mentionnée à l’article L. 311-2 » ;
6° Les articles L. 711-3, L. 711-6, L. 712-1, L. 712-2, L. 712-10 et L. 713-4 sont abrogés ;
7° Le second alinéa de l’article L. 711-7 est supprimé ;
8° À la première phrase de l’article L. 712-3, après le mot : « décédés, », sont insérés les mots : « sont aux moins égales à celles qui résultent de la législation relative au régime général de sécurité sociale. Elles » ;
9° L’article L. 712-9 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « invalidité », sont insérés les mots : « dont bénéficient les fonctionnaires civils » et, à la fin, les mots : « des fonctionnaires et pour ceux qui sont en activité une cotisation au moins égale de l’État » sont remplacés par les mots : « à la charge de l’employeur » ;
b) Le second alinéa est supprimé ;
10° Au premier alinéa de l’article L. 712-10-1, les mots : « dispositions des articles L. 712-1 et L. 712-3 du premier alinéa de l’article L. 712-9 et de l’article L. 712-10 » sont remplacés par les mots : « articles L. 712-3 et L. 712-9 » ;
10° bis A À l’article L. 712-13, les mots : « assurés mentionnés à l’article L. 712-1 » sont remplacés par les mots : « magistrats de l’ordre judiciaire et aux fonctionnaires et anciens fonctionnaires de l’État ne relevant pas de la Caisse nationale militaire de sécurité sociale ainsi qu’à leurs ayants droit, » ;
10° bis Après le mot : « intéressés », la fin de la seconde phrase de l’article L. 761-5 est supprimée ;
11° Le début de la première phrase du premier alinéa de l’article L. 921-1 est ainsi rédigé : « Les personnes mentionnées à l’article L. 311-2 et les salariés des professions agricoles qui ne relèvent… (le reste sans changement). » ;
12° Au premier alinéa de l’article L. 921-2-1, après le mot : « public », sont insérés les mots : « et les personnes mentionnées à l’article L. 381-32 ».
V bis. – Au premier alinéa de l’article L. 722-24-2 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « L. 712-1 et L. 712-3, du premier alinéa de l’article L. 712-9 et de l’article L. 712-10 » sont remplacés par les mots : « L. 712-3 et L. 712-9 ».
VI. – Au premier alinéa de l’article L. 4163-4 du code du travail, les mots : « ainsi que » sont remplacés par les mots : « , les salariés régis par un statut particulier et ».
VII. – Le 4° du V s’applique aux membres du Conseil économique, social et environnemental entrant en fonction à compter du 1er septembre 2023. Les I à IV, les 1° à 3° et 5° à 12° du V et le VI entrent en vigueur à la même date.
Articles 1er bis A et 1er bis
(Supprimés)
Article 2
I. – La section 4 du chapitre Ier du titre II du livre Ier de la cinquième partie du code du travail est ainsi rétablie :
« Section 4
« Indicateurs relatifs à l’amélioration de l’emploi des seniors
« Art. L. 5121-6. – L’employeur poursuit un objectif d’amélioration de l’embauche et du maintien en activité des seniors.
« Art. L. 5121-7. – Dans les entreprises d’au moins trois cents salariés, l’employeur publie chaque année des indicateurs relatifs à l’emploi des seniors, en distinguant leur sexe, ainsi qu’aux actions mises en œuvre pour favoriser leur emploi au sein de l’entreprise.
« La liste des indicateurs et leur méthode de calcul sont fixées par décret.
« Une convention ou un accord de branche étendu peut déterminer la liste des indicateurs mentionnés au premier alinéa et leur méthode de calcul, qui se substituent alors à celles fixées par le décret mentionné au deuxième alinéa pour les entreprises de la branche concernée.
« Un décret fixe les conditions d’application du présent article, notamment les modalités de mise en œuvre du troisième alinéa, la date et les modalités de publication des indicateurs ainsi que la date et les modalités de leur transmission à l’autorité administrative.
« Art. L. 5121-8. – Les entreprises qui méconnaissent l’obligation de publication prévue à l’article L. 5121-7 peuvent se voir appliquer par l’autorité administrative une pénalité, dans la limite de 1 % des rémunérations et gains, au sens du premier alinéa de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et du premier alinéa de l’article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime, versés aux travailleurs salariés ou assimilés au cours de l’année civile précédant celle au titre de laquelle l’obligation est méconnue.
« La pénalité est prononcée dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État. Son montant tient compte des efforts constatés dans l’entreprise en matière d’emploi des seniors ainsi que des motifs de méconnaissance de l’obligation de publication.
« Le produit de cette pénalité est affecté à la caisse mentionnée à l’article L. 222-1 du code de la sécurité sociale.
« Art. L. 5121-9. – Dans les entreprises qui, pour le troisième exercice consécutif de publication des indicateurs prévus à l’article L. 5121-7, constatent la détérioration de ces indicateurs, l’employeur engage des négociations portant sur les mesures d’amélioration de l’emploi des seniors dans un délai de six mois. À défaut d’accord, l’employeur établit un plan d’action.
« Les entreprises pour lesquelles les indicateurs ont atteint une valeur maximale ou minimale démontrant que l’objectif d’amélioration de l’embauche et du maintien en activité des seniors est atteint ne sont pas soumises à l’obligation de couverture par un accord ou un plan d’action mentionnée au premier alinéa du présent article. »
II. – La sous-section 4 de la section 3 du chapitre II du titre IV du livre II de la deuxième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° Après le 6° de l’article L. 2242-20, il est inséré un 7° ainsi rédigé :
« 7° L’emploi des seniors, en prenant en compte les indicateurs publiés par l’entreprise en application de l’article L. 5121-7, et l’amélioration de leurs conditions de travail. » ;
2° Au 6° de l’article L. 2242-21, les mots : « l’emploi des salariés âgés et » et, à la fin, les mots : « et l’amélioration des conditions de travail des salariés âgés » sont supprimés.
III. – Le Gouvernement engage, dès la publication de la présente loi, une concertation avec les organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel en vue de l’adoption du décret mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 5121-7 du code du travail.
IV. – Les I et II du présent article entrent en vigueur le 1er juillet 2024. Par dérogation, ils s’appliquent à compter du 1er novembre 2023 aux entreprises d’au moins mille salariés.
V. – (Supprimé)
Article 2 bis A
I A (nouveau). – Les organisations d’employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel peuvent engager une négociation en vue de définir des mesures visant à favoriser l’emploi des seniors demandeurs d’emploi de longue durée, sur la base d’un document d’orientation transmis par le ministre chargé du travail, tel que prévu à l’article L. 1 du code du travail.
I B (nouveau). – En l’absence d’accord national interprofessionnel conclu avant le 31 août 2023, le I du présent article s’applique à titre expérimental du 1er septembre 2023 jusqu’au 1er septembre 2026.
I. – Un demandeur d’emploi de longue durée âgé d’au moins soixante ans, inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi auprès de Pôle emploi et tenu d’accomplir à ce titre des actes positifs et répétés de recherche d’emploi peut conclure avec un employeur un contrat pour la fin de sa carrière.
Le contrat est conclu pour une durée indéterminée.
Une convention de branche ou un accord de branche étendu définit les activités concernées, les mesures d’information du salarié sur la nature de son contrat, les modalités selon lesquelles l’employeur peut, par dérogation aux articles L. 1237-5 et L. 1237-5-1 du code du travail, mettre à la retraite le salarié qui remplit les conditions pour bénéficier d’une pension de retraite à taux plein mentionnées au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale et les contreparties en termes de rémunération et d’indemnité de mise à la retraite accordées au salarié.
Les rémunérations versées au salarié durant les douze premiers mois d’exécution de ce contrat sont exonérées des cotisations dues au titre du 1° de l’article L. 241-6 du même code. Cette exonération n’est pas applicable aux rémunérations versées au salarié percevant une pension de vieillesse servie par un régime de retraite légalement obligatoire.
II et III. – (Supprimés)
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I B et I du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
V (nouveau). – Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation prévue aux I B et I du présent article au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation.
Article 2 bis
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’intitulé de la section 6 du chapitre VII du titre III du livre Ier est ainsi rédigé : « Contributions sur les indemnités versées à l’occasion de la rupture conventionnelle et de la mise à la retraite » ;
2° L’article L. 137-12 est ainsi rédigé :
« Art. L. 137-12. – Est instituée, à la charge de l’employeur et au profit de la Caisse nationale d’assurance vieillesse, une contribution assise sur les indemnités versées à l’occasion de :
« 1° La mise à la retraite d’un salarié à l’initiative de l’employeur mentionnée à l’article L. 1237-5 du code du travail, pour la part exclue de l’assiette des cotisations de sécurité sociale en application du 7° du II de l’article L. 242-1 du présent code ;
« 2° La rupture conventionnelle mentionnée aux articles L. 1237-11 à L. 1237-15 du code du travail, pour leur part exclue de l’assiette des cotisations de sécurité sociale en application du 7° du II de l’article L. 242-1 du présent code.
« Le taux de cette contribution est fixé à 30 %. » ;
3° L’article L. 137-15 est ainsi modifié :
a) Au 3°, les mots : « , qui sont exclues de l’assiette des cotisations de sécurité sociale en application du douzième alinéa » sont remplacés par les mots : « ainsi que des indemnités mentionnées au 6° de l’article 80 duodecies du code général des impôts, qui sont exclues de l’assiette des cotisations de sécurité sociale en application du 7° du II » ;
b) Le huitième alinéa est supprimé ;
4° Le 7° du II de l’article L. 242-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le premier alinéa du présent 7° est également applicable aux indemnités mentionnées au 6° de l’article 80 duodecies du code général des impôts versées aux salariés et aux agents en droit de bénéficier d’une pension de retraite d’un régime légalement obligatoire. »
II. – Le présent article est applicable aux indemnités versées à l’occasion des ruptures de contrat de travail intervenant à compter du 1er septembre 2023.
Article 2 ter
I. – Le premier alinéa de l’article L. 242-5 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce décret prévoit que les modalités de calcul du taux de cotisation permettent la mutualisation entre les entreprises des coûts liés aux maladies professionnelles dont l’effet est différé dans le temps, dans l’objectif de favoriser l’emploi des salariés âgés. »
II. – L’article L. 751-15 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cet arrêté prévoit que les modalités de calcul du taux de cotisation permettent la mutualisation entre les entreprises des coûts liés aux maladies professionnelles dont l’effet est différé dans le temps, dans l’objectif de favoriser l’emploi des salariés âgés. »
Article 2 quater
(Supprimé)
Article 3
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le 6° de l’article L. 213-1 est ainsi modifié :
a) Après les mots : « code du travail », la fin de la première phrase est supprimée ;
b) La seconde phrase est supprimée ;
2° L’article L. 213-1-1 est complété par des 5° à 9° ainsi rédigés :
« 5° Des cotisations dues aux organismes mentionnés à l’article L. 921-4 du présent code, à l’exception de celles recouvrées dans le cadre de l’un des dispositifs prévus à l’article L. 133-5-6 ;
« 6° Des cotisations dues à la caisse mentionnée à l’article 3 de l’ordonnance n° 45-993 du 17 mai 1945 relative aux services publics des départements et communes et de leurs établissements publics ;
« 7° Des cotisations dues à l’institution mentionnée à l’article L. 921-2-1 du présent code ;
« 8° Des cotisations mentionnées à l’article 76 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites ;
« 9° De la contribution mentionnée à l’article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l’organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique. » ;
3° Le premier alinéa du III de l’article L. 243-6-3 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle est également opposable, dans les mêmes conditions, aux institutions mentionnées à l’article L. 922-4 du présent code en tant qu’elle porte sur la législation relative à la réduction dégressive de cotisations sociales mentionnée à l’article L. 241-13, sur les dispositions prévues aux articles L. 241-10 et L. 752-3-2 ou sur tout point de droit susceptible d’avoir une incidence sur les allègements portant sur les cotisations à la charge de l’employeur dues au titre des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires mentionnés à l’article L. 921-4. » ;
4° Les articles L. 243-6-6 et L. 243-6-7 sont ainsi rétablis :
« Art. L. 243-6-6. – Lorsqu’une demande d’échéancier de paiement est adressée par un cotisant à un organisme mentionné aux articles L. 213-1 ou L. 752-4, cet organisme la communique, ainsi que sa réponse, aux institutions mentionnées à l’article L. 922-4 dont le cotisant relève.
« Dans des conditions déterminées par décret, l’octroi d’un échéancier de paiement par un organisme de recouvrement mentionné aux articles L. 213-1 ou L. 752-4 emporte également le bénéfice d’un échéancier de paiement similaire au titre des cotisations à la charge de l’employeur restant dues, le cas échéant, aux titres des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires mentionnés à l’article L. 921-4.
« Lorsqu’il est statué sur l’octroi à une entreprise d’un plan d’apurement par plusieurs créanciers publics, l’organisme mentionné aux articles L. 213-1 ou L. 752-4 reçoit mandat des institutions mentionnées à l’article L. 922-4 dont le cotisant relève pour prendre toute décision sur les créances qui les concernent, le cas échéant.
« Art. L. 243-6-7. – Une convention, approuvée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est conclue entre un représentant des institutions mentionnées à l’article L. 922-4 et l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale.
« La convention précise les modalités selon lesquelles les organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 et les institutions mentionnées à l’article L. 922-4 mettent à la disposition des employeurs, ou leur délivrent des informations de manière coordonnée, notamment, le cas échéant, les constats d’anomalie et les demandes de rectification qu’ils adressent à la réception et à l’issue de l’exploitation des données de la déclaration mentionnée à l’article L. 133-5-3 et portant sur l’application de la législation relative à la réduction dégressive de cotisations sociales mentionnée à l’article L. 241-13 ou des dispositions prévues aux articles L. 241-10 et L. 752-3-2 ou sur tout point de droit dont l’application est susceptible d’avoir une incidence sur les allègements portant sur les cotisations à la charge de l’employeur dues au titre des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires mentionnés à l’article L. 921-4.
« La convention précise les modalités selon lesquelles, pour permettre l’application du deuxième alinéa du présent article, est effectuée par les organismes et institutions mentionnés au même deuxième alinéa la vérification de l’exactitude et de la conformité à la législation en vigueur des déclarations mentionnées à l’article L. 133-5-3 s’agissant des points mentionnés au deuxième alinéa du présent article.
« La convention détermine notamment les modalités de coordination entre les organismes et institutions mentionnés au même deuxième alinéa permettant un traitement coordonné des demandes et des réclamations des cotisants ainsi que la formulation de réponses coordonnées, lorsque ces sollicitations portent sur la législation relative à la réduction dégressive de cotisations sociales mentionnée à l’article L. 241-13, sur les dispositions prévues aux articles L. 241-10 et L. 752-3-2 ou sur tout point de droit susceptible d’avoir une incidence sur les allègements portant sur les cotisations à la charge de l’employeur dues au titre des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires mentionnés à l’article L. 921-4.
« Les organismes et les institutions mentionnés au deuxième alinéa du présent article utilisent les données d’un répertoire commun relatif à leurs entreprises cotisantes qui sont nécessaires à la mise en œuvre du présent article. » ;
5° Au début du deuxième alinéa de l’article L. 921-2-1, est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Les articles L. 243-4 et L. 243-5 s’appliquent aux cotisations versées à l’institution mentionnée au premier alinéa du présent article. »
II. – Au c du 4° du XII de l’article 18 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020, les mots : « aux cotisations d’assurance vieillesse des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, aux cotisations d’assurance vieillesse des agents non titulaires de la fonction publique, aux cotisations de retraite additionnelle des agents de la fonction publique, aux contributions mentionnées à l’article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l’organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique, à la cotisation due au titre de l’allocation temporaire d’invalidité des agents des collectivités locales, » sont supprimés.
III. – Le III de l’article 7 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023 est abrogé.
IV. – Les 1° et 2° du I et les II et III s’appliquent à compter du 1er janvier 2023. Le 5° du I s’applique aux cotisations dues au titre des périodes d’activité courant à compter de la même date.
Article 3 bis
(Supprimé)
Article 4
Pour l’année 2023, est approuvé le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :
(En milliards d’euros) |
|||
Recettes |
Dépenses |
Solde |
|
Maladie |
231,2 |
239,1 |
-7,9 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
17,0 |
14,8 |
2,2 |
Vieillesse |
269,8 |
273,7 |
-3,8 |
Famille |
56,7 |
55,3 |
1,3 |
Autonomie |
36,3 |
37,5 |
-1,3 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
593,3 |
602,8 |
-9,5 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse |
595,0 |
603,2 |
-8,2 |
Article 5
I. – Pour l’année 2023, l’objectif d’amortissement de la dette sociale par la Caisse d’amortissement de la dette sociale est fixé à 17,7 milliards d’euros.
II. – Pour l’année 2023, les prévisions de recettes par catégorie affectées au Fonds de réserve pour les retraites demeurent fixées conformément au II de l’article 24 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.
III. – Pour l’année 2023, les prévisions de recettes par catégorie mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse demeurent fixées conformément au III de l’article 24 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 précitée.
Article 6
Est approuvé le rapport figurant en annexe à la présente loi modifiant, pour les quatre années à venir (2023 à 2026), les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses, par branche, des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie.
Annexe
Rapport décrivant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses, par branche, des régimes obligatoires de base, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie pour les quatre années à venir
La présente annexe décrit l’évolution des agrégats de dépenses, de recettes et de soldes de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) pour la période 2023-2026.
Le solde des régimes obligatoires de base a connu en 2020, sous l’effet des dépenses de crise sanitaire et de la récession qui a suivi, une dégradation sans précédent et a atteint le niveau de -39,7 milliards d’euros. Il s’est redressé en 2021 à -24,3 milliards d’euros, sous l’effet de la reprise progressive de l’activité et de l’atténuation graduelle des contraintes sanitaires, et est prévu en 2022 à -18,9 milliards d’euros dans la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.
La reprise de l’activité économique se poursuivrait en 2023, bien qu’en ralentissement après les forts rebonds enregistrés en 2021 et en 2022. Les dépenses liées à la crise sanitaire diminueraient sensiblement cette année, tandis que le contexte de forte inflation conduirait à l’inverse à une hausse des prestations. Au total, ces mouvements conduiraient à une nette diminution du déficit cette année, qui verrait également les premiers effets de la réforme des retraites portée par la présente loi (I). Les comptes de la sécurité sociale demeureraient toutefois fortement dégradés à moyen terme, sous l’effet de recettes durablement affectées par la crise, d’une hausse des dépenses de la branche Maladie et de la situation des comptes de la branche Vieillesse, les effets de la réforme des retraites se matérialisant seulement progressivement au gré de l’élévation progressive de l’âge de départ à la retraite et l’équilibre financier global du système de retraite étant en partie assuré par les régimes complémentaires de retraite, hors du champ de la présente annexe. La trajectoire présentée traduirait enfin la mise en œuvre des mesures votées dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 (II). La branche Vieillesse serait dans une situation de déficits élevés durant les années à venir, atténués par la montée en charge progressive de la réforme. La branche Maladie présenterait également des déficits élevés, bien que plus réduits, notamment du fait d’un transfert entre la branche Famille et la branche Maladie dès 2023. La branche Famille et la branche Accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) dégageraient des excédents. Enfin, la nouvelle branche Autonomie présenterait une trajectoire excédentaire à moyen terme, reflétant le surcroît de recettes de la contribution sociale généralisée (CSG) apporté en 2024, lui permettant de financer dans la durée les dépenses prévues dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 (III).
I. – La présente loi s’inscrit dans un contexte macroéconomique, inchangé par rapport à celui prévu dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, de forte poussée de l’inflation, en lien avec la situation géopolitique et sur les marchés de l’énergie, et de ralentissement marqué de la croissance attendu pour cette année.
L’hypothèse de croissance du produit intérieur brut (PIB) retenue est de 1,0 % en 2023, après 2,7 % en 2022. Le rythme d’inflation resterait toujours élevé, à 4,3 % en 2023 au sens de l’indice des prix à la consommation hors tabac (IPCHT), après 5,4 % en 2022. À moyen terme, la croissance effective du PIB serait supérieure à son rythme potentiel de 1,35 % par an et atteindrait 1,6 % en 2024, puis 1,7 % en 2025 et 2026, tandis que l’inflation refluerait pour s’établir à 1,75 % par an à cet horizon. La masse salariale du secteur privé, principal déterminant de la progression des recettes de la sécurité sociale, progresserait de 5,0 % en 2023 avant de revenir progressivement à son rythme tendanciel.
Le tableau ci-dessous détaille les principaux éléments retenus pour l’élaboration des prévisions de recettes et objectifs de dépenses décrits dans la présente annexe :
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
|
PIB en volume |
1,8 % |
-7,8 % |
6,8 % |
2,7 % |
1,0 % |
1,6 % |
1,7 % |
1,7 % |
Masse salariale secteur privé * |
3,1 % |
-5,7 % |
8,9 % |
8,6 % |
5,0 % |
3,9 % |
3,6 % |
3,4 % |
Inflation hors tabac |
0,9 % |
0,2 % |
1,6 % |
5,4 % |
4,3 % |
3,0 % |
2,1 % |
1,75 % |
Revalorisations au 1er janvier ** |
0,3 % |
1,0 % |
0,4 % |
3,1 % |
2,8 % |
4,9 % |
3,2 % |
2,2 % |
Revalorisations au 1er avril ** |
0,5 % |
0,3 % |
0,2 % |
3,4 % |
3,7 % |
3,6 % |
3,2 % |
2,2 % |
ONDAM |
2,7 % |
9,4 % |
8,7 % |
2,6 % |
-0,9 % |
2,4 % |
2,7 % |
2,6 % |
ONDAM hors covid |
2,7 % |
3,3 % |
6,3 % |
5,6 % |
3,8 % |
2,8 % |
2,7 % |
2,6 % |
* Masse salariale du secteur privé. Hors prime exceptionnelle de pouvoir d’achat et prime de partage de la valeur ajoutée, la progression serait de 4,8 % en 2023. |
||||||||
** En moyenne annuelle, incluant les effets en moyenne annuelle de la revalorisation anticipée au 1er juillet 2022 de 4,0 %. |
La trajectoire présentée dans cette annexe repose sur les mesures votées dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 ainsi que dans la réforme des retraites présentée dans la présente loi. Le solde atteindrait ainsi -8,2 milliards d’euros en 2023.
La trajectoire de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) intègre en 2023 une provision d’un milliard d’euros au titre des dépenses liées à la crise sanitaire. La progression de l’ONDAM hors crise est par ailleurs marquée à partir de 2020 par le « Ségur de la santé ». La progression hors dépenses de crise restera soutenue, à +3,8 % en 2023, en lien notamment avec la poursuite de la montée en charge du « Ségur » mais également avec la revalorisation de 3,5 % du point d’indice de la fonction publique intervenue en juillet 2022 et la compensation des effets de l’inflation sur les charges des établissements de santé et des établissements et services médico-sociaux (2,2 milliards d’euros d’effet cumulé). Cette progression sera également rehaussée par rapport à celle de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, alors à 3,5 %, en conséquence des annonces faites par le Président de la République lors de ses vœux aux acteurs de la santé le 6 janvier 2023. La progression tendancielle de l’ONDAM, c’est-à-dire avant mesures d’économies, atteindrait 4,4 % cette année, tenant compte, au-delà des effets liés au contexte d’inflation, de la montée en charge des mesures nouvelles dans ce champ, en ville, à l’hôpital et dans le secteur médico-social, et des économies permises par la maîtrise médicalisée et la lutte contre la fraude. L’atteinte du taux de progression de 3,8 % hors crise sera permise par les mesures de régulation et d’économies, s’élevant à un total de 1,7 milliard d’euros. Dans une perspective pluriannuelle, le taux de progression de l’ONDAM hors crise serait ramené à 2,8 % en 2024, puis à 2,7 % en 2025 et à 2,6 % en 2026.
Dans le champ des régimes de base de retraite, la trajectoire intègre les dispositions présentées dans la présente loi, portant une hausse progressive de l’âge d’ouverture des droits (AOD) de soixante-deux à soixante-quatre ans, au rythme d’un trimestre par génération à compter du 1er septembre 2023, et une accélération de la durée d’assurance requise (DAR), au rythme d’un trimestre par génération, contre un trimestre toutes les trois générations jusqu’à présent. La trajectoire intègre également des mesures d’accompagnement et de hausse des minima de pensions. Ces mesures viseront, en premier lieu, à dispenser de la hausse de l’AOD les personnes inaptes au travail ou reconnues invalides. Elles permettront également aux assurés ayant commencé à travailler précocement de partir plus tôt que l’âge de droit commun avec notamment un renforcement du dispositif « carrières longues », développeront les transitions entre l’activité et la retraite et amélioreront les dispositifs de prévention et de réparation de l’usure professionnelle. Enfin, les minima de pension seront revalorisés pour les nouveaux retraités à partir de 2023 mais également pour ceux déjà partis à la retraite et bénéficiant du minimum contributif. La réforme emporte également des mesures en recettes, avec des hausses des taux des cotisations vieillesse dues par les employeurs publics (Caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales [CNRACL]) et par les employeurs privés, cette hausse étant compensée pour ces derniers par une baisse à due concurrence des cotisations AT-MP. Pour les employeurs publics de la CNRACL, l’État compensera intégralement le surcoût qui en résulte dès 2023, selon des modalités définies en loi de finances. La présente annexe porte sur le champ des régimes obligatoires de base et du FSV à l’horizon 2026, mais la réforme des retraites présentée dans la présente loi aura des impacts financiers qui monteront en charge au-delà de 2026, ainsi que sur les régimes complémentaires de retraite. Le système de retraite pris dans son ensemble retournera ainsi à l’équilibre à l’horizon 2030. Il est également tenu compte des propositions parlementaires tendant à une harmonisation des prélèvements applicables aux indemnités de rupture. Une étude d’impact financière spécifique a été jointe au projet de loi.
Dans le champ de la famille, la trajectoire intègre, sur un horizon pluriannuel, la réforme du service public de la petite enfance ainsi que celle du complément de mode de garde et l’augmentation de l’allocation de soutien familial intervenue en novembre 2022.
Dans le champ de l’autonomie, elle intègre un plan de recrutements d’aides-soignants et d’infirmiers en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), l’accroissement des moyens consacrés au maintien à domicile avec le développement des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) et la mise en place de temps dédiés au lien social auprès de nos aînés bénéficiant d’un plan d’aide à domicile.
Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), dans son avis publié le 18 janvier 2023 relatif au projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, « considère que la prévision de croissance [pour 2023] associée au PLFRSS reste élevée » et que les prévisions d’inflation et de masse salariale sont « un peu basses ». S’agissant de la trajectoire des comptes publics et de l’impact de la réforme des retraites sur l’équilibre 2023, il considère que le « coût net estimé à 0,4 Md€ […] est réaliste ».
II. – Au-delà du contexte macroéconomique, la trajectoire financière traduit la normalisation progressive de la situation sanitaire et la mise en œuvre des mesures votées en loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 ainsi que la réforme du système de retraite présentée dans la présente loi.
Comme lors de la crise économique et financière de 2008-2009, la sécurité sociale a joué un rôle majeur d’amortisseur économique et social, tant en matière de prélèvements que de dépenses. Majoritairement proportionnelles aux revenus d’activité, les recettes se sont fortement contractées alors que les dépenses se sont maintenues s’agissant des prestations de retraite et familiales, dont les déterminants ne sont pas affectés par la crise, et ont fortement progressé pour ce qui concerne la branche Maladie.
Après un net rebond en 2021, à +8,0 % sur l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (ROBSS) et du FSV pris à périmètre constant, les recettes auraient continué de progresser de +5,3 % en 2022 selon les prévisions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, portées par la progression de l’emploi et des salaires, dans un contexte de forte inflation produisant ses effets au-delà des règles d’indexation automatique du salaire minimum (+8,6 % de progression de la masse salariale privée). Dans le même temps, les dépenses ont également été dynamiques mais dans une moindre proportion. Elles progresseraient de 4,1 % en valeur en 2022. En conséquence, le déficit des régimes obligatoires de base et du FSV diminuerait à nouveau en 2022 de 5,4 milliards d’euros et s’établirait à 18,9 milliards d’euros.
En 2023, le déficit des régimes obligatoires de base et du FSV atteindrait 8,2 milliards d’euros, en très nette amélioration par rapport à 2022 (10,7 milliards d’euros). Les dépenses ne progresseraient que de 2,1 %, à la faveur d’une diminution des dépenses sous ONDAM du fait de dépenses liées à la crise attendues en net repli, provisionnées à hauteur de 1 milliard d’euros, mais avec une poursuite des effets de l’inflation sur les prestations : à la revalorisation anticipée de 4,1 % de juillet 2022 s’est ainsi ajoutée une revalorisation de 0,8 % au 1er janvier 2023 pour les retraites et s’ajouterait au 1er avril 2023, pour les autres prestations sociales, une revalorisation de 1,7 %. Les recettes croîtraient de 4,0 %, soutenues par la masse salariale du secteur privé.
À partir de 2024, les prestations continueraient d’être portées par le contexte d’inflation persistant, mais avec un effet retard moyen d’une année pour les pensions et les autres prestations, alors que les recettes réagiraient davantage au contexte contemporain de l’année. Le ralentissement progressif de l’inflation, au rythme d’un point par an environ (de 4,3 % en 2023 à 2,1 % en 2025), participerait ainsi à une dégradation du solde en 2024 et à nouveau en 2025, malgré une progression maîtrisée de l’ONDAM et la montée en charge progressive de la réforme des retraites. En 2024, le déficit des régimes obligatoires de base et du FSV se creuserait ainsi à 9,4 milliards d’euros, les recettes évoluant de +4,2 %, légèrement en deçà de la dépense (+4,3 %). En 2025, il atteindrait 13,3 milliards d’euros, avec une progression des recettes de +3,1 %, moindre que celle des dépenses (+3,7 %). Le déficit se réduirait à partir de 2026, l’effet du différentiel d’inflation d’une année sur l’autre disparaissant quasiment alors que les effets de la réforme des retraites continueraient de monter en charge. Il atteindrait ainsi 12,9 milliards d’euros à cet horizon.
III. – D’ici 2026, les branches des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale connaîtraient des évolutions différenciées.
La branche Maladie, qui connaîtrait une nouvelle résorption de son déficit en 2022 avec un solde atteignant -21,9 milliards d’euros, verrait son solde se redresser plus nettement, à -7,9 milliards d’euros en 2023, sous l’effet de dépenses de crise attendues en très nette baisse (1 milliard d’euros provisionnés). L’amélioration du solde de la branche serait par ailleurs soutenue par le transfert pérenne du coût des indemnités journalières liées au congé maternité post-natal, de 2 milliards d’euros en 2023.
Le projet de loi prévoit un financement du fonds de prévention à l’usure professionnelle en soutien aux employeurs des établissements publics de santé et médico-sociaux. Les effets et le financement de la hausse du taux des cotisations vieillesse de la CNRACL sont intégrés dans la trajectoire. La branche Maladie verrait son solde s’améliorer continuellement à l’horizon 2026, en raison à la fois de recettes dynamiques et de dépenses évoluant de manière contenue. En 2026, son déficit s’établirait à 4,0 milliards d’euros.
La branche Autonomie verrait son solde passer en déficit en 2022, à
-0,4 milliard d’euros, et se creuser à nouveau en 2023, sous l’effet d’un objectif global de dépenses porté respectivement à 5,1 % et à 5,2 % dans les champs des personnes âgées et des personnes handicapées. Il atteindrait -1,3 milliard d’euros en 2023.
À partir de 2024, la branche Autonomie bénéficiera d’une fraction de CSG augmentée de 0,15 point supplémentaire de la part de la CADES, en application de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie. La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) afficherait alors un excédent de 0,7 milliard d’euros, qui diminuerait par la suite, du fait notamment de 50 000 créations de postes à terme en EHPAD et du financement de temps dédiés au lien social auprès des personnes âgées qui bénéficient d’un plan d’aide à domicile. La branche financera par ailleurs la meilleure prise en compte des trimestres cotisés au titre du congé proche aidant dans le cadre de la présente réforme.
S’agissant de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), son excédent passerait à 2,0 milliards d’euros en 2022, puis s’élèverait à 2,2 milliards d’euros en 2023. À partir de 2024, la branche verrait le niveau de ses cotisations baisser au bénéfice de la branche Vieillesse. De plus, elle prendrait en charge de nouvelles dépenses liées à la meilleure prise en compte de la pénibilité et de l’usure professionnelle dans le cadre de la réforme. Au total, son excédent atteindrait encore 2,1 milliards d’euros en 2026.
Le solde de la branche Vieillesse des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et du FSV poursuivrait en 2022 son amélioration engagée en 2021, après le creux enregistré en 2020, à -1,2 milliard d’euros.
À partir de 2023, le solde de la branche serait directement affecté par les effets démographiques du vieillissement (augmentation de la taille des générations qui partent à la retraite) et par la dégradation marquée du solde de la CNRACL mais bénéficierait de la hausse progressive de l’âge effectif de départ portée par la présente loi. Le solde de la branche serait également particulièrement sensible au contexte d’inflation, notamment au ralentissement projeté des prix, avec comme conséquence une progression des recettes en phase avec le contexte de prix de l’année, moindre cependant que l’inflation de l’année précédente dont s’approche le taux de revalorisation appliqué au 1er janvier de l’année. Ainsi, en 2023, les revalorisations des pensions liées à la prise en compte de l’inflation porteraient la progression des charges de la branche Vieillesse et du FSV à 4,5 %, contre 4,0 % pour les recettes. Le déficit de la branche, y compris le Fonds de solidarité vieillesse, atteindrait ainsi 2,5 milliards d’euros en 2023 et jusqu’à 11,8 milliards d’euros à l’horizon 2026. Les éléments relatifs à l’ensemble des régimes, qui permettent d’atteindre l’équilibre à l’horizon 2030, sont présentés dans l’étude d’impact du projet de loi.
La branche Famille verrait son excédent se réduire légèrement en 2022, à 2,6 milliards d’euros, reflétant le transfert d’une fraction de taxe sur les salaires à la branche Maladie décidé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 pour compenser le coût lié aux indemnités journalières dérogatoires pour garde d’enfants (1,0 milliard d’euros) supporté par cette branche.
L’excédent serait moindre en 2023 en raison du transfert de la part du congé maternité post-natal, pour 2,0 milliards d’euros, prévu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023. De plus, conformément aux engagements du Président de la République, l’allocation de soutien familial a été revalorisée de 50 % en novembre 2022. L’excédent de la branche Famille diminuerait ainsi de moitié, pour s’établir à 1,3 milliard d’euros en 2023.
À l’horizon 2026, l’excédent de la branche diminuerait et s’élèverait à 0,8 milliard d’euros, du fait de dépenses portées par l’indexation des prestations légales et de la montée en charge des mesures du quinquennat concernant la branche Famille s’agissant du complément de mode de garde et du service public de la petite enfance.
Prévisions des recettes, dépenses et soldes des régimes de base et du FSV
Recettes, dépenses et soldes de l’ensemble des régimes obligatoires de base
(En milliards d’euros) |
||||||||||||||||||||
2019 |
2020 |
2021 |
2022 (p) |
2023 (p) |
2024 (p) |
2025 (p) |
2026 (p) |
|||||||||||||
Maladie |
||||||||||||||||||||
Recettes |
216,6 |
209,8 |
209,4 |
221,0 |
231,2 |
238,4 |
244,7 |
251,7 |
||||||||||||
Dépenses |
218,1 |
240,3 |
235,4 |
242,9 |
239,1 |
244,6 |
250,5 |
255,8 |
||||||||||||
Solde |
-1,5 |
-30,5 |
-26,1 |
-21,9 |
-7,9 |
-6,2 |
-5,8 |
-4,0 |
||||||||||||
Accidents du travail et maladies professionnelles |
||||||||||||||||||||
Recettes |
14,7 |
13,5 |
15,1 |
16,2 |
17,0 |
16,9 |
17,5 |
18,2 |
||||||||||||
Dépenses |
13,6 |
13,6 |
13,9 |
14,2 |
14,8 |
15,3 |
15,7 |
16,1 |
||||||||||||
Solde |
1,1 |
-0,1 |
1,3 |
2,0 |
2,2 |
1,6 |
1,8 |
2,1 |
||||||||||||
Famille |
||||||||||||||||||||
Recettes |
51,4 |
48,2 |
51,8 |
53,5 |
56,7 |
58,5 |
60,3 |
62,2 |
||||||||||||
Dépenses |
49,9 |
50,0 |
48,9 |
50,9 |
55,3 |
57,7 |
59,8 |
61,4 |
||||||||||||
Solde |
1,5 |
-1,8 |
2,9 |
2,6 |
1,3 |
0,8 |
0,5 |
0,8 |
||||||||||||
Vieillesse |
||||||||||||||||||||
Recettes |
240,0 |
241,2 |
249,4 |
258,9 |
269,8 |
282,1 |
291,3 |
299,6 |
||||||||||||
Dépenses |
241,3 |
246,1 |
250,5 |
261,9 |
273,7 |
290,1 |
303,6 |
314,2 |
||||||||||||
Solde |
-1,3 |
-4,9 |
-1,1 |
-3,0 |
-3,8 |
-8,1 |
-12,3 |
-14,6 |
||||||||||||
Autonomie |
||||||||||||||||||||
Recettes |
32,8 |
35,0 |
36,3 |
40,3 |
41,3 |
42,5 |
||||||||||||||
Dépenses |
32,6 |
35,4 |
37,5 |
39,6 |
41,1 |
42,4 |
||||||||||||||
Solde |
0,3 |
-0,4 |
-1,3 |
0,7 |
0,2 |
0,2 |
||||||||||||||
Régimes obligatoires de base de sécurité sociale consolidés |
||||||||||||||||||||
Recettes |
509,1 |
499,3 |
544,2 |
569,6 |
593,3 |
617,7 |
636,5 |
655,2 |
||||||||||||
Dépenses |
509,2 |
536,5 |
567,0 |
590,3 |
602,8 |
628,9 |
652,1 |
671,0 |
||||||||||||
Solde |
-0,2 |
-37,3 |
-22,7 |
-20,7 |
-9,5 |
-11,2 |
-15,6 |
-15,7 |
Recettes, dépenses et soldes du Fonds de solidarité vieillesse
(En milliards d’euros) |
||||||||
2019 |
2020 |
2021 |
2022 (p) |
2023 (p) |
2024 (p) |
2025 (p) |
2026 (p) |
|
Recettes |
17,2 |
16,7 |
17,7 |
19,8 |
20,6 |
21,5 |
22,2 |
23,1 |
Dépenses |
18,8 |
19,1 |
19,3 |
18,0 |
19,3 |
19,7 |
19,9 |
20,3 |
Solde |
-1,6 |
-2,5 |
-1,5 |
1,8 |
1,3 |
1,8 |
2,3 |
2,8 |
Recettes, dépenses et soldes des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse
(En milliards d’euros) |
||||||||
2019 |
2020 |
2021 |
2022 (p) |
2023 (p) |
2024 (p) |
2025 (p) |
2026 (p) |
|
Recettes |
508,0 |
497,2 |
543,0 |
571,8 |
595,0 |
619,8 |
639,1 |
658,4 |
Dépenses |
509,7 |
536,9 |
567,3 |
590,7 |
603,2 |
629,3 |
652,5 |
671,3 |
Solde |
-1,7 |
-39,7 |
-24,3 |
-18,9 |
-8,2 |
-9,4 |
-13,3 |
-12,9 |
DEUXIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2023
TITRE Ier
RECULER L’ÂGE DE DÉPART EN TENANT COMPTE DES SITUATIONS D’USURE PROFESSIONNELLE ET DE LA PÉNIBILITÉ EFFECTIVE DES MÉTIERS
Article 7
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° A (nouveau) Le troisième alinéa du II de l’article L. 111-2-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle se fixe pour objectifs, à l’horizon 2050, la suppression de l’écart entre le montant des pensions perçues par les femmes et celui des pensions perçues par les hommes et, à l’horizon 2037, sa réduction de moitié par rapport à l’écart constaté en 2023. » ;
1° L’article L. 161-17-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « soixante-deux » est remplacé par le mot : « soixante-quatre » et, à la fin, l’année : « 1955 » est remplacée par l’année : « 1968 » ;
b) Au deuxième alinéa, l’année : « 1955 » est remplacée par l’année : « 1968 », la date : « 1er juillet 1951 » est remplacée par la date : « 1er septembre 1961 » et, après le mot : « décembre », la fin est ainsi rédigée : « 1967, de manière croissante, à raison de trois mois par génération. » ;
c) Les 1° et 2° sont abrogés ;
2° L’article L. 161-17-3 est ainsi modifié :
a) À la fin du 2°, la date : « 31 décembre 1963 » est remplacée par la date : « 31 août 1961 » ;
b) Au 3°, la date : « 1er janvier 1964 » est remplacée par la date : « 1er septembre 1961 » et l’année : « 1966 » est remplacée par l’année : « 1962 » ;
c) À la fin du 4°, les mots : « entre le 1er janvier 1967 et le 31 décembre 1969 » sont remplacés par les mots : « en 1963 » ;
d) À la fin du 5°, les mots : « entre le 1er janvier 1970 et le 31 décembre 1972 » sont remplacés par les mots : « en 1964 » ;
e) À la fin du 6°, l’année : « 1973 » est remplacée par l’année : « 1965 » ;
2° bis Au début de l’article L. 173-7, sont ajoutés les mots : « À l’exception des versements mentionnés au IV de l’article L. 351-14-1, » ;
3° Au 1° de l’article L. 351-8, les mots : « à l’article L. 161-17-2 augmenté de cinq » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa de l’article L. 161-17-2 augmenté de trois » ;
4° Le I de l’article L. 351-14-1 est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° Les périodes pendant lesquelles une personne a été inscrite en tant que sportif de haut niveau sur la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 221-2 du code du sport et qui n’ont pas été prises en compte à un autre titre dans un régime de base ; »
5° Au II du même article L. 351-14-1, les mots : « au délai de présentation de la demande, fixé à dix ans à compter de la fin des études » sont remplacés par les mots : « à l’âge de l’assuré à la date de la demande, qui ne peut être inférieur à trente ans » ;
6° Le 1° de l’article L. 351-17 est ainsi rédigé :
« 1° L’âge jusqu’auquel l’assuré peut présenter une demande, qui ne peut être inférieur à vingt-cinq ans ; ».
II. – Le code des communes est ainsi modifié :
1° Le chapitre VI du titre Ier du livre IV est abrogé ;
2° Le début de l’article L. 417-11 est ainsi rédigé : « Les agents et anciens agents des réseaux souterrains des égouts qui remplissent les conditions mentionnées au dixième alinéa du 1° du I de l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent… (le reste sans changement). » ;
3° À l’article L. 444-5, les mots : « des dispositions du 3° de l’article L. 416-1 et » sont supprimés.
III. – Le code des pensions civiles et militaires de retraite est ainsi modifié :
1° L’article L. 12 est ainsi modifié :
a) La première phrase du i est ainsi modifiée :
– après les mots : « les militaires », sont insérés les mots : « et anciens militaires » ;
– après le mot : « invalidité », la fin est supprimée ;
a bis) À l’avant-dernier alinéa, le mot : « au » est remplacé par les mots : « aux a à i du » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les bonifications acquises, en application des règles qui les régissent, pour services accomplis dans différents emplois classés dans la catégorie active et la bonification prévue au i peuvent se cumuler, dans la limite de vingt trimestres. » ;
2° L’article L. 13 est ainsi modifié :
a) À la fin de la seconde phrase du premier alinéa du I, les mots : « fixé à cent soixante trimestres » sont remplacés par les mots : « celui mentionné au 6° de l’article L. 161-17-3 du code de la sécurité sociale » ;
b) Les II et III sont abrogés ;
3° L’article L. 14 est ainsi modifié :
a) À la fin du 1° du I, les mots : « la limite d’âge du grade détenu par le pensionné » sont remplacés par les mots : « l’âge d’annulation de la décote prévu à l’article L. 14 bis » ;
b) Le même I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’effet en durée d’assurance de l’une des bonifications mentionnées au dernier alinéa de l’article L. 12 ou du cumul mentionné au même dernier alinéa peut être additionné à la majoration de durée d’assurance mentionnée à l’article 78 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, dans la limite de vingt trimestres. » ;
c) (Supprimé)
4° Le paragraphe Ier du chapitre II du titre III du livre Ier est complété par un article L. 14 bis ainsi rédigé :
« Art. L. 14 bis. – L’âge d’annulation de la décote est égal :
« 1° Pour le fonctionnaire civil, à l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale augmenté de trois années ;
« 2° Pour le fonctionnaire bénéficiant d’un droit au départ au titre du deuxième alinéa du 1° du I de l’article L. 24, à l’âge anticipé mentionné au même deuxième alinéa augmenté de trois années ;
« 3° Pour le fonctionnaire bénéficiant d’un droit au départ au titre des troisième à dernier alinéas du 1° du I du même article L. 24, à l’âge minoré mentionné au troisième alinéa du même 1° augmenté de trois années ;
« 4° Pour le militaire mentionné à la première phrase du premier alinéa du II de l’article L. 14 ou les fonctionnaires mentionnés aux 2° à 4° de l’article L. 556-8 du code général de la fonction publique, à la limite d’âge de leur grade ;
« 5° Par dérogation au 2° du présent article, pour les fonctionnaires bénéficiant d’un droit au départ à l’âge anticipé au titre d’un emploi dont la limite d’âge est fixée à soixante-quatre ans, à cet âge. » ;
5° Le I de l’article L. 24 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Le premier alinéa du 1° est ainsi modifié :
– les mots : « civil est radié des cadres par limite d’âge, ou s’il » et les mots : « , à la date de l’admission à la retraite, » sont supprimés ;
– après le mot : « sociale », la fin est supprimée ;
c) Au début du second alinéa du même 1°, sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Par dérogation au premier alinéa du présent 1°, la liquidation de la pension peut, pour les fonctionnaires occupant ou ayant occupé un emploi classé en catégorie active, intervenir à compter d’un âge anticipé égal à l’âge mentionné au premier alinéa de l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale diminué de cinq années. Cette faculté est ouverte à la condition que le fonctionnaire puisse se prévaloir, au total, d’au moins dix-sept ans de services accomplis indifféremment dans de tels emplois, dits services actifs. » ;
d) Ledit 1° est complété par onze alinéas ainsi rédigés :
« En outre, l’occupation de certains de ces emplois permet de porter l’âge anticipé à un âge minoré égal à l’âge mentionné au même premier alinéa diminué de dix années, dès lors que le fonctionnaire peut se prévaloir de services dits super-actifs, accomplis indifféremment :
« a) Dans le corps des identificateurs de l’institut médico-légal de la préfecture de police ;
« b) Dans les réseaux souterrains en tant que fonctionnaire des réseaux souterrains des égouts ;
« c) En tant que personnel de surveillance de l’administration pénitentiaire ;
« d) En tant que fonctionnaire des services actifs de la police nationale appartenant au corps mentionné au 1° de l’article L. 556-8 du code général de la fonction publique.
« Les services super-actifs peuvent être comptabilisés comme services actifs.
« Le droit à la liquidation à l’âge minoré est ouvert à la condition d’avoir accompli, au total, une durée de services super-actifs égale à :
« – pour le fonctionnaire ou l’ancien fonctionnaire des réseaux souterrains et le fonctionnaire ou l’ancien fonctionnaire du corps des identificateurs de l’institut médico-légal, douze années de services super-actifs, dont la moitié de manière consécutive, et d’avoir accompli trente-deux années de services effectifs au sens de l’article L. 13 du présent code ;
« – pour le fonctionnaire ou l’ancien fonctionnaire des services actifs de police mentionné au d du présent 1° ainsi que pour le surveillant ou l’ancien surveillant pénitentiaire, vingt-sept années de services super-actifs, déduction faite, le cas échéant, de la durée des services militaires obligatoires.
« Lorsque le fonctionnaire a occupé plusieurs emplois parmi ceux mentionnés aux dixième et onzième alinéas du présent 1° et se prévaut de durées de services super-actifs cumulées, la condition de durée de service applicable pour bénéficier de l’âge de départ minoré est celle associée à l’emploi que le fonctionnaire a occupé le plus longtemps.
« Bénéficie d’un droit à la liquidation à l’âge minoré l’ingénieur ou l’ancien ingénieur du contrôle de la navigation aérienne ayant effectué dix-sept années de service dans les services actifs ; »
e) Il est ajouté un 6° ainsi rédigé :
« 6° Par atteinte de la limite d’âge. » ;
6° Après l’article L. 24, il est inséré un article L. 24 bis ainsi rédigé :
« Art. L. 24 bis. – Les services accomplis par un fonctionnaire dans un emploi classé en catégorie active au cours de la période de dix ans précédant sa titularisation sont comptabilisés comme des services actifs pour l’acquisition du droit au départ anticipé mentionné au deuxième alinéa du 1° du I de l’article L. 24.
« De même, les services accomplis par le fonctionnaire dans des fonctions incombant aux fonctionnaires mentionnés aux a à d du même 1° au cours de la période de dix ans précédant sa titularisation sont comptabilisés comme services super-actifs permettant un droit au départ à l’âge minoré mentionné audit 1°. » ;
7° L’article L. 25 est ainsi modifié :
a) Après la seconde occurrence du mot : « âge », la fin du 1° est ainsi rédigée : « minoré ou anticipé dans les conditions définies aux deuxième à dernier alinéas du 1° du I de l’article L. 24 du présent code ; »
b) Au 2°, deux fois, et à la fin des 3° et 4°, les mots : « de cinquante-deux ans » sont remplacés par les mots : « défini à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale abaissé de dix années » ;
c) (Supprimé)
III bis. – L’article L. 921-4 du code de l’éducation est abrogé.
IV. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° À la première phrase des articles L. 732-25 et L. 781-33, les mots : « à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale augmenté de cinq » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa de l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale augmenté de trois » ;
2° (nouveau) Au second alinéa de l’article L. 732-27-1, les mots : « au délai de présentation de la demande, fixé à dix ans à compter de la fin des études » sont remplacés par les mots : « à l’âge de l’assuré à la date de la demande, qui ne peut être inférieur à trente ans ».
V. – Au 2° de l’article L. 5421-4 du code du travail, les mots : « à l’article L. 161-17-2 du même code augmenté de cinq ans » sont remplacés par les mots : « au 1° de l’article L. 351-8 du même code ».
VI. – Le chapitre Ier du titre Ier du livre IX du code de l’éducation est complété par un article L. 911-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 911-9. – Quand ils atteignent la limite d’âge en cours d’année scolaire, les enseignants des premier et second degrés, les personnels d’inspection ainsi que les maîtres contractuels et agréés des établissements d’enseignement privés sous contrat restent en fonction à leur demande, si les besoins du service le justifient, jusqu’à la fin de l’année scolaire. »
VII. – Le code général de la fonction publique est ainsi modifié :
1° L’article L. 556-1 est ainsi modifié :
a) Au 1°, le mot : « premier » est remplacé par le mot : « deuxième » ;
b) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, le fonctionnaire occupant un emploi qui ne relève pas de la catégorie active et auquel s’applique la limite d’âge mentionnée au 1° du présent article ou une limite d’âge qui lui est égale ou supérieure peut, sur autorisation, être maintenu en fonctions sans radiation des cadres préalable, jusqu’à l’âge de soixante-dix ans.
« Le refus d’autorisation est motivé.
« Le bénéfice cumulé de ce maintien en fonctions, des prolongations d’activité et des reculs de limite d’âge prévus aux articles L. 556-2 à L. 556-5 ne peut conduire le fonctionnaire à être maintenu en fonctions au-delà de soixante-dix ans. » ;
2° L’article L. 556-7 est ainsi modifié :
a) Après la référence : « L. 556-1 », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « bénéficie, à sa demande et sous réserve de son aptitude physique, d’une prolongation d’activité jusqu’à l’âge fixé au même 1°. » ;
b) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « le maintien en » sont remplacés par les mots : « la prolongation d’ » ;
c) Au dernier alinéa, les mots : « maintien en » sont remplacés par les mots : « prolongation d’ » ;
3° Après le mot : « est », la fin de l’article L. 556-8 est ainsi rédigée : « fixée comme suit :
« 1° À cinquante-sept ans pour les fonctionnaires appartenant au corps d’encadrement et d’application et au corps de commandement ;
« 2° À soixante ans pour les commissaires de police ;
« 3° À soixante et un ans pour les commissaires divisionnaires de police et pour les commissaires généraux de police ;
« 4° À soixante-deux ans pour les emplois de contrôleur général et d’inspecteur général des services actifs de la police nationale, de chef de service de l’inspection générale de la police nationale et de directeur des services actifs de l’administration centrale et de la préfecture de police. » ;
3° bis Après l’article L. 556-8, il est inséré un article L. 556-8-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 556-8-1. – La limite d’âge des fonctionnaires appartenant à l’un des cadres d’emplois de sapeurs-pompiers professionnels est fixée à soixante-deux ans. » ;
4° L’article L. 556-11 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, l’agent contractuel occupant un emploi auquel s’applique la limite d’âge mentionnée au premier alinéa ou une limite d’âge qui lui est égale ou supérieure peut, sur autorisation, être maintenu en fonctions jusqu’à l’âge de soixante-dix ans.
« Le refus d’autorisation est motivé.
« Le bénéfice cumulé de ce maintien en fonctions et des reculs de limite d’âge prévus à l’article L. 556-12 ne peut conduire l’agent contractuel à être maintenu en fonctions au-delà de soixante-dix ans. » ;
5° La section 3 du chapitre VI du titre II du livre VIII est ainsi modifiée :
a) Au 3° de l’article L. 826-13, après le mot : « opérationnelle, », sont insérés les mots : « à partir de l’âge de droit au départ anticipé fixé au troisième alinéa de l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite diminué de cinq années, » et, à la fin, sont ajoutés les mots : « de la présente section » ;
b) Est ajoutée une sous-section 5 ainsi rédigée :
« Sous-section 5
« Modalités d’application
« Art. L. 826-30. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application de la présente section. »
VIII. – Au deuxième alinéa de l’article L. 6151-3 du code de la santé publique, les mots : « de soixante-sept ans » sont remplacés par les mots : « mentionné au 1° de l’article L. 556-1 du code général de la fonction publique ».
IX. – Le code de justice administrative est ainsi modifié :
1° L’article L. 133-7-1 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– après le mot : « résultant », sont insérés les mots : « du 1° de l’article L. 556-1 du code général de la fonction publique ou de l’article 1er » ;
– après le mot : « public », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, à l’issue des reculs de limite d’âge et des prolongations d’activité mentionnés aux articles L. 556-2 à L. 556-5 du code général de la fonction publique » ;
– après les mots : « l’âge », la fin est ainsi rédigée : « mentionné au cinquième alinéa de l’article L. 556-1 du même code sans radiation des cadres préalable pour exercer les fonctions de conseiller d’État ou des fonctions dans lesquelles ils sont mis à disposition ou détachés. » ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
2° Le premier alinéa de l’article L. 233-7 est ainsi modifié :
a) Les mots : « de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d’âge dans la fonction publique et le secteur public » sont remplacés par les mots : « du 1° de l’article L. 556-1 du code général de la fonction publique, le cas échéant à l’issue des reculs de limite d’âge et des prolongations d’activité mentionnés aux articles L. 556-2 à L. 556-5 du même code » ;
b) Les mots : « pour exercer l’une des fonctions dévolues aux premiers conseillers » sont supprimés ;
c) Après les mots : « l’âge », la fin est ainsi rédigée : « mentionné au cinquième alinéa de l’article L. 556-1 dudit code sans radiation des cadres préalable pour exercer l’une des fonctions dévolues aux premiers conseillers ou des fonctions dans lesquelles ils sont mis à disposition ou détachés. » ;
3° L’article L. 233-8 est abrogé.
IX bis (nouveau). – À la seconde phrase du quatrième alinéa du 2° du I de l’article L. 4139-16 et à la seconde phrase du 2° de l’article L. 4141-5 du code de la défense, les mots : « la limite d’âge retenue » sont remplacés par les mots : « l’âge d’annulation de la décote retenu ».
X. – La loi n° 57-444 du 8 avril 1957 instituant un régime particulier de retraites en faveur des personnels actifs de police est ainsi modifiée :
1° L’article 1er est ainsi rédigé :
« Art. 1er. – Les agents et les anciens agents des services actifs de police de la préfecture de police, soumis à la loi n° 48-1504 du 28 septembre 1948 relative au statut spécial des personnels de police, dont la limite d’âge était, au 1er décembre 1956, égale à cinquante-cinq ans, bénéficient, à compter du 1er janvier 1957, s’ils ont droit à une pension d’ancienneté ou à une pension proportionnelle pour invalidité ou par limite d’âge, d’une bonification pour la liquidation de ladite pension, égale à un cinquième du temps qu’ils ont effectivement passé en position d’activité dans des services actifs de police. Cette bonification ne peut être supérieure à cinq annuités.
« À l’exception des contrôleurs généraux, sous-directeurs, directeurs, adjoints, chefs de service et directeurs des services actifs, le bénéfice de la bonification acquise dans les conditions définies au premier alinéa du présent article est maintenu aux fonctionnaires des services actifs de la préfecture de police également soumis à la loi n° 48-1504 du 28 septembre 1948 précitée et dont la limite d’âge était, au 1er décembre 1956, supérieure à cinquante-cinq ans, auxquels est également applicable le premier alinéa du présent article. » ;
2° L’article 2 est abrogé.
XI. – Le III de l’article 125 de la loi n° 83-1179 du 29 décembre 1983 de finances pour 1984 est ainsi modifié :
1° Au début, sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« III. – Les fonctionnaires occupant ou ayant occupé des emplois de sapeur-pompier professionnel de tous grades, y compris les emplois de directeur départemental, de directeur départemental adjoint et de sous-directeur des services d’incendie et de secours bénéficient, sous certaines conditions, notamment d’une durée minimale de service susceptible d’être prise en compte dans la constitution de leurs droits à pension du régime de retraite des agents des collectivités territoriales et d’une durée de dix-sept ans de service effectif en qualité de sapeur-pompier professionnel, d’une bonification du cinquième du temps du service accompli pour la liquidation de leur pension de retraite, dans la limite de cinq annuités.
« Cet avantage est également accordé, sans condition de durée de service, aux sapeurs-pompiers professionnels radiés des cadres pour invalidité imputable au service, aux sapeurs-pompiers professionnels reclassés pour raison opérationnelle et aux sapeurs-pompiers professionnels admis au bénéfice d’un congé pour raison opérationnelle. » ;
2° L’avant-dernier alinéa est supprimé.
XII. – À l’article 1er de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d’âge dans la fonction publique et le secteur public, les mots : « aux dispositions » sont remplacés par les mots : « au 1° ».
XIII. – La loi n° 86-1304 du 23 décembre 1986 relative à la limite d’âge et aux modalités de recrutement de certains fonctionnaires civils de l’État est ainsi modifiée :
1° L’article 1er est ainsi modifié :
a) Après le mot : « membres », sont insérés les mots : « du corps » ;
b) Les mots : « l’âge limite résultant » sont remplacés par les mots : « la limite d’âge résultant du 1° de l’article L. 556-1 du code général de la fonction publique ou de l’article 1er » ;
c) Après le mot : « public », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, à l’issue des reculs de limite d’âge et des prolongations d’activité mentionnés aux articles L. 556-2 à L. 556-5 du code général de la fonction publique » ;
d) Les mots : « la limite d’âge qui était en vigueur avant l’intervention de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 précitée » sont remplacés par les mots : « l’âge mentionné au cinquième alinéa de l’article L. 556-1 du même code sans radiation des cadres préalable » ;
e) Les mots : « fonctions, de » sont remplacés par les mots : « fonctions de » ;
f) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le maintien en activité, y compris dans des fonctions exercées par la voie du détachement ou de la mise à disposition, jusqu’à l’âge mentionné au même cinquième alinéa est accordé sur demande, en considération de l’intérêt du service et de l’aptitude de l’intéressé. » ;
2° L’article 4 est abrogé.
XIV. – La loi n° 89-1007 du 31 décembre 1989 relative au corps des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne est ainsi modifiée :
1° L’article 4 est abrogé ;
2° À l’article 5, après le mot : « ingénieurs », sont insérés les mots : « et anciens ingénieurs ».
XV. – L’article 24 de la loi n° 96-452 du 28 mai 1996 portant diverses mesures d’ordre sanitaire, social et statutaire est ainsi modifié :
1° Le II est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « des corps mentionnés au I ci-dessus » sont remplacés par les mots : « appartenant ou ayant appartenu aux corps du personnel de surveillance de l’administration pénitentiaire » et les mots : « s’ils sont radiés des cadres par limite d’âge ou par invalidité » sont remplacés par les mots : « sous réserve de vérifier la condition de durée de services mentionnée au onzième alinéa du 1° du I de l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite » ;
b) La seconde phrase du deuxième alinéa est supprimée ;
c) Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« La condition de durée de services mentionnée au premier alinéa n’est pas applicable aux fonctionnaires radiés des cadres pour invalidité ou par limite d’âge. » ;
2° Les III et IV sont abrogés.
XVI. – La première phrase de l’article 78 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites est ainsi modifiée :
1° Les mots : « fonctionnaires relevant de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dont la limite d’âge est fixée à soixante-deux ans » sont remplacés par les mots : « personnes ayant ou ayant eu la qualité de fonctionnaire hospitalier, au sens de l’article L. 5 du code général de la fonction publique, » ;
2° Les mots : « I de l’article L. 24 du même code » sont remplacés par les mots : « deuxième alinéa du 1° du I de l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite ».
XVII. – L’article 93 de la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 de finances rectificative pour 2003 est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « appartenant », sont insérés les mots : « ou ayant appartenu » ;
b) Le deuxième alinéa est supprimé ;
2° Le II est abrogé.
XVIII. – Au quatrième alinéa du II de l’article 3 de la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005 relative à la situation des maîtres des établissements d’enseignement privés sous contrat, les mots : « de soixante-deux ans » sont remplacés par les mots : « mentionné à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale ».
XIX. – L’article 37 de la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique est ainsi modifié :
1° À la fin de la première phrase du I, les mots : « soixante-sept ans » sont remplacés par les mots : « l’âge mentionné au 1° de l’article L. 556-1 du code général de la fonction publique » ;
2° Le dernier alinéa du III est ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa du 1° du I de l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, l’âge d’ouverture du droit à pension applicable aux fonctionnaires mentionnés au présent III est fixé à soixante-deux ans. Par dérogation à l’article L. 14 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite, leur âge d’annulation de la décote est fixé à soixante-cinq ans. »
XIX bis. – La loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites est ainsi modifiée :
1° Au premier alinéa du I de l’article 35, les mots : « , au 1° de l’article L. 25 du même code, au 3° de l’article L. 416-1 du code des communes, au premier alinéa de l’article 2 de la loi n° 57-444 du 8 avril 1957 instituant un régime particulier de retraites en faveur des personnels actifs de police, à l’article 4 de la loi n° 89-1007 du 31 décembre 1989 relative au corps des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne et au troisième alinéa du II de l’article 24 de la loi n° 96-452 du 28 mai 1996 portant diverses mesures d’ordre sanitaire, social et statutaire » sont remplacés par les mots : « et au 1° de l’article L. 25 du même code » ;
2° (Supprimé)
XIX ter. – La limite du nombre total de trimestres validés prévue au 7° de l’article L. 351-3 du code de la sécurité sociale est augmentée par décret.
XX. – A. – Par dérogation à l’article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite, la durée de services et de bonifications requise pour les fonctionnaires nés :
1° Avant le 1er septembre 1961 est celle applicable avant l’entrée en vigueur du présent XX ;
2° Entre le 1er septembre 1961 et le 31 décembre 1962, est celle prévue au 3° de l’article L. 161-17-3 du code de la sécurité sociale ;
3° En 1963, est celle prévue au 4° du même article L. 161-17-3 ;
4° En 1964, est celle prévue au 5° dudit article L. 161-17-3.
B. – Par dérogation à l’article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite et au A du présent XX :
1° La durée de services et de bonifications requise pour les fonctionnaires bénéficiant, au titre de la catégorie active, d’un droit au départ à l’âge anticipé est égale :
a) Pour ceux nés avant le 1er septembre 1966, à celle applicable avant l’entrée en vigueur du présent XX ;
b) Pour ceux nés à compter du 1er septembre 1966, à 169 trimestres à compter du 1er septembre 2023. Cette durée augmente d’un trimestre par génération pour les générations nées en 1968 et 1969 ;
2° Pour les fonctionnaires bénéficiant, au titre de la catégorie super-active, d’un droit au départ à l’âge minoré, cette durée est fixée :
a) Pour ceux nés avant le 1er septembre 1971, à celle applicable avant l’entrée en vigueur du présent XX ;
b) Pour ceux nés à compter du 1er septembre 1971, à 169 trimestres à compter du 1er septembre 2023. Cette durée augmente d’un trimestre par génération pour les générations nées en 1973 et 1974.
C. – Par dérogation à l’article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite, la durée de services et de bonifications requise pour les fonctionnaires civils, autres que ceux mentionnés aux A et B du présent XX, et les militaires remplissant les conditions de liquidation de la pension avant l’âge de soixante ans est égale :
1° Pour ceux pouvant liquider leur pension avant le 1er septembre 2023, à celle applicable avant l’entrée en vigueur du présent XX ;
2° Pour ceux pouvant liquider leur pension à compter du 1er septembre 2023, à 169 trimestres. Cette durée augmente d’un trimestre par an à compter du 1er janvier 2025 pour atteindre, au 1er janvier 2027, la durée mentionnée au 6° de l’article L. 161-17-3 du code de la sécurité sociale.
D. – Par dérogation au III de l’article L. 14 du code des pensions civiles et militaires de retraite, l’âge à compter duquel le coefficient de majoration s’applique est :
1° Pour les fonctionnaires mentionnés au 1° du A, au 1° du C, au a du 1° du F et au a du 2° du F du présent XX, celui applicable avant l’entrée en vigueur du présent XX ;
2° Pour les fonctionnaires mentionnés au b du 1° du F du présent XX, à l’âge défini au même 1° augmenté de cinq années ;
3° Pour les fonctionnaires mentionnés au b du 2° du même F, à l’âge défini au même 2° augmenté de dix années.
E. – 1. Pour l’application du 1° de l’article L. 14 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite, l’âge d’annulation de la décote des fonctionnaires nés avant le 1er janvier 1968 est égal à soixante-sept ans. Par dérogation, pour ceux nés avant le 1er janvier 1958, l’âge d’annulation de la décote est celui applicable avant l’entrée en vigueur du présent XX.
2. Pour l’application des 2° et 3° de l’article L. 14 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite, l’âge d’annulation de la décote des fonctionnaires mentionnés aux 1° et 2° du F du présent XX est égal respectivement à soixante-deux ans et à cinquante-sept ans. Par dérogation, pour les fonctionnaires actifs nés avant le 1er janvier 1963 et les fonctionnaires super-actifs nés avant le 1er janvier 1968, l’âge d’annulation de la décote est celui applicable avant l’entrée en vigueur du présent XX.
F. – Par dérogation à l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite :
1° Pour les fonctionnaires relevant du deuxième alinéa du 1° du I du même article L. 24 et nés :
a) Avant le 1er septembre 1966, l’âge anticipé est fixé à cinquante-sept ans ;
b) À compter du 1er septembre 1966, l’âge anticipé résultant des dispositions antérieures à la présente loi augmente de trois mois par génération jusqu’à cinquante-neuf ans ;
2° Pour les fonctionnaires relevant des troisième à dernier alinéas du même 1° et nés :
a) Avant le 1er septembre 1971, l’âge minoré est fixé à cinquante-deux ans ;
b) À compter du 1er septembre 1971, l’âge minoré résultant des dispositions antérieures à la présente loi augmente de trois mois par génération jusqu’à cinquante-quatre ans.
G. – Par dérogation aux 2°, 3° et 4° de l’article L. 25 du code des pensions civiles et militaires de retraite, l’âge avant lequel la liquidation ne peut intervenir est :
1° Pour les militaires nés avant le 1er septembre 1971, fixé à l’âge applicable avant l’entrée en vigueur du présent XX ;
2° Pour les militaires nés à compter du 1er septembre 1971, rehaussé de trois mois à compter du 1er septembre 2023 et augmenté de trois mois par an à partir du 1er janvier 2024 jusqu’à atteindre l’âge de cinquante-quatre ans.
H (nouveau). – Par dérogation au III de l’article 37 de la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique, l’âge d’ouverture du droit à pension :
1° Est égal à soixante ans pour les fonctionnaires mentionnés au même III nés avant le 1er septembre 1963 ;
2° Augmente de trois mois par génération jusqu’à soixante-deux ans pour ceux nés à compter du 1er septembre 1963.
XXI. – Les cotisations versées avant la publication de la présente loi, en application des articles L. 351-14, L. 351-14-1, L. 634-2-1, L. 643-2, L. 653-5, L. 742-2, L. 742-4 et L. 742-7 du code de la sécurité sociale, de l’article L. 9 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite et des articles L. 732-27-1 et L. 732-52 du code rural et de la pêche maritime ainsi que celles versées en application des dispositions réglementaires ayant le même objet applicables aux fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et aux ouvriers régis par le régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État, par l’assuré né à compter du 1er septembre 1961 lui sont remboursées à sa demande, à la condition qu’il n’ait fait valoir aucun des droits aux pensions personnelles de retraite auxquels il peut prétendre au titre des régimes de retraite de base et complémentaires légalement obligatoires.
Le montant des cotisations à rembourser est calculé en revalorisant les cotisations versées par l’assuré par application chaque année du coefficient annuel de revalorisation mentionné à l’article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale.
Les demandes de remboursement sont présentées dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi.
XXII. – Les assurés ayant demandé leur pension avant l’entrée en vigueur du I du présent article et qui entrent en jouissance de leur pension après le 31 août 2023 bénéficient, sur leur demande, d’une annulation de leur pension ou de leur demande de pension. Les conditions de cette annulation sont fixées par décret.
XXII bis. – Avant le 1er octobre 2027, le comité mentionné à l’article L. 114-4 du code de la sécurité sociale remet au Parlement un rapport d’évaluation de la présente loi ainsi que des mesures légales et réglementaires en matière d’emploi des seniors prises après sa publication.
Il analyse l’évolution des différents paramètres de l’équilibre financier de l’ensemble des régimes obligatoires de base à l’horizon de 2040.
Ce rapport peut donner lieu à un débat à l’Assemblée nationale et au Sénat sur le bilan et les conditions d’adaptation de la présente loi.
XXIII. – Le 6° du III est applicable aux services accomplis en qualité d’agent contractuel à compter de la publication de la présente loi.
XXIV. – Le présent article est applicable aux fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ainsi qu’aux ouvriers régis par le régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État, dans des conditions déterminées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d’État.
XXV. – A. – Les VII, IX, XII et XIII entrent en vigueur deux mois après la promulgation de la présente loi. Les articles L. 133-7-1, L. 233-7 et L. 233-8 du code de justice administrative et la loi n° 86-1304 du 23 décembre 1986 relative à la limite d’âge et aux modalités de recrutement de certains fonctionnaires civils de l’État demeurent applicables, dans leur rédaction antérieure à la présente loi, aux fonctionnaires qui sont déjà maintenus en activité à la date de cette entrée en vigueur.
A bis. – (Supprimé)
B. – Les autres dispositions du présent article, à l’exception des VI et VIII, s’appliquent aux pensions prenant effet à compter du 1er septembre 2023.
XXVI. – (Supprimé)
XXVII (nouveau). – Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les conséquences du présent article sur l’engagement de la population au sein d’activités bénévoles, qui étudie en particulier les moyens de valoriser cet engagement bénévole dans les modalités de calcul de la pension de retraite.
Article 8
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au second alinéa de l’article L. 161-18, les mots : « avant-dernier alinéa de l’article L. 732-23 » sont remplacés par les mots : « article L. 732-18-4 » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 161-21-1, le taux : « 80 % » est remplacé par le taux : « 50 % » ;
3° À la fin de la première phrase du premier alinéa et au dernier alinéa de l’article L. 341-15, au premier alinéa et à la première phrase du second alinéa de l’article L. 341-17 ainsi qu’à la première phrase du premier alinéa et à la fin du second alinéa de l’article L. 351-7-1 A, les mots : « au premier alinéa de l’article L. 351-1 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 351-1-5 » ;
4° L’article L. 341-16 est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, les mots : « au premier alinéa de l’article L. 351-1 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 351-1-5 » ;
b) Au troisième alinéa, après la référence : « L. 351-1 », sont insérés les mots : « , à l’exclusion de son premier alinéa, » ;
5° Au début de la section 1 du chapitre Ier du titre V du livre III, il est ajouté un article L. 351-1-1 A ainsi rédigé :
« Art. L. 351-1-1 A. – La condition d’âge prévue au premier alinéa de l’article L. 351-1 est abaissée d’au moins un an, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés mentionnés à l’article L. 161-22-1-5 et pour les assurés bénéficiaires d’un départ à la retraite au titre des articles L. 351-1-1 et L. 351-1-5. Cette condition d’âge est abaissée d’une durée pouvant aller jusqu’à neuf ans pour les assurés mentionnés à l’article L. 351-1-3 et d’une durée ne pouvant excéder deux ans pour les assurés mentionnés à l’article L. 351-6-1. » ;
6° L’article L. 351-1-1 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « un âge » sont remplacés par les mots : « un des quatre âges, dont le plus élevé ne peut excéder vingt et un ans, » et, après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa du même article L. 351-1 » ;
b) La seconde phrase est ainsi modifiée :
– après le mot : « cotisations », sont insérés les mots : « à la charge de l’assuré » ;
– sont ajoutés les mots : « , ainsi que les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 et les périodes pendant lesquelles les fonctionnaires, magistrats et militaires vérifiaient les conditions d’affiliation à l’assurance vieillesse du régime général mentionnées aux mêmes articles L. 381-1 et L. 381-2, mais étaient affiliés à un régime spécial » ;
6° bis Après l’article L. 351-1-2, il est inséré un article L. 351-1-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 351-1-2-1. – Pour les assurés qui bénéficient d’au moins un trimestre de majoration de durée d’assurance au titre des articles L. 351-4, L. 351-4-1 ou L. 351-5, la durée d’assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré, accomplie l’année précédant l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2, lorsque celui-ci est égal ou supérieur à soixante-trois ans, et au-delà de la limite mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 ouvre droit à une majoration de pension dans les mêmes conditions que celles prévues au premier alinéa de l’article L. 351-1-2, sous réserve de l’application du second alinéa du même article L. 351-1-2.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles le présent article s’applique aux assurés affiliés à plusieurs régimes légaux ou rendus légalement obligatoires d’assurance vieillesse, afin que soient pris en compte, pour le bénéfice de la majoration de pension mentionnée au premier alinéa du présent article, des trimestres de majoration de durée d’assurance ou de bonification accordés à l’assuré au même titre que ceux mentionnés au même premier alinéa par les autres régimes. » ;
7° Au premier alinéa de l’article L. 351-1-3, les mots : « tout ou partie de » sont supprimés ;
8° La section 1 du chapitre Ier du titre V du livre III est complétée par un article L. 351-1-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 351-1-5. – La condition d’âge prévue au premier alinéa de l’article L. 351-1 est abaissée, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés reconnus inaptes au travail dans les conditions prévues à l’article L. 351-7 et pour ceux justifiant d’une incapacité permanente au moins égale à un taux fixé par décret. » ;
9° L’article L. 351-8 est ainsi modifié :
a) Le 1° ter est abrogé ;
b) À la fin du 2°, les mots : « dans les conditions prévues à l’article L. 351-7 » sont remplacés par les mots : « et les assurés justifiant d’une incapacité permanente au moins égale à un taux fixé par décret admis à demander la liquidation de leur pension de retraite dans les conditions prévues à l’article L. 351-1-5 » ;
c) Après le 4° bis, il est inséré un 4° ter ainsi rédigé :
« 4° ter Les assurés dont l’âge mentionné au même premier alinéa est abaissé dans des conditions prévues à l’article L. 351-1-1 ; »
10° Au troisième alinéa de l’article L. 382-24, les mots : « du premier alinéa de l’article L. 351-1 » sont remplacés par les mots : « de l’article L. 351-1-5 » ;
10° bis (nouveau) Au premier alinéa de l’article L. 382-27, après la référence : « L. 351-1-3 », sont insérés les mots : « et L. 351-1-5 » ;
11° L’article L. 643-3 est ainsi modifié :
aa) Le I est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les assurés qui bénéficient d’au moins un trimestre de majoration de durée d’assurance au titre des articles L. 351-4, L. 351-4-1 ou L. 351-5, la durée d’assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré, accomplie l’année précédant l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2, lorsque celui-ci est égal ou supérieur à soixante-trois ans, et au-delà de la limite mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 ouvre droit à une majoration de pension dans les mêmes conditions que celles prévues à la première phrase du quatrième alinéa du présent I et sous réserve de l’application de la seconde phrase du même quatrième alinéa.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles le présent article s’applique aux assurés affiliés à plusieurs régimes légaux ou rendus légalement obligatoires d’assurance vieillesse, afin que soient pris en compte, pour le bénéfice de la majoration de pension mentionnée à l’avant-dernier alinéa du présent I, des trimestres de majoration de durée d’assurance ou de bonification accordés à l’assuré au même titre que ceux mentionnés au même avant-dernier alinéa par les autres régimes. » ;
a) Après le même I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – La condition d’âge prévue au premier alinéa du I est abaissée d’au moins un an, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés bénéficiaires d’un départ à la retraite au titre des II et IV. Cette condition d’âge est abaissée d’une durée pouvant aller jusqu’à neuf ans pour les assurés mentionnés au III. » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « un âge » sont remplacés par les mots : « un des quatre âges, dont le plus élevé ne peut excéder vingt et un ans, » et, après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 » ;
la seconde phrase est complétée par les mots : « , ainsi que les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 » ;
– est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Ce décret prévoit également les conditions dans lesquelles sont réputées avoir donné lieu à versement de cotisations par l’assuré les périodes pendant lesquelles les fonctionnaires, les magistrats et les militaires vérifiaient les conditions d’affiliation à l’assurance vieillesse du régime général mentionnées aux mêmes articles L. 381-1 et L. 381-2, mais étaient affiliés à un régime spécial. » ;
c) Au premier alinéa du III, les mots : « tout ou partie de » sont supprimés ;
d) Il est ajouté un IV ainsi rédigé :
« IV. – La condition d’âge prévue au premier alinéa du I du présent article est abaissée, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés relevant des 2° et 3° de l’article L. 643-4. » ;
12° Au premier alinéa du 2° de l’article L. 643-4, les mots : « premier alinéa du I » sont remplacés par la référence : « IV » ;
12° bis Le même article L. 643-4 est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Des assurés dont l’âge mentionné au premier alinéa du I de l’article L. 643-3 est abaissé dans des conditions prévues au I bis du même article L. 643-3 ; »
13° L’article L. 653-2 est ainsi modifié :
aa) Le I est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les assurés qui bénéficient d’au moins un trimestre de majoration de durée d’assurance au titre des articles L. 351-4, L. 351-4-1 ou L. 351-5, la durée d’assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré, accomplie l’année précédant l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2, lorsque celui-ci est égal ou supérieur à soixante-trois ans, et au-delà de la limite mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 ouvre droit à une majoration de pension dans les mêmes conditions que celles prévues à la première phrase du quatrième alinéa du présent I, sous réserve de l’application de la seconde phrase du même quatrième alinéa.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles le présent article s’applique aux assurés affiliés à plusieurs régimes légaux ou rendus légalement obligatoires d’assurance vieillesse, afin que soient pris en compte, pour le bénéfice de la majoration de pension mentionnée à l’avant-dernier alinéa du présent I, des trimestres de majoration de durée d’assurance ou de bonification accordés à l’assuré au même titre que ceux mentionnés au même avant-dernier alinéa par les autres régimes. » ;
a) Après le même I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – La condition d’âge prévue au premier alinéa du I est abaissée d’au moins un an, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés bénéficiaires d’un départ à la retraite au titre des II et IV. Cette condition d’âge est abaissée d’une durée pouvant aller jusqu’à neuf ans pour les assurés mentionnés au III. » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « un âge » sont remplacés par les mots : « un des quatre âges, dont le plus élevé ne peut excéder vingt et un ans, » et, après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 » ;
– la seconde phrase est complétée par les mots : « , ainsi que les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 » ;
– est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Ce décret prévoit également les conditions dans lesquelles sont réputées avoir donné lieu à versement de cotisations par l’assuré les périodes pendant lesquelles les fonctionnaires, les magistrats et les militaires vérifiaient les conditions d’affiliation à l’assurance vieillesse du régime général mentionnées aux mêmes articles L. 381-1 et L. 381-2, mais étaient affiliés à un régime spécial. » ;
c) Au premier alinéa du III, les mots : « tout ou partie de » sont supprimés ;
d) Il est ajouté un IV ainsi rédigé :
« IV. – La condition d’âge prévue au premier alinéa du I du présent article est abaissée, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés relevant des 2° et 3° de l’article L. 653-4. » ;
14° Au premier alinéa du 2° de l’article L. 653-4, les mots : « premier alinéa » sont remplacés par la référence : « IV » ;
14° bis Le même article L. 653-4 est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Des assurés dont l’âge mentionné au premier alinéa de l’article L. 653-2 est abaissé dans des conditions prévues au I bis du même article L. 653-2. » ;
15° Après les mots : « l’âge », la fin du dixième alinéa de l’article L. 821-1 est ainsi rédigée : « prévu à l’article L. 351-1-5. »
II. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Au troisième alinéa de l’article L. 117-3, la référence : « L. 161-17-2 » est remplacée par la référence : « L. 351-1-5 » ;
2° Au deuxième alinéa du I de l’article L. 262-10, les mots : « au premier alinéa de l’article L. 351-1 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 351-1-5 ».
III. – Le code des pensions civiles et militaires de retraite est ainsi modifié :
1° A Après le septième alinéa du I de l’article L. 14, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le coefficient de minoration n’est pas applicable aux assurés dont l’âge mentionné au premier alinéa du 1° du I de l’article L. 24 du présent code est abaissé dans les conditions prévues à l’article L. 25 bis. » ;
1° B Le même article L. 14 est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – Pour les assurés qui bénéficient d’au moins un trimestre de majoration de durée d’assurance ou de bonification au titre des b et b bis de l’article L. 12 ou des articles L. 12 bis ou L. 12 ter, la durée d’assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré, accomplie l’année précédant l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale, lorsque celui-ci est égal ou supérieur à soixante-trois ans, et au-delà de la limite mentionnée au premier alinéa du I de l’article L. 13 du présent code ouvre droit à une majoration de pension dans les mêmes conditions que celles prévues au III du présent article.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles le présent article s’applique aux assurés affiliés à plusieurs régimes légaux ou rendus légalement obligatoires d’assurance vieillesse, afin que soient pris en compte, pour le bénéfice de la majoration de pension mentionnée au premier alinéa du présent IV, des trimestres de majoration de durée d’assurance ou de bonification accordés à l’assuré au même titre que ceux mentionnés au même premier alinéa par les autres régimes. » ;
1° Le 5° du I de l’article L. 24 est ainsi modifié :
a) Les mots : « , par rapport à un âge de référence de soixante ans » sont remplacés par les mots : « d’une durée pouvant aller jusqu’à neuf ans, par rapport à l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale » ;
b) Les mots : « tout ou partie de » sont supprimés ;
2° L’article L. 25 bis est ainsi modifié :
a) La première phrase est ainsi modifiée :
– après le mot : « abaissé », sont insérés les mots : « d’au moins un an » ;
– les mots : « un âge et dans des conditions déterminés » sont remplacés par les mots : « un des quatre âges, dont le plus élevé ne peut excéder vingt et un ans, et dans des conditions déterminés » ;
– après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « , qui ne peut être supérieure à la durée de services et bonifications requise pour obtenir le pourcentage maximum de la pension mentionné à l’article L. 13 » ;
b) La seconde phrase est ainsi modifiée :
– après le mot : « temporaire », sont insérés les mots : « ainsi qu’en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 du code de la sécurité sociale et les périodes pendant lesquelles les fonctionnaires, les magistrats et les militaires vérifiaient les conditions d’affiliation à l’assurance vieillesse du régime général mentionnées aux mêmes articles L. 381-1 et L. 381-2, mais étaient affiliés à un régime spécial » ;
– sont ajoutés les mots : « à la charge de l’assuré ».
IV. – Le livre VII du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Au début de la section 3 du chapitre II du titre III, il est ajouté un article L. 732-17-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 732-17-1. – La condition d’âge prévue à l’article L. 732-18 est abaissée d’au moins un an, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés mentionnés à l’article L. 732-29 et pour les assurés bénéficiaires d’un départ à la retraite au titre des articles L. 732-18-1 et L. 732-18-4. Cette condition d’âge est abaissée d’une durée pouvant aller jusqu’à neuf ans pour les assurés mentionnés à l’article L. 732-18-2 et d’une durée ne pouvant excéder deux ans pour les assurés mentionnés à l’article L. 351-6-1 du code de la sécurité sociale. » ;
2° L’article L. 732-18-1 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « un âge » sont remplacés par les mots : « un des quatre âges, dont le plus élevé ne peut excéder vingt et un ans, », le mot : « déterminées » est remplacé par le mot : « déterminés » et, après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « , qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 161-17-3 du code de la sécurité sociale » ;
b) La dernière phrase est ainsi modifiée :
– après le mot : « cotisations », sont insérés les mots : « à la charge de l’assuré » ;
– sont ajoutés les mots : « , ainsi que les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 du même code et les périodes pendant lesquelles les fonctionnaires, magistrats et militaires vérifiaient les conditions d’affiliation à l’assurance vieillesse du régime général mentionnées aux mêmes articles L. 381-1 et L. 381-2, mais étaient affiliés à un régime spécial » ;
3° Au premier alinéa de l’article L. 732-18-2, les mots : « tout ou partie de » sont supprimés ;
4° Après l’article L. 732-18-3, il est inséré un article L. 732-18-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 732-18-4. – La condition d’âge prévue à l’article L. 732-18 est abaissée, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés reconnus inaptes au travail dans les conditions prévues à l’article L. 351-7 du code de la sécurité sociale et pour ceux justifiant d’une incapacité permanente au moins égale à un taux fixé par décret. » ;
5° L’article L. 732-23 est ainsi rédigé :
« Art. L. 732-23. – Les anciens prisonniers de guerre bénéficient d’une pension à un âge variant suivant la durée de captivité, dans des conditions fixées par décret.
« Les anciens prisonniers de guerre évadés de guerre, au-delà d’un certain temps de captivité, et les anciens prisonniers rapatriés pour maladie peuvent choisir le régime le plus favorable.
« Aucune partie de mois n’est prise en considération.
« Les trois premiers alinéas s’appliquent à tous les anciens combattants pour leur durée de service actif passé sous les drapeaux. » ;
6° À la fin de la seconde phrase des articles L. 732-25 et L. 781-33, les mots : « de l’article L. 732-23 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 732-18-2 et L. 732-18-4 du présent code, ni aux assurés mentionnés aux 3°, 4° bis et 5° de l’article L. 351-8 du code de la sécurité sociale, dans des conditions fixées par décret » ;
6° bis Les mêmes articles L. 732-25 et L. 781-33 sont complétés par une phrase ainsi rédigée : « Le coefficient de minoration n’est pas applicable aux assurés dont l’âge mentionné à l’article L. 732-18 est abaissé dans les conditions prévues à l’article L. 732-18-1. » ;
6° ter Après l’article L. 732-25-1, il est inséré un article L. 732-25-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 732-25-2. – Pour les assurés qui bénéficient d’au moins un trimestre de majoration de durée d’assurance au titre des articles L. 351-4 ou L. 351-4-1 du code de la sécurité sociale étendues au régime d’assurance vieillesse des non-salariés des professions agricoles en application de l’article L. 732-38 du présent code, la durée d’assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge du chef d’exploitation ou d’entreprise agricole ou de l’assuré, accomplie l’année précédant l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale, lorsque celui-ci est égal ou supérieur à soixante-trois ans, et au-delà de la durée minimale mentionnée à l’article L. 732-25 du présent code ouvre droit à une majoration de pension dans les mêmes conditions que celles prévues au premier alinéa de l’article L. 732-25-1, sous réserve de l’application du second alinéa du même article L. 732-25-1.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles le présent article s’applique aux assurés affiliés à plusieurs régimes légaux ou rendus légalement obligatoires d’assurance vieillesse, afin que soient pris en compte, pour le bénéfice de la majoration de pension mentionnée au premier alinéa du présent article, des trimestres de majoration de durée d’assurance ou de bonification accordés à l’assuré au même titre que ceux mentionnés au même premier alinéa par les autres régimes. » ;
7° À la première phrase du I et à la fin du II de l’article L. 732-30, la référence : « L. 732-18 » est remplacée par la référence : « L. 732-18-4 ».
V. – Le 3° de l’article L. 5421-4 du code du travail est ainsi modifié :
1° La référence : « , L. 351-1-4 » est remplacée par les mots : « à L. 351-1-5 » ;
2° La référence : « L. 723-10-1 » est remplacée par la référence : « L. 653-2 » ;
3° La référence : « L. 732-18-3 » est remplacée par la référence : « L. 732-18-4 ».
V bis. – À la seconde phrase du premier alinéa de l’article 12 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte, la référence : « 1° ter » est remplacée par la référence : « 2° ».
VI. – A. – Le III s’applique aux fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ainsi qu’aux ouvriers régis par le régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État.
B. – Le présent article s’applique aux pensions prenant effet à compter du 1er septembre 2023.
VII. – La perte de recettes résultant pour l’État du 5° du I du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
VIII. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du 5° du I du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Article 8 bis
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le V de l’article L. 351-4 est ainsi modifié :
a) À la fin, les mots : « par une décision de justice au cours des quatre premières années de l’enfant » sont remplacés par les mots : « dans les cas suivants : » ;
b) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« 1° Par une décision de justice au cours des quatre premières années de l’enfant ;
« 2° Sur décision du juge pénal, à la suite d’une condamnation pénale au titre des crimes ou délits prévus à la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du code pénal ou aux paragraphes 1 et 2 des sections 1 et 3 du chapitre II du même titre II, lorsque ces crimes ou délits ont été commis à l’encontre de l’enfant.
« Lorsque les trimestres de majoration ont été répartis conformément au II, les trimestres attribués au parent condamné dont la pension n’a pas encore été liquidée sont attribués à l’autre parent, sous réserve que ce dernier n’ait pas fait l’objet d’une condamnation dans les mêmes conditions. » ;
2° L’article L. 351-12 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sur décision du juge pénal, l’assuré ne peut bénéficier de la majoration prévue au premier alinéa du présent article s’il a été privé de l’exercice de l’autorité parentale ou s’est vu retirer l’autorité parentale consécutivement à une condamnation pénale au titre des crimes ou délits prévus à la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du code pénal ou aux paragraphes 1 et 2 des sections 1 et 3 du chapitre II du même titre II, lorsque ces crimes ou délits ont été commis à l’encontre d’un des enfants. »
II. – L’article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite est complété par un VI ainsi rédigé :
« VI. – Sur décision du juge pénal, le titulaire ne peut bénéficier de la majoration prévue au I du présent article s’il a été privé de l’exercice de l’autorité parentale ou s’est vu retirer l’autorité parentale consécutivement à une condamnation pénale au titre des crimes ou délits prévus à la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du code pénal ou aux paragraphes 1 et 2 des sections 1 et 3 du chapitre II du même titre II, lorsque ces crimes ou délits ont été commis à l’encontre d’un des enfants. »
III. – Le présent article est applicable aux privations et aux retraits de l’exercice de l’autorité parentale prenant effet à compter du 1er septembre 2023.
Article 8 ter
Le deuxième alinéa du II de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le bénéfice de cette majoration en faveur de la mère assurée sociale ne peut être inférieur à deux trimestres. »
Articles 8 quater et 8 quinquies
(Supprimés)
Article 8 sexies
Après la deuxième phrase du deuxième alinéa du III de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le bénéfice de cette majoration en faveur de la mère assurée sociale ne peut être inférieur à deux trimestres. »
Articles 8 septies et 8 octies
(Supprimés)
Article 8 nonies
Le VI de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au premier alinéa du présent VI, en cas de décès de l’enfant avant la fin de la quatrième année suivant sa naissance ou son adoption, la majoration est égale à quatre trimestres.
« Sur décision du juge pénal, en cas de condamnation définitive d’une personne pour meurtre dans les situations prévues aux 1°, 3° et 4° ter de l’article 221-4 du code pénal lorsque la victime est l’enfant ouvrant droit à la majoration prévue au II du présent article, la personne condamnée ne peut bénéficier de cette majoration. »
Article 8 decies
Au premier alinéa du III de l’article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les mots : « par faits de guerre » sont supprimés.
Article 9
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 221-1-4, il est inséré un article L. 221-1-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 221-1-5. – I. – Est créé, au sein de la Caisse nationale de l’assurance maladie mentionnée à l’article L. 221-1, un fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle placé auprès de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles mentionnée à l’article L. 221-5. Le montant de la dotation de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles du régime général au fonds est fixé chaque année par arrêté.
« II. – Le fonds a pour mission de participer au financement par les employeurs d’actions de sensibilisation et de prévention, d’actions de formation mentionnées à l’article L. 6323-6 du code du travail et d’actions de reconversion et de prévention de la désinsertion professionnelle à destination des salariés particulièrement exposés aux facteurs de risques professionnels mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 du même code.
« III. – Les orientations du fonds, qui encadrent l’attribution de ses financements dans les conditions prévues au IV du présent article, sont définies par la commission mentionnée à l’article L. 221-5 après avis de la formation compétente du Conseil d’orientation des conditions de travail. Elles se fondent sur une cartographie des métiers et des activités particulièrement exposés aux facteurs de risques professionnels mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 du code du travail, qui s’appuie sur les listes établies, le cas échéant, par les branches professionnelles, en application de l’article L. 4163-2-1 du même code. La commission établit cette cartographie, notamment pour les secteurs dans lesquels les branches n’ont pas conclu d’accord mentionné au même article L. 4163-2-1, en se fondant sur les données disponibles relatives à la sinistralité et aux expositions professionnelles. La commission peut, dans ce cadre, être assistée d’un comité d’experts, dont le fonctionnement et la composition sont définis par décret.
« IV. – Le fonds peut financer :
« 1° Des entreprises, notamment celles identifiées par les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail mentionnées à l’article L. 215-1 du présent code, en vue de soutenir leurs démarches de prévention des effets de l’exposition aux facteurs de risques mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 du code du travail et leurs actions de formation en faveur des salariés exposés à ces facteurs ;
« 2° Des organismes de branche mentionnés à l’article L. 4643-1 du même code et ayant conclu une convention avec la Caisse nationale de l’assurance maladie mentionnée à l’article L. 221-1 du présent code dans des conditions définies par voie réglementaire. Ces organismes peuvent faire appel à des organismes nationaux de prévention des risques professionnels ;
« 3° L’institution nationale mentionnée à l’article L. 6123-5 du code du travail, qui répartit la dotation ainsi reçue, dans les conditions prévues au 5° du même article L. 6123-5, entre les commissions paritaires interprofessionnelles régionales mentionnées à l’article L. 6323-17-6 du même code, pour le financement de projets de transition professionnelle.
« V. – Le fonctionnement de ce fonds, les conditions de sa participation au financement des actions mentionnées au II du présent article, les modalités d’identification des métiers et des activités exposant aux facteurs de risques professionnels mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 du code du travail ainsi que les modalités de gestion et d’affectation de ses ressources sont précisés par décret en Conseil d’État. » ;
2° L’article L. 351-1-4 est ainsi modifié :
aa) Au I, les mots : « , dans des conditions fixées par décret, » sont remplacés par les mots : « à soixante ans » ;
a) (Supprimé)
b) Le premier alinéa du III est ainsi rédigé :
« III. – Lorsque l’assuré justifie d’une incapacité permanente d’un taux inférieur à celui mentionné au I du présent article et que cette incapacité est reconnue au titre d’une maladie professionnelle mentionnée à l’article L. 461-1 ou au titre d’un accident de travail mentionné à l’article L. 411-1, la condition d’âge prévue au premier alinéa de l’article L. 351-1 est abaissée de deux ans et le II du présent article s’applique, sous réserve : » ;
3° Le premier alinéa du II de l’article L. 351-6-1 est complété par les mots : « et pour la détermination de la durée d’assurance mentionnée au troisième alinéa du même article L. 351-1 » ;
4° L’article L. 434-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les victimes titulaires d’une rente sont informées, selon des modalités prévues par décret, des dispositions prévues à l’article L. 351-1-4 avant un âge fixé par décret. »
II. – L’article L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Au I, les mots : « , dans les conditions fixées par décret, » sont remplacés par les mots : « à soixante ans » ;
2° Le premier alinéa du III est ainsi rédigé :
« III. – Lorsque l’assuré justifie d’une incapacité permanente d’un taux inférieur à celui mentionné au I du présent article et que cette incapacité est reconnue au titre d’une maladie professionnelle mentionnée au second alinéa de l’article L. 752-2 ou au titre d’un accident de travail mentionné au premier alinéa du même article L. 752-2, la condition d’âge prévue à l’article L. 732-18 est abaissée de deux ans et le II du présent article s’applique, sous réserve : ».
III. – A. – La quatrième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° Au premier alinéa du I de l’article L. 4162-1, la référence : « L. 2133-1 » est remplacée par la référence : « L. 2331-1 » ;
2° Après l’article L. 4163-2, il est inséré un article L. 4163-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4163-2-1. – Dans le cadre d’accords, les branches professionnelles peuvent établir des listes de métiers ou d’activités particulièrement exposés aux facteurs de risques professionnels mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1, en vue de l’application de l’article L. 221-1-5 du code de la sécurité sociale. » ;
3° La seconde phrase du dernier alinéa de l’article L. 4163-5 est ainsi rédigée : « Il définit le nombre de points auxquels ouvrent droit les expositions simultanées à plusieurs facteurs de risques professionnels, en fonction du nombre de facteurs auxquels le salarié est exposé. » ;
4° L’article L. 4163-7 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– au premier alinéa, le mot : « trois » est supprimé ;
– il est ajouté un 4° ainsi rédigé :
« 4° Le financement des frais afférents à une ou plusieurs actions mentionnées aux 1°, 2° ou 3° de l’article L. 6313-1 dans le cadre d’un projet de reconversion professionnelle et, le cas échéant, le financement de sa rémunération pendant un congé de reconversion professionnelle, lorsqu’il suit cette action de formation en tout ou partie durant son temps de travail, en vue d’accéder à un emploi non exposé aux facteurs de risques professionnels mentionnés au I de l’article L. 4163-1. » ;
a bis) Le II est ainsi modifié :
– après le mot : « compte », la fin de la première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « pour les utilisations mentionnées aux 2° et 4° du I et, que celui-ci soit salarié ou demandeur d’emploi, pour la prise en charge d’une ou de plusieurs actions de formation professionnelle dans le cadre des utilisations mentionnées aux 1° et 4° du même I. » ;
– au second alinéa, les mots : « et 2° » sont remplacés par les mots : « , 2° et 4° » ;
b) Après le même II, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
« II bis. – L’organisme gestionnaire mentionné à l’article L. 4163-14 communique sur le dispositif à l’égard des employeurs mentionnés à l’article L. 4163-4 et des bénéficiaires du compte professionnel de prévention. » ;
c) (nouveau) Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret fixe le plafond du nombre de points pouvant être affectés à l’utilisation prévue au 2° du même I par le salarié qui n’a pas atteint son soixantième anniversaire. » ;
5° Après la sous-section 1 de la section 3 du chapitre III du titre VI du livre Ier, est insérée une sous-section 1 bis ainsi rédigée :
« Sous-section 1 bis
« Utilisation du compte pour un projet de reconversion professionnelle
« Art. L. 4163-8-1. – Lorsque le titulaire du compte professionnel de prévention décide de mobiliser tout ou partie des points inscrits sur le compte pour l’utilisation mentionnée au 4° du I de l’article L. 4163-7, ces points sont convertis en euros :
« 1° Pour abonder son compte personnel de formation afin de financer les coûts pédagogiques afférents à son projet de reconversion professionnelle ;
« 2° Le cas échéant, pour assurer sa rémunération pendant un congé de reconversion professionnelle mentionné à l’article L. 4163-8-4.
« Art. L. 4163-8-2. – Le projet de reconversion professionnelle mentionné au 4° du I de l’article L. 4163-7 fait l’objet d’un accompagnement par l’un des opérateurs financés par l’institution mentionnée à l’article L. 6123-5 au titre du conseil en évolution professionnelle mentionné à l’article L. 6111-6. Cet opérateur informe, oriente le salarié et l’aide à formaliser son projet.
« Art. L. 4163-8-3. – Les commissions paritaires interprofessionnelles régionales mentionnées à l’article L. 6323-17-6 assurent l’instruction et la prise en charge administrative et financière des projets de reconversion professionnelle, dans des conditions fixées par décret.
« Art. L. 4163-8-4. – Le salarié titulaire du compte professionnel de prévention peut demander un congé de reconversion professionnelle à son employeur, dans des conditions précisées par décret, afin de suivre tout ou partie des actions de formation incluses dans son projet de reconversion professionnelle.
« Art. L. 4163-8-5. – La durée du congé de reconversion professionnelle est assimilée à une période de travail effectif pour la détermination des droits que le salarié tient de son ancienneté. Le salarié conserve le bénéfice de tous les avantages qu’il avait acquis avant le début du congé. » ;
5° bis (Supprimé)
6° Au deuxième alinéa de l’article L. 4163-15, les mots : « , 2° et 3° » sont remplacés par les mots : « à 4° » ;
7° Après l’article L. 4624-2-1, il est inséré un article L. 4624-2-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4624-2-1-1. – Les salariés exerçant ou ayant exercé, pendant une durée définie par voie réglementaire, des métiers ou des activités particulièrement exposés aux facteurs de risques professionnels mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 bénéficient d’un suivi individuel spécifique défini comme suit :
« 1° À l’occasion de la visite de mi-carrière prévue à l’article L. 4624-2-2, le professionnel de santé au travail apprécie l’état de santé du salarié et relève, le cas échéant, ses altérations. En fonction de son diagnostic, il peut proposer des mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou des mesures d’aménagement du temps de travail, dans les conditions prévues à l’article L. 4624-3. Il peut également orienter le salarié, le cas échéant, vers la cellule pluridisciplinaire de prévention de la désinsertion professionnelle prévue à l’article L. 4622-8-1. Il informe le salarié des modalités d’accès au conseil en évolution professionnelle ;
« 2° Le diagnostic mentionné au 1° du présent article est intégré au dossier médical en santé au travail du salarié mentionné à l’article L. 4624-8 et prévoit, si le professionnel de santé au travail l’estime nécessaire, de réévaluer les modalités du suivi individuel de son état de santé ;
« 3° Une visite médicale est organisée entre le soixantième et le soixante et unième anniversaire du salarié. À cette occasion, si l’état de santé du salarié le justifie, le professionnel de santé au travail informe celui-ci de la possibilité d’être reconnu inapte au travail dans les conditions prévues à l’article L. 351-7 du code de la sécurité sociale et transmet, le cas échéant, un avis favorable au médecin-conseil. Cette visite tient lieu de visite médicale au titre du suivi individuel du salarié. Le professionnel de santé au travail peut orienter le salarié vers le rendez-vous de prévention prévu à l’article L. 1411-6-2 du code de la santé publique ;
« 4° (nouveau) Tout au long de ce suivi, le professionnel de santé au travail ou la cellule de prévention de la désinsertion professionnelle peuvent orienter le salarié vers les dispositifs prévus aux 1° et 2° de l’article L. 323-3-1 du code de la sécurité sociale et vers le dispositif mentionné à l’article L. 6323-17-1 du présent code.
« Un décret en Conseil d’État définit les conditions d’application du présent article. »
B. – La sixième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° Au 5° de l’article L. 6123-5, après la référence : « L. 6323-17-1 », sont insérés les mots : « et de projets de reconversion professionnelle mentionnés au 4° du I de l’article L. 4163-7 » ;
2° L’article L. 6323-17-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le projet de transition professionnelle d’un salarié concerné par les facteurs de risques professionnels mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 peut être financé par la dotation versée par France compétences aux commissions paritaires interprofessionnelles régionales en application du 3° du IV de l’article L. 221-1-5 du code de la sécurité sociale, en vue de permettre au salarié d’accéder à un emploi non exposé aux facteurs de risques professionnels mentionnés à l’article L. 4161-1 du présent code, lorsque le projet de transition professionnelle du salarié fait l’objet d’un cofinancement assuré par son employeur, dans des conditions fixées par décret. » ;
3° Le I de l’article L. 6323-17-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour bénéficier du projet de transition professionnelle dans le cadre des interventions du fonds mentionné à l’article L. 221-1-5 du code de la sécurité sociale, le salarié doit justifier d’une durée minimale d’activité professionnelle dans un métier concerné par les facteurs de risques professionnels mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 du présent code. Cette durée minimale d’activité, déterminée par décret, n’est pas exigée pour le salarié mentionné à l’article L. 5212-13. »
C. – Pour l’application de l’article L. 4624-2-1-1 du code du travail, les salariés ayant atteint au 1er septembre 2023 un âge supérieur à l’âge prévu à l’article L. 4624-2-2 du même code pour effectuer la visite médicale de mi-carrière bénéficient de l’examen prévu au 1° de l’article L. 4624-2-1-1 dudit code à l’occasion de leur premier examen réalisé après le 1er septembre 2023. Les 2° et 3° du même article L. 4624-2-1-1 leur sont applicables à l’issue de cet examen.
IV. – Au IV de l’article 109 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023, le nombre : « 128,4 » est remplacé par le nombre : « 150,2 » et le nombre : « 9 » est remplacé par le nombre : « 9,7 ».
V. – Les branches professionnelles engagent, dans les deux mois suivant la promulgation de la présente loi, une négociation en vue d’aboutir à l’établissement des listes de métiers ou d’activités particulièrement exposés aux facteurs de risques professionnels mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 du code du travail dans les conditions prévues à l’article L. 4163-2-1 du même code. Pour les dépenses engagées en 2023, le fonds établit ses orientations mentionnées à l’article L. 221-1-5 du code de la sécurité sociale en se fondant sur les données disponibles relatives à la sinistralité et aux expositions professionnelles.
VI. – A. – Il est créé, au sein de la Caisse nationale de l’assurance maladie, un fonds pour la prévention de l’usure professionnelle, destiné à soutenir les employeurs, d’une part, des établissements et des services mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 5 du code général de la fonction publique et, d’autre part, des établissements publics locaux et des établissements, dotés ou non de la personnalité morale, créés ou gérés par des personnes morales de droit public autres que l’État et ses établissements publics, accueillant des personnes en situation de handicap, des personnes confrontées à des difficultés spécifiques ou des personnes âgées, qui proposent des prestations de soins et dont le financement relève des objectifs de dépenses mentionnés au I de l’article L. 314-3 du code de l’action sociale et des familles et à l’article L. 314-3-2 du même code.
B. – Le fonds concourt au financement :
1° Des actions de sensibilisation et de prévention de l’usure professionnelle par les établissements et services mentionnés au A du présent VI ;
2° Des dispositifs d’organisation du travail permettant l’aménagement des fins de carrière au sein des établissements et des services mentionnés au même A qui sont particulièrement exposés à des facteurs d’usure professionnelle.
La nature des actions mentionnées au 1° du présent B, la nature des dispositifs mentionnés au 2° et l’éligibilité à ces dispositifs ainsi que les conditions dans lesquelles l’employeur apprécie ladite éligibilité sont définies par décret.
C. – Le fonds est alimenté par une dotation des régimes obligatoires de base d’assurance maladie dont le montant est fixé chaque année par arrêté des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et des comptes publics.
D. – Les modalités d’application du présent VI, notamment celles de la gouvernance de ce fonds, sont précisées par décret.
TITRE II
RENFORCER LA SOLIDARITÉ DE NOTRE SYSTÈME DE RETRAITE
Article 10
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 114-4 est ainsi modifié :
a) Après le 3° du II, il est inséré un 4° ainsi rédigé :
« 4° Examinant si le montant de la majoration prévue au premier alinéa de l’article L. 351-10 permet aux assurés mentionnés aux articles L. 311-2 et L. 631-1 du présent code et à l’article L. 722-20 du code rural et de la pêche maritime ayant travaillé à temps complet avec un revenu équivalent au salaire minimum de croissance et justifiant d’une durée d’assurance cotisée, tant au régime général que dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, identique à la durée d’assurance nécessaire pour bénéficier d’une pension à taux plein de se voir servir par les régimes légaux ou rendus légalement obligatoires, de base et complémentaires, lors de la liquidation de leur pension, un montant brut mensuel total des pensions de vieillesse de droit personnel au moins égal à 85 % du montant mensuel du salaire minimum de croissance net des cotisations et contributions sociales obligatoires d’origine légale ou conventionnelle. » ;
b) Le III est complété par un 6° ainsi rédigé :
« 6° Les mesures permettant d’atteindre l’objectif mentionné au 4° du II. » ;
2° L’article L. 351-10 est ainsi modifié :
a) Après la première occurrence du mot : « assuré », la fin de la seconde phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « et, dans la limite d’un plafond fixé par décret, des périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 ou des périodes pendant lesquelles les fonctionnaires, magistrats et militaires vérifiaient les conditions d’affiliation à l’assurance vieillesse du régime général mentionnées aux mêmes articles L. 381-1 et L. 381-2 mais étaient affiliés à un régime spécial, lorsque la durée d’assurance correspondant à ces périodes accomplies, tant dans le régime général que dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, est au moins égale à un seuil déterminé par décret. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant du minimum prévu à la première phrase du premier alinéa du présent article et celui du minimum majoré prévu à la seconde phrase du même premier alinéa sont revalorisés, au 1er janvier de chaque année, d’un taux au moins égal à l’évolution, depuis le 1er janvier précédent, du salaire minimum de croissance mentionné à l’article L. 3231-2 du code du travail. » ;
2° bis Le titre V du livre III est complété par un chapitre VIII ainsi rédigé :
« CHAPITRE VIII
« Pension d’orphelin
« Art. L. 358-1. – En cas de décès, de disparition ayant entraîné une déclaration judiciaire de décès en application de l’article 88 du code civil ou d’absence, définie aux articles 112 et 122 du même code, de l’ensemble des personnes avec lesquelles il entretient un lien de filiation au sens des articles 310-1, 356 et 358 dudit code, l’orphelin a droit à une pension pour chaque assuré décédé, disparu ou absent.
« La pension d’orphelin est égale à un pourcentage fixé par décret de la pension principale dont bénéficiait ou aurait bénéficié chaque assuré décédé, disparu ou absent au régime général. Lorsque l’assuré concerné n’a pas liquidé sa pension au régime général, les modalités de son calcul sont précisées par décret.
« Art. L. 358-2. – La somme des pensions d’orphelin versées en application de l’article L. 358-1 au titre d’un assuré décédé, disparu ou absent ne peut excéder la pension principale dont bénéficiait ou aurait bénéficié cet assuré au régime général. Le cas échéant, la pension principale est répartie à parts égales entre les orphelins ayant demandé à bénéficier de la prestation.
« En cas d’ouverture d’un droit pour un nouveau bénéficiaire, le montant des pensions d’orphelin des autres bénéficiaires est révisé.
« Art. L. 358-3. – Sans préjudice du premier alinéa de l’article L. 358-2, la pension d’orphelin ne peut être inférieure à un montant minimal fixé par décret.
« Art. L. 358-4. – La pension est versée sur le compte de dépôt, mentionné à l’article L. 312-1 du code monétaire et financier, personnel de l’orphelin.
« Art. L. 358-5. – La pension d’orphelin est due jusqu’à un âge prévu par décret. Cet âge est majoré d’un nombre d’années déterminé par décret si les revenus d’activité du bénéficiaire n’excèdent pas un plafond, dans des conditions prévues par décret.
« La pension d’orphelin est due sans condition d’âge aux bénéficiaires qui, à l’âge prévu à la première phrase du premier alinéa du présent article, justifient d’une incapacité permanente au moins égale au pourcentage prévu au premier alinéa de l’article L. 821-1, sous réserve que leurs revenus d’activité, prévus au premier alinéa du présent article, n’excèdent pas le plafond mentionné au même premier alinéa.
« Art. L. 358-6. – La pension prend définitivement fin :
« 1° En cas d’adoption plénière de l’orphelin ou lorsque le parent absent ou disparu reparaît au lieu de son domicile ;
« 2° Lorsque la condition de revenus mentionnée à l’article L. 358-5 n’est plus remplie.
« Art. L. 358-7. – I. – Le bénéficiaire de la pension d’orphelin est tenu de déclarer à l’organisme qui lui sert cette pension tout changement survenu dans ses liens de filiation et, à compter de l’âge mentionné à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 358-5, tout changement survenu dans ses revenus d’activité. Lorsque le bénéficiaire de la pension d’orphelin justifie de l’incapacité permanente prévue au second alinéa du même article L. 358-5, il est tenu de déclarer au même organisme tout changement au regard de cette incapacité.
« II. – Lorsque le bénéficiaire de la pension d’orphelin est un mineur non émancipé, les déclarations prévues au I du présent article sont effectuées par ses tuteurs. » ;
2° ter Le second alinéa de l’article L. 815-1 est complété par les mots : « , sa durée ne pouvant être inférieure à neuf mois par année civile » ;
3° Le deuxième alinéa de l’article L. 815-13 est ainsi modifié :
a) À la fin de la première phrase, les mots : « par décret » sont remplacés par les mots : « à 100 000 euros au 1er septembre 2023 et revalorisé dans les mêmes conditions que celles prévues au même article L. 816-2 » ;
b) À la seconde phrase, le montant : « 100 000 euros » est remplacé par le montant : « 150 000 .euros » et, à la fin, l’année : « 2026 » est remplacée par l’année : « 2029 ».
II. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Au 3° de l’article L. 731-3, le taux : « 26,67 % » est remplacé par le taux : « 26,02 % » ;
1° bis La seconde phrase du second alinéa de l’article L. 732-54-2 est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Le montant minimum est revalorisé, au 1er janvier de chaque année, d’un taux au moins égal à l’évolution, depuis le 1er janvier précédent, du salaire minimum de croissance mentionné à l’article L. 3231-2 du code du travail. La majoration de pension servie à l’assuré est revalorisée dans les conditions prévues à l’article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale. » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 732-54-3, après la première occurrence du mot : « est », sont insérés les mots : « fixé par décret et est au moins » ;
2° bis À la fin du troisième alinéa du même article L. 732-54-3, les mots : « les conditions prévues à l’article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale » sont remplacés par les mots : « des conditions fixées par décret » ;
3° L’article L. 732-56 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du 2° du II, les mots : « et qui justifient, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, d’une durée d’assurance ou de périodes reconnues équivalentes au moins égale à celle requise par l’article L. 732-25 pour ouvrir droit à une pension à taux plein du régime d’assurance vieillesse des professions non salariées agricoles, et » sont remplacés par les mots : « , qui ont liquidé leur pension à taux plein dans le régime d’assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles et qui justifient » ;
b) Au 2° du V, les mots : « et qui justifient, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, d’une durée d’assurance, ou de périodes reconnues équivalentes, au moins égale à la durée requise par l’article L. 732-25 pour ouvrir droit à une pension à taux plein du régime d’assurance vieillesse des professions non salariées agricoles et » sont remplacés par les mots : « , qui ont liquidé leur pension à taux plein dans le régime d’assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles et qui justifient » ;
c) Au VI, les mots : « de durée d’assurance » sont supprimés ;
4° L’article L. 732-58 est ainsi modifié :
a) Au troisième alinéa, le taux : « 26,73 % » est remplacé par le taux : « 27,38 % » ;
b) Après le même troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« – par les contributions et les subventions de l’État. » ;
c) Le cinquième alinéa est supprimé ;
5° À la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article L. 732-60, les mots : « à la date du 1er janvier 2003 au compte des personnes visées au II de l’article L. 732-56, à la date d’effet de la retraite au compte des personnes visées au III de l’article L. 732-56, à la date du 1er février 2014 au compte des personnes mentionnées au V du même article, à la date d’effet de la retraite au compte des personnes mentionnées au VI dudit article, » sont remplacés par les mots : « au compte des personnes mentionnées aux II, III, V et VI de l’article L. 732-56 » et les mots : « II, III, V et VI du même article » sont remplacés par les mots : « mêmes II, III, V et VI » ;
6° Au 2° du I de l’article L. 732-63, les mots : « et qui justifient, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, d’une durée d’assurance ou de périodes reconnues équivalentes au moins égale à la durée requise par l’article L. 732-25, dans sa rédaction en vigueur à la date de liquidation de la pension de retraite, pour ouvrir droit à une pension à taux plein du régime d’assurance vieillesse de base des personnes non salariées des professions agricoles et » sont remplacés par les mots : « , qui liquident leur pension à taux plein dans le régime d’assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles et qui justifient » ;
7° Au début du premier alinéa de l’article L. 781-40, les mots : « Pour l’application de l’article L. 732-56, la référence à l’article L. 781-33 est substituée à la référence à l’article L. 732-25 et » sont supprimés.
II bis. – Le dernier alinéa de l’article L. 17 du code des pensions civiles et militaires de retraite est ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 du code de la sécurité sociale ou les périodes pendant lesquelles les fonctionnaires, magistrats et militaires vérifiaient les conditions d’affiliation obligatoire à l’assurance vieillesse du régime général mentionnées aux mêmes articles L. 381-1 et L. 381-2 mais étaient affiliés à un régime spécial sont considérées comme des périodes de services effectifs pour l’application du présent article. »
III. – Les montants des majorations prévues aux première et seconde phrases du premier alinéa de l’article L. 351-10 du code de la sécurité sociale et à l’article L. 732-54-1 du code rural et de la pêche maritime sont augmentés par décret pour les pensions de retraite prenant effet à compter du 1er septembre 2023.
Le montant du seuil prévu au premier alinéa de l’article L. 815-12 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004 simplifiant le minimum vieillesse, est revalorisé dans les conditions prévues à l’article L. 816-2 du code de la sécurité sociale.
IV. – Les pensions de vieillesse personnelles de base du régime général de sécurité sociale, y compris les pensions servies aux personnes relevant, à la date de prise d’effet de leur pension, d’un régime ultérieurement intégré au régime général, ainsi que les pensions du régime des salariés agricoles ayant pris effet avant le 31 août 2023 sont assorties d’une majoration, dont le montant est défini par décret, lorsque les deux conditions suivantes sont remplies :
1° La pension a été liquidée à taux plein ;
2° La durée totale des périodes ayant donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré tant dans les régimes mentionnés au premier alinéa du présent IV que dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires de base est supérieure ou égale à une durée fixée par décret.
Cette majoration est versée intégralement lorsque la durée totale des périodes ayant donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré dans le régime concerné est supérieure ou égale à la limite prévue au troisième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale applicable à l’assuré. Lorsque cette durée totale est inférieure à cette limite, le montant de la majoration est réduit à due concurrence.
La somme de la pension du régime de base concerné et de la majoration calculée en application du quatrième alinéa du présent IV ne peut pas excéder un plafond fixé par décret et réduit, le cas échéant, en fonction du nombre de trimestres d’assurance validés par l’assuré dans le régime concerné, rapporté à la limite prévue au troisième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale et applicable à l’assuré. En cas de dépassement de ce plafond, la majoration est réduite à due concurrence du dépassement.
La majoration est versée sous réserve que le montant mensuel des pensions personnelles de retraite attribuées au titre d’un ou de plusieurs régimes légaux ou rendus légalement obligatoires, de base et complémentaires, incluant cette majoration, n’excède pas le montant prévu à l’article L. 173-2 du même code. En cas de dépassement de ce plafond, la majoration est réduite à due concurrence du dépassement.
L’attribution de la majoration ne conduit pas à la révision du montant des majorations de pension mentionnées aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 351-10 dudit code dues à l’assuré.
La pension majorée en application des sept premiers alinéas du présent IV est ensuite revalorisée dans les conditions prévues à l’article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale.
La majoration prévue au présent IV est due à compter du 1er septembre 2023 et versée au plus tard en septembre 2024.
V. – Le 3° du I entre en vigueur le 1er septembre 2023.
Les 2° et 2° ter du I ainsi que les 1° bis, 2° et 2° bis du II s’appliquent aux pensions prenant effet à compter du 1er septembre 2023.
Le 2° bis du I s’applique aux décès, aux disparitions et aux absences survenus à compter du 1er septembre 2023.
Les 3° et 5° à 7° du II entrent en vigueur le 1er septembre 2023. Ces mêmes 3° et 5° à 7° s’appliquent également aux assurés dont la pension a pris effet avant cette date pour les pensions dues à compter de la même date.
Le 1° et le a du 4° du II entrent en vigueur le 1er janvier 2023.
Pour l’application du 6° du même II aux assurés dont les pensions ont pris effet avant le 1er septembre 2023, les montants du salaire minimum de croissance et des éléments de calcul du complément différentiel de points de retraite complémentaire obligatoire prévu à l’article L. 732-63 du code rural et de la pêche maritime sont ceux en vigueur au 1er septembre 2023.
Article 10 bis
I. – Les pensions de vieillesse servies par le régime mahorais, ayant pris effet avant le 31 août 2023, sont majorées à titre exceptionnel au 1er septembre 2023 d’un montant forfaitaire fixé par décret.
II. – Lorsqu’elles ont été liquidées à taux plein, les pensions de vieillesse personnelles servies par le régime mahorais ayant pris effet avant le 31 août 2023 sont assorties d’une majoration, dont le montant est défini par décret.
Cette majoration est versée intégralement lorsque la durée totale des périodes d’assurance validées par l’assuré dans le régime mahorais est supérieure ou égale à la durée minimale d’assurance prévue au premier alinéa de l’article 6 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte. Lorsque la durée totale des périodes validées par l’assuré dans le régime mahorais est inférieure à cette durée minimale, le montant de la majoration est réduit à due concurrence.
La somme de la pension du régime de base mahorais et de la majoration calculée en application du deuxième alinéa du présent II ne peut pas excéder un plafond fixé par décret. En cas de dépassement de ce plafond, la majoration est réduite à due concurrence du dépassement.
La majoration est versée sous réserve que le montant mensuel des pensions personnelles de retraite attribuées au titre d’un ou de plusieurs régimes légaux ou rendus légalement obligatoires, de base et complémentaires, incluant cette majoration, n’excède pas le montant prévu à l’article L. 173-2 du code de la sécurité sociale. En cas de dépassement de ce plafond, la majoration est réduite à due concurrence du dépassement.
La pension majorée en application des quatre premiers alinéas du présent II est ensuite revalorisée dans les conditions prévues à l’article 13 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 précitée.
La majoration prévue au présent II est due à compter du 1er septembre 2023 et versée au plus tard en septembre 2024.
III. – Les salaires portés au compte avant le 1er septembre 2023 servant au calcul du salaire annuel de base mentionné au deuxième alinéa de l’article 12 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte sont revalorisés à titre exceptionnel pour les pensions prenant effet à compter du 1er septembre 2023, dans des conditions fixées par décret.
Article 10 ter
Le montant maximum de l’allocation spéciale pour les personnes âgées prévu à l’article 29 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte est revalorisé à titre exceptionnel à compter du 1er septembre 2023 d’un montant forfaitaire fixé par décret.
Article 10 quater
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au 5° de l’article L. 223-1, les mots : « et le régime des exploitants agricoles » sont remplacés par les mots : « , le régime des non-salariés agricoles et les régimes d’assurance vieillesse de base des professions libérales et des avocats » ;
2° Aux articles L. 643-1-1 et L. 653-3, après la référence : « L. 351-4-2 », sont insérés les mots : « et L. 351-12 ».
II. – Le I s’applique aux pensions prenant effet à compter du 1er septembre 2023.
Article 10 quinquies
I. – Le VI de l’article 118 de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Il est également applicable aux indemnités journalières d’assurance maternité versées dans le cadre des congés de maternité ayant débuté avant le 1er janvier 2012. Ces indemnités sont évaluées sur une base forfaitaire, selon des modalités fixées par décret en tenant compte du montant dont peut bénéficier un salarié rémunéré au niveau du salaire médian l’année précédant le congé de maternité. »
II. – Le présent article est applicable aux pensions liquidées à compter du 1er septembre 2023.
Article 11
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 351-3 est complété par un 9° ainsi rédigé :
« 9° Les périodes de stage dont les cotisations sociales ont été prises en charge par l’État et ayant pour finalité l’insertion dans l’emploi par la pratique d’une activité professionnelle définies par décret en Conseil d’État ainsi que celles mentionnées à l’article 3 de la loi n° 79-575 du 10 juillet 1979 portant diverses mesures en faveur de l’emploi et à l’article L. 980-9 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 91-1405 du 31 décembre 1991 relative à la formation professionnelle et à l’emploi. » ;
2° Le I de l’article L. 351-14-1 est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Les périodes pendant lesquelles l’assuré a été membre de l’organe délibérant d’une collectivité territoriale mentionnée à l’article 72 de la Constitution dans laquelle s’applique le régime général de sécurité sociale, ainsi que les périodes pendant lesquelles l’assuré a été délégué de ces collectivités territoriales membres d’un établissement public de coopération intercommunale. »
II. – L’État prend en charge chaque année, pour les trimestres validés au cours de l’année précédente et sur une base forfaitaire fixée par décret, les coûts que représente, pour l’assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale et du régime des salariés agricoles, l’application du 9° de l’article L. 351-3 du code de la sécurité sociale.
II bis. – L’article L. 382-31 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au second alinéa, la référence : « L. 4422-22 » est remplacée par la référence : « L. 4422-19 » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les indemnités de fonction des élus des collectivités territoriales mentionnées à l’article 72 de la Constitution dans lesquelles s’applique le régime général de sécurité sociale et qui ne sont pas assujetties aux cotisations de sécurité sociale en application des deux premiers alinéas du présent article peuvent, sur demande des élus concernés, être assujetties aux mêmes cotisations. Un décret fixe les modalités selon lesquelles cette faculté s’exerce. »
III. – Les I à II bis sont applicables aux pensions prenant effet à compter du 1er septembre 2023.
Article 11 bis
La sous-section 1 de la section 3 du chapitre III du titre VII du livre Ier du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 173-1-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 173-1-5. – Les assurés ayant accompli au moins dix années de service, continues ou non, en qualité de sapeur-pompier volontaire ont droit à des trimestres supplémentaires pris en compte pour la détermination du taux de calcul de la pension et la durée d’assurance dans le régime, dans des conditions et des limites prévues par décret en Conseil d’État. Ce décret précise notamment le régime auquel incombe la charge de valider ces trimestres lorsque l’assuré a relevé successivement, alternativement ou simultanément de plusieurs régimes d’assurance vieillesse de base. »
Article 12
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au 1° de l’article L. 131-2, après la référence : « L. 381-1 », est insérée la référence : « , L. 381-2 » ;
2° Le 1° de l’article L. 131-8 est ainsi modifié :
a) À la fin du troisième alinéa, le taux : « 17,19 % » est remplacé par le taux : « 16,87 % » ;
b) À la fin du dernier alinéa, le taux : « 4,25 % » est remplacé par le taux : « 4,57 % » ;
3° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 134-1, après la référence : « L. 381-1 », est insérée la référence : « , L. 381-2 » ;
4° Au 1° de l’article L. 200-1, après la référence : « L. 381-1 », est insérée la référence : « , L. 381-2 » ;
5° Le chapitre Ier du titre VIII du livre III est ainsi modifié :
a) À la fin de l’intitulé de la section 1, les mots : « – Personnes assumant la charge d’un handicapé » sont supprimés ;
b) L’article L. 381-1 est ainsi modifié :
– les troisième à neuvième alinéas sont supprimés ;
– la seconde phrase de l’avant-dernier alinéa est supprimée ;
– à la seconde phrase du dernier alinéa, les mots : « en tant que de besoin » sont supprimés ;
c) La section 2 est ainsi rétablie :
« Section 2
« Parents d’enfants malades ou en situation de handicap – Aidants de personnes en situation de handicap ou en perte d’autonomie
« Art. L. 381-2. – La personne bénéficiaire de l’allocation journalière de présence parentale mentionnée à l’article L. 544-1 est affiliée à l’assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale, à l’exclusion des fonctionnaires, des magistrats et des militaires, lorsqu’ils bénéficient d’un congé de présence parentale pris en compte dans le régime spécial de retraite dont ils relèvent.
« La personne bénéficiaire de l’allocation journalière du proche aidant mentionnée à l’article L. 168-8, à l’exclusion des fonctionnaires, des magistrats et des militaires, lorsqu’ils bénéficient d’un congé de proche aidant pris en compte dans le régime spécial de retraite dont ils relèvent, est affiliée à l’assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale. Est également affiliée obligatoirement à l’assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale la personne bénéficiaire du congé de proche aidant mentionné à l’article L. 3142-16 du code du travail pour les périodes pendant lesquelles elle ne bénéficie pas de l’allocation journalière mentionnée à l’article L. 168-8 du présent code. Dans ce second cas, l’affiliation est subordonnée au dépôt d’une demande par la personne bénéficiaire du congé, dans des conditions définies par décret.
« Le travailleur non salarié, mentionné à l’article L. 611-1 du présent code, à l’article L. 722-4 du code rural et de la pêche maritime ou au 2° de l’article L. 722-10 du même code ainsi que le conjoint collaborateur mentionné à l’article L. 661-1 du présent code ou aux articles L. 321-5 et L. 732-34 du code rural et de la pêche maritime qui interrompt son activité professionnelle pour s’occuper d’une personne mentionnée à l’article L. 3142-16 du code du travail présentant un handicap ou une perte d’autonomie définis en application de l’article L. 3142-24 du même code, est affilié obligatoirement à l’assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale. Cette affiliation n’est pas subordonnée à la déclaration de la cessation d’activité auprès de l’organisme unique mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 123-33 du code de commerce ou à la radiation prévue à l’article L. 613-4 du présent code. Elle est subordonnée au dépôt d’une demande par le travailleur non salarié, dans des conditions définies par décret.
« La somme des durées d’affiliation à l’assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale au titre des deuxième et troisième alinéas du présent article ne peut excéder une durée totale d’un an sur l’ensemble de la carrière.
« En outre, est affilié obligatoirement à l’assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale, pour autant qu’il n’exerce aucune activité professionnelle ou seulement une activité à temps partiel, la personne ou, pour un couple, l’un ou l’autre de ses membres :
« 1° Ayant la charge d’un enfant en situation de handicap qui n’est pas admis dans un internat, dont l’incapacité permanente est au moins égale à un taux fixé par décret et qui n’a pas atteint l’âge limite d’attribution de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé mentionnée à l’article L. 541-1 ;
« 1° bis (nouveau) Ayant la charge d’un enfant en situation de handicap qui n’est pas admis dans un internat et au titre duquel il est éligible au complément de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé prévu au deuxième alinéa du même article L. 541-1 ;
« 2° Ou apportant son aide à une personne adulte en situation de handicap dont la commission prévue à l’article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles reconnaît que l’état nécessite une assistance ou une présence définie dans des conditions fixées par décret et dont le taux d’incapacité permanente est au moins égal au taux mentionné au 1° du présent article et qui est, pour le bénéficiaire, une des personnes mentionnées aux 1° à 9° de l’article L. 3142-16 du code du travail.
« Le financement de l’assurance vieillesse des catégories de personnes mentionnées au présent article est assuré par une cotisation à la charge exclusive des organismes débiteurs des prestations familiales et calculée sur des assiettes forfaitaires. La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie rembourse à la Caisse nationale des allocations familiales les cotisations acquittées par les organismes débiteurs des prestations familiales au titre des personnes mentionnées aux deuxième à avant-dernier alinéas. » ;
6° À la fin du deuxième alinéa de l’article L. 742-1, la référence : « L. 381-1 » est remplacée par la référence : « L. 381-2 » ;
7° La sous-section 2 de la section 2 du chapitre III du titre V du livre VII est ainsi modifiée :
a) L’intitulé est ainsi rédigé : « Bénéficiaires du complément familial, de la prestation d’accueil du jeune enfant – Parents d’enfants malades ou en situation de handicap – Aidants de personnes en situation de handicap ou en perte d’autonomie » ;
b) À l’article L. 753-6, les mots : « qui ont la charge d’un enfant, d’un adulte handicapé ou d’une personne âgée dépendante, ou » et les mots : « ou de l’allocation journalière de présence parentale » sont supprimés ;
c) Il est ajouté un article L. 753-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 753-6-1. – L’article L. 381-2 est applicable aux personnes résidant dans les collectivités mentionnées à l’article L. 751-1. »
II. – Au 1° de l’article L. 732-54-1 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « de l’article L. 381-1 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 381-1 et L. 381-2 ».
III. – Le présent article, à l’exception du 2° du I, entre en vigueur à des dates fixées par décret, et au plus tard le 1er septembre 2023.
Le 2° du même I est applicable à compter du 1er janvier 2023.
TITRE III
FACILITER LES TRANSITIONS ENTRE EMPLOI ET RETRAITE
Article 13
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le IV de l’article L. 161-17 est ainsi modifié :
a) À la fin de la seconde phrase, les mots : « L. 351-15 et L. 241-3-1 » sont remplacés par les mots : « L. 161-22-1-5 et L. 241-3-1 du présent code ainsi qu’aux articles L. 11 bis, L. 84 et L. 89 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite » ;
b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Une simulation de liquidation partielle dans le cadre d’une retraite progressive est jointe à cette estimation. » ;
2° Le paragraphe 3 de la sous-section 4 de la section 1 du chapitre Ier du titre VI du livre Ier est ainsi modifié :
a) Au début, il est ajouté un sous-paragraphe 1 intitulé : « Cumul d’une activité professionnelle et d’une retraite » et comprenant les articles L. 161-22 et L. 161-22-1 ;
b) Il est ajouté un sous-paragraphe 3 intitulé : « Remboursement des cotisations d’assurance vieillesse » et comprenant l’article L. 161-22-2 ;
3° L’article L. 161-22 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « subordonné », sont insérés les mots : « , pour les assurés exerçant une activité salariée, » et, à la fin, les mots : « ou, pour les assurés exerçant une activité non salariée relevant du ou desdits régimes, à la cessation de cette activité » sont supprimés ;
b) Au deuxième alinéa, après le mot : « sociale », sont insérés les mots : « au titre du 1° de l’article L. 200-1, à l’exception des activités relevant de l’article L. 611-1 » ;
c) Au 6°, les mots : « à l’article L. 811-2 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 6522-2, L. 6523-3 et L. 6523-4 » ;
d) Le dix-septième alinéa est ainsi rédigé :
« 9° Activités donnant lieu à la perception des indemnités mentionnées à l’article L. 382-31 du présent code. » ;
e) L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :
– les mots : « premier alinéa » sont remplacés par les mots : « présent article » ;
– les mots : « le bénéfice » sont remplacés par les mots : « ou qui bénéficie » ;
– la référence : « L. 351-15 » est remplacée par la référence : « L. 161-22-1-5 » ;
4° L’article L. 161-22-1 A est abrogé ;
5° L’article L. 161-22-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 161-22-1. – La reprise ou la poursuite d’une activité professionnelle par le bénéficiaire d’une pension de vieillesse personnelle servie par un régime de retraite de base légalement obligatoire n’ouvre droit à aucun avantage de vieillesse, de droit direct ou dérivé, auprès d’un régime légal ou rendu légalement obligatoire d’assurance vieillesse, de base ou complémentaire.
« Le premier alinéa ne s’applique pas :
« 1° Aux assurés demandant à bénéficier d’une fraction de pension dans le cadre d’un dispositif de retraite progressive prévu par des dispositions législatives ou réglementaires, notamment l’article L. 161-22-1-5 ;
« 2° Aux assurés remplissant les conditions leur permettant de cumuler intégralement le service de leur pension de vieillesse et les revenus tirés de l’exercice d’une activité professionnelle, prévues aux troisième à avant-dernier alinéas de l’article L. 84 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ainsi qu’aux quatrième à septième alinéas de l’article L. 161-22 du présent code, aux troisième à avant-dernier alinéas des articles L. 634-6 et L. 643-6 et à l’article L. 653-7, sous réserve que la reprise d’activité, lorsqu’elle a lieu chez le dernier employeur, intervienne au plus tôt six mois après la liquidation de la pension de vieillesse. » ;
6° Le sous-paragraphe 1 du paragraphe 3 de la sous-section 4 de la section 1 du chapitre Ier du titre VI du livre Ier, tel qu’il résulte du a du 2° du présent I, est complété par des articles L. 161-22-1-1 à L. 161-22-1-4 ainsi rédigés :
« Art. L. 161-22-1-1. – Les assurés mentionnés au 2° de l’article L. 161-22-1 se constituent de nouveaux droits à pension au titre des régimes de base dans les conditions prévues au présent article, sans préjudice des dispositions ou des stipulations régissant les régimes complémentaires auxquels ils sont affiliés. Ces nouveaux droits sont sans incidence sur le montant de la pension de vieillesse résultant de la première liquidation.
« La nouvelle pension de vieillesse, résultant de l’exercice d’une activité professionnelle faisant suite à la liquidation d’une première pension, bénéficie du taux plein ou du pourcentage maximum mentionnés à l’article L. 161-17-3.
« Seules sont retenues les périodes d’assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré, à l’exclusion des périodes correspondant à des versements mentionnés aux articles L. 173-7 et L. 634-2-1 du présent code et au I de l’article 108 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022.
« Aucune majoration, aucun supplément ni aucun accessoire ne peut être octroyé au titre de cette nouvelle pension et de la pension de droit dérivé qui en est issue.
« Les articles L. 161-22-2 et L. 173-1 du présent code ne s’appliquent pas à cette nouvelle pension.
« Le montant de la nouvelle pension liquidée en application des cinq premiers alinéas du présent article ne peut dépasser un plafond annuel déterminé par décret.
« Art. L. 161-22-1-2. – Aucun droit ne peut être acquis dans un régime de retraite de base après la liquidation d’une seconde pension de vieillesse en application de l’article L. 161-22-1-1. Si plusieurs pensions sont liquidées simultanément après la première liquidation, des droits sont acquis au titre de chacune de ces pensions.
« Par dérogation, les articles L. 161-22, L. 161-22-1 et le premier alinéa du présent article ne font pas obstacle à la constitution de droits supplémentaires, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État, au bénéfice :
« 1° Des assurés relevant du régime mentionné à l’article L. 5551-1 du code des transports ;
« 2° Des artistes du ballet relevant de la caisse de retraites des personnels de l’Opéra national de Paris ;
« 3° Des anciens agents, relevant du régime de retraite des mines, d’une des entreprises minières ou ardoisières mentionnées au titre Ier de la loi n° 2004-105 du 3 février 2004 portant création de l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs et diverses dispositions relatives aux mines, lorsque l’entreprise a cessé définitivement son activité ou a été mise en liquidation avant le 31 décembre 2015.
« Art. L. 161-22-1-3. – La constitution de nouveaux droits à pension de vieillesse en application du 2° de l’article L. 161-22-1 ne fait pas obstacle à l’attribution des droits ou des prestations dont le bénéfice est subordonné, par les dispositions législatives et réglementaires qui les régissent, à la liquidation des droits à retraite.
« Art. L. 161-22-1-4. – Les plafonds et seuils prévus à l’article L. 85 du code des pensions civiles et militaires de retraite ainsi qu’au deuxième alinéa de l’article L. 161-22 et au premier alinéa des articles L. 634-6 et L. 643-6 du présent code et le délai de reprise d’activité prévu au deuxième alinéa de l’article L. 161-22 et au 2° de l’article L. 161-22-1 peuvent être suspendus par décret, pour une durée qui ne peut excéder un an et qui peut être renouvelée pour une durée ne pouvant excéder six mois, lorsque des circonstances exceptionnelles nécessitent, en urgence, la poursuite ou la reprise d’activités par des assurés susceptibles de les exercer. Ce décret précise les catégories d’activités et d’assurés concernés par la suspension des mêmes plafonds, seuils et délai et peut en prévoir l’application rétroactive, dans la limite d’un mois avant sa publication.
« Le décret peut suspendre, dans les mêmes conditions, les règles de plafond et de seuil ou de délai minimal de reprise d’activité, analogues à celles mentionnées au premier alinéa du présent article, prévues par les dispositions ou les stipulations régissant les régimes complémentaires de retraite.
« Le deuxième alinéa du présent article est d’ordre public. » ;
7° Après l’article L. 161-22-1-4, tel qu’il résulte du 6° du présent I, il est inséré un sous-paragraphe 2 ainsi rédigé :
« Sous-paragraphe 2
« Retraite progressive
« Art. L. 161-22-1-5. – Le bénéfice d’une retraite progressive est accordé, à condition d’avoir atteint un âge, inférieur à celui mentionné à l’article L. 161-17-2, déterminé par décret, et de justifier d’une durée d’assurance et de périodes reconnues équivalentes fixées par décret en Conseil d’État, à :
« 1° L’assuré qui exerce une activité salariée à temps partiel ou à temps réduit par rapport à la durée maximale légale ou conventionnelle de travail exprimée en jours ou en demi-journées et qui justifie d’une quotité de temps de travail comprise entre deux limites définies par décret en Conseil d’État ;
« 2° L’assuré exerçant à titre exclusif une activité salariée ou non salariée qui, n’étant pas assujettie à une durée d’activité définie par un employeur, lui procure un revenu minimal et donne lieu à diminution des revenus professionnels ;
« 3° L’assuré exerçant à titre exclusif une activité de chef d’exploitation ou d’entreprise agricole et qui s’engage dans la cessation progressive de son activité.
« Les conditions de revenu minimal et de diminution des revenus professionnels mentionnées au 2° ainsi que la condition de cessation progressive d’activité agricole mentionnée au 3° sont déterminées par décret.
« Le bénéfice de la retraite progressive entraîne la liquidation provisoire et le service d’une même fraction de pension dans tous les régimes de retraite de base légalement obligatoires.
« La fraction de retraite servie varie, dans des conditions fixées par voie réglementaire, en fonction de la durée de travail à temps partiel ou à temps réduit par rapport à la durée maximale légale ou conventionnelle, en fonction de la diminution des revenus professionnels ou de la cessation progressive de l’activité agricole. En cas de modification du temps de travail, des revenus professionnels ou de l’activité agricole conservée, cette fraction de retraite est modifiée au terme d’un délai déterminé par voie réglementaire.
« Les majorations de pension mentionnées au premier alinéa de l’article L. 351-10 et à l’article L. 351-12 du présent code et à l’article L. 732-54-2 du code rural et de la pêche maritime sont attribuées lors de la liquidation provisoire si les conditions en sont remplies ou, à défaut, lors de la liquidation ultérieure de la pension complète si les conditions en sont remplies à cette date. Lorsqu’elles sont attribuées lors de la liquidation provisoire, elles sont révisées lors de la liquidation de la pension complète.
« Les modalités d’application du présent article aux assurés exerçant des activités à temps partiel ou des activités à temps réduit par rapport à la durée maximale légale ou conventionnelle de travail auprès de plusieurs employeurs sont précisées par voie réglementaire.
« L’assuré est informé des conditions d’application de l’article L. 241-3-1.
« Art. L. 161-22-1-6. – Le présent sous-paragraphe est applicable, sans que la condition d’exercice à temps partiel leur soit opposable :
« 1° Aux agents non titulaires de la fonction publique exerçant leur activité à titre exclusif dans le cadre d’un service à temps incomplet ou d’un ou de plusieurs emplois à temps non complet ;
« 2° Aux fonctionnaires occupant à titre exclusif un ou plusieurs emplois permanents à temps non complet mentionnés aux articles L. 613-6 et L. 613-10 du code général de la fonction publique.
« Les agents mentionnés aux 1° et 2° du présent article occupant plusieurs emplois à temps non complet bénéficient de la retraite progressive sous réserve que leur durée totale de travail n’excède pas un pourcentage, fixé par décret, de la durée annuelle mentionnée au second alinéa de l’article L. 611-1 du code général de la fonction publique.
« Art. L. 161-22-1-7. – Le service de la fraction de pension est remplacé par le service de la pension complète, à la demande de l’assuré, lorsque celui-ci en remplit les conditions d’attribution. La pension complète est liquidée en tenant compte du montant de la pension initiale et de la durée d’assurance accomplie depuis la liquidation de celle-ci, dans des conditions fixées par décret.
« Le bénéfice de la retraite progressive ne peut pas être à nouveau demandé.
« Art. L. 161-22-1-8. – Le service de la fraction de pension est supprimé à titre définitif, sans possibilité de présenter une nouvelle demande tendant au bénéfice de la retraite progressive, lorsque l’assuré reprend une activité à temps complet ou lorsque le revenu tiré de l’activité professionnelle atteint ou excède le montant de revenu professionnel perçu antérieurement au service de la fraction de pension ou lorsque les conditions de la cessation d’activité agricole ne sont pas respectées.
« Le service de la fraction de pension est suspendu lorsque, en dehors des cas mentionnés au premier alinéa, les conditions pour en bénéficier ne sont plus réunies.
« Art. L. 161-22-1-9. – Les articles L. 341-15 et L. 341-16 ne font pas obstacle à la substitution de la fraction de pension de vieillesse prévue à l’article L. 161-22-1-5 à la pension d’invalidité de l’assuré lorsque ce dernier atteint l’âge mentionné à l’article L. 351-1-5. » ;
8° L’article L. 323-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le premier alinéa du présent article n’est pas applicable aux personnes mentionnées à l’article L. 161-22-1-5 du présent code et à l’article L. 732-29 du code rural et de la pêche maritime. » ;
9° Le premier alinéa de l’article L. 341-14-1 est ainsi modifié :
a) La première phrase est ainsi modifiée :
– après la première occurrence du mot : « articles », est insérée la référence : « L. 161-22-1-5, » ;
– la référence : « , L. 351-15 » est supprimée ;
b) À la seconde phrase, les deux occurrences de la référence : « L. 351-15 » sont remplacées par la référence : « L. 161-22-1-5 » ;
10° La section 5 du chapitre Ier du titre IV du livre III est complétée par un article L. 341-14-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 341-14-2. – La pension ou la solde de réforme servie en application des articles L. 6 et L. 7 du code des pensions civiles et militaires de retraite peut être cumulée avec la pension d’invalidité prévue à l’article L. 341-1 du présent code jusqu’à un seuil et dans des conditions déterminés par décret en Conseil d’État. » ;
11° L’article L. 341-16 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de reprise ou de poursuite d’une activité ouvrant droit à une nouvelle pension de retraite, la demande de retraite mentionnée aux deux premiers alinéas du présent article est celle effectuée lors de la première liquidation de la retraite. » ;
12° Au premier alinéa de l’article L. 341-17, les mots : « avant-dernier et dernier » sont remplacés par les mots : « troisième et avant-dernier » ;
13° Le premier alinéa de l’article L. 342-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque l’assuré était retraité et, à la suite d’une reprise ou d’une poursuite d’activité dans les conditions prévues au 2° de l’article L. 161-22-1, titulaire de droits à une nouvelle pension de retraite, ceux-ci ouvrent droit à une pension de veuve ou de veuf dans les mêmes conditions. » ;
14° La section 10 du chapitre Ier du titre V du livre III est abrogée ;
15° Le premier alinéa de l’article L. 353-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque, à la suite d’une reprise ou d’une poursuite d’activité dans les conditions prévues au 2° de l’article L. 161-22-1, l’assuré était titulaire de droits à une nouvelle pension de retraite, ceux-ci ouvrent droit à une pension de réversion dans les mêmes conditions. » ;
15° bis Au premier alinéa de l’article L. 357-4, les mots : « L. 351-15 et L. 351-16 » sont remplacés par les mots : « L. 161-22-1-5 à L. 161-22-1-8 » ;
16° L’article L. 634-3-1 est abrogé ;
17° L’article L. 634-6 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les revenus procurés par une activité indépendante relevant du champ de l’article L. 631-1 peuvent être cumulés avec une pension de retraite relevant du même champ, sous réserve qu’ils soient inférieurs à des seuils adaptés selon les zones géographiques concernées et déterminés dans des conditions fixées par décret. » ;
b) Au deuxième alinéa, après le mot : « reprend », sont insérés les mots : « ou poursuit » ;
c) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« L’article L. 161-22 et le présent article ne s’appliquent pas à l’assuré qui demande ou qui bénéficie de sa pension au titre de l’article L. 161-22-1-5 du présent code, de l’article L. 732-29 du code rural et de la pêche maritime et de l’article L. 89 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite. » ;
18° L’article L. 643-6 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les revenus procurés par une activité relevant du régime d’assurance vieillesse des professions libérales peuvent être cumulés avec une pension de retraite relevant du même champ, sous réserve qu’ils soient inférieurs à un seuil déterminé dans des conditions fixées par décret. » ;
b) Au deuxième alinéa, après le mot : « reprend », sont insérés les mots : « ou poursuit » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l’article L. 161-22 et le présent article ne s’appliquent pas à l’assuré qui demande le bénéfice ou qui bénéficie de sa pension au titre de l’article L. 161-22-1-5 du présent code, de l’article L. 732-29 du code rural et de la pêche maritime ou de l’article L. 89 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite. »
II. – Le code des pensions civiles et militaires de retraite est ainsi modifié :
1° Au neuvième alinéa de l’article L. 5, les mots : « en application de l’article 37 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée, de l’article 60 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et de l’article 46 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière » sont supprimés ;
2° Le 1° de l’article L. 11 est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase, les mots : « été autorisés à accomplir un service à temps partiel dans les conditions prévues à l’article 37 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée » sont remplacés par les mots : « accompli un service à temps partiel » ;
b) Sont ajoutés six alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, sont pris en compte comme des périodes de travail à temps plein :
« a) Le temps partiel de droit pour élever un enfant mentionné à l’article L. 9 ;
« b) Le temps partiel exercé dans le cadre du congé de présence parentale mentionné au même article L. 9 ;
« c) Le cas échéant, dans les conditions prévues par les lois et règlements qui le prévoient, le temps partiel accordé sur le fondement du 2° dudit article L. 9 ;
« d) Le temps partiel exercé dans le cadre du congé de proche aidant mentionné à l’article L. 634-2 du code général de la fonction publique ;
« e) Le temps partiel thérapeutique mentionné à l’article L. 823-1 du même code. » ;
3° À l’avant-dernier alinéa du I de l’article L. 14, dans sa rédaction résultant de l’article 7, les mots : « telles que définies à l’article L. 5 » sont supprimés ;
4° Le premier alinéa de l’article L. 38 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque, à la suite de la reprise ou de la poursuite d’une activité dans les conditions prévues au 2° de l’article L. 161-22-1 du code de la sécurité sociale, l’assuré était titulaire de droits à une nouvelle pension de retraite, ceux-ci ouvrent droit à une pension de réversion dans les mêmes conditions. » ;
5° L’article L. 84 est ainsi modifié :
a) Au début de la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « Par dérogation, les articles L. 161-22 et L. 161-22-1 A » sont remplacés par les mots : « Les articles L. 161-22, L. 161-22-1, L. 161-22-1-1 et L. 161-22-1-2 » ;
b) Le deuxième alinéa est complété par les mots : « et à l’article L. 161-22-1-1 du code de la sécurité sociale » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article et les articles L. 85 et L. 86-1 ne s’appliquent pas à l’assuré qui demande ou bénéficie d’une pension au titre de l’article L. 89 bis du présent code et des articles L. 161-22-1-5 et L. 161-22-1-9 du code de la sécurité sociale. » ;
6° Le titre III du livre II est complété par un chapitre V ainsi rédigé :
« CHAPITRE V
« Retraite progressive
« Art. L. 89 bis. – Par dérogation à l’article L. 26, une pension partielle est servie, à sa demande, au fonctionnaire qui exerce à titre exclusif son activité à temps partiel dans les conditions prévues au chapitre II du titre Ier du livre VI du code général de la fonction publique et qui :
« 1° A atteint l’âge fixé au premier alinéa de l’article L. 161-22-1-5 du code de la sécurité sociale ;
« 2° Justifie d’une durée d’assurance mentionnée à l’article L. 14 du présent code égale à celle fixée au premier alinéa de l’article L. 161-22-1-5 du code de la sécurité sociale.
« Le bénéfice de la pension partielle entraîne l’application du sixième alinéa du même article L. 161-22-1-5, dont les autres dispositions ne sont pas applicables.
« La pension partielle est liquidée dans les conditions et selon les modalités de calcul applicables à sa date d’effet. Le montant servi varie en fonction de la quotité de travail à temps partiel effectuée. En cas d’évolution de cette quotité, le montant de pension partielle servi est modifié.
« Le présent article est applicable, sans que la condition d’exercice à temps partiel leur soit opposable, aux fonctionnaires exerçant leur activité à titre exclusif dans le cadre d’un service à temps incomplet ou d’un ou de plusieurs emplois à temps non complet dans les conditions mentionnées aux articles L. 613-5 et L. 613-9 du code général de la fonction publique.
« Lorsqu’ils occupent plusieurs emplois à temps non complet, les fonctionnaires mentionnés à l’avant-dernier alinéa du présent article bénéficient de la retraite progressive sous réserve que leur durée totale de travail n’excède pas le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l’article L. 161-22-1-6 du code de la sécurité sociale.
« Art. L. 89 ter. – La pension complète est liquidée en tenant compte des services accomplis pendant la durée de perception de la pension partielle et du montant de la pension initiale, dans des conditions fixées par voie réglementaire.
« Le service de la pension partielle prend fin à titre définitif lorsque la pension complète intervient ou lorsque le fonctionnaire reprend une activité à temps plein ou à temps complet.
« Le service de la pension partielle est suspendu lorsque le fonctionnaire, en dehors des cas prévus au deuxième alinéa, ne réunit plus les conditions pour en bénéficier. »
III. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° A Au 2° du II de l’article L. 254-1, les mots : « de l’avant-dernier alinéa » sont remplacés par les mots : « du premier alinéa du V » ;
1° B À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 411-64, après le mot : « application », sont insérés les mots : « du V » ;
1° L’article L. 732-29 est ainsi rédigé :
« Art. L. 732-29. – Les articles L. 161-22-1-5 à L. 161-22-1-9 du code de la sécurité sociale sont applicables aux assurés relevant du régime des personnes non salariées des professions agricoles. » ;
2° L’article L. 732-39 est ainsi modifié :
a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « le régime d’assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles » sont remplacés par les mots : « un régime d’assurance vieillesse de base » ;
c) Le troisième alinéa est ainsi modifié :
– au début, est ajoutée la mention : « II. – » ;
– les mots : « des alinéas précédents » sont remplacés par les mots : « du I » ;
– le mot : « premier » est remplacé par le mot : « deuxième » ;
d) Le quatrième alinéa est ainsi modifié :
– au début, est ajoutée la mention : « III. – » ;
– les mots : « aux deux premiers alinéas » sont remplacés par les mots : « au I » ;
e) Au septième alinéa, les mots : « aux deux premiers alinéas » sont remplacés par les mots : « au I du présent article » et la troisième occurrence du mot : « article » est remplacée par la référence : « III » ;
f) Le neuvième alinéa est ainsi modifié :
– au début, est ajoutée la mention : « IV. – » et les mots : « Elles ne font » sont remplacés par les mots : « Le I du présent article ne fait » ;
– les mots : « et 7° » sont remplacés par les mots : « , 7° et 9° » ;
g) Au début de l’avant-dernier alinéa, est ajoutée la mention :
« V. – » ;
h) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Le présent article n’est pas applicable à l’assuré qui demande ou qui bénéficie d’une pension au titre de l’article L. 732-29 du présent code, de l’article L. 89 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite ou de l’article L. 161-22-1-5 du code de la sécurité sociale. » ;
i) Il est ajouté un VI ainsi rédigé :
« VI. – L’article L. 161-22 du code de la sécurité sociale ne s’applique pas aux personnes relevant du présent article. La poursuite ou la reprise d’une activité par les personnes mentionnées au III du présent article et, sous réserve du respect des conditions prévues aux deux derniers alinéas du même III, par les personnes mentionnées au IV donne lieu à la constitution de nouveaux droits à pension dans les conditions prévues à l’article L. 161-22-1-1 du code de la sécurité sociale. » ;
3° L’article L. 732-40 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « obligatoire », sont insérés les mots : « dans les conditions prévues à l’article L. 161-22-1-1 du code de la sécurité sociale » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’article L. 161-22 du même code ne s’applique pas aux assurés mentionnés au premier alinéa du présent article. » ;
4° Le premier alinéa de l’article L. 732-41 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque, à la suite de la reprise ou de la poursuite d’une activité dans les conditions prévues au 2° de l’article L. 161-22-1 du code de la sécurité sociale, l’assuré était titulaire d’une nouvelle pension de retraite, celle-ci ouvre droit à une pension de réversion dans les mêmes conditions. » ;
5° Le dernier alinéa de l’article L. 742-3 est supprimé.
IV. – L’article L. 5552-21 du code des transports est ainsi rédigé :
« Art. L. 5552-21. – L’article L. 161-22-1 du code de la sécurité sociale est applicable à toute reprise d’activité entraînant l’affiliation au régime d’assurance vieillesse des marins, sauf dans les cas mentionnés aux articles L. 5552-7 et L. 5552-10 du présent code. »
V. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 1237-7 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Chaque salarié ne peut bénéficier que d’une seule indemnité de départ ou de mise à la retraite. L’indemnité est attribuée lors de la première liquidation complète de la retraite. » ;
2° L’article L. 1237-9 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Chaque salarié ne peut bénéficier que d’une seule indemnité de départ ou de mise à la retraite. L’indemnité est attribuée lors de la première liquidation complète de la retraite. » ;
3° Après l’article L. 3121-60, il est inséré un article L. 3121-60-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3121-60-1. – Lorsqu’un salarié ayant conclu une convention de forfait en jours et ayant atteint l’âge prévu au premier alinéa de l’article L. 161-22-1-5 du code de la sécurité sociale demande à travailler à temps réduit par rapport à la durée maximale légale ou conventionnelle de travail exprimée en jours, il adresse sa demande, dans des conditions fixées par décret, à l’employeur. À défaut de réponse écrite et motivée dans un délai de deux mois à compter de la réception de la demande, l’accord de l’employeur est réputé acquis.
« Le refus de l’employeur est justifié par l’incompatibilité de la durée de travail demandée par le salarié avec l’activité économique de l’entreprise. » ;
4° Le paragraphe 2 de la sous-section 1 de la section 1 du chapitre III du titre II du livre Ier de la troisième partie est complété par un article L. 3123-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3123-4-1. – Lorsqu’un salarié ayant atteint l’âge prévu au premier alinéa de l’article L. 161-22-1-5 du code de la sécurité sociale demande à travailler à temps partiel, il adresse sa demande, dans des conditions fixées par décret, à l’employeur. À défaut de réponse écrite et motivée dans un délai de deux mois à compter de la réception de la demande, l’accord de l’employeur est réputé acquis.
« Le refus de l’employeur est justifié par l’incompatibilité de la durée de travail demandée par le salarié avec l’activité économique de l’entreprise. » ;
5° Avant le dernier alinéa de l’article L. 3123-7, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Une durée de travail inférieure à celle prévue audit premier alinéa peut être fixée, à sa demande, au bénéfice du salarié ayant atteint l’âge prévu au premier alinéa de l’article L. 161-22-1-5 du code de la sécurité sociale. » ;
5° bis À l’article L. 3123-16, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois » ;
6° À la première phrase du 2° de l’article L. 5312-1, après les mots : « promotion professionnelle », sont insérés les mots : « , participer à leur information sur les dispositifs de transition entre l’emploi et la retraite, notamment sur celui prévu à l’article L. 161-22-1-5 du code de la sécurité sociale ».
VI. – Les articles L. 84 à L. 86-1, L. 89 bis et L. 89 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans leur rédaction résultant du présent article, sont applicables aux assurés relevant de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ainsi qu’à ceux relevant du régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État.
VII. – Le I de l’article 11 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat est ainsi rédigé :
« I. – Les indemnités mentionnées à l’article L. 382-31 du code de la sécurité sociale acquises après la liquidation complète d’une pension de vieillesse ouvrent droit à une nouvelle pension de retraite, de droit direct ou dérivé, dans le régime prévu à l’article L. 921-2-1 du même code. »
VIII. – L’article 20-8-5 de l’ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l’amélioration de la santé publique, à l’assurance maladie, maternité, invalidité, décès et autonomie, au financement de la sécurité sociale à Mayotte et à la caisse de sécurité sociale de Mayotte est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de reprise ou de poursuite d’une activité ouvrant droit à une nouvelle pension de retraite, la pension de retraite mentionnée au premier alinéa du présent article est celle résultant de la première liquidation de la retraite. »
IX. – L’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte est ainsi modifiée :
1° À la fin du 2° de l’article 11-2, les mots : « la référence à l’article L. 241-3-1 est supprimée » sont remplacés par les mots : « les mots : “, L. 161-22-1-5 et L. 241-3-1 du présent code ainsi qu’aux articles L. 11 bis, L. 84 et L. 89 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite” sont remplacés par les mots : “et L. 161-22-1-5 du présent code” » ;
2° L’article 14-1 est ainsi modifié :
a) Les mots : « L. 161-22, L. 161-22-1 A, L. 161-17-1-1, L. 161-17-1-2, L. 351-15 et L. 351-16 » sont remplacés par les mots : « L. 161-17-1-1, L. 161-17-1-2 et L. 161-22 à L. 161-22-1-9 » et sont ajoutés les mots : « sous réserve des adaptations suivantes : » ;
b) Sont ajoutés des 1° à 5° ainsi rédigés :
« 1° À l’article L. 161-22 :
« a) Au deuxième alinéa, après la référence : “L. 711-1”, sont insérés les mots : “ou, pour les salariés, du régime de retraite de base obligatoire de sécurité sociale applicable aux résidents à Mayotte” ;
« b) À la fin du a, les mots : “1° de l’article L. 351-8” sont remplacés par les mots : “second alinéa de l’article 6 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte” ;
« c) Au b, les mots : “premier alinéa de l’article L. 351-1” sont remplacés par les mots : “premier alinéa de l’article 6 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 précitée” et les mots : “au deuxième alinéa du même article” sont remplacés par les mots : “à la première phrase du premier alinéa de l’article 12 de la même ordonnance” ;
« d) Au septième alinéa, les mots : “à l’article L. 161-17-2” sont remplacés par les mots : “au premier alinéa de l’article 6 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 précitée” ;
« 2° À l’article L. 161-22-1-1 :
« a) À la fin du deuxième alinéa, les mots : “à l’article L. 161-17-3” sont remplacés par les mots : “au premier alinéa de l’article 12 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte” ;
« b) Au troisième alinéa, les mots : “aux articles L. 173-7 et L. 634-2-1 du présent code et au I” sont remplacés par les mots : “au II” ;
« c) L’avant-dernier alinéa est supprimé ;
« 3° (Supprimé)
« 4° À l’article L. 161-22-1-5 :
« a) Au premier alinéa, les mots : “à l’article L. 161-17-2” sont remplacés par les mots : “au premier alinéa de l’article 6 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte” ;
« b) Au huitième alinéa, les mots : “au premier alinéa de l’article L. 351-10 et à l’article L. 351-12 du présent code et à l’article L. 732-54-2 du code rural et de la pêche maritime” sont remplacés par les mots : “aux premier et troisième alinéas de l’article 14 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 précitée” ;
« 5° À l’article L. 161-22-1-9, au début, les mots : “Les articles L. 341-15 et L. 341-16 ne font” sont remplacés par les mots : “L’article 20-8-5 de l’ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l’amélioration de la santé publique, à l’assurance maladie, maternité, invalidité, décès et autonomie, au financement de la sécurité sociale à Mayotte et à la caisse de sécurité sociale de Mayotte ne fait” et, après la référence : “L. 161-22-1-5”, sont insérés les mots : “du présent code”. » ;
3° Après le I de l’article 23-4, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – L’article L. 634-6 du code de la sécurité sociale est applicable aux travailleurs non salariés mentionnés à l’article 23-1 de la présente ordonnance sous réserve de l’adaptation suivante :
« Au premier alinéa, la référence : “L. 631-1” est remplacée par les mots : “23-1 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte”. »
X. – Le premier alinéa de l’article L. 323-2 du code de la sécurité sociale n’est pas applicable aux personnes mentionnées à l’article L. 732-29 du code rural et de la pêche maritime et aux articles L. 351-15 et L. 634-3-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction antérieure à la présente loi.
XI. – Par dérogation au 2° de l’article L. 161-22-1 du code de la sécurité sociale et à l’article L. 161-22-1-1 du même code, dans leur rédaction résultant de la présente loi, les médecins bénéficiant de l’exonération de cotisation prévue à l’article 13 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023 ne se constituent, au titre des périodes concernées, aucun droit à retraite de base en vue d’une seconde pension.
XII. – Le présent article entre en vigueur le 1er septembre 2023, sous réserve des dispositions suivantes :
1° Le premier alinéa de l’article L. 161-22-1-4 du code de la sécurité sociale s’applique à compter du 1er janvier 2023 ;
2° Le deuxième alinéa du même article L. 161-22-1-4 ainsi que le VII du présent article entrent en vigueur le lendemain de la publication de la présente loi ;
3° La liquidation des pensions de droit direct ou dérivé intervenant à compter du 1er septembre 2023 prend en compte, le cas échéant, les droits en vue d’une nouvelle pension de vieillesse constitués à partir du 1er janvier 2023 en application du 2° de l’article L. 161-22-1 et de l’article L. 161-22-1-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction résultant du présent article ;
4° L’article L. 732-29 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, et les articles L. 351-15, L. 351-16 et L. 634-3-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction antérieure à la présente loi, continuent de s’appliquer aux assurés bénéficiant d’une retraite progressive à la date du 1er septembre 2023. Toutefois, la liquidation de la pension complète ne peut être obtenue que lorsque ces assurés remplissent les conditions d’âge et de durée d’assurance prévues aux articles L. 161-17-2 et L. 161-17-3 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction résultant de la présente loi ;
5° L’avant-dernier alinéa de l’article L. 3123-7 du code du travail, dans sa rédaction résultant du présent article, est applicable aux personnes mentionnées au 4° du présent XII ;
6° Le X du présent article entre en vigueur le premier jour du mois suivant la publication de la présente loi ;
7° Le délai mentionné au 2° de l’article L. 161-22-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant du présent article, n’est pas applicable aux assurés ayant liquidé leur pension de retraite au plus tard six mois après la publication de la présente loi ;
8° La seconde phrase du premier alinéa des articles L. 3121-60-1 et L. 3123-4-1 du code du travail ne s’applique qu’aux demandes présentées à compter du 1er septembre 2023.
Article 13 bis
L’article L. 161-17 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le II est ainsi modifié :
a) (nouveau) Au deuxième alinéa, les mots : « sur les possibilités de cumuler un emploi et une retraite, » sont supprimés et, après le mot : « maternité, », sont insérés les mots : « sur les possibilités de cumuler un emploi et une retraite » ;
b) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les assurés mentionnés au deuxième alinéa du présent II dont la durée cotisée est inférieure à dix années ou dont la carrière a été interrompue pendant une période au moins égale à une durée fixée par décret se voient proposer un rendez-vous de conseil sur leur carrière. » ;
2° (nouveau) Après la deuxième phrase du V, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ces informations sont également transmises à l’assuré et à son conjoint lors de leur inscription au registre consulaire. »
TITRE III bis
LUTTER CONTRE LA FRAUDE AUX PRESTATIONS SOCIALES À L’ÉTRANGER ET SIMPLIFIER LES DÉMARCHES ADMINISTRATIVES POUR LES FRANÇAIS ÉTABLIS HORS DE FRANCE
Article 13 ter
L’article L. 161-24-1 du code de la sécurité sociale s’applique à compter du lendemain de la publication du décret mentionné aux deux dernières phrases du même article L. 161-24-1, et au plus tard le 1er septembre 2023.
TITRE IV
DOTATIONS ET OBJECTIFS DE DÉPENSES DES BRANCHES ET DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DES RÉGIMES OBLIGATOIRES
Article 14 A
I. – L’article 23-5 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les résidents à Mayotte qui exercent une profession libérale mentionnée au premier alinéa de l’article L. 645-1 du code de la sécurité sociale bénéficient des régimes de prestations complémentaires de vieillesse prévus au même article L. 645-1. » ;
2° Après le mot : « base », la fin du second alinéa est ainsi rédigée : « , complémentaire et de prestations complémentaires de vieillesse légaux ou rendus légalement obligatoires. »
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er septembre 2023.
Article 14
Pour l’année 2023, les objectifs de dépenses de la branche Maladie, maternité, invalidité et décès sont fixés à 239,1 milliards d’euros pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale.
Article 15
Pour l’année 2023, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base et ses sous-objectifs sont fixés comme suit :
(En milliards d’euros) |
||
Sous-objectif |
Objectif de dépenses |
|
Dépenses de soins de ville |
104,0 |
|
Dépenses relatives aux établissements de santé |
101,3 |
|
Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes âgées |
15,3 |
|
Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes handicapées |
14,6 |
|
Dépenses relatives au fonds d’intervention régional et au soutien national à l’investissement |
6,1 |
|
Autres prises en charge |
3,4 |
|
Total |
244,8 |
Article 16
Pour l’année 2023, les objectifs de dépenses de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles sont fixés à 14,8 milliards d’euros pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale.
Article 17
Pour l’année 2023, les objectifs de dépenses de la branche Famille de la sécurité sociale sont fixés à 55,3 milliards d’euros.
Article 18
Pour l’année 2023, les objectifs de dépenses de la branche Autonomie de la sécurité sociale sont fixés à 37,5 milliards d’euros.
Article 19
Pour l’année 2023, les prévisions des charges des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale sont fixées ainsi qu’il suit :
(En milliards d’euros) |
|
Prévision de charges |
|
Fonds de solidarité vieillesse |
19,3 |
Article 20
Pour l’année 2023, les objectifs de dépenses de la branche Vieillesse sont fixés à 273,7 milliards d’euros pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale.
M. le président. Nous allons maintenant examiner l’amendement déposé par le Gouvernement.
articles liminaire à 5
M. le président. Sur les articles liminaire à 5, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…
Le vote est réservé.
article 6 et annexe
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
L’annexe est ainsi rédigée :
ANNEXE
RAPPORT DÉCRIVANT LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET LES OBJECTIFS DE DÉPENSES PAR BRANCHE DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE, LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET DE DÉPENSES DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DE CES RÉGIMES AINSI QUE L’OBJECTIF NATIONAL DES DÉPENSES D’ASSURANCE MALADIE POUR LES QUATRE ANNÉES À VENIR
La présente annexe décrit l’évolution des agrégats de dépenses, de recettes et de soldes de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) pour la période 2023-2026.
Le solde des régimes obligatoires de base a connu en 2020 sous l’effet des dépenses de crise sanitaire et de la récession qui a suivi, une dégradation sans précédent et a atteint le niveau de - 39,7 milliards d’euros. Il s’est redressé en 2021 à - 24,3 milliards d’euros, sous l’effet de la reprise progressive de l’activité et de l’atténuation graduelle des contraintes sanitaires, et est prévu en 2022 à -18,9 milliards d’euros dans la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.
La reprise de l’activité économique se poursuivrait en 2023, bien qu’en ralentissement après les forts rebonds enregistrés en 2021 et en 2022. Les dépenses liées à la crise sanitaire diminueraient sensiblement cette année, tandis que le contexte de forte inflation conduirait à l’inverse à une hausse des prestations. Au total, ces mouvements conduiraient à une nette diminution du déficit cette année, qui verrait également les premiers effets de la réforme des retraites portée par le présent projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (I). Les comptes de la sécurité sociale demeureraient toutefois fortement dégradés à moyen terme, sous l’effet de recettes durablement affectées par la crise, d’une hausse des dépenses de la branche Maladie et de la situation des comptes de la branche Vieillesse, les effets de la réforme des retraites se matérialisant seulement progressivement au gré de l’élévation progressive de l’âge de départ à la retraite et l’équilibre global du système de retraite étant en partie assuré par les régimes complémentaires de retraite, hors du champ de la présente annexe. La trajectoire présentée traduirait enfin la mise en œuvre des mesures votées dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 (II). La branche Vieillesse serait dans une situation de déficits élevés durant les années à venir, atténués par la montée en charge progressive de la réforme. La branche Maladie présenterait également des déficits élevés, bien que plus réduits, notamment du fait d’un transfert entre la branche Famille et la branche Maladie dès 2023. La branche Famille et la branche Accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) dégageraient des excédents. Enfin, la nouvelle branche Autonomie présenterait une trajectoire excédentaire à moyen terme, reflétant le surcroît de recettes de la contribution sociale généralisée (CSG) apporté en 2024, lui permettant de financer dans la durée les dépenses prévues dans la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2023 (III).
I. – Le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 s’inscrit dans un contexte macroéconomique, inchangé par rapport à celui prévu en LFSS 2023, de forte poussée de l’inflation, en lien avec la situation géopolitique et sur les marchés de l’énergie, et de ralentissement marqué de la croissance attendu pour cette année.
L’hypothèse de croissance du produit intérieur brut (PIB) retenue est de 1,0 % en 2023, après 2,7 % en 2022. Le rythme d’inflation resterait toujours élevé, à 4,3 % en 2023 au sens de l’indice des prix à la consommation hors tabac (IPCHT), après 5,4 % en 2022. À moyen terme, la croissance effective du PIB serait supérieure à son rythme potentiel de 1,35 % par an et atteindrait 1,6 % en 2024, puis 1,7 % en 2025 et 2026, tandis que l’inflation refluerait pour s’établir à 1,75 % par an à cet horizon. La masse salariale du secteur privé, principal déterminant de la progression des recettes de la sécurité sociale, progresserait de 5,0 % en 2023 avant de revenir progressivement à son rythme tendanciel.
Le tableau ci-dessous détaille les principaux éléments retenus pour l’élaboration des prévisions de recettes et objectifs de dépenses décrits dans la présente annexe :
|
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
PIB en volume |
1,8 % |
-7,8 % |
6,8 % |
2,7 % |
1,0 % |
1,6 % |
1,7 % |
1,7 % |
Masse salariale secteur privé * |
3,1 % |
-5,7 % |
8,9 % |
8,6 % |
5,0 % |
3,9 % |
3,6 % |
3,4 % |
Inflation hors tabac |
0,9 % |
0,2 % |
1,6 % |
5,4 % |
4,3 % |
3,0 % |
2,1 % |
1,75 % |
Revalorisations au 1er janvier ** |
0,3 % |
1,0 % |
0,4 % |
3,1 % |
2,8 % |
4,9 % |
3,2 % |
2,2 % |
Revalorisations au 1er avril ** |
0,5 % |
0,3 % |
0,2 % |
3,4 % |
3,7 % |
3,6 % |
3,2 % |
2,2 % |
ONDAM |
2,7 % |
9,4 % |
8,7 % |
2,6 % |
-0,9 % |
2,4 % |
2,7 % |
2,6 % |
ONDAM hors covid |
2,7 % |
3,3 % |
6,3 % |
5,6 % |
3,8 % |
2,8 % |
2,7 % |
2,6 % |
* Masse salariale du secteur privé. Hors prime exceptionnelle de pouvoir d’achat et prime de partage de la valeur ajoutée, la progression serait de 4,8 % en 2023. |
||||||||
** En moyenne annuelle, incluant les effets en moyenne annuelle de la revalorisation anticipée au 1er juillet 2022 de 4,0 %. |
La trajectoire présentée dans cette annexe repose sur les mesures votées dans la LFSS pour 2023 ainsi que la réforme des retraites présentée dans le présent projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. Le solde atteindrait ainsi - 8,2 milliards d’euros en 2023.
La trajectoire de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) intègre en 2023 une provision de 1 milliard d’euros au titre des dépenses liées à la crise sanitaire. La progression de l’ONDAM hors crise est par ailleurs marquée à partir de 2020 par le « Ségur de la santé ». La progression hors dépenses de crise restera soutenue, à + 3,8 % en 2023, en lien notamment avec la poursuite de la montée en charge du « Ségur », mais également avec la revalorisation de 3,5 % du point d’indice de la fonction publique intervenue en juillet 2022 et la compensation des effets de l’inflation sur les charges des établissements de santé et des établissements et services médico-sociaux (2,2 milliards d’euros d’effet cumulé). Cette progression sera également rehaussée par rapport à celle de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, alors à 3,5 %, en conséquence des annonces faites par le Président de la République lors de ses vœux aux acteurs de la santé le 6 janvier 2023. La progression tendancielle de l’ONDAM, c’est-à-dire avant mesures d’économies, atteindrait 4,4 % cette année, tenant compte, au-delà des effets liés au contexte d’inflation, de la montée en charge des mesures nouvelles dans ce champ, en ville, à l’hôpital et dans le secteur médico-social, et des économies permises par la maîtrise médicalisée et la lutte contre la fraude. L’atteinte du taux de progression de 3,8 % hors crise sera permise par les mesures de régulation et d’économies, s’élevant à un total de 1,7 milliard d’euros. Dans une perspective pluriannuelle, le taux de progression de l’ONDAM hors crise serait ramené à 2,8 % en 2024, puis à 2,7 % en 2025 et à 2,6 % en 2026.
Dans le champ des régimes de base de retraite, la trajectoire intègre les dispositions présentées dans la présente loi, portant une hausse progressive de l’âge d’ouverture des droits (AOD) de soixante-deux à soixante-quatre ans, au rythme d’un trimestre par génération à compter du 1er septembre 2023, et une accélération de la durée d’assurance requise (DAR), au rythme d’un trimestre par génération, contre un trimestre toutes les trois générations jusqu’à présent. La trajectoire intègre également des mesures d’accompagnement et de hausse des minima de pensions. Ces mesures viseront en premier lieu à dispenser de la hausse de l’AOD les personnes inaptes au travail ou reconnues invalides. Elles permettront également aux assurés ayant commencé à travailler précocement de partir plus tôt que l’âge de droit commun avec notamment un renforcement du dispositif « carrières longues », développeront les transitions entre l’activité et la retraite et amélioreront les dispositifs de prévention et de réparation de l’usure professionnelle. Enfin, les minima de pension seront revalorisés pour les nouveaux retraités à partir de 2023, mais également pour ceux déjà partis à la retraite et bénéficiant du minimum contributif. La réforme emporte également des mesures en recettes, avec des hausses des taux des cotisations vieillesse dues par les employeurs publics (CNRACL) et par les employeurs privés, cette hausse étant compensée pour ces derniers par une baisse à due concurrence des cotisations AT-MP. Pour les employeurs publics de la CNRACL, l’État compensera intégralement le surcoût qui en résulte dès 2023, selon des modalités définies en loi de finances. La présente annexe porte sur le champ des régimes obligatoires de base et du FSV à l’horizon 2026, mais la réforme des retraites présentée dans la présente loi de financement rectificative de la sécurité sociale aura des impacts financiers qui monteront en charge au-delà de 2026, ainsi que sur les régimes complémentaires. Il est également tenu compte des propositions parlementaires tendant à une harmonisation des prélèvements applicables aux indemnités de rupture. Le système de retraite pris dans son ensemble retournera ainsi à l’équilibre à l’horizon 2030. Une étude d’impact financière spécifique a été jointe au projet de loi.
Dans le champ de la famille, la trajectoire intègre, sur un horizon pluriannuel, la réforme du service public de la petite enfance ainsi que celle du complément de mode de garde et l’augmentation de l’allocation de soutien familial intervenue en novembre 2022.
Dans le champ de l’autonomie, elle intègre un plan de recrutements d’aides-soignants et d’infirmiers en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), l’accroissement des moyens consacrés au maintien à domicile avec le développement des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) et la mise en place de temps dédiés au lien social auprès de nos aînés bénéficiant d’un plan d’aide à domicile.
Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), dans son avis n° 2023-1 du 18 janvier 2023 relatif au projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, « considère que la prévision de croissance [pour 2023] associée au PLFRSS reste élevée » et que les prévisions d’inflation et de masse salariale sont « un peu basses ». S’agissant de la trajectoire des comptes publics et de l’impact de la réforme des retraites sur l’équilibre 2023, il considère que le « coût net estimé à 0,4 Md€ […] est réaliste ».
II. – Au-delà du contexte macroéconomique, la trajectoire financière traduit la normalisation progressive de la situation sanitaire et la mise en œuvre des mesures votées en loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, ainsi que la réforme du système de retraite présentée dans la présente loi.
Comme lors de la crise économique et financière de 2008-2009, la sécurité sociale a joué un rôle majeur d’amortisseur économique et social, tant en matière de prélèvements que de dépenses. Majoritairement proportionnelles au niveau d’activité, les recettes se sont fortement contractées alors que les dépenses se sont maintenues s’agissant des prestations retraites et famille, dont les déterminants ne sont pas affectés par la crise, et ont fortement progressé pour ce qui concerne la branche Maladie.
Après un net rebond en 2021, à + 8,0 % sur l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (ROBSS) et du FSV pris à périmètre constant, les recettes auraient continué de progresser de + 5,3 % en 2022 selon les prévisions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, portées par la progression de l’emploi et des salaires, dans un contexte de forte inflation produisant ses effets au-delà des règles d’indexation automatique du salaire minimum (+ 8,6 % de progression de la masse salariale privée). Dans le même temps, les dépenses ont également été dynamiques, mais dans une moindre proportion. Elles progresseraient de 4,1 % en valeur en 2022. En résultante, le déficit des régimes obligatoires de base et du FSV diminuerait à nouveau en 2022, de 5,4 milliards d’euros, et s’établirait à 18,9 milliards d’euros.
En 2023, le déficit des régimes obligatoires de base et du FSV atteindrait 8,2 milliards d’euros, en très nette amélioration par rapport à 2022 (10,7 milliards d’euros). Les dépenses ne progresseraient que de 2,1 %, à la faveur d’une diminution des dépenses sous ONDAM du fait de dépenses liées à la crise attendues en net repli, provisionnées à hauteur de 1 milliard d’euros, mais avec une poursuite des effets de l’inflation sur les prestations : à la revalorisation anticipée de 4,1 % de juillet 2022 s’est ainsi ajoutée une revalorisation de 0,8 % au 1er janvier 2023 pour les retraites, et s’ajouterait au 1er avril 2023 pour les autres prestations sociales une revalorisation de 1,7 %. Les recettes croîtraient de 4,0 %, soutenues par la masse salariale du secteur privé.
À partir de 2024, les prestations continueraient d’être portées par le contexte d’inflation persistant, mais avec un effet retard moyen d’une année pour les pensions et les autres prestations, alors que les recettes réagiraient davantage au contexte contemporain de l’année. Le ralentissement progressif de l’inflation, au rythme d’un point par an environ (de 4,3 % en 2023 à 2,1 % en 2025), participerait ainsi à une dégradation du solde en 2024 et à nouveau en 2025, malgré une progression maîtrisée de l’ONDAM et la montée en charge progressive de la réforme des retraites. En 2024, le déficit des régimes obligatoires de base et du FSV se creuserait ainsi à 9,6 milliards d’euros, les recettes évoluant de + 4,2 %, légèrement en deçà de la dépense (+ 4,3 %). En 2025, il atteindrait 13,5 milliards d’euros, avec une progression des recettes de + 3,1 %, moindre que celle des dépenses (+ 3,7 %). Le déficit se réduirait à partir de 2026, l’effet du différentiel d’inflation d’une année sur l’autre disparaissant quasiment alors que les effets de la réforme des retraites continueraient de monter en charge. Il atteindrait ainsi 13,1 milliards d’euros à cet horizon.
III. – D’ici 2026, les branches des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale connaîtraient des évolutions différenciées.
La branche Maladie, qui connaîtrait une nouvelle résorption de son déficit en 2022 avec un solde atteignant -21,9 milliards d’euros, verrait son solde se redresser plus nettement, à -7,9 milliards d’euros en 2023, sous l’effet de dépenses de crise attendues en très nette baisse (1 milliard d’euros provisionnés). L’amélioration du solde serait par ailleurs soutenue par le transfert pérenne du coût des indemnités journalières liées au congé maternité postnatal, de 2 milliards d’euros en 2023.
Le projet de loi prévoit un financement du fonds de prévention à l’usure professionnelle en soutien aux employeurs des établissements publics de santé et médico-sociaux. Les effets et le financement de la hausse du taux des cotisations vieillesse CNRACL sont intégrés dans la trajectoire. La branche Maladie verrait son solde s’améliorer continuellement à l’horizon 2026, en raison à la fois de recettes dynamiques et de dépenses évoluant de manière contenue. En 2026, son déficit s’établirait à 4,0 milliards d’euros.
La branche Autonomie verrait son solde passer en déficit en 2022, à - 0,4 milliard d’euros, et se creuser à nouveau en 2023, sous l’effet d’un objectif global de dépenses porté respectivement à 5,1 % et à 5,2 % dans les champs des personnes âgées et des personnes handicapées. Il atteindrait - 1,3 milliard d’euros en 2023.
À partir de 2024, la branche Autonomie bénéficiera d’une fraction de CSG augmentée de 0,15 point supplémentaire de la part de la CADES, en application de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie. La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) afficherait alors un excédent de 0,7 milliard d’euros, qui diminuerait par la suite, du fait notamment de 50 000 créations à terme de postes en Ehpad et du financement de temps dédiés au lien social auprès des personnes âgées qui bénéficient d’un plan d’aide à domicile. La branche financera par ailleurs la meilleure prise en compte des trimestres cotisés au titre du congé proche aidant dans le cadre de la présente réforme.
S’agissant de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), son excédent passerait à 2,0 milliards d’euros en 2022, puis s’élèverait à 2,2 milliards d’euros en 2023. À partir de 2024, la branche verrait le niveau de ses cotisations baisser au bénéfice de la branche vieillesse, puis de nouveau en 2026. De plus, elle prendrait en charge de nouvelles dépenses liées à la meilleure prise en compte de la pénibilité et de l’usure professionnelle dans le cadre de la réforme. Au total, son excédent atteindrait toutefois encore 1,4 milliard d’euros en 2026.
Le solde de la branche Vieillesse des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et du FSV poursuivrait en 2022 son amélioration engagée en 2021, après le creux enregistré en 2020, à - 1,2 milliard d’euros.
À partir de 2023, le solde de la branche serait directement affecté par les effets démographiques du vieillissement (augmentation de la taille des générations qui partent à la retraite) et par la dégradation marquée du solde de la CNRACL, mais bénéficierait de la hausse progressive de l’âge effectif de départ portée par la présente loi. Le solde de la branche serait également particulièrement sensible au contexte d’inflation, notamment au ralentissement projeté des prix, avec comme conséquence une progression des recettes en phase avec le contexte de prix de l’année, moindre cependant que l’inflation de l’année précédente dont s’approche le taux de revalorisation appliqué au 1er janvier de l’année. Ainsi, en 2023, les revalorisations des pensions liées à la prise en compte de l’inflation porteraient la progression des charges de la branche vieillesse et du FSV à 4,5 %, contre 4,0 % pour les recettes. Le déficit de la branche, y compris fonds de solidarité vieillesse, atteindrait ainsi 2,5 milliards d’euros en 2023 et jusqu’à 11,3 milliards d’euros à l’horizon 2026. Les éléments relatifs à l’ensemble des régimes, qui permettent d’atteindre l’équilibre à l’horizon 2030, sont présentés dans l’étude d’impact du projet de loi.
La branche Famille verrait son excédent se réduire légèrement en 2022, à 2,6 milliards d’euros, reflétant le transfert d’une fraction de taxe sur les salaires à la branche Maladie décidé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 pour compenser le coût lié aux indemnités journalières dérogatoires pour garde d’enfants (1,0 milliard d’euros) supporté par cette branche.
L’excédent serait moindre en 2023 en raison du transfert de la part du congé maternité postnatal, pour 2,0 milliards d’euros, prévu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022. De plus, conformément aux engagements du Président de la République, l’allocation de soutien familial a été revalorisée de 50 % en novembre 2022. L’excédent de la branche Famille diminuerait ainsi de moitié, pour s’établir à 1,3 milliard d’euros en 2023.
À l’horizon 2026, l’excédent de la branche diminuerait et s’élèverait à 0,8 milliard d’euros, du fait de dépenses portées par l’indexation des prestations légales et de la montée en charge des mesures du quinquennat concernant la branche Famille s’agissant du complément de mode de garde et du service public de la petite enfance.
Prévisions des recettes, dépenses et soldes des régimes de base et du FSV
Recettes, dépenses et soldes de l’ensemble des régimes obligatoires de base
(En milliards d’euros) |
||||||||
|
2019 |
2020 |
2021 |
2022 (p) |
2023 (p) |
2024 (p) |
2025 (p) |
2026 (p) |
Maladie |
||||||||
Recettes |
216,6 |
209,8 |
209,4 |
221,0 |
231,2 |
238,4 |
244,7 |
251,7 |
Dépenses |
218,1 |
240,3 |
235,4 |
242,9 |
239,1 |
244,6 |
250,5 |
255,8 |
Solde |
-1,5 |
-30,5 |
-26,1 |
-21,9 |
-7,9 |
-6,2 |
-5,8 |
-4,0 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
||||||||
Recettes |
14,7 |
13,5 |
15,1 |
16,2 |
17,0 |
16,9 |
17,5 |
17,5 |
Dépenses |
13,6 |
13,6 |
13,9 |
14,2 |
14,8 |
15,3 |
15,7 |
16,1 |
Solde |
1,1 |
-0,1 |
1,3 |
2,0 |
2,2 |
1,6 |
1,8 |
1,4 |
Famille |
||||||||
Recettes |
51,4 |
48,2 |
51,8 |
53,5 |
56,7 |
58,5 |
60,3 |
62,2 |
Dépenses |
49,9 |
50,0 |
48,9 |
50,9 |
55,3 |
57,7 |
59,8 |
61,4 |
Solde |
1,5 |
-1,8 |
2,9 |
2,6 |
1,3 |
0,8 |
0,5 |
0,8 |
Vieillesse |
||||||||
Recettes |
240,0 |
241,2 |
249,4 |
258,9 |
269,8 |
282,0 |
291,2 |
300,2 |
Dépenses |
241,3 |
246,1 |
250,5 |
261,9 |
273,7 |
290,3 |
303,7 |
314,3 |
Solde |
-1,3 |
-4,9 |
-1,1 |
-3,0 |
-3,8 |
-8,2 |
-12,5 |
-14,2 |
Autonomie |
||||||||
Recettes |
32,8 |
35,0 |
36,3 |
40,3 |
41,3 |
42,5 |
||
Dépenses |
32,6 |
35,4 |
37,5 |
39,6 |
41,1 |
42,4 |
||
Solde |
0,3 |
-0,4 |
-1,3 |
0,7 |
0,2 |
0,2 |
||
Régimes obligatoires de base de sécurité sociale consolidés |
||||||||
Recettes |
509,1 |
499,3 |
544,2 |
569,6 |
593,3 |
617,7 |
636,5 |
655,2 |
Dépenses |
509,2 |
536,5 |
567,0 |
590,3 |
602,8 |
629,0 |
652,2 |
671,1 |
Solde |
-0,2 |
-37,3 |
-22,7 |
-20,7 |
-9,5 |
-11,4 |
-15,8 |
-15,9 |
Recettes, dépenses et soldes du Fonds de solidarité vieillesse
(En milliards d’euros) |
||||||||
|
2019 |
2020 |
2021 |
2022 (p) |
2023 (p) |
2024 (p) |
2025 (p) |
2026 (p) |
Recettes |
17,2 |
16,7 |
17,7 |
19,8 |
20,6 |
21,5 |
22,2 |
23,1 |
Dépenses |
18,8 |
19,1 |
19,3 |
18,0 |
19,3 |
19,7 |
19,9 |
20,3 |
Solde |
-1,6 |
-2,5 |
-1,5 |
1,8 |
1,3 |
1,8 |
2,3 |
2,8 |
Recettes, dépenses et soldes des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse
(En milliards d’euros) |
||||||||
|
2019 |
2020 |
2021 |
2022 (p) |
2023 (p) |
2024 (p) |
2025 (p) |
2026 (p) |
Recettes |
508,0 |
497,2 |
543,0 |
571,8 |
595,0 |
619,8 |
639,1 |
658,3 |
Dépenses |
509,7 |
536,9 |
567,3 |
590,7 |
603,2 |
629,4 |
652,6 |
671,4 |
Solde |
-1,7 |
-39,7 |
-24,3 |
-18,9 |
-8,2 |
-9,6 |
-13,5 |
-13,1 |
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Comme je viens de l’indiquer dans mon intervention liminaire, cet amendement vise à modifier l’annexe obligatoire présentant les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre par branche des régimes obligatoires de base pour les années à venir.
Il s’agit d’un amendement de coordination, dont l’adoption permettrait de tenir compte, en conformité avec le principe de sincérité des lois financières, des impacts financiers des amendements adoptés au Sénat, ainsi que des modifications effectuées par la commission mixte paritaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ? (Exclamations sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. Guy Benarroche. La commission s’est-elle réunie ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. La commission ne s’est pas réunie. (Protestations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
Mme Éliane Assassi. Pourquoi ne s’est-elle pas réunie ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. Toutefois, à titre personnel, j’émets un avis favorable sur cet amendement, qui est conforme au principe de sincérité. (Mêmes mouvements.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Quelle honte !
Mme Laurence Cohen. C’est cela la démocratie ? Bravo !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. Ses dispositions sont la traduction des accords qui ont été trouvés hier en commission mixte paritaire, mais aussi des votes du Sénat.
M. David Assouline. Personne n’a pu lire ces six pages !
M. le président. L’amendement est consultable en ligne. (Murmures sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mes chers collègues, il va vous être distribué.
(L’amendement est distribué.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le ministre, nous découvrons cet amendement ce matin. Il vise à corriger le tableau figurant à l’annexe 6, pour tenir compte des travaux de la commission mixte paritaire.
Les conclusions de la CMP sont connues de tous, et il est évident qu’elles ont une incidence sur le tableau. Si vous souhaitez toutefois, mes chers collègues, que la commission se prononce dans les formes, je vous propose de la réunir quelques instants au salon Victor Hugo. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Le texte de cet amendement est long, puisqu’il reprend l’intégralité de l’annexe A. En réalité, il ne comporte qu’une seule modification.
Il s’agit, comme je l’ai annoncé dans mon intervention liminaire, d’un nouveau transfert de recettes entre la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) et la branche vieillesse, pour garantir l’équilibre de notre système de retraites. Le montant de ce transfert est de 700 millions d’euros.
C’est la seule évolution notable qui figure dans cet amendement.
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour un rappel au règlement.
Mme Laurence Cohen. Mon intervention se fonde sur l’article 44 de notre règlement.
Je remercie Mme la présidente de la commission des affaires sociales de réunir – enfin ! – la commission. En effet, pendant toute la durée de l’examen de ce texte, malgré nos nombreux rappels au règlement, ce privilège nous a été refusé. C’est dire combien la démocratie a été bafouée… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Franchement, nous distribuer ainsi un amendement de sept pages, sans suspension de séance à l’origine, en nous disant qu’il n’y a pas de modification notable, n’est-ce pas, également, bafouer les droits des parlementaires ?
Nous acceptons donc les quelques minutes grappillées grâce à la générosité de Mme la présidente. Mais j’attire votre attention, mes chers collègues, sur la façon dont les sénateurs, notamment ceux de l’opposition, sont traités. C’est une remise en cause du parlementarisme ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.)
M. le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à neuf heures trente-cinq, est reprise à neuf heures cinquante.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 1 ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. La commission des affaires sociales s’est réunie et a émis un avis favorable sur cet amendement.
Pour autant, je souhaite vous faire part d’un certain nombre de réflexions suscitées par cette suspension de séance. Je crois que notre manière de présenter cet amendement n’a pas été la bonne. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Sans blague ?
Mme Michelle Meunier. C’est bien de le reconnaître !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. Nous aurions dû diffuser un tableau informant nos collègues des traductions budgétaires des différents amendements votés au Sénat.
Par ailleurs, il est exact qu’il n’est pas possible de prendre connaissance en quelques minutes d’un amendement de plusieurs pages, même s’il ne tend à apporter qu’un seul changement dans une ligne budgétaire. Nous devons donc employer des méthodes différentes, car celle qui a été mise en œuvre aujourd’hui me paraît en effet très contestable. (M. Pierre Louault applaudit.)
M. Victorin Lurel. Dans ce cas, ne votez pas ce texte !
M. le président. Le vote sur l’ensemble constitué par l’article 6 et l’annexe, modifié, est réservé.
articles 7 à 20
M. le président. Sur les articles 7 à 20, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…
Le vote est réservé.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de passer au vote, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui ont été inscrits pour expliquer leur vote.
J’indique au Sénat que, compte tenu de l’organisation du débat décidée par la conférence des présidents, chacun des groupes dispose de cinq minutes pour ces explications de vote, à raison d’un orateur par groupe, l’orateur de la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes.
La parole est à Mme Catherine Deroche, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Annick Billon et Évelyne Perrot applaudissent également.)
Mme Catherine Deroche. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la CMP qui s’est tenue hier a marqué une étape importante dans le parcours d’un texte qui, après un examen tronqué à l’Assemblée nationale, suivi d’un long examen au Sénat, au terme duquel son volume a plus que doublé, a poursuivi le cheminement ordinaire de la procédure parlementaire.
Réunie pendant plus de huit heures et demie, la CMP a procédé à une revue attentive des différents articles, notamment au fil de différentes propositions de suppression.
Nos collègues députés, empêchés en première lecture de débattre du recul de l’âge légal, des carrières longues ou encore des équilibres financiers du texte ont cette fois pu le faire, ce qui a permis aux différentes sensibilités de s’exprimer avant de passer au vote.
Cela a été rappelé à de nombreuses reprises, le Sénat, soucieux de la pérennité de notre modèle social et de notre capacité collective à en faire bénéficier les générations futures, porte cette réforme de longue date.
Les évolutions démographiques et sociales nous y obligent, car l’émergence de besoins sociaux accrus liés au vieillissement, à la santé ou encore à la nécessité d’investir pour notre jeunesse et l’avenir de notre pays ne nous permet pas de dégager des marges supplémentaires pour le financement des retraites.
Comme je l’indiquais dans la discussion générale, consacrer une part très importante de notre richesse nationale aux retraites relève d’un choix implicite, qu’il nous revient aujourd’hui de clarifier, d’interroger et de discuter. Une part des gains d’espérance de vie qui se poursuivent doit être mobilisée pour le bien commun et la consolidation du financement des retraites.
Deux autres éléments supplémentaires plaident en ce sens.
D’une part, les sexagénaires d’aujourd’hui n’ont que peu à voir avec leurs aînés des années 1950, qui partaient pourtant à la retraite à 65 ans et pour peu de temps.
D’autre part, notre système de retraites s’est enrichi au fil du temps de dispositifs de solidarité qui atténuent les inégalités de carrière et corrigent les effets des règles générales pour les publics qui sont les plus vulnérables pour des raisons de santé, de carrière ou de revenus.
C’est pourquoi la présente réforme pèse beaucoup moins que les précédentes sur les publics fragiles. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Son examen au Sénat a permis de renforcer cette caractéristique. Nous avons voulu prendre en considération la situation de ceux qui ne peuvent travailler plus longtemps, parce qu’ils ont commencé tôt, parce qu’ils sont en mauvaise santé ou parce que leur fin de carrière manque de perspectives.
Au-delà des atténuations des effets de la réforme, le texte comporte des avancées pour les apprentis, les stagiaires, les étudiants ou les élus locaux. Il s’inscrit dans une tendance, jamais démentie, d’élargissement et d’enrichissement de notre système social.
Finalement, le texte issu de la CMP propose une réforme qui garantit l’avenir de notre système de retraite sans toutefois faire peser l’effort sur ceux qui ne pourraient le supporter.
C’est pourquoi le groupe Les Républicains invite le Sénat à le voter et à prendre ses responsabilités avec courage, comme il l’a fait de manière constante. Nous sommes conscients que ce projet de loi marque une étape et qu’il doit s’accompagner de changements profonds dans la prise en compte des salariés les plus âgés. Dans une économie souffrant d’une pénurie de main-d’œuvre, il est évident que ceux-ci ont toute leur place.
Ce chantier est celui des entreprises et des partenaires sociaux avant d’être celui de la loi. Néanmoins, si des changements législatifs se révélaient nécessaires, nous répondrions présents, comme nous l’avons fait pour la santé au travail, l’assurance chômage et toutes les réformes affectant le fonctionnement du marché du travail.
La retraite ne saurait être le seul horizon pour les jeunes qui ont, avant de l’atteindre, toute leur vie à construire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions. – MM. Olivier Cadic et Vincent Capo-Canellas applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme Colette Mélot. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, plus de cent heures de débats au Sénat, plusieurs milliers d’amendements examinés, dix jours de discussions et, enfin, nous y sommes !
Enfin, ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale trouve une issue. La CMP s’est réunie hier. Nous devons désormais adopter le texte qui en résulte.
C’est pourquoi, je le dis d’emblée, notre groupe votera cette réforme des retraites. Notre objectif est non pas de vendre du rêve aux Français (Exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE.), mais bien de fonder la politique sur la réalité.
Cette réalité, elle est limpide. Il y avait quatre actifs pour un retraité dans les années 1960 ; trois cotisants pour un retraité dans les années 1970 ; et, en 2023, il y a 1,7 cotisant par retraité… Face à ce constat, qui peut croire que notre modèle social, en l’état, est pérenne ? Il ne l’est pas. Le Gouvernement se devait d’agir.
Le choix était binaire. Augmenter les prélèvements revenait à pénaliser le pouvoir d’achat des Français dans un contexte déjà difficile. Accroître le temps de travail restait donc la seule solution réaliste, alors que l’espérance de vie progresse encore.
Cette réforme permettra de sauver notre régime par répartition et de préserver le pouvoir d’achat des Français. Nous saluons ainsi le report de deux ans de l’âge légal. Il s’agit d’une nécessité pour l’équilibre de notre système.
Nous regrettons toutefois que l’ajout d’une dose de capitalisation collective dans notre système par répartition n’ait pas été retenu. Il nous faudra à l’avenir réfléchir à cette question.
Si de nombreux Français se sont inquiétés de certains aspects de cette réforme, notamment sur les carrières longues, la CMP est parvenue à trouver une solution à ce sujet.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires avait choisi, lors des débats, de porter un amendement visant à favoriser les carrières longues, idée partagée par de nombreux sénateurs. Nous nous réjouissons donc que le dispositif adopté permette à tous ceux qui ont cotisé au moins cinq trimestres avant 21 ans de partir plus tôt, sans avoir à cotiser plus de 43 annuités. Le coût, de l’ordre de 700 millions d’euros à l’horizon de 2030, est important, mais cette mesure a le mérite de donner plus de lisibilité à la réforme et d’en garantir l’équité.
C’est la preuve que le compromis et le consensus sont possibles.
Par ailleurs, ce texte contient plusieurs mesures de justice sociale. Les régimes spéciaux avaient été conçus à des périodes où les circonstances l’imposaient, en raison de mauvaises conditions de travail. De nombreux progrès ont été réalisés en la matière, ce qui justifie leur suppression progressive. Le régime général apparaît désormais plus juste pour l’ensemble des Français. Nous saluons donc le maintien de cette mesure par la CMP.
Nous saluons également la surcote, allant jusqu’à 5 %, pour les mères de famille ayant réalisé une carrière complète. C’était une nécessité. Cette surcote vient combler un manque et rend hommage à ces femmes qui, tout en travaillant pour subvenir aux besoins de leur famille, participent activement à l’éducation de leurs enfants.
Il est d’ailleurs juste d’avoir étendu aux professions libérales la majoration de 10 % de la pension à partir du troisième enfant, tout comme il est juste d’avoir intégré les indemnités journalières de maternité dans le calcul de la pension.
Nous nous réjouissons de l’adoption de l’assurance vieillesse du parent au foyer (AVPF), qui va bénéficier à près de 40 000 personnes par an. C’est un dispositif que nous soutenons et qui va dans le bon sens, même si certains d’entre nous auraient souhaité aller plus loin.
De plus, la prise en compte d’une majoration de trimestres au bénéfice des pompiers volontaires représente une avancée tout à fait justifiée, que nous avions nous-mêmes défendue.
Sceptiques quant au CDI senior qui a été proposé, nous sommes rassurés de constater qu’il n’a été maintenu qu’à titre expérimental. Cela permettra d’en juger l’efficacité, avant, éventuellement, de le généraliser. Dans le même registre, l’index seniors peut être un atout.
Nous ne doutons pas que cette politique volontariste en faveur de l’emploi des seniors trouvera son aboutissement dans la future loi Travail. Les échanges entre les générations sont une richesse pour les entreprises et doivent être encouragés.
Ainsi, avec toutes ces mesures, cette réforme est juste et s’inscrit dans le pacte social français. Elle est un moyen de garantir la pérennité de notre système de retraites, ce qui est indispensable.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera donc pour l’adoption de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Bernard Buis applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le texte soumis au vote du Parlement aujourd’hui est le fruit d’une CMP sans suspense, au cours de laquelle l’opposition a pris connaissance du résultat de réaménagements à la marge, négociés en amont avec le Gouvernement pour assurer les votes de la droite dans les deux chambres.
Dans le cadre d’un budget alloué aux mesures d’atténuation de la brutalité de la réforme, nous avons assisté au compromis final, troquant une mesure contre une autre, tout en préservant la philosophie générale, qui est de faire travailler plus, par le report de 62 ans à 64 ans de l’âge ouvrant droit à la retraite.
Ainsi, le CDI senior, proposé par le Sénat, a été cantonné à une expérimentation, afin de libérer quelques centaines de millions d’euros pour un meilleur calibrage des carrières longues, dont dépendaient quelques votes de l’Assemblée nationale.
Ne soutenant pas la première mesure, et constatant que la seconde n’a pas atteint son but, nous remarquons néanmoins que la droite sénatoriale a consenti à abandonner une partie de ses amendements et remaniements du texte pour éviter un 49.3 à l’Assemblée nationale, après avoir consenti au 44.3 au Sénat.
Défendue depuis plusieurs années, cette réforme valait bien quelques sacrifices du rôle du Parlement… Son cœur est inchangé, tout comme son injustice et sa brutalité, ou sa dimension productiviste, puisque son impact a été évalué au gain d’un point de PIB.
Un point de PIB, au prix, pour beaucoup, d’un prolongement du sas de précarité et de pauvreté, d’une explosion des arrêts maladie de longue durée, du chômage ou du basculement dans les minimas, soit un coût social inédit et une fracture sociale approfondie, ignorée par les partisans de la réforme, qui n’ont rien d’autre à proposer qu’un index non contraignant, l’expérimentation d’un CDI fin de carrière, prétexte à de nouvelles exonérations, et un peu de surcote, contre la liberté de partir à la retraite.
Un point de PIB, vanté à coups de mensonges sur les 1 200 euros et de marchandages entre les droites et le Gouvernement, pour troquer une mesure d’atténuation contre une autre, avec l’objectif partagé de réaliser l’économie des dépenses sociales qui financera, in fine, les nouvelles baisses d’impôts des plus fortunés.
Un point de PIB, en imposant une augmentation contrainte de l’offre de travail et la concurrence entre travailleurs pour faire pression sur les salaires, après avoir dérégulé le marché de l’emploi, permis la dégradation des conditions de travail et voté une restriction des droits au chômage.
Un point de PIB, à contre-courant, ignorant les transformations sociétales et sociales en cours, la crise de l’attractivité, les vagues de démissions et le ras-le-bol face à la subordination salariale, au manque d’autonomie et de sens au travail.
Un point de PIB, que vous grappillez encore sur le travail, aggravant l’inégalité du partage des richesses, alors que la ponction des dividendes explose et capte, justement, de plus en plus de points de PIB.
Un point de PIB, parce que vous ignorez la diversité et l’utilité des services non marchands et le logiciel nouveau pour relever les défis sociaux et climatiques de notre siècle.
Un point de PIB, contre les préconisations du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), arraché à la Terre, alors que la France dépasse déjà six des neuf limites planétaires et que s’aggravent les inégalités de patrimoines inconciliables avec la bifurcation écologique.
Un point de PIB, parce que vous êtes prisonniers d’un logiciel productiviste, incapables d’imaginer une prospérité sans croissance, où serait possible, et même nécessaire, une réduction du temps de travail.
Un point de PIB, enfin, en bafouant les corps intermédiaires, acteurs représentatifs de la démocratie sociale moderne, en brutalisant le Parlement, en ignorant le refus radical de cette réforme par le peuple français, en l’imposant comme si ce n’était qu’un mauvais moment à passer.
Vous vous trompez ! Votre refus de la solution de cette impasse, à savoir le recours au référendum, est un nouvel aveu de faiblesse. Retirez votre projet ou soumettez-le au référendum, car vous n’avez pas de mandat du peuple français pour cette réforme.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera contre ce texte, bien entendu, et il vous appelle, messieurs les ministres, à faire preuve de responsabilité et à retirer votre réforme. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Évelyne Perrot applaudit également.)
M. Xavier Iacovelli. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous arrivons au terme de ce débat sur la réforme des retraites. Après soixante-quatorze heures de discussions à l’Assemblée nationale, cent neuf heures au Sénat et neuf heures en CMP, personne ne pourra nier que nous avons eu le temps de débattre sur le fond.
Certains ont remis en cause la légitimité des outils prévus par notre Constitution ou notre règlement intérieur. Mais l’obstruction d’une minorité n’aura pas empêché la majorité d’entre nous, qui souhaitions améliorer ce texte, de faire ce pour quoi nous sommes élus : voter la loi.
Mme Éliane Assassi. Pas contre le peuple !
M. Xavier Iacovelli. Je me félicite, mes chers collègues, que nous ayons abouti à ce texte, car c’est le fruit du travail parlementaire – le fruit du travail de toutes les sensibilités de notre chambre.
En trouvant un compromis, nous avons répondu à la nécessité d’équilibrer notre système de retraite tout en assurant des droits et progrès nouveaux.
Le travail est au cœur de cette réforme. Vous l’avez rappelé, messieurs les ministres, alors que certains considèrent que le travail est une contrainte et une soumission à un système qui exploite les citoyens, nous y voyons la possibilité de jouer un rôle et d’occuper une place dans la société.
M. Christian Cambon. Très bien !
M. Xavier Iacovelli. Le travail crée du lien social et offre les conditions de l’émancipation et de la dignité.
M. Christian Cambon. Bien sûr !
M. Xavier Iacovelli. Oui, mes chers collègues, nombre de nos concitoyens s’épanouissent dans leur vie active. Ils y trouvent un sens et une place dans notre société.
Il n’y a pas de déni dans mes propos : certains métiers sont moins épanouissants que d’autres, plus usants et plus pénibles, et il faut donc adapter notre système à ces publics fragiles. C’est ce que nous avons fait dans ce projet de loi.
Nous avons axé nos travaux sur des points essentiels, porteurs d’avancées et de solidarité pour les Françaises et les Français. C’est ainsi que nous avons renforcé les droits familiaux, par la création d’une surcote pour les mères qui auraient atteint la durée d’assurance requise à 63 ans, par l’extension aux professions libérales de la majoration de 10 % de la pension à partir du troisième enfant, ou encore par la prise en compte des congés maternité.
Nous avons aussi souhaité, après en avoir débattu en CMP, conserver la proposition de la présidente Billon, qui consiste à ne pas attribuer de trimestres aux parents condamnés pour violences et maltraitances à l’encontre de leur enfant.
M. Loïc Hervé. Beau travail !
M. Xavier Iacovelli. Nous avons fixé un minimum de deux trimestres de majoration au titre de l’éducation des enfants au bénéfice de la mère. Cette mesure, portée par la présidente Rossignol, protégera de fait les femmes.
Nous avons souhaité soutenir les publics les plus fragiles, notamment par la réversion de la pension pour les orphelins, avec des mesures spécifiques pour les enfants porteurs de handicaps, ou par la revalorisation des retraites et de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) à Mayotte, défendue par notre collège Thani Mohamed Soilihi.
Nous avons aussi adopté plusieurs mesures pour rendre notre système plus juste, par une meilleure prise en compte des carrières hachées, le renforcement des droits à la retraite des aidants, l’attribution de la durée d’assurance au titre de l’éducation en cas de décès de l’enfant, l’intégration des périodes d’emploi des stagiaires et des apprentis dans le calcul des droits à la retraite et la majoration pour les sapeurs-pompiers.
Nous avons aussi assoupli le dispositif carrières longues, qui a tant fait débat. En créant une barrière d’âge à 18 ans et une autre à 21 ans, qui s’ajoutent à celles de 16 ans et 20 ans, et en supprimant le dispositif de la loi Touraine, qui imposait jusqu’à deux ans de cotisations supplémentaires à ceux qui ont travaillé avant l’âge de 16 ans, nous avons fait en sorte que plus aucune personne ayant travaillé avant 21 ans ne soit obligée de travailler plus que 43 annuités. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. Fabien Gay. C’est faux !
M. Xavier Iacovelli. Cette réforme permettra également une prise en compte de l’usure professionnelle, par l’élargissement de l’accès au compte professionnel de prévention et par la création d’un fonds d’investissement dans la prévention doté de 1 milliard d’euros.
Ce texte, mes chers collègues, a été considérablement enrichi par le Sénat, ce qui renforce le rôle de notre chambre dans la fabrique de la loi.
Notre système par répartition tout entier est bien bâti sur la solidarité intergénérationnelle entre actifs et retraités. Nous votons pour une société plus solidaire, prospère et pérenne.
Devant une réalité démographique qui est implacable, cela a été rappelé, nous faisons le choix de la responsabilité.
Face au déséquilibre de nos finances publiques, nous faisons le choix du travail.
Confrontés au risque d’une paupérisation sociale, nous faisons le choix de l’équité.
Parce que nous valoriserons toujours le travail par rapport à la taxation excessive, notre groupe votera en faveur de ce texte et des conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et GEST.)
Mme Monique Lubin. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, j’avais travaillé un texte pour mon explication de vote sur l’ensemble de ce texte, comme nous le faisons en règle générale.
Seulement voilà, parce que j’ai entendu les discours des ministres et d’autres propos encore, je ne l’utiliserai pas.
M. Christian Cambon. Quel dommage !
M. Éric Bocquet. Très bien !
Mme Monique Lubin. Je vous parlerai plutôt avec mes tripes. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laurence Cohen. Pas de commentaires, chers collègues de la droite !
Mme Monique Lubin. Monsieur Dussopt, vous avez pris soin d’expliquer à quel point le débat s’était mal déroulé dans nos deux assemblées.
Tout en nuançant vos propos lorsque vous parliez du Sénat, vous avez tout de même critiqué la façon dont nous avons travaillé. Or nous avons œuvré très sérieusement. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et GEST.)
Les oppositions, comme la majorité, j’imagine, ont préparé leur sujet pendant des semaines.
Oui, monsieur le ministre, nous avons usé de notre droit d’amendement. Si nous ne l’avions pas fait, je ne vois pas bien comment nous aurions pu débattre. Vous avez tout fait, à commencer par le choix du véhicule législatif, pour nous empêcher d’aller au fond du sujet et de discuter. Vous avez tout fait pour réduire le temps du débat.
Alors, oui, nous avons déposé des amendements, parce que nous voulions vous pousser jusque dans vos retranchements. Si nous avons agi de la sorte, c’est parce que nous accompagnons le mouvement social et ces millions de salariés qui ne veulent pas du report de l’âge de la retraite. (Applaudissements sur les mêmes travées.)
Quant à vous, monsieur Attal, vous nous promettez, comme d’habitude, l’enfer et la faillite. Tout cela n’est pas sérieux !
Mme Monique Lubin. Nous savons, certes, qu’il y aura peut-être, dans quelques années, des déficits, de l’ordre de 13 milliards d’euros. Nous vous avons d’ailleurs fait des propositions pour les combler. (M. le ministre délégué sourit.)
Cela vous fait peut-être sourire,…
M. Éric Bocquet. Eh oui !
Mme Monique Lubin. … mais les salariés, eux, n’ont pas envie de rire aujourd’hui.
S’agissant de la commission mixte paritaire d’hier, on nous dit qu’elle a débouché sur un compromis. Mais une CMP, c’est une CMP.
Mme Monique Lubin. Chacun sait comment cela fonctionne. (M. Jérôme Bascher ironise.)
Les compromis n’ont pas été trouvés hier dans la journée. La CMP a duré, parce que, une fois de plus, nous vous avons contraints à discuter de tous les articles, mais tout était bouclé hier matin.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr !
Mme Monique Lubin. Et tout était bouclé dans l’intérêt non pas des salariés, mais du Gouvernement et du Président de la République. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)
Visiblement, ce que je dis doit être drôle, car on rit beaucoup sur les travées…
M. Jérôme Bascher. La caricature vous dessert !
Mme Monique Lubin. En réalité, la CMP d’hier n’avait qu’un seul but : sauver la face, tant votre projet de loi est mal engagé depuis des mois, tant il est mal perçu par la population.
S’agissant de la réforme, vous nous avez suffisamment entendus : nous ne voulons pas des 64 ans. Cette mesure va pénaliser ceux qui travaillent depuis longtemps, ceux qui ont les métiers les plus difficiles et ceux qui perçoivent les salaires les moins élevés.
Vous avez apporté des mesures dites d’atténuation, comme les contrats seniors, qui seront en réalité financés par d’autres, en l’occurrence, si j’ai bien compris, par la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) de la sécurité sociale.
Les contrats seniors sont un énième cadeau aux entreprises, comme si on ne leur en faisait pas assez, comme si maintenant les recrutements ne dépendaient que des cadeaux fiscaux et sociaux qu’on leur ferait ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Vous avez instauré également des surcotes pour les femmes. J’ai déjà eu l’occasion de l’expliquer plusieurs fois : aujourd’hui, une femme qui arrive à 62 ans avec tous ses trimestres et qui décide de travailler jusqu’à 64 ans bénéficie d’une surcote de 10 %. Demain, elle ne décidera plus de travailler jusqu’à cet âge, elle y sera obligée et on lui donnera royalement 5 % de surcote. (Applaudissements sur les mêmes travées.)
Mme Victoire Jasmin. Bravo !
M. Éric Bocquet. Très bien !
Mme Monique Lubin. Les petites pensions, pour leur part, sont un véritable fiasco ! Vous nous avez raconté que les deux millions de Français qui perçoivent les pensions les plus faibles verraient leur retraite s’améliorer. Or nous savons que ce n’est pas vrai.
Quant aux carrières longues, je suis désolé de vous le dire, malgré tous vos efforts, personne ne comprend rien au dispositif prévu.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
Mme Monique Lubin. Nous espérons que le plus grand nombre en bénéficiera, ce texte visant de fait ceux qui travaillent déjà depuis longtemps.
En conclusion, comment allez-vous réparer ce pays que vous êtes en train de fracturer durablement ? (Bravo ! et applaudissements prolongés sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, sans surprise, la commission mixte paritaire a trouvé un accord sur cette réforme des retraites.
À dix heures quatorze, vous avez voté les 64 ans.
M. Philippe Bas. C’est ici que l’on va voter !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Mais avec quelle légitimité ?
M. Xavier Iacovelli. Celle de la majorité !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cela n’avait rien d’étonnant, puisque les parlementaires Les Républicains, les centristes et les membres de Renaissance étaient favorables à l’allongement de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans.
Nous examinons les conclusions de la CMP alors même que le rapport n’a pas été mis en ligne, mais qu’importe ! Sur les travées de la droite, plus rien ne vous gêne : rapport ou non, vous voterez ce texte.
M. François Bonhomme. Eh oui !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Alors que nous n’en étions qu’à l’article 14 du texte et que la CMP était loin d’être terminée, vous avez sorti un communiqué annonçant une CMP conclusive.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Ce sont les députés qui l’ont rédigé !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il vous a fallu moins de temps en CMP pour « dealer » l’avenir de notre pays qu’il n’en a fallu au Sénat pour déposer un amendement de réécriture de l’article 7, qui a fait tomber 1 300 amendements.
Nous n’oublions pas non plus que la majorité présidentielle et la majorité sénatoriale veulent imposer une réforme à laquelle sont opposés 70 % des Français et 90 % des actifs.
Cette minorité politique a décidé de notre avenir, à une majorité de 10 contre 14 en commission mixte paritaire. À la crise sociale et environnementale, le Gouvernement et les droites parlementaires ont donc décidé d’ajouter une crise parlementaire et une crise démocratique.
Vous imposez une régression sociale en ayant recours aux artifices de la Constitution et du règlement du Sénat.
Depuis deux mois, le peuple vous dit non. Ils étaient encore des milliers dans la rue hier, pour la huitième fois, pour dire leur refus de votre projet. Nous avons dénoncé votre réforme injuste, inefficace et impopulaire, mais votre obsession s’est transformée en aveuglement.
Le texte issu de la CMP acte une réforme profondément injuste, qui va s’appliquer dès le 1er septembre prochain et contraindre des milliers de concitoyens à retarder leur pot de départ à la retraite de deux ans.
Le Gouvernement a donc accepté le contrat de fin de carrière des Républicains. En 2006, un contrat du même type avait été instauré, pour un résultat nul.
Le Gouvernement devrait mettre autant d’énergie à lutter contre la fraude patronale aux cotisations sociales et contre l’évasion fiscale. Les sommes recouvrées permettraient de financer notre système de retraite, sans imposer deux années supplémentaires de vie brisée.
Contrairement aux affirmations du ministre Gabriel Attal, l’équilibre du système de retraite n’est nullement garanti par cette réforme. Il est assuré par la baisse de la subvention d’équilibre de l’État au régime de retraite et notamment par le gel du point d’indice des fonctionnaires et la réduction du nombre de fonctionnaires territoriaux et hospitaliers.
Votre dogme libéral vous fait perdre la raison. Ce sont les politiques d’austérité qui ont entraîné le déséquilibre de notre système de retraite.
Je rappelle que le Conseil d’orientation des retraites indique dans son rapport que les mesures d’économies sur la masse salariale publique se traduisent « par une détérioration du solde du système de retraite ».
Les choix réalisés par la droite sous Nicolas Sarkozy permettent aujourd’hui aux parlementaires Les Républicains d’exiger la généralisation de la capitalisation dans notre système par répartition.
Le refus de mettre à contribution les plus riches, le refus de mettre à contribution les dividendes, le refus d’élargir l’assiette de cotisation révèlent les intérêts de ceux que vous protégez.
Vous avez même refusé l’augmentation de la cotisation employeur, pourtant proposée par le Haut-Commissariat au Plan pour garantir la pérennité du système de retraite.
Vous faites passer les intérêts financiers avant la prise en compte de la pénibilité et des inégalités salariales entre les femmes et les hommes.
La suppression des régimes spéciaux offre une vision éclairante de la manière dont vous concevez la prise en compte de la pénibilité des métiers.
En conclusion, nous avons assisté à un marché de dupes entre le Gouvernement et Les Républicains, qui ont renoncé à leurs amendements sur les carrières longues et sur la prise en compte des risques chimiques.
Vous portez un projet de classe contre les travailleurs et les travailleuses.
La fébrilité du pouvoir monte avec la menace croissante du 49.3. Vous aurez beau utiliser, comme vous l’avez fait ici, tous les coups de force antidémocratiques, vous ne convaincrez pas les Français du bien-fondé de votre réforme, qui vise à les faire travailler jusque 64 ans, bien au contraire.
Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste s’opposera jusqu’au bout à cette réforme et soutiendra le mouvement social. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Olivier Henno. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous y voilà ! Nous abordons la toute dernière ligne droite de ce texte sur la réforme des retraites. Le groupe Union Centriste votera majoritairement ce texte.
M. Mickaël Vallet. Ah !
M. Olivier Henno. Le Sénat et la majorité sénatoriale ont été à la hauteur de l’enjeu, sourds à la démagogie. (Mme Cathy Apourceau-Poly et M. Éric Bocquet ironisent.) « Le triomphe des démagogies est passager, mais les ruines sont éternelles », disait Péguy. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
J’irai même plus loin. Tel un diapason, le Sénat et la majorité sénatoriale ont donné le la sur ce texte. Je saisis l’occasion de saluer et remercier nos rapporteurs de la qualité de leur travail et de leur connaissance du dossier des retraites. Ils l’ont démontrée tout au long du débat, au cours de la CMP et encore à l’instant en commission.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. Merci à vous !
M. Olivier Henno. Je persiste et signe, mes chers collègues : ce texte ne mérite pas l’indignation qu’il suscite.
Il ne justifie pas non plus un enthousiasme démesuré. Ce n’est ni le diable ni la mère des réformes.
Mme Laurence Rossignol. C’est bien centriste, ça ! (Sourires.)
M. Olivier Henno. Ce texte, et ce n’est pas rien, assure la survie de notre régime par répartition. Surtout, il évite à notre pays de s’endetter pour payer ses retraites.
Souvent, nous entendons dans cet hémicycle qu’il y a une bonne et une mauvaise dette. Je partage cette opinion : s’endetter pour investir dans la recherche ou les infrastructures – en un mot, s’endetter pour l’avenir et l’innovation – peut avoir une dimension vertueuse.
Toutefois, s’endetter pour le fonctionnement, c’est irresponsable ; c’est compromettre l’avenir. Cela nous est d’ailleurs interdit, dans les collectivités territoriales, sous peine de mise sous tutelle. Nous considérons que s’endetter pour payer les retraites est le comble de l’irresponsabilité. C’est une honte eu égard aux plus jeunes générations.
Cette affirmation toute simple donne sens au vote de ce texte. J’ai entendu des choses et d’autres au cours de cette discussion, et cette citation de Shakespeare me revenait à l’instant : « Les mots ne paient pas les dettes », mes chers collègues. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. David Assouline. Et les dettes ne paient pas les mots !
M. Olivier Henno. Ce texte consolide pour plusieurs années notre système de retraite par répartition.
Notons les avancées qu’il contient sur la question de l’égalité entre les femmes et les hommes ou sur l’emploi des seniors, grâce au dispositif d’incitation et d’octroi.
Notons la prise en compte des trimestres – excusez du peu ! – travaillés au titre des travaux d’utilité collective (TUC), en tant qu’aidants ou pour les élus qui touchent moins de 1 830 euros par mois.
Notons enfin les mesures visant à compenser la pénibilité ou les carrières longues, avec les 43 ans de cotisation.
Aussi, pourquoi ce texte, qui contient des avancées et ne concerne au total que six Français sur dix, à l’exclusion de ceux qui exercent les métiers les plus pénibles, suscite-t-il autant de tensions ?
Nous y voyons plusieurs causes. Notre système de retraite est injuste, mais cela ne date pas d’aujourd’hui. Lorsque la réforme Touraine a été adoptée, nous vous avons peu entendus, mes chers collègues, sur l’injustice du système de retraite…
Notre système est injuste. Il l’est moins à l’issue de cette réforme, mais il faudra continuer à avancer vers plus d’équité.
Par ailleurs, nous attendons peut-être trop de la réforme des retraites, laquelle ne saurait corriger toutes les injustices de la société française et de notre système social.
Enfin, et surtout, notre groupe estime que ces tensions ont pour cause le manque de dialogue social et la crise du paritarisme. La faute originelle de l’exécutif est, selon nous, d’avoir enjambé les corps intermédiaires. C’est pourquoi nous appelons à l’ouverture d’une conférence sociale après le vote de ce texte.
Les sujets sociaux qui sont sur la table sont importants et nombreux. Le travail comme valeur ou contrainte – nous en avons débattu ces derniers jours –, la rémunération des salariés, le cadre de gestion de l’assurance chômage, l’emploi des seniors, la santé ou le logement : autant de questions sur lesquelles la société française a besoin d’apaisement.
Or cet apaisement passe par un paritarisme et un dialogue social refondés et rénovés.
Pour conclure, je veux partager avec vous, mes chers collègues, un sentiment différent de celui qui a été évoqué à l’instant : je pense avoir vécu, ici au Sénat, un beau moment parlementaire. (Merci ! sur les travées des groupes CRCE et SER.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est grâce à nous !
Mme Laurence Cohen. Bravo la démocratie !
M. Olivier Henno. Nous avons fait honneur, mes chers collègues, au bicamérisme.
M. Pascal Savoldelli. C’est une joie nombriliste !
M. Olivier Henno. Le Sénat représente les territoires, et c’est son honneur. Mais nous avons apporté la réponse la plus forte qui soit à ceux qui nous ont parfois caricaturés en Bundesrat.
Mme Éliane Assassi. Vous vous caricaturez tout seuls !
M. Olivier Henno. Nous sommes un parlement de plein droit et, surtout, un pilier de la République.
Mes chers collègues, vive le Sénat, vive la République ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Colette Mélot et M. Bernard Fialaire applaudissent également.)
M. Loïc Hervé. Et vive Olivier Henno !
M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe. (Vives exclamations sur des travées des groupes SER et CRCE.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Aurait-il retrouvé la porte du Sénat ?
Mme Éliane Assassi. Il n’a participé à aucun débat !
Mme Laurence Rossignol. Il a été absent quinze jours !
M. Stéphane Ravier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, aujourd’hui, nous sommes appelés à un vote crucial pour éviter d’infliger de nouveaux sacrifices à nos compatriotes et mettre le Gouvernement face à ses responsabilités.
M. David Assouline. Supercherie !
M. Stéphane Ravier. Ce vote est crucial en vue de réconcilier la démocratie parlementaire avec les Français.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Vous n’étiez pas là !
M. Stéphane Ravier. Ce vote est crucial pour la droite, qui peut enfin envoyer le message qu’elle n’est pas là pour servir la soupe à Emmanuel Macron.
Ce vote est crucial, enfin, pour la gauche, en vue d’expier sa faute d’avoir appelé à voter pour le candidat Macron en 2022 (Protestations sur les travées des groupes CRCE et SER.) et d’avoir voulu empêcher le vote du texte par une tenue parlementaire d’un aussi mauvais goût que ses tenues vestimentaires. (Mêmes mouvements)
En réalité – dois-je vous le rappeler, mes chers collègues ? –, nous sommes des hommes et des femmes libres. Moi, en tout cas, je le suis !
L’exécutif, lui, est piégé, car Bercy a promis cette réforme des retraites à la Commission européenne pour bénéficier du plan de relance et du « quoi qu’il en coûte ».
M. Patrick Kanner. C’était bien, les vacances ?
M. Stéphane Ravier. Il est obligé désormais de faire cette réforme, qui est non pas sociale, mais économique et idéologique. Il la fera sans nous. En tout cas, il la fera sans moi !
Nous voilà livrés pieds et poings liés à Mme von der Leyen et à l’Union européenne, alors que notre participation nette à son budget est de 10 milliards d’euros par an. En voilà des économies !
Je ne nie pas la réalité problématique du système par répartition : on compte aujourd’hui 1,7 actif seulement pour un retraité. Mais ce n’est pas la faute des Français si, pour se plier aux exigences de l’ultralibéralisme, les gouvernements ont abandonné depuis trente ans notre tissu agricole et industriel à une concurrence étrangère déloyale, jetant des millions de Français au chômage et nous privant ainsi d’autant de cotisants.
Reporter l’âge de départ à la retraite, c’est demander plus d’efforts aux Français pour s’éviter de tailler dans les gisements d’économies tabous.
En effet, des économies, il y en a à faire, sur la fraude sociale – de 20 à 30 milliards d’euros –, sur la fraude fiscale – près de 40 milliards d’euros selon un rapport sénatorial d’information –, sur le recours aux cabinets de conseil – 2,5 milliards d’euros selon l’inspection générale des finances –, …
M. David Assouline. Et sur la fraude de votre parti !
M. Stéphane Ravier. … sur la fraude migratoire, enfin – plusieurs dizaines de milliards d’euros ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe CRCE.)
Dans un pays où les prélèvements obligatoires – 45 % du PIB – représentent un record européen, aucune réflexion n’est engagée par l’État, par facilité, par paresse ou par couardise pour baisser les cotisations qui pèsent sur notre croissance.
Comme les précédents, le gouvernement actuel préfère sacrifier les travailleurs et les mères de famille plutôt que son allégeance européiste en engageant les réformes structurelles nécessaires et urgentes.
De grâce, revenons à un État stratège, qui protège le présent et prévoit l’avenir en soutenant l’industrie et le monde paysan, créons des emplois qualifiés pour les plus jeunes et engageons une politique familiale ambitieuse encourageant la natalité française, et exclusivement française. (Ah ! sur les travées des groupes CRCE et SER.)
Mme Éliane Assassi. Forcément !
M. Stéphane Ravier. Puisque le Président de la République fait le tour du monde pour fuir la colère des Français, le Sénat doit lui envoyer un message clair : quand Emmanuel Macron prend une cuite à Kinshasa, ce n’est pas aux Français d’avoir la gueule de bois !
C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à refuser le grand déclassement, en faisant un bras d’honneur à cet injuste projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, cela a été souligné samedi soir : le Sénat a consacré au texte sur la réforme des retraites un peu plus de cent heures de débat. Il est ainsi allé jusqu’au vote sur l’ensemble, ce que nos collègues de l’Assemblée nationale n’ont pu faire.
Cependant, dans notre hémicycle aussi, la forme l’a trop souvent emporté sur le fond, la politesse en plus. Amendements et sous-amendements déclinés à l’infini et petit livre vert brandi très fréquemment : toute la palette des outils de l’obstruction parlementaire a été utilisée. (Mme Monique Lubin proteste.)
Le Parlement ne sort pas grandi de cet épisode. La réforme méritait des débats plus approfondis sur bien des aspects. Il a fallu en passer par l’article 44.3 pour pouvoir se pencher a minima sur tous les articles.
Soyons lucides : une réforme nous semble nécessaire, car la logique démographique à l’œuvre depuis plusieurs décennies menace l’équilibre financier de notre régime de retraite. C’est une évidence.
Le système a un grand défaut : il ne supporte pas une donnée pourtant heureuse, celle de l’allongement de l’espérance de vie. C’est cette équation qu’il nous faut résoudre, tout en tenant compte de certaines situations.
Tous les métiers ne se valent pas. Ce que certains peuvent faire jusqu’à 64 ans, d’autres ne le peuvent pas. Il y a l’exposition au risque. Il y a les accidents de la vie. Il y a le manque d’offres d’emploi pour les seniors. Il y a aussi des gens qui ont commencé trop tôt à travailler et pour lesquels l’expression « une retraite bien méritée » prend tout son sens !
La commission mixte paritaire qui s’est réunie hier a-t-elle réussi à trouver cet équilibre entre nécessité et justice ?
Nos collègues sont parvenus à un accord. C’est assez clair, les travaux de la commission portent la marque du Sénat. Bien entendu, les fondamentaux du texte gouvernemental demeurent, dont le fameux article 7 sur l’âge légal de départ, ainsi que l’index seniors, qui avait été réintroduit par notre assemblée.
Nos collègues rapporteurs ont exposé les principaux apports de notre assemblée. Je n’y reviendrai pas, si ce n’est pour saluer les améliorations concernant les carrières longues, mais aussi pour regretter le recul sur l’usure professionnelle à la suite du retrait du critère d’exposition aux agents chimiques dangereux.
Mes chers collègues, la balle sera cette après-midi dans le camp de l’Assemblée nationale. En attendant, je ne cacherai pas les différentes sensibilités qui existent au sein de mon groupe. Chacun a voté jusqu’à présent selon ses convictions : il en sera de même aujourd’hui.
M. François Bonhomme. Quelle surprise !
M. Jean-Claude Requier. Tout au long des débats, nous nous sommes toujours rassemblés sur les nombreux défis de la réforme : la pénibilité, les carrières longues, l’emploi des seniors, la compensation de l’engagement citoyen et bénévole, ou encore la possibilité de rachat de trimestres pour différents profils.
Une dizaine de nos amendements ont été adoptés, et certains, qui ont survécu à la CMP, visent à répondre à quelques-unes de nos attentes. Je pense aux jeunes en apprentissage, aux étudiants, aux travailleurs handicapés, aux sapeurs-pompiers volontaires ou encore aux femmes, pour lesquelles des aménagements ont été apportés.
Ce qui nous réunit aussi au groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, c’est l’idée que la solidarité, une valeur républicaine à laquelle nous sommes fortement attachés, continue de guider le régime par répartition que la France a mis en place en 1945 et auquel nos concitoyens restent très attachés. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP. – M. Pierre Louault applaudit également.)
M. Éric Bocquet. Vive Ambroise Croizat !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je vais mettre aux voix l’ensemble du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par l’amendement du Gouvernement.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 251 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 307 |
Pour l’adoption | 193 |
Contre | 114 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP, RDPI et RDSE.)
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures quarante-deux, est reprise à dix heures cinquante, sous la présidence de M. Alain Richard.)
PRÉSIDENCE DE M. Alain Richard
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Allocation logement et habitat non décent
Rejet d’une proposition de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe Les Indépendants – République et Territoires, la discussion de la proposition de loi visant à mieux protéger les locataires bénéficiant d’une allocation de logement et vivant dans un habitat non décent, présentée par M. Jean-Louis Lagourgue et plusieurs de ses collègues (proposition n° 821 [2021-2022], résultat des travaux n° 412, rapport n° 411).
Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, auteur de la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Micheline Jacques applaudit également.)
M. Jean-Louis Lagourgue, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous le savez, dans les territoires d’outre-mer subsistent un grand nombre de disparités, notamment du fait de l’éloignement géographique avec la métropole. La vie y est chère, le chômage y est deux à trois fois plus élevé et le taux de pauvreté avoisine les 40 % en moyenne.
Depuis près de vingt ans, les crises économiques et sanitaires s’y succèdent – chikungunya, « gilets jaunes », covid-19, etc. –, entraînant des conséquences encore plus frappantes qu’en métropole, à l’image de l’augmentation constante des prix, de la suppression de milliers d’emplois ou encore de la diminution du nombre de nouveaux logements construits.
Depuis 2019, les effets de l’actuelle crise sanitaire ont accentué le mal-être social, les inégalités et la précarisation de nombreux concitoyens ultramarins.
Parmi les très nombreux problèmes auxquels ils sont confrontés, c’est sans aucun doute le logement, au côté de l’emploi, qui figure en haut du classement.
Si le manque de logements est malheureusement une triste réalité qui se ressent chaque jour, un phénomène suscite de plus en plus l’inquiétude des pouvoirs publics et des associations de défense de consommateurs : la non-décence des logements sociaux existants. Bien que toute la France soit concernée, l’outre-mer l’est tout particulièrement.
Le texte que je vous propose aujourd’hui a d’abord été déposé à l’Assemblée nationale par l’ancien député de La Réunion David Lorion, qui a été comme moi interpellé par la situation préoccupante de notre île. Une très grande partie de notre population est confrontée à des malfaçons et à des problèmes d’humidité ou de sécurité électrique, avec toutes les conséquences qui vont avec, notamment pour la santé.
Tant dans les logements anciens que dans les constructions neuves, beaucoup vivent dans des conditions d’extrême insalubrité ou d’indécence.
Aussi, cette proposition de loi vise-t-elle à inciter encore plus fortement les bailleurs à mettre en conformité leurs logements avec les critères de décence fixés par la loi.
Le droit actuel prévoit la suspension des aides personnelles au logement (APL) pour les logements non décents ; nous proposons la consignation des loyers jusqu’à la réalisation des travaux de mise en conformité.
Le texte de l’Assemblée nationale avait été cosigné par des députés métropolitains comme ultramarins, notamment par deux vice-présidents du parti Les Républicains.
Parce que tous les territoires de la République sont susceptibles d’avoir besoin de ce dispositif, nous avions conservé l’application nationale de la proposition. La commission nous a dit qu’une telle application ferait courir le risque d’effets de bord.
Pour répondre aux inquiétudes, nous proposons, comme la commission l’envisageait initialement, une expérimentation ciblée sur le territoire de La Réunion. En effet, si le problème du logement non décent ne se pose pas qu’à La Réunion, il s’y pose là-bas avec beaucoup d’acuité. La commission a alors estimé qu’une telle expérimentation ferait courir le risque d’une rupture d’égalité.
Pour nos concitoyens qui subissent le mal-logement, pour tous ceux qui vivent dans les moisissures, dans l’inquiétude d’un dégât des eaux ou d’un accident électrique causé par les infiltrations ou les malfaçons, je ne puis me résoudre à ne rien faire.
Tout comme six députés sur sept de La Réunion, tout comme mes trois collègues sénateurs de ce département, j’observe régulièrement la situation de notre territoire.
Des personnes âgées, d’autres en situation de handicap, des familles nombreuses déjà durement touchées par la précarité financière, énergétique et sociale vivent dans des conditions parfois dignes du tiers-monde, alors que nous sommes au XXIe siècle et dans un pays qui figure parmi les premières puissances mondiales.
Nous ne pouvons pas rester sans solution. Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas. Si la route est encore longue avant de résoudre toutes les difficultés qui sont au cœur du problème du logement dans nos territoires, je veux faire ce premier pas avec vous.
Il consiste à empêcher que l’on puisse tirer profit des infractions à la loi. Un bailleur qui met en location un logement non décent ne doit pas toucher de loyers. Il ne s’agit pas d’exempter le locataire du paiement, puisqu’il devra continuer de le verser. Mais le bailleur ne percevra les loyers que lorsqu’il aura mis son bien en conformité avec les critères de décence fixés par la loi.
Afin de permettre un suivi de cette loi, je proposerai qu’une commission mixte soit mise en place sur le territoire réunionnais, composée à parité de membres de la société civile et des institutions publiques nommés par décret ministériel, afin d’évaluer de manière totalement neutre la bonne application de la loi, ses limites et les améliorations qui seraient éventuellement nécessaires.
L’inaction, quels qu’en soient les motifs, reste l’inaction. En votant aujourd’hui cette proposition de loi, nous mettrons les choses en mouvement. Nous permettrons à la navette parlementaire d’enrichir le texte. Nous affirmerons aux bailleurs notre détermination à faire respecter la loi.
Cette mobilisation, à laquelle je vous appelle aujourd’hui, mes chers collègues, représente un pas supplémentaire pour faire de la lutte contre le mal-logement une priorité politique essentielle, afin de répondre aux besoins des citoyens mal logés, en souhaitant que toutes les collectivités puissent à terme porter cet enjeu crucial à la bonne échelle.
Il s’agit simplement de garantir le respect d’un droit fondamental pour permettre à chaque citoyen d’accéder à un logement digne et décent adapté à ses besoins et ses ressources et de s’y maintenir.
Cette proposition de loi est une réponse qui devra incontestablement en appeler d’autres. Une réflexion beaucoup plus large devra ainsi être menée, particulièrement dans les outre-mer, notamment sur les questions de production de logements sociaux et de lutte contre le sans-abrisme.
Je demande à l’État de prendre toutes ses responsabilités et de faire de la lutte contre le mal-logement une grande cause nationale. L’abbé Pierre disait : « La maladie la plus constante et la plus mortelle, mais aussi la plus méconnue de toute société est l’indifférence ».
Aussi, mes chers collègues, montrons aux plus vulnérables de nos concitoyens que nous agissons pour les protéger !
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Micheline Jacques, rapporteur de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la question du logement non décent est malheureusement un sujet récurrent dans notre hémicycle.
Les chiffres montrent que nous n’avons pas encore trouvé les clés pour résorber ce fléau : en France, il y aurait au moins 420 000 logements indignes. Outre-mer, la situation est encore pire : il n’y en aurait pas moins de 110 000 dans les départements et régions d’outre-mer, soit 13 % du parc. C’est dix fois plus qu’en métropole ! À La Réunion, le département de Jean-Louis Lagourgue, il y en aurait 18 000.
C’est pourquoi je voudrais doublement remercier Jean-Louis Lagourgue : tout d’abord, pour attirer de nouveau notre attention sur la situation de ces ménages qui sont confrontés à des conditions de vie vraiment dramatiques, ensuite, pour nous permettre de nous focaliser sur la situation particulièrement dégradée du logement en outre-mer.
J’en avais déjà dressé le constat il y a un an et demi, dans le rapport d’information sur la politique du logement en outre-mer que j’ai cosigné avec nos collègues Guillaume Gontard et Victorin Lurel au nom de la délégation sénatoriale aux outre-mer.
C’est un sujet qui me tient particulièrement à cœur, car, au-delà du seul aspect matériel, la dégradation de l’habitat a des répercussions sur tous les aspects de la vie de ses occupants : ce sont des problèmes respiratoires causés par des moisissures, c’est un jeune qui ne peut pas s’isoler pour faire ses devoirs à cause d’une fuite dans le plafond, etc. Face à ces problèmes, les locataires se sentent souvent démunis.
Pour lutter contre l’habitat dégradé, le dispositif proposé est simple et, je dois le dire, séduisant : prolonger le dispositif actuel de retenue temporaire des allocations de logement, lorsque le logement est déclaré non décent, en consignant le reste à charge du loyer. L’idée est de faire pression sur les propriétaires, pour qu’ils engagent rapidement les travaux de mise en décence nécessaires.
Je vois cependant plusieurs écueils à la mise en œuvre de ce dispositif.
Tout d’abord, la notion de non-décence ne s’applique, en droit, qu’aux logements locatifs. Le problème des propriétaires occupants de logements insalubres ou indignes ne fait donc pas partie du champ de la proposition de loi. Or ils sont nombreux, particulièrement dans nos outre-mer.
Ensuite, le dispositif proposé ne concerne que les locataires qui bénéficient d’allocations de logement. C’est donc une petite partie du logement dégradé qui pourrait, en théorie, être traitée par le dispositif proposé.
Or, pour cette petite part, la procédure actuelle de retenue des allocations de logement est déjà très efficace : selon les services de l’État, plus de 95 % des procédures engagées aboutiraient à une remise en état dans les dix mois prévus.
Surtout, tous les acteurs que j’ai interrogés m’ont fait part de leurs craintes quant à des effets de bord négatifs, à la fois pour les propriétaires et pour les locataires.
En ce qui concerne les propriétaires, je voudrais d’entrée de jeu souligner que les possesseurs de logements non décents ne sont pas tous des marchands de sommeil, loin de là.
Les critères de non-décence ont été considérablement renforcés ces dernières années. C’est bien entendu une très bonne chose, mais le sens juridique du mot « décence » s’est ainsi beaucoup éloigné de son acception courante, ce qui brouille quelque peu les repères. Si un logement indigne est forcément non décent, le contraire n’est pas nécessairement vrai.
Par exemple, la dernière évolution en date des critères de décence concerne les performances énergétiques. Vous le savez, mes chers collègues, depuis le 1er janvier dernier, les logements G+ sont interdits à la location.
D’ici à 2034, c’est l’ensemble des logements classés E, F et G qui seront qualifiés de « non décents ». Cela rend nécessaire la rénovation de dizaines de milliers de logements locatifs, ce qui représente des investissements considérables pour les propriétaires. Serait-il raisonnable de les priver, précisément maintenant, d’un complément de revenu qui pourrait justement financer ces travaux de mise aux normes ?
Dans une perspective plus large, ce ne serait d’ailleurs pas forcément rendre service aux locataires : d’ores et déjà, on constate une surreprésentation des passoires énergétiques dans les mises en vente de logements. Ce sont autant de logements qui sortent du parc locatif, temporairement ou définitivement.
Or la tension du marché locatif peut aussi favoriser, indirectement, le maintien dans des logements non décents, lorsque les prix pratiqués sont trop élevés pour que les locataires osent quitter leur logement ou même tenter de faire valoir leurs droits auprès des bailleurs.
En outre, introduire une procédure active de consignation du reste à charge pourrait, si cette procédure était mal comprise par les locataires, amener une partie d’entre eux à cesser purement et simplement de payer leur loyer. Ils se mettraient ainsi en tort et s’exposeraient à une expulsion.
Aussi, loin de protéger les locataires, le dispositif risquerait de les fragiliser encore davantage.
En réalité, la question de la résorption du logement non décent nécessite de prendre en compte tout l’écosystème du logement. Il faut évidemment mieux informer les locataires sur leurs droits. Il faut les encourager à activer la procédure existante de retenue des allocations, qui, je le répète, est très efficace, et les encourager à aller devant le juge pour obtenir une injonction à réaliser des travaux, voire une diminution du loyer si le logement demeure non décent.
Il faut également mieux accompagner les propriétaires, notamment en faisant connaître les aides à la rénovation – elles sont nombreuses.
Je comprends le sentiment d’urgence qui sous-tend cette proposition de loi, particulièrement dans nos outre-mer. Mais à l’écoute de mes interlocuteurs réunionnais, j’ai surtout compris que le sujet dépassait largement le champ de l’habitat indécent : la plupart des cas évoqués lors des auditions relevaient clairement de l’habitat indigne ou insalubre, voire de situations de péril.
Or, pour ces situations, il existe d’autres procédures, bien plus rapides et plus coercitives, pour contraindre le propriétaire à faire des travaux, voire les réaliser d’office. Que ces procédures ne soient pas mises en œuvre par les autorités administratives, qui en ont le pouvoir en temps utile, c’est un autre problème…
On m’a aussi parlé d’immeubles de moins de dix ans tenus par des étais, de bâtiments soudainement sortis « non décents » d’une opération de réhabilitation…
Ce sont les symptômes de problèmes systémiques du secteur du bâtiment et du logement à La Réunion : nombre trop limité d’entreprises de taille critique ; difficultés d’approvisionnement en matériaux de qualité ; déficit d’encadrement intermédiaire des chantiers et de contrôle qualité ; rigidité du mécanisme de la garantie décennale… Sans parler de l’inadaptation de certaines normes aux territoires ultramarins.
En résumé, pour élaborer des stratégies efficaces de lutte contre l’habitat dégradé, que ce soit en métropole ou outre-mer, c’est l’ensemble de l’écosystème qu’il faut prendre en compte, et pas simplement la relation contractuelle entre les locataires et les bailleurs, qui sont en bout de chaîne et pâtissent de ces situations.
Pour toutes ces raisons, la commission n’est pas favorable à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Daphné Ract-Madoux applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Klein, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le Sénat doit aujourd’hui s’exprimer sur la proposition de loi du sénateur Jean-Louis Lagourgue visant à mieux protéger les locataires bénéficiant d’une allocation de logement et vivant dans un habitat non décent.
Dans son article unique, ce texte vise à augmenter la contrainte qui pèse sur les propriétaires bailleurs en vue de procéder aux travaux de mise en décence des logements loués à des personnes bénéficiant des APL.
Même si le Gouvernement partage pleinement l’objectif de cette proposition de loi, nous constatons que le mécanisme actuel de conservation des aides est suffisant pour mettre fin aux situations de non-décence.
À ce jour, la plupart des situations de conservation des APL cessent avant la fin du délai maximum prévu par le code de la construction et de l’habitation.
En moyenne, on constate une sortie de conservation d’environ 320 dossiers par mois, dont 300, soit en moyenne 93 %, au sens où la situation de non-décence a pris fin et le versement de l’APL a été rétabli, et seulement une vingtaine de situations dans lesquelles l’APL n’a pas été rendue une fois la période de conservation écoulée. Dans ces derniers cas, la conservation peut, dans certaines situations, être prolongée, notamment pour finir les travaux.
Vous le comprenez, mesdames, messieurs les sénateurs, l’efficacité du mécanisme actuel de conservation des aides est, à notre avis, avérée.
J’ajouterai que la mise en place de la conservation ne se limite pas à son caractère coercitif ; elle s’accompagne d’une information du propriétaire par l’organisme payeur.
De façon plus globale, l’engagement de ce gouvernement est total pour lutter contre le phénomène de non-décence des logements.
Nous avons souhaité faire évoluer le mécanisme de conservation des aides, pour qu’il s’adapte aux politiques publiques de lutte contre le logement indécent.
Ainsi, l’entrée en vigueur au 1er janvier 2023 et la future montée en charge du critère de non-décence énergétique, à la suite de la réforme du diagnostic de performance énergétique et aux dispositions de la loi Climat et résilience, créent une condition d’ouverture supplémentaire d’une mesure de conservation des aides.
Les critères de non-décence et incidemment les causes d’ouverture d’une mesure de conservation des APL englobent la non-décence énergétique. L’obligation qui pèse sur les bailleurs a ainsi été renforcée.
Pour lutter contre le fléau que constitue l’habitat indigne et dégradé, un important arsenal de procédures et de dispositifs, qui reposent la plupart du temps sur des partenariats locaux et associent notamment les collectivités territoriales, a été développé.
Soyez assurés, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement travaille à l’amélioration constante de ces outils. Je le répète, la lutte contre l’habitat indécent est ma priorité – ceux qui connaissent mon parcours le savent bien –, comme c’est celle du Gouvernement.
Parmi les mesures prises, je citerai les dispositifs de déclaration et d’autorisation de mise en location. Pérennisés par la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové et reposant sur l’initiative des collectivités, ces deux dispositifs continuent de se déployer. Je tiens d’ailleurs à saluer les maires et élus locaux qui sont engagés dans cette démarche – je sais qu’ils sont nombreux.
Le dispositif d’autorisation préalable de mise en location a par ailleurs fait l’objet de modifications en 2021, via la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets du 22 août 2021.
Je veux également mettre en avant le travail de l’Agence nationale de l’habitat (Anah), qui finance l’amélioration de l’habitat des propriétaires bailleurs. En effet, l’Anah octroie des subventions, sous conditions, aux propriétaires bailleurs pour réaliser des travaux de sortie d’indignité ou de forte dégradation, via les aides « Habiter sain », « Habiter serein » ou « Habiter mieux ».
À la fin de l’année 2018, l’Anah a aussi décidé de consacrer des crédits supplémentaires, dans le cadre d’une expérimentation, à la lutte contre l’habitat indigne dans six territoires dits « d’accélération », particulièrement touchés par ces problématiques.
Reconduit jusqu’en 2023, ce dispositif a d’ores et déjà permis de mobiliser plus de 33 millions d’euros supplémentaires en quatre ans sur ces six départements : les Alpes-Maritimes, les Bouches-du-Rhône, l’Essonne, le Nord, la Seine-Saint-Denis et le Val-de-Marne.
Il a permis la majoration des taux de subvention pour les propriétaires occupants et bailleurs, ainsi que le financement à 100 % hors taxes des travaux d’office à la charge des communes, notamment à la suite de la prise d’arrêtés de péril.
Ce dispositif, qui va se terminer dans sa forme expérimentale, fait actuellement l’objet d’une évaluation. Les résultats dégagés permettront de déterminer des axes d’action sur le champ du financement par l’Anah de la sortie d’indignité à partir de 2024.
L’Anah a par ailleurs majoré depuis 2021 les crédits consacrés au financement des opérations de résorption de l’habitat indigne : ils sont passés de 15 millions d’euros à 23 millions par an. Tous les territoires engagés dans ce type d’opérations sont éligibles à ces financements.
Nous aurons l’occasion, au cours du débat, d’évoquer plus particulièrement le cas des territoires ultramarins.
Pour en revenir à cette proposition de loi, je le redis et vous l’avez compris, nous partageons l’objectif, mais la mesure proposée soulèverait plusieurs contraintes opérationnelles.
En effet, si les organismes payeurs – Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) ou Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) – ne sont pas directement concernés par cette proposition, ils seraient néanmoins placés au cœur d’un tel dispositif, puisque la responsabilité leur reviendrait de transmettre à la Caisse des dépôts et consignations chaque ouverture de conservation des aides et, en toute logique, chaque levée de conservation.
Il est d’ailleurs à noter que le système d’information de la Cnaf est actuellement surchargé, ce qui laisse envisager une difficulté réelle quant à la possibilité d’automatiser un tel signalement, sans compter la question de la sécurisation du transfert de ces données.
Je veux rappeler d’ailleurs que la création du dispositif de conservation a permis d’impliquer davantage les Caisses d’allocations familiales (CAF) dans la lutte contre le mal-logement en tant que partenaires des autres acteurs intervenant dans ce domaine – je tiens à les en remercier.
Enfin, à la lecture de cette proposition de loi, il est permis de s’interroger sur le potentiel effet dissuasif de la mesure proposée. En effet, la suspension du versement direct des loyers aux propriétaires pourrait inciter ces derniers à retirer leurs biens du marché de la location pour les mettre en vente.
De plus, l’absence de versement du loyer résiduel peut priver certains propriétaires des ressources nécessaires pour financer la réalisation des travaux.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la détermination est là, les outils sont mobilisés, et nous continuerons de lutter contre l’habitat indigne et dégradé. C’est un enjeu majeur, pour permettre à chacun, notamment aux plus modestes, de vivre dignement dans leur logement.
Nous devons faire en sorte que l’endroit où nos concitoyens se sentent à l’abri et où ils veulent se reposer après une dure journée de travail ne soit pas un logement qui les rende malades ou dans lequel ils ne supportent pas de vivre.
C’est donc bien parce que le mécanisme actuel de conservation des aides est suffisant pour mettre fin aux situations de non-décence que le Gouvernement s’en remettra sur ce texte à la sagesse du Sénat.
M. le président. Mes chers collègues, je tiens à vous faire observer que deux textes sont inscrits à l’ordre du jour de cette matinée…
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le logement n’est pas un sujet comme les autres. En 2023, chaque Français de métropole ou d’outre-mer doit avoir accès à un logement décent et à un toit, parce que les conditions d’hébergement doivent être dignes dans un pays civilisé.
Débattre du logement ce n’est pas seulement s’intéresser à des murs, c’est également faciliter l’accès à l’emploi ou élever ses enfants décemment, c’est tout simplement poser la question de la dignité. Notre groupe y est très attaché ; nous avons soutenu l’adoption de la proposition de loi visant à lutter contre l’occupation illicite des logements.
Nombre de nos concitoyens tentent d’accéder à la propriété. Tous n’en ont cependant pas les moyens. Le logement constitue l’un des plus importants postes de dépenses des Français, qu’ils soient propriétaires ou locataires. Cette situation rend encore plus insupportable l’exploitation du besoin de logement.
L’habitat indigne est un fléau. Notre collègue Jean-Louis Lagourgue nous propose aujourd’hui de renforcer la lutte contre les logements non décents mis en location.
En l’état actuel du droit, cela a été rappelé, les critères de décence des logements sont fixés par la loi. Il s’agit notamment de la surface et du volume minimum du logement, de l’absence de parasites et de nuisibles. Il s’agit aussi de critères destinés à la protection de la santé de l’occupant, comme une aération empêchant le développement de moisissures ou la protection du logement contre les eaux de ruissellement et les remontées d’eau.
Notre collègue Jean-Louis Lagourgue propose que le loyer d’un logement non décent soit consigné auprès de la Caisse des dépôts et consignations jusqu’à ce que les travaux de conformité soient réalisés.
Le droit actuel prévoit déjà la suspension du versement des aides personnelles au logement (APL) au propriétaire, lorsque les services de la caisse d’allocations familiales (CAF) constatent qu’un logement ne satisfait pas aux critères de la décence.
Aussi, de deux choses l’une : ou bien nous sommes d’accord pour dire qu’un logement mis en location doit satisfaire aux critères de décence fixés par la loi, auquel cas les mesures portées par la proposition de notre collègue ne constituent que la poursuite de la logique qui sous-tend le droit actuel ; ou bien nous considérons qu’un logement non décent peut valablement continuer à être une source de profits pour des bailleurs peu scrupuleux.
« Faire une loi et ne pas la faire exécuter, c’est autoriser la chose qu’on veut défendre », selon le cardinal de Richelieu. Nous pensons donc qu’un logement non décent, c’est-à-dire une mise en location illégale, ne doit pas générer de profit. Le dispositif proposé ne prive que temporairement le propriétaire de ses loyers. Ceux-ci seront en effet consignés jusqu’à la réalisation des travaux de mise en conformité, et c’est à ce moment que les sommes lui seront reversées.
Certains craignent qu’un tel dispositif ne fragilise la situation de petits bailleurs – ils ne sont pas tous petits, loin de là –, mais suffirait-il d’être un petit bailleur pour être exonéré du respect de la loi ? Par ailleurs, en tout état de cause, le propriétaire bailleur conserve toujours la capacité de vendre son bien s’il ne peut en assumer la décence.
Les difficultés qui pèsent sur le logement sont nombreuses, diverses et complexes. La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui ne prétend pas toutes les résoudre. Elle a cependant le mérite d’être simple, claire et de saisir à bras-le-corps l’une d’entre elles.
Nous pouvons comprendre la réticence de certains de nos collègues à l’idée de l’appliquer définitivement à l’échelle nationale. Issue d’une proposition déposée à l’Assemblée nationale par un député réunionnais et, au Sénat, par notre collègue Jean-Louis Lagourgue et l’ensemble des sénatrices et sénateurs de La Réunion, cette proposition est néanmoins le signe que l’île rencontre en matière de logement un problème majeur, qui appelle une réponse rapide.
Jean-Louis Lagourgue a déposé un amendement pour que cette proposition de loi ne s’applique qu’à titre expérimental et temporaire sur le territoire de La Réunion.
L’expérimentation permettrait à la fois d’agir rapidement et de recueillir des données utiles au perfectionnement du dispositif. À l’inverse, ne rien faire reviendrait à prendre encore du retard dans un domaine où l’urgence est déjà là. La loi fixe déjà les critères de la décence des logements ; à nous de les faire respecter ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout comme l’habitat insalubre et l’habitat indigne, le chantier de l’habitat non décent est gigantesque.
Comme le soulignait notre rapporteur, sur l’ensemble du territoire français, au moins 420 000 logements seraient indignes, dont 110 000 dans les départements et régions d’outre-mer, qui sont particulièrement confrontés à ces difficultés.
Contrairement aux procédures relatives à l’indignité, à l’insalubrité ou au péril, qui relèvent des autorités administratives, la lutte contre la non-décence relève exclusivement d’une action privée, celle du locataire contre le bailleur.
Toutefois, les problématiques de fond sont similaires : l’accompagnement des propriétaires et le reste à charge des travaux, qui est bien souvent hors de portée du budget des ménages modestes. C’est d’autant plus vrai lorsqu’il s’agit d’entamer des travaux de rénovation globale, qui peuvent être effectués pour des logements qualifiés de non décents, pour renforcer l’étanchéité contre les infiltrations d’eau ou d’air, ou isoler les murs et les fenêtres, etc.
Après l’aide de MaPrimeRénov’, le reste à payer pour les ménages très modestes s’élève en moyenne à 33 % du montant des travaux – 52 % pour les ménages modestes –, d’après les calculs de France Stratégie en 2021.
Je ne reviendrai pas en détail sur le dispositif actuel, car vous l’avez toutes et tous à l’esprit.
L’article unique de cette proposition de loi tend à consigner le reste à charge du loyer auprès de la Caisse des dépôts et consignations. Le locataire continuerait de payer le loyer, mais celui-ci ne serait plus versé au bailleur. Cette mesure semble, de prime abord, aller dans le bon sens pour répondre à l’objectif indispensable de lutte contre la non-décence des logements.
L’examen en commission a toutefois mis en avant un certain nombre d’écueils et le manque d’opérationnalité du dispositif. La commission a également estimé que le dispositif actuel de consignation du montant des APL fonctionnait dans la majorité des cas pour que les travaux soient engagés. Plus de 95 % des procédures aboutiraient à une remise en état dans les dix-huit mois impartis, selon les services de l’État.
Par ailleurs, le risque de priver les propriétaires modestes a été mis en avant lors de l’examen en commission – nous l’entendons –, à cause de la consignation du reste à charge de ressources nécessaires pour engager les travaux de remise en décence de leur bien.
En effet, nombre de propriétaires rencontrent eux-mêmes des difficultés financières et peinent à financer les travaux, comme le démontrent régulièrement les rapports de la Fondation Abbé Pierre. Encore une fois, l’accompagnement des bailleurs est l’un des sujets essentiels !
Le risque que ce nouveau mécanisme rende l’actuel plus complexe et moins lisible a aussi été souligné. Pour l’instant, après le signalement à la CAF, le locataire n’a aucune démarche supplémentaire à effectuer, puisque la CAF procède d’elle-même à la retenue des allocations de logement.
Le dispositif proposé est plus complexe. Il introduit une procédure active de consignation du reste à charge. Une mauvaise compréhension du dispositif pourrait conduire une partie des locataires vers des situations d’impayés de loyer, qui pourraient in fine déboucher sur leur expulsion.
Par ailleurs, le texte n’aborde pas la question épineuse du sort des reliquats des loyers qui resteraient consignés une fois la période de blocage des aides révolue. Qu’adviendrait-il de ces sommes ?
Une fois le délai épuisé, les aides de la CAF sont perdues, cela risquerait donc de faire peser le loyer sur le seul locataire.
Les cas seront certes limités, mais le locataire aura donc tout intérêt à avoir saisi un juge pour obliger son bailleur à réaliser les travaux nécessaires ou à faire réduire son loyer. Cela soulève la question de l’opportunité de saisir le juge. Le plus efficace serait donc de prévoir une procédure simplifiée pour obtenir plus rapidement une décision de justice.
Se pose également la question de la possibilité de remise en location du logement si les travaux ne sont toujours pas effectués, mais le texte n’y répond pas non plus.
Compte tenu de ces éléments, la question de l’opérationnalité du dispositif est posée et sa plus-value n’est pas évidente, dans la mesure où il ne tend pas à améliorer le sort du locataire de manière significative. Il est peut-être même contre-productif, car le risque que le dispositif fragilise les propriétaires modestes et les locataires semble réel, à La Réunion comme en métropole.
La bataille contre l’habitat non décent ne pourra être gagnée qu’une fois la crise du logement enrayée, c’est-à-dire à la suite de la mise en œuvre de mesures réellement structurelles.
Je pense à la production massive de logements sociaux, à l’encadrement des loyers en secteurs tendus, à l’augmentation des APL, à la garantie universelle des loyers, à l’intensification de la prévention des expulsions locatives, au renforcement des moyens pour les quartiers prioritaires de la politique de la ville, et, bien sûr, à un réel accompagnement humain et financier des propriétaires pour la rénovation de leur logement.
Il convient également de communiquer plus efficacement auprès des publics concernés sur les différents dispositifs existants qui s’offrent à eux pour la réhabilitation de leur logement.
La procédure actuelle n’est engagée que dans trop peu de situations – quelques centaines de cas avérés par an à La Réunion –, alors qu’il existe plusieurs dizaines de milliers de logements indécents. Même si le taux de réussite s’élève à 95 % dans ce domaine, le dispositif ne concerne que trop peu de personnes.
Pour toutes ces raisons, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s’abstiendra.
M. le président. La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que notre assemblée examine ce matin vise à augmenter la contrainte qui pèse sur les bailleurs, afin de les inciter à procéder aux travaux de mise en décence et de rénovation des logements loués à des allocataires d’aides personnelles au logement.
Si le sujet des logements non décents et insalubres ou indignes n’est pas nouveau, force est de constater que celui-ci persiste en métropole comme dans les outre-mer.
Aujourd’hui, le constat est sans appel : il y aurait 420 000 logements indignes au sein du territoire national, dont 110 000 dans les outre-mer, selon les chiffres cités par un récent rapport de la délégation sénatoriale à l’outre-mer.
La Réunion est particulièrement affectée par ces dégradations de logement, ce qui explique, sans aucun doute, le dépôt de cette proposition de loi par notre collègue, M. Jean-Louis Lagourgue, sénateur de La Réunion, qui reprend ainsi le texte déposé voilà un an, en février 2022, par l’ancien député de ce même territoire, M. David Lorion.
Introduite par la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite SRU, la notion de non-décence ne concerne, en droit, que le logement locatif. L’objectif du législateur était clairement de préciser l’obligation faite aux bailleurs de délivrer un logement en bon état et qui réponde à des normes minimales en matière de confort.
Par conséquent, pour être qualifié de décent, un logement doit notamment présenter une surface minimale, une absence de risque pour la sécurité et la santé du locataire, une absence d’animaux nuisibles et de parasites, ainsi que la mise à disposition de certains équipements nécessaires à le rendre habitable – le chauffage, l’électricité ou le système d’évacuation des eaux usées.
Toutefois, depuis le 1er janvier 2023, en application de la loi Énergie et climat, les logements locatifs doivent également répondre à des critères de performance énergétique pour pouvoir être qualifiés de « décents ». Ces critères seront progressivement durcis jusqu’en 2034, date à laquelle l’ensemble des logements classés E, F ou G ne pourront plus être loués.
Les transitions écologiques et énergétiques nous imposent de légiférer. Nous avons commencé le travail et nous le poursuivrons ! Autrement dit, mes chers collègues, notre groupe partage bien évidemment l’objet affiché par ce texte, qui vise à protéger davantage les locataires face au fléau que représentent les logements non décents.
Cela étant, je constate à mon tour que le dispositif proposé dans le texte est inadapté et qu’il risque de complexifier et d’aggraver la situation des locataires.
Le mécanisme proposé dans l’article unique est inadapté et inopérant.
Il est inadapté, car faire en sorte que le loyer soit désormais non plus versé au bailleur, mais consigné auprès de la Caisse des dépôts et consignations soulève des interrogations sur le plan opérationnel, en particulier pour les organismes payeurs que sont la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) et la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (CCMSA).
Si ces organismes ne sont pas directement concernés, ils seraient néanmoins placés au cœur du mécanisme, puisqu’il leur reviendrait de transmettre à la Caisse des dépôts et consignations chaque ouverture de conservation des aides et, en toute logique, chaque levée de la conservation.
Compte tenu de la surcharge d’activités actuelle du système d’information de la Cnaf, nous pouvons craindre une réelle difficulté quant à la possibilité d’automatiser un tel signalement, sans compter la question de la sécurisation du transfert de ces données et celle du coût que cela représenterait.
Le dispositif est donc inadapté, mais il est également inopérant, car on peut s’interroger sur le potentiel effet dissuasif de la mesure proposée. Je rappelle que la procédure actuelle de retenue des allocations de logement démontre une certaine efficacité, puisque, selon les services de l’État, plus de 95 % des dossiers aboutissent à une remise en état dans les délais impartis.
Contrairement à la situation en métropole, la procédure existante concerne également les bailleurs sociaux dans les outre-mer. Or ces derniers semblent affirmer que la privation du reste à charge du loyer n’influerait en rien sur leur diligence à traiter les cas de non-décence.
De plus, l’absence de versement du loyer résiduel pourrait priver des propriétaires, au moins les plus modestes, des ressources nécessaires pour financer la réalisation de travaux. Ce sont autant de raisons qui démontrent que le dispositif du texte est inadapté et inopérant.
Par ailleurs, le mécanisme risque d’entraîner des conséquences non négligeables sur les locataires. Pour l’instant, après un signalement à la Cnaf, les locataires n’ont aucune démarche à effectuer pour que les allocations de logement cessent d’être versées aux bailleurs. Introduire une procédure active de consignation du reste à charge pourrait amener une partie des locataires à cesser de payer leur loyer, ce qui les exposerait à une expulsion, tout à fait légale, à la demande du propriétaire.
Pis encore, la suspension du versement direct des loyers aux propriétaires pourrait inciter ces derniers à retirer leurs biens du marché de la location pour les mettre en vente.
Mes chers collègues, si l’intention de l’auteur de ce texte est louable, le dispositif me semble inadapté à l’objectif qui fait sans doute consensus au sein de cette assemblée, à savoir un meilleur accompagnement des bailleurs, dans l’intérêt des locataires et de nouvelles solutions face à la dégradation des logements, qui dépasse largement le seul champ du logement non décent.
Pour toutes ces raisons, le groupe RDPI s’abstiendra sur ce texte.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas.
Mme Viviane Artigalas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, selon les sources, le nombre d’habitats indignes en France est estimé à 450 000 logements ou à 600 000, selon le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre, qui ne saurait être accusée d’excès, compte tenu des situations dramatiques qu’elle étudie et suit de près.
Selon ce même rapport, rien ne permet d’indiquer une quelconque évolution positive en 2022, et aucune dynamique n’a été lancée pour les années à venir.
Dans les territoires d’outre-mer, la situation est particulièrement critique. Selon le rapport d’information sénatorial sur la politique du logement en outre-mer, près de 13 % du parc sont jugés indignes.
L’estimation du nombre de logements jugés non décents pâtit d’une définition imprécise du terme.
Faute de chiffres précis, nous pouvons nous référer à plusieurs critères. Selon l’Insee, l’Institut national de la statistique et des études économiques, quelque 2,3 millions de personnes vivent dans des logements possédant des défauts graves. Il y manquerait au moins un élément élémentaire, tel que l’eau chaude ou le chauffage, et il y aurait des défauts structurels essentiels, liés à une plomberie défectueuse causant des fuites, ou encore à une mauvaise étanchéité.
Un chiffre semble fiable : 600 000 enfants vivraient dans ces conditions aujourd’hui dans notre pays.
La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise à mieux protéger les locataires bénéficiant d’une allocation logement et vivant dans des habitats considérés comme non décents.
Depuis la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite Alur, si le logement est reconnu comme tel, alors la CAF retient le montant de l’allocation logement et le locataire ne verse que le loyer résiduel et les charges locatives au bailleur durant dix-huit mois. Ce délai doit permettre au bailleur d’effectuer les travaux nécessaires pour rendre le logement apte à la location.
Si nous adoptions cette proposition de loi, le locataire d’un logement indécent verserait le loyer résiduel non plus au bailleur, mais à la Caisse des dépôts et consignations. De ce fait, le bailleur ne percevrait plus aucune somme tant que le logement ne répondrait pas aux normes de décence.
Si nous comprenons bien l’intention qui se trouve derrière cette proposition, nous ne pouvons manquer de formuler plusieurs réserves.
En premier lieu, il existe déjà des procédures permettant d’inciter le bailleur à effectuer des travaux de réhabilitation d’un logement non décent.
Comme l’a rappelé en commission Mme le rapporteur, contrairement aux procédures relatives à l’indignité, à l’insalubrité ou au péril, qui relèvent des autorités administratives, la lutte contre la non-décence relève exclusivement d’une action privée, celle du locataire contre le bailleur. Si ce dernier refuse d’exécuter les travaux de remise en état d’un logement en situation de non-décence, le locataire peut en effet saisir le juge.
Le juge peut notamment ordonner l’exécution des travaux, assortie d’une éventuelle réduction du montant du loyer pour toute la durée pendant laquelle le logement demeure non décent.
Cette procédure a concerné 2 647 situations en 2017 et 4 079 en 2019. Le chiffre est en augmentation, ce qui signifie bien que les locataires, mieux informés sur leurs droits, n’ont pas hésité à les faire valoir auprès des autorités compétentes. La grande majorité des travaux ont été effectués dans les dix-huit mois par les propriétaires.
En second lieu, le dispositif proposé par nos collègues du groupe Les Indépendants – République et Territoires pourrait entraîner des conséquences négatives, sans répondre pour autant de manière efficace à la lutte contre les logements dégradés.
En effet, la mesure précitée a peut-être pour objet de sanctionner plus efficacement les propriétaires indélicats qui louent délibérément des logements indécents, mais elle tendrait à priver les bailleurs de bonne foi de ressources utiles pour financer les travaux nécessaires. Cela reviendrait in fine à pénaliser des locataires déjà en situation de précarité.
Ce point me permet d’aborder le sujet de l’accompagnement des propriétaires bailleurs ou occupants : ils n’en disposent pas toujours pour réaliser des travaux d’amélioration de leur logement, notamment pour en améliorer la performance énergétique, afin de lutter contre la précarité.
Depuis la loi Climat et résilience, les logements doivent présenter une performance énergétique minimum. Cela se traduit par l’interdiction de louer les logements les plus énergivores à compter du 1er janvier 2023 et par l’interdiction progressive de louer les logements de catégorie G à partir du 1er janvier 2025 et du 1er janvier 2028 pour ceux de catégorie F.
Outre l’inconfort et le poids financier des factures d’énergie, un logement humide ou mal chauffé risque d’amplifier les pathologies de certaines personnes âgées ou plus fragiles.
Or force est de constater que la politique menée ces dernières années ne produit pas les effets escomptés, car les aides sont mal ciblées.
Rémi Cardon et moi avons déposé une proposition de loi pour recentrer l’effort budgétaire du pays sur l’éradication des passoires thermiques et engager une stratégie de rénovation plus inclusive.
Nous constatons en effet aujourd’hui que la précarité énergétique s’accroît et que le nombre de passoires thermiques ne baisse pas, malgré le vote de la loi Climat et résilience.
Les raisons sont simples. Trop peu de personnes s’engagent dans un parcours de rénovation. Près de la moitié des ménages résidant en passoire thermique ont des revenus modestes, voire très modestes. Quelque 37 % de ces logements sont occupés par des ménages vivant en dessous du seuil de pauvreté.
Toujours selon la Fondation Abbé Pierre, le reste à charge des plus modestes serait actuellement de l’ordre de 39 % pour une rénovation globale, ce qui est bien trop important pour les familles les plus précaires, y compris dans le cadre du prêt avance rénovation mis en place par le Gouvernement, dont les résultats ne sont pas aussi bons qu’escomptés. Il y a pourtant urgence !
La hausse générale des prix de l’énergie a des conséquences importantes sur les ménages, tout particulièrement sur les plus vulnérables, qui sont les premiers à en subir les effets.
Il y a urgence, également, car les logements les plus énergivores vont disparaître du marché de la location, faute de rénovation. Cette interdiction est entrée en vigueur au 1er janvier 2023 pour les logements de classe G, c’est-à-dire pour ceux qui ont une consommation supérieure à 450 kilowattheures.
Il y a urgence, enfin, à prendre en compte les spécificités des territoires ultramarins, à promouvoir les techniques les mieux adaptées et à faciliter le recours à des matériaux de construction et de rénovation produits et utilisés localement.
Ainsi, plutôt que de confisquer, pour ainsi dire, les revenus locatifs des propriétaires, nous pensons qu’il est préférable de mieux les accompagner. Il est nécessaire que les citoyens perçoivent enfin les signes concrets et positifs de la transition énergétique. Celle-ci est encore trop souvent perçue comme inefficace et inégalitaire.
Notre politique climatique et énergétique doit comporter une stratégie de rénovation des logements et de lutte contre la précarité énergétique plus performante et plus inclusive. Notre priorité devrait être de sortir les 5,6 millions de ménages de la précarité, qu’ils soient propriétaires ou copropriétaires, bailleurs ou occupants.
Les auteurs de la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui mettent en lumière un réel problème et partent d’une bonne intention ; nous ne pouvons que partager leurs constats.
Cependant, les solutions qui sont proposées nous semblent inadaptées pour répondre à de tels enjeux. Par conséquent, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a choisi de s’abstenir sur ce texte.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Mes chers collègues, en février dernier, vous étiez nombreux dans cet hémicycle à ne pas avoir de mots assez durs pour condamner les locataires dans l’incapacité de payer leurs loyers. Ce sont d’ailleurs les mêmes à qui vous avez décidé d’ajouter deux ans de travail…
Aujourd’hui, nous nous retrouvons pour aborder l’autre partie du contrat, si l’on peut dire. Les locataires ne sont pas les seuls à avoir des devoirs ; il y a aussi, et même d’abord, les propriétaires.
La proposition de loi qui nous est présentée aujourd’hui est audacieuse. Elle a le mérite de poser clairement le problème du mal-logement et d’y apporter des éléments de réponse.
En vous attaquant aux logements non décents, vous soulevez aussi, et peut-être même surtout, la question des passoires thermiques.
Plusieurs catégories de logements seront progressivement interdites à la location ; tant mieux pour les locataires et pour la lutte contre le gaspillage d’énergie ! Cela concerne d’abord les logements G+, dès cette année, puis G, à partir de 2025, F en 2028, et ainsi de suite.
Nous sommes tout à fait convaincus qu’il faut développer des mesures fortes contre ces passoires thermiques. Les situations sont très inégales sur le territoire, mais elles sont trop nombreuses. Il sera nécessaire d’agir en profondeur pour mieux isoler les logements et mieux protéger les locataires. Quelque 12 millions de personnes souffrent de précarité énergétique. Cet enjeu doit être prioritaire.
Tous les outils pour mesurer les performances énergétiques des logements ne sont pas toujours concordants. Il est nécessaire d’affiner quelque peu ces instruments, pour qu’aucun logement ne sorte des radars ou ne soit intégré à la mauvaise catégorie.
Il y a un besoin réel et urgent de vérifier la fiabilité de la classification et de déterminer des outils et un référentiel qui soient identiques, quelles que soient la localisation du logement et la nature du propriétaire.
Cependant, il faut distinguer le propriétaire de bonne foi, qui possède un logement mis en location et qui n’a pas les moyens de réaliser les travaux, du multipropriétaire qui empoche de nombreux loyers sans jamais mettre un euro dans l’entretien ou l’isolation du logement.
Il faut aussi faire la part des choses avec les bailleurs sociaux, dont les finances ont été durement ponctionnées, notamment avec la réduction de loyer de solidarité (RLS).
Pour les propriétaires de bonne foi, comme pour les bailleurs sociaux, la réponse selon laquelle il faudrait bloquer leurs ressources pour qu’ils fassent les travaux est un peu contradictoire. C’est à peu près le même niveau de réflexion que de dire que l’on bloque les APL pour les locataires qui n’arrivent plus à payer leur loyer !
Ce n’est pas toujours la volonté qui manque – voilà ce que je veux vous dire aujourd’hui. Ce sont parfois d’abord les moyens qui sont insuffisants.
Je vous le dis, oui, il y a besoin d’un grand chantier de rénovation thermique des logements, pour limiter la consommation et les dépenses d’énergie, ainsi que pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre. Ce sera bon pour les finances de nos concitoyens comme pour notre planète. Il faudra donc, avant tout, proposer des moyens aux bailleurs, publics comme privés, pour que chacun vive dignement dans un logement décent.
Telle est notre préoccupation première : que chacun puisse vivre dans un logement digne.
Le groupe CRCE a déposé une proposition de loi visant à garantir l’accès au logement pour tous et la préservation du pouvoir d’achat des ménages. Elle est assez fournie et avance plusieurs idées sur le sujet.
Par exemple, l’article 16 tend à rendre possible la préemption des passoires thermiques. Au travers de notre article 28, nous souhaitons rendre obligatoire les permis de louer. L’article 35, quant à lui, vise à donner au juge la responsabilité de suspendre le bail et de décider du montant de loyer versé, le temps que le propriétaire fasse les travaux de mise aux normes, avec une prise différée du bail pour empêcher la mise à la rue du locataire qui aurait fait valoir ses droits.
Nous nous exprimerons aussi au sujet des logements décents, plus particulièrement des passoires thermiques, dans le cadre de la commission d’enquête sur l’efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique.
Pour l’heure, votre proposition de loi demeure incomplète, peut-être même contre-productive, et surtout cantonnée à une partie du territoire français, ce qui est à notre avis regrettable.
C’est pourquoi, en l’état, notre groupe s’abstiendra. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Daphné Ract-Madoux. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Daphné Ract-Madoux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’heure où la vie n’a jamais été aussi chère et où la précarité ne cesse d’augmenter, le logement demeure la première dépense contrainte de nos concitoyens, à hauteur de 30 % à 40 % de leur budget. Nous devons plus que jamais nous saisir du sujet et le mettre à l’ordre du jour pour agir concrètement afin d’améliorer le quotidien des Français.
Toutes les initiatives allant dans ce sens sont à saluer. Je tiens donc à remercier notre collègue Jean-Louis Lagourgue et les autres signataires de cette proposition de loi, qui ont ainsi permis de relancer le débat sur la situation du logement dans notre pays, un sujet qui préoccupe tant de nos concitoyens.
Je salue également les apports précieux de la rapporteure Micheline Jacques et de la commission des affaires économiques ; ils rappellent tout l’intérêt et toute la vitalité du travail parlementaire.
Toutefois, avec mes collègues de l’Union Centriste, nous considérons que ce texte n’est pas abouti, à ce jour, et partageons la position de la rapporteure.
Nous souscrivons évidemment à la volonté de protéger plus efficacement les locataires confrontés à des bailleurs malveillants, mais nous tenons également à ce que les propriétaires les plus modestes, qui sont, de surcroît, le plus souvent de bonne foi, ne soient pas pénalisés par un dispositif qui risquerait, en l’état, d’être trop rigide.
Priver un petit bailleur du loyer qu’il perçoit pourrait en effet lui faire perdre une part importante de ses revenus, qui n’excèdent parfois pas ceux de ses locataires. Cela pourrait aussi, tout simplement, l’empêcher de procéder aux travaux nécessaires à la rénovation du logement, ce qui irait à l’encontre de l’objectif des auteurs de la proposition de loi.
De plus, la procédure de constat en non-décence, bien que trop peu usitée, a fait preuve de son efficacité et nous manquons de données pour évaluer d’éventuels dysfonctionnements.
Enfin, le déficit que connaît notre pays en matière d’offre de logements nous astreint à faire preuve de pragmatisme et de nuance. Certains propriétaires ne seront jamais prêts à louer s’ils craignent que la mise en location de leur bien représente, in fine, une charge plutôt qu’une source de revenus. Or nous avons plus que jamais besoin de nouveaux bailleurs.
C’est en ayant ces éléments à l’esprit que, avec une grande majorité du groupe Union Centriste, nous suivrons la rapporteure et la commission en votant contre l’adoption de ce texte.
Je veux profiter du reste du temps qui m’est imparti pour mettre l’accent sur les urgentes priorités qui doivent être les nôtres en matière de logement.
Les chiffres du dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre nous rappellent la réalité brutale du mal-logement dans notre pays.
Aujourd’hui en France, on compte 330 000 sans-abri et 4,1 millions de personnes mal logées ; plus de 12 millions de personnes se trouvent en situation de fragilité en matière de logement.
Or les personnes qui paient le plus lourd tribut au mal-logement, ce sont, comme souvent, les femmes. Il est plus difficile pour une femme, et plus encore pour une mère célibataire, de sortir du mal-logement ; celui-ci renforce la précarité des femmes et les expose, plus que les hommes, au risque de violences sexuelles. Le logement reste malheureusement le creuset des inégalités dans notre pays.
Face à cette situation, il serait faux de dire que le Gouvernement est demeuré passif : 440 000 personnes sont sorties de l’hébergement d’urgence ou du sans-abrisme grâce au plan Logement d’abord au cours du dernier quinquennat ; 250 000 logements sociaux ont été construits entre 2021 et 2022 ; enfin, 6,7 milliards d’euros ont été consacrés par le plan France Relance à la rénovation des logements privés et sociaux, des bâtiments publics et des locaux des PME-TPE.
Toutefois, pour atteindre les objectifs ambitieux auxquels nous astreint la situation du logement dans notre pays, ces efforts doivent être poursuivis et complétés. L’offre de logements demeure en effet très insuffisante au regard des besoins croissants de la population, en particulier dans les territoires qui connaissent les tensions les plus fortes.
Cela s’explique, tout d’abord, par la raréfaction du foncier. Nous manquons de terrains constructibles et nous devrons veiller à ce que l’objectif de « zéro artificialisation nette » des sols en 2050, le fameux ZAN, ne fasse pas peser de contraintes trop lourdes sur la construction de logements neufs.
Je salue à ce titre l’excellent travail réalisé par la commission spéciale présidée par Valérie Létard autour de la proposition de loi dont nous débattons cette semaine. Ce sont des signes forts envoyés aux acteurs de nos territoires.
En outre, la construction et l’amélioration des logements sont compliquées par le foisonnement des normes qui les encadrent. Entre 2002 et 2022, le code de l’urbanisme est passé de 1 584 à 3 542 pages. La prolifération des normes augmente le coût de la construction et peut en limiter le volume ; parfois, ces normes sont tout simplement absurdes.
Je me réjouis à ce propos que la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, présidée par notre collègue Françoise Gatel, organise ce matin même les États généraux de la simplification.
La crise de l’offre est enfin celle de la location. Il importe à ce titre que les bailleurs soient accompagnés dans la rénovation de leurs logements, afin que les obligations de performance énergétique auxquels ils sont soumis ne représentent pas une charge trop lourde et désincitative.
Au Sénat, la commission d’enquête sur l’efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique, proposée par notre collègue Guillaume Gontard et présidée par Dominique Estrosi Sassone, commission d’enquête dont je suis membre, mène à cette fin, depuis plusieurs semaines, de nombreuses auditions.
Nous tentons notamment d’évaluer le service MaPrimeRénov’ et, plus largement, les freins et les dysfonctionnements qui entravent les dispositifs d’aide à la rénovation énergétique, empêchant à ce jour de massifier ces rénovations et de répondre à cette priorité nationale. C’est l’une des missions du Parlement que d’évaluer et de contrôler les politiques publiques.
Mes chers collègues, gardons toujours à l’esprit ces mots de l’abbé Pierre : « Gouverner, c’est d’abord loger son peuple. »
Le logement est un sujet complexe, qui fait intervenir de très nombreux acteurs et soulève des problématiques variées, qu’elles soient de nature économique, sociale, ou environnementale.
Je souhaite que l’initiative de Jean-Louis Lagourgue, à défaut de constituer à ce stade une réponse viable à la problématique du mal-logement, marque le début d’un vrai débat de fond sur ces questions chères aux Français. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Maryse Carrère. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le bailleur doit mettre à disposition du locataire un « logement décent », notion introduite dans notre droit par la loi SRU.
C’est ainsi qu’on garantit que chacun pourra satisfaire l’un des besoins les plus essentiels et qu’on lui apporte sécurité physique et préservation de la santé. La lutte contre le mal-logement doit donc constituer une priorité nationale, quel que soit le territoire concerné.
Quelle réponse apporte-t-on aux territoires ultramarins ? Il est inacceptable que 13 % du parc de logements y relève de l’habitat indigne, soit dix fois plus qu’en métropole. À La Réunion, territoire cité dans l’exposé des motifs de ce texte, 18 000 logements seraient concernés ; la tendance est à la hausse. Les chiffres concernant la non-décence sont plus complexes à obtenir.
La présente proposition de loi procède à une légère modification de la loi en vigueur, de manière à inciter le propriétaire d’un logement non décent pour lequel des allocations de logement sont versées à réaliser les travaux de mise en conformité au plus vite. Elle dispose que le locataire consigne le montant du loyer qui lui incombe – déduction faite des allocations – auprès de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), plutôt que de le verser au bailleur.
Il apparaît que la mise en place de la suspension du versement des allocations de logement au propriétaire pendant ce délai, limité à dix-huit mois, mais prolongeable de six mois, a porté ses fruits. Le droit en vigueur serait donc suffisamment dissuasif pour provoquer la remise en état du bien. En effet, le taux de libération des allocations serait de 95 %, soit une très forte effectivité.
La rapporteure a par ailleurs exprimé ses craintes quant au caractère contre-productif du dispositif proposé, qui retirerait aux propriétaires modestes les moyens financiers nécessaires à la réalisation des travaux. Or, rappelons-le, ces derniers peuvent donner lieu à des aides à la rénovation.
Encore faut-il que le locataire signale à la caisse d’allocations familiales l’état de non-décence de son logement. C’est tout le problème lorsque la demande est loin de satisfaire l’offre. Le locataire est prêt à tout accepter pour dormir sous un toit.
Que le dispositif ne soit pas adapté, soit ! Mais l’argument selon lequel il enverrait au locataire le signal de ne pas payer le loyer ne nous a pas convaincus. Si l’on exclut une minorité de mauvais payeurs, la principale préoccupation des locataires et notamment des plus modestes d’entre eux est de parvenir à régler le loyer, par peur de l’expulsion.
D’ailleurs, il aurait été intéressant de disposer de chiffres plus précis quant aux délais de réalisation des travaux. Est-ce qu’ils sont majoritairement réalisés dans un délai de 6, 12, 18 ou 24 mois ? S’ils sont achevés à la fin du délai réglementaire seulement, le dispositif proposé dans ce texte pourrait s’avérer utile pour accélérer la mise en décence du bien.
Bien que les deux tiers des logements non décents soient traités au bout d’un an dans le cadre de cette procédure, son expérimentation à La Réunion, proposée au travers de l’amendement déposé par M. Lagourgue, pourrait nous éclairer sur ce point.
Certes, les difficultés structurelles de l’accès à un logement décent en outre-mer méritent une réponse plus complète, notamment sur l’île de La Réunion. Nous sommes tous d’accord pour affirmer que, face à une telle hémorragie, il convient d’en traiter les causes plutôt que de proposer des pansements.
L’excellent rapport sur ce sujet de la délégation sénatoriale aux outre-mer, dont notre collègue Micheline Jacques était l’un des auteurs, pointe un certain nombre de défaillances.
Si le contrôle de la qualité des nouvelles constructions demeure déficient, on alimente la machine à produire de l’habitat indigne. Il est ahurissant de constater que la moitié des habitants de La Réunion affrontent des problèmes d’humidité dans leur domicile. La multiplication des malfaçons, notamment sur des constructions de moins de dix ans, alors même que les règles se renforcent, doit être rapidement réglée par les pouvoirs publics.
Nous faisons donc face à un défi à la fois quantitatif et qualitatif. Où en est-on des plans logement outre-mer ? Après l’échec du premier, le bilan en attente du deuxième et l’abandon du troisième, quelles solutions sont envisagées ?
J’espère, monsieur le ministre, que, après le débat qui s’est tenu en janvier dernier au sein de cet hémicycle, vous pourrez nous donner plus de précisions sur les réponses qui seront apportées à la crise du logement en outre-mer, en particulier à La Réunion, mais aussi, en général, sur l’ensemble du territoire.
Au vu des arguments que j’ai développés, le groupe du RDSE se partagera entre vote favorable et abstention sur la présente proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme Dominique Estrosi Sassone. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je remercie notre collègue Jean-Louis Lagourgue et le groupe Les Indépendants de donner, ce matin, l’occasion à notre assemblée de faire un point sur la lutte contre le logement indécent dans notre pays et, plus particulièrement, outre-mer.
C’est un sujet qui me tient particulièrement à cœur et sur lequel je me suis beaucoup investie, avec la commission des affaires économiques et sa présidente Sophie Primas, notamment après le drame de la rue d’Aubagne, survenu le 5 novembre 2018, très présent encore dans nos mémoires.
Le logement est un bien de première nécessité, avons-nous coutume de répéter. C’est aussi un droit et un élément central de notre pacte républicain. C’est l’abri de la famille, la protection de la vie privée, une possibilité d’épanouissement personnel et, normalement, une garantie d’égalité, car grandir dans un logement délabré diminue les chances de réussite et même l’espérance de vie.
Mais ce droit est également un combat. Il nous mobilise, quel que soit notre groupe politique. Ce combat se fonde sur des principes simples – l’égalité, la justice et l’humanité –, mais il se décline dans des réalités compliquées. Malheureusement, il n’y a pas de martingale, pas de cause ou de responsable uniques, pas de baguette magique pour une solution immédiate.
Cette tension, nous la ressentons aujourd’hui en examinant la proposition de loi qui nous est soumise. La rapporteure de la commission, Micheline Jacques, dont je tiens à saluer le travail de fond, a osé affronter la complexité de la lutte contre l’habitat indécent et ne s’est pas contentée de solutions séduisantes, mais mal adaptées.
En effet, personne, bien évidemment, ne peut s’opposer à la recherche d’une meilleure protection des locataires bénéficiant d’une allocation logement et vivant dans un habitat non décent, comme l’indique le titre de la proposition de loi.
S’appuyant sur le rapport d’information de juillet 2021 de notre délégation aux outre-mer, dont Micheline Jacques était déjà l’un des auteurs, Jean-Louis Lagourgue souligne qu’environ 13 % des logements seraient considérés comme indignes dans les départements et régions ultramarins, soit 110 000 sur 900 000. C’est certainement un problème central et urgent.
Pour y porter remède, l’auteur de la proposition de loi propose, au-delà du mécanisme de retenue des aides personnelles au logement, que les locataires ne versent plus de loyer à leurs propriétaires, et que le montant de celui-ci soit consigné auprès de la CDC.
À première vue, on peut être séduit par la solution qui désigne un coupable et un seul : le bailleur ! C’est malheureusement trop simple. Le rapport de la commission a démonté cette fausse évidence.
On doit relever tout d’abord que le droit actuel, qui prévoit la retenue des APL lorsque le locataire fait valoir une situation d’indécence, est efficace dans 95 % des cas. Il permet donc, d’ores et déjà, d’apporter les solutions attendues.
Aller plus loin en retirant toute ressource aux propriétaires bailleurs aurait donc une dimension plus punitive qu’incitative, approche qui n’est pas justifiée par les faits. À La Réunion, la Fondation Abbé Pierre a estimé que la majorité des logements problématiques appartenaient à des propriétaires modestes dont les conditions de vie sont similaires à celles de leurs locataires. On le sait, à l’échelle nationale, un tiers des propriétaires ne sont pas imposables et deux tiers n’ont qu’un seul bien à louer, souvent pour compléter une retraite.
Par ailleurs, à La Réunion, de nombreux logements indécents sont des logements sociaux ; leur caractère indécent est notamment dû à des problèmes d’infiltrations. On se rend alors compte qu’il s’agit moins d’un conflit de classes entre propriétaires et locataires que d’un problème plus structurel de qualité du bâti, y compris pour les constructions récentes.
Utiliser l’outil de l’indécence des logements, c’est aussi faire reposer le poids de la résorption de l’habitat indigne sur les seuls locataires, dont on sait que beaucoup hésiteront à lancer une procédure face au risque de ne pas disposer d’un autre logement et de perdre le bénéfice des APL après les dix-huit mois de suspension s’ils demeurent dans le logement.
Par ailleurs, centrer la lutte contre l’habitat indigne sur les seuls locataires, c’est laisser de côté un pan important du sujet : les nombreux propriétaires qui vivent dans des logements de ce type et la question des copropriétés dégradées. Je sais que ce problème particulièrement difficile et long à traiter vous tient particulièrement à cœur, monsieur le ministre.
En outre-mer, l’habitat informel, ou spontané, est un sujet souvent important, mais il ne résulte pas de difficultés dans les relations entre propriétaires et locataires.
Enfin, les problèmes de logement indigne outre-mer, et plus particulièrement à La Réunion, ont un caractère structurel qui dépasse largement les défaillances d’entretien des logements.
Le rapport de la commission, sur la base des témoignages des services de l’État, mais aussi des associations de locataires et des bailleurs sociaux, pointe des malfaçons récurrentes, une formation et une qualification insuffisantes des professionnels et des matériaux inappropriés. Ainsi, beaucoup d’immeubles récents, encore sous garantie décennale, seraient aujourd’hui problématiques. Certains de ces défauts pourraient s’expliquer par un usage mal contrôlé des possibilités d’investissement défiscalisé.
Aussi, plutôt que de mettre en cause les seuls propriétaires bailleurs, le problème de l’habitat indigne outre-mer ne pourra trouver de solutions qu’à la suite d’une analyse multifactorielle de ses différentes causes, d’autant que ces départements font face à des risques sismiques et climatologiques spécifiques.
À cet égard, je regrette que l’auteur de la proposition de loi n’ait pas accepté la proposition d’un renvoi en commission, qui aurait permis de procéder à cette analyse conjointement avec la délégation aux outre-mer.
C’est pourtant la solution que nous avions trouvée sur la proposition de loi déposée par notre collègue Bruno Gilles à la suite du drame de la rue d’Aubagne. Nous avions pu mener un travail en profondeur et faire adopter la proposition de loi modifiée quelques mois plus tard.
Une expérimentation du dispositif évoqué dans la seule île de La Réunion ne paraît pas plus pertinente que la rédaction initiale s’appliquant à l’ensemble du territoire national, compte tenu des arguments que j’ai évoqués.
C’est pourquoi le groupe Les Républicains suivra et appuiera les recommandations de la rapporteure et de la commission des affaires économiques, en rejetant, à regret, le présent texte et l’amendement présenté par son auteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. La discussion générale est close.
La commission n’ayant pas élaboré de texte, nous passons à la discussion de l’article unique de la proposition de loi initiale.
proposition de loi visant à mieux protéger les locataires bénéficiant d’une allocation de logement et vivant dans un habitat non-décent
Article unique
Au dernier alinéa de l’article L. 843-1 du code de la construction et de l’habitation, les mots : « s’acquitte du » sont remplacés par les mots : « consigne à la Caisse des dépôts et consignations le ».
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié, présenté par MM. Lagourgue, Capus, Chasseing, Decool et Dennemont, Mme Dindar, MM. Grand, Guerriau et Longeot, Mme Malet, MM. Malhuret, A. Marc et Médevielle, Mme Mélot, M. Menonville, Mme Paoli-Gagin et MM. Verzelen et Wattebled, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 843-1 du code de la construction et de l’habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, à La Réunion et jusqu’au 31 décembre 2026, durant ce délai, le locataire consigne à la Caisse des dépôts et consignations le montant du loyer et des charges récupérables diminué du montant des allocations de logement, dont il a été informé par l’organisme payeur, sans que cette diminution puisse fonder une action du propriétaire à son encontre pour obtenir la résiliation du bail. »
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue.
M. Jean-Louis Lagourgue. J’ai entendu les réserves exprimées par Mme le rapporteur quant à l’application du dispositif proposé sur l’ensemble du territoire national.
J’ai aussi entendu que le problème du logement à La Réunion dépasse le sujet de l’habitat non décent, bien que celui-ci en représente une large part.
J’estime que la proposition que je formule au travers du présent amendement répond à ces inquiétudes. Il y est en effet prévu une application limitée, tant dans l’espace – le seul territoire de La Réunion – que dans le temps, du dispositif.
Notre territoire en a cruellement besoin. Nombre de nos concitoyens, parmi lesquels des personnes âgées et des personnes en situation de handicap, y vivent dans des conditions déplorables. Nous ne pouvons pas les laisser sans solution. Il faut agir dès aujourd’hui. Nous aurons besoin de données pour continuer ce travail : l’expérimentation proposée permettra de les recueillir.
Madame le rapporteur, chère collègue ultramarine, je pense que vous comprenez notre situation. Je veux croire que vous ne vous opposerez pas à la demande de la quasi-totalité des parlementaires de La Réunion, pour leur territoire et leurs concitoyens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Le présent amendement vise à restreindre l’application du dispositif proposé au seul territoire de La Réunion et à une période courant jusqu’au 31 décembre 2026, à titre expérimental.
Toutefois, les motifs qui font douter de l’adéquation du dispositif proposé à l’objectif de ses auteurs sont tout aussi valables à La Réunion que sur le reste du territoire national.
Concernant l’utilité de la mesure, les acteurs réunionnais que j’ai interrogés, notamment la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Deal), ont confirmé la grande efficacité de la procédure actuelle de retenue des allocations de logement. Dès lors, pourquoi la durcir ?
Concernant le risque de fragilisation des propriétaires modestes, je me reporte à un récent rapport de la Fondation Abbé Pierre, qui soulignait justement le manque de ressources des bailleurs privés de La Réunion pour réhabiliter leurs logements. J’ajoute que, si les critères de performance énergétique ne s’appliquent pas pour l’instant dans les outre-mer, ils y entreront progressivement en vigueur à partir de 2028, ce qui induira des coûts supplémentaires pour les bailleurs dès avant cette année.
Enfin, le risque d’exposition à des situations d’impayés de locataires victimes d’une mauvaise compréhension du dispositif a bien été relevé par mes interlocuteurs de la Deal de La Réunion.
Je comprends la tentation de l’expérimentation, face aux situations ubuesques dont je vous ai parlé tout à l’heure, mais, je le répète, le dispositif n’est pas efficient et les risques d’effets de bord sont réels, à La Réunion comme ailleurs.
En outre, étant donné que le régime des allocations de logement diffère entre les outre-mer et la métropole, le bilan d’une expérimentation limitée à La Réunion ne permettrait de tirer aucune conclusion quant à la pertinence d’étendre le dispositif à l’ensemble du territoire national. Ce qui est demandé au travers de cet amendement est donc moins une expérimentation qu’une législation dérogatoire temporaire.
Pour toutes ces raisons, l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Klein, ministre délégué. Par constance, le Gouvernement s’en remettra à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
Évidemment, les problématiques d’habitat indigne et insalubre sont particulièrement prégnantes dans les collectivités d’outre-mer. Je me suis rendu outre-mer à plusieurs reprises en tant que président de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), notamment à La Réunion. Dans mes fonctions actuelles, je me suis rendu tout récemment à Mayotte, où la situation est encore plus difficile.
Néanmoins, comme Mme la rapporteure vient de l’expliquer, la mise en œuvre du dispositif proposé, même à titre expérimental, me paraît susciter les difficultés que j’avais déjà relevées dans mon intervention liminaire.
Ajoutons que la mobilisation du Gouvernement sur le logement à La Réunion est extrêmement importante. Nous nous y employons notamment avec mon collègue Jean-François Carenco. La ligne budgétaire unique (LBU) a été très largement mobilisée pour une politique du logement plus incitative dans nos territoires d’outre-mer : 20 millions d’euros sont inscrits à ce titre sur la LBU pour 2023. Je peux donc vous assurer, mesdames, messieurs les sénateurs, de notre profonde mobilisation sur la question du logement indigne et du renouvellement urbain outre-mer.
Ces éléments justifient l’avis de sagesse du Gouvernement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Indépendants – République et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 252 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 213 |
Pour l’adoption | 19 |
Contre | 194 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Je mets aux voix, l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi visant à mieux protéger les locataires bénéficiant d’une allocation de logement et vivant dans un habitat non décent.
Je rappelle que le vote sur l’article vaudra vote sur l’ensemble de la proposition de loi.
Y a-t-il des demandes d’explication de vote ?…
(L’article unique n’est pas adopté.)
M. le président. En conséquence, la proposition de loi n’est pas adoptée.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures dix, est reprise à douze heures quinze.)
M. le président. La séance est reprise.
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Lutte contre la désertification médicale des collectivités
Rejet d’une proposition de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe Les Indépendants – République et Territoires, de la proposition de loi relative aux outils de lutte contre la désertification médicale des collectivités, présentée par M. Dany Wattebled et plusieurs de ses collègues (proposition n° 102, texte de la commission n° 414, rapport n° 413).
Dans la discussion générale, la parole est à M. Dany Wattebled, auteur de la proposition de loi.
M. Dany Wattebled, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la désertification médicale ne cesse de progresser en France. Derrière cette expression, entrée dans le langage courant, il y a une réalité pour 49 millions de Français et de Françaises.
Nous avons tous entendu les mêmes récits et les mêmes questions : comment faire renouveler son ordonnance quand il n’y a plus de médecin généraliste ? Comment accéder à un spécialiste quand ce dernier n’a pas de remplaçant ? Comment se faire soigner s’il n’y a pas de médecin près de chez soi ?
Lutter contre la désertification médicale constitue un enjeu de santé publique pour une population qui augmente, qui vieillit et qui souffre de plus en plus souvent de maladies chroniques.
Dans certains territoires, il faut parfois attendre vingt jours pour obtenir un rendez-vous chez un généraliste. Pour ce qui est des consultations chez un spécialiste, les délais augmentent : il y a jusqu’à cinq mois d’attente pour obtenir un rendez-vous auprès d’un ORL. Il s’agit d’un vrai problème en matière de soins et de dépistage, qui augmente les risques d’aggravation de l’état de santé des patients.
Ce problème affecte également tous les professionnels de santé, qui sont confrontés à une charge de travail très importante, dont une partie n’est pas consacrée à la médecine.
Par ailleurs, cette question accentue le désintérêt des étudiants et des étudiantes pour l’exercice de la médecine générale en libéral.
Pendant cinquante ans, le numerus clausus a contribué à tarir l’offre de soins. Si sa réforme, en 2019, a été une bonne nouvelle, nous savons tous qu’il nous faudra attendre plusieurs années avant d’en voir les premiers effets.
D’autres réponses ont également été apportées, mais la politique qui a été menée associe insuffisamment les collectivités.
En effet, les élus locaux se retrouvent démunis face à des départs de médecins, les moyens dont ils disposent étant insuffisants pour rendre leur territoire attractif afin d’en faire venir de nouveaux. Pourtant, les maires font preuve d’initiatives et proposent des réponses innovantes.
Nous devons leur faire confiance. J’en veux pour preuve que les collectivités se sont systématiquement et pleinement saisies de chacun des outils mis à leur disposition en matière de santé.
Par exemple, les collectivités se sont montrées innovantes en étant à l’origine de 23 % des créations de centres de santé. Elles ont également été pragmatiques et volontaristes, en mettant des locaux à disposition auprès des médecins qui s’installeraient sur leur territoire ou en offrant à ceux-ci des aides financières.
Face au désarroi de nombreux maires, il m’est apparu utile de leur donner de nouveaux moyens d’agir en matière de santé.
Nous savons tous que les médecins croulent sous les tâches administratives. Aussi pouvons-nous comprendre leur inquiétude de s’installer dans un territoire inconnu, auprès d’une patientèle nouvelle, sans personnel administratif. C’est pourquoi j’ai proposé de mettre à la disposition des cabinets médicaux et des maisons de santé situées dans un désert médical des fonctionnaires territoriaux.
Pourquoi des fonctionnaires territoriaux, me direz-vous ? En réalité, cela relève de l’évidence. Imaginons une commune mettant à disposition un agent municipal afin d’officier temporairement en tant que secrétaire d’un cabinet médical. Cet agent serait en parfaite mesure d’accueillir les patients et d’apporter un appui administratif au médecin. Il connaîtrait et les professionnels de santé locaux et les habitants et pourrait ainsi assurer une bonne coordination entre ceux-ci et le médecin nouvellement arrivé. Il s’agit d’une mesure simple, pragmatique et efficace.
Je profite de cette intervention pour remercier très chaleureusement l’ensemble de la commission et le rapporteur Daniel Chasseing de leur excellent travail. Fort de son expérience en tant que médecin généraliste en milieu rural, le docteur Chasseing a parfaitement compris l’esprit que j’ai voulu donner à cette proposition de loi et l’intérêt pour certaines communes de recourir à ce dispositif.
Aussi a-t-il proposé une nouvelle rédaction particulièrement claire afin de délimiter le dispositif avec précision. Le texte de la commission qui est soumis au vote de notre Haute Assemblée ouvre ainsi la possibilité, pour les collectivités territoriales situées dans les déserts médicaux, de mettre un agent à la disposition d’un médecin. Cet agent devra exercer la mission de service public de permanence des soins et sera mis à disposition pour une durée de trois mois, renouvelable deux fois et seulement à l’arrivée du médecin sur le territoire.
Le droit commun prévoit, sauf dérogation, que le salaire de l’agent doit être remboursé par la structure d’accueil. Aussi ce dispositif peut-il se concevoir comme une avance de trésorerie pour les médecins nouvellement arrivés.
Il s’agit de donner aux élus locaux la possibilité d’accueillir dans les meilleures conditions un médecin lorsqu’il n’y en a plus. Une fois lancé, le médecin recrutera son équipe ou bénéficiera des différentes aides proposées par la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) ou par les agences régionales de santé, et l’agent recouvrera ses fonctions initiales. Les cabinets libéraux doivent bien entendu rester libéraux !
Mes chers collègues, l’urgence de la situation nous oblige à faire feu de tout bois dans la lutte contre la désertification médicale. Je vous sais tous concernés et compte sur vous. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mmes Véronique Guillotin et Nadia Sollogoub applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (M. Jean-Pierre Decool applaudit.)
M. Daniel Chasseing, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis 2015, l’accessibilité des consultations chez le médecin généraliste a reculé dans 86 départements.
Un à un, nos territoires les plus fragiles se transforment en déserts médicaux, tant et si bien que près de neuf millions de nos concitoyens disposent actuellement d’une offre médicale insuffisante pour répondre à leurs besoins en santé.
Trop de fois déjà, la commission des affaires sociales a eu à diagnostiquer l’origine du mal. Un manque de médecins, lié à l’application aveugle d’un numerus clausus trop restrictif, en est bien sûr la cause principale. Le premier cycle comporte trop peu de stages pour découvrir la médecine libérale et les hôpitaux et cabinets médicaux périphériques ne comptent pas assez d’internes. Cette situation est la conséquence d’une action publique décidée à l’échelle nationale en associant insuffisamment les collectivités.
Nombre d’administrés expriment leur désarroi, leur sentiment d’abandon et parfois même leur colère à leurs élus locaux, qui sont souvent démunis pour faire face à des départs de médecins, faute de disposer de leviers d’attractivité suffisants pour en faire venir de nouveaux.
La proposition de loi que nous examinons a été déposée par notre collègue Dany Wattebled. Son article unique vise à élargir la liste des entités éligibles à la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux, en y ajoutant les cabinets médicaux et les maisons de santé situés en zones sous-denses.
Le texte a été adopté par la commission des affaires sociales, modifié par un amendement que j’ai soutenu. Ainsi, tout en restant fidèles à l’esprit du dispositif, nous en avons précisé le champ, encadré la durée et conditionné l’éligibilité à la participation au service public de permanence des soins ambulatoires, répondant ainsi à certaines observations formulées lors des auditions.
La mise à disposition consiste, pour un agent public réputé occuper son emploi, à exercer ses fonctions hors de l’administration où il a vocation à servir. À ce jour, la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux est ouverte à une liste limitative d’entités, qui sont de droit public, exercent une mission de service public, ou, à titre expérimental et sur un champ restreint, sont des organismes sans but lucratif.
Le texte se situe donc entre rupture et continuité vis-à-vis du droit de la fonction publique. Rupture, tout d’abord, car il marque l’engagement du législateur dans la lutte contre la désertification médicale, puisque le dispositif ouvre la mise à disposition à des entités de droit privé à but lucratif. Continuité, ensuite, dès lors que le texte adopté en commission maintient bien le lien consubstantiel unissant l’agent mis à disposition et le service public, en conditionnant la mise à disposition à la participation à la permanence des soins ambulatoires.
L’objectif de ce texte, madame la ministre, mes chers collègues, est de proposer un accompagnement humain articulé avec les différents dispositifs existants pour aider ponctuellement l’installation de médecins en zones sous-denses.
La plupart des dispositifs existants pour lutter contre la désertification médicale se concentrent sur l’appui financier et logistique aux nouveaux arrivants. Ces dispositifs, s’ils sont une composante essentielle pour revitaliser l’attractivité médicale, ne doivent pas éclipser l’accompagnement humain du médecin libéral dans les semaines suivant son arrivée dans un nouveau territoire, qui demeure un angle mort des politiques conduites jusqu’à présent.
Pourtant, si l’on veut éviter qu’un médecin nouvellement installé ne plie bagage précocement, il convient de ne pas le laisser livré à lui-même lors de ses premiers mois d’exercice, au moment où il a besoin d’appui pour accomplir des démarches d’installation chronophages et des tâches administratives. Ces dernières, qui occupent une part importante du temps des médecins, sont démultipliées, à l’arrivée dans un nouveau territoire, par la constitution d’une nouvelle patientèle.
Le fait de pouvoir partager, voire déléguer une partie de cette charge administrative à un agent mis à disposition répondrait aux préoccupations légitimes des médecins en la matière et pourrait contribuer à lever une barrière à l’installation.
L’aide apportée pourrait également répondre à des contraintes organisationnelles. Exercer la médecine dans un nouveau territoire, dont on ne connaît ni les caractéristiques ni l’écosystème professionnel, peut relever de la gageure, à plus forte raison pour les médecins étrangers.
En effet, les représentants des professions médicales que nous avons auditionnés se sont montrés intéressés par la possibilité offerte au nouveau médecin de recourir à des fonctionnaires territoriaux, qui pourront faciliter la coordination avec les autres professionnels de santé du territoire lors des premiers mois d’installation.
La rémunération du fonctionnaire mis à disposition sera versée par l’administration d’origine, puis remboursée dans les conditions fixées par la convention de mise à disposition. Les salaires du personnel mis à disposition feront obligatoirement, je le répète, l’objet d’un remboursement intégral par l’entité bénéficiaire. À terme, le dispositif est donc neutre pour les finances des collectivités.
Dès lors, ce texte, s’il devait être voté, n’alimenterait pas une quelconque forme de concurrence financière délétère entre collectivités, comme le craignaient certains élus auditionnés. Les personnels mis à disposition pourraient être des agents de municipaux, intercommunaux ou départementaux, qui seraient chargés de l’accueil de la patientèle, de la gestion administrative – classement de dossiers, saisie de documents dans le dossier médical partagé, etc. – et de la coordination avec les autres professionnels paramédicaux.
Ces derniers, qu’ils soient infirmiers, kinés, orthophonistes, pédicures, etc. ont besoin de prescriptions dans le cadre de leur travail auprès du patient. Ainsi, la réception de demandes ou la transmission de documents entre professionnels de santé sont journaliers.
De même, les agents pourront informer les personnes en salle d’attente au cas où le médecin aurait dû s’absenter pour prescrire des soins urgents non programmés. Ils pourront parfois même prendre des rendez-vous auprès de médecins spécialistes.
Ce personnel mis à disposition travaillera bien souvent à mi-temps et de manière temporaire – trois mois renouvelables deux fois – afin que le médecin arrivant trouve ses marques et puisse recruter son propre personnel. À cet égard, ce texte, loin de faire doublon avec les dispositifs existants, notamment celui des assistants médicaux, en est le complément.
Le fonctionnaire mis à disposition a vocation à passer le témoin à un assistant médical ou à un secrétaire médical, qui sera recruté sous un contrat de droit privé par le médecin. Ce dernier aura simplement bénéficié ponctuellement d’un accompagnement personnalisé à son arrivée.
Cette proposition de loi ouvre donc une possibilité, dont pourront se saisir les collectivités qui le souhaiteront. À ceux qui estiment que les communes ne disposent pas de moyens humains ou financiers suffisants pour le faire, je rappelle que le dispositif proposé est bien sûr facultatif et qu’il est remboursé.
Au reste, les collectivités se sont pleinement saisies de l’ensemble des potentialités que leur offre, à date, la loi en matière de santé : elles se sont montrées innovantes en étant à l’origine de 23 % des créations de centres de santé à activité médicale. Elles ont également été pragmatiques et volontaristes, en mettant des locaux à disposition auprès des médecins qui s’y installeraient et en leur proposant des aides financières.
Mes chers collègues, madame la ministre, cette proposition de loi ne résoudra pas le problème de la désertification médicale.
M. Daniel Chasseing, rapporteur. Elle n’en a d’ailleurs pas l’ambition. Toutefois, je demeure convaincu, à la fois en tant que rapporteur et en tant que médecin exerçant en zone sous-dense, que la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux peut apporter une réponse locale intéressante pour accompagner ponctuellement les médecins dans leur installation.
Facultatif, temporaire et neutre pour les finances des collectivités, le dispositif est sans risque et ne fait pas de perdants. Par conséquent, j’espère que ce texte rassemblera une majorité au sein de notre assemblée. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et UC, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement se réjouit de l’inscription à l’ordre du jour de cette proposition de loi portée par M. Dany Wattebled, avec le soutien de son groupe Les Indépendants – République et Territoires, dont je salue l’initiative.
Elle rejoint pleinement la philosophie du Gouvernement, qui consiste à reconnaître le rôle majeur et décisif des territoires pour faire émerger des solutions issues d’initiatives locales avec l’ensemble des acteurs concernés.
Car l’enjeu majeur, pour les professionnels de santé, dans le contexte démographique tendu que nous connaissons, est bien de mobiliser tous les leviers existants pour trouver du temps médical et augmenter l’attractivité de tous les territoires.
Le Gouvernement est pleinement engagé en faveur de l’accès aux soins, fondant son approche sur la territorialisation afin de construire partout, avec l’ensemble des acteurs, les solutions les plus adaptées aux contextes locaux. Nous sommes tous convaincus que la réponse ne peut pas être unique et identique sur l’ensemble du territoire.
Tout d’abord, en matière de formation, la quatrième année de médecine générale permettra aux internes et aux externes de réaliser des stages en ambulatoire et de découvrir la pratique en libéral. Nous comptons ainsi donner envie à nos étudiants de s’installer et exercer en ville.
Ensuite, pour créer le choc d’attractivité dont nous avons besoin, nous agissons en faveur de l’exercice coordonné, en poursuivant le déploiement des maisons et centres de santé pluriprofessionnels et des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).
J’ai d’ailleurs lancé ce mois-ci un grand tour de France des CPTS pour identifier ce qui fonctionne et ce qui fonctionne un peu moins bien dans les structures déjà existantes et dans celles qui se créent. Notre volonté est de proposer des leviers d’amélioration pour permettre d’ici à la fin de 2023 un maillage du territoire couvrant l’ensemble de la population.
Nous souhaitons également accélérer le déploiement des assistants médicaux pour atteindre le chiffre de 10 000 en 2025. Pour cela, nous aurons besoin des élus et des collectivités territoriales.
En effet, les cabinets médicaux ne sont souvent pas adaptés pour accueillir ce nouveau métier, dont l’objectif est de libérer du temps soignant. Il nous faut donc anticiper ces questions dès le montage de projets des nouveaux cabinets, mais aussi apporter des solutions concrètes d’adaptation des locaux existants.
Nous travaillons d’ores et déjà avec l’ensemble des parties prenantes – élus locaux, professionnels de santé – au cabinet médical de demain. Il s’agit de l’un des volets du pacte territorial en santé avec les élus qu’a annoncé le Président de la République, qui se déclinera dans le cadre du Conseil national de la refondation (CNR) en santé durant les mois à venir.
Par ailleurs, nous devons répondre au défi de la simplification et de la suppression des tâches administratives, qui empoisonnent la vie de nos médecins. La feuille de route de mon ministère, au côté de François Braun, est de tout faire pour simplifier la vie des médecins.
Le 8 février dernier, nous avons présenté quinze mesures pour réduire le temps administratif des médecins, afin de redonner du temps médical aux médecins et d’améliorer durablement leurs conditions d’exercice.
À titre d’exemple, les certificats médicaux doivent devenir l’exception. Nous savons que les médecins y passent en moyenne entre une heure trente et deux heures par semaine ; supprimer la délivrance de certificats médicaux non nécessaires, c’est autant de temps retrouvé au service des patients.
Il était urgent de clarifier les règles pour les domaines concernés que sont les crèches, les écoles ou les fédérations sportives. Ce sera bientôt chose faite, avec des campagnes d’informations régulières pour mieux informer patients et institutions sur le caractère non nécessaire de certains certificats.
Nous agissons également pour déployer des outils numériques mieux adaptés au quotidien des professionnels de santé, en particulier les médecins libéraux.
La proposition de loi que nous examinons tend à un plus grand partage des leviers mis à la disposition des acteurs, y compris les collectivités territoriales, pour faciliter la vie des médecins et encourager ainsi leur installation dans les territoires.
Elle va dans le sens d’un enrichissement de la boîte à outils que nous souhaitons mettre à la disposition des acteurs locaux et dont pourraient s’emparer certains maires pour agir concrètement sur l’accès aux soins.
De plus, elle s’ajoute aux mesures votées en LFSS pour 2023 en faveur de l’installation des médecins. Je pense notamment au guichet unique départemental et à la simplification des aides à l’installation. L’objectif est bien d’offrir plus de lisibilité et de souplesse pour une efficacité renforcée.
Dans le cadre du CNR en santé, qui se poursuivra dans les prochains mois, la mise en œuvre de ce guichet unique départemental trouvera toute sa place. Ce sera d’ailleurs l’un des volets de la deuxième phase du CNR en santé que nous lancerons d’ici à la fin du mois et qui a vocation à rassembler de façon régulière tous les acteurs, territoire par territoire, pour partager les besoins en matière de santé et construire des solutions adaptées aux réalités du terrain, en utilisant l’ensemble des outils que nous mettons à disposition.
Le dispositif de cette proposition de loi se fonde sur cette même volonté, celle de simplifier la vie des médecins en facilitant les conditions de leur installation dans les déserts médicaux en offrant la possibilité aux collectivités territoriales de mettre à leur disposition un agent administratif, pour une durée limitée.
Pour être pleinement efficace, un médecin doit être accompagné d’un secrétariat médical ou d’un assistant médical. Cette aide est souvent demandée par les médecins en lieu et place d’une aide financière, mais le droit actuel ne permet pas de la leur accorder.
En commission des affaires sociales, vous avez souhaité en préciser le champ, en soulignant le rôle d’amorçage de la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux, d’où sa limitation dans le temps. Vous avez également souhaité conditionner le dispositif à la participation du bénéficiaire à la mission de service public de permanence des soins ambulatoires.
M. Daniel Chasseing, rapporteur. Tout à fait !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Le Gouvernement est favorable à ces ajouts et vous proposera, par souci d’équité, un amendement visant à permettre aux fonctionnaires des trois versants de la fonction publique d’intégrer le dispositif. Sans rien enlever au fond de la proposition de loi, dont nous partageons la philosophie, cela nous paraît de nature à en favoriser l’opérationnalité.
Tout faire, c’est déployer les outils nécessaires. Ce texte, vous en conviendrez, monsieur le rapporteur, a une portée limitée (M. le rapporteur acquiesce.), mais il est bienvenu, en cela qu’il participe de notre volonté commune de déployer tous les moyens pour répondre aux besoins en santé de nos concitoyens.
Je rappelle que le dispositif ne retire rien à personne. Il est facultatif, limité dans le temps et les frais y afférents sont seulement avancés. Il y a deux jours, alors que nous débattions au sein de cet hémicycle, tous les orateurs ont appelé à ce que les collectivités territoriales puissent s’investir pour répondre aux besoins de santé de nos concitoyens. Vous avez l’occasion de le leur permettre.
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c’est la sixième fois en quelques mois que nous débattons de la question de l’accès aux soins. Cela démontre l’urgence de la situation et le manque de réponses à la hauteur de la part du Gouvernement.
Le constat est connu et s’aggrave un peu plus chaque année, pour atteindre un seuil critique dans certains territoires. Rappelons quelques chiffres : quelque huit millions de Français vivent dans un désert médical, six millions d’entre eux n’ont pas de médecin traitant, tandis que 60 % des habitants de territoires ruraux connaissent des difficultés d’accès à un médecin généraliste.
Depuis les années 2000, de nombreuses politiques d’incitation à l’installation des médecins dans les zones sous-denses ont été mises en œuvre : financement d’assistants médicaux, contrats d’engagement de service public (CESP) passés avec des étudiants, maisons de santé ou encore passage du numerus clausus à un numerus apertus, qui va toutefois mettre plusieurs années à produire des effets.
Bien que ces mesures soient utiles, elles restent clairement insuffisantes. En effet, les écarts entre les territoires les mieux et les moins bien dotés se creusent.
Si les dispositifs de soutien financier aux étudiants, en contrepartie d’engagements de service, permettent d’accroître l’offre à court terme, les résultats à plus long terme sont beaucoup moins probants. Les incitations financières ne suffisent pas à attirer et à retenir les médecins dans les zones sous-denses, et les effets de ces mesures sont assez faibles au regard de leur coût.
Les dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 n’offrent pas non plus de réponse satisfaisante. Une quatrième année d’études est certes créée pour les médecins généralistes, mais cette mesure demeure très floue.
Aussi, il nous paraît évident que le dispositif de cette proposition de loi ne répond pas au problème.
Cet article unique prévoit d’ajouter les cabinets médicaux et les maisons de santé à la liste des entités pouvant bénéficier de la mise à disposition d’un agent public, dans le cas où la collectivité se trouve dans une zone sous-dense. L’objectif affiché est d’alléger les contraintes financières et administratives pesant sur l’installation des médecins dans ces territoires.
Nous nous opposons clairement à cette proposition qui flèche des moyens publics vers des cabinets libéraux.
MM. Jean-Baptiste Lemoyne et Dany Wattebled. Dommage !
Mme Monique de Marco. Les fonctionnaires territoriaux n’ont pas à être mis au service des médecins, ou, tout du moins, cela ne peut pas être une priorité.
Par ailleurs, ce dispositif paraît peu opérationnel : la mise à disposition se fonderait certes sur le volontariat, mais une contrainte supplémentaire pèserait sur les petites communes, qui ne peuvent se passer ni d’un de leurs agents ni de l’arrivée d’un médecin.
L’examen du texte en commission a également mis au jour plusieurs écueils. Par exemple, il nous semble un peu risqué, dans les faits, de confier une telle mission à un agent municipal non soumis au secret médical et dont ce n’est pas le métier.
Pour faire face à l’urgence, des mesures de planification de l’offre et de régulation réelle de l’installation paraissent plus efficientes, comme l’a fait valoir le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires à plusieurs reprises, notamment à l’occasion de l’examen du dernier PLFSS.
Les mesures qui nous semblent prioritaires sont les suivantes : la prise en compte par les facultés de médecine du nombre de candidats originaires de zones sous-denses en premier cycle dans l’élaboration de leur capacité d’accueil ; la prise en charge des frais de transport pour lever les difficultés d’accès aux soins ; l’accès effectif aux urgences et à la maternité en moins de trente minutes.
Ces mesures doivent s’inscrire dans des réformes structurelles, qui engagent le long terme. Il nous faut véritablement rééquilibrer notre démographie médicale et mettre fin à cette iniquité territoriale qui ne cesse de croître.
Pour toutes ces raisons, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera contre ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Annie Le Houerou. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « la France est un désert médical. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 87 % du territoire français est un désert médical. Paris comme la Nièvre sont des déserts médicaux ».
Tels étaient vos mots, madame la ministre, à l’occasion du 104e congrès de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) en novembre dernier.
Notre pays connaît, en effet, de grandes difficultés en matière de démographie médicale. Toutefois, ce n’est pas une fatalité. Cette question mérite un plan Marshall pour apporter à tous nos concitoyens une offre de soins correspondant à leurs besoins.
Nous n’en pouvons plus de voir l’offre de soins se dégrader pour s’adapter aux moyens disponibles, alors qu’aucune perspective d’amélioration ne se profile.
Le constat étant connu, je n’y reviendrai que brièvement. La France a perdu plus de 5 000 médecins généralistes entre 2010 et 2021, alors que la population s’est accrue de 2,5 millions d’habitants sur la même période. La situation est alarmante : 11 % des Français, soit six millions de personnes, n’ont pas de médecin traitant. Plus de huit millions de Français, faute d’un praticien proche de chez eux, ne peuvent consulter plus de deux fois par an.
Par ailleurs, l’augmentation de la demande de soins liée au vieillissement de la population, le développement des maladies chroniques et le non-remplacement d’un grand nombre de médecins généralistes partant à la retraite aggravent ce phénomène.
Les inégalités territoriales d’accès aux soins ne cessent de se creuser : vivre dans une zone sous-dense multiplie par deux le taux de renonciation aux soins. Les pertes de chances pour certains d’entre nous sont une réalité inacceptable dans notre pays, où le système de santé se fonde sur la solidarité nationale.
Selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), la propension à renoncer à des soins est multipliée par huit lorsque le fait de vivre dans un désert médical se couple à une pauvreté en conditions de vie.
S’ils s’étendent en priorité dans les territoires ruraux, les déserts médicaux existent aussi dans des territoires urbains tels que l’Île-de-France et plus encore dans nos départements et collectivités d’outre-mer.
Qu’elles soient liées à la fermeture des urgences ou à l’absence de praticien à proximité, les difficultés d’accès aux soins entraînent une dégradation de leur qualité susceptible de mettre en péril la santé et la vie de nos concitoyens.
Cette situation dramatique devient insupportable à vivre pour les patients et insoutenable pour les élus, qui se battent sans relâche pour trouver des solutions.
Des réponses concrètes et ambitieuses sont plus que jamais nécessaires pour préserver notre système de soins.
Pour ne pas laisser nos concitoyens dans la détresse, sans solution pour se soigner, et afin de leur garantir un égal accès à la santé, il appartient au législateur et au Gouvernement d’agir.
La proposition de loi de notre collègue Dany Wattebled, présentée au nom du groupe Les Indépendants – République et Territoires, vise à améliorer la situation dégradée que nous connaissons dans nos communes. Elle a pour objet d’autoriser la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux auprès des cabinets médicaux ou des maisons de santé.
Ce texte s’inscrit dans une logique intéressante, puisqu’elle tend à libérer du temps médical et à faciliter l’intégration des nouveaux médecins sur un territoire.
La mise à disposition d’un fonctionnaire territorial permettrait de répondre à la préoccupation de médecins, qui seraient prêts à s’installer dans une zone sous-dense, mais qui s’inquiéteraient des contraintes financières et administratives à supporter.
Bien qu’il prévoie un dispositif facultatif, ouvert uniquement aux collectivités locales volontaires, ce texte suscite l’étonnement des associations d’élus, lesquelles ont émis des réserves.
Le caractère opérationnel du dispositif appelle en effet plusieurs réserves.
Comment s’articulera-t-il avec les dispositifs existants, notamment celui des secrétaires médicaux ou des assistants médicaux, dont l’assurance maladie facilite l’embauche grâce à une aide financière significative, à hauteur de 36 000 euros par an, sous réserve que le médecin traite un minimum de patients et exerce de manière coordonnée ?
Le texte ne prévoit aucun financement de l’État ou des agences régionales de santé. Le dispositif, dont le coût est à la charge des collectivités locales, a été très justement modifié par le rapporteur Daniel Chasseing, qui en prévoit le remboursement par le médecin lui-même. Cependant, cette mesure pose une difficulté au moment où les marges de manœuvre en matière de ressources humaines et financières des collectivités sont restreintes, et alors qu’elles sont elles-mêmes confrontées à des difficultés de recrutement.
Enfin, les personnels mis à disposition doivent pouvoir bénéficier d’une formation adaptée à la terminologie médicale et aux outils de gestion de l’assurance maladie, formation qui est sans lien direct avec celle des fonctionnaires territoriaux. Cette formation minimale, mais essentielle, ne vaudrait que pour quelques mois, compte tenu de la durée maximale du dispositif qui est limitée à trois mois, renouvelable dans la limite de deux fois.
Il nous semble plus adapté de prévoir, dès l’installation du médecin, un recrutement direct sous contrat de droit privé.
L’amendement du Gouvernement, qui ouvre le bénéfice du dispositif aux agents des trois fonctions publiques, dont ceux de la fonction publique hospitalière, pourrait améliorer ce point, mais, au vu de l’état actuel de l’hôpital public, le remède serait pire que le mal : l’hôpital souffre aujourd’hui d’une hémorragie, d’une fuite de ses agents qu’il convient plutôt de colmater !
Permettez-moi également de rappeler que les agents de la fonction publique territoriale sont soumis au devoir de réserve et à la discrétion d’usage, mais qu’ils ne sont pas assujettis au secret médical, contrairement aux assistants médicaux. Cela pose un vrai problème, susceptible de fragiliser la relation de confiance entre les patients et le personnel médical.
Par ailleurs, le caractère optionnel du dispositif risque d’accroître les inégalités territoriales et, ainsi, d’amplifier la concurrence entre collectivités, sans effet global sur l’attractivité médicale.
Lors de son examen en commission, le rapporteur a réécrit, à très juste titre, l’article unique de la proposition de loi.
Il a encadré la durée de recours au dispositif, en la limitant à une période maximale de trois mois, renouvelable deux fois. Les fonctionnaires territoriaux n’ont pas vocation à se substituer durablement au personnel des cabinets libéraux et des maisons de santé libérales.
Le rapporteur a également conditionné le dispositif à la participation des organismes à la mission de service public de permanence des soins ambulatoires, en cohérence avec le droit en vigueur en matière de mise à disposition.
Pour pallier tout risque de détournement, le dispositif a principalement pour but d’accompagner les médecins lors de leur arrivée sur un nouveau territoire.
Pour autant, nous estimons que d’autres mesures ont déjà été prises par les ARS en lien avec les collectivités, au travers notamment des contrats locaux de santé, des CPTS, ainsi que du soutien et de l’accompagnement accordés aux nouveaux médecins qui s’installent dans une commune – le guichet unique.
Une installation se prépare et doit s’inscrire dans un exercice coordonné, en lien avec les autres professionnels de santé. Les collectivités territoriales sont sollicitées au-delà de leurs compétences pour financer de tels dispositifs incitatifs.
Je rappelle que la santé est une compétence de l’État, à qui il appartient d’établir une offre de soins équilibrée sur l’ensemble du territoire.
L’origine du problème tient au manque de médecins et de professionnels de santé, qui ne résulte pas d’une crise des vocations, car nombreux sont les jeunes souhaitant s’impliquer dans ces métiers, mais de l’inadaptation des recrutements, de la formation et de la désorganisation actuelle de notre offre de soins.
La mise à disposition d’un fonctionnaire est une procédure administrative lourde, qui prend du temps, car elle doit faire l’objet d’une information préalable de l’assemblée délibérante et de l’accord préalable de l’intéressé. Ces démarches, étant donné les trois mois de mise à disposition, posent la question de l’efficacité relative du dispositif pour les communes qui seront concernées.
Pour lutter contre les déserts médicaux, surmonter la crise de l’hôpital, pallier le manque d’attractivité des métiers du soin et de la santé et répondre aux enjeux de santé de la population, il nous faut un grand projet de loi d’orientation et de programmation.
La mise en œuvre d’un plan Marshall pour un accès de tous et de toutes à la santé, partout sur le territoire national, qu’il soit rural, urbain ou ultramarin, devient urgente.
Si l’intention des auteurs de la proposition de loi est louable, le dispositif nous semble être une fausse bonne solution ! Nous partageons les réserves des associations d’élus, notamment celles de l’Association des maires ruraux de France et de l’Assemblée des départements de France.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, pour toutes les raisons que je viens d’énoncer, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ne votera pas cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, lutter contre la désertification médicale dans les collectivités territoriales est une urgence que personne ne peut contester.
Les chiffres en attestent : il n’est pas acceptable que 30 % de la population française vive dans un désert médical.
Les difficultés pour obtenir un rendez-vous avec un médecin généraliste en secteur 1 ne sont plus spécifiques aux territoires ruraux ; elles concernent désormais les territoires périurbains et urbains. Face à ces difficultés d’accès aux soins, la colère monte chez nos concitoyennes et nos concitoyens.
Cependant, je m’interroge sur cette nouvelle initiative parlementaire. Le Sénat a déjà discuté de six propositions de loi relatives à l’accès aux soins en moins de six mois !
Le présent texte est examiné en séance publique, alors même que votre groupe, messieurs Wattebled et Chasseing, et la majorité sénatoriale ont voté en faveur de l’ensemble des projets de loi de financement de la sécurité sociale, qui ont entériné la réduction des dépenses de santé.
On peut donc s’interroger sur l’objectif réel que vous visez, d’autant que nous débattons de cette proposition de loi quelques mois avant le prochain renouvellement du Sénat.
Depuis 2017, vous n’avez pas contesté, mes chers collègues, l’insuffisance des moyens mis en œuvre par le Gouvernement et le remplacement du numerus clausus par le numerus apertus, qui n’a augmenté que de deux cents médecins le nombre de praticiens formés chaque année.
Pourtant, on évalue le manque de médecins ou professionnels de santé à 20 % en médecine générale, à 14 % en odontologie, à 8 % en pharmacie et à 4 % en maïeutique.
Sur le fond, le texte vise à lutter contre les déserts médicaux en améliorant l’attractivité des territoires. Il prévoit la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux pour assurer le secrétariat des cabinets médicaux en zone sous-dense, bien que les médecins bénéficient déjà, à ce titre, d’aides financières pour recruter du personnel.
On nie ainsi la réalité du métier de secrétaire médical, dont le quotidien ne se limite pas à la prise de rendez-vous, à la tenue du standard téléphonique et à l’archivage des documents. Ce métier implique, outre sa dimension humaine essentielle, une maîtrise du vocabulaire et de la réglementation des soins et une bonne connaissance des patients. On ne peut donc pas envisager sérieusement que des fonctionnaires mis à disposition pendant seulement trois mois, ce que propose le rapporteur, puissent correctement l’exercer.
On nie également, comme l’ont souligné les associations d’élus lors des auditions, le manque dramatique de moyens des collectivités locales.
J’ajoute qu’un tel dispositif constitue une remise en cause du statut de fonctionnaire.
Dans leur exposé des motifs, les auteurs du texte envisagent de transformer les postiers en secrétaires médicaux et, au passage, de casser encore davantage le service public postal. On marche sur la tête !
En outre, nos collègues proposent une disposition discriminatoire, puisque seuls les maisons de santé et les cabinets libéraux pourraient bénéficier du dispositif de mise à disposition, ce qui exclurait de fait les centres de santé. Cette inégalité de traitement est incompréhensible.
Enfin, la commission des affaires sociales a apporté sa touche libérale à ce texte, en suggérant d’exonérer le personnel territorial de cotisations sociales, certainement pour affaiblir encore davantage la sécurité sociale…
À la lecture de votre amendement, madame la ministre, une question m’est venue à l’esprit : ne trouvez-vous pas que les hôpitaux souffrent déjà suffisamment d’une pénurie de soignants, pour envisager de les mettre à disposition des médecins libéraux ? (Mme la ministre déléguée fait une moue dubitative.) Vous pouvez soupirer, vous apportez de mauvaises solutions à de vrais problèmes !
En résumé, cette proposition de loi apporte, je viens de le dire, une réponse simpliste à un problème complexe. Elle créera plus de difficultés qu’elle ne permettra de trouver des solutions.
Nous assistons à une compétition entre territoires pour attirer des médecins, conséquence de l’impuissance organisée par les gouvernements successifs en matière de formation des professionnels de santé. Il s’agit également de la conséquence du refus de s’attaquer au totem de la liberté d’installation, qui s’applique au détriment de l’accès aux soins de nos concitoyennes et de nos concitoyens.
Pour les professionnels de santé, l’attractivité des territoires découlera moins de la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux que de l’existence de services publics – école, transports, sécurité sociale – et de la proximité d’un hôpital public.
Malheureusement, les politiques de restriction budgétaire menées par les différents gouvernements ces vingt dernières années – dont le vôtre, madame la ministre – ont entraîné la fermeture des hôpitaux et des maternités de proximité, ainsi que la disparition des services publics.
Pour moi, comme pour l’ensemble des membres de mon groupe, la réponse politique passe nécessairement par l’augmentation des moyens des universités, qui permettra de former davantage de professionnels de santé, d’un côté et de l’autre, par le développement des centres de santé et le rétablissement de la permanence médicale la nuit et le week-end, la revalorisation des gardes et la réquisition des spécialistes, y compris ceux des établissements privés.
En conclusion, les sénatrices et les sénateurs du groupe communiste républicain citoyen et écologiste voteront contre cette proposition de loi. (Mmes Monique de Marco et Annie Le Houerou applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi vise à perfectionner les leviers d’action des collectivités territoriales en matière de lutte contre la désertification médicale.
Pour ce faire, elle tend à ouvrir aux maisons de santé et aux cabinets libéraux en zone sous-dense le bénéfice de la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux.
Tout d’abord, je tiens à remercier l’auteur de ce texte, notre collègue Dany Wattebled, pour son implication dans ce dossier, ainsi que notre collègue rapporteur, Daniel Chasseing, pour sa persévérance.
L’adoption de l’amendement du rapporteur en commission a permis de clarifier le dispositif, en précisant les publics concernés et en conditionnant la mesure à la participation à la mission de service public de permanence des soins ambulatoires.
Il a également contribué à limiter la durée de recours au dispositif à trois mois, durée renouvelable deux fois. Ainsi, les fonctionnaires mis à disposition ne sauraient se substituer durablement au personnel des cabinets libéraux et des maisons de santé.
Afin de pallier tout risque de détournement, le dispositif est conditionné à une installation récente, s’agissant des médecins exerçant en cabinet libéral. Cette disposition contribue à accompagner les médecins à leur arrivée sur un nouveau territoire et à les soutenir, en leur faisant bénéficier d’une forme d’avance de trésorerie au cours de leurs premiers mois d’exercice.
Cela ne vaudrait que pour les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins, telles qu’elles sont définies par le code de la santé publique.
Il s’agit d’un appui temporaire et facultatif, avant que la maison de santé ou le cabinet n’ait pu recruter son propre personnel ou bénéficier des différentes aides proposées par la Cnam ou les ARS, à commencer par le dispositif des assistants médicaux.
Certes, la mise à disposition de fonctionnaires donne lieu à un remboursement des traitements versés à la collectivité d’origine, mais les conditions de ce remboursement, notamment dans le temps, sont définies par une convention avec l’administration d’origine.
Certains s’interrogent sur la formation et le rôle des fonctionnaires mis à disposition dans ces structures, par exemple les agents de mairie officiant comme secrétaires médicaux. Il me semble qu’aucune formation spécifique n’est nécessaire pour accueillir la patientèle, répondre au téléphone ou classer des dossiers.
Dans leur grande majorité, nos fonctionnaires exercent déjà ces activités. Peut-être pourrait-on simplement convenir de la nécessité du respect du secret médical, ce qui suscite des interrogations et devrait donner lieu à des ajustements ad hoc.
Mes chers collègues, un rapport d’information fait par la délégation aux collectivités territoriales il y a un an a alerté le Gouvernement sur les inégalités d’accès aux soins dans nos territoires. Ces derniers temps, plusieurs initiatives parlementaires ont été examinées par notre assemblée, afin de pallier le manque criant de médecins. Mais cela ne suffit pas !
J’ai la douloureuse impression que nous essayons de panser une plaie ouverte, mal soignée, avec des pansements de premiers secours qui risquent de se décoller…
Force est de constater que nous en demandons de plus en plus aux communes. Certaines collectivités, démunies face au départ de médecins, en viennent à payer la voiture de fonction, le logement et les locaux des praticiens qu’elles souhaitent attirer sur leur territoire.
Cette situation engendre une concurrence déloyale, car toutes les communes n’ont pas les moyens financiers et humains suffisants pour actionner ces leviers. Comment s’assurer que le dispositif n’aggravera pas une compétition déjà bien ancrée dans le paysage médical ? Ce risque existe et pourrait creuser les inégalités territoriales.
Cela étant, compte tenu de l’urgence de la situation, chaque collectivité tente, à sa façon, d’apporter des solutions, qui ne sont pas toujours parfaites. Nombreux sont les élus locaux qui, de manière volontariste, mettent en œuvre des dispositifs innovants et pragmatiques. Cependant, leur cadre juridique d’intervention reste limité.
Même si, je dois l’avouer, j’ai eu quelques doutes – j’aurais certainement voté contre ce texte s’il n’avait pas été modifié par la commission des affaires sociales –, je me prononcerai, comme l’ensemble des membres du groupe Union Centriste, et pour toutes les raisons que je viens d’exposer, en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
M. Daniel Chasseing, rapporteur. Merci !
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Pascale Gruny.)
PRÉSIDENCE DE Mme Pascale Gruny
vice-président
Mme le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion de la proposition de loi relative aux outils de lutte contre la désertification médicale des collectivités.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous avons déjà eu de nombreuses occasions de débattre et de légiférer sur notre système de santé ces dernières années.
Et pour cause, nous héritons aujourd’hui d’un système de soins dégradé après quarante années de politiques publiques, qui n’ont pas été à la hauteur des enjeux et qui n’ont pas permis d’anticiper les transformations de notre société.
La baisse du nombre de médecins engendrée par un numerus clausus beaucoup trop restreint, à des fins de régulation des dépenses de santé, a conduit à la pénurie actuelle.
Dans le même temps, le vieillissement de la population, ainsi que l’augmentation de la prévalence des maladies chroniques ont aggravé la situation. Aujourd’hui, 72 % de la population vit dans une zone où l’offre de soins est insuffisante, soit 48 millions de Français.
Malgré le numerus apertus, les difficultés perdureront plusieurs années, en raison notamment du nombre élevé de médecins qui partiront à la retraite sans être remplacés. La nouvelle génération souhaite mieux concilier vie personnelle et vie professionnelle, ce qui est légitime. Il faut désormais deux, voire trois médecins généralistes pour remplacer celui qui s’en va.
Cette réalité a naturellement suscité de nombreuses initiatives parlementaires. En règle générale, je suis sceptique sur l’empilement des textes visant à lutter contre la désertification médicale. Je suis surtout convaincue que les tentatives, nombreuses et répétées, de renforcer les obligations des professionnels ne réconcilieront pas les jeunes avec l’exercice de ce métier, devenu peu attrayant, même si dans le contexte actuel, la tentation est grande.
Cela étant, la présente proposition de loi vise à créer un nouvel outil, qui ne s’inscrit pas dans la logique de coercition et la logique financière habituelles, tout en permettant de dégager du temps médical. Elle autorise la mise à disposition de fonctionnaires dans les cabinets médicaux et les maisons de santé en zone sous-dense.
Les agents des trois fonctions publiques, si l’amendement du Gouvernement était adopté, pourraient ainsi réaliser des tâches de secrétariat, gérer l’accueil des patients et effectuer une partie du travail administratif.
Pour un jeune qui s’installe, le fait d’avoir à ses côtés, dès le départ, une personne de confiance qui connaît le territoire pourrait avoir un caractère incitatif et l’aider à s’installer rapidement.
La rémunération sera versée par l’administration d’origine, puis remboursée par le médecin : il s’agira donc d’une opération neutre pour les finances de la collectivité, en plus d’être facultative et temporaire. Le contrat pourrait également prévoir que le remboursement du salaire soit décalé dans le temps.
La commission a souhaité fixer certaines limites, bienvenues, à ce nouvel outil, en créant un dispositif d’amorçage d’une durée maximale de neuf mois, uniquement dans les cabinets libéraux récemment installés, le tout dans le cadre d’une participation du médecin à la permanence des soins ambulatoires.
Ces précisions et contreparties devraient rassurer ceux qui craignent de voir les agents publics se substituer durablement aux personnels que le médecin pourrait recruter.
La question de la désertification médicale inquiète les élus locaux. De nombreuses initiatives ont déjà été mises en œuvre par les élus pour améliorer l’accès aux soins. Notons que les collectivités locales sont à l’origine de la création de 23 % des centres de santé à activité médicale.
Les auteurs de ce texte veulent donner des moyens nouveaux et supplémentaires aux élus pour agir en matière de santé, en s’attaquant de manière pragmatique à la question de la charge administrative, qui est un réel problème.
La mesure proposée permettra de compléter les dispositifs existants mis en place par la Cnam et les ARS. Elle contribuera également à soutenir les efforts déjà déployés par les élus locaux, qui ne ménagent ni leur temps ni leur énergie pour offrir un cadre de vie agréable aux médecins.
On le sait, seule une politique globale visant à rendre les territoires plus attractifs, en jouant sur l’emploi, le logement, les transports, sera en mesure de garantir une meilleure répartition de l’offre de soins, même si nous savons tous que le nerf de la guerre reste le nombre de médecins formés.
La proposition de loi apportera une réponse à certaines collectivités territoriales qui, aujourd’hui, peuvent aider leurs médecins salariés – c’est le cas dans certaines maisons de santé –, mais qui ne peuvent pas, même de manière temporaire, le faire pour les médecins libéraux, y compris quand les deux statuts coexistent au sein d’une même structure – l’un de mes collègues sénateurs m’a récemment fait part d’un exemple de cet ordre.
J’ai conscience qu’il existe des points de vigilance dans ce contexte de pénurie de médecins, notamment le fait que ce nouveau dispositif pourrait créer une concurrence entre territoires et un effet d’aubaine.
Toutefois, attaché à la décentralisation, convaincu que les leviers d’action doivent être actionnés à l’échelon des territoires, le groupe du RDSE soutiendra cette proposition de loi.
M. Jean-Pierre Decool. Très bien !
Mme Véronique Guillotin. Certes, comme certains d’entre vous l’ont dit, elle ne résoudra pas à elle seule le problème de la désertification médicale, mais elle offre un outil supplémentaire, facultatif, transitoire, qui ne comporte aucun risque et ne fait aucun perdant. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et INDEP.)
Mme le président. La parole est à Mme Corinne Imbert. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Corinne Imbert. Madame le président, madame la ministre, mes chers collègues, la problématique de la désertification médicale est l’une de celles qui reviennent le plus souvent ces derniers mois au centre des débats de la Haute Assemblée.
En plus d’être une préoccupation majeure de nos concitoyens, elle est celle des sénatrices et des sénateurs que nous sommes, l’ensemble des territoires ruraux, périurbains et urbains, étant confrontés aujourd’hui à une démographie médicale en baisse et, donc, à un temps médical devenu très précieux.
Face à ce constat alarmant, les élus locaux, de très bonne volonté, se retrouvent bien souvent désemparés. Pourtant, ils continuent d’être force de proposition, afin de créer les conditions nécessaires et favorables à l’installation dans leurs territoires de professionnels de santé et, plus particulièrement, de médecins généralistes.
Ce texte s’ajoute à la panoplie des propositions faites au sein de cette assemblée en matière de lutte contre la désertification médicale. Il prévoit d’étendre le dispositif de mise à disposition des fonctionnaires territoriaux aux cabinets médicaux et aux maisons de santé. Cela permettrait aux médecins souhaitant s’installer dans une zone sous-dotée de ne pas avoir à s’occuper temporairement du recrutement et de la rémunération du personnel administratif.
Si nous comprenons l’objectif visé par les auteurs de cette proposition de loi, qui a pour objet de répondre à certaines situations, sa mise en œuvre nous laisse songeurs.
Même si le texte a été amendé en commission, reconnaissons que l’installation d’un médecin, généraliste par exemple, ne s’improvise jamais et qu’elle se programme au contraire plusieurs mois à l’avance.
Le recrutement du personnel administratif pourrait donc parfaitement faire l’objet de la réflexion à mener par le praticien dans ce laps de temps, surtout si un accompagnement de la collectivité est prévu, notamment sous la forme de la recommandation de candidats susceptibles d’être recrutés, sans que ceux-ci soient des agents de la collectivité en question.
Nous avons bien sûr entendu l’exemple cité par notre collègue Véronique Guillotin de médecins exerçant sous des statuts différents – médecins libéraux ou salariés – au sein d’un même organisme, mais, au regard du temps dont un médecin a besoin pour planifier son installation, il me semble que cette proposition de loi n’est pas forcément pertinente.
Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains, bien que sensible à l’objectif visé, votera contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
M. Jean-Pierre Decool. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, 49 millions d’habitants vivent dans un désert médical, soit 72 % de la population française.
Certes, notre population est vieillissante, mais nous avons formé moins de soignants. Des experts ont pensé faire des économies sur le système de santé, tout en gagnant en innovation et en efficacité.
Au contraire, la gouvernance s’en est trouvée alourdie et a contribué à rigidifier beaucoup de procédures. Le cloisonnement entre l’exercice en libéral et à l’hôpital s’est par ailleurs renforcé.
Les conséquences de cette politique sont bien connues : allongement des délais pour obtenir un rendez-vous, au risque d’une dégradation de l’état de santé du patient, déport des consultations vers les urgences médicales, difficultés, pour le moins, de trouver un médecin traitant et, donc, rupture du parcours et de la permanence des soins, pourtant garantis par la loi…
Si nous partageons ce constat, nous partageons également la responsabilité de résoudre ce problème.
Certaines réponses ont été apportées. Je pense notamment à la création d’une quatrième année d’internat de médecine générale, consacrée à des stages en cabinet médical, en priorité dans les zones médicalement tendues. Cette proposition, formulée initialement par le président Retailleau est de bon aloi et attendue. Toutefois, il nous faut encore en attendre les premiers effets.
Mes chers collègues, cette situation nous oblige à accueillir toute initiative avec responsabilité. Il n’est pas question de se priver d’outils qui se révéleront utiles.
La proposition de loi examinée aujourd’hui est l’un de ces outils. Déposée par notre collègue Dany Wattebled, elle comporte un article unique qui prévoit la mise à disposition d’agents auprès de cabinets médicaux et de maisons de santé par les collectivités territoriales.
En début d’année, lors de ses vœux aux acteurs de la santé, le Président de la République a précisé que « les médecins généralistes doivent pouvoir se concentrer sur la santé, et rien que sur la santé ». Ce texte pourrait permettrait de tendre vers cette ambition.
Toutefois, il n’est pas question de déléguer la gestion administrative des cabinets médicaux aux collectivités territoriales. À cet égard, je tiens à saluer le travail du rapporteur, le docteur Daniel Chasseing qui, fort de sa connaissance du monde médical en milieu rural, a su donner à cette proposition de loi une orientation précise.
Il faut comprendre ce texte comme l’ouverture d’une possibilité pour les collectivités territoriales volontaristes. Il s’agit de leur donner la faculté de mettre à disposition un agent, pendant une courte période, soit trois mois, renouvelable deux fois, auprès d’un cabinet médical ou d’une maison de santé. Le traitement de l’agent sera naturellement remboursé ultérieurement par la structure d’accueil.
Ce dispositif pourrait n’être utilisable que lorsqu’un nouveau médecin arrive, et si celui-ci exerce la mission de service public de permanence des soins.
Ce dernier point est très important. La permanence des soins est au fondement de notre réflexion sur la lutte contre la désertification médicale. Elle doit être l’affaire de toutes et de tous. Les élus locaux souhaitent légitimement pouvoir assurer cette mission de service public sur leurs territoires. Nous devons les accompagner dans cette démarche.
Vous le savez, mes chers collègues, je suis un ardent défenseur de l’initiative parlementaire. Les expériences sur le terrain, en contact direct avec les élus locaux et nos concitoyens, nous conduisent à élaborer et à proposer des évolutions législatives ayant pour objectif de répondre à des difficultés concrètes. Le texte proposé par notre collègue Dany Wattebled s’inscrit dans cet esprit.
J’ai relevé les propos de certains des orateurs m’ayant précédé à cette tribune, notamment lorsqu’ils ont évoqué les compétences et le nécessaire respect de la confidentialité par les personnels des collectivités territoriales. Mes chers collègues, nous leur avons fait confiance quand il s’est agi de mettre en place les agences postales dans une situation similaire ; nous leur avons également fait confiance pour mettre en œuvre nos décisions lorsqu’il s’est agi de lutter contre la covid-19.
Alors, ne manquons pas l’occasion de créer un nouveau levier pour lutter contre la désertification médicale. Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera naturellement cette proposition de loi ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub.
Mme Nadia Sollogoub. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’accès aux soins dans les territoires, particulièrement ruraux, est un problème majeur dont vous avez tous une conscience aiguë – je ne vous apprends rien.
Face à cette situation, chaque élu, qu’il soit local ou national, cherche des solutions. Ce sont parfois des propositions de réformes structurelles, parfois simplement des outils pratiques, mais qui peuvent faire la différence et permettre d’accueillir de nouveaux soignants.
Dans cet esprit, notre collègue Dany Wattebled, peut-être inspiré par une situation concrète ou par son expérience du terrain, nous fait une proposition intéressante.
En prenant exemple sur les partenariats qui ont pu être établis, par exemple entre les collectivités et La Poste, afin de garantir un maillage territorial et une proximité, pourquoi ne pas mettre à disposition d’un cabinet médical ou d’une maison de santé, de façon temporaire et remboursable, un agent communal ?
En dépit de leur nombre, les outils financiers et fiscaux, aides de diverses natures déjà en place, ne parviennent plus à déclencher chez les jeunes praticiens la décision d’installation. C’est une vraie difficulté !
Ces étudiants en fin de cursus, au moment de franchir le grand pas vers l’exercice en autonomie, en indépendance et sous leur propre responsabilité, sont souvent angoissés par des questions pratiques, qui peuvent les amener à reculer. Concrètement, qui pour décrocher le téléphone le premier jour ? Connaître la population locale, le contexte social ? Éventuellement, pouvoir indiquer les lieux et les adresses des patients ?
Personnellement, je me souviens, pour avoir accueilli sur ma commune nivernaise un nouveau médecin arrivant de Belgique, de l’aide précieuse de mon adjoint d’alors, facteur retraité, qui l’accompagnait bénévolement dans ses premières tournées. Ce même médecin, n’ayant pas pu s’occuper de recruter une collaboratrice et ne connaissant personne de confiance, décrochait lui-même le téléphone au cours des premières semaines d’installation, ce qui lui faisait perdre beaucoup de temps.
Lorsqu’un médecin arrive dans une commune, particulièrement rurale, l’équipe municipale au sens large fait un véritable service d’accompagnement dans les premières semaines, et c’est une des conditions d’une installation réussie. Dès lors, permettre la mise à disposition d’un agent public d’accueil connaissant le territoire et ses habitants, afin de faire un lien, aider à la prise de contact pendant une période d’« amorçage », me semble un outil intéressant, et même assez évident.
Les soucis d’ordre pratique font partie des critères poussant les candidats à l’installation vers le salariat plutôt que vers l’exercice libéral. Ils nous le disent. Ils apprécient, au moins dans les premiers temps, d’être épaulés et déchargés de certaines contingences matérielles.
Évidemment, cette facilité ne réglera pas, malgré son titre prometteur, nos problèmes dramatiques de désertification médicale. Il faudrait pour cela bien d’autres outils, et il faudrait surtout beaucoup plus de médecins, un plan massif de formation.
Les médecins sont désormais tellement rares, la pression est devenue telle sur les épaules des étudiants en fin de cursus que ces derniers sont écrasés par les demandes, les attentes, les offres, la responsabilité. On leur propose des primes, des surprimes, des avantages matériels, et dans le même temps on les insécurise, on les terrorise, on les fait fuir.
Ce n’est pas en formant 15 % de médecins en plus qu’on sortira de cette surenchère malsaine et contre-productive.
Il faut des outils sécurisants, mais surtout une vraie décision politique qui n’a pas encore été prise. Les jeunes Français vont toujours apprendre la médecine en Roumanie ou en Espagne…
Vous aurez compris, mes chers collègues, que cet outil est un outil de plus, et nous y sommes favorables. En l’occurrence, qui peut le plus peut le moins !
J’espère seulement que l’expression « maison de santé » sera entendue au sens large, avec ou sans médecin, car il est évident que tous les autres professionnels de santé nous sont également précieux. Infirmiers, dentistes, kinésithérapeutes, pharmaciens : tous devraient pouvoir bénéficier des mêmes facilités. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. le rapporteur applaudit également.)
Mme le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Claude Anglars. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le présent texte tend à apporter une nouvelle solution à la désertification médicale, sujet déjà traité au cours des derniers mois, à travers les projets de loi de financement de la sécurité sociale et d’autres propositions de loi. Je pense notamment à la proposition de loi visant à la consolidation et à la professionnalisation de la formation des internes en médecine générale, adoptée le 18 octobre 2022.
Le constat de la désertification médicale a déjà été longuement abordé dans cet hémicycle.
Le texte que nous examinons aujourd’hui, comme cela a déjà été rappelé, vise à autoriser la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux auprès de cabinets médicaux ou de maisons de santé.
La possibilité offerte aux collectivités territoriales de mettre temporairement à disposition un agent public constituerait un nouveau levier d’attractivité médicale pour les territoires, en allégeant les contraintes financières et administratives qui pèsent sur l’installation des médecins. L’accompagnement serait prévu sur toute la durée de l’installation en zone sous-dense. Le fonctionnaire territorial pourrait, éventuellement, être chargé de l’accueil de la patientèle.
Si cette solution, visant à favoriser l’implantation de médecins dans les déserts médicaux, est louable, les moyens choisis interrogent. Malgré les améliorations apportées par le rapporteur Daniel Chasseing pour clarifier le caractère transitoire et temporaire du dispositif, celui-ci appelle des réserves.
En effet, le recours aux ressources humaines d’une collectivité locale pour la gestion d’un secrétariat médical soulève de nombreuses interrogations sur la formation professionnelle et les risques d’incompatibilités avec le statut du fonctionnaire, les filières et cadres d’emploi.
La proposition de loi ne traite pas la nature des missions qui pourraient être confiées au fonctionnaire territorial. Qu’il s’agisse de la responsabilité juridique de l’employeur et de la garantie du secret médical, le dispositif proposé ne paraît pas d’une opérationnalité optimale.
J’ajoute à cela les réserves émises par les associations d’élus locaux lors de leurs auditions sur différents points : les difficultés de recrutement rencontrées par les collectivités dans les métiers susceptibles d’être concernés par la mise à disposition ; le risque de doublon avec d’autres dispositions existantes, notamment la fonction d’assistant médical, ou d’inadéquation entre la formation des personnels mis à disposition et les besoins des cabinets médicaux ; les effets pervers de concurrence entre les collectivités en matière d’attractivité médicale.
Outre ces réserves, j’attire aussi votre attention sur les solutions existantes. Je rappelle, par exemple, que nous avons amélioré, simplifié et renforcé la coordination de l’installation des professionnels de santé, en harmonisant les dispositifs d’aide à l’installation dans l’article 24 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023.
De plus, les expériences locales peuvent aussi être source d’inspiration. En ce sens, j’évoquerai rapidement la politique d’attractivité expérimentée en Aveyron depuis 2010 pour inciter les médecins de médecine générale à s’installer.
L’implication des médecins en exercice et du Conseil de l’ordre des médecins a été cruciale dans la définition d’une politique d’attractivité médicale qui a emporté, dès ses débuts, l’adhésion de l’ARS. Aborder la désertification médicale recommande une approche globale et partagée à l’échelle d’un territoire.
La stratégie repose sur un accompagnement de la profession : d’abord, en favorisant l’accueil de stagiaires par la promotion des terrains de stage, par l’intégration des stagiaires et par une aide financière au transport et au logement des internes éloignés de leur résidence ; ensuite, en soutenant l’établissement de maisons de santé pluriprofessionnelles, adossées à un projet de santé ; enfin, en créant un guichet unique d’accompagnement à l’installation.
Le succès repose sur une coordination inédite de tous les acteurs. La cellule d’accueil des médecins s’est imposée progressivement comme un interlocuteur privilégié. Elle réunit plusieurs acteurs, dans une approche partenariale volontariste et informelle.
Depuis 2011, il y a eu 105 installations de médecins généralistes en Aveyron, pour 107 départs.
Au vu de ces éléments, nous sommes très réservés sur cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à Mme Nadine Bellurot.
Mme Nadine Bellurot. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ce texte tend à mettre un nouvel outil à la disposition des collectivités territoriales, comme cela a été dit précédemment. La rédaction de l’article unique issue des travaux de la commission répond aux inquiétudes que celle-ci avait soulevées.
À ce sujet, s’agissant de la concurrence que l’on pourrait constater entre les communes, il faut souligner qu’elle existe déjà. Les collectivités territoriales financent les installations, accordent des aides – dans le département de l’Indre, ce sont 30 000 euros qui sont proposés et viennent se conjuguer avec des aides nationales, par exemple pour les zones de revitalisation rurale, les ZRR. N’oublions pas que les collectivités territoriales financent aussi la construction de maisons de santé, même si, comme je le dis souvent, le parpaing ne fait, hélas ! pas le médecin…
Ce texte vient donc aider temporairement à l’installation des médecins, en permettant aux maisons de santé et cabinets libéraux en zone sous-dense de bénéficier d’une mise à disposition de fonctionnaires territoriaux, qui, connaissant bien leur territoire et ses habitants, pourront parfaitement offrir un accompagnement dans la gestion quotidienne du cabinet médical.
Les médecins manquent partout en France, madame la ministre. Certes, vous n’êtes pas responsable des mauvaises décisions prises par les précédents gouvernements en matière de formation. En revanche, vous êtes responsable du bon fonctionnement du centre national de gestion – le CNG –, qui, disons-le franchement, ne fonctionne absolument pas ! De par son opacité – aucune information – et son inefficacité dans la gestion des dossiers – les commissions ne se réunissent que très rarement –, le CNG bloque la possibilité pour des milliers de médecins, français ou étrangers, ayant des diplômes hors Union européenne de s’installer dans les territoires, notamment ruraux, s’ils le souhaitent, et je précise que c’est le cas !
Entre octobre 2020 et octobre 2021, ce sont 4 500 dossiers qui ont été déposés auprès des ARS pour validation par le CNG, après un parcours de consolidation de un à deux ans dans les hôpitaux, ce qui offre une main-d’œuvre peu chère. Seulement quelques centaines de dossiers avaient reçu un avis favorable du CNG au début de l’année 2022. Des années d’attente, donc, pour ces professionnels, avec des examens au compte-gouttes et très peu de validations. Je connais personnellement de nombreux cas.
Madame la ministre, il y a urgence dans toutes les spécialités. Nos territoires se meurent, car aujourd’hui, en France, les Français ne sont pas soignés. Palliez donc le manque d’organisation et de disponibilité des ARS et des jurys du CNG, manque reconnu dans cet hémicycle par votre prédécesseur !
Peut-être faudrait-il abandonner totalement ce système, qui, d’ailleurs, n’a pas été retenu par le ministre de l’intérieur pour la création, dans le cadre du futur projet de loi sur l’immigration, de la carte de séjour « talent-professions médicales et de la pharmacie ». L’administration centrale de votre ministère pourrait alors reprendre en charge – elle le faisait par le passé – toutes ces demandes d’homologation, dont les médecins et professionnels de santé ont tant besoin, et la France aussi ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. Cyril Pellevat. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Cyril Pellevat. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, chacun ici – cela va sans dire – mesure l’impact de la désertification médicale pour nos concitoyens et, incidemment, pour nos collectivités. Les conséquences sont nombreuses : urgences débordées, renoncement aux soins et, en conséquence, dégradation de l’état médical ou rupture du parcours de soins.
Désormais, comme cela a déjà été observé, 72 % de la population habite dans une zone caractérisée par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins ; 12 % dans un désert médical à proprement parler.
Dans mon département de la Haute-Savoie, le phénomène est amplifié du fait de la proximité avec la Suisse, qui entraîne une hausse du coût de la vie décourageant les professionnels de santé à s’y installer, mais aussi une fuite chez nos voisins helvétiques.
Certaines communes désespèrent de trouver des médecins. Pas plus tard que la semaine dernière, j’ai remarqué que l’une d’entre elles en était même venue à installer des panneaux à l’entrée du village, indiquant qu’elle cherchait désespérément un médecin généraliste.
Le problème de fond est celui du manque de médecins. Il est désormais identifié et des mesures ont été prises à l’échelon national pour y remédier, comme la fin du numerus clausus. Mais les effets ne seront pas tangibles avant quelques années… Dans l’attente, je suis plutôt favorable à ce que nous prévoyions des dispositifs complémentaires, en particulier s’ils offrent de nouveaux leviers aux collectivités volontaristes sur le sujet.
Nombre d’entre elles le sont déjà, malgré le peu d’outils à leur disposition. Elles créent des maisons de santé, mettent à disposition des locaux et offrent des aides financières aux nouveaux médecins qui s’installent. Il faut les en féliciter, tout en étant vigilants sur les possibles tendances à la surenchère de certains professionnels.
J’accueille donc plutôt positivement la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui, visant à permettre aux collectivités de mettre des fonctionnaires territoriaux à disposition de cabinets médicaux et de maisons de santé dans les zones sous-denses. Elle ajoute une corde à l’arc des collectivités, et va dans le sens de la décentralisation et de la confiance en nos élus locaux pour être force de proposition.
Les modifications adoptées par la commission me semblent bienvenues, car elles viennent border le dispositif dans le but d’en faire une aide temporaire à l’installation de nouveaux médecins, qui pourraient y avoir recours pour un appui administratif ou pour la coordination avec d’autres professionnels de santé du territoire. De même, conditionner la mise à disposition à une participation à la permanence des soins ambulatoires permet de clarifier le lien avec le service public nécessaire à toute mise à disposition.
Le fait qu’il s’agisse d’une simple faculté et qu’il n’y ait pas d’impact financier pour la collectivité puisque les salaires devront être remboursés engendre une souplesse qui pourrait être appréciée par les médecins, comme par les collectivités. Par ailleurs, la crainte d’une concurrence entre communes me paraît infondée, dès lors que le dispositif est temporaire et qu’il interviendrait seulement après la prise de décision d’installation par le médecin.
Je voterai donc en faveur de ce texte, ma seule réserve étant que, compte tenu des difficultés rencontrées par les collectivités pour recruter, il est nécessaire que sa mise en œuvre aille de pair avec un travail sur l’attractivité de la fonction publique.
Enfin, avant de conclure, je tiens à insister sur le fait que la mise en place d’outils à destination des collectivités pour participer à la lutte contre les déserts médicaux ne doit pas conduire l’État à se dédouaner de sa responsabilité. C’est à lui que revient en premier lieu le rôle de trouver des solutions, et beaucoup reste encore à faire pour clore ce chapitre. Cela passera nécessairement par une différenciation en fonction des spécificités des territoires, par exemple, pour mon département, la mise en place d’établissements de santé et de formation transfrontaliers, une meilleure prise en charge des soins réalisés dans l’autre pays ou encore une prise en charge des frais de scolarité des personnels de santé en contrepartie d’un engagement à exercer un certain nombre d’années en France.
Je suis d’ailleurs, madame la ministre, à votre entière disposition pour échanger sur ces propositions. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Alain Marc applaudit également.)
Mme le président. La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, voilà plusieurs années que j’interviens dans cet hémicycle pour alerter sur la désertification médicale, notamment dans les territoires d’outre-mer, où la densité de médecins est très inférieure à la moyenne nationale.
Je commencerai mon intervention par une illustration, que ma collègue Victoire Jasmin connaît bien : l’année dernière, en Guadeloupe, l’île de la Désirade souffrait d’une absence totale de médecin. Aujourd’hui, malgré l’ouverture récente d’un centre de santé, et la présence quelques jours par semaine d’un médecin, l’offre de soins y demeure très insuffisante et la population rencontre une forte difficulté d’accès aux soins.
Ce territoire souffre, en effet, de sa double insularité et des difficultés d’accès qui en découlent, tout comme les deux îles des Saintes – Terre-de-Bas et Terre-de-Haut – et Marie-Galante.
Classée au quatrième rang des régions françaises ayant les densités de médecins généralistes libéraux les plus faibles, la Guadeloupe est donc bien un véritable désert médical.
Toutefois, nous misons beaucoup sur les maisons de santé qui se développent dans les communes pour attirer et fidéliser les médecins, et également, dans les prochaines années, sur les premiers résultats de la faculté de médecine de plein exercice aux Antilles.
Je tiens à saluer le rapport réalisé par nos collègues Patricia Schillinger et Philippe Mouiller, en octobre 2021, qui préconise de bâtir des centres ou maisons de santé « partenariaux », en étroite concertation entre les élus locaux et les professionnels de santé, ainsi que le renforcement des liens entre les collectivités territoriales et les facultés de médecine.
La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui, dans le cadre de la niche réservée au groupe Les Indépendants - République et Territoires, s’inscrit dans cette dynamique, en permettant l’élargissement de la liste des entités susceptibles d’accueillir un agent public aux cabinets médicaux et aux maisons de santé.
Cette mesure renforcera la boîte à outils mise à la disposition des acteurs locaux pour agir concrètement sur l’accès aux soins.
Si nous émettions quelques réserves en commission, nous saluons la réécriture globale de l’article unique sur la proposition du rapporteur, qui permet d’établir un équilibre en encadrant la durée potentielle de recours au dispositif et en le conditionnant à une installation récente des médecins exerçant en cabinet libéral.
Le dispositif a en effet pour principale vocation d’accompagner les médecins à leur arrivée et les inciter à s’installer sur un nouveau territoire.
Il nous faudra toutefois être vigilants sur les phénomènes de concurrence entre territoires, car il pourrait y avoir un risque que certains d’entre eux multiplient les dispositifs incitatifs, quand d’autres ne pourront rien proposer par manque de moyens. Il ne faudrait pas que la multiplication des dispositifs, sans vision systémique et globale, entraîne une nouvelle hiérarchisation locale.
Malgré cela, le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants votera en faveur de cette proposition de loi. Tout dispositif visant à multiplier les leviers d’action pour répondre à l’une des attentes les plus essentielles de nos concitoyens doit effectivement être encouragé.
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Chasseing, rapporteur. Je voudrais tout d’abord rappeler à l’attention d’Annie Le Houerou que le dispositif proposé est ponctuel.
S’il faut bien sûr une formation médicale et une connaissance des termes médicaux, pour travailler dans le cabinet d’un médecin spécialiste, ici la situation est tout autre. Ce que l’on demande, c’est simplement d’avoir quelqu’un pour prendre les appels, en plus du recours éventuel à une plateforme, pour accueillir la patientèle, pour renseigner le médecin quand celui-ci a des visites à faire sur le territoire – qu’il ne connaît pas, notamment s’il est étranger. Et, j’y insiste, il s’agit d’une aide totalement ponctuelle.
Lorsque j’ai parlé de coordination, ce terme était à prendre entre guillemets… Comme vous le savez, le médecin est un peu le chef d’orchestre dans la maison de santé. Des documents vont donc lui être demandés, parfois par les pharmaciens, mais surtout par les infirmiers, le kinésithérapeute, les orthophonistes, la pédicure, etc. Je pense, par exemple, à des certificats à renouveler. Or le médecin n’est pas toujours disponible pour rencontrer ces professionnels paramédicaux, d’où la possibilité que la personne mise à disposition se charge de collecter et traiter ces demandes.
Vous avez évoqué la CPTS, madame Le Houerou… Il faut voir un médecin pour pouvoir participer à une CPTS. Sans médecin, pas de CPTS !
Concernant l’intervention de Laurence Cohen, l’évolution du numerus clausus portera ses fruits en 2030. Il aurait fallu, en effet, que celle-ci intervienne beaucoup plus tôt.
Je voudrais par ailleurs remercier Jocelyne Guidez de son intervention – et j’entends sa remarque sur le secret médical –, ainsi que Véronique Guillotin, qui a exprimé des sentiments de médecin de terrain.
J’en viens aux propos de Corinne Imbert. Bien sûr, une installation se décide plusieurs mois avant qu’elle n’ait lieu. Mais, prenons le cas d’un médecin étranger : à son arrivée, il lui faut un logement, il ne connaît absolument pas le secteur et, malheureusement, tout le monde n’a pas la chance de profiter d’un travail en amont tel que celui que le département de l’Aveyron a réalisé, et que je salue. C’est pourquoi on doit pouvoir proposer cet accompagnement, qui, je le répète encore, est ponctuel.
Merci aussi à Nadia Sollogoub, qui nous a livré la vision d’une élue rurale,…
Mme le président. Pouvez-vous ne pas être trop long, monsieur le rapporteur ?
M. Daniel Chasseing, rapporteur. … ainsi qu’à notre collègue de l’Aveyron, Jean-Claude Anglars. Je voudrais lui dire qu’il ne s’agit pas d’un doublon : dès l’arrivée d’un assistant médical ou d’une secrétaire, la personne s’en va évidemment. De nouveau, c’est ponctuel.
C’est ce que Nadine Bellurot a souligné, et je suis également d’accord avec ses propos sur l’homologation.
Pour réagir à ceux de Cyril Pellevat, je confirme que ce nouveau levier est en effet une marque de confiance envers les élus locaux. Comme il l’a remarqué, nous avons ajouté – je l’ai proposé, et la commission m’a suivi – une condition de participation à la permanence des soins ambulatoires. Le médecin doit s’y engager.
Enfin, je remercie Dominique Théophile de son intervention. Il n’y a pas de concurrence entre les communes et les territoires, du fait du remboursement obligatoire.
Mme le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi relative aux outils de lutte contre la désertification médicale des collectivités
Article unique
Le code général de la fonction publique est ainsi modifié :
1° L’article L. 512-13 est complété par des 3° et 4° ainsi rédigés :
« 3° D’un médecin exerçant dans un cabinet libéral situé dans les zones mentionnées au 1° de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique, sous réserve que celui-ci ait changé de résidence professionnelle depuis moins de trois mois et participe à la mission de service public mentionnée à l’article L. 6314-1 du même code ;
« 4° D’une maison de santé mentionnée à l’article L. 6323-3 dudit code située dans les zones mentionnées au 1° de l’article L. 1434-4 du même code, sous réserve que plus de la moitié des médecins y exerçant participent à la mission de service public mentionnée à l’article L. 6314-1 du même code. » ;
2° Après l’article L. 512-13, il est inséré un article L. 512-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 512-13-1. – Lorsque le fonctionnaire est mis à disposition auprès d’un organisme d’accueil mentionné aux 3° ou 4° de l’article L. 512-13, la mise à disposition est prononcée pour une durée maximale fixée par décret et ne pouvant excéder trois mois, renouvelable dans des conditions fixées par décret dans la limite de deux fois. »
Mme le président. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le code général de la fonction publique est ainsi modifié :
1° Au dernier alinéa de l’article L. 512-7, les mots : « au titre des 6°, 7° et 8° » sont remplacés par les mots : « au titre des 6° et 7° » ;
2° L’article L. 512-8 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« 8° D’un médecin exerçant dans un cabinet libéral situé dans les zones mentionnées au 1° de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique, sous réserve que celui-ci ait changé de résidence professionnelle depuis moins de trois mois et participe à la mission de service public mentionnée à l’article L. 6314-1 du même code ;
« 9° D’une maison de santé mentionnée à l’article L. 6323-3 du code de la santé publique située dans les zones mentionnées au 1° de l’article L. 1434-4 du même code, sous réserve que plus de la moitié des médecins y exerçant participent à la mission de service public mentionnée à l’article L. 6314-1 dudit code. » ;
3° Après l’article L. 512-8, il est inséré un article L. 512-8-… ainsi rédigé :
« Art. L. 512-8-… – La mise à disposition prévue aux 8° et 9° de l’article L. 512-8 est prononcée pour une durée qui ne peut excéder trois mois, renouvelable deux fois dans la limite d’une durée totale de neuf mois. »
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Il s’agit d’un amendement de réécriture globale de l’article unique de la proposition de loi, visant notamment à clarifier la rédaction, en permettant aux fonctionnaires des trois versants de la fonction publique de participer au dispositif.
Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, le Gouvernement soutient cette proposition de loi qui, certes, n’est pas une révolution, mais apporte une réponse.
Nous souhaitons apporter des réponses pragmatiques, mesdames, messieurs les sénateurs ; de fait, le vote de cette proposition de loi apporterait une réponse pragmatique. Il n’y a pas d’obligation – l’accompagnement est facultatif – et il n’y a pas d’engagement de moyens financiers publics par les collectivités territoriales – il s’agit d’une avance.
J’entends les messages envoyés par les associations d’élus, par exemple la difficulté dans laquelle certains se trouvent pour recruter, y compris des secrétaires de mairie. Mais on doit aussi pouvoir faciliter l’installation de médecins : quand on arrive dans un territoire qu’on ne connaît pas, madame Imbert, on peut juste avoir besoin d’une personne pendant trois mois pour nous faire connaître le territoire ou prendre en charge quelques tâches le temps de réaliser les embauches nécessaires.
Ce texte n’est pas une révolution, nous sommes tous très clairs sur ce point. Il s’agit juste d’une proposition pragmatique permettant de lever les freins à l’installation, et nous souhaitons l’accompagner.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Chasseing, rapporteur. Contrairement à ce que sa rédaction et son objet pourraient laisser penser, cet amendement ne modifie que très partiellement le dispositif adopté la semaine dernière par la commission des affaires sociales.
Je constate que le Gouvernement a conservé les modifications apportées, sur mon initiative, pour clarifier le dispositif : celui-ci demeure limité aux organismes participant à une mission de service public, conditionné à une installation récente des professionnels libéraux et son recours encadré dans le temps.
Le seul objet du présent amendement est d’ouvrir la mise à disposition des fonctionnaires auprès de cabinets médicaux ou de maisons de santé en zone sous-dense aux trois versants de la fonction publique, et non plus à la seule fonction publique territoriale.
À titre personnel, je n’y voyais que des avantages. L’adoption d’une telle mesure donnerait une ampleur supplémentaire au dispositif, lui permettant d’atteindre avec plus d’efficacité son objectif de lutte contre la désertification médicale. Par ailleurs, un tel amendement montre bien que cette lutte contre la désertification médicale n’est pas à la seule charge des collectivités territoriales, mais qu’elle constitue bien une responsabilité partagée.
La commission a émis des réserves sur ce dispositif, eu égard, notamment, aux difficultés de recrutement rencontrées par les employeurs hospitaliers, qui limiteraient la portée de l’amendement. Son avis est donc défavorable.
Mme le président. Je vais mettre aux voix l’amendement n° 1 de rédaction globale de l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi.
L’adoption de cet amendement vaudrait adoption de l’ensemble de la proposition de loi.
La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. Quand on y regarde bien, mes chers collègues, nous sommes tous favorables à la lutte contre la désertification médicale. Mais on voit bien, aussi, que nos collectivités font face à des difficultés et, quand l’Association des maires ruraux de France (AMRF) et l’Assemblée des départements de France (ADF) sont hostiles à cette proposition, nous, qui représentons les collectivités, nous ne pouvons pas accepter n’importe quoi.
Pourquoi, dans mon territoire, et plus généralement en outre-mer, le recours aux contrats de redressement en outre-mer (Corom) s’accroît ? C’est parce que, justement, les collectivités ont des difficultés budgétaires. On ne peut pas être incohérent à ce point !
Je voterai donc contre ce texte, tout comme mon groupe a indiqué qu’il le ferait.
Il y a d’autres possibilités, mes chers collègues. Faisons en sorte de réfléchir à des systèmes cohérents, pertinents et efficients – pas à du bricolage !
Cette proposition de loi est volontariste, mais nous ne pouvons pas accepter n’importe quoi. Après avoir entendu l’ensemble des collègues qui se sont exprimés, je crois que nous devons réfléchir encore pour trouver les meilleures solutions possible. Il faut éviter le pire dans nos territoires – c’est vrai –, mais nous ne pouvons pas accepter une telle proposition, compte tenu de la situation actuelle de nos collectivités.
Mme le président. La parole est à M. Dany Wattebled, pour explication de vote.
M. Dany Wattebled. Personnellement, j’estime que cette réécriture conforte notre proposition de loi en ouvrant les maisons de santé et les cabinets libéraux aux trois versants de la fonction publique. La mise à disposition de ce personnel, qu’il soit territorial, médical ou d’État, n’est qu’un plus, d’autant que la liberté de choix sera toujours garantie.
Je suis donc très favorable à cet amendement.
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Chasseing, rapporteur. Mes chers collègues, je le répète, il n’y aura pas de concurrence entre les communes et, financièrement, ces dispositions seront complètement neutres. Vous le savez très bien, si un agent public va travailler dans un cabinet médical ou dans une maison de santé, cela donnera obligatoirement lieu à un remboursement.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Indépendants – République et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 253 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 109 |
Contre | 232 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Vote sur l’ensemble
Mme le président. Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi relative aux outils de lutte contre la désertification médicale des collectivités.
Je rappelle que le vote sur l’article vaudra vote sur l’ensemble de la proposition de loi.
Y a-t-il des demandes d’explication de vote ?…
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Indépendants – République et Territoires.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 254 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 108 |
Contre | 235 |
Le Sénat n’a pas adopté.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures vingt, est reprise à seize heures.)
Mme le président. La séance est reprise.
5
Mise au point au sujet d’un vote
Mme le président. La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Madame la présidente, lors du scrutin n° 254 sur l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi relative aux outils de lutte contre la désertification médicale des collectivités, M. Pellevat souhaitait voter pour.
Mme le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
6
Rappel au règlement
Mme le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour un rappel au règlement.
Mme Éliane Assassi. Mon rappel au règlement, qui porte sur l’organisation de nos travaux, se fonde sur les articles 44, alinéa 3, et 49, alinéa 3, de la Constitution.
Quelle violence est faite au Parlement : après avoir bloqué, avec la complicité de la droite, le vote au Sénat pour accélérer les débats, le Gouvernement, sur ordre d’Emmanuel Macron, vient d’engager l’article 49.3 de la Constitution pour éviter la sanction de l’Assemblée nationale, qui s’apprêtait à rejeter le projet de réforme des retraites.
Ainsi, le Gouvernement est seul : les salariés rejettent massivement son texte ; l’opinion publique est vent debout ; l’unité intersyndicale est totalement contre lui. Et, maintenant, l’Assemblée nationale refuse de s’engager à ses côtés, malgré les tentatives honteuses de débauchage de certains députés.
Dans sa solitude, l’exécutif pousse encore plus loin l’autoritarisme. Il a commencé en corsetant les débats avec l’article 47-1. Il finit en interdisant le débat et le vote à l’Assemblée nationale. L’insincérité et l’illégitimité du débat sont totales.
Emmanuel Macron et le Gouvernement devront répondre devant le peuple de ce coup de force démocratique. Ce gouvernement ne peut plus rester aux affaires. Il sème le chaos dans le pays.
La voix de la raison, la voix de la sagesse, eût été le retrait de ce texte.
Les sénatrices et sénateurs du groupe CRCE vont renforcer encore leur soutien à toutes celles et à tous ceux qui vont redoubler d’effort dans le pays pour obtenir le retrait de ce projet injuste, ce projet décidé par les marchés financiers. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et GEST.)
M. Daniel Breuiller. Très bien !
Mme le président. Acte est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.
7
Gestion différenciée de la compétence « Eau et Assainissement »
Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission
Mme le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à permettre une gestion différenciée de la compétence eau et assainissement, présentée par M. Jean-Yves Roux et plusieurs de ses collègues (proposition n° 908 [2021-2022], texte de la commission n° 382, rapport n° 381).
Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et UC. – M. Franck Menonville applaudit également.)
M. Jean-Yves Roux, auteur de la proposition de loi. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai le plaisir de vous présenter une proposition de loi visant à permettre une gestion différenciée de la compétence eau et assainissement.
J’y associe bien sûr d’autres propositions de loi, questions orales et questions écrites présentées au Sénat comme à l’Assemblée nationale, qui, très récemment, ont repris cette thématique. Je pense notamment à la proposition de loi de Mathieu Darnaud et de plusieurs de ses collègues ; aux travaux de notre délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, placée sous la présidence de Françoise Gatel ; ou encore à la proposition de loi de Jean-Michel Arnaud, mon collègue des Hautes-Alpes.
Les associations d’élus ne sont pas en reste. De l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) à l’Association des maires ruraux de France (AMRF) en passant par l’Association nationale des élus de la montagne (Anem), toutes continuent d’exprimer régulièrement ce que j’appellerai la permanence de leurs réserves et la croissance de leurs incertitudes.
Mes chers collègues, toutes ces initiatives parlementaires relèvent, dans des tonalités et des périmètres différents, bien sûr, l’inadéquation d’un dispositif pensé de manière uniforme, quels que soient les territoires : la transformation de la compétence optionnelle eau et assainissement des communautés de communes et d’agglomération en compétence obligatoire.
Bon an mal an, ce transfert s’est effectué dans les communautés d’agglomération. Mais, dans les communautés de communes, les obstacles s’accumulent. Les conseils municipaux ne cessent de nous alerter par des motions et des délibérations s’opposant à ce qui leur apparaît comme une délégation de compétence beaucoup trop technocratique.
Je conçois bien ce qu’un tel texte peut avoir d’agaçant. Nous mettons une fois de plus sur la table ce que certains désignent avec morgue comme des problèmes de fuites d’eau, des lubies sénatoriales ou des agitations rurales. Mais, si ce sujet revient une nouvelle fois, c’est parce qu’aucune solution n’a été trouvée.
Il s’agit ni plus ni moins que de la ressource en eau. Devons-nous tourner la tête sous prétexte que les territoires ruraux concernés ne rassemblent pas 76 % de la population ? Ils couvrent, en revanche, la grande majorité des linéaires de cours d’eau à entretenir.
Face aux premières difficultés rencontrées, notamment dans la ruralité et dans les communes de haute montagne, notre législation a cherché à assouplir les modalités de transfert.
La loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dite Engagement et proximité, autorise ainsi les communautés de communes et les communautés d’agglomération à déléguer aux communes tout ou partie des compétences liées à l’eau, à l’assainissement des eaux usées ou à la gestion des eaux pluviales.
La loi du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement, dite Ferrand, a quant à elle ouvert la possibilité de reporter ce transfert au 1er janvier 2026 pour les communautés de communes. Or, près de cinq ans après ce dernier assouplissement, l’association représentant les intercommunalités de France nous livre un verdict qu’il faut entendre : seul un tiers des communautés de communes concernées exercent à ce jour cette compétence.
Sommes-nous étonnés ? Pas vraiment. Je vous invite à relire le compte rendu intégral de notre séance du 26 juillet 2018 : des sénateurs pourtant favorables à l’intercommunalisation de la gestion de cette compétence évoquaient déjà cette éventualité.
M. Sueur, nous faisant bénéficier de sa fine connaissance des questions territoriales,…
M. Jean-Pierre Sueur. Merci, mon cher collègue ! (Sourires.)
M. Jean-Yves Roux. … soulignait ainsi : « La question est si complexe sur le terrain, entre les régies, les concessions, les affermages et autres, que la réalisation d’un tel transfert dans de bonnes conditions demande du temps. »
M. Jean-Pierre Sueur. Je souscris à ces propos ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Yves Roux. M. Gontard regrettait pour sa part que les revendications des communes, notamment au sujet de leurs spécificités, n’aient pour ainsi dire pas été entendues. « Nous arriverons à l’échéance de 2026 sans être plus avancés », prédisait-il avant de conclure : « Il importait non seulement de laisser ce choix, mais aussi d’apporter une certaine visibilité. » Aurions-nous dit mieux ?
Mes chers collègues, devons-nous nous attendre à un mouvement spontané de communes qui opéreraient ce transfert de compétences avant 2026, alors que rien n’a fondamentalement changé ?
Je crois assez peu aux propriétés du ruissellement. De même, je ne crois ni aux stratégies d’assèchement financier ni au mariage forcé auquel ces dernières sont censées aboutir.
Madame la ministre, les communes n’ayant pas transféré la compétence observent bien la loi. Elles peuvent comme les autres prétendre au concours des agences de l’eau. Les écarter de ces possibilités de subvention pour des motifs – il faut le dire – tatillons ne les conduira pas à déléguer plus vite.
Il en est de même pour les syndicats, qui déplorent ces stratégies punitives. Le risque écologique, s’il faut le prendre, est tout de même une nouvelle dégradation des réseaux et un sous-investissement dangereux qui, tôt ou tard, sera assumé par les intercommunalités. Quant au risque démocratique, c’est celui de la démission des maires.
Les plus petites communautés de communes concernées ne disposent pas davantage des capacités financières nécessaires pour assumer le plein exercice de cette compétence. Certaines d’entre elles ne souhaitent pas s’engager dans une délégation complexe, avec moult frais cachés qui font ployer la barque.
Reconnaissons, moi le premier, que nous devons envisager la question autrement. Nous disposons en effet d’un cadre conceptuel plus souple que nous pouvons faire vivre.
Ce cadre d’action – je vais vous étonner –, c’est la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou loi NOTRe, qui a reconnu l’existence de communautés de communes à partir de 5 000 habitants.
Ce cadre d’action, c’est la loi relative au développement et à la protection de la montagne, dite Montagne, qui nous invite à prendre en compte les aménités des territoires montagneux.
Ce cadre d’action, c’est la différenciation territoriale. Comme le soulignait Jacqueline Gourault, alors ministre de la cohésion des territoires, ce principe est garant d’« un État plus agile, plus réactif et plus proche, qui adapte sa réponse et accompagne main dans la main les initiatives des collectivités ».
Mes chers collègues, n’en avons-nous pas assez de nous gargariser de « logiques ascendantes » sans pour autant les faire vivre quand nous en avons l’occasion ?
Je dois vous le dire : échaudés par les réalités économiques et l’âpreté de leur mission, les élus concernés – maires et conseillers intercommunaux – ne placeront leur confiance dans ce transfert de compétences que s’ils ont l’absolue certitude que cette décision rime avec efficacité et bonne gestion ; que ce transfert sera pris dans l’intérêt de leur commune et leurs administrés ; et qu’il n’engendrera pas une augmentation inconsidérée des coûts et du prix de l’eau, dans le contexte d’une forte inflation que beaucoup peinent à supporter.
Madame la ministre, nos élus de proximité sont parfaitement conscients de leur grande responsabilité en la matière.
Votre collègue Christophe Béchu nous rappelait récemment que la nature ne nous laisse pas le choix. C’est vrai : face à une sécheresse structurelle, la réponse ne sera pas uniforme ; elle sera collective. (Mme la ministre déléguée acquiesce.)
L’Anem, dont je salue le travail, vient de rendre publics les principaux arguments développés par ces maires réticents. Ce sont autant de pistes de différentiation territoriale sur lesquelles il serait – j’en suis sûr – utile de s’appuyer.
Ces élus soulignent tout d’abord la nécessité de permettre un exercice de proximité de la compétence, lequel fait défaut dans les ensembles intercommunaux de très grande superficie. Il n’est guère aisé de réparer une fuite de canalisations lorsque le siège d’intervention est à quatre-vingts kilomètres de distance. À l’évidence, cette organisation n’est pas tout à fait performante.
Ils relèvent également le risque de doublons, qui implique une forte augmentation des personnels consacrés à ces tâches. Les petites communautés de communes ne pourraient assumer cette charge, si tant est qu’elles réussissent à recruter et à les attirer sur leurs territoires, tant ces métiers sont en tension.
Les mêmes élus s’inquiètent surtout des conséquences financières des transferts de compétences prévus : « Les études préalables concluent trop souvent à une forte augmentation du prix de l’eau, difficilement supportable, surtout en période d’inflation. »
Foncièrement pragmatiques, les élus de montagne mettent enfin en avant des traditions de mutualisation existantes, notamment au sein des syndicats, qu’il conviendrait de conforter.
Dans son rapport d’information intitulé Comment éviter la panne sèche ? Huit questions sur l’avenir de l’eau en France, la délégation sénatoriale à la prospective dresse un constat cruel : « La gestion de l’eau est un domaine ardu, souvent laissé aux techniciens, dont les élus ont du mal à se saisir. Or la légitimité des choix politiques en matière de gestion de l’eau passe par une repolitisation de ses instances et le renforcement de l’échelon local de prise de décision. »
La gestion différenciée de la compétence eau et assainissement et, au travers d’elle, la bataille contre la sécheresse replacent les élus au cœur de la décision politique. Il y va de notre destin commun.
Nos élus demandent cette compétence, car ils souhaitent livrer bataille.
Madame la ministre, c’est pourquoi je vous propose de lever le verrou du transfert en 2026 pour les communautés de communes et d’engager dès maintenant des conventions décentralisées permettant l’exercice réel de cette compétence.
Je vous le dis en écho à ce que nous vivons aujourd’hui : écoutons les élus, écoutons le Parlement ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et UC, ainsi que sur des travées des groupes INDEP, SER et CRCE.)
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. Alain Marc, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi de Jean-Yves Roux a une ambition simple. Son article unique vise à supprimer le transfert obligatoire de la compétence eau et assainissement aux communautés de communes prévu au 1er janvier 2026.
Ce texte, qui permet de répondre aux attentes légitimes des élus des territoires ruraux et de montagne, traduit une position défendue de manière constante par le Sénat depuis le vote de la loi NOTRe en août 2015.
Vous le savez, en matière d’eau et d’assainissement des eaux usées, le Gouvernement a brutalement remis en cause la liberté des communes par le biais de simples amendements déposés à l’Assemblée nationale lors de l’examen du projet de loi NOTRe. Ces dispositions n’ont jamais été introduites sur l’initiative du Sénat.
M. Jean-Pierre Sueur. Qui a voté la loi NOTRe ?
M. Alain Marc, rapporteur. Notre assemblée s’est opposée à ce transfert obligatoire, consciente des difficultés qu’il allait poser aux communes de nos territoires qui ne connaissent pas la même urbanisation que les autres intercommunalités.
Toutefois, la commission mixte paritaire (CMP) a trouvé un compromis en reportant le transfert obligatoire au 1er janvier 2020.
Par la suite, le Sénat a tenté d’obtenir le rétablissement du caractère facultatif du transfert des compétences eau et assainissement lors de l’examen de différents textes.
En effet, dès janvier 2017, le président Retailleau a déposé une proposition de loi visant à rétablir le caractère optionnel du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes et d’agglomération. Ce texte a été voté à l’unanimité par le Sénat en octobre 2017, mais les députés ont renvoyé son examen en commission.
Par la suite, le Parlement a voté plusieurs assouplissements à cette obligation de transfert, à défaut d’un véritable retour en arrière.
Avec la loi du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes, dite Ferrand-Fesneau, le Parlement a voté le report de ce transfert au 1er janvier 2026 pour les communautés de communes.
Puis, la loi du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dite Engagement et proximité, a permis aux communautés de communes de déléguer l’exercice des compétences eau et assainissement à une commune membre de l’intercommunalité ou à un syndicat infracommunautaire.
Enfin, la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite 3DS, rend possible le maintien des syndicats infracommunautaires après le 1er janvier 2026.
M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !
M. Alain Marc, rapporteur. Ces différents aménagements n’offrent toutefois qu’un semblant de liberté aux communes, car ils sont limités dans le temps ou dans leurs conditions de mise en œuvre. Cette situation doit donc évoluer rapidement : l’échéance du 1er janvier 2026 est proche et risque de provoquer un effet cliquet.
En outre, les arguments qui justifient la suppression du transfert obligatoire sont toujours d’actualité. On peut notamment évoquer le risque d’augmentation du tarif de l’eau et de l’assainissement, une perte de connaissance des réseaux et une inadaptation du périmètre administratif de l’intercommunalité à la réalité géographique et hydrique des communes concernées.
Nous l’avons maintes fois rappelé : nous, élus ruraux, savons bien que les limites administratives des communautés de communes ne correspondent pas toujours à la géographie physique des cours d’eau.
De surcroît, de nombreuses communautés de communes n’ont pas la volonté d’exercer ces compétences. Le Sénat a souhaité que des communautés de communes de 5 000 habitants puissent exister, mais j’ai moi-même été président d’une communauté de communes et tous les collègues que je connais ne le veulent surtout pas. J’en prends à témoin notre collègue Mathieu Darnaud, qui s’est déplacé sur tout le territoire national et avec qui j’ai beaucoup travaillé.
Au 1er octobre 2022, moins de 30 % des communautés de communes exercent la compétence liée à l’eau et moins de 50 % d’entre elles sont en charge de l’assainissement collectif. Il est évident que les territoires pour lesquels la mutualisation de ces compétences est pertinente l’ont déjà fait depuis plusieurs années, et ce sans attendre que la loi NOTRe le leur impose.
Au surplus, l’idée selon laquelle l’intercommunalisation de la compétence eau permettrait de faire diminuer le taux de fuite des réseaux ne nous semble pas sérieuse. Ce n’est pas parce que l’on fait basculer la compétence que le taux de fuite s’améliore, notamment parce qu’aucun fonds de concours supplémentaire n’est attribué à la communauté. De plus, nous savons que la proximité renforce l’efficacité, ainsi que de nombreux exemples de mutualisation le démontrent. Les communautés de communes n’obtiendront pas davantage de financements que les communes, de sorte que le transfert de cette compétence n’aura pas d’effet réel sur la diminution de ces fuites.
C’est pourquoi l’intention qui anime la proposition de loi de Jean-Yves Roux a emporté la complète adhésion de la commission, qui a néanmoins souhaité améliorer le caractère opérationnel de son dispositif au bénéfice des communes qui souhaitent conserver ou retrouver l’exercice des compétences eau et assainissement. La rédaction qu’elle a retenue entend donc donner son plein effet au principe de différenciation, voté par le Parlement dans la loi 3DS voilà tout juste un an.
En premier lieu, elle a prévu un mécanisme de restitution des compétences eau et assainissement aux communes qui les ont déjà transférées. Cette faculté peut s’exercer à tout moment et pour tout ou partie des compétences concernées. Le texte confère aux communes, et non à l’intercommunalité, le pouvoir de lancer un tel processus. Ainsi, la restitution pourra être obtenue si une majorité des conseils municipaux la demande.
Cette proposition vise à répondre aux préoccupations des communautés de communes dans lesquelles une seule commune peut représenter jusqu’à 80 % de la population, ce qui pourrait déséquilibrer les décisions en sa faveur.
Afin d’éviter aux communes minoritaires de se voir imposer une redescente de compétences qu’elles ne souhaitent pas exercer, il est prévu un mécanisme de transfert à la carte et simplifié des compétences redescendues à la communauté de communes.
À l’inverse, pour empêcher qu’une minorité de communes se retrouve dans l’impossibilité d’exercer de nouveau les compétences eau et assainissement en cas de majorité défavorable à une restitution de compétences, le dispositif proposé prévoit que, dès lors qu’il existe un accord sur cette demande entre, d’une part, la communauté de communes, d’autre part, une ou plusieurs communes, la restitution peut être opérée.
En deuxième lieu, la commission a entendu assurer une stabilité aux conventions de délégation existantes entre les communautés de communes et leurs délégataires. Il ne faut pas remettre en cause des modalités de fonctionnement satisfaisantes pour les communes.
Néanmoins, dans l’hypothèse d’un changement du titulaire de l’exercice des compétences eau et assainissement, en raison d’une restitution de ces dernières à la commune, le texte de la commission permet à la commune de mettre fin à la convention de délégation avant son terme dans le but de la renégocier, d’assurer une restitution effective des compétences aux communes ou de modifier le périmètre des syndicats délégataires.
En troisième lieu, la commission a choisi de créer un mécanisme dérogatoire de délégation de compétence plus souple que le droit commun. En effet, les délégataires pourront être des communes ou des syndicats infracommunautaires existants ou créés postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi, ce qui est actuellement impossible.
Pour conclure, je tiens à souligner que j’ai œuvré en parfaite coopération avec notre collègue Jean-Yves Roux ainsi qu’avec Mathieu Darnaud, qui a beaucoup travaillé sur ce sujet et auditionné de nombreux élus locaux, avec Françoise Gatel, à l’échelon national. J’ai également échangé avec tous les collègues issus des territoires ruraux qui m’ont fait part de leur préoccupation commune : faire en sorte qu’en 2026 il n’y ait pas de transfert obligatoire de la compétence aux intercommunalités. Le maintien de cette possibilité est très cher au Sénat, mais aussi à nos communes et à de nombreux présidents de communautés de communes.
Je tiens à remercier tous les collègues qui ont participé à cette démarche pour la qualité de nos discussions et de notre collaboration en vue de formuler des pistes de solution équilibrées et consensuelles, dans l’intérêt de nos communes. ((Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, RDSE, UC et Les Républicains. – M. Sebastien Pla applaudit également.)
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, monsieur le sénateur Jean-Yves Roux, mesdames, messieurs les sénateurs, votre Haute Assemblée débat aujourd’hui de la question de l’exercice des compétences eau et assainissement au sein du bloc communal.
Ce sujet fait l’objet d’un fort intérêt de la part de nos collègues élus locaux. Il est aussi passionnant que passionné et, pour m’être moi-même penchée sur cette question, je sais combien il est sensible dans nos territoires. Et c’est parce qu’il est sensible que le Gouvernement est aussi attaché, depuis dix ans, à ce qu’il soit traité à la hauteur des enjeux qu’il représente.
La position du Gouvernement ne sera pas nécessairement partagée sur vos travées, mais je me permets de dire que j’exprimerai également ma position personnelle : celle d’une élue locale, d’une maire, dont l’intime conviction est que la mutualisation de cette compétence relève d’une ardente nécessité. Je vais bien entendu, dans le fil de mon propos, justifier cette position.
Regardons les choses froidement : quelle est la situation après dix ans d’efforts collectifs tendus vers une meilleure gestion quantitative et qualitative de l’eau ? Aujourd’hui, 14 % des communes appartenant à une communauté de communes exercent encore la compétence eau sans aucune forme de mutualisation. Elles se sont saisies de la possibilité que leur offre la loi de reporter le transfert de cette compétence à 2026. C’est sur ces 14 % de communes que se portent aujourd’hui toutes nos attentions, soit que celles-ci soient plus durement frappées par les conséquences des épisodes de sécheresse, soit qu’elles estiment ne pas devoir transférer cette compétence à leur établissement public de coopération intercommunale (EPCI).
Le Sénat s’est déjà saisi de cette question à de nombreuses reprises. Avec le soutien du Gouvernement, il a pu, dans le cadre des lois Engagement et proximité et 3DS, apporter les assouplissements nécessaires pour permettre aux collectivités d’adapter et de différencier les modalités de la gestion de l’eau en fonction des enjeux et des contraintes spécifiques de chaque territoire.
Vous estimez que ces assouplissements ne sont pas suffisants et qu’il convient de revenir davantage sur les règles que la loi a fixées voilà plus de dix ans.
Si je ne peux que partager, de manière générale et plus encore en l’espèce, votre souhait d’apporter une réponse plus différenciée aux contraintes de chaque territoire, je ne peux non plus passer sous silence ce que la mutualisation nous apporte de façon évidente. Cela tient en quatre points : protection de la ressource, sobriété dans son utilisation, qualité de l’eau et meilleure allocation de nos ressources dans la gestion de nos infrastructures.
Il nous faut en effet nous battre pour protéger les ressources en eau. La période que nous traversons nous fait davantage réaliser chaque été à quel point elles sont mises sous tension, voire menacées. L’équilibre entre nos prélèvements – 5,5 milliards de mètres cubes par an tous usages confondus – et ce que les cycles de l’eau, petits et grands, restituent aux milieux naturels se dégrade continuellement.
Nul besoin de rappeler ici ces faits préoccupants : les épisodes de restriction au niveau de crise sont de plus en plus fréquents : 2 000 collectivités se sont trouvées en tension ou en rupture d’alimentation en eau potable lors de l’été 2022 et 110 bassins versants, sur le millier que compte la France métropolitaine, sont déjà en déséquilibre quantitatif structurel au mois de février, entraînant des restrictions de consommation dans les territoires concernés.
Bref, nous manquons et nous allons manquer d’eau dans les années qui viennent et vous, élus des territoires, êtes sans aucun doute les mieux placés pour savoir ce qu’en seront les conséquences :…
M. Jean-Michel Arnaud. Absolument !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. … c’est le champ que l’on n’irrigue plus, c’est le puits qui manque d’eau, c’est la citerne que l’on doit monter au village.
M. Mathieu Darnaud. C’est le plan d’eau à sec !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Je sais que vous partagez le constat et l’objectif de protection de la ressource, mais il ne me paraissait pas inutile de commencer par là : s’il y a moins d’eau, il faudra la gérer mieux, et il faudra le faire ensemble et partout.
M. Jean-Michel Arnaud. Elle est déjà bien gérée !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Nous devons ensuite relever un défi en termes de sobriété pour assurer une gestion plus efficiente de l’eau potable. Or la performance globale de notre réseau ne nous le garantit pas : nous perdons chaque année 30 % du volume que nous prélevons, ce qui, dans le contexte hydrique que nous connaissons, n’est évidemment pas un facteur facilitant.
Actuellement, 170 collectivités ont un réseau dont le rendement est inférieur à 50 %, ce que les techniciens appellent, dans leur jargon, les points noirs de la gestion quantitative de l’eau. Ce taux de perte est lié à l’état de nos réseaux, lesquels, même si les maires ont fait les meilleurs efforts pour les entretenir, nécessitent encore de lourds investissements. Plus de 40 % de notre réseau devra être renouvelé dans les quarante ans qui viennent. C’est une charge et une dette que nous laissons à ceux qui vont nous succéder, ne nous le cachons pas. Si nous voulons accélérer ces investissements, nous devons le faire ensemble.
La sobriété passe aussi par un travail sur les usages : je sais que nos collègues sont, avec les préfets et la profession agricole, très investis pour favoriser une utilisation raisonnable et rationnelle de l’eau.
Nous allons, en outre, devoir garantir la qualité de nos eaux. L’eau est une ressource du quotidien pour nos concitoyens, qui s’attendent à pouvoir la consommer sans se poser de questions. Or, en 2021, 11 millions de Français ont été alimentés par une eau non conforme. Ce n’est bien sûr pas toujours lié à l’absence de mutualisation, mais l’évidence est tout de même que nous assurerons mieux le contrôle de la qualité des eaux en faisant gérer nos ressources par des structures de plus en plus professionnalisées. Le fait est que, dans les services d’eau les plus mutualisés, le taux de conformité microbiologique est excellent. Là encore, nous devons traiter ensemble ce sujet majeur de santé publique.
Vous connaissez aussi les enjeux de gestion des infrastructures liés à la mutualisation. Un bon gestionnaire sait que son actif se déprécie s’il ne l’entretient pas. C’est bien selon ce modèle que les maires se préoccupent de leurs réseaux et je veux rendre hommage au travail qu’ils ont souvent fourni, avec les techniciens des eaux, pour assurer l’entretien et la pérennité du réseau.
Pour autant, la réalité est là : nous faisons et nous ferons face, dans les trente ans qui viennent, à un mur d’investissements de près de 10 milliards d’euros par an. Toute la bonne volonté de nos élus n’y suffira pas et nous devons trouver les moyens d’investir vite et à la hauteur des besoins.
Je me permets de me mettre à la place des maires des 3 600 communes qui n’ont pas encore mutualisé et qui doivent donc faire face seuls à ces investissements. Évidemment, ils peuvent avoir accès aux soutiens de la Banque des territoires, donc de l’État, via ses agences, mais quelle ingénierie technique et financière ne faut-il pas développer pour souscrire des Aqua Prêts ou remplir un dossier de subvention !
M. Mathieu Darnaud. C’est faux ! C’est scandaleux de dire cela !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Quelle expertise ne faut-il pas déployer pour poser le diagnostic de l’état du réseau et planifier ses travaux !
M. Jean-Jacques Panunzi. Ce n’est pas possible d’entendre cela !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Je fais toute confiance aux maires, mais, soyons lucides, ceux-ci sont et seront plus forts en s’associant à leurs collègues, dans le cadre de l’EPCI, et en mutualisant ressources, moyens et ingénierie. Là encore, c’est ensemble que nous construirons le réseau de demain.
M. Alain Marc. Ces propos sont incompréhensibles !
M. François Bonhomme. Vous ne pouvez pas dire cela ! Quid des syndicats ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Pour toutes ces raisons, j’ai l’intime conviction que nous devons poursuivre dans la voie de la mutualisation, car seule une gouvernance collective de la ressource est à même de nous permettre de relever le défi.
M. François Bonhomme. Ce n’est pas à la loi de le dire !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Vous le savez, le transfert à l’échelle intercommunale vise plusieurs objectifs : redondance et interconnexion des réseaux, mutualisation des moyens humains, techniques et financiers, performance accrue, maîtrise et modernisation des équipements, qualité du service rendu à l’usager.
L’EPCI, c’est l’échelle pertinente pour prendre en charge ces compétences, dans le cadre tracé par les documents de planification que sont les schémas d’aménagement et de gestion de l’eau (Sage) et les plans de gestion de la ressource en eau (PGRE). L’EPCI, c’est ce qui permet de faire ensemble !
Cela n’interdit évidemment pas de mener une gestion différenciée, non plus que de la déléguer à un syndicat infracommunautaire, comme le permet déjà la loi.
De ce point de vue, les territoires spécifiques, notamment en montagne, peuvent utiliser les marges et les souplesses prévues par la loi pour adapter la gestion de l’eau à leurs contraintes. Il n’a jamais été question de ne pas le leur permettre.
Il me semble, ainsi que l’a d’ailleurs demandé le Comité national de l’eau, que nous avons besoin de donner de la stabilité et de favoriser l’anticipation et la planification. Pour cela, il nous faut nous concentrer, plus que sur la répartition des compétences au sens juridique du terme, sur la façon dont nous œuvrons collectivement, dans chaque territoire, pour gagner sur la raréfaction et sur la qualité de la ressource.
Mon intime conviction est que l’enjeu se situe à ce niveau, et c’est de cela que je souhaite débattre avec vous.
Encore une fois, ne nous leurrons pas : même si de nombreux maires ont géré et gèrent encore l’eau et l’assainissement avec autant de rigueur et de passion, ils ont absolument besoin du collectif pour faire face aux exigences réglementaires, pour mobiliser de l’ingénierie et pour investir massivement dans le renouvellement des réseaux.
M. François Bonhomme. Ils ont besoin de liberté !
M. Jean-Jacques Panunzi. Arrêtez, arrêtez !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Non, monsieur le sénateur, je ne m’arrêterai pas ; j’utiliserai mon temps de parole pour exprimer mes convictions, mais je respecte profondément les vôtres.
C’est pourquoi le Gouvernement, investi de la responsabilité de garantir la gestion de la ressource, ne peut revenir davantage en arrière.
M. Jean-Michel Arnaud. Ce n’est pas possible !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Dans quelques semaines, il sera en mesure de vous présenter un plan Eau susceptible de répondre à ces enjeux,…
M. Mathieu Darnaud. Il devait être présenté au mois de janvier !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. … fruit d’un travail transparent et responsable. Nous sommes conscients des chantiers qui sont devant nous.
Pour ces raisons, je vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, à ne pas soutenir la proposition de la loi qui vous est soumise. (Exclamations nourries sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)
M. Mathieu Darnaud. Encore une fois, le Gouvernement fait cavalier seul !
M. François Bonhomme. Vous portez atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales !
Mme le président. La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de notre collègue Jean-Yves Roux entend rétablir les compétences eau et assainissement dans la liste des compétences facultatives de la communauté de communes.
Son auteur souhaite ainsi revenir sur les acquis de la loi NOTRe, laquelle avait prévu le transfert obligatoire de ces compétences, jusque-là communales à de rares exceptions près, à l’échelon de l’intercommunalité. L’ambition du législateur était de maîtriser les coûts et d’offrir aux Français, grâce à la mutualisation des moyens, des services de meilleure qualité.
Cette réorganisation territoriale avait suscité à l’époque, et suscite toujours, des inquiétudes chez de nombreux élus, parfois à raison.
M. Dominique Théophile. Trois lois sont venues moduler le dispositif adopté en 2015. Elles ont notamment permis le report de la date butoir de ce transfert au 1er janvier 2026.
M. Mathieu Darnaud. Grâce au Sénat !
M. François Bonhomme. Cela ne s’est pas fait tout seul…
M. Dominique Théophile. Vous les avez évoquées à l’instant.
La proposition de loi que nous examinons cet après-midi s’inscrit donc à rebours de ces évolutions. Elle n’est pas pour autant le premier texte présenté au Sénat qui vise cet objectif et, selon toute vraisemblance, elle ne sera pas le dernier.
Mes chers collègues, nous ne partageons pas cette position, d’abord parce que le transfert des compétences eau et assainissement à l’échelon de l’intercommunalité fonctionne bien. Plus de la moitié des intercommunalités sont désormais compétentes sur l’eau et 55 % des communautés de communes sur l’assainissement, ce qui confirme le caractère réalisable de cette réforme.
Ensuite, ces transferts de compétence ont permis de réaliser les économies d’échelle, de moyens et de coûts que la réforme promettait, même si ce n’est peut-être pas le cas partout. Au bout du compte, cela signifie des services publics plus performants et des factures sans doute allégées.
M. François Bonhomme. Voilà qui reste à démontrer !
M. Dominique Théophile. Nous entendons les difficultés que rencontrent certaines collectivités. Elles sont authentiques et nous ne les contestons pas.
Pour autant, la question de la réalité géographique et hydrique, par exemple, qui est souvent citée pour contester cette réforme, ne nous semble pas trouver d’issue dans un éparpillement des responsabilités. Il est vrai que certaines intercommunalités sont à cheval entre deux bassins versants, ce qui provoque certains problèmes, mais cela peut également être le cas de communes.
C’est précisément pour cela qu’un changement d’échelle est nécessaire, parfois au-delà de la communauté de communes, comme chez moi. Nous avons ainsi créé un syndicat mixte qui couvre tout le territoire de la Guadeloupe. (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Michel Arnaud. Excellent exemple, vraiment !
M. François Bonhomme. Parlons-en !
M. Mathieu Darnaud. Quel exemple !
M. Dominique Théophile. J’appelle enfin votre attention sur un point : le défi qui s’impose à nous aujourd’hui n’est plus seulement celui de la gestion et du transport de l’eau, mais aussi celui de la disponibilité de la ressource.
L’eau devient plus rare en raison du réchauffement climatique, des déséquilibres entre les prélèvements et les réserves et de pollutions diffuses.
Le niveau de 80 % des nappes souterraines est inférieur à la normale, selon le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), et la sécheresse s’annonce pire que celle de l’année dernière.
M. François Bonhomme. Quel rapport ?
M. Alain Marc, rapporteur. En passant à l’intercommunalité, les eaux vont sans doute remonter ! (Sourires.)
M. Dominique Théophile. Sur ce sujet aussi, la réponse à apporter est bien l’interconnexion et la mutualisation, et non l’éparpillement, qui me semble dépassé.
Dans un esprit de stabilité, de continuité, de lisibilité et de clarification des compétences entre les collectivités territoriales, et pour ne pas revenir sur les grands équilibres adoptés en 2015,…
M. Mathieu Darnaud. La faute originelle !
M. Dominique Théophile. … notre groupe votera contre cette proposition de loi. Pour autant, nous entendons ce qui se passe sur certains territoires. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)
Mme le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Michel Arnaud. Vive la loi NOTRe ! (Sourires sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Jean-Pierre Sueur. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la question de l’eau est tellement cruciale qu’elle sera sans doute l’un des problèmes politiques les plus complexes et les plus dirimants auxquels nous serons confrontés au cours des prochaines décennies, voire des prochaines années.
M. Jean-Pierre Sueur. Il s’agit d’une question grave, à laquelle nous devons apporter des réponses solides. Je ne reprendrai pas tous les arguments que Mme la ministre Dominique Faure et M. Théophile ont développés à l’instant. Ils sont véridiques et je les partage.
C’est pourquoi, mes chers collègues, j’ai voté en faveur de la loi NOTRe en 2015. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Jacques Panunzi. C’était une erreur !
M. Jean-Pierre Sueur. Je tiens à rappeler ici, car certains semblent l’avoir oublié, que si ce texte a été adopté en ces lieux, c’est parce qu’il a recueilli les suffrages de la majorité de la majorité et de la majorité de l’opposition de l’époque. J’ai ainsi entendu quelques discours singuliers sur la loi NOTRe, de la part même de ceux qui l’avaient votée.
M. Jean-Michel Arnaud. Et de la part de ceux qui ne l’ont pas votée ?
M. Jean-Pierre Sueur. Pour ma part, je suis clair : nous avons alors décidé de mutualiser la question de l’eau.
Pour autant, certaines choses ne fonctionnaient pas du tout. En particulier, je me souviens très bien que, lors de la commission mixte paritaire, nos collègues députés avaient souhaité la mise en œuvre de cette mesure dès 2018. J’étais parmi ceux qui leur ont indiqué qu’ils rêvaient, que c’était impossible. Nous, les sénateurs, avons donc proposé 2020.
J’ai même déclaré à l’époque, comme le montre le compte rendu, que, de toute façon, l’échéance de 2020 ne serait pas tenable. C’est pour cette raison que j’ai voté la loi présentée par M. Retailleau en 2017 : ce délai était totalement irréaliste. C’est également pour cette raison que j’ai voté, avec mes collègues, la loi Ferrand-Fesneau, qui l’a fort heureusement repoussé à 2026, afin que nous ayons le temps d’effectuer les études et les diagnostics nécessaires.
La situation est très complexe. Certaines communes n’ont rien fait et le prix de l’eau y est bas. Il leur est alors facile de s’en réclamer pour refuser de rejoindre l’intercommunalité, au motif que cela ferait augmenter les coûts. À l’inverse, celles qui ont investi pour disposer d’un bon réseau connaissent un prix plus élevé.
Il est donc naturellement nécessaire de réaliser des calculs pour prendre en compte ces situations, afin que certains ne paient pas deux fois. Je conviens que ce n’est pas simple. Néanmoins, la mutualisation est une nécessité absolue pour l’efficacité.
Je défends ce point de vue en cohérence avec ce que j’ai toujours soutenu, avec la majorité du groupe socialiste. C’est clair et cela aura été dit à cette tribune.
Ensuite, la loi Engagement et proximité a représenté un grand pas en avant en permettant des assouplissements, tels que la délégation et la subdélégation aux syndicats.
Je me souviens d’ailleurs des propos de M. Mathieu Darnaud à cette tribune. Mon cher collègue, après avoir relevé que le texte répondait « à des préoccupations du quotidien », vous avez indiqué qu’il permettait de « trouver l’échelon adéquat pour offrir le meilleur service au moindre coût à nos concitoyens ». Je ne mentionnerai pas les mots dithyrambiques que prononçait alors Mme Gatel !
M. Mathieu Darnaud. Nous disons exactement la même chose : il faut de la liberté !
M. Jean-Pierre Sueur. La loi 3DS a également permis, à juste titre, des assouplissements en matière de concertation, de possibilité d’investir avec le budget principal et de dérogation à la dissolution des syndicats.
Vous avez raison : la réalité hydrique ne correspond pas forcément à la réalité communautaire. Cela impose que l’on puisse déroger, déléguer et subdéléguer à des syndicats existants. Une certaine souplesse est donc nécessaire, nous sommes d’accord.
Néanmoins, la position majoritaire du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain est de continuer à avancer et de ne pas revenir en arrière, quelles que soient les difficultés.
Nous avons effectué un travail approfondi au sein de notre groupe. J’ignore encore si un scrutin public sera demandé sur le texte,…
M. Jean-Claude Requier. Il y en aura bien un !
M. Jean-Pierre Sueur. … mais je peux d’ores et déjà vous dire que quarante-neuf de nos collègues voteront contre ce texte, qu’ils considèrent comme un recul, douze seront pour (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains) et trois s’abstiendront.
J’ai donc présenté la position de la majorité de mon groupe ainsi que celle de sa minorité, tout en exprimant ma conviction personnelle : quelles que soient les difficultés, l’enjeu est tel qu’il faut continuer à aller de l’avant !
M. François Bonhomme. Dans le mur !
Mme le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Mme Cécile Cukierman. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ce n’est pas la première fois – cela a déjà été rappelé tant par l’auteur de la présente proposition de loi que par notre rapporteur – que nous évoquons au Sénat la question des compétences eau et assainissement et que nous débattons de l’opportunité de leur maintien parmi les compétences communales ou de leur remontée parmi les compétences obligatoires des intercommunalités.
Le bilan de la remontée de compétences obligatoires pour les métropoles, les communautés urbaines et les communautés d’agglomération est mitigé. Nous constatons que les différents dispositifs que nous nous sommes efforcés d’imaginer pour permettre des subdélégations ne fonctionnent pas, ou du moins qu’ils ne répondent pas aux attentes des élus locaux concernés. Seule échappe à ce bilan, si je puis dire, la « catégorie » des communautés de communes.
Je ne reviendrai pas sur les débats qui ont amené à la loi NOTRe, à la loi Engagement et proximité et à la loi 3DS.
Je rappellerai toutefois que le Sénat, comme il l’a montré en votant en 2017 la proposition de loi tendant au maintien des compétences eau et assainissement dans les compétences optionnelles des communautés de communes, a toujours porté une attention particulière à la gestion de ces compétences à l’échelle communale.
Dire cela ne revient en aucun cas à affirmer que chaque commune doit gérer son eau et son assainissement et que des miradors empêchant toute mutualisation, toute gestion commune et toute sécurisation de l’apport en eau et des réserves constituées en vue des incendies doivent être érigés entre deux périmètres communaux. Il convient de respecter les arguments de chacun, mes chers collègues ! (Mme Maryse Carrère renchérit.)
Dire cela, c’est poser la question de l’enjeu politique de la gestion de l’eau et de l’assainissement. L’eau a en effet permis à l’homme de faire société. Il s’est sédentarisé à proximité des ressources en eau et il s’est organisé en société afin de capter, de transporter et de traiter l’eau par l’action collective pour satisfaire aux nécessités de sa survie.
Si demain la démonstration était faite que la simple remontée de compétences permettait de régler la question de la pluviométrie dans notre pays, ce qui est tout de même le premier enjeu, si la remontée de compétences permettait de régler la question des finances publiques – le rapporteur y a fait référence – et de la capacité à résorber les fuites sur un certain nombre de réseaux, peut-être pourrions-nous revoir notre positionnement.
Mais jusqu’à preuve du contraire, je n’y crois pas, car à l’instar de saint François, je ne crois que ce que je vois.
Une voix sur les travées du groupe Les Républicains. C’est saint Thomas ! (Sourires sur les mêmes travées.)
Mme Cécile Cukierman. Le véritable enjeu de cette proposition de loi de nos collègues du RDSE est au fond celui de la liberté locale. La liberté locale est non seulement fondamentale, mais au regard des événements qui se tiennent en dehors de cet hémicycle, elle devient plus que jamais un enjeu impératif, car elle détermine la capacité à protéger la commune, cellule de base de la République et de la démocratie.
Oui, la liberté locale dérange parfois. Cette liberté du quotidien, cette liberté de proximité traduit pourtant la réalité des femmes et des hommes des différents territoires de notre République. Il nous revient ensuite d’y apporter des réponses collectives conformes aux enjeux de liberté, d’égalité et de fraternité.
En tout état de cause et sans surprise, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera, comme il le fait depuis 2015, la présente proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et du RDSE, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains. – Mmes Viviane Artigalas, Marie-Pierre Monier et Angèle Préville, ainsi que M. Sebastien Pla applaudissent également.)
Mme le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Jean-Michel Arnaud. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui réunis pour examiner la proposition de loi de Jean-Yves Roux et de plusieurs de nos collègues du RDSE.
À la suite de la proposition de loi de Mathieu Darnaud et de celle que j’ai moi-même déposée l’année dernière, ce texte constitue une nouvelle tentative de remettre en cause le caractère impératif du transfert des compétences eau et assainissement des communes aux intercommunalités.
Il s’agit en effet de revenir sur une obligation instaurée en 2015 par la loi NOTRe. Lors de l’examen de cette dernière à l’Assemblée nationale, le Gouvernement avait déposé deux amendements visant à rendre obligatoire un tel transfert de compétences. Cette évolution législative – il importe de le rappeler – a été introduite sans aucune étude d’impact préalable et sans concertation.
Sous l’impulsion du Sénat, divers ajustements ont par la suite permis de corriger à la marge un certain nombre de dispositifs jugés brutaux et inapplicables sur le terrain.
Un aménagement des modalités de transfert de compétences via l’activation d’une minorité de blocage a été rendu possible par la loi du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes. La loi Engagement et proximité a doté les intercommunalités de la faculté de déléguer tout ou partie des compétences en la matière. Et, depuis 2021, les communautés de communes ont la possibilité de maintenir les syndicats infracommunautaires après le 1er janvier 2026 dès lors que ces derniers – c’est un point important – existaient antérieurement.
Pour autant, l’obligation de transfert à l’horizon du 1er janvier 2026 demeure. C’est pourquoi, sans doute en vain, mais avec courage et ténacité, je m’attellerai à vous convaincre, madame la ministre, du bien-fondé de la position d’une majorité de nos collègues – je l’espère du moins –, notamment ceux qui sont issus d’un territoire rural.
Pour ce qui concerne les périmètres des comités de communes, je rappelle que, contrairement à ce que j’ai entendu encore aujourd’hui, le territoire d’une intercommunalité est le fruit d’une histoire politique.
M. Loïc Hervé et Mme Cécile Cukierman. Exactement !
M. Jean-Pierre Sueur. Je l’ai dit aussi !
M. Jean-Michel Arnaud. Il ne correspond donc pas toujours au bassin de vie ni à la réalité hydrique du territoire.
M. Loïc Hervé. Surtout en montagne !
M. Jean-Michel Arnaud. L’intercommunalité politique et institutionnelle et les jalons du réseau d’eau et d’assainissement ne se superposent pas nécessairement.
Vous avez également affirmé, madame la ministre, que l’intercommunalisation permettait de sécuriser les réseaux et de mieux penser la gouvernance de l’eau de demain.
Vous avez indiqué que les fuites étaient mieux gérées par les intercommunalités, notamment les métropoles et les agglomérations.
La raison en est simple, madame la ministre : dans un territoire rural, quel qu’en soit le mode de gestion, le réseau est beaucoup moins dense que dans une métropole, et il compte un nombre bien plus grand de mètres linéaires à entretenir. Il est donc normal que le taux de fuite soit plus élevé. (MM. Loïc Hervé, Jean-Yves Roux et François Bonhomme approuvent.) Il convient de comparer ce qui est comparable, toutes choses égales par ailleurs !
Vous avez également indiqué que l’intercommunalisation permettait de mutualiser les services. Ne s’agit-il pas plutôt de les transférer ?
Je puis témoigner que, dans les communes rurales, des agents techniques et des maires assurent bien souvent une gestion directe en lien avec la commande publique de proximité, notamment avec des artisans qui connaissent parfaitement le réseau.
Vous avez par ailleurs évoqué la nécessité de protéger la ressource. Vous nous expliquez, au fond, que les difficultés de disponibilité de la ressource en eau sont dues à la moins bonne gestion des réseaux par les communes, notamment rurales, que par les intercommunalités, alors qu’il s’agit avant tout d’une question de moyens financiers.
M. Jean-Michel Arnaud. Donnez des instructions à vos services et aux agences diverses et variées, notamment aux agences de l’eau, madame la ministre, pour que les communes rurales soient traitées sur un pied d’égalité avec les intercommunalités en matière d’attribution des financements.
Dans nos communes, des intercommunalités qui n’exercent pas à ce jour les compétences eau et assainissement se voient notifier par les agences de l’eau des décisions de non-financement du fait de l’absence de transfert des compétences. Nous ne sommes pourtant pas encore au 1er janvier 2026 ! Encore une fois, votre argumentation est biaisée !
Vous avez ensuite souligné la nécessité de garantir la qualité des eaux en vous appuyant sur l’exemple de quelques communes qui ont distribué une eau dont la qualité était insuffisante. Mais ces difficultés sont liées à la sécheresse importante que nous avons connue et les intercommunalités y sont tout autant exposées que les communes rurales.
Par ailleurs, celles-ci font face aux difficultés : elles diligentent des analyses, mobilisent les entreprises et informent la population.
Je vous ferai une confidence, madame la ministre : dans mon département, l’agglomération de Gap-Tallard-Durance, dont je suis par ailleurs élu, a été confrontée à de telles difficultés, non pas dans une commune rurale, mais dans un quartier de la commune de Gap, qui a dû faire l’objet d’un accompagnement spécifique.
Pour importante qu’elle soit, la qualité de l’eau n’est donc pas un argument pertinent.
Vous avez enfin évoqué la nécessité d’investir. Je vous rejoins sur ce point : il faut bien sûr investir pour rénover nos réseaux, pour abaisser les taux de fuite et pour créer de l’interconnexion. Je vous ferai toutefois une révélation, madame la ministre : nous n’avons pas attendu l’intercommunalisation pour le faire. Des dizaines de communes ont maillé leur réseau par le biais, non pas de l’intercommunalisation, mais parfois uniquement de conventions. (MM. Loïc Hervé et Jean-Yves Roux approuvent.)
Je connais aussi des communes qui attendent des moyens de l’État et des financements des agences de l’eau pour rénover leur réseau.
Il faut déconnecter l’attribution des financements des modalités de gestion de la ressource, madame la ministre !
Mme le président. Veuillez conclure, cher collègue.
M. Jean-Michel Arnaud. M. le Président de la République a demandé que l’on s’efforce de régler les difficultés au plus près du territoire. Par cette proposition de loi qui rétablit la liberté locale et la différenciation territoriale, notre collègue Jean-Yves Roux nous offre une opportunité de le faire ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, INDEP, et CRCE. – Mmes Viviane Artigalas et Angèle Préville, ainsi que MM. Sebastien Pla et Jean-Yves Roux applaudissent également.)
M. Loïc Hervé. Excellent !
Mme le président. La parole est à Mme Maryse Carrère. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, INDEP et UC.)
Mme Maryse Carrère. Madame le président, madame la ministre, mes chers collègues, chacun se souvient ici du mois de juillet 2021, au cours duquel nous avons longuement débattu de la différenciation territoriale à l’occasion de la loi 3DS.
La ministre de la cohésion des territoires de l’époque, Mme Jacqueline Gourault, avait pris le temps de nous expliquer le sens de cette différenciation territoriale. Je me permets donc de reprendre ses mots : « Une République différenciée, c’est […] une République davantage décentralisée, où les compétences des collectivités sont confortées et clarifiées. C’est un État plus agile, plus réactif et plus proche, qui adapte sa réponse et accompagne main dans la main les initiatives des collectivités. »
La proposition de loi de notre collègue Jean-Yves Roux me semble parfaitement conforme à cet état d’esprit. Celle-ci se propose en effet de ménager une administration plus agile, plus réactive et plus proche des petites collectivités.
Vous le savez, mes chers collègues, le groupe du RDSE s’attache à toujours défendre les territoires et leurs spécificités, particulièrement celles des territoires ruraux.
Notre groupe n’était pas favorable au transfert obligatoire des compétences eau et assainissement des communes aux communautés de communes et aux communautés d’agglomérations instauré par la loi NOTRe. Avec quelques années de recul, nous constatons, hélas ! que ce transfert imposé pose des difficultés. En effet, comme nous le redoutions, le niveau intercommunal ne permet pas toujours de répondre aux besoins de chaque commune.
Les remontées de terrain sont sans équivoque : au-delà des positions de principe que l’on peut avoir sur l’intercommunalité, ce recours forcé pose de réelles difficultés.
Notre groupe a toujours dit son attachement au tandem commune-département. Pour autant, nous ne sommes pas obtus et nous reconnaissons que la mise en commun des moyens peut également être une bonne chose. Mais tel n’est pas le cas ici.
Nous rappelons régulièrement dans cet hémicycle que nous sommes la chambre des territoires ; il nous revient donc d’agir en responsabilité sur cette question. C’est la raison pour laquelle je salue cette initiative de notre collègue Jean-Yves Roux, tout comme celles de Mathieu Darnaud et de Jean-Michel Arnaud, qui ont également déposé des propositions de loi sur cette thématique. Depuis cinq ans, celle-ci fait du reste l’objet d’un travail constant au Sénat, lequel ne manque pas une occasion de rappeler ses positions.
Notre rapporteur Alain Marc a travaillé pour améliorer le dispositif proposé. Je salue sa connaissance du sujet et son expertise.
Ce texte prévoit de mettre un terme au transfert obligatoire des compétences eau et assainissement en introduisant un dispositif assoupli, lequel prendra en considération les situations créées par la loi NOTRe tout en laissant une marge de liberté aux communes.
Madame la ministre, pour 3 600 communes qui assument cette compétence seules,…
Mme Maryse Carrère. … on déstabilise des centaines de syndicats et de communes qui n’ont pas attendu la loi NOTRe pour mutualiser leurs moyens de gestion ou se fédérer et qui font aujourd’hui un travail exemplaire.
M. Loïc Hervé. Bien sûr !
Mme Maryse Carrère. Ce transfert de compétences aux communautés d’agglomérations est obligatoire depuis deux ans. Il me semble que le moment est venu de réaliser un bilan, car de nombreuses communautés d’agglomérations sont embourbées dans des problématiques de création de services et dans des difficultés techniques et surtout financières.
M. Loïc Hervé. Eh oui !
Mme Maryse Carrère. Cette proposition de loi constitue un compromis acceptable. Mon groupe y sera donc unanimement favorable. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, INDEP, UC et Les Républicains. – Mmes Viviane Artigalas et Angèle Préville, ainsi que M. Sebastien Pla applaudissent également.)
Mme le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Mathieu Darnaud. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, « Hâtez-vous lentement, et, sans perdre courage, Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage ». Par ces vers empruntés à Boileau, madame la ministre, je veux traduire l’état d’esprit qui nous anime.
Vous avez bien compris la détermination, l’opiniâtreté à ne rien lâcher, à ne rien concéder sur ce sujet. Je veux toutefois redire, à la suite de mes collègues, notamment Jean-Michel Arnaud, Maryse Carrère et Cécile Cukierman, que, s’il est une compétence singulière qui ne ressemble à aucune autre, c’est bien celle de l’eau plus encore que de l’assainissement.
Cette compétence répond en effet, non pas à une logique intercommunale – elle n’y répondra jamais –, mais à une logique de bassin versant. En dépit de tous vos efforts et des contre-vérités que vous nous assénez, vous ne parviendrez jamais à contredire cette vérité implacable, dont découle la nécessaire liberté qui doit être accordée à ceux des élus de nos territoires qui ont la meilleure expertise pour organiser la politique en matière d’eau. (Vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDSE.)
Mais qu’il me soit permis, avec un peu plus de gravité, de revenir sur certains des propos que vous avez tenus à cette tribune, madame la ministre.
Vous venez nous dire que les agences de l’eau financent les communes isolées, qu’elles sont à l’écoute des territoires.
M. Jean-Michel Arnaud. Incroyable !
M. Loïc Hervé. C’est faux !
M. Mathieu Darnaud. Je vous invite à prendre attache avec les communes qui ont mis en place des dossiers de subvention pour leur schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux. Aucune d’entre elles n’est financée dès lors qu’elle est isolée !
Autrement dit, le Gouvernement et vos agences de l’eau, madame la ministre, foulent aux pieds la loi elle-même, puisque le transfert n’est obligatoire qu’à compter de 2026. Il est grave de ne respecter ni le législateur ni la volonté des élus des territoires !
Je ne reviendrai pas sur les arguments techniques et juridiques – les orateurs qui m’ont précédé les ont remarquablement exposés – qui ont présidé au dépôt de cette proposition de loi. Je souhaite à mon tour remercier notre collègue Jean-Yves Roux, ainsi que Jean-Michel Arnaud qui avait pris la même initiative avant lui et toutes celles et tous ceux qui, depuis la loi NOTRe, s’efforcent de faire entendre la singularité de la compétence eau.
Madame la ministre, le Gouvernement doit respecter le travail accompli par les élus locaux de nos territoires.
Vous avez tenté de nous asséner une autre contre-vérité, en soulignant que les syndicats existants, y compris ceux qui sont infracommunautaires, étaient préservés et pouvaient continuer à exercer les compétences.
C’est aussi ce que la ministre avait essayé de nous vendre lors de l’examen de la loi 3DS, dont j’étais corapporteur avec Françoise Gatel.
Or à y regarder de plus près – c’est subtil ! –, par le principe de la subdélégation, vous ne permettez même pas au syndicat infracommunautaire d’avoir sa propre existence et ses propres règles juridiques. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDSE, ainsi que sur des travées des groupes SER, GEST et CRCE.)
Encore une supercherie gouvernementale, mais s’agissant de la compétence eau, nous y sommes désormais habitués !
M. Daniel Breuiller. Comme pour les retraites !
M. Mathieu Darnaud. Vous avez abordé le sujet sous l’angle de la culpabilisation, madame la ministre, nous reprochant de ne pas avoir le souci d’économiser l’eau dans les Hautes-Alpes, les Alpes-de-Haute-Provence, en Ardèche…
M. Loïc Hervé. Ou en Haute-Savoie !
M. Mathieu Darnaud. … ou en Haute-Savoie en effet, parce que ces territoires ne seraient pas concernés par la sécheresse.
Permettez-moi de vous dire, madame la ministre, que dans mon département, les robinets de la commune de Coucouron ne distribuent pas d’eau potable depuis le mois d’août. Gardez donc vos leçons de morale et écoutez plutôt ce que nous avons à vous dire, car, s’il est un sujet sur lequel nous sommes soucieux de ce qui se passe sur le territoire, c’est bien celui de l’eau !
Pour avancer de manière constructive, encore faut-il considérer le sujet de la façon la plus objective possible. Il est à cet égard absolument nécessaire que le Gouvernement entende ce que les élus de ces communes et de ces syndicats ont à lui dire.
Vous n’évoquez jamais les syndicats, madame la ministre, car votre volonté – nous le savons – est de les placer eux aussi en coupe réglée sous le joug des intercommunalités.
Pour notre part, nous affirmons avec force que l’eau a sa propre vérité, à l’aune de chacun des territoires de France, et que, si nous voulons être demain au rendez-vous des enjeux de l’eau comme vous nous y invitez, il est grand temps de redonner aux élus la liberté et l’agilité à laquelle ils aspirent ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDSE. – Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE.)
Mme le président. La parole est à M. Franck Menonville. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Franck Menonville. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui réunis pour évoquer ensemble le sujet, récurrent dans notre hémicycle, du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes.
Rappelons que ce transfert obligatoire imposé par le Gouvernement en 2015 lors de l’examen de la loi NOTRe, et auquel le Sénat s’oppose avec constance, est inadapté à la réalité des territoires.
Je tiens tout d’abord à saluer, cher Jean-Yves Roux, votre initiative d’inscrire ce sujet ô combien important à notre ordre du jour. Celle-ci s’ajoute aux initiatives de nos collègues Mathieu Darnaud et Jean-Michel Arnaud.
À la réticence des élus locaux et du Parlement, différents motifs censés justifier la nécessité de ce transfert ont été opposés. À titre d’exemple, je citerai l’urgence de réduire la dispersion des compétences ou encore l’importance d’abaisser le taux de fuite des réseaux.
Ces explications ne sauraient justifier le transfert définitif des compétences en 2026, qui suscite l’opposition d’une large partie des élus locaux – des maires, bien sûr, mais aussi d’un certain nombre de présidents d’intercommunalités – qui, dans le contexte inflationniste que nous connaissons, ont bien d’autres préoccupations et urgences en tête – énergie, investissements…
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires estime que l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) n’est pas toujours l’échelon idoine pour assurer le service de l’eau et de l’assainissement en ce qu’il ne coïncide pas du tout avec la réalité hydrique et géographique du terrain.
Comme l’a rappelé notre rapporteur Alain Marc, dont je salue le travail, ce passage de flambeau engendre une perte de compétences à l’échelon local, mais aussi une hausse des dépenses publiques locales du fait du recrutement de nouveaux agents dédiés.
La commune reste dans certaines situations l’échelon le plus satisfaisant pour exercer les compétences eau et assainissement.
À plusieurs reprises, le Parlement a tenté de revenir sur le caractère impératif de ce transfert. Certains reports et assouplissements – il convient de le rappeler – ont été permis grâce au Sénat.
L’échéance se rapprochant, force est de constater que de nombreuses communes éprouvent des difficultés à régulariser dans les temps ce transfert de compétences. C’est tout particulièrement le cas dans les territoires les plus ruraux et de montagne.
D’après une publication récente d’Intercommunalités de France, seulement 48 % des intercommunalités exerçaient la compétence eau en octobre dernier. Ce chiffre illustre bien les difficultés ressenties sur le terrain pour faire face à ce transfert imposé au forceps.
Plutôt qu’une approche uniformisée, nous souhaitons privilégier une réponse sur mesure adaptée aux besoins et aux spécificités des territoires. Il convient de faire confiance aux élus locaux.
Le texte amendé par la commission et notre rapporteur apporte la souplesse nécessaire et permet de répondre à tous les cas de figure qui se présentent à nous. En permettant un transfert à la carte des compétences eau et assainissement, cette proposition de loi donne aux communes la marge de manœuvre indispensable pour mener sereinement leur mission et offrir les meilleurs services à leurs habitants.
Il conviendra toutefois de veiller – c’est un véritable défi pour demain – à ce que nos concitoyens disposent d’une eau de qualité et en quantité suffisante, conformément à la réglementation.
Adopter cette proposition de loi, c’est faire confiance aux maires. Adopter cette proposition de loi, c’est faire vivre les principes de différenciation et de subsidiarité en s’appuyant sur une dynamique de liberté locale.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires que je représente votera donc en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. Daniel Breuiller.
M. Daniel Breuiller. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le texte dont nous débattons aujourd’hui vise à faire figurer de nouveau les compétences eau et assainissement dans la liste des compétences facultatives des communautés de communes.
J’aurais aimé faire une synthèse des propos tenus par notre collègue Sueur et par les autres orateurs, mais je dois avouer que le débat au sein du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires a été assez animé.
Les questions de l’eau et de l’assainissement sont centrales. La présente proposition de loi interroge la capacité des communes à choisir de transférer ou non les compétences eau et assainissement à l’intercommunalité, ce qu’une précédente loi avait rendu obligatoire.
Par respect du principe de subsidiarité, nous jugeons légitime que des élus puissent librement choisir de mettre en commun, ou non, les compétences eau et assainissement et décider des modalités de cette mise en commun selon les particularités de leur territoire.
En matière de gestion de l’eau, les questions relatives à la géographie et aux capacités techniques se posent nécessairement.
Souvent, le périmètre administratif de l’intercommunalité ne se superpose pas à la réalité hydrique du territoire. Je pense notamment aux territoires ruraux et aux territoires de montagne, pour lesquels le transfert de ces compétences peut ne pas être opportun.
Cette proposition de loi a le mérite de faire véritablement confiance aux élus locaux. Elle leur laisse une liberté de choisir, « à la carte », la manière dont ils veulent gérer l’eau et l’assainissement : ensemble ou seuls, une compétence sans l’autre ou les deux en même temps.
Il faut toutefois admettre que l’intercommunalité permet d’envisager des projets plus ambitieux et de mutualiser les coûts et les risques pour mieux investir face aux enjeux environnementaux croissants.
Car oui, la multiplication des épisodes de chaleur et de sécheresse nécessitera de plus en plus de mises en commun pour éviter les conflits d’usage autour de l’eau.
À ce titre, je souhaite revenir sur la question centrale qui se posera à l’avenir. On a longtemps cru, en France, que l’accès à l’eau serait garanti à tous et pour tous les usages. Cette affirmation n’est plus d’actualité : nous avons connu des sécheresses estivales redoutables, et nous connaissons aujourd’hui des sécheresses hivernales dont la réalité brutale annonce de nouveau des étés difficiles.
L’été 2022 nous a bien montré que l’accroissement du nombre des épisodes de canicule et de sécheresse a des conséquences directes sur l’eau potable et sur l’assainissement. Ceux qui s’en sortent bien aujourd’hui de façon isolée s’en sortiront-ils toujours aussi bien demain ?
Quelque 90 % des cours d’eau étaient en grand déficit cet été – les gorges du Verdon et le lac de Serre-Ponçon étaient complètement à sec – et une centaine de collectivités ont été privées d’eau potable, ce qui a rendu nécessaire l’acheminement d’eau par camions-citernes et la distribution de millions de bouteilles.
À l’aune de ces crises, on comprend que la présente proposition de loi ne constitue pas une solution en soi pour répondre à ces enjeux locaux, car aucune collectivité ne s’en sortira seule.
Que l’on se place à l’échelle communale ou intercommunale, le problème demeure le même. Aujourd’hui, la politique de l’eau est sous-financée dans une fourchette de 800 millions à 3 milliards, voire 4 milliards d’euros par an. On est loin du compte !
Les réseaux, souvent vieillissants et usagés, ont besoin d’être rénovés. Les canaux sont vétustes au point que 20 % de l’eau produite disparaît dans les sous-sols avant d’atteindre un robinet.
C’est aussi un enjeu social fort, car l’inflation et le sous-investissement gonflent et gonfleront les prix de l’eau au détriment des usagers. Aujourd’hui, 1 million de foyers sont déjà concernés par une facture d’eau d’un montant supérieur à 3 % de leurs revenus.
Si l’on peut soutenir l’intelligence des élus territoriaux et respecter leur faculté de faire les meilleurs choix pour leur commune, on peut aussi souligner la nécessité de mutualiser et d’investir collectivement.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires se partagera sur ce texte entre quelques votes pour et une majorité d’abstentions, mes collègues estimant que cette proposition de loi n’est pas la réponse aux problèmes évoqués.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Raymond Hugonet. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, dans la vie législative – nous ne le savons que trop –, de simples amendements peuvent avoir une immense portée.
C’est en effet par un simple amendement gouvernemental au funeste projet de loi NOTRe, en 2015, sans étude d’impact ni avis du Conseil d’État, que le gouvernement d’alors avait fait adopter le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux EPCI, y compris dans les communautés de communes.
Face à l’opposition farouche de l’Association des maires de France et d’une bonne partie du Sénat, nous avons depuis obtenu de haute lutte un certain nombre d’assouplissements : plusieurs reports de la date de transfert, finalement fixée au plus tard au 1er janvier 2026 sous conditions, la possibilité de déléguer la compétence à un syndicat ou à une commune par la loi du 3 août 2018 et la loi Engagement et proximité du 27 décembre 2019. Enfin, la loi 3DS du 21 février 2022 prévoit le maintien après le 1er janvier 2026 des syndicats infracommunautaires de gestion des eaux existant au 1er janvier 2019 au sein d’une communauté de communes, sauf délibération contraire de cette dernière.
Nonobstant ces différentes mesures d’adaptation législative, le résultat final ne semble pas avoir répondu totalement aux inquiétudes des élus de la ruralité et de la montagne, car il ne résout pas le problème de fond : la loi oblige toujours les communes à transférer l’eau et l’assainissement à leur communauté de communes.
La mise en place de cette communautarisation généralisée a été voulue, nous dit-on, pour éviter une trop forte dispersion des modalités d’exercice de ces compétences, laquelle, selon le législateur de l’époque, serait à l’origine d’un manque de rationalisation des services.
La loi NOTRe se donnait ainsi pour objectif une mutualisation efficace des moyens techniques et financiers nécessaires à une meilleure maîtrise des réseaux de distribution d’eau potable et d’assainissement, notamment dans les zones rurales.
Nous y voilà, les mots magiques sont lâchés : « rationalisation, maîtrise, mutualisation, circulez ! »
Combien d’inepties génératrices de gabegie d’argent public ont été inventées sur la base de ce mirage ? Comment un principe aussi général peut-il être opérant au vu de la très grande hétérogénéité des situations locales ?
L’Assemblée des communautés de France (AdCF) a constaté que, à la fin de 2021, seules 33 % des communes avaient effectivement transféré aux communautés de communes la compétence en question.
À l’évidence, la fixation du niveau d’exercice de cette compétence ne peut être uniforme et déconnectée du terrain, mais doit a contrario relever de considérations matérielles et techniques propres à chaque territoire.
Cela vaut encore davantage pour les territoires ruraux, où les modalités de gestion d’un service public peuvent varier d’une commune à l’autre et nécessiter de maintenir une gestion directe par la commune ou les syndicats en place afin de permettre une capacité d’intervention plus souple et plus efficace.
Que dire encore des investissements coûteux et des recrutements qui seraient nécessaires à la seule mise en œuvre de ces transferts, si tant est qu’ils ne soient pas contestés par la Cour des comptes, sans réel bénéfice en termes d’efficacité pour les territoires concernés ? À n’en pas douter, ces transferts s’accompagneraient dans certains cas d’une hausse importante du prix de l’eau !
Aussi, en ce qui concerne les communautés de communes, les auteurs de la présente proposition de loi entendent privilégier une approche pragmatique, moins coûteuse et technocratique, adaptée aux réalités géographiques et hydrologiques des territoires. Suivant l’essence même du principe de subsidiarité, il reviendrait aux communes de décider du niveau d’exercice de ladite compétence en matière d’eau et d’assainissement.
Nous sommes donc impatients de connaître la position du Gouvernement et, par la suite, l’avis de l’Assemblée nationale. Le Gouvernement finira-t-il par accepter de revenir sur une disposition profondément contestée sur le terrain ?
Le fait qu’à peine un tiers des communautés de communes se soient vu transférer la compétence eau, presque dix ans après la loi NOTRe, montre que les maires restent prudents sur le sujet, ce qui devrait suffire à faire réfléchir le Gouvernement.
Pour conclure, et avant même d’examiner le texte proposé par nos collègues du groupe RDSE, que je remercie, il me semble indispensable de préciser un point technique qui peut prêter à confusion lorsque l’on évoque, sans autre précision, l’eau et l’assainissement.
Le réseau d’eau potable est sous pression et peut donc avoir n’importe quel périmètre. En revanche, les réseaux d’eaux pluviales et d’eaux usées sont gravitaires. L’eau potable est facturée, comme l’assainissement des eaux usées, via une redevance pour la collecte, le transport et l’épuration. Au contraire,…
Mme le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Jean-Raymond Hugonet. … les dépenses de collecte d’eaux pluviales ne sont pas couvertes par des recettes propres. Les coûts afférents sont donc incorporés dans le budget général de la collectivité.
Mme le président. Il faut conclure !
M. Jean-Raymond Hugonet. Attention donc au titre même de la proposition de loi puisque, traditionnellement,…
Mme le président. Votre temps de parole est écoulé !
M. Jean-Raymond Hugonet. … le terme « eau » renvoie à l’eau potable, alors même que l’assainissement inclut les eaux usées et les eaux pluviales. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Marc, rapporteur. Madame la ministre, après toutes ces interventions, y compris la vôtre, je n’ai pas encore compris le cheminement intellectuel qui vous conduit à affirmer que le basculement de la compétence de la commune à celle de l’intercommunalité ferait baisser le taux de fuite. Pour le dire franchement, cela me dépasse ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.) Peut-être ne suis-je pas suffisamment intelligent ?
Je souscris à ce qu’a dit mon collègue du groupe écologiste : si l’on bascule la compétence à l’intercommunalité, comment fera-t-on pour celles qui ne comptent que 5 000 habitants, comme chez moi, avec des secteurs où l’on ne trouve pas plus de cinq habitants au kilomètre carré ? Je précise que, dans le Sahel, on est à onze habitants au kilomètre carré !
Cela signifie, madame la ministre, que la problématique de la sécheresse et des retenues d’eau ne pourra être résolue à l’échelle intercommunale, mais seulement à celle, a minima, des départements.
En outre, puisque nous faisons face à des problèmes liés au manque de pluie, j’allais vous suggérer, si vous ne souhaitez pas faire évoluer votre position sur cette compétence, que vous y glissiez l’obligation pour nos intercommunalités d’apprendre la danse de la pluie. Au moins, nous y gagnerons un peu d’humour.
L’idée de basculer la compétence à l’intercommunalité me semble pour le moins relever de l’obstination.
M. Alain Marc, rapporteur. Les études montrent toutes que cela relève parfois même – j’ose le dire – de la bêtise ! (M. Jean-Michel Arnaud applaudit.) On peut s’interroger : l’une de nos collègues, qui avait voté pleinement avec nous le refus de ce transfert, a changé de cap une fois devenue ministre !
Y aurait-il, dans les hautes sphères de l’exécutif, une collusion avec certains grands groupes ? Je n’ose le penser et j’espère que tel n’est pas le cas.
Je souhaite que nous soutenions collectivement, les uns et les autres, cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et RDSE. – Mme Cécile Cukierman applaudit également.)
Mme le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à permettre une gestion différenciée des compétences « eau » et « assainissement »
Article unique
I. – L’article L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Les 6° et 7° sont abrogés ;
b) Les treizième à dix-septième alinéas sont supprimés ;
2° Le II est ainsi modifié :
a) Les 6° et 7° sont ainsi rétablis :
« 6° Assainissement des eaux usées, dans les conditions prévues à l’article L. 2224-8 du présent code ;
« 7° Eau. » ;
b) (nouveau) Avant le 8°, sont insérés dix alinéas ainsi rédigés :
« La communauté de communes peut, avec l’accord du conseil municipal des communes concernées, déléguer, par convention, tout ou partie des compétences mentionnées aux 6° et 7° du présent II ainsi que la compétence relative à la gestion des eaux pluviales urbaines définie à l’article L. 2226-1 à l’une de ses communes membres. Lorsqu’une commune demande à bénéficier d’une délégation, l’organe délibérant de la communauté de communes statue sur cette demande dans un délai de deux mois.
« La délégation prévue au douzième alinéa du présent II peut également être faite au profit d’un syndicat mentionné à l’article L. 5212-1 et inclus en totalité dans le périmètre de la communauté de communes.
« Les compétences déléguées en application des 6° et 7° du présent II sont exercées au nom et pour le compte de la communauté de communes délégante.
« La convention, conclue entre les parties et approuvée par leurs assemblées délibérantes, précise la durée de la délégation et ses modalités d’exécution. Elle précise notamment les conditions tarifaires des services d’eau et d’assainissement des eaux usées sur le territoire de la communauté de communes. Les autres modalités de cette convention sont définies par un décret en Conseil d’État.
« Les compétences mentionnées aux 6° et 7° du même II exercées par une communauté de communes peuvent, à tout moment et en tout ou partie, être restituées à chacune de ses communes membres après accord de la moitié au moins des conseils municipaux des communes membres, ou à une ou plusieurs de ses communes membres après délibérations concordantes de l’organe délibérant de la communauté de communes et des conseils municipaux des communes membres concernées. Sont applicables à ces restitutions de compétences les articles L. 1321-1 à L. 1321-6 du présent code.
« Les délibérations mentionnées au seizième alinéa du présent II définissent le coût des dépenses liées aux compétences restituées ainsi que les taux représentatifs de ce coût pour l’établissement public de coopération intercommunale et chacune de ses communes membres ou à une ou plusieurs communes membres dans les conditions prévues au 4 du 3° du B du III de l’article 85 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.
« La restitution de compétences est prononcée par arrêté du ou des représentants de l’État dans le ou les départements intéressés.
« Une ou plusieurs communes membres d’une communauté de communes peuvent transférer à cette dernière, en tout ou partie, les compétences mentionnées aux 6° et 7° du présent II ainsi que les biens, équipements ou services publics nécessaires à leur exercice. Le transfert intervient après délibérations concordantes de l’organe délibérant de la communauté de communes et des conseils municipaux des communes membres concernées. Sont applicables à ces transferts de compétences les articles L. 1321-1 à L. 1321-6 du présent code.
« Les conventions de délégation conclues en application des treizième à dix-septième alinéas du I du présent article, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° … du … visant à permettre une gestion différenciée des compétences “eau” et “assainissement”, ou du IV de l’article 14 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique demeurent valables en l’absence de modification du titulaire de l’exercice des compétences eau et assainissement des eaux usées postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi n° … du … précitée.
« Lorsque les compétences eau et assainissement des eaux usées sont restituées, en tout ou partie, aux communes, les conventions de délégation, conclues en application des treizième à dix-septième alinéas du I du présent article, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° … du … visant à permettre une gestion différenciée des compétences “eau” et “assainissement”, ou du IV de l’article 14 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, sont maintenues pendant une durée d’un an à compter de la délibération des conseils municipaux se prononçant sur la restitution des compétences précitées. La communauté de communes et les communes concernées délibèrent, au cours de cette année, sur le principe d’une délégation de tout ou partie des compétences eau et assainissement des eaux usées ou de l’une d’entre elles, aux communes ou aux syndicats délégataires à la date de la restitution de compétences. »
II (nouveau). – L’article 1er de la loi n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes est abrogé.
III (nouveau). – L’article 14 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique est ainsi modifié :
1° Le II est abrogé ;
2° Le IV est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « au deuxième alinéa du I de l’article L. 5214-21 et » et les mots : « d’une communauté de communes exerçant à titre obligatoire ou facultatif ces compétences ou l’une d’entre elles, ou dans celui » sont supprimés ;
b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au deuxième alinéa du I de l’article L. 5214-21 du code général des collectivités territoriales, les syndicats compétents en matière d’eau, d’assainissement, de gestion des eaux pluviales urbaines ou dans l’une de ces matières inclus en totalité dans le périmètre d’une communauté de communes exerçant à titre facultatif ces compétences ou l’une d’entre elles sont maintenus jusqu’à neuf mois suivant la prise de compétence. Le syndicat exerce, sur son périmètre, ses attributions pour le compte de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et lui rend compte de son activité. » ;
c) Le dernier alinéa est supprimé.
IV (nouveau). – Les III et IV de l’article 30 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale sont abrogés.
Vote sur l’ensemble
Mme le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Jean-Claude Anglars, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Anglars. Je voudrais tout d’abord apporter mon soutien à cette proposition de loi. Tout a été dit par les précédents orateurs sur la dimension dans laquelle il faut se situer.
Ensuite, madame la ministre, par rapport à ce que vous avez indiqué et à votre obstination à vouloir transférer la compétence eau à la communauté de communes, je me souviens d’une discussion que nous avions eue, lors d’un de vos passages en Occitanie : vous me posiez une question sur le vote des territoires ruraux en faveur de certains extrêmes. L’eau, c’est la vie : mes collègues l’ont bien expliqué. Il s’agit donc d’une compétence tout à fait particulière. Vous ne pouvez pas ne pas entendre qu’il faut laisser cette liberté aux communes, en les laissant faire comme elles le souhaitent.
Je voulais simplement vous le dire et apporter tout mon soutien aux auteurs de la proposition de loi, au rapporteur et à tous les intervenants précédents. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. Jean-Jacques Panunzi, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Panunzi. Les élus locaux ne veulent pas, à juste titre, que la compétence eau et assainissement soit gérée à l’échelon intercommunal. Les conseils municipaux souhaitent conserver ce levier, qui a aussi une dimension sociale. Le coût varie en fonction du mode de gestion s’il s’agit d’une régie, d’une concession ou bien encore d’une délégation de service public (DSP).
Cela dépend aussi des investissements effectués par les collectivités locales pour la qualité du service apporté à la clientèle, ainsi que des contraintes géographiques. En effet, la qualité et la quantité de ressources disponibles tout comme l’éloignement du lieu de captage, qui génère une certaine longueur de canalisations, et les conséquences liées à la nature des sols sur le vieillissement des canalisations ont un effet sur les coûts de production et d’entretien.
Il faut aussi prendre en compte le fait que, dans les zones rurales, l’habitat dispersé oblige à se doter d’un réseau de distribution de grande longueur. Les coûts d’entretien par habitant des réseaux de distribution et de collecte ne sont pas les mêmes qu’en agglomération. Comment une intercommunalité pourrait-elle gérer de façon efficiente ce type de difficultés ?
Vous comprenez bien que la réponse du Gouvernement, par votre voix, madame la ministre, le 24 janvier dernier, pour défendre le principe du transfert sans l’ombre d’un argument fondé, comme vous venez de le faire, ne me convient pas. Mais je ne pense pas que vous soyez responsable de cette situation. Je crois plutôt que c’est encore une conséquence négative de la fameuse loi NOTRe.
Pour rappel, la vision pragmatique sur ce dossier nous avait conduits, le 23 février 2017, sur l’initiative de Bruno Retailleau, au vote d’un texte d’équilibre qui ne supprime pas le transfert, mais le rend facultatif.
Mme le président. Il faut conclure !
M. Jean-Jacques Panunzi. Je me réjouis que cette proposition de loi soit reprise par notre collègue Jean-Yves Le Roux ; je la voterai des deux mains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Cécile Cukierman applaudit également.)
Mme le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.
M. François Bonhomme. Par cette proposition de loi, nous voulons corriger l’un des irritants les plus récurrents de ces dernières années et qui concerne tous les élus de terrain : celui du transfert forcé de la compétence eau et assainissement aux communautés de communes.
Encore faut-il rappeler la faute originelle qui nous réunit ici, celle qui provient de la funeste loi NOTRe, à propos de laquelle la ministre chargée des collectivités locales de l’époque, Marylise Lebranchu, déclarait, trois ans après avoir tordu le bras du Parlement et de la majorité du Sénat pour la faire adopter : « Sur la loi NOTRe, nous n’avons pas été bons. » Quel aveu d’impuissance et quel aveu tout court !
Ce n’est pourtant pas faute, au Sénat, d’avoir constamment refusé ce transfert forcé en signifiant notre volonté de respecter la liberté communale la plus élémentaire, c’est-à-dire le droit pour les communes d’exercer cette compétence de service public majeure à l’échelon d’administration qui lui semble le plus efficient.
Ce n’est pas faute non plus d’avoir été à l’origine d’autres initiatives législatives visant à corriger cette situation – je pense notamment aux travaux de Mathieu Darnaud et de Françoise Gatel.
La loi du 3 août 2018 a permis, malgré l’opposition du Gouvernement, de revenir sur le transfert forcé, mais seul un report au 1er janvier 2026 était prévu. Cinq ans après, sans surprise, nous n’avons que des remontées négatives. Les élus locaux, les maires et les syndicats, tous expriment leurs inquiétudes à l’approche du grand saut.
Si vous vous entêtez à ne pas reconnaître cette liberté communale fondamentale, vous confirmerez et conforterez le sentiment de dépossession des maires au moment même où nous assistons à une vague de démissions d’élus locaux partout sur le territoire. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Jean-Yves Roux applaudit également.)
M. Jean-Michel Arnaud. Très bien !
Mme le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour explication de vote.
M. Mathieu Darnaud. Je voudrais simplement ajouter à mon intervention précédente un fait qui vient encore une fois tordre le cou à votre argumentaire, madame la ministre.
Vous venez nous dire que l’intercommunalité, c’est mieux, c’est plus efficace et, pour reprendre l’expression que vous avez assénée à plusieurs reprises, qu’« il faut le faire ensemble ».
Nous avons pu auditionner l’ensemble des présidents et directeurs des agences de l’eau dans le cadre d’une mission d’information sur la gestion durable de l’eau créée par nos collègues socialistes. Nous les avons interrogés sur les Aqua Prêts. Tous nous ont dit que ce dispositif ne fonctionnait pas, y compris dans les intercommunalités qui disposent de la compétence.
Madame la ministre, nous attendons encore que vous répondiez sur le fond à nos arguments. Car vous ne répondez que sur la forme : « il faut aller plus vite », « il faut avancer coûte que coûte », « si vous n’entrez pas par la fenêtre, on vous fera entrer par la cheminée », « tout doit se faire dans le cadre de l’intercommunalité »…
Si vous avez la prétention d’avancer au moins un argument de fond pour nous convaincre, essayez donc ! C’est le moment, madame la ministre : jusqu’à présent, vous n’en avez pas produit un seul qui expliquerait pourquoi et comment nous devrions y aller ensemble, au travers de l’intercommunalité.
Enfin, je serais curieux de vous entendre sur les Aqua Prêts. C’est bien la démonstration la plus absolue que rien ne marche mieux en plaçant la compétence sous le joug et sous le prisme de l’intercommunalité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Je voudrais tout d’abord remercier les auteurs de cette proposition de loi et le groupe RDSE.
Les élus sont des personnes responsables, nous pouvons et nous devons leur faire confiance. Je voudrais souligner une réalité toute simple que mes collègues ont déjà rappelée : le contour des communautés de communes est purement artificiel. Il ne respecte aucune géographie ni aucune réalité, pas même hydrique. Ici, il y a une nappe phréatique ; là-bas, on va puiser dans une rivière. Il n’y a donc aucun sens à rendre cette compétence obligatoire.
De plus, ce transfert nécessitera la création d’un service au sein d’une communauté de communes, ce qui entraînera vraisemblablement une hausse du prix de l’eau, voire un recours à une société privée. Telles sont les questions que je me pose.
Dans ma commune, dont je suis toujours conseillère municipale, nous sommes en régie : nous entretenons nos réseaux et tout se passe bien en qualité et en volume. C’est une petite commune industrielle, dont de nombreux habitants ont des salaires modestes ; nous sommes heureux et fiers d’offrir l’eau à un coût très bas, bien en dessous de la moyenne, autour de 1 euro.
S’il y a des fuites, nous avons un adjoint et un agent qui interviennent immédiatement.
M. Loïc Hervé. C’est la vie réelle !
Mme Angèle Préville. La vie réelle, c’est en effet toute la richesse que nous avons : des élus qui s’investissent, qui sont bien souvent à la retraite et qui peuvent consacrer du temps à la commune et être présents. Or, si l’on transfère la compétence, nous perdrons tout cela. Cette organisation est précieuse : elle nous permet de faire de grosses économies et d’avoir un service immédiat.
Mme le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Angèle Préville. S’il y a une fuite dans la nuit, ils interviennent immédiatement, ce qui n’est pas le cas dans d’autres communes.
Mme le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. J’ai aussi le mérite de la cohérence, cher Jean-Pierre Decool : j’ai été présidente de l’association des maires de mon département des Hautes-Pyrénées en 2014 et j’ai toujours milité pour que la compétence eau et assainissement reste optionnelle.
Je reste sur cette position parce que tout ce que j’ai vu dans mon territoire me montre bien que c’est la seule solution pour que la compétence eau et assainissement soit gérée au mieux, dans la diversité de nos territoires.
Les communes n’ont pas attendu la loi NOTRe ni d’autres lois pour mutualiser sur des sujets d’intérêt général : elles l’ont fait pour l’eau ou pour les déchets, par exemple. (Marques d’approbation sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Elles n’ont pas attendu : des syndicats existent, qui fonctionnent bien. Pourquoi vouloir tout changer plutôt que de laisser tout simplement les communes faire comme elles l’entendent ? Et cela vaut aussi pour les intercommunalités, dont certaines n’ont aucune envie de prendre cette compétence ; elles le font parfois à contrecœur.
Dans mon département, la communauté d’agglomération regroupe deux grandes villes et une multitude de toutes petites communes. Elle n’avait aucune envie de prendre cette compétence et les petites communes du pays de Lourdes, qui ont dû la lui transférer, ne sont plus compétentes du tout.
Certaines communes ont fait des investissements, même avec de petits moyens ; d’autres ont fait un choix différent : cela relève de leur responsabilité.
Chacun a de bonnes raisons de faire ou de ne pas faire. Certaines communes, même sans obligation, ont fait le choix du transfert. Il faut laisser le choix aux communes, particulièrement en zone de montagne et partout où c’est nécessaire.
Je voterai cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains.)
M. Jean-Yves Roux. Bravo !
Mme le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Je voudrais remercier le groupe RDSE d’avoir une énième fois déposé une proposition de loi sur ce sujet. Mathieu Darnaud avait également déjà travaillé sur la question et bien d’autres de nos collègues aussi.
Je souscris à ce que tous les orateurs ont dit dans la discussion générale, sauf ceux qui sont contre ce texte : tout le monde n’habite pas Paris ou Orléans…
Je voudrais ajouter un élément qui n’a pas forcément été bien précisé, à savoir que les intercommunalités ne sont pas du tout demandeuses : il va leur falloir créer des services et engager des dépenses pour inventer des choses qui coûtent fort cher !
On a parlé des sécheresses, qui surviennent de plus en plus souvent. Il est donc essentiel de favoriser la création de syndicats, éventuellement départementaux, pour la production d’eau et non pour la distribution.
Enfin, je voudrais souligner que cette intercommunalisation entraînera naturellement une augmentation du prix du mètre cube.
Madame la ministre, les éleveurs sont vent debout contre votre projet. Ils sont nombreux, mais leurs bovins le sont plus encore. Savez-vous combien de litres d’eau boit une vache laitière chaque jour ? Plus de 100 litres, madame la ministre ! Compte tenu de la taille des exploitations, cela fait 10 mètres cubes par jour. Vous imaginez bien, avec l’augmentation du prix de l’eau, ce que cela donnerait pour l’élevage, qui est déjà dans un marasme complet.
Par conséquent, je soutiens cette proposition de loi que je voterai en applaudissant des deux mains. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE et INDEP.)
Mme le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.
M. Stéphane Sautarel. Je souhaite à mon tour apporter mon soutien total à cette proposition de loi. Je remercie ses auteurs et tous ceux qui, depuis de nombreuses années, se battent pour rétablir cette liberté locale.
Il ne s’agit pas seulement de conviction, même s’il en est bien évidemment question, mais aussi de la réalité de nos territoires et de la réalité locale. En effet, le rétablissement de la confiance dans nos territoires passe par le maintien de cette compétence à une échelle maîtrisée, de manière à permettre l’intervention des services mutualisés et des élus locaux dans une petite commune.
C’est aussi, et vous l’avez souligné, madame la ministre, une question grave : raison de plus pour la confier au bon sens des élus locaux et pour la leur laisser ! Ils ont démontré, dans l’exercice de cette liberté locale, leur capacité à agir et à travailler ensemble. À la question posée, on apporte une réponse qui ajoute une confusion entre la compétence et la gestion des ressources.
Bien évidemment, les élus locaux n’ont pas attendu un texte nouveau pour interconnecter des réseaux, pour travailler ensemble, pour partager des ressources et pour communiquer à leur échelle, c’est-à-dire à l’échelle la plus pertinente.
La mutualisation choisie est déjà en place. Quand il y a des besoins d’ingénierie complémentaires, ils sont mutualisés avec les agences techniques des départements, par exemple, de manière à apporter ce complément aux communes lorsque les besoins s’expriment à cette échelle. Il me semble donc que la liberté doit prévaloir.
Enfin, je conclurai en revenant sur le sujet des syndicats infracommunautaires. À une question que je vous ai posée, vous avez répondu qu’il n’était plus possible de constituer de syndicats infracommunautaires, ce qui est là aussi une limite à cette liberté locale, alors qu’elle serait la bienvenue, y compris du point de vue des communautés de communes. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDSE.)
Mme le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. À mon tour, je veux remercier le groupe RDSE pour cette initiative importante.
Eu égard à ce que j’ai entendu précédemment, et je souscris à bon nombre des propos qui ont été tenus, je voudrais rappeler qu’il faut se méfier des lois fourre-tout comme la loi NOTRe de 2015, mais aussi la loi Climat et résilience de 2021, dont nous aurons, ce soir, à corriger les erreurs en ce qui concerne l’objectif du zéro artificialisation nette.
Surtout, madame la ministre, il est extrêmement important de faire confiance aux élus locaux. Il faut, à l’image de ce que le Gouvernement veut promouvoir, notamment la décentralisation et la différenciation, que l’on puisse tenir compte des réalités des territoires : la mutualisation est un processus positif dans certains territoires, mais pas dans d’autres.
Je vais assez régulièrement au Grand-Bornand, à l’invitation de mon collègue Loïc Hervé,…
M. Loïc Hervé. Magnifique ! Le paradis sur terre !
M. Michel Canévet. … où je mesure, en parlant avec les élus locaux, combien il est indispensable que la compétence demeure à l’échelon local. À défaut, c’est toute l’économie générale qui serait remise en cause : l’eau sert pour l’alimentation en eau potable des habitants et des élevages, nombreux dans cette région, ainsi que pour la production de neige. Au regard de ces différents usages, la gestion locale prend ici tout son sens.
Il est important de faire confiance aux élus locaux, de s’appuyer sur leurs choix et de les respecter. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour explication de vote.
Mme Maryse Carrère. Laissez-moi retracer devant vous, de manière anecdotique, mais si peu, le parcours d’un permis de construire avant et après le transfert de la compétence eau et assainissement de la commune à une communauté d’agglomération.
Avant ce transfert, le pétitionnaire déposait en mairie son permis de construire, laquelle envoyait la demande d’avis au syndicat intercommunal d’eau potable, qui renvoyait son avis à la commune une semaine après.
Aujourd’hui, avec le transfert à la communauté d’agglomération, la commune reçoit le permis de construire, l’envoie à la communauté d’agglomération, qui l’envoie au syndicat, puis le syndicat rend son avis à la communauté d’agglomération qui le retransmet à la mairie. Ce parcours prend environ quatre semaines : c’est autant d’agents publics à recruter pour contrôler et pour examiner les dossiers et autant d’augmentation du coût d’instruction des dossiers, sans compter que l’on tombe dans la caricature en termes d’empilement des échelons !
M. François Bonhomme. C’est Kafka !
Mme Maryse Carrère. Au-delà des considérations financières et techniques et des difficultés que peut poser le transfert de cette compétence, on peut faire mieux en matière de simplification. Nos concitoyens risquent de ne plus rien y comprendre. (M. le rapporteur et M. Jean-Yves Roux applaudissent.)
Mme le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Qualité ou défaut, voilà maintenant quelques années que je siège dans cet hémicycle.
Je me souviens de ce qui a été dit au moment de l’examen de la loi NOTRe : à aucun moment la question de la gestion des sécheresses n’a été évoquée pour justifier la remontée de compétence obligatoire aux intercommunalités.
Priorité était alors donnée à la recherche de rentabilité, aux coupes drastiques dans les finances locales et aux économies. À l’époque, on entendait dire qu’il fallait « réduire par plus de dix le nombre de services dans notre pays et réduire l’émiettement » pour satisfaire ainsi l’exigence de la Cour des comptes et du Conseil d’État. À aucun moment les enjeux que nous évoquons aujourd’hui n’ont été mentionnés.
Nous avons de la chance, en quelque sorte, de tenir ce débat en mars 2023, après un été de sécheresse. Car si nous avions eu le même débat voilà un an, quels arguments auraient été avancés après l’été 2021, plutôt pluvieux par rapport à l’été dernier ?
Nous avons besoin d’un peu de sincérité. Le vrai débat qui a prévalu en son temps était celui des remontées de compétences pour satisfaire une exigence de rentabilité, y compris au travers de la casse de la gestion publique de l’eau dans nos territoires. Voilà ce qui a prévalu !
Je voudrais dire à ceux de nos collègues qui défendent aujourd’hui encore les positions d’hier – la constance en politique, c’est magnifique ! – que le temps nous apprend que faire la loi, c’est exigeant ; l’évaluer, c’est indispensable ; savoir la réécrire quand elle ne répond pas aux attentes de la population et des territoires, c’est une exigence démocratique ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, RDSE, UC et Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Arnaud. Beaucoup a déjà été dit et je voudrais seulement apporter mon témoignage, madame la ministre, sur la situation de la communauté d’agglomération de Gap-Tallard-Durance, qui a basculé, par obligation et contre l’avis unanime des communes membres, vers la compétence intercommunale.
Je serai bref et me contenterai, si vous le permettez, d’inviter vos services, puisque visiblement ils ont beaucoup d’influence sur les choix politiques de votre ministère, à consulter le rapport de la chambre régionale des comptes qui évalue la situation de cette communauté d’agglomération entre 2017 et 2020. Cela permettra d’alimenter la réflexion de votre administration.
Un contentieux est en cours avec la direction générale des finances publiques (DGFiP). Certaines entreprises ne sont pas payées depuis trois ans. Les entreprises, les collectivités locales et les maires sont à feu et à sang, car ils ne comprennent pas ce qui se passe. Les travaux sont bloqués compte tenu de ces difficultés. J’ai cru comprendre que la situation était similaire dans le secteur de Tarbes.
Madame la ministre, je vous invite à organiser une mission flash, puisque vous les affectionnez tant. Je serai votre homme, si vous le souhaitez, pour la mener afin d’analyser au fond la situation.
Enfin, sans être trop long, je voudrais citer quelqu’un d’importance, selon qui, « dans la très grande majorité des cas, les territoires savent mieux ce qui est le plus pertinent pour eux ».
M. François Bonhomme. Du cirage !
M. Jean-Michel Arnaud. Il s’agit d’Emmanuel Macron, lors de la Conférence nationale des territoires, le 18 juillet 2017.
M. Loïc Hervé. Ici même !
M. Jean-Michel Arnaud. À défaut d’écouter le Sénat, même si vous l’avez fait tout à l’heure et durant de longues journées de manière constructive sur la question des retraites, écoutez au moins le Président de la République qui a su dire, lors de cette Conférence, des choses puissantes et utiles.
Mme le président. La parole est à M. Sebastien Pla, pour explication de vote.
M. Sebastien Pla. Permettez-moi d’évoquer l’expérience très douloureuse vécue par le maire d’une petite commune de 150 habitants.
Ce maire a très bien travaillé pendant dix ou quinze ans. Il a refait sa station d’épuration, réhabilité l’intégralité de son réseau, dont il a porté le taux de rendement à 98 %, réalisé les travaux nécessaires non seulement pour protéger la ressource, mais également pour prêter de l’eau à la commune voisine lorsqu’elle n’en avait pas.
Puis, un jour, patatras ! En 2018, l’intercommunalité a annoncé à ce maire qu’elle allait prendre la compétence de l’eau. Il a alors réalisé un audit de l’ensemble des communes de l’intercommunalité et découvert que les niveaux et les coûts de gestion de l’eau n’étaient pas les mêmes partout.
Certaines petites communes ont alors décidé d’appliquer la loi et de réunir une minorité de blocage, soit 25 % des communes membres représentant 20 % de la population, afin de s’opposer au transfert de la compétence. Le département, l’Agence de l’eau, les services de l’État, le préfet ont gentiment commencé à exercer un chantage et à leur dire qu’elles n’obtiendraient pas de subventions si elles ne transféraient pas la compétence eau à l’intercommunalité.
Ces communes ont alors saisi le tribunal administratif pour casser l’arrêté. Après rejet de leur demande en référé, elles ne se sont pas démontées et sont allées jusqu’au Conseil d’État, qui in fine leur a donné raison et a considéré que le transfert de la compétence eau de ces petites communes à l’intercommunalité était abusif.
Ce maire, élu pendant vingt ans à Duilhac-sous-Peyrepertuse, qui s’est battu pour conserver la compétence eau, c’est moi ! J’ai estimé qu’il n’était pas nécessaire de transférer cette compétence et que les services de l’État, en particulier les préfets de deux départements, l’Aude et les Pyrénées orientales, avaient fait un peu d’excès de zèle et abusé de leurs compétences.
Je voterai avec grand plaisir la proposition de loi qui nous est aujourd’hui soumise. Laissons un minimum de liberté à nos communes, sinon il va falloir que l’on ferme la porte et que l’on rende les clefs aux préfets. Est-ce ce que vous voulez ? Ce n’est pas la culture de la France, de la ruralité. Laissez les maires tranquilles et laissez-les gérer leurs compétences en proximité. (Applaudissements sur des travées des groupes SER et CRCE, ainsi que sur les travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.
M. Loïc Hervé. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, dans ce temple du girondisme qu’est le Sénat, là où on a la subsidiarité chevillée au corps, il est important de vous rappeler, madame la ministre, que si un certain nombre de communes n’ont pas encore transféré la compétence eau et/ou assainissement, c’est peut-être pour de bonnes raisons, des raisons objectives.
Il fut un temps où l’on pouvait être à la fois sénateur et président d’une intercommunalité. Cela a été mon cas pendant trois ans. Si les montagnards ont été nombreux à s’exprimer cet après-midi, c’est qu’ils ont des raisons hydrauliques, géographiques de s’opposer au transfert. Ce n’est pas vrai qu’en montagne, mais c’est particulièrement vrai dans ces régions.
Mme Cécile Cukierman. C’est vrai !
M. Loïc Hervé. La gestion syndicale ou communale de l’eau, parfois de l’assainissement, laquelle relève certaines fois de l’intercommunalité, y est le fruit de la volonté des conseils communautaires, dans le cadre d’un accord général.
Je vous le dis très sincèrement, madame la ministre, dans ce pays, comme on l’a encore vu hier lors de l’examen de la proposition de loi visant à adapter la défense extérieure contre l’incendie à la réalité des territoires ruraux, l’hypercentralisation et le pouvoir des technocrates se heurtent à la réalité d’élus locaux honnêtes, compétents, qui savent rendre un service public à des coûts raisonnables. Le refus de transférer la compétence eau n’est pas de l’égoïsme de leur part. Dans un certain nombre de territoires, ce transfert à l’intercommunalité va faire flamber les coûts !
Mme Cécile Cukierman. Bien sûr ! C’est ce qui s’est passé dans les agglomérations.
M. Loïc Hervé. C’est une perspective que nous devons combattre ! Ce n’est pas de la solidarité, madame la ministre. Il faudra l’assumer dans les territoires où ce n’est pas le cas…
Dans le territoire que je représente, la Haute-Savoie, il faut laisser cette compétence à l’échelon où les élus veulent la conserver.
Mme le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.
M. Cédric Vial. Je ne suis pas opposé au transfert de la compétence eau à l’intercommunalité ; je suis farouchement opposé au transfert obligatoire de la compétence eau à l’intercommunalité. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe SER.) Farouchement opposé !
J’y suis opposé pour deux raisons, madame la ministre. Je ne reviendrai pas sur les arguments qui ont déjà été avancés, mais la compétence eau et, dans une moindre mesure, la compétence assainissement forment l’ADN de nos territoires, de nos communes. La compétence eau est exercée par l’ensemble des communes de France. C’est le point commun entre elles. C’est même souvent sur cette base que certaines d’entre elles ont été créées ou assemblées voilà quelques années.
Je ne connais pas un élu, madame la ministre, pas un maire qui se désintéresse de la gestion de l’eau dans sa commune. Pas un ! C’est probablement la compétence la plus importante exercée par nos élus locaux. Ils ont développé une connaissance de ces réseaux à nulle autre pareille, ainsi que des compétences techniques et d’adaptabilité en matière de gestion de ces réseaux avec lesquelles aucune société privée, aucun service technique mis en place dans les intercommunalités ne sauraient rivaliser.
Nous sommes ici en train de modifier la nature de l’intercommunalité. D’un point de vue sémantique, le mot « intercommunalité » veut dire « entre les communes ». Cela signifie que les communes décident entre elles des compétences qu’elles doivent transférer. Quand le Gouvernement décide du transfert obligatoire de la commune à l’intercommunalité, il modifie la nature même de l’intercommunalité. Il crée un échelon de collectivité territoriale qui n’est pas celui que l’on souhaite. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)
Mme le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour explication de vote.
Mme Frédérique Espagnac. Madame la ministre, je serai aujourd’hui le porte-voix des élus de la montagne, dont certains ont déjà pris la parole aujourd’hui dans cet hémicycle.
Nous avons collecté les témoignages d’un certain nombre d’élus de la montagne, de tous les massifs, que nous vous avons remis.
Loin de justifier leur opposition au transfert obligatoire par le seul désir de conserver à l’échelon communal une compétence supplémentaire, les élus locaux avancent des arguments de fond. Ainsi, ils insistent sur l’importance de conserver une gestion de proximité des réseaux d’eau et d’assainissement dans les territoires où l’habitat est dispersé et où la densité de population au kilomètre carré est faible.
Au quotidien, l’entretien des réseaux est assuré par les agents techniques, mais aussi, souvent, par des élus bénévoles, comme cela a été dit. Élus et techniciens ont acquis une connaissance des réseaux et une réactivité qui permettent d’assurer un service de qualité à un faible coût pour les usagers.
Le transfert de la compétence à l’intercommunalité suscite des interrogations sur la capacité des agents de la communauté de communes à assurer les travaux de surveillance et d’entretien, ainsi que la gestion des pannes, sachant qu’il faut souvent plus d’une heure en temps normal pour se rendre au siège de la communauté de communes et que les déplacements sont très difficiles, parfois impossibles, en hiver. Les usagers devront également se déplacer pour tous les litiges ou toutes les questions.
À long terme, la perte d’expertise des techniciens et des élus communaux et l’absence de transmission de cette expertise conduiront à dégrader encore plus le service aux usagers.
Il ressort par ailleurs de l’ensemble des études préalables et des témoignages recueillis une augmentation des prix de l’eau, liée notamment à l’harmonisation des prix à l’échelon intercommunal et au surcoût en équipements et en masse salariale qu’entraîne une gestion intercommunale. Les conséquences financières du transfert de la compétence ne sont pas négligeables. Ces études concluent à une forte augmentation des prix de l’eau difficilement supportable, surtout en période d’inflation, pour les ménages à faible revenu et pour les agriculteurs montagnards, très dépendants de l’eau et déjà économiquement fragilisés.
Les élus de montagne s’inquiètent aussi de la gouvernance dans la gestion des compétences eau et assainissement dans les intercommunalités où les communes de montagne ne sont pas majoritaires et où les spécificités de leurs problématiques ne sont pas prises en compte ni même parfois comprises.
Madame la ministre, vous avez évoqué les travaux nécessaires.
Mme le président. Il faut conclure, chère collègue !
Mme Frédérique Espagnac. Je rappelle que les subventions ont été asséchées par les agences de l’eau, lesquelles sont malheureusement elles-mêmes ponctionnées par l’État.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Je remarque que les bonnes lois portent en principe le nom de ceux qui les ont inspirées ou portées. Je pense à la loi Malraux, à la loi Barnier ou encore à la loi Chevènement. Quand les lois n’ont pas de nom, c’est un peu plus compliqué. Ainsi, la loi NOTRe n’a ni père ni mère, même si Mme Lebranchu l’a défendue ici. (Sourires.)
Les membres de notre groupe, dont Jacques Mézard était alors le président, ont combattu cette loi. Ils ont voté contre ou se sont abstenus. Ils poursuivent aujourd’hui ce combat avec la proposition de loi de Jean-Yves Roux qui vise à modifier la loi NOTRe, sur laquelle d’aucuns ont fondé beaucoup d’espoir. Or il est assez décevant de voir le résultat !
Sur la compétence eau, je suis tout à fait d’accord avec ce qui a été dit. Avec cette proposition de loi, nous essayons modestement de rebrancher ce que Mme Lebranchu a débranché ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains, ainsi que sur les travées du groupe CRCE.)
Mme le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je vais tout à fait dans le sens de cette proposition de loi : laissons les maires faire ce qu’ils souhaitent. L’intercommunalité peut parfois être un bon projet, mais laissons les communes décider entre elles si elles veulent gérer seules ou dans le cadre d’un syndicat ou d’une intercommunalité. Écoutons les élus, ne décidons pas à leur place. Comme cela a été dit, ils connaissent souvent très bien les réseaux et leurs ressources en eau, qu’ils savent gérer.
Écoutons les élus qui veulent modifier la loi NOTRe ; ils sont très nombreux dans nos territoires ruraux.
Je voterai bien évidemment cette proposition de loi.
Mme le président. Je vais mettre aux voix l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi.
Je rappelle que le vote sur l’article unique vaudra vote sur l’ensemble de la proposition de loi.
Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’article unique de la proposition de loi.
J’ai été saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Union Centriste et, l’autre, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 255 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 329 |
Pour l’adoption | 259 |
Contre | 70 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, UC, Les Républicains et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
8
Fraudes en matière artistique
Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Mme le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi portant réforme de la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique, présentée par M. Bernard Fialaire et plusieurs de ses collègues (proposition n° 177, texte de la commission n° 403, rapport n° 402).
Dans la discussion générale, la parole est à M. Bernard Fialaire, auteur de la proposition de loi et rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Bernard Fialaire, auteur de la proposition de loi et rapporteur de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, faux Poussin, faux Cranach, faux Miro, faux Picasso, faux Chagall, fausses antiquités, faux meubles Boulle ou faux sièges XVIIIe : les dernières années ont été marquées par la révélation de nombreuses affaires de faux.
Si le phénomène des fraudes artistiques n’est pas nouveau, il semble aujourd’hui en pleine expansion. La hausse de la demande, l’explosion des prix sur le marché de l’art et l’essor de la vente d’art en ligne contribuent sans doute très largement à doper et à faciliter ce type d’escroqueries.
Aucune forme d’art n’est épargnée et la nature des fraudes se diversifie. Loin de se réduire à la fabrication de fausses œuvres d’art, ces fraudes prennent aussi la forme de faux certificats attestant d’une fausse authenticité, mais aussi, de plus en plus, d’une fausse provenance.
L’office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC), que nous avons reçu en audition, n’a pas caché l’intérêt croissant des organisations criminelles à l’échelon mondial pour cette forme de trafic. Il est donc important que nous disposions d’outils efficaces pour prévenir et réprimer ce type d’infractions.
Le problème, c’est que le seul texte de nature législative dont nous disposons en France pour réprimer spécifiquement les fraudes artistiques est un texte daté, d’application limitée et aux effets peu dissuasifs. Il s’agit de la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique, plus connue sous le nom de loi Bardoux.
Son champ d’application ne correspond plus à la diversité des œuvres d’art que l’on trouve aujourd’hui sur le marché et, par conséquent, à la diversité des faux. Il concerne uniquement les catégories d’œuvres d’art en vogue à la Belle Époque – peinture, sculpture, dessin, gravure, musique – et laisse de côté les faux manuscrits, fausses photographies, faux meubles ou faux objets de design, ainsi que les œuvres d’art numériques, qui soulèvent de nombreuses difficultés en matière de respect des droits de la propriété intellectuelle.
Au sein de ces catégories déjà très limitées, la loi Bardoux ne vise que les faux qui correspondent à des œuvres authentiques qui ne sont pas encore tombées dans le domaine public. Elle n’est donc pas applicable aux faux qui concernent des œuvres anciennes, en dépit du nombre important d’affaires en la matière.
Enfin, le texte en vigueur ne s’intéresse qu’aux faux revêtus d’une signature apocryphe. Il exclut donc tous les faux sans signature, à l’instar des faux « à la manière de », ainsi que tous les faux sans auteur identifié, dont relèvent pourtant l’essentiel des arts premiers, des antiquités, de l’art médiéval, de l’art islamique, des arts asiatiques ou des arts appliqués.
À cela s’ajoute le fait que les peines prévues par la loi Bardoux ne sont pas assez sévères pour être dissuasives. Elles sont de deux ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. Il n’est en outre pas possible de les alourdir, quelle que soit la circonstance dans laquelle l’infraction est commise.
Il y a bien un autre texte spécifique aux fraudes artistiques : le décret Marcus, datant de 1981, qui vise à réprimer les tromperies sur l’authenticité d’une œuvre d’art et d’un objet de collection. Néanmoins, ce texte ne s’applique qu’aux transactions : il permet de sanctionner les seuls vendeurs contrevenants d’une amende d’un montant maximal de 1 500 euros.
Il est vrai que plusieurs infractions de droit commun peuvent être utilisées pour poursuivre les auteurs de fraudes artistiques. Je pense en particulier aux délits de contrefaçon, d’escroquerie, de tromperie ou de faux et usage de faux, qui sont beaucoup plus lourdement sanctionnés. Mais, comme aucun de ces délits n’est propre au marché de l’art, leur champ d’application n’est pas parfaitement adapté pour assurer la répression des fraudes artistiques dans leur globalité.
La caractérisation des faits se révèle complexe pour certaines natures de faux ou dans certaines circonstances, notamment lorsque le faux n’a pas fait l’objet d’une quelconque transaction.
C’est pour combler les insuffisances du cadre juridique en vigueur que j’ai déposé, en décembre dernier, avec mes collègues du groupe RDSE, la proposition de loi dont nous débattons ce soir portant réforme de la loi Bardoux.
Nous nous sommes appuyés sur les différentes réflexions conduites sur le sujet au cours des dernières années. La Cour de cassation a notamment consacré un colloque à ce sujet en 2017 et l’Institut Art et Droit, une association de réflexion réunissant juristes et acteurs du monde de l’art, a mis en place un groupe de travail à compter de 2018. Le résultat de ses travaux a été présenté lors d’un colloque en mars 2022 et a inspiré notre proposition de loi.
Notre texte propose la création d’une nouvelle infraction pénale dans le code du patrimoine, destinée à remplacer celle qui est prévue par la loi Bardoux. Afin de mieux appréhender la diversité des phénomènes de fraudes artistiques, nous avons décidé de faire porter la matérialité de l’infraction non plus sur le nom ou la personnalité de l’artiste, comme le prévoit la loi Bardoux, mais sur les atteintes portées aux œuvres d’art elles-mêmes, quelle que soit la catégorie dont elles relèvent et que l’auteur de l’œuvre authentique soit ou non identifié ou identifiable.
C’est la raison pour laquelle le texte, tel qu’il a été déposé, prévoit de sanctionner la réalisation, la présentation, la diffusion ou la transmission, à titre gratuit ou onéreux, de tout bien artistique ou objet de collection qui serait, par quelque moyen que ce soit, affecté d’une altération de la vérité sur l’identité de son créateur, sa provenance, sa datation, son état ou toute autre caractéristique essentielle, et ce sous réserve qu’elle ait été faite en pleine connaissance de cause.
Afin d’améliorer la prévention et la répression des fraudes artistiques, nous avons veillé à durcir suffisamment l’échelle des peines. À titre principal, nous avons proposé d’aligner celles-ci sur celles qui sont applicables en matière d’escroquerie, de recel ou de blanchiment, soit cinq ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende.
Nous avons proposé qu’elles puissent être alourdies à sept ans d’emprisonnement et 750 000 euros d’amende lorsque le délit est commis par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteurs ou de complices ou lorsqu’il est commis de manière habituelle. Nous avons prévu enfin qu’elles passent à dix ans d’emprisonnement et 1 million d’euros d’amende lorsque les faits sont commis en bande organisée.
À titre de peine complémentaire, notre texte autorise la confiscation du bien ou de l’objet saisi ou sa remise au plaignant. Elle rend également possible cette confiscation ou cette remise en cas de relaxe ou de non-lieu, lorsqu’il est établi, à l’issue de la procédure judiciaire, que le bien ou l’objet saisi est affecté d’une altération de la vérité. Ces dispositions ne changent pas le droit existant.
Comme la création de cette nouvelle infraction rend obsolètes les dispositions de la loi Bardoux, l’article 2 l’abroge et opère les coordinations afférentes dans le code général de la propriété des personnes publiques, seul texte de valeur législative au sein duquel cette loi est mentionnée.
Maintenant que je vous ai exposé les raisons qui nous ont amenés à déposer cette proposition de loi, permettez-moi de vous présenter la position de la commission de la culture sur ce texte.
La proposition de loi lui paraît répondre à une véritable attente, exprimée aussi bien par les artistes ou leurs ayants droit, que par les professionnels du marché de l’art, les praticiens du droit et les services enquêteurs. Le procureur général près la Cour de cassation, Jean-Claude Marin, n’avait-il pas lui-même appelé, en 2017, à repenser intégralement le délit même de fraude artistique ?
Ces fraudes ne portent pas seulement atteinte à des intérêts privés, ceux des acquéreurs lésés, ceux des artistes dont les droits sont bafoués, elles érodent également la confiance dans le marché de l’art et les institutions patrimoniales et constituent, finalement, une menace pour la création.
La commission est donc convaincue qu’une réforme de la loi Bardoux est indispensable afin d’améliorer la protection des acquéreurs et le respect des droits des artistes, de restaurer la crédibilité du marché de l’art et d’accroître la transparence et la fiabilité dans ce secteur.
Le fait que la proposition de loi prévoie de réprimer les atteintes portées aux œuvres d’art elles-mêmes plutôt que de chercher à réparer le seul préjudice subi par les acquéreurs ou les auteurs des œuvres authentiques, comme dans la loi Bardoux, présente à ses yeux un double avantage.
D’une part, elle permet de ne plus conditionner l’infraction ni à la nécessaire identification d’un artiste ni à celle d’une transaction ou d’un cadre contractuel ; d’autre part, elle revêt un caractère hautement symbolique en ce qu’elle est une manière d’affirmer que les œuvres d’art ne sont pas assimilables à de simples marchandises, mais qu’elles constituent, au contraire, un bien commun à tous.
La création d’une infraction spécifique aux différents types de fraudes artistiques envoie un signal fort aux auteurs de ces fraudes sur le caractère hautement répréhensible de leurs actions.
La proposition de loi permet de corriger les principales lacunes de la loi Bardoux.
Elle élargit le périmètre de l’infraction aux falsifications affectant l’ensemble des œuvres d’art, quel que soit leur support, sans la restreindre à certaines catégories d’œuvres particulières ni distinguer entre les œuvres selon qu’elles sont encore ou non couvertes par les droits patrimoniaux de l’auteur authentique.
Elle étend l’infraction aux falsifications relatives à la datation, l’état ou la provenance d’une œuvre d’art, sans la limiter aux seules falsifications liées à la signature ou à la personnalité de l’artiste.
Elle alourdit considérablement le régime des peines et rend possible leur aggravation dans certaines circonstances, tout en restant dans une échelle comparable à ce qui est prévu en matière d’escroquerie, de recel ou de blanchiment. Ce niveau apparaît cohérent compte tenu de l’implication croissante des réseaux criminels en matière de trafic d’œuvres d’art.
La commission a aussi souhaité clarifier la rédaction de certains aspects de la proposition de loi pour garantir son caractère pleinement opérationnel.
Les auditions ont en effet mis en évidence un certain nombre d’ambiguïtés de la rédaction initiale, incompatibles avec l’exigence de précision imposée par la matière pénale ou susceptibles de nuire à la qualification des faits.
Je pense ainsi à l’emploi de la notion de « bien artistique », jugé trop risqué dans la mesure où aucun code ni texte ne la définit ni ne l’utilise. Je pense aussi à la notion d’« altération de la vérité » employée dans le cadre du délit de faux et usage de faux, qui pourrait se révéler inopérante en matière artistique tant la vérité est souvent difficile à établir en ce domaine, comme en témoignent les fréquentes querelles entre experts.
Notre objectif n’est ni d’empêcher à l’avenir les experts d’émettre une opinion ni d’entraver la liberté de création des artistes en rendant impossible la pratique de la copie, du plagiat, de la parodie ou du détournement d’œuvre d’art dès lors qu’il n’y a pas d’intention de tromper autrui en faisant passer l’œuvre ainsi créée pour ce qu’elle n’est pas.
La commission a décidé de recentrer l’infraction sur les différents types de comportements frauduleux destinés à tromper autrui sur et autour de l’œuvre d’art.
La définition de l’infraction a été totalement revue et distingue désormais quatre hypothèses.
La première hypothèse est celle de la réalisation ou de la modification d’une œuvre d’art ou d’un objet de collection dans l’intention de tromper autrui sur l’identité de son créateur, son origine, sa datation, sa nature ou sa composition. Cette définition reprend les éléments rendus obligatoires par le décret Marcus sur les certificats d’authenticité délivrés par les vendeurs à l’occasion des transactions. Elle permet de sanctionner l’auteur ou le commanditaire du faux proprement dit.
La deuxième hypothèse est celle de la présentation, de la diffusion ou de la transmission, à titre gratuit ou onéreux, d’un faux en toute connaissance de son caractère trompeur et sans rétablir la vérité à son sujet. Elle vise à sanctionner le receleur.
La troisième hypothèse est celle de la présentation, de la diffusion ou de la transmission d’une œuvre ou d’un objet authentique en mentant sur l’identité de son auteur, son origine, sa datation, sa nature ou sa composition dans l’intention de tromper autrui. Elle vise à sanctionner l’escroquerie sur l’authenticité de l’œuvre, même en l’absence de remise de fonds.
La dernière hypothèse est celle de la présentation, de la diffusion ou de la transmission d’une œuvre ou d’un objet en lui inventant une fausse provenance. Elle vise à sanctionner l’escroquerie sur la provenance de l’œuvre ou de l’objet, peu importe que celui-ci soit authentique ou faux.
La commission s’est également attachée à clarifier la rédaction des dispositions destinées à permettre au juge de mettre hors circuit les œuvres et objets qui seraient reconnus comme des faux.
Les auditions ont révélé à quel point cette mise hors circuit constitue une question complexe. À la fois, il est à n’en pas douter essentiel que les faux artistiques soient détruits ou retirés par quelque moyen que ce soit pour éviter qu’ils ne reviennent tôt ou tard sur le marché, mais, en même temps, force est de reconnaître que la question du faux n’est pas totalement binaire : comment être certain qu’une œuvre constitue un faux, en dehors des faux grossiers, par exemple ceux qui ont manifestement été réalisés après la mort de l’artiste qui en serait prétendument l’auteur ? Peut-on considérer qu’une œuvre d’atelier signée de la main du maître est un faux ?
Est-il possible de porter atteinte au droit de propriété, garanti par la Constitution, en confisquant une œuvre lorsque celle-ci appartient à un propriétaire de bonne foi ? C’est cette question qui a conduit en 2021 la Cour de cassation, dans une affaire dite Chagall, à confirmer la décision de la cour d’appel qui avait ordonné l’apposition de la mention « Reproduction » sur une œuvre contrefaisante avant sa restitution à un propriétaire, plutôt que de demander sa destruction. Cette décision suscite l’incompréhension des représentants des artistes au regard des atteintes aux droits privatifs de l’auteur. Elle illustre bien toute la difficulté de cette question.
La commission a donc souhaité mettre à la disposition du juge un panel d’outils pour écarter définitivement les faux des circuits commerciaux : la confiscation de l’œuvre ou de l’objet, sa destruction ou sa remise à l’artiste victime de la fraude ou à ses ayants droit.
Sur ma proposition, la commission a choisi de ne pas faire mention du marquage, de peur que le juge ne retienne systématiquement cette option qui, pour être moins attentatoire au droit de propriété, n’apporte aucune garantie réelle d’un retrait définitif de l’œuvre ou de l’objet du marché.
Pour autant, la commission n’a pas souhaité imposer au juge le retrait systématique des œuvres du marché. Il ne s’agit que d’options à sa disposition. La rédaction retenue lui laisse la possibilité, en fonction des circonstances d’espèce, d’ordonner l’une ou l’autre de ces solutions, ou de n’en rien faire, parce que toutes les œuvres ou objets litigieux ne sont pas nécessairement des faux intégraux. Certains peuvent revenir sur le marché dès lors que leurs véritables caractéristiques sont rétablies.
Pour compléter ce dispositif, la commission a décidé de mettre en place un registre des fraudes artistiques, sur lequel auraient vocation à être inscrits tous les faux reconnus comme tels qui ne seraient pas détruits. Ce registre est très largement inspiré du Thésaurus de recherche électronique et d’imagerie en matière artistique (Treima) développé par Interpol afin de recenser les œuvres d’art volées. Le caractère mondial du marché de l’art nécessiterait qu’une telle base soit, à terme, gérée à l’échelon international. Nous comptons sur le Gouvernement pour en convaincre nos partenaires.
Pour finir, la commission a très largement complété le dispositif de la proposition de loi en matière de sanctions. Elle a prévu les peines applicables en cas de commission des faits par une personne morale. Elle a élargi le champ des circonstances aggravantes, pour répondre à l’émotion suscitée par plusieurs affaires récentes, comme celle des faux meubles de Versailles, qui a d’autant plus choqué l’opinion que son auteur était un professionnel extrêmement reconnu et qu’il a fait du tort à l’une de nos plus prestigieuses institutions patrimoniales.
Il nous a donc semblé justifié d’alourdir également les peines applicables lorsque les faits portent préjudice à un établissement public relevant de l’État ou d’une collectivité territoriale ou lorsqu’ils sont commis par des professionnels du marché de l’art.
Enfin, par cohérence avec l’introduction de cette seconde circonstance aggravante, nous avons également autorisé le juge à prononcer, à titre de peine complémentaire, une interdiction d’exercice à titre temporaire ou définitif de l’activité professionnelle dans le cadre de laquelle, ou à l’occasion de laquelle, l’infraction a été commise. Il s’agit d’une peine complémentaire fréquemment prévue pour ce type de délits : on la retrouve, par exemple, en matière de tromperie.
L’ensemble des améliorations apportées par la commission au texte initial avait pour but de garantir une meilleure répression des fraudes artistiques, dans le souci évident d’en améliorer aussi la prévention.
Nous espérons que la suite de la discussion parlementaire permettra encore d’enrichir ce texte.
Nous attendons beaucoup des conclusions de la mission sur les faux artistiques conduite par le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, qui devraient être rendues en juillet prochain. Nous avons largement échangé avec le président du Conseil supérieur, ainsi qu’avec les responsables de cette mission.
Nous savons qu’une partie de leur réflexion porte sur les différentes procédures judiciaires qui pourraient être mises en place pour lutter contre la prolifération des faux sur le marché. Ils envisagent notamment d’ouvrir une voie d’action civile, complémentaire à l’action pénale que nous proposons. Cela existe en matière de contrefaçon. Je pense, par exemple, à la procédure jugée très efficace de saisie-contrefaçon. Ils voudraient également proposer des solutions afin de mieux encadrer l’activité des plateformes en ligne.
Nous considérons que ces pistes pourraient donner un intérêt supplémentaire à la présente proposition de loi, en offrant des possibilités complémentaires d’action à l’encontre des faux. Le besoin de moyens d’actions judiciaires rapides pour intervenir contre les pratiques frauduleuses de certaines galeries éphémères ou de plateformes en ligne se fait de plus en plus sentir.
Au-delà de la réforme de la loi Bardoux, il nous paraît indispensable de mieux sensibiliser les services de la police et de la justice aux spécificités des infractions qui peuvent être commises dans le domaine de l’art et de renforcer les moyens mis à la disposition de ces services pour que la lutte contre les fraudes artistiques gagne en efficacité.
J’espère, madame la ministre, que le Gouvernement en tiendra compte et prendra les mesures appropriées une fois cette réforme adoptée. (Applaudissements.)
Mme le président. La parole est à Mme la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord de remercier l’ensemble du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen d’avoir mis ce texte à l’ordre du jour et de féliciter le rapporteur pour son travail précis et solide.
Cette proposition de loi permet d’aborder un défi majeur pour l’ensemble du secteur du marché de l’art : la lutte contre les faux artistiques.
Qu’est-ce qu’un faux artistique ? Vous l’avez dit, au sens large, il s’agit d’un objet destiné à passer pour autre chose que ce qu’il est réellement. Le but est de tromper l’acheteur en faisant passer cet objet pour une œuvre authentique.
Si ces fraudes ne constituent pas un phénomène nouveau, on constate ces dernières années une multiplication sans précédent des transactions illicites et l’apparition de nouvelles formes de falsifications d’œuvres d’art, notamment liées au développement des plateformes en ligne.
Je souhaite saluer le travail mené par l’Office central de lutte contre le trafic des biens culturels, compétent pour diligenter les enquêtes, y compris les plus complexes, et celui de la société des auteurs dans les arts graphiques et plastiques (ADAGP), qui contribue pleinement à la réflexion et à la sensibilisation sur ce sujet si important.
Les faux artistiques constituent en effet un véritable fléau, qui porte atteinte aux intérêts des professionnels du marché de l’art, mais aussi et surtout à ceux des acheteurs, des auteurs et de leurs ayants droit.
La lutte contre les faux artistiques trouve son fondement juridique dans la loi du 9 février 1895, dite loi Bardoux, du nom du sénateur qui en fut le principal artisan. Si plusieurs autres infractions de droit commun, comme la contrefaçon, l’escroquerie, le faux et usage de faux, permettent également de sanctionner les coupables de telles fraudes, ce texte apparaît aujourd’hui daté, car il présente des lacunes et n’est plus adapté au marché actuel de l’art.
Ces lacunes sont de plusieurs ordres. La liste des œuvres falsifiables est réduite aux seules œuvres de peinture, de sculpture, de dessin, de gravure et de musique. Elle ne permet pas d’appréhender la diversité des œuvres d’art d’aujourd’hui. Je pense à la photographie, aux arts appliqués, mais également à l’ensemble des nouvelles formes d’art numérique, dont les frontières ne cessent d’être repoussées, comme le montre le développement NFT (Non Fungible Tokens) ou « jetons non fongibles ».
Autre lacune, l’incrimination de fraude artistique est limitée aux seules œuvres « non tombées dans le domaine public », alors même que les œuvres anciennes suscitent une part très importante des affaires de faux. Enfin, les sanctions prévues par la loi Bardoux – deux ans d’emprisonnement, 75 000 euros d’amende – peuvent sembler peu dissuasives.
Je partage donc l’avis du rapporteur : oui, la loi Bardoux mérite d’être actualisée.
Le ministère de la culture en est pleinement conscient et le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA), placé sous l’égide de mon ministère, s’est emparé de ce sujet l’an dernier, confiant à MM. Tristan Azzi et Pierre Sirinelli, deux éminents spécialistes, une mission visant à évaluer l’opportunité d’une évolution du cadre juridique actuel pour mieux définir le faux en art, faciliter sa détection et renforcer sa répression. Les résultats de cette mission seront connus définitivement en juillet prochain.
Le présent texte propose plusieurs évolutions de la loi pour répondre à cette forte attente d’actualisation et la rendre plus opérationnelle.
Il prévoit notamment l’élargissement du périmètre de l’infraction aux falsifications affectant l’ensemble des biens artistiques et objets de collection, afin de protéger l’ensemble des supports ; l’alourdissement des peines, afin de les aligner sur celles applicables en matière d’escroquerie ; ou encore l’extension de l’infraction aux falsifications relatives à la datation, l’état ou la provenance d’une œuvre d’art, pour ne pas la limiter plus aux seules falsifications liées à la signature ou à la personnalité de l’artiste.
Plusieurs évolutions ont été apportées lors de l’examen du texte en commission la semaine dernière, afin de prendre en compte les échanges et remarques formulées au cours des auditions.
Ces dispositions vont dans le bon sens. Nous sommes pleinement convaincus de la nécessité de faire évoluer cette loi pour renforcer la lutte contre la fraude en matière artistique.
Nous en sommes ici à la première étape, avec cet examen en première lecture. Il est important, comme l’a indiqué le rapporteur, d’ajuster le texte et de l’enrichir au cours des prochaines étapes de la navette parlementaire, afin de prendre en compte les conclusions, très attendues, de la mission sur les faux artistiques lancée par le CSPLA.
Soyez en tout cas assurés de la disponibilité de mes équipes et de tous les services concernés du ministère de la culture pour travailler avec vous sur ce sujet dans les prochaines semaines.
Avant de conclure, je souhaite profiter de cette occasion pour revenir sur les inquiétudes exprimées ces derniers jours par un certain nombre d’acteurs du marché de l’art français, et par de nombreux artistes, à propos de l’impact d’une directive européenne sur la fiscalité des œuvres d’art en France. Je sais que c’est un sujet que vous suivez au sein de votre commission et je souhaitais vous apporter quelques éléments d’information.
Aujourd’hui, on ne le sait pas assez, le marché de l’art fonctionne avec deux dispositifs de TVA dérogatoires : un taux réduit, de 5,5 %, à l’achat d’œuvres et, à la revente, un taux de 20 % ne s’appliquant qu’à la marge faite par le marchand.
La directive européenne d’avril 2022 interdit de cumuler deux dispositifs dérogatoires différents. Dès lors, quelles sont les possibilités ?
Si nous voulons maintenir un taux de TVA sur la seule marge à la revente, il faut rétablir à 20 % le taux à l’achat, ce qui rognerait les marges des galeristes. Si nous maintenons à 5,5 % le taux à l’achat, nous ne pouvons plus appliquer la TVA sur la seule marge à la revente. Les œuvres risqueraient donc de se renchérir en France.
Mais la France peut décider que les œuvres d’art relèvent du taux réduit de bout en bout. Le taux de 5,5 % s’appliquerait alors à l’achat et à la revente – sur le prix global. Cela maintient un système quasiment équivalent à l’actuel, puisqu’appliquer un taux de 5,5 % sur le prix total revient à peu près au même que d’appliquer un taux de 20 % sur la marge.
Des expertises et simulations sont encore nécessaires pour avancer vers cette possibilité. C’est pourquoi, avec Gabriel Attal, nous venons de lancer une concertation avec les professionnels du secteur, pour qu’une décision soit prise avant l’été. L’objectif est d’aboutir à une disposition qui sera inscrite dans le projet de loi de finances pour 2024, afin qu’elle soit examinée par le Parlement cet automne, ce qui permettra d’achever, d’ici à la fin de l’année 2023, la transposition de cette directive.
Soyez en tous cas assurés que la ministre de la culture que je suis, comme l’ensemble du Gouvernement, suit très attentivement ce dossier et demeure très attachée à la compétitivité et au dynamisme du marché de l’art français, qui représente 50 % du marché de l’art de l’Union européenne !
Vu le nombre de galeries internationales qui s’installent à Paris, le dynamisme de nos musées, le succès des foires et la vitalité de la scène de l’art contemporain de notre pays, la France est véritablement aujourd’hui au centre du marché européen. Elle doit le rester. Elle peut le rester. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
Mme le président. La parole est à Mme Sylvie Robert. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Sylvie Robert. Je commencerai par une question : connaissez-vous Mark A. Landis ? Sa vie, qualifiée de « hors du commun » outre-Atlantique, a été quasiment consacrée à une seule activité : réaliser de fausses œuvres d’art, en prenant appui sur les catalogues des musées américains. Mais là où l’histoire devient mordante, c’est qu’il n’agit pas ainsi dans le but de s’enrichir : il donne, gratuitement, ses faux aux musées qui, pendant plus de vingt ans, ne remarquent rien.
Finalement démasqué par un conservateur perspicace, il fera l’objet d’un documentaire, Le Faussaire, diffusé en 2015 au cinéma. Et, quand il est interrogé sur la tromperie à grande échelle qu’il a orchestrée, il a cette sentence déconcertante : « Je n’ai commis aucun crime ! » Il faut comprendre par là qu’il n’a pas bénéficié d’un enrichissement personnel.
Cette histoire romanesque témoigne de l’acuité de la présente proposition de loi et de la nécessité de mieux appréhender, culturellement et juridiquement, le faux en art. Car ce qui apparaît principal dans la défense de Mark A. Landis, en l’occurrence l’absence d’enrichissement personnel, n’est en réalité que secondaire ; ce qui est central, c’est la vaste duperie qui a abouti à ce que des institutions culturelles présentent au public pendant des années de fausses œuvres d’art.
En France, la loi Bardoux, accompagnée du décret Marcus du 3 mars 1981, semble désormais dépassée, obsolète pour traiter efficacement du faux. Il est évident qu’à la Belle Époque, et même il y a quarante ans, le faux en art ne revêtait pas les mêmes formes qu’aujourd’hui, devenues plus sophistiquées et plus étendues.
De manière analogue, le marché de l’art ne représentait pas autant qu’aujourd’hui un terrain de jeu pour la criminalité organisée et les divers trafics internationaux : le nombre de contrefaçons artistiques a été multiplié par deux entre 2017 et 2020. C’est pourquoi il est indispensable d’actualiser la loi pour mieux lutter contre les fraudes artistiques.
Mais par-delà la modernisation de notre arsenal législatif, la philosophie même de la proposition de loi est extrêmement contemporaine. Celle-ci ne se contente pas de viser les auteurs de l’infraction et la réparation des préjudices subis, elle tend surtout à protéger les œuvres d’art en tant que telles. Autrement dit, l’œuvre d’art, et la prévention des atteintes qui pourraient lui être portées, devient l’objet même de la proposition de loi. C’est un renversement de paradigme très intéressant et radicalement moderne dans son approche.
Ainsi, de nombreux questionnements se posent, de plus en plus, autour de l’œuvre et de sa vie. C’est particulièrement vrai dans la filière musicale, où l’une des conséquences du numérique – qui n’était pas la plus attendue – a été de redonner un élan, voire même parfois une existence, à des œuvres qui semblaient condamnées à l’oubli. En d’autres termes, il n’y a plus de parcours uniforme, linéaire pour une œuvre ; et, plus encore qu’auparavant, la vie d’une œuvre se trouve décorrélée de celle de son auteur – ce qui rend sa protection d’autant plus impérieuse.
D’autre part, le postulat de cette proposition de loi est aussi une déclinaison de l’exception culturelle, tant soutenue par la France : une œuvre d’art n’est aucunement un bien comme un autre et, à ce titre, elle doit disposer de protections spécifiques. C’est précisément ce raisonnement qui avait conduit la France et d’autres pays européens à créer un droit d’asile des œuvres en 2015 et 2016, lorsque les destructions et pillages d’œuvres et de monuments parfois plurimillénaires se multipliaient dans les territoires sous domination de l’État islamique.
Nous avions alors été nombreux, y compris sur ses travées, à nous émouvoir et nous révolter contre ce qui constituait un effacement méthodique de sociétés, de cultures, d’histoires, de croyances, d’imaginaires, en somme de vies et de faits qui sont constitutifs d’une certaine vérité historique et anthropologique.
La question de la vérité a été au cœur de nos riches échanges sur ce texte. S’il est aisé de s’accorder sur le principe que le faux est éminemment une altération de la vérité, il est beaucoup plus délicat d’apprécier cette altération en matière artistique. Non seulement, par essence, atteindre la vérité d’une œuvre, ou ne serait-ce qu’un pan de cette vérité, peut se révéler très compliqué, voire illusoire – ce que démontre magistralement Mohamed Mbougar Sarr dans son livre La plus secrète mémoire des hommes. Mais de plus, l’état des connaissances et des techniques nous oblige à l’humilité, notamment devant le développement des œuvres créées par l’intelligence artificielle. Des expériences ont déjà prouvé qu’avec le degré de technicité actuel de l’intelligence artificielle, les conservateurs et spécialistes de l’art peuvent se retrouver démunis pour distinguer une œuvre authentique et un faux façonné par une machine informatique.
Plutôt que de nous en remettre à la notion instable d’altération de la vérité, nous avons préféré caractériser précisément le faux et l’infraction qui s’y rattache, élargissant à cette occasion son spectre par rapport à la loi Bardoux, afin de renforcer l’effectivité et la portée du dispositif.
Enfin, j’aimerais évoquer une préoccupation majeure : la confiance. L’implication la plus dangereuse et déstabilisante du feuilleton Landis, et de tout faux qui circule de manière générale, c’est la défiance qui en résulte, aussi bien sur le marché de l’art que dans le rapport aux institutions culturelles.
Quoi qu’il en soit, madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi constitue un premier pas important pour moderniser notre corpus législatif. Nous devrons impérativement rester très vigilants face aux développements de l’art numérique, où les défauts de preuve d’authenticité et les risques de falsification sont, par définition, accrus. À n’en pas douter, comme dans beaucoup de secteurs, le numérique et l’intelligence artificielle réinterrogeront – et réinterrogent déjà ! – le faux artistique et nous amèneront sûrement, en tant que législateurs, à intervenir de nouveau.
Merci à Bernard Fialaire et à son groupe d’avoir déposé cette proposition de loi. Les auditions auxquelles j’ai assisté m’ont ouvert des perspectives infinies sur toutes les questions qui se posent aujourd’hui en matière de création artistique. J’espère que ce texte continuera son parcours à l’Assemblée nationale, après réception des conclusions du rapport demandé par le CSPLA, et que nous pourrons en débattre de nouveau ensemble. (Applaudissements.)
Mme le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il fallait une certaine intrépidité pour partir à l’assaut du vénérable édifice constitué par la loi Bardoux. Les premiers coups de pioche donnés, vous vous aperçûtes que ses fondations, encore bien solides, pouvaient expliquer la durabilité d’élévations que l’on pensait croulantes.
Avec l’humilité qui vous caractérise, vous reconnaissez que la proposition de loi que vous nous soumettez est encore imparfaite. Elle a néanmoins le mérite de définir le cadre utile d’un chantier de reconstruction. Il restera à M. le sénateur Agénor Bardoux bien d’autres mérites – dont celui d’avoir participé à la révision du texte de Salammbô.
La loi de 1895 intéresse le droit des contrats. Dans le domaine particulier du marché de l’art, elle apporte des garanties à l’acheteur en le préservant du dol, de l’escroquerie et de la falsification. Son objet n’est pas de protéger l’auteur ni son œuvre, mais de sanctionner les tromperies sur l’authenticité d’une œuvre pour donner à l’acquéreur une assurance de délivrance conforme.
Elle met en œuvre pour cela deux notions essentielles, l’intentionnalité de la fraude et l’authenticité de l’œuvre. À l’usage, ces deux principes sont parfois apparus d’établissement complexe : la question de l’authenticité recoupe souvent celle de la provenance et l’intentionnalité est quelquefois difficile à établir quand elle est l’enjeu de controverses académiques.
Le décret modifié du 3 mars 1981, dit décret Marcus, a tenté de corriger ce défaut en introduisant des gradations dans le degré de certitude de l’authentification. Les formules qu’il propose – « attribué à », « de l’école de », du « style »… – ont eu le mérite d’offrir au vendeur la possibilité de ne pas engager totalement sa responsabilité quand il estimait que l’authenticité pouvait être discutable.
Néanmoins, de nombreuses questions restaient pendantes, comme celle relative à la révision de la valeur d’une œuvre à la suite d’une nouvelle attribution. On sait que la Cour de cassation, par son deuxième arrêt Poussin, a considéré qu’elle n’était pas créatrice de qualités nouvelles, mais révélatrice de qualités préexistantes, ce qui permettait au vendeur de dénoncer le contrat.
Par ailleurs, la loi Bardoux était inspirée par une conception très académique des beaux-arts, qui fut rapidement dépassée par l’évolution de la pratique artistique. En 1913, Marcel Duchamp expose sa roue de bicyclette et, plus tard, sa fontaine, en posant la question : « Peut-on faire des œuvres qui ne soient pas d’art ? ». En l’occurrence, ce qu’interroge Marcel Duchamp, c’est le statut de l’artiste et de l’œuvre, et c’est dans ce questionnement que réside la démarche artistique. La notion d’authenticité n’a alors plus aucun sens.
Avec cet exemple est rapidement abordé le problème juridique complexe des relations entre la législation du patrimoine et celle de la propriété intellectuelle. L’auteur conserve des droits sur l’œuvre même après sa vente. Comment établir l’authenticité d’une œuvre que son auteur aurait reniée et qu’il aurait peut-être détruite ?
Monsieur le rapporteur, à plusieurs reprises dans cet hémicycle, notamment lors de la discussion sur les lois de restitution, vous avez exprimé vos interrogations d’ordre philosophique sur la valeur de la notion de propriété appliquée à une œuvre d’art. Dans l’exposé des motifs de votre proposition de loi, vous considérez que l’œuvre appartient d’abord à une culture avant d’appartenir à un individu.
L’abrogation de la loi Bardoux est alors pour vous un moyen de nous inciter à une réflexion plus profonde. Pour cette première pierre d’un édifice plus vaste, nous vous remercions chaleureusement. (Applaudissements.)
Mme le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi.
M. Pierre-Antoine Levi. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je ne sais exactement ce qu’est un faux. Je ne sais précisément ce qu’est un bien culturel. J’ignore la différence réelle entre un plagiat et un pastiche. Mais je sais reconnaître une œuvre d’art quand j’en vois une. Et je peux dire que ce texte en est une. Une œuvre d’art authentique. Une œuvre de dentelle, ou d’orfèvrerie juridique, pour filer la métaphore.
Car elle nous entraîne dans un univers de droit où chaque concept doit être bien pesé et où la subtilité le dispute à la finesse. Monsieur Fialaire, en tant qu’auteur et rapporteur de ce texte, vous me permettrez de vous dire : chapeau l’artiste !
Votre proposition réforme la loi Bardoux, du nom de l’honorable sénateur inamovible Agénor Bardoux, aïeul d’une personnalité chère à la famille politique dont je suis membre, à savoir l’ancien Président de la République Valéry Giscard d’Estaing.
En proposant ce texte en 1895, Agénor Bardoux avait réagi au scandale provoqué par une escroquerie artistique dont avait été victime Alexandre Dumas fils. Ce dernier avait acquis un tableau qui lui avait été vendu comme étant un Corot et qui était en réalité une œuvre de Paul Désiré Trouillebert…
Près de cent trente ans plus tard, les arnaques artistiques font toujours la une des gazettes : faux sièges de Marie-Antoinette acquis par le château de Versailles, fausse Vénus de Cranach achetée par le prince de Liechtenstein et, surtout, acquisition par le Louvre Abu Dhabi d’une stèle de Toutankhamon illégalement sortie d’Égypte en 2011.
Trois exemples qui montrent à quel point la fraude artistique est non seulement d’actualité, mais même en plein boom. Trois exemples qui montrent aussi à quel point elle peut être protéiforme.
Frauder, ce n’est pas seulement mentir sur l’authenticité d’une œuvre. Cela peut tout aussi bien être mentir sur son origine. Et cela peut concerner des objets de toute nature et de toute époque.
C’est cette extension du domaine de la fraude que ne couvre pas la loi Bardoux. Depuis 1895, la création artistique a changé, tout comme le marché de l’art et l’art des escrocs. Ce texte ne protégeait que les œuvres d’art classiques, telles que les peintures ou les sculptures, mais pas les photographies, les objets de design, et encore moins la vidéo et les NFT.
De plus, elle ne protège que les œuvres les plus récentes, c’est-à-dire celles qui ne sont pas encore tombées dans le domaine public. La loi Bardoux était dépassée depuis longtemps. À l’heure de la numérisation de l’art et de son commerce, sa survivance a presque quelque chose de poétique. Mais poésie ne rime pas toujours avec effectivité juridique…
Le principal apport du texte qui nous est proposé est d’élargir la répression de la fraude à la réalité contemporaine du phénomène, à l’ensemble des œuvres aujourd’hui concernées, signées ou non, contemporaines ou anciennes.
L’arsenal juridique dont nous disposons à côté de la loi Bardoux ne permet-il pas déjà de remédier à ses lacunes ? C’est là que l’on entre dans le byzantinisme. Le code pénal sanctionne bien les délits de contrefaçon, d’escroquerie, de tromperie et de faux et usage de faux. Mais le pénal n’est pas le civil. De même, le décret Marcus de 1981 ne permet de sanctionner que les vendeurs contrevenants. Les trous dans la raquette sont donc importants.
L’autre grand apport du texte est de revaloriser la peine encourue. La loi Bardoux n’est pas assez sévère : deux ans et 75 000 euros d’amende, sans modulation en fonction des circonstances, compte tenu de l’ampleur des trafics actuels, c’est très insuffisant. Nous ne pouvons que soutenir le renforcement substantiel de ces sanctions, qui sont alignées sur les infractions d’escroquerie, recel ou blanchiment. Cela portera la peine et l’amende à cinq ans et 350 000 euros pour les cas ordinaires et permettra de monter à dix ans de prison et 1 million d’euros d’amende quand les faits sont commis en bande organisée.
D’aucuns se sont exprimés pour regretter que ce texte soit présenté avant que le CSPLA, saisi sur le même sujet, ne rende ses conclusions. On peut le comprendre, mais il y aura toujours de bonnes raisons d’attendre… et le cadre juridique actuel a presque 130 ans !
De plus, les apports du CSPLA, qui semble travailler sur les procédures judiciaires qui permettraient de mieux lutter contre les faux sur le marché de l’art, seront sans doute parfaitement complémentaires avec le travail effectué sur la présente proposition de loi.
Un point, toutefois, me laisse perplexe, celui du devenir des faux. C’est une question passionnante, car elle interroge notre rapport à l’authenticité – et presque au réel.
Non seulement on ne peut jamais être sûrs qu’un faux en est bien un, mais, de plus, un faux peut être beau, un faux peut être une vraie œuvre d’art.
Face à cet épineux problème, monsieur le rapporteur, vous avez refusé la solution grossière de la destruction systématique. C’est sage ! Vous avez aussi refusé celle du marquage, au motif qu’un marquage peut toujours être escamoté.
Vous proposez donc la mise en place d’un registre des faux artistiques. C’est la solution qui nous semble la plus pertinente. Mais, parallèlement, vous déléguez au juge le soin d’apprécier ce qu’il devrait advenir du faux en fonction des circonstances de l’espèce. Comme trop souvent, le législateur se dessaisit.
Ne peut-on au moins utiliser notre compétence pour énumérer de manière restrictive les conditions dans lesquelles un faux devrait être détruit ou confisqué ?
Nonobstant cette interrogation, mes chers collègues, le groupe Union Centriste votera en faveur de ce texte. Puisse-t-il avoir la longévité de la loi Bardoux ! (Applaudissements.)
Mme le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique, dite loi Bardoux – j’ai découvert ce nom grâce à cette loi (Sourires.) – est un texte que son ancienneté pourrait d’ores et déjà condamner.
Si le faussaire s’est longtemps vu crédité d’une image romantique, mérite-t-il encore aujourd’hui ce qualificatif ? (Mme la ministre sourit.)
De ces génies d’autrefois aux délinquants de notre temps, il n’en demeure pas moins qu’à l’ancienneté de la réponse du droit doit être opposée la modernité des pratiques des faussaires.
C’est en cela que résident l’enjeu et l’objectif de la proposition de loi présentée par Bernard Fialaire et cosignée par les treize autres sénateurs du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Je rappelle que ce texte désuet, à l’application limitée, aux effets peu dissuasifs, inadapté aux enjeux contemporains du marché de l’art international, cristallise la frustration des ayants droit et professionnels du marché de l’art. Ces derniers sont depuis trop longtemps dans l’attente d’une actualisation des dispositions juridiques permettant de lutter contre les fraudes en matière artistique.
Afin de conserver à la liberté toute sa légitimité, j’appelle néanmoins l’attention sur la nécessité de veiller à ce que nos différents débats ne fassent pas entrer le texte dans une répression trop marquée.
Le monde de l’art a ses propres usages, ses propres traditions, et il n’est pas évident de se positionner de façon tranchée entre ce que le droit peut accepter et ce qu’il doit interdire.
La liberté de la création est essentielle à l’art. Elle est ce que la liberté d’expression est à la pensée.
Cet équilibre fragile entre la nécessité de protéger les œuvres contre leur exploitation frauduleuse et le principe intangible de liberté de création doit donc être recherché en priorité.
C’est ce que le groupe du RDSE a désiré atteindre, sous la plume de Bernard Fialaire et au travers de ce texte, en focalisant notamment la répression sur les atteintes portées aux œuvres d’art elles-mêmes, et non sur la seule protection de l’acheteur ni sur les seuls aspects contractuels.
Le faux artistique ne devrait-il pas être pensé comme une atteinte à la vérité – et de surcroît à l’intérêt général – plutôt que comme une atteinte à un intérêt particulier ?
À l’heure de la démocratisation et de l’internationalisation du marché de l’art et alors que la loi Bardoux se démarque par son caractère inadapté aux enjeux contemporains du marché international de l’art, il était important d’attacher un symbolisme marquant à la nouvelle infraction que crée cette proposition de loi portant réforme de la loi Bardoux.
Nous souhaitons ainsi affirmer que les œuvres d’art ne sont pas assimilables à de simples marchandises, mais qu’elles constituent un bien commun.
Ce bien commun pourrait s’étendre demain non plus aux seules catégories d’œuvres d’art et d’objets de collection en vogue à la Belle Époque, mais à toutes les nouvelles formes de création, d’aujourd’hui et du futur.
La fraude serait désormais étendue aux falsifications relatives à la datation, à l’état ou à la provenance de l’œuvre d’art et ne serait plus limitée aux seules falsifications liées à la signature ou à la personnalité de l’artiste.
Si la finalité est d’améliorer la protection des consommateurs, de restaurer la crédibilité du marché de l’art et d’accroître la transparence et la fiabilité dans ce domaine, reste la difficulté inhérente à l’art d’appréciation de l’altération de sa vérité, tant la vérité en matière artistique est souvent difficile à établir et sujette aux aléas des connaissances et des techniques.
Je finirai en soulignant le signal fort que cette proposition de loi adresse aux auteurs de fraudes artistiques sur le caractère hautement répréhensible de leurs actions.
Si la loi Bardoux se distingue par ses effets peu dissuasifs, l’alourdissement du régime des peines devrait contribuer à rendre toute sa crédibilité à notre marché de l’art – qui occupe le quatrième rang mondial – et à protéger les amateurs d’art contre la tromperie, tout en garantissant la liberté de création des artistes.
Le groupe du RDSE se félicite par ailleurs des modifications et enrichissements apportés par la commission. Il votera bien évidemment cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
Mme le président. La parole est à M. Max Brisson. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je remercie tout d’abord le groupe du RDSE, ainsi que Bernard Fialaire, auteur et rapporteur de cette proposition de loi. Ils ont pointé un véritable sujet dont nous devions nous saisir : les fraudes en matière artistique.
Le phénomène n’est pas nouveau. En 1895, déjà, le sénateur Agénor Bardoux intervenait dans cet hémicycle, à la suite de l’achat par Alexandre Dumas fils d’un paysage portant la signature de Corot, alors qu’en réalité il avait été peint par un artiste bien moins renommé de l’école de Barbizon, Paul-Désiré Trouillebert.
Ce scandale a abouti à la loi Bardoux, qui, depuis sa promulgation en 1895, n’a jamais été modifiée et continue d’être appliquée par les juges.
Toutefois, on constate ces dernières années une multiplication des fraudes en matière artistique, ainsi qu’une augmentation considérable des transactions illicites.
Face à ces dernières, cette proposition de loi pointe à juste titre les insuffisances des dispositions juridiques de la loi Bardoux, qui est aujourd’hui obsolète au regard des exigences de notre temps en matière de lutte contre la fraude artistique.
Cette loi est obsolète, car son champ d’application est trop restrictif pour couvrir toute l’étendue des faux dans leur réalité actuelle. Elle ne vise en effet que les arts existant à la Belle Époque tels que la peinture, la sculpture, le dessin, la gravure ou la musique, alors que de nouvelles formes artistiques – photographie, arts décoratifs ou encore arts numériques – se sont développées et ne cessent de se développer depuis.
Cette loi est obsolète, car elle ne prend en considération que les faux en signature et vise exclusivement les œuvres protégées par le droit d’auteur, alors que les œuvres tombées dans le domaine public constituent une part importante des affaires de fraude.
Cette loi est obsolète, enfin, car l’échelle des peines n’est plus en adéquation avec les infractions similaires, comme les délits de contrefaçon ou de faux et d’usage de faux. Comme le souligne justement la proposition de loi, le recours aux dispositifs existants, comme ceux qui sont prévus pour lutter contre l’escroquerie, le faux, la tromperie ou la contrefaçon, est impossible, car ces derniers ne sont pas tout à fait adaptés à la situation particulière des fraudes artistiques.
Madame la ministre, les auteurs et leurs ayants droit, les acheteurs – amateurs d’art ou investisseurs –, les professionnels du marché de l’art, ainsi que les institutions dont l’activité se trouve parasitée, sont ainsi dans l’attente d’une réforme.
À ce besoin criant d’actualisation de la loi, ce texte apporte une réponse nécessaire et attendue.
Cependant, si les insuffisances de la loi Bardoux sont connues, sa réécriture s’annonçait particulièrement complexe. (Mme la ministre acquiesce.)
On peut déplorer à cette occasion que la lutte contre les faux en matière artistique n’ait pas été jusqu’alors une priorité, en comparaison des efforts engagés à l’égard des contrefaçons dans d’autres secteurs économiques.
Bernard Fialaire s’est attaché à mener ce travail complexe. Certes, les travaux sur les fraudes artistiques se sont multipliés ces dernières années. Notre rapporteur les a recensés : le colloque « Le faux en art », organisé au mois de novembre 2017 par la Cour de cassation, le groupe de travail constitué en 2018 au sein de l’institut Art & Droit et, bien sûr, la mission du CSPLA, dont les conclusions sont attendues au mois de juillet prochain.
C’est en se fondant sur ces travaux et réflexions de spécialistes que Bernard Fialaire a eu le mérite de proposer une réforme du droit existant, au travers d’un nouveau texte qui va au-delà de simples aménagements.
La loi Bardoux, venue combler en son temps un vide juridique, laissera place à une loi ancrée dans la modernité, que l’on appellera peut-être dans quelques années, cher Jean-Claude Requier, puisque vous avez indiqué que les grandes lois devaient avoir un nom, la loi Fialaire ! (Sourires et applaudissements.)
Ce texte apporte en effet une réponse pénale adaptée, qui prend en considération la diversité des œuvres d’art circulant sur le marché.
À partir des travaux menés en commission, plusieurs amendements ont été adoptés en vue de clarifier les nouvelles règles et d’éviter certains effets collatéraux relevés lors des auditions.
L’approche retenue place au centre du dispositif non plus les droits qui lui sont attachés, mais l’œuvre en elle-même. Elle vise à assurer un équilibre entre protection des œuvres et liberté de création.
La définition de la fraude artistique a été réécrite en ce sens, afin de ne pas entraver les usages non frauduleux de l’œuvre d’art.
Pour lutter contre la multiplication des fraudes, la commission a aussi prévu l’alourdissement des peines en cas de circonstances aggravantes, lorsque la fraude est commise par un professionnel du marché de l’art ou lorsque le préjudice est subi par une collectivité publique.
Le juge pourra par ailleurs prononcer une interdiction d’exercice de l’activité professionnelle ayant conduit à l’infraction.
La question du sort de l’œuvre falsifiée est également traitée par le texte issu des travaux de la commission, qui s’en remet au juge pour décider la confiscation, la restitution ou la destruction de l’œuvre.
Ces dispositions vont manifestement dans le bon sens. Elles pourront être utilement complétées – M. le rapporteur y est prêt – en cours de navette parlementaire, à partir des conclusions de la mission créée par le CSPLA.
Certes, nous sommes conscients qu’une loi ne suffira pas à résoudre tous les problèmes posés par l’évolution du marché de l’art, notamment celui de la circulation des œuvres via l’activité des plateformes en ligne si peu réglementée.
Ce texte constitue néanmoins la première pierre de ce chantier et adressera un signal fort aux auteurs de fraudes artistiques.
Dans cette perspective, le groupe Les Républicains votera bien entendu cette proposition de loi.
La loi Bardoux a vécu cent vingt-huit ans. Longue vie à la future loi Fialaire ! (Rires et applaudissements.)
M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture. Bien sûr !
Mme le président. La parole est à M. Claude Malhuret. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Claude Malhuret. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la loi du 9 février 1895, dite loi Bardoux, est encore aujourd’hui le texte de référence en matière de fraude artistique.
Pourtant, avec l’évolution des escroqueries et la diversification des pratiques artistiques, elle est devenue lacunaire.
Le droit en vigueur n’apporte pas de réponse satisfaisante face à la prolifération des cas de fraude artistique, dont témoigne l’Office central de lutte contre le trafic des biens culturels.
La loi Bardoux limite l’incrimination à certains types de cas.
Premièrement, elle ne concerne que les œuvres de peinture, sculpture, dessin, gravure et musique. Cette considération énumérative de l’art est aujourd’hui très limitée au regard de la grande diversité de la création artistique.
Deuxièmement, l’œuvre d’art en question doit présenter une signature apocryphe ou un nom usurpé. Or les pratiques de falsification sont de plus en plus complexes et imaginatives.
Troisièmement, enfin, l’œuvre ne doit pas être tombée dans le domaine public, ce qui relègue dans l’oubli un vaste pan de l’art.
Les peines prévues par la loi de 1895 en cas d’infraction sont bien trop faibles et éloignées de celles qui sont prévues par d’autres dispositifs similaires, visant par exemple à réprimer la contrefaçon. Il est donc nécessaire de muscler l’arsenal de réponse à la fraude.
Notre pays représente le second marché de l’art dans le monde. Cela nous engage à veiller avec exigence à la transparence et à la fiabilité des acteurs.
Il nous faut rétablir la confiance en nos institutions culturelles, nos artistes, nos experts, nos lieux de vente, meurtris ces dernières années par de nombreux cas d’escroquerie.
Rappelons la tristement célèbre affaire des faux meubles achetés par le Château de Versailles entre 2008 et 2012 à plusieurs professionnels du marché de l’art, pour un montant total de 2,7 millions d’euros.
Une réforme de la loi Bardoux, texte précurseur, mais aujourd’hui daté, se révèle donc nécessaire, afin de protéger au mieux le marché de l’art français et ses institutions, tout en rassurant les acquéreurs et les artistes.
Entre son dépôt et sa présentation en commission, le texte que nous examinons aujourd’hui a été enrichi par une série d’amendements.
Les différents apports qu’a proposés Bernard Fialaire, à la fois auteur et rapporteur de ce texte, se nourrissent d’une série d’entretiens, qui ont mis en lumière le caractère éminemment complexe de la réponse à apporter aux évolutions des fraudes artistiques.
Se pose notamment la question de la protection des créations artistiques numériques, sujet qui a fait l’objet d’une proposition de loi déposée par Colette Mélot au mois de janvier dernier.
J’en profite pour saluer le travail et l’engagement de Bernard Fialaire et pour remercier le groupe du RDSE de cette initiative.
Ce texte va dans le bon sens. Par son adoption, le Sénat donnera le coup d’envoi d’une vaste réflexion sur la prise en considération des évolutions de l’art et du droit d’auteur.
Cette réflexion sera également nourrie au mois de juillet prochain par les conclusions de la mission lancée par le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique.
Ses apports permettront notamment de mieux définir le faux en art et de simplifier sa détection, preuve supplémentaire, s’il en fallait, que cette proposition de loi arrive à point nommé.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires accueille donc favorablement ce texte. (Applaudissements)
Mme le président. La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en 1885, lorsque la loi Bardoux est discutée au Parlement, le peintre Camille Corot est mort depuis dix ans.
Paul-Désiré Trouillebert, lui, est toujours vivant. Peut-être lit-il alors, dans les colonnes des journaux, les conclusions du débat parlementaire, dont l’une de ses toiles fut à l’origine, parce qu’elle avait été attribuée à un autre, à savoir à Corot.
Qu’a pu ressentir Trouillebert à ce moment-là, lui qui, comme Corot, a consacré sa vie à la peinture, pour une bien moins grande fortune ? Du plaisir, du fait que l’un de ses paysages ait séduit et illusionné Alexandre Dumas fils ? De l’amertume, à ne devenir pour l’histoire qu’un copiste de Corot ? Du cynisme, à observer le comportement moutonnier du marché de l’art, transformant les artistes en brevets et plaçant, surtout, au second plan l’émotion esthétique produite par la contemplation d’une toile ?
Ce qui ne fait pas de doute, c’est que Trouillebert, au même titre que les ayants droit de Corot et que Dumas, est, lui aussi, victime de cette escroquerie. Ne disposant pas de la renommée de ces derniers et n’ayant pas voix au chapitre, il ne voit pas ses droits protégés par la loi Bardoux, qui ne prévoit pas de réhabilitation pour l’auteur véritable de l’œuvre.
Vieille de plus de cent ans, cette loi nécessitait une actualisation pour adapter les moyens de la lutte contre les faux artistiques aux nouvelles techniques développées par les faussaires. C’est pourquoi nous accueillons favorablement l’initiative de Bernard Fialaire.
La création d’un registre des faux faciliterait le travail des enquêteurs. En outre, la proposition de loi alourdit considérablement les peines et prévoit des circonstances aggravantes lorsque les faux sont réalisés au détriment d’une personne publique ou commis en bande organisée. La rédaction proposée élargit enfin la qualification du faux.
Nous serons toutefois très attachés à trouver un meilleur équilibre entre la protection des droits patrimoniaux des collectionneurs et des marchands d’art et la protection des artistes.
Le droit d’auteur est un corollaire de la liberté d’expression artistique. Il ne doit pas devenir une entrave à la création.
C’est pourquoi nous présenterons des amendements destinés à exclure la destruction des œuvres jugées comme faux, en considérant que ces dernières peuvent disposer d’une valeur intrinsèque, autonome de l’identité de l’artiste, même faussaire. D’autres pistes pourraient être envisagées, comme la mise sous séquestre automatique.
De la même manière, nous souhaitons préserver la capacité des artistes à créer leur nom d’emprunt et leur permettre de garder secrètes leurs techniques de fabrication.
La protection des artistes doit être replacée au centre de nos préoccupations de législateur, alors que le marché, toujours plus fort, s’est encore renforcé pendant la crise sanitaire.
Entre 2007 et 2013, 30 % des expositions personnelles proposées par les grands musées américains ont ainsi été consacrées à des artistes représentés par seulement cinq galeries.
Certains artistes se battent contre cette tendance. Je pense à Banksy, dont l’une des œuvres a été détruite en pleine salle des ventes. Je pense aussi, avant lui, à Marcel Duchamp présentant un urinoir comme une fontaine ou à René Magritte qui nous interpellait avec son célèbre tableau La Trahison des images, accompagné de la légende « Ceci n’est pas une pipe ».
Quelles retombées directes les artistes ont-ils à attendre de ce texte ? Très peu, madame la ministre. La navette parlementaire vous laisse le temps d’enrichir le texte en leur direction.
De leur capacité à nous illusionner dépend notre capacité à nous émerveiller. À nous de veiller à ce que leur liberté d’expression demeure entière.
Mme le président. La parole est à M. Julien Bargeton.
M. Julien Bargeton. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, alors qu’il était traîné en justice par le prieur de la chartreuse de Naples pour avoir copié La Guérison du paralytique de Dürer, le peintre baroque Luca Giordano fut acquitté par ses juges, qui trouvèrent qu’il avait parfaitement imité le grand peintre allemand et que cela valait bien un acquittement. Auteur de près d’un millier d’œuvres dans sa carrière, Luca Giordano fut d’ailleurs surnommé par la suite Luca Fà-presto. C’était l’époque des ateliers, c’était une autre vision.
Ce n’est pas un hasard si la loi Bardoux tombe à la fin du XIXe siècle, au temps des impressionnistes et des beaux-arts. C’est le moment où l’artiste est reconnu. La vision de l’artiste romantique l’a alors définitivement emporté.
Aujourd’hui, à l'heure où les fraudes représentent 6,5 milliards de dollars, soit l’équivalent du chiffre d’affaires d’une grande maison comme Sotheby’s par exemple, la proposition de loi de Bernard Fialaire est la bienvenue.
La loi Bardoux était certes utile, mais elle est désormais dépassée. Les peines qu’elle prévoit – deux ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende – sont tellement insuffisantes et peu répressives que des mafias et organisations criminelles ont investi le champ de la fraude en matière artistique.
Enfin, les enjeux ont changé. La photographie, qui est maintenant un art ancien, n’était pas prise en compte par la loi Bardoux, pas plus évidemment que les NFT, qui révolutionnent la façon de rémunérer les artistes.
Si les NFT ne représentent que 1,6 % du marché de l’art, ils pèsent déjà plus lourd que la photographie, qui en représente 1 %. Leur développement est évident. Il faut donc prendre en compte ce nouveau champ de l’art.
Cette proposition de loi se justifie, car elle permet non pas simplement un toilettage, mais une refonte qui tient compte des évolutions en cours.
Le texte aligne les sanctions judiciaires sur des escroqueries comparables, comme la contrefaçon. Ainsi, les peines encourues passeraient à cinq ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende.
Enfin, les amendements proposés améliorent le texte initial. Je pense aux circonstances aggravantes pour la fraude pratiquée par un professionnel, la rupture de confiance étant telle dans ce cas de figure que le marché de l’art s’en trouve pénalisé sur le long terme.
Je pense aussi au recentrage de la définition considérée sur les manœuvres frauduleuses.
À la fois parce que ce texte répond aux évolutions du secteur et parce que vous proposez des amendements, notre groupe votera en sa faveur.
Nous restons évidemment dans l’attente du rapport que doit rendre le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique. Ses conclusions viendront enrichir le texte, puisque vous-même, mon cher collègue Fialaire, vous reconnaissez qu’il n’est qu’un jalon ou une étape.
Cette étape est utile, ce qui explique notre vote positif et constructif. Il faut lutter davantage contre ces fraudes qui deviennent massives et qui prennent de l’ampleur, notamment avec la montée en puissance des plateformes numériques. (M. le rapporteur, ainsi que MM. Pierre Ouzoulias et Jean-Claude Requier applaudissent.)
M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture. Très bien !
Mme le président. La parole est à Mme Véronique Del Fabro. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Véronique Del Fabro. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, depuis la promulgation de la loi Bardoux voilà cent trente ans, les choses ont bien changé dans le monde de l’art. La technologie a complètement transformé le marché et les moyens par lesquels les œuvres d’art sont créées et vendues.
On a vu l’apparition et l’essor de nouvelles technologies telles que la 3D ou les NFT, ces jetons numériques qui ont permis de numéroter et de rendre chaque œuvre unique. Malheureusement, la loi Bardoux et le droit commun en général ne se sont pas toujours enrichis ni adaptés à ces changements.
De fait, les artistes sont de plus en plus exposés aux fraudes et à la contrefaçon. Ainsi, ceux qui vendent leurs œuvres en ligne sont très vulnérables aux escroqueries et aux pirates informatiques, tandis que ceux qui vendent leurs œuvres dans des galeries peuvent être sujets aux pratiques douteuses de certains professionnels.
Aujourd’hui, la loi Bardoux n’offre aucune protection aux artistes contre le vol de leurs œuvres. C’est particulièrement préoccupant, à l’heure d’internet et des réseaux sociaux. Ils sont donc souvent contraints de recourir à des moyens légaux coûteux pour se défendre contre ces pratiques.
Cela pousse parfois certains d’entre eux à exercer une surveillance constante. Or les auteurs et leurs ayants droit n’ont pas toujours les moyens matériels, humains et financiers pour lutter seuls face à ce phénomène en constante expansion.
Personne ne remet en cause la nécessité d’actualiser la loi ni de compléter notre arsenal législatif en la matière. Il faut mettre en place de nouvelles mesures pour lutter contre le vol de propriété intellectuelle, mieux protéger les artistes contre les pratiques abusives, leur permettre de mener leurs activités avec plus de sécurité et de confiance et encourager évidemment une plus grande transparence dans le marché de l’art.
Cette proposition de loi apporte des réponses utiles pour lutter contre les fraudes causant des préjudices aux artistes et aux acquéreurs d’œuvres d’art. Elle définit une nouvelle infraction pénale et procède à une refonte de la répression, en élargissant le périmètre de l’infraction et en alourdissant le régime des peines.
Concrètement, ses dispositions permettront un recentrage sur les comportements frauduleux destinés à tromper autrui sur l’authenticité ou sur la provenance de l’œuvre, en distinguant, d’une part, les fraudes portant directement sur l’œuvre d’art – la réaliser ou la modifier –, d’autre part, les fraudes réalisées autour de l’œuvre d’art – la présenter, la diffuser ou la transmettre à titre gratuit ou onéreux.
Angle mort de la loi Bardoux, les œuvres tombées dans le domaine public étaient jusqu’à présent exclues de toute protection. Les œuvres anciennes constituant aujourd’hui une part importante des faux, il est essentiel d’étendre le champ d’application de la loi aux œuvres tombées dans le domaine public.
Sur le volet répressif, les peines étaient jusqu’alors insuffisantes. L’établissement de circonstances aggravantes lorsque les faits sont commis par des professionnels du marché de l’art et lorsque le préjudice est subi par une institution patrimoniale publique était indispensable.
En parallèle, l’enjeu est d’éviter la remise sur le marché de l’œuvre falsifiée, tout en veillant à l’équilibre avec le risque de destruction d’une œuvre sur laquelle il y aurait toujours un doute.
Ainsi, la création d’un registre de fraude artistique contribuera à cette lutte. Nous ne doutons pas que les résultats des travaux du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique enrichiront ce texte au cours des prochaines étapes de la navette parlementaire.
Le travail mené en commission sous votre houlette et non votre baguette, monsieur le rapporteur (Sourires.), a permis de préciser et de clarifier le texte initial, le rendant ainsi plus opérationnel.
Comme l’a dit Max Brisson, le groupe Les Républicains votera la loi Fialaire. Pardon pour le plagiat ! (Sourires. – Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi portant réforme de la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique
Article 1er
Après le chapitre II du titre Ier du livre Ier du code du patrimoine, il est inséré un chapitre II bis ainsi rédigé :
« CHAPITRE II BIS
« Lutte contre les fraudes artistiques
« Art. L. 112-28. – Est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende le fait :
« 1° De réaliser ou de modifier, par quelque moyen que ce soit, une œuvre d’art ou un objet de collection, dans l’intention de tromper autrui sur l’identité de son créateur, son origine, sa datation, sa nature ou sa composition ;
« 2° De présenter, de diffuser ou de transmettre, à titre gratuit ou onéreux, une œuvre ou un objet mentionné au 1° en connaissance de son caractère trompeur ;
« 3° De présenter, de diffuser ou de transmettre, à titre gratuit ou onéreux, une œuvre d’art ou un objet de collection en trompant, par quelque moyen que ce soit, sur l’identité de son créateur, son origine, sa datation, sa nature ou sa composition ;
« 4° De présenter, de diffuser ou de transmettre, à titre gratuit ou onéreux, une œuvre d’art ou un objet de collection en trompant, par quelque moyen que ce soit, sur sa provenance.
« Art. L. 112-29. – Les faits mentionnés à l’article L. 112-28 sont punis de sept ans d’emprisonnement et de 750 000 euros d’amende lorsqu’ils sont commis :
« 1° Soit par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice, sans qu’elles constituent une bande organisée ;
« 2° Soit de manière habituelle ou en utilisant les facilités que procure l’exercice d’une activité professionnelle ;
« 3° (nouveau) Soit au préjudice de l’État ou d’une collectivité territoriale, ou de l’un de leurs établissements publics.
« Art. L. 112-30. – Les faits mentionnés à l’article L. 112-28 sont punis de dix ans d’emprisonnement et de 1 000 000 d’euros d’amende lorsqu’ils sont commis en bande organisée.
« Art. L. 112-30-1 (nouveau). – Les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l’article 121-2 du code pénal, des délits punis aux articles L. 112-28 à L. 112-30 du présent code encourent, outre l’amende suivant les modalités prévues à l’article 131-38 du code pénal, les peines prévues aux 2° à 9° de l’article 131-39 du même code. L’interdiction mentionnée au 2° de l’article 131-39 dudit code porte sur l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise.
« Art. L. 112-31. – Le juge peut également prononcer :
« 1° La confiscation de l’œuvre ou de l’objet mentionné à l’article L. 112-28 du présent code ;
« 1° bis (nouveau) Sa destruction ;
« 2° Sa remise, s’ils existent, au créateur victime ou à ses ayants droit.
« L’article L. 3211-19 du code général de la propriété des personnes publiques est applicable en cas de confiscation de l’œuvre en application du 1° du présent article.
« La peine complémentaire de confiscation est encourue dans les conditions prévues à l’article 131-21 du code pénal.
« Art. L. 112-32. – En cas de relaxe ou de non-lieu, la juridiction peut prononcer la confiscation, la destruction ou la remise, s’ils existent, au créateur victime ou à ses ayants droit de l’œuvre ou de l’objet saisi lorsqu’il est établi qu’il constitue, en tant que tel, un faux au sens du 1° de l’article L. 112-28.
« Art. L. 112-33 (nouveau). – Les personnes physiques coupables des délits punis aux articles L. 112-28 à L. 112-30 du présent code encourent également à titre de peine complémentaire l’interdiction, suivant les modalités prévues à l’article 131-27 du code pénal, soit d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise, soit d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour leur propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale. Ces interdictions d’exercice peuvent être prononcées cumulativement.
« Art. L. 112-34 (nouveau). – Lorsqu’il est établi qu’ils constituent, en tant que tels, des faux au sens du 1° de l’article L. 112-28, les œuvres et les objets mentionnés au même article L. 112-28 font l’objet d’une inscription sur un registre dans des conditions définies par décret en Conseil d’État. »
Mme le président. L’amendement n° 2 rectifié, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
de tromper autrui sur l’identité de son créateur,
par les mots :
de tromper autrui en attribuant l’œuvre à un autre ou
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Dans sa rédaction actuelle, la loi du 9 février 1895 définit dans son article 1er la fraude artistique comme le fait, soit d’apposer ou de faire apparaître « un nom usurpé sur une œuvre de peinture, de sculpture, de dessin, de gravure, de musique », soit d’imiter frauduleusement la signature ou un signe adopté par l’auteur de l’œuvre dans le but de tromper l’acheteur sur la personnalité de ce dernier. L’article 2 ajoute que « les mêmes peines seront applicables à tout marchand ou commissionnaire qui aura sciemment recélé, mis en vente ou en circulation les objets revêtus de ces noms, signatures ou signes ».
La réécriture proposée dans cet amendement est beaucoup plus large que ce que prévoit le droit actuel. Elle vise non seulement la vente, mais également la présentation, la diffusion ou la transmission à titre onéreux d’œuvres ou d’objets d’art.
L’interdiction faite de tromper par quelque moyen que ce soit sur l’identité du créateur ne doit pas être prise à la légère, car elle pourrait se retourner contre les artistes qui se décideraient à créer sous un nom d’emprunt.
Ce fut par exemple le cas de Marcel Duchamp, quand il signa sa fontaine « R. Mutt », de Romain Gary, dissimulé derrière Émile Ajar, ou encore des Daft Punk, dont on ne connaît pas – du moins, c’est mon cas – la véritable identité.
Il faut absolument protéger ce droit. C’est pourquoi nous proposons une réécriture de cet article afin d’exclure totalement ce risque et de clarifier une zone d’ombre rédactionnelle.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Fialaire, rapporteur. Madame de Marco, vous souhaitez à juste titre éviter que l’infraction créée par la proposition de loi porte atteinte à la liberté de création des artistes. Nous partageons cette préoccupation et nous y veillons.
Néanmoins, votre amendement tend à supprimer toute référence à la notion de tromperie, qui figurait dans le texte adopté par la commission. Or cette notion me paraît essentielle à la définition de l’infraction pénale, si l’on veut garantir la répression des seules manœuvres frauduleuses et éviter justement de brider la liberté de la création.
La rédaction de votre amendement comporte un risque, celui d’interdire certaines pratiques artistiques, à commencer par la copie, dans la mesure où la simple intention d’attribuer l’œuvre à un autre pourrait être sanctionnée.
J’ajoute que la rédaction du texte de la commission ne remet pas en cause, à mes yeux, la possibilité, pour un artiste, d’utiliser un pseudonyme. On pourrait d’ailleurs considérer que les différents pseudonymes utilisés par un artiste sont partie intégrante de son identité d’artiste.
L’infraction doit permettre de sanctionner les seuls cas dans lesquels l’identité d’un créateur, qu’il s’agisse de son vrai nom ou de son pseudonyme, a été usurpée.
Enfin, sur la forme, la rédaction proposée a pour effet de supprimer les mots « de tromper autrui sur », ce qui rend la lecture de la suite de l’alinéa impossible.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Même avis.
Les explications de M. le rapporteur sont tellement limpides et précises que je ne les répète pas.
Mme le président. L’amendement n° 3 rectifié, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
, sa nature ou sa composition
par les mots :
ou sa nature
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Cet amendement s’inscrit dans le même esprit que l’amendement précédent et il est également important, parce que le nouvel article s’applique non seulement à la vente, mais aussi à l’exposition gratuite des œuvres.
La rédaction issue des travaux de la commission expose à une amende et à de la prison tout artiste qui présenterait, diffuserait ou transmettrait une œuvre en trompant sur sa composition.
Je comprends l’intention de protéger les collectionneurs de mobilier de collection par exemple, mais cette écriture me paraît trop large et susceptible de porter atteinte à la liberté artistique qui justifie parfois de faire passer un matériau pour un autre ou de cacher la nature des matériaux.
Selon moi, ce n’est pas la matière utilisée qui fait l’œuvre, mais c’est l’agencement recherché par l’artiste, sa technique.
On attribue souvent à Picasso cette citation : « Certains peintres transforment le soleil en un point jaune. D’autres transforment un point jaune en soleil. » Laissons donc les artistes nous illusionner avec la matière qui leur plaira.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Fialaire, rapporteur. Madame de Marco, ici encore, vous entendez éviter les atteintes à la liberté de la création.
Je souhaite vous rassurer sur le fait que l’objectif n’est nullement de contraindre les artistes à dévoiler leurs secrets de fabrication artistique, lorsqu’ils mettent en vente leurs œuvres.
En mentionnant les tromperies sur la composition, c’est bien, par exemple, les tromperies sur les matières utilisées que nous avions en tête, si celles-ci sont mentionnées, ou encore les restaurations ou reconstitutions excessives qui ont pour effet de faire perdre à une œuvre ou à un objet d’art son caractère authentique. On peut aussi penser à la fabrication de faux meubles, en utilisant des matériaux anciens.
Il me semblerait regrettable que des escroqueries de ce type ne puissent pas être sanctionnées. D’ailleurs, le terme de « composition » est repris du décret Marcus qui impose aux vendeurs la délivrance de certificats d’authenticité contenant les « spécifications qu’ils auront avancées quant à la nature, la composition, l’origine et l’ancienneté de la chose vendue ».
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Ce débat a déjà eu lieu au début des années 1980 au moment de la préparation du décret Marcus.
On doit d’ailleurs reconnaître le travail de précision chirurgicale réalisé par le rapporteur sur cette proposition de loi. Il a eu pour souci constant de ne jamais porter atteinte à la liberté de création.
C’est avec le même souci que le CSPLA travaille actuellement – je tiens à vous rassurer sur ce point, madame la sénatrice.
Le Gouvernement émet donc également un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. L’amendement n° 1 rectifié, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 17
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéa 21
Supprimer les mots :
, la destruction
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. De toutes les dispositions introduites par la proposition de loi, celle-ci me paraît la plus contestable. Elle prévoit en effet de permettre au juge d’ordonner la destruction d’un bien culturel saisi sur le fondement du nouvel article L. 112-28 du code du patrimoine.
Une telle disposition est déjà prévue par le code pénal pour les biens dangereux ou nuisibles et le Conseil constitutionnel a rigoureusement encadré cette faculté donnée au juge dans le cas des armes à feu. Il me paraît donc disproportionné de l’étendre aux biens culturels, même frauduleux.
Je comprends l’intention du rapporteur, mais je pense que des solutions alternatives devraient être recherchées, comme l’automaticité de la mise sous séquestre ou des techniques de marquage des châssis d’époque utilisés par les faussaires.
Nous nous sommes entretenus avec les représentants de la Société des auteurs dans les arts graphiques et plastiques (ADAGP), qui ont reconnu que des solutions moins abruptes pourraient être envisagées.
La destruction est évidemment irréversible et, en cas d’erreur d’appréciation par le juge, des originaux pourraient être détruits. Les erreurs d’expertise existent et il me semble que de tels cas de figure se sont déjà produits.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Fialaire, rapporteur. Madame de Marco, vous vous inquiétez de la possibilité offerte au juge par la proposition de loi de prononcer la destruction de l’œuvre qui aurait été reconnue comme un faux.
Je comprends parfaitement cette inquiétude et ce sujet complexe nous a d’ailleurs beaucoup occupés durant nos travaux et a été largement évoqué dans les auditions que nous avons organisées : la destruction n’est pas un outil à manier à la légère.
Il ne serait pas acceptable qu’une œuvre d’art simplement revêtue d’une signature apocryphe soit détruite, car, à l’exception de cette signature trompeuse, elle reste l’œuvre originale d’un artiste qui mérite d’être rétabli dans ses droits. Surtout, si la signature peut être retirée, il n’y a aucune raison que l’œuvre ne puisse pas être remise sur le marché.
C’est la raison pour laquelle le texte de la commission se contente de donner un panel d’outils au juge pour permettre de retirer l’œuvre d’art litigieuse du marché, mais celui-ci ne sera en aucun cas contraint d’en faire usage : il conservera sa liberté d’appréciation en fonction des circonstances.
J’ajoute que la possibilité d’autoriser la destruction des faux est une arme réclamée par de nombreux artistes contemporains – les auditions l’ont confirmé – ou leurs ayants droit dans l’objectif d’assurer une meilleure défense des droits des artistes.
Le code général de la propriété des personnes publiques autorise déjà la destruction des œuvres falsifiées déclarées comme telles en application de la loi Bardoux.
Il n’y a donc pas vraiment de changement par rapport au droit existant, si ce n’est qu’aujourd’hui cette décision appartient entièrement à l’administration des domaines, qui peut être tentée d’y recourir pour résoudre des problèmes de stockage, alors qu’à l’avenir cette décision pourra aussi relever du juge.
Je vous remercie d’avoir soulevé ce point, qui est très important, mais nous souhaitons conserver la destruction des œuvres dans le panel des outils à la disposition du juge.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. Max Brisson. C’est plus sage !
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 2
I. – La loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique est abrogée.
II. – Le code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° L’article L. 3211-19 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « contrefaisantes mentionnées par la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique » sont remplacés par les mots : « ou objets falsifiés au sens du 1° de l’article L. 112-28 du code du patrimoine » ;
b) Au second alinéa, les mots : « contrefaisantes mentionnées par la loi du 9 février 1895 précitée et confisquées dans les conditions fixées par ses articles 3 et 3-1 » sont remplacés par les mots : « ou objets falsifiés au sens du 1° de l’article L. 112-28 du code du patrimoine ayant donné lieu à confiscation en application des articles L. 112-31 ou L. 112-32 du même code » ;
2° Au 1° de l’article L. 5441-3, les mots : « contrefaisantes mentionnées par la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique » sont remplacés par les mots : « ou objets falsifiés au sens du 1° de l’article L. 112-28 du code du patrimoine ».
Mme le président. L’amendement n° 4, présenté par M. Fialaire, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Au même second alinéa, les mots : « détruites, soit déposées » sont remplacés par les mots : « détruits, soit déposés » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Fialaire, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination légistique visant à accorder les deux adjectifs avec les mots « œuvres ou objets ».
M. Max Brisson. C’est bien de continuer à s’intéresser à l’orthographe !
M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture. C’est bien une faute d’orthographe et pas un faux… (Sourires.)
M. Bernard Fialaire, rapporteur. Absolument !
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Avis favorable.
Soyons irréprochables sur l’orthographe ! (Nouveaux sourires.)
Mme le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.
(L’article 2 est adopté.)
Vote sur l’ensemble
Mme le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. le président de la commission.
M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Si la loi Bardoux a tenu cent vingt-huit ans, c’est peut-être parce que ses fondements étaient solides, mais c’est aussi parce que la matière est particulièrement complexe. Il fallait donc sans doute, de la part des parlementaires qui voulaient s’attaquer à ce monument législatif, un brin d’innocence ou d’insouciance – c’est tout le mérite de Bernard Fialaire !
Albert Einstein disait que rien n’est plus proche du vrai que le faux. En matière d’art, c’est particulièrement exact et tout le mérite de ce texte, notamment dans son article 1er, est d’arriver à définir à partir de quel moment une intention devient malveillante et un acte répréhensible.
La matière est tellement complexe qu’au fil de nos travaux la rédaction de la proposition de loi a évolué. Je crois que cet approfondissement était nécessaire et qu’il permettra au texte de poursuivre son parcours législatif.
Ce texte était nécessaire, parce que, vous l’avez dit, madame la ministre, le marché de l’art est important pour notre pays. Nous en sommes même fiers, mais, pour qu’il fonctionne correctement et qu’il continue d’exister, il faut lutter contre la fraude, ce que ce texte permettra.
Je tenais donc en mon nom, mais aussi au nom de l’ensemble de la commission, à remercier et à féliciter Bernard Fialaire de la qualité de son travail. Je crois d’ailleurs que ce texte sera très largement approuvé quelques instants.
Dans votre propos liminaire, madame la ministre, et je voudrais conclure mon intervention sur ce point, vous avez évoqué un autre sujet qui concerne le marché de l’art et mentionné plusieurs options en ce qui concerne la question de la TVA et de l’application de la directive européenne. J’ai compris que la troisième option serait la plus favorable pour le marché de l’art. Je vous encourage par conséquent, madame la ministre, à emprunter cette voie.
M. Pierre Ouzoulias. Très bien !
Mme le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Madame la ministre, j’espère que vous avez bien compris, au travers de l’examen de ce texte, l’utilité du Sénat !
On peut tout de même s’étonner que les exécutifs successifs – je ne vous fais aucun reproche personnel – aient laissé se creuser un tel vide juridique, alors que le marché de l’art connaissait des évolutions si importantes – envol des prix, accélération des fraudes, notamment via le numérique, etc. Il a fallu qu’un parlementaire se penche sur cette situation inquiétante pour que le sujet avance !
C’est d’ailleurs l’honneur de notre commission et du Sénat dans son ensemble d’avoir mis ce sujet sur la table.
Madame la ministre, vous avez dit tout le bien que vous pensiez de la proposition de loi de Bernard Fialaire. J’espère par conséquent que vous ferez tout pour que la navette parlementaire se poursuive et prospère sur cette base, même si vous attendez encore le rapport du CSPLA.
J’espère qu’ainsi, après la loi Bardoux, nous aurons, je le redis, la loi Fialaire ! (Sourires.)
Mme le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour explication de vote.
Mme Monique de Marco. Je voterai avec enthousiasme cette proposition de loi. (Ah ! au banc des commissions.)
Les amendements que j’ai déposés avaient pour but de mettre en débat certaines interrogations et d’éclairer les zones d’ombre qui me semblaient persister. Il fallait bien animer nos débats, mes chers collègues…
Je tiens en tout cas à remercier Bernard Fialaire d’avoir déposé ce texte.
Mme le président. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi portant réforme de la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique.
(La proposition de loi est adoptée.) – (Applaudissements.)
M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture. À l’unanimité, me semble-t-il !
9
Objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Mme le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires (proposition n° 205, texte de la commission spéciale n° 416, rapport n° 415).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux amendements portant article additionnel après l’article 4.
Après l’article 4
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 4 rectifié quinquies, présenté par Mme Noël, MM. Bascher, Joyandet, Panunzi et Cadec, Mme Belrhiti, MM. Reichardt et Courtial, Mme Puissat, MM. Pellevat, Saury et Bouchet, Mmes Richer et Berthet, MM. Sautarel, Genet, J.M. Boyer, C. Vial et Chatillon, Mmes Garriaud-Maylam et Dumont, MM. Savin et Mandelli, Mme Dumas et MM. Pointereau, Duplomb, Charon, Gremillet et Houpert, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° du II de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
«…° L’artificialisation des sols ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers résultant de projets liés à la construction, l’aménagement, la mise en œuvre d’infrastructures ou d’équipements visant à favoriser l’utilisation de mobilités douces et durables, se voit appliquer un taux de minoration de 50 %. »
La parole est à M. Stéphane Sautarel.
M. Stéphane Sautarel. Les communes et collectivités territoriales devront continuer à accentuer leurs efforts en matière de développement d’infrastructures destinées à l’accueil des modes de transport doux. Les mobilités douces sont en effet au cœur d’un projet global de revitalisation de notre territoire dans le contexte environnemental que nous connaissons.
Ces travaux nécessaires vont résolument dans le sens de la lutte contre le dérèglement climatique et accroissent notre résilience face à ses effets.
Cet amendement a pour objet d’appliquer un taux de minoration de 50 % à toute artificialisation des sols ou consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers (Enaf) résultant de projets liés à la construction, à l’aménagement ou à la mise en œuvre d’infrastructures ou d’équipements visant à favoriser l’utilisation de mobilités douces et durables.
Mme le président. L’amendement n° 201 rectifié ter, présenté par MM. Fernique, Dantec, Benarroche et Breuiller, Mme de Marco, MM. Dossus, Gontard, Labbé et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
«…° L’artificialisation des sols ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers résultant de projets de construction, d’aménagement, d’infrastructures cyclables, est comptabilisée au niveau régional, dans le cas où leur dimension est supérieure à celle définie par décret.
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Par définition, l’utilisation du vélo est très favorable à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. En outre, rapporté au nombre de déplacements, le vélo a besoin de beaucoup moins d’espace au sol que les autres infrastructures de voirie.
Cet amendement vise à aider l’État dans la définition de la nomenclature et à mieux définir les contours du dispositif du zéro artificialisation nette (ZAN) pour les aménagements cyclables.
Jusqu’en 2030, tout cela a assez peu d’impact, puisque par définition les pistes cyclables qui se situent en zone urbaine ne sont pas en Enaf.
À partir de 2030, c’est la fameuse règle des cinq mètres de largeur – la dimension exacte sera définie par décret – qui devrait s’appliquer à ce type d’ouvrage linéaire. En dessous de cette largeur, les surfaces artificialisées ne devraient pas être prises en compte, parce que considérées comme non observables. Ce sera donc le cas des pistes cyclables.
Nous proposons que les pistes cyclables dont la largeur va au-delà de cinq mètres ne soient pas comptabilisées à l’échelle locale, afin que les communes n’aient pas à trancher entre pistes cyclables et autres aménagements nécessaires à la bonne vie du bloc communal. Ces infrastructures doivent bien être comptabilisées – vous connaissez notre vigilance sur ce point, il n’est pas question que quoi que ce soit passe par pertes et profits –, mais uniquement sur la part régionale.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur de la commission spéciale. L’amendement n° 4 rectifié quinquies tend à introduire une pondération dans la comptabilisation. La commission spéciale n’a pas souhaité entrer dans ce genre de logique. C’est pourquoi elle demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
La commission spéciale demande également le retrait de l’amendement n° 201 rectifié ter, qui vise à comptabiliser les projets d’infrastructures cyclables dans la part régionale ; à défaut, elle émettra là encore un avis défavorable. En effet, elle n’a pas fait ce choix et il a été annoncé – M. le ministre pourra nous le confirmer – que le décret à venir tiendrait compte de la situation particulière de ces infrastructures.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Le décret à venir sur la nomenclature précisera en effet qu’en dessous de cinq mètres il ne s’agit pas d’artificialisation, ce qui rendra possible de continuer de construire des pistes cyclables. Le Gouvernement demande donc le retrait de l’amendement n° 201 rectifié ter ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Si je comprends l’intérêt de la mesure proposée à l’amendement n° 4 rectifié quinquies, le décret sera tout de même mieux à même de satisfaire ses auteurs. Nous disons souvent que nous devons éviter d’ajouter des normes : la pondération, outre le fait qu’elle est extrêmement complexe à mettre en œuvre, en est une. C’est pourquoi le Gouvernement demande également le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Je le redis, la question soulevée par ces amendements sera réglée par le décret.
Mme le président. Monsieur Sautarel, l’amendement n° 4 rectifié quinquies est-il maintenu ?
M. Stéphane Sautarel. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 4 rectifié quinquies est retiré.
Monsieur Dantec, l’amendement n° 201 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Ronan Dantec. Je comprends bien que le décret exclura de la mesure de l’artificialisation des infrastructures cyclables de moins de cinq mètres, mais cet amendement vise en fait à ce que celles qui font plus de cinq mètres soient comptabilisées à l’échelon régional. Vous ne m’avez pas répondu sur ce point, monsieur le ministre.
Mme le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christophe Béchu, ministre. Nous voulons éviter la complexité, ce que ne manquerait pas d’introduire une telle proposition. Pour autant, je comprends l’intention des auteurs de cet amendement, monsieur le sénateur, et elle est louable.
Je le redis, le décret sur la nomenclature exclura les pistes cyclables de moins de cinq mètres pour en favoriser la réalisation.
M. Ronan Dantec. Je maintiens mon amendement, madame la présidente !
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 201 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. L’amendement n° 2 rectifié quinquies, présenté par Mme Noël, MM. Bascher, Joyandet, Panunzi et Cadec, Mme Belrhiti, M. Courtial, Mme Puissat, MM. Pellevat et Saury, Mme Ventalon, M. Bouchet, Mmes Richer et Berthet, MM. Sautarel, Genet, J.M. Boyer et Chatillon, Mmes F. Gerbaud, Garriaud-Maylam et Dumont, MM. Savin et Mandelli, Mme Dumas et MM. Pointereau, Duplomb, Charon, Gremillet, Rapin et Houpert, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
«…° L’artificialisation des sols ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers résultant de projets liés à la construction d’aires d’accueil mentionnés à l’article 1er de la loi n° 2000-614 du 15 juillet 2000 relative à l’accueil des gens du voyage est imputée à un compte foncier national. »
La parole est à M. Jérôme Bascher.
M. Jérôme Bascher. Cet amendement concerne la future construction d’aires d’accueil pour les gens du voyage. Vous savez bien, monsieur le ministre, que, dans beaucoup d’endroits, les schémas départementaux ne sont pas pleinement respectés.
Si vous ne sortez pas les aires d’accueil du ZAN, que se passera-t-il ? Quand les maires auront le choix entre construire deux maisons ou construire une aire d’accueil, ils choisiront les maisons et diront ensuite qu’en raison du ZAN ils ne peuvent pas installer d’aire d’accueil – je caricature bien sûr un peu.
Si l’on veut résoudre le problème de la construction des aires d’accueil, il faut les sortir du ZAN. Cela facilitera aussi le travail des élus.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Le sujet des aires d’accueil est évidemment important, mais l’adoption de cet amendement reviendrait à les faire entrer dans la catégorie des projets d’ampleur nationale ou européenne, ce qui est problématique d’un point de vue juridique.
C’est pourquoi la commission spéciale en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Même avis.
Nous sommes en train de parler ici des grands projets d’envergure nationale. Si vous aviez créé une catégorie spécifique, monsieur le sénateur, nous pourrions en discuter, mais là on est hors des clous des grands projets d’envergure nationale.
Mme le président. Monsieur Bascher, l’amendement n° 2 rectifié quinquies est-il maintenu ?
M. Jérôme Bascher. Non, je le retire, madame la présidente, mais il faudra bien traiter ce sujet à un moment ou à un autre.
Mme le président. L’amendement n° 2 rectifié quinquies est retiré.
L’amendement n° 156 rectifié, présenté par MM. Somon et Burgoa, Mme Dumas, M. Mouiller, Mme Ventalon, MM. Courtial et Brisson, Mmes Belrhiti, Canayer et Bonfanti-Dossat, MM. Klinger, Paccaud, de Legge, Bascher et Genet, Mmes Gruny, Imbert et Goy-Chavent, MM. Sido et Rapin, Mme Gosselin et MM. Wattebled, Bouchet, Cadec, Panunzi, Vanlerenberghe et Savary, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
«…° L’artificialisation des sols ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers, résultant de projets de construction, d’aménagement, d’infrastructures ou d’équipements nécessaires à la réalisation du canal à grand gabarit Seine-Nord Europe, ainsi que ses aménagements connexes, n’est pas comptabilisée pour évaluer l’atteinte des objectifs de réduction du rythme de l’artificialisation ou de la consommation d’espaces prévus au présent article. »
La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Cet amendement concerne la comptabilisation des grands projets, en l’espèce celle du canal Seine-Nord Europe et de ses travaux connexes.
Le canal Seine-Nord Europe s’inscrit dans la démarche ERC (éviter, réduire, compenser). Je vous citerai quelques chiffres : 1 100 hectares de plantations, 25 kilomètres de berges écologiques, 17 hectares d’annexes hydrauliques en zone humide, 60 sites acquis par la Société du canal pour renaturation ou remise en état de zones humides, notamment à visée pédagogique pour le grand public.
Compte tenu de cette démarche ERC, qui a été menée de manière ardente, il ne faut pas oublier les travaux connexes à l’aménagement du canal, quand on qualifie celui-ci en termes d’artificialisation.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Il nous semble que le canal Seine-Nord Europe entre déjà dans les critères de l’article 4 de ce texte. L’amendement nous paraît donc satisfait et la commission spéciale en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
De manière générale, ce sujet très important revient depuis des mois au fil de nos différents débats et il me semble qu’il mériterait de ce fait un travail spécifique, à l’occasion d’une mission d’information par exemple. Mon cher collègue, je vous invite à poursuivre ce travail dans un tel cadre, qui me semble plus adapté.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Même avis.
Dans une vie antérieure, j’ai été le président de l’Agence de financement des infrastructures de transport au moment où elle a ratifié la part de financement de l’État du projet de canal Seine-Nord Europe. Ce projet entre bien dans la catégorie des grands projets d’intérêt national et nous devons le réaliser compte tenu de son impact en termes de décarbonation et d’emploi.
Beaucoup des travaux connexes que vous mentionnez visent précisément à la naturation ou à la renaturation, monsieur le sénateur. Pour ceux qui relèvent de plantations, on est évidemment en dehors des clous. Pour ceux qui relèvent de l’ouvrage ou de sa réalisation, nous sommes en plein accord pour considérer qu’ils ne font pas partie de l’enveloppe régionale.
Mme le président. La parole est à Mme la présidente de la commission spéciale.
Mme Valérie Létard, présidente de la commission spéciale. Monsieur le ministre, pour connaître parfaitement le sujet, vous savez bien que le canal Seine-Nord n’a de sens que s’il est relié à des plateformes tout le long de son trajet afin d’optimiser le report modal vers le fluvial de toute l’activité industrielle et économique.
Mme Valérie Létard, présidente de la commission spéciale. Le financement de ce projet par l’Europe porte sur le canal, mais aussi sur les plateformes. Il me semble qu’avec cet amendement notre collègue Laurent Somon souhaite s’assurer que l’on prenne bien en compte l’ensemble du projet, sous peine de mettre en difficulté les territoires qui accueillent ces plateformes.
Mme le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christophe Béchu, ministre. Je vais clarifier le débat : c’est très exactement la vision du Gouvernement et le sens dans lequel il travaille.
Mme Valérie Létard, présidente de la commission spéciale. Très bien !
M. Christophe Béchu, ministre. Si nous n’intégrons pas la partie sur les plateformes, nous ne pourrons pas profiter pleinement, en termes de décarbonation, de la diminution du nombre de camions sur les routes.
Mme le président. Monsieur Somon, l’amendement n° 156 rectifié est-il maintenu ?
M. Laurent Somon. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
J’ajoute – ce n’est pas anecdotique pour les départements – qu’il faut aussi prendre en compte l’adaptation et la mise aux normes des routes.
Mme le président. L’amendement n° 213 rectifié bis, présenté par Mme Gatel, M. Longeot, Mmes de La Provôté, Loisier, Ract-Madoux et Billon, MM. Détraigne et Levi, Mme Gacquerre, MM. Kern, Bonnecarrère, Laugier, Cazabonne, Duffourg, Le Nay et Moga, Mmes Perrot, Jacquemet, Morin-Desailly, Canayer et Saint-Pé, MM. Canévet et Hingray, Mme Vermeillet, M. Henno, Mme Férat et MM. J.M. Arnaud, Vanlerenberghe, Cigolotti et Chauvet, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« …. – L’artificialisation des sols résultant de projets de construction, d’aménagement, d’infrastructures ou d’équipements d’ampleur qui présentent un intérêt général majeur national ou régional, peut, à titre dérogatoire, par décision motivée de l’autorité compétente de l’État, prise après avis de la conférence régionale de gouvernance prévue au V du présent article, ne pas être comptabilisée pour évaluer l’atteinte des objectifs de réduction du rythme de l’artificialisation ou de la consommation d’espaces prévus au présent article et intégrés aux documents de planification mentionnés au présent article, lorsque sa comptabilisation serait de nature à compromettre de manière irréversible l’atteinte des objectifs généraux prévus à l’article L. 101-2 du code de l’urbanisme.
« Dans ce cas, l’artificialisation des sols fait l’objet d’une comptabilisation séparée.
« Un décret pris en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »
La parole est à Mme Daphné Ract-Madoux.
Mme Daphné Ract-Madoux. Le poids des grands projets nationaux et régionaux sur le foncier est l’un des principaux points de blocage dans plusieurs régions pour atteindre l’objectif ZAN. Cet objectif se heurte aussi à des enjeux de décarbonation des activités, de construction de logements et de réindustrialisation de la France.
Pour répondre à une partie du problème, il est proposé, pour certains projets dont l’intérêt est majeur – réindustrialisation, logement social, etc. –, de disposer d’un recours auprès de l’autorité compétente de l’État pour obtenir leur sortie de l’enveloppe d’artificialisation, lorsque leur comptabilisation serait de nature à compromettre de manière irréversible l’atteinte des objectifs généraux.
Dans cette hypothèse et pour éviter toute péréquation inéquitable sur les territoires voisins, leur emprise serait sortie de la trajectoire ZAN nationale et régionale et soldée dans le cadre du bilan périodique du ZAN par tranche de dix ans jusqu’à 2050.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Il nous semble que l’article 4 de ce texte, en particulier la notion de déclaration de projet, permet de répondre à la préoccupation soulevée par cet amendement. La commission spéciale en demande donc le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Ce qui est proposé au travers de cet amendement pourrait constituer la base d’un compromis entre une vision selon laquelle on ne compte pas ce qui relève de l’État et une autre selon laquelle on compte cela à part.
Une forme de contractualisation qui permettrait sur certains projets de trouver un équilibre est peut-être le chemin grâce auquel nous pourrons avancer.
C’est la raison pour laquelle, sur cet amendement, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Mme le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Cet amendement, dont la rédaction est certainement perfectible – je rappelle que nous avons découvert toutes les joies des sous-amendements il y a moins d’une semaine (Sourires.) –, répond à une forte préoccupation et à un certain nombre d’appréhensions face à l’application du ZAN dans les territoires. Il y a de l’angoisse à ce sujet, monsieur le ministre.
Nous savons que, dans les dix ou vingt ans qui viennent, des projets vont s’implanter et consommer du foncier. Ne pas adopter cet amendement enverrait comme message que nous figeons les choses, que nous remettons notamment en cause la capacité d’accueillir les projets liés à la réindustrialisation du pays.
Il faut passer des discours aux actes, en particulier quand on parle de réindustrialisation, et la loi doit donner aux élus locaux le pouvoir d’agir.
Mme le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Je crains un peu les conséquences liées à l’adoption de cet amendement.
Nous sommes tous d’accord – c’était le socle de notre travail en commun – sur le fait qu’il faut mettre de la souplesse par rapport à la règle mécanique de départ des 50 % qui s’appliquerait dans presque toutes les communes.
Reste que deux problèmes se posent.
Cet amendement reviendrait à ne pas prendre en compte dans le ZAN un certain nombre de projets, ce qui ne serait pas la même chose qu’une mutualisation nationale qui se répercuterait à l’échelon régional sur les régions. On les passerait en quelque sorte par pertes et profits.
Cela rejoint l’idée de l’amendement n° 74 rectifié de Didier Mandelli que nous examinerons ensuite qui a pour objet une comptabilisation nationale des installations de production ou de stockage d’énergies renouvelables, ce qui me semble de bon sens, mais à condition, encore une fois, que cela ait une répercussion ensuite sur les régions.
J’appelle votre attention sur une autre question. En Basse-Loire, il existe déjà de nombreux projets absolument essentiels pour la France.
En Loire-Atlantique, nous avons la possibilité d’accueillir la future usine de construction de canadairs.
Si l’on suit cette logique, ce sont plutôt les territoires déjà très industrialisés qui accueilleront de nouveaux projets. En effet, si l’on est quelque peu strict en matière de non-utilisation de nouveaux espaces naturels, agricoles ou forestiers, on regardera où se trouvent les grandes friches à l’échelle de la France, c’est-à-dire dans les zones désindustrialisées, et non chez moi !
Ainsi, trop assouplir, c’est aller dans le sens d’une concentration économique encore plus forte dans les territoires qui se portent déjà bien.
Mme le président. La parole est à Mme la présidente de la commission spéciale.
Mme Valérie Létard, présidente de la commission spéciale. Nous comprenons la réflexion de Françoise Gatel, qui, en déposant cet amendement, propose des solutions supplémentaires ou complémentaires aux dispositifs et aux processus actuels.
En revanche, à ce stade, confier au préfet un rôle d’arbitrage nous pose problème, dans la mesure où le dispositif de l’article a été pensé pour qu’un tel rôle soit uniquement dévolu à la région. Par conséquent, faire intervenir l’État ne nous paraît pas utile.
Aussi, même si nous pourrons réfléchir et cheminer sur ces questions au cours de la navette parlementaire, il semble plus raisonnable de retirer cet amendement, d’ailleurs quelque peu complexe – on ne mesure pas encore précisément tous les contours ni toutes les conséquences de l’inscription, du rôle de l’État – et sans doute risqué.
Mme le président. Madame Ract-Madoux, l’amendement n° 213 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Daphné Ract-Madoux. Non, je le retire, madame le président.
Mme le président. L’amendement n° 213 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 74 rectifié, présenté par MM. Mandelli, Tabarot et Bacci, Mme Belrhiti, M. Paccaud, Mmes L. Darcos, Noël, Puissat, Demas, Goy-Chavent et Richer, MM. Somon, Sautarel, Sol, B. Fournier et Cuypers, Mme Gruny, M. Reichardt, Mme Imbert, MM. Chaize et E. Blanc, Mme Estrosi Sassone, MM. Chatillon et Bouloux, Mme Joseph, MM. C. Vial, Piednoir et Darnaud, Mme Ventalon, M. Mouiller et Mme F. Gerbaud, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’artificialisation des sols ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers résultant de l’implantation d’installations de production ou de stockage d’énergies renouvelables, y compris leurs ouvrages de raccordement aux réseaux de transport et de distribution d’énergie ainsi que les ouvrages connexes qui leur sont directement liés, n’est pas comptabilisée pour évaluer l’atteinte des objectifs de réduction du rythme de l’artificialisation ou de la consommation d’espaces.
Les modalités de mise en œuvre du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État.
La parole est à Mme Laure Darcos.
Mme Laure Darcos. La loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite Climat et résilience, qui a introduit l’objectif de zéro artificialisation nette, comprend une mesure visant à ne pas comptabiliser dans la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers les installations de production d’énergie photovoltaïque.
Cet amendement de Didier Mandelli auquel Ronan Dantec a déjà fait allusion, tend à pérenniser dans le temps cette mesure d’exemption, qui s’arrêtera en 2031, et à l’élargir à l’ensemble des projets concourant à la production et au stockage d’énergies renouvelables.
Après la date de 2031, les collectivités seront dans une impasse. En effet, le développement des énergies renouvelables dans leur territoire, sur leur initiative ou non, pourrait grever leur capacité d’artificialiser leurs sols.
Il s’agit donc d’exclure ces réalisations du calcul des objectifs de réduction du rythme d’artificialisation, afin de ne pas entraver la capacité de nos collectivités à développer ces projets, tout en permettant d’autres réalisations, pour les activités économiques ou pour l’habitat.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Je comprends bien l’intention de l’auteur de cet amendement, qui est fort louable. Dans la mesure où nous avons abordé le sujet du photovoltaïque, pourquoi n’irions-nous pas plus loin ?
Un amendement à l’objet identique a déjà été proposé au cours de la discussion relative au projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables – la loi vient d’ailleurs d’être promulguée –, mais il n’a pas été retenu lors de la commission mixte paritaire. À ce titre, il n’est peut-être pas très opportun d’aborder de nouveau ce sujet.
Par ailleurs, il nous semble toujours préférable de ne pas tenir compte de la destination de la construction. Nous préférons chercher plutôt l’échelle la plus pertinente de sa comptabilisation – locale, régionale ou nationale.
Mme Sophie Primas. Justement !
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Tel est en tout cas l’esprit de notre texte.
La commission spéciale demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Même avis.
À partir d’une certaine taille, tout projet peut être considéré comme un grand projet d’envergure nationale ou européenne.
Toutefois, considérer que n’importe quel projet relatif aux énergies renouvelables le serait reviendrait à bousculer la nature même d’une telle catégorie.
Mme Sophie Primas. Mouais…
Mme le président. Madame Darcos, l’amendement n° 74 rectifié est-il maintenu ?
Mme Laure Darcos. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 74 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 5
I. – Le III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets est complété par un 8° ainsi rédigé :
« 8° L’artificialisation des sols ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers, résultant de projets de construction, d’aménagement, d’infrastructures ou d’équipements d’ampleur régionale, peut ne pas être prise en compte pour l’évaluation de l’atteinte des objectifs mentionnés au second alinéa de l’article L. 141-3 du code de l’urbanisme et, dans ce cas, elle fait l’objet d’une comptabilisation séparée par la région.
« Le présent 8° est applicable dès lors que les conditions suivantes sont réunies :
« a) Les projets mentionnés au premier alinéa du présent 8° font l’objet d’une inscription au schéma prévu à l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, après avis de la conférence prévue au V du présent article qui se prononce sur leur qualification de projet d’ampleur régionale, ainsi que des collectivités territoriales et des groupements de collectivités territoriales sur le territoire desquels ces projets sont implantés. Ces avis sont rendus dans un délai de deux mois après transmission d’une liste préliminaire de projets par l’autorité compétente pour élaborer le schéma. Pour procéder à cette inscription, il peut être recouru à la déclaration de projet mentionnée à l’article L. 300-6 du code de l’urbanisme ;
« b) L’artificialisation ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers mentionnée au premier alinéa du présent 8° est prise en compte pour l’évaluation de l’atteinte des objectifs mentionnés au deuxième alinéa de l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales.
« Les communes et les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de document d’urbanisme, les départements et leurs groupements peuvent soumettre à l’autorité compétente pour l’élaboration du schéma prévu au même article L. 4251-1, en vue de leur qualification comme projet d’ampleur régionale, des projets dont l’implantation est envisagée sur leur territoire. L’autorité précitée se prononce par délibération motivée de son organe délibérant sur les suites données à ces demandes ; ».
II. – Le quatrième alinéa de l’article L. 151-5 du code de l’urbanisme est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Pour fixer ces objectifs, lorsque le plan local d’urbanisme est élaboré par un établissement public de coopération intercommunale, ce dernier tient compte de l’existence de projets de construction, d’aménagement, d’infrastructures ou d’équipements d’intérêt intercommunal sis sur le territoire des communes membres. Ces projets sont identifiés au sein du projet d’aménagement et de développement durables. »
Mme le président. L’amendement n° 9 rectifié bis, présenté par M. E. Blanc, Mme Thomas, M. Tabarot, Mme Di Folco, MM. Bascher, D. Laurent et Brisson, Mmes Goy-Chavent et Dumas, M. Longuet, Mmes Muller-Bronn, Bonfanti-Dossat et Lassarade et MM. Bouchet et Rapin, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Tabarot.
M. Philippe Tabarot. Cet article précise les modalités d’inscription des projets d’envergure régionale dans le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires, le Sraddet.
La demande d’inscription de tels projets se ferait ainsi sur saisine de toute commune ou établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétents en matière d’urbanisme, entraînant ainsi une délibération motivée du conseil régional pour refuser ou accepter chacune des demandes, après avis de la conférence régionale de la gouvernance de la politique de réduction de l’artificialisation des sols.
Cette procédure, lourde et contraignante, place les régions dans une situation de justification permanente. Elle crée aussi de l’instabilité, en raison de la possible modulation – sans fin et à la hausse – de l’enveloppe régionale, ce qui est incompatible, comme vous le savez, avec l’atteinte de l’objectif de 50 %, fixé à l’échelle régionale.
C’est pourquoi le sénateur M. Étienne Blanc souhaite supprimer cet article.
M. Jérôme Bascher. Et ce n’est pas rien ! (Sourires.)
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Nous anticipons déjà, dans le texte de la commission spéciale, les questions soulevées par M. Étienne Blanc dans son amendement. Nous avons en effet introduit un délai limite de deux mois dans notre texte. Il tend ainsi à mieux encadrer la procédure et à améliorer la concertation locale.
La commission spéciale demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Monsieur Tabarot, l’amendement n° 9 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Philippe Tabarot. Non, je le retire, madame le président.
Mme le président. L’amendement n° 9 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 69 rectifié bis, présenté par M. Babary, Mme Belrhiti, MM. Bouloux, Paccaud, Segouin, Somon, Rietmann, Perrin, Cuypers, Burgoa, E. Blanc, Meignen et Chatillon, Mme Lassarade, M. Tabarot, Mme Jacques, M. D. Laurent, Mme Dumont, M. Gremillet, Mme Chain-Larché, MM. Darnaud, Mandelli et Brisson, Mmes Ventalon et Dumas, MM. Piednoir et Pointereau, Mmes Canayer et Raimond-Pavero, MM. Sido et Savary, Mme Lopez, MM. B. Fournier, Rapin et Belin, Mme Garriaud-Maylam, M. de Nicolaÿ et Mme Di Folco, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La nature des projets d’ampleur régionale prévus au présent 8° est précisée par décret.
M. Laurent Somon. Il est défendu.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Les auteurs de cet amendement estiment que la nature des projets d’ampleur régionale sera laissée à la seule appréciation des conférences régionales du ZAN.
Telle n’est pas l’intention de la commission spéciale. Nous voulons en effet que les conférences régionales émettent des propositions, qui feront l’objet d’une décision de la région, qui les inscrira ou non dans le Sraddet.
Il ne paraît pas nécessaire de prévoir un décret qui contraindrait la liste des projets. Il vaut mieux appliquer le principe de subsidiarité, auquel nous sommes très attachés dans cette assemblée.
La commission spéciale demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Même avis.
Je pense que c’est aux élus locaux plutôt qu’aux services de l’État d’établir cette liste.
Mme le président. Monsieur Somon, l’amendement n° 69 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Laurent Somon. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 69 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 193, présenté par MM. Dantec, Benarroche et Breuiller, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4, première phrase
Remplacer les mots :
au schéma prévu à l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales
par les mots :
respectivement dans le document prévu aux articles L. 4251-1, L. 4424-9 et L. 4433-7 du code général des collectivités territoriales et à l’article L. 123-1 du code de l’urbanisme
II.- Alinéa 5
Après la référence :
L. 4251-1
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
, au quatrième alinéa du I de l’article L. 4424-9 et au troisième alinéa de l’article L. 4433-7 du code général des collectivités territoriales ainsi qu’au dernier alinéa de l’article L. 123-1 du code de l’urbanisme.
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Jérôme Bascher. Il vaut mieux !
M. Ronan Dantec. Vous l’avez bien compris, nous sommes très favorables à la mutualisation à l’échelle régionale, car elle fait partie de la souplesse indispensable à l’application du ZAN – c’est un objectif que nous partageons avec Mme la présidente de la commission spéciale et avec M. le rapporteur. La rédaction de l’article 5 s’inscrit dans cet esprit.
Il apparaît toutefois que, dans sa rédaction actuelle, il ne s’applique qu’aux régions qui, en application de l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, sont chargées d’élaborer un Sraddet.
Cet amendement vise à en étendre l’application aux régions qui sont chargées d’élaborer un schéma directeur de la région d’Île-de-France (Sdrif), un plan d’aménagement et de développement durable de la Corse (Padduc) et des schémas d’aménagement régionaux (SAR) dans les outre-mer.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Avis favorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Favorable ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Connivence ! (Sourires.)
Mme Sophie Primas. Profitez, mon cher collègue ! (Nouveaux sourires.)
Mme le président. L’amendement n° 121 rectifié, présenté par MM. C. Vial, Bacci et Bascher, Mmes Bellurot et Belrhiti, M. E. Blanc, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa, Charon et Chatillon, Mme L. Darcos, M. Darnaud, Mmes Dumas et Dumont, M. Genet, Mmes Gosselin et Goy-Chavent, MM. Gremillet et Husson, Mme Jacques, MM. D. Laurent et Longuet, Mmes Garriaud-Maylam et Noël, MM. Paccaud et Pellevat, Mme Puissat, MM. Rapin, Reichardt, Rietmann, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Somon et Tabarot et Mme Ventalon, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par cinq phrases ainsi rédigés :
Le schéma identifie le périmètre et les différentes composantes de ces projets. Il identifie les conséquences attendues de ces projets sur les infrastructures, équipements et besoins en logement du territoire. Ce schéma détermine le besoin foncier nécessaire à l’accueil du projet et de ses conséquences directes sur le territoire concerné. Si les capacités foncières du territoire d’accueil ne sont pas suffisantes, sans remettre en cause son développement endogène, il détermine une enveloppe foncière complémentaire nécessaire pour permettre la réalisation des conséquences directes de ce projet. Cette enveloppe complémentaire peut ne pas être prise en compte pour l’évaluation de l’atteinte des objectifs mentionnés au second alinéa de l’article L. 141-3 du code de l’urbanisme et, dans ce cas, elle fait l’objet d’une comptabilisation séparée par la région.
La parole est à M. Cédric Vial.
M. Cédric Vial. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec celui que nous avons adopté à l’article 4, mardi soir dernier. Il a pour objet d’instaurer une enveloppe foncière complémentaire sur laquelle seraient comptabilisés les projets induits par ceux qui ont été qualifiés d’ampleur régionale, relatifs aux infrastructures ou aux logements, par les conseils régionaux.
Ces projets seraient comptabilisés, après qu’a été réalisée l’étude de leur impact sur le territoire et si les enveloppes foncières disponibles à l’échelle du territoire ne permettent pas d’accueillir ce projet dans des conditions favorables.
Ainsi, une quarantaine de collègues qui ont cosigné cet amendement et moi-même proposons, par cohérence avec ce qui a été prévu pour les projets d’ampleur nationale ou européenne, de prévoir le même dispositif pour les projets d’ampleur régionale.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Cet amendement semble s’inscrire dans le prolongement, non pas de l’amendement qui a été adopté à l’article 4, mais de celui qui a été retiré. Si tel est le cas, la commission spéciale émet un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Monsieur Vial, ce que vous appelez cohérence, je le qualifierais plutôt d’effet de cascade ou de domino.
Notre argumentation est la suivante : pour éviter que la réduction de moitié du rythme de la trajectoire d’atteinte du ZAN soit trop contraignante, il faut ajouter des hectares à l’échelle nationale. Vous, vous nous dites qu’il faut ajouter des hectares à l’échelle régionale.
M. Cédric Vial. Oui !
M. Christophe Béchu, ministre. Lors de la discussion générale, tous les orateurs qui sont intervenus ont indiqué ne pas souhaiter remettre en cause la nécessité de diminuer la trajectoire d’artificialisation.
En votant cette disposition, en plus de celle qui existe déjà, nous ne sommes pas du tout sûrs que le total des enveloppes nationales et régionales ne soit pas, au bout du compte, plus élevé que la moitié que nous prétendons, dans le même temps, diminuer. (M. Cédric Vial le conteste.)
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. Fabien Genet. Il faut garder espoir !
Mme le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.
M. Cédric Vial. Depuis mardi, les esprits se sont apaisés.
Pour répondre à votre demande d’explication, monsieur le rapporteur, cet amendement s’inscrit bien à la suite de celui qui a été retenu.
L’amendement que j’ai retiré visait à ce que les effets collatéraux, pour ainsi dire, de cette enveloppe foncière complémentaire soient pris en compte, à l’instar de ce qui se fait pour les projets d’ampleur nationale, à l’échelle nationale, donc qu’ils soient purement et simplement décomptés de l’enveloppe.
L’amendement n° 120 rectifié, qui a été adopté, tend à préciser que les effets collatéraux d’un projet d’ampleur nationale soient comptabilisés dans une enveloppe régionale qui compte pour le ZAN, parce que l’on considère qu’il y a aussi des intérêts régionaux.
L’amendement dont nous discutons s’inspire du même raisonnement : il s’agit de prendre en compte les conséquences directes des projets d’ampleur régionale et de fixer une enveloppe foncière complémentaire régionale. Si l’on ne procède pas ainsi, un tel projet sera inclus dans les schémas de cohérence territoriale (Scot).
Si une centrale nucléaire est construite dans un territoire rural, il s’agit alors d’un projet d’intérêt national. En revanche, s’il s’agit d’un projet de moindre ampleur, qui s’intègre à l’échelle locale et qui nécessite d’employer mille personnes pour fonctionner, pour ce projet d’intérêt régional, ces mille emplois ne sont pas prévus dans le Scot ! Aujourd’hui, l’enveloppe est fermée à l’échelle d’un Sraddet. On ne pourra donc pas ajouter de capacité foncière dans un Scot sans en enlever à tous les autres.
Il est évident que l’on ne pourra pas accueillir ce type de projet avec des procédures aussi lourdes, qui nécessiteraient de diminuer le droit à construire d’un département pour en ajouter à un autre. Cette enveloppe foncière, qui sera régionale, rendra plus faciles les importations dans les territoires.
Néanmoins, il est vrai que, lors de la première répartition, l’ensemble des territoires auront une enveloppe un peu moindre.
Cet amendement est bien cohérent avec l’amendement qui a été voté mardi, dont l’objet est d’instaurer une déduction sur l’enveloppe régionale.
Mme le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Je voterai cet amendement.
Je vais le répéter – je vous prie de m’excuser, c’est sans doute mon côté enseignante qui prend le dessus : je pense que la pédagogie est l’art de la répétition, même si cela ne fonctionne pas toujours (Sourires.) – : on ne peut pas bloquer l’aménagement de nos territoires pour les années à venir ; il faut y faire attention.
Je suis la première à défendre le projet de requalification des friches. Pour autant, si aménager notre territoire demain signifie recréer ici une France industrielle, là une France des services et là-bas une France du vide, ce n’est pas le projet que j’ai pour la France !
Si l’on suit la logique de la relocalisation, de l’aménagement de tous nos territoires, afin d’éviter la concentration d’un certain nombre d’activités, donc des richesses et des problèmes d’embolie, y compris en matière de mobilité, que l’on a dû gérer au cours des dernières années, il faudra accepter que nos territoires accueillent demain des projets et toutes les conséquences qui vont avec et qui ont déjà été évoquées.
On connaît ces projets, certains sont d’envergure nationale, d’autres d’envergure régionale. Pour nombre d’entre eux, on se demandera, sur le modèle du débat byzantin sur le sexe des anges, si c’est un projet régional ou national. J’ignore où tout cela nous mènera, ce dont je suis sûre, c’est que nous ne pouvons pas, dans la situation actuelle, nous mettre des freins et bloquer le développement du pays.
En l’état, je suis favorable à cet amendement. (M. Cédric Vial applaudit.)
Mme le président. Quel est désormais l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Défavorable.
Mme le président. L’amendement n° 176, présenté par M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, M. J. Bigot, Mme Espagnac, MM. P. Joly et Kerrouche, Mme Préville, M. Kanner, Mme S. Robert, MM. Michau, Jacquin, Montaugé et Tissot, Mme Monier, M. Mérillou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 6, seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
L’autorité précitée informe les collectivités territoriales, établissements publics et groupements ayant soumis des projets, des choix retenus et des motivations qui ont conduit à les retenir ou à ne pas les retenir.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
M. Christian Redon-Sarrazy. Il est prévu par l’article 5 que les projets d’envergure régionale pourront être mutualisés et faire l’objet d’une inscription en tant que tel au Sraddet, après avis de la conférence régionale ZAN et des collectivités d’implantation desdits projets.
Les communes et les EPCI dotés de la compétence urbanisme seront donc force de proposition dans l’identification de ces projets.
Il est également prévu par cet article que la région se prononce par délibération motivée en conseil régional sur les suites à donner à ces demandes.
Nombre de maires et de présidents d’EPCI souhaiteront que leurs projets remontent à l’échelle régionale, nous n’en doutons pas.
Cet article nous semble donc alourdir la procédure d’identification des projets d’envergure régionale.
Aussi, cet amendement vise à supprimer la délibération motivée du conseil régional prévue pour chaque projet, afin de ne pas alourdir les débats et afin que les délais de réponse ne soient pas trop longs, du fait d’une file d’attente que nous connaissons pour d’autres types de demandes.
Nous proposons toutefois de maintenir à destination des collectivités ayant soumis des projets l’information relative aux choix et aux motivations qui ont conduit à les retenir ou non, afin que les porteurs de projet ne soient pas frustrés. Pour autant, ne provoquons pas l’embolie du système !
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Avis favorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° 137 rectifié bis, présenté par MM. Canévet, Bonneau, de Belenet, Mizzon, Laugier, Longeot et Le Nay, Mmes N. Goulet et Jacquemet, M. Kern, Mme Férat, MM. Louault, Levi, Prince, Chauvet et Duffourg, Mme Perrot, M. Folliot, Mme Morin-Desailly, M. J.M. Arnaud et Mme Herzog, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° L’artificialisation des sols ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers résultant de projets de construction, d’aménagement, d’infrastructures ou d’équipements d’ampleur supracommunale peut ne pas être prise en compte pour l’évaluation de l’atteinte des objectifs mentionnés au second alinéa de l’article L. 141-3 du code de l’urbanisme. »
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Cet amendement, déposé par Michel Canévet, vise à permettre la prise en compte des projets d’intérêt supracommunal dans la fixation des objectifs de réduction de l’artificialisation, à l’échelle d’un EPCI.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Qu’est-ce qu’un projet d’ampleur supracommunale ?
J’ai retrouvé cette notion dans la doctrine et dans plusieurs articles, mais, sauf erreur de ma part, elle n’a pas d’existence juridique.
De plus, la notion de supracommunalité peut s’entrechoquer avec celle d’intercommunalité ou, en tout cas, de projet d’intérêt intercommunal.
La commission spéciale demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Monsieur Longeot, l’amendement n° 137 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-François Longeot. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 137 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’article 5, modifié.
(L’article 5 est adopté.)
Mme le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq.)
Mme le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion de la proposition de loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’examen de l’amendement n° 174 tendant à insérer un article additionnel après l’article 5.
Après l’article 5
Mme le président. L’amendement n° 174, présenté par Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy et J. Bigot, Mme Espagnac, MM. P. Joly et Kerrouche, Mme Préville, M. Kanner, Mme S. Robert, MM. Michau, Jacquin, Montaugé et Tissot, Mme Monier, M. Mérillou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« …° Pour la première tranche de dix années mentionnée au 1° du présent III, la comptabilisation de la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers résultant de projets de construction ou d’aménagement pour des opérations destinées à la réalisation de programmes comportant majoritairement des logements sociaux, peut être pondérée dans l’évaluation de l’atteinte des objectifs de réduction du rythme de l’artificialisation ou de la consommation d’espaces prévus au présent article. Au plus tard le 1er janvier 2031, au sein de la conférence mentionnée au V du présent article, il est présenté un bilan de l’application de cette pondération. La conférence formule des propositions au regard des besoins fonciers constatés pour répondre aux enjeux de production de logements sociaux, de mixité sociale et fonctionnelle et d’équilibre entre les territoires, pour les périodes décennales ultérieures. Le présent alinéa s’applique sans préjudice des modalités de comptabilisation de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers prévues au présent article ;
« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application de cette pondération. »
La parole est à Mme Viviane Artigalas.
Mme Viviane Artigalas. Pour soutenir les collectivités dans leurs efforts de construction de logements sociaux et être en mesure de répondre davantage à la forte demande de logements à prix abordable, cet amendement tend à pondérer l’artificialisation résultant de projets de construction de logements sociaux.
Il s’agirait des opérations de construction ou d’aménagement destinées à la réalisation de programmes comportant majoritairement des logements sociaux.
Nous souhaitons concilier la mise en œuvre de l’objectif ZAN, sur lequel nous ne revenons pas, avec la production soutenue de logements sociaux, pour répondre aux 2,4 millions de demandeurs en attente d’un logement.
Il est proposé que cette pondération s’applique sur la première tranche 2021-2031. Un bilan de son application serait réalisé en 2031, ce qui permettrait à la conférence régionale de gouvernance du ZAN de faire des propositions pour les étapes décennales ultérieures.
La conférence pourrait ainsi vérifier la pertinence de cette mesure au regard des besoins fonciers constatés pour répondre aux enjeux de production de logement, de mixité sociale et fonctionnelle, et d’équilibre entre les territoires.
Il est bien précisé que cette pondération constitue non pas une dérogation à l’objectif ZAN, mais un outil facilitateur à utiliser à l’intérieur de l’enveloppe régionale.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. La commission spéciale s’est penchée sur les conséquences du ZAN sur le logement social et sur la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite SRU.
Nous n’avons pas choisi de suivre une telle direction, car nous avons considéré qu’il pourrait s’agir d’une nouvelle dérogation supplémentaire, alors que nous avons décidé d’en limiter le champ des exceptions.
Nous avons aussi collectivement choisi de ne pas opter pour un système de pondération. Pour autant, nous sommes évidemment bien conscients qu’il s’agit d’un sujet très important.
Plus concrètement, construire un mètre carré dans un espace naturel, quel que soit l’objectif – qu’il s’agisse de logement social ou non –, c’est artificialiser un mètre carré.
Nous avons pensé qu’il ne fallait pas, à ce stade, mêler le logement social et le ZAN. Le logement social peut bénéficier d’autres outils – politiques publiques, subventions, fiscalité avantageuse, aides diverses. Il ne faut donc pas utiliser les objectifs du ZAN à ce stade de la discussion.
Peut-être irons-nous prochainement dans cette direction, mais la commission spéciale, dans le cadre de la discussion de ce texte, n’a pas fait ce choix. L’adoption de cet amendement nous emmènerait trop loin.
Par conséquent, la commission spéciale demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Pour autant, je partage votre préoccupation et il faudra bien régler cette question.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, pour trois raisons.
La première raison, c’est la pondération. Adopter un amendement visant à mettre en œuvre une telle mesure revient à mettre le doigt dans un engrenage, qui va, dans l’ensemble, compliquer tous nos domaines d’action.
La deuxième raison, c’est que le Gouvernement est défavorable au principe d’une sortie de la trajectoire d’atteinte du ZAN.
La troisième raison, c’est qu’il n’y a pas de construction plus sobre pour le foncier que le logement social. Près de 84 % des logements sociaux construits dans notre pays sont des collectifs. Autant nous considérons qu’il pourrait, à la rigueur, y avoir un sujet dans les communes rurales, autant nous considérons que, dans les communes astreintes à l’obligation SRU, le sujet du foncier n’est pas premier.
Mme le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. Je maintiens mon amendement.
J’appelle votre attention sur le fait qu’en matière de construction la plupart des difficultés affecteront, selon nombre d’observateurs, la construction de logements sociaux, même si elle consomme moins de foncier, comme vous l’avez mentionné, monsieur le ministre.
Lorsque le foncier sera rare, les opérateurs et les maires choisiront d’autres projets que la construction de logements sociaux.
Je souhaitais vous alerter sur ce point et je tiens à ce que cet amendement soit mis aux voix.
Mme le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. L’amendement de Viviane Artigalas nous alerte sur une réalité, même si sa rédaction n’est pas l’unique solution. En effet, à partir du moment où la constructibilité globale sera atteinte, il y aura moins de foncier. Cela entraînera un effet prix – nous en avons déjà parlé – et un effet compétitivité, car tout le foncier n’appartient pas aux collectivités locales.
Un propriétaire d’un terrain ou un détenteur d’une propriété peut choisir de le vendre à qui il veut.
La rareté entraînera la compétition pour l’acquisition de ces terrains ; or, on le sait, les projets de logements sociaux, au regard de leurs moyens, ne seront souvent pas à la hauteur des autres projets de promotion privée.
La question du prix du foncier et celle de la façon dont on produit du logement social à des prix abordables dans le cadre du ZAN me paraissent insuffisamment traitées à ce jour.
Aussi, je crois que, par cet amendement, notre collègue soulève cette question et exige que le Gouvernement et le Sénat travaillent de concert pour mieux relever ce défi.
Mme le président. La parole est à Mme la présidente de la commission spéciale.
Mme Valérie Létard, présidente de la commission spéciale. J’abonderai dans le sens de Marie-Noëlle Lienemann et je salue la proposition d’amendement de Viviane Artigalas, qui aborde un sujet qui nous inquiète tous.
Comment le logement social peut-il trouver sa place, alors que le ZAN impose une pression foncière et que nombre de critères doivent être satisfaits ?
À l’instar de Marie-Noëlle Lienemann, je pense que pondérer et rendre le logement prioritaire n’est pas la bonne solution.
Dans un deuxième temps, après l’examen de ce texte, il faudra aborder le sujet du financement du ZAN – ce sera l’acte II ou le deuxième étage de la fusée de la question du ZAN –, c’est-à-dire l’accompagnement et les solutions qui permettront de construire la ville sur la ville.
Demain, nous devrons accompagner les acteurs du logement social pour les aider à maîtriser le coût du foncier. Si nous laissons les choses se faire naturellement, quel opérateur pourra trouver les moyens d’acquérir, de transformer, de requalifier des friches et de construire des logements sociaux ?
C’est déjà difficile aujourd’hui, ce sera pire demain, au moment où nous aborderons cette question dans l’acte II du ZAN, qui répondra à cette question, centrale, à savoir comment se donner les moyens d’y parvenir.
Mme le président. L’amendement n° 136 rectifié ter, présenté par MM. Canévet, Bonneau, de Belenet, Mizzon, Laugier et Longeot, Mme N. Goulet, M. Le Nay, Mme Jacquemet, M. Kern, Mmes Saint-Pé et Férat, M. Louault, Mme Devésa, MM. Levi et Prince, Mme de La Provôté, MM. Chauvet et Duffourg, Mme Perrot, M. Folliot, Mme Morin-Desailly, M. J.M. Arnaud et Mme Herzog, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 7° de l’article L. 141-8 du code de l’urbanisme, le mot : « intercommunal » est remplacé par le mot : « supracommunal ».
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Cet amendement de Michel Canévet vise à soustraire de la consommation foncière locale les constructions d’équipements de services publics essentiels.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Pour les mêmes raisons que pour l’amendement que vous avez précédemment présenté, mon cher collègue, la commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Même avis.
Le terme « supracommunal » n’est pas suffisamment défini pour qu’on l’introduise dans le texte.
M. Jean-François Longeot. Je retire l’amendement, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 136 rectifié ter est retiré.
Chapitre III
Mieux prendre en compte les spécificités des territoires
Avant l’article 6
Mme le président. L’amendement n° 95, présenté par Mmes Cukierman, Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Avant l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets est ainsi modifié :
1° Le 3° du III est ainsi rédigé :
« Pour la première tranche de dix années, le rythme prévu à l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales doit permettre la préservation d’au moins 90 % d’espaces naturels, agricoles ou forestiers ; »
2° Après ce même 3°, il est inséré un 3° … ainsi rédigé :
« 3° … Pour les régions ayant atteint le seuil de 90 % d’espaces naturels, agricoles ou forestiers préservés sur leur territoire, plus aucune consommation nette d’espaces naturels, agricoles ou forestiers n’est possible. » ;
3° Au deuxième alinéa du 5° du IV, les mots : « la carte communale engagent l’intégration d’un objectif, pour les dix années suivant la promulgation de la présente loi, de réduction de moitié de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers par rapport à la consommation réelle observée sur les dix années précédentes » sont remplacés par les mots : « la carte communale, tiennent compte des objectifs de préservation d’au moins 90 % d’espaces naturels, agricoles ou forestiers, tels que prévus au 3° du présent article ».
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Par cet amendement, nous souhaitons en quelque sorte inverser la logique du ZAN en privilégiant la préservation du vivant à la contrainte sur la constructibilité.
En effet, réduire de moitié leurs constructions n’a aucun sens pour des communes qui ont très peu bâti. À l’inverse, inciter les communes qui ont déjà beaucoup artificialisé à continuer de construire risque d’aggraver des situations alarmantes en matière de biodiversité, de perméabilité des sols, de qualité de l’air et de la vie.
De plus, les objectifs fixés par le ZAN figeront le paysage français sans tenir compte des potentielles évolutions économiques et sociales et inciteront à surdensifier les grandes métropoles plutôt qu’à créer des villes ou des villages à taille humaine.
Au rythme fixé par les objectifs du ZAN, 175 000 hectares supplémentaires auront été artificialisés d’ici à 2050, soit 0,3 % de la surface métropolitaine, qui s’étend sur 55 millions d’hectares. Ces 0,3 % s’ajouteraient aux 9 % déjà artificialisés selon certaines estimations.
En tenant compte de la surface non artificialisée à préserver, qui avoisinera les 90 % en 2050, plutôt qu’en limitant les constructions de façon disparate sur l’ensemble du territoire, la loi ouvrirait ainsi des possibilités rationnelles de constructibilité à toutes les collectivités. Ce faisant, elle serait en adéquation avec les accords de la COP15, qui fixe un objectif de 30 % d’espaces naturels à préserver.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Je suis fermement opposé à cet amendement, dans la mesure où son adoption modifiera l’objectif directeur du dispositif du ZAN, allant ainsi à l’encontre du choix de la commission spéciale. Il s’agit d’une remise en cause de l’esprit de la loi Climat et résilience, qui tendait plutôt à responsabiliser les territoires.
De plus, l’objectif proposé nous semble moins ambitieux que celui qui a été fixé par cette même loi.
Enfin, cela remettrait en cause tous les schémas intercommunaux en cours – Sraddet, Scot, plans locaux d’urbanisme (PLU), plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUi)… –, ce qui serait source d’insécurité juridique et sans doute d’incompréhension pour les élus et causerait une perte de temps pour le climat.
La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. Christophe Béchu, ministre. Avis défavorable.
Je précise que l’exposé des motifs comporte des erreurs. Je suis incapable de vous dire le nombre d’hectares qui auront été artificialisés d’ici à 2050. Selon la décision qui a été prise, 125 000 hectares l’auront été d’ici à 2030. Dans ces conditions, comment n’artificialiser que 50 000 hectares entre 2030 et 2050, tel que le laisse entendre l’objet de cet amendement ? Cela signifierait, au regard du rythme actuel, que l’on passerait à zéro artificialisation dès l’année 2033 ou 2034.
Par ailleurs, la rédaction de cet amendement crée une inégalité alors même que vous souhaitez instaurer une garantie rurale, mesdames, messieurs les sénateurs. Toutes les communes n’ont pas la même superficie : certaines s’étendent sur un petit espace, d’autres sur des surfaces gigantesques. L’appréciation de 90 % de surface non artificialisée créerait une sorte de plafond qui s’ajouterait au plancher s’appliquant aux constructions. Cela reviendrait à produire une norme complexe, qui pousserait les territoires ruraux à accueillir des constructions malgré une éventuelle volonté de maîtriser leur urbanisation.
Aussi, pour des questions de souplesse, de libre administration des collectivités territoriales et d’ambition climatique, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Une chose me paraît certaine : compter en termes de maintien de la surface non artificialisée plutôt que de constructions nouvelles n’est pas de nature à modifier les contraintes ou les libertés des collectivités. (M. le ministre le conteste.) Nous proposons que la logique ne vise pas à freiner la capacité de développement des petites communes qui ont peu construit. La surface qui doit être préservée étant définie par un pourcentage, une collectivité ayant une petite superficie aura à préserver une surface moindre qu’une commune étendue.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. J’ai bien compris que nous étions en désaccord, mais nous maintenons cet amendement.
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 64 rectifié bis, présenté par MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, MM. Guiol, Requier, Chasseing, Folliot, Grand et Houpert, Mme Noël, MM. A. Marc et Savin et Mme Vermeillet, est ainsi libellé :
Avant l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre V de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets est complété par un article … ainsi rédigé :
« Art. …. – Le présent chapitre ne s’applique pas aux communes de 2 000 habitants ou moins, dont 90 % minimum de la superficie communale est constituée d’espaces naturels ou de zones agricoles. »
La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Il s’agit de transposer l’article unique de la proposition de loi n° 786 déposée par Christian Bilhac le 13 juillet 2022.
Cet amendement a pour objet d’exonérer les communes de 2 000 habitants ou moins, dont au moins 90 % de la superficie est constituée d’espaces naturels ou de zones agricoles, des obligations de zéro artificialisation nette. Ces petites communes constituent l’essence même de la ruralité. Alors qu’elles ont faiblement artificialisé leur territoire, parfois à moins de 2 % ou 3 %, elles devraient renoncer à des projets utiles à leurs habitants. De fait, elles respectent déjà le ZAN.
Mme le président. L’amendement n° 103 rectifié septies, présenté par Mme Herzog, MM. Reichardt, Louault, Pellevat, Chatillon et Calvet, Mme F. Gerbaud, MM. Duffourg, Cadec, Panunzi et Joyandet, Mmes Schalck et N. Goulet, MM. Canévet, Longuet et Belin, Mme Ventalon et MM. Delcros, Folliot, Le Nay, Bouloux, Houpert, Chasseing et Hingray, est ainsi libellé :
Avant l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre V de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets est complété par un article … ainsi rédigé :
« Art. …. – Le présent chapitre ne s’applique pas aux communes de 1 000 habitants ou moins, dont 70 % minimum de la superficie communale est constituée d’espaces naturels ou de zones agricoles. »
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement est pratiquement identique au précédent, sinon que le seuil est fixé à 1 000 habitants ou moins. Même motif, même punition : des petites communes qui ont très peu artificialisé ne pourront plus rien construire, compte tenu de la répartition prévue par le texte. Cette double peine est extrêmement injuste.
Dans un département comme le mien, composé majoritairement de communes de moins de 1 000 habitants, le résultat serait catastrophique.
Cet amendement a été déposé par Mme Herzog ; je le soutiens sans réserve.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Si cette proposition de loi a bien une cible, ce sont les petites communes rurales. Pour autant, nous proposons d’atteindre notre objectif non pas par une dérogation supplémentaire, ce qui est un peu l’esprit de ces deux amendements, mais par une territorialisation, que nous souhaitons conforter, renforcer, améliorer – chacun appliquera le terme qui lui sied.
À cet égard, je vous renvoie à l’article 7 de ce texte, qui introduit une surface minimale de développement communal – nous pourrions même dire, au fond, de développement rural.
La commission spéciale émet par conséquent un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces amendements, et ce pour deux raisons.
D’une part, si le texte ne comportait pas la garantie rurale, je comprendrais que l’on se demande comment préserver le monde rural. Reste que c’est bien le cas et c’est précisément à cela que serviront les mécanismes de ce dispositif.
D’autre part, les communes de moins de 1 000 ou 2 000 habitants forment un ensemble hétérogène : certaines sont en déprise de population forte, d’autres en progression. Ainsi, les exonérations auraient un sens pour certaines d’entre elles, mais en auraient moins pour d’autres, les trajectoires étant très différentes d’un territoire à l’autre.
Nous sommes attentifs à cette situation. Pour y répondre, nous avons choisi le cadre de la garantie rurale et non celui d’un dispositif d’exonérations, qui, de surcroît, s’appuierait sur un double seuil : le pourcentage de construction et le nombre d’habitants. Ce seuil entraînerait des iniquités entre des communes comptant un nombre d’habitants comparable, mais dont la superficie diffère.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 64 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 103 rectifié septies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Les amendements nos 21 et 18 ne sont pas soutenus.
Article 6
I. – Le deuxième alinéa de l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Il est tenu compte des efforts de réduction de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers déjà réalisés par les collectivités compétentes en matière d’urbanisme au cours des vingt dernières années et traduits au sein de leurs documents d’urbanisme. À compter de 2031 et pour chaque tranche de dix années, il est également tenu compte de l’effort de réduction de l’artificialisation constaté au cours de la tranche de dix années précédentes. »
II (nouveau). – Le 5° de l’article L. 141-8 du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Au début, sont ajoutés les mots : « Pour la première tranche de dix années mentionnée à l’article L. 141-3, » ;
2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « À compter de 2031 et pour chaque tranche de dix années, il est tenu compte de l’effort de réduction de l’artificialisation constatée au cours de la tranche précédente ; ».
Mme le président. Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 217 rectifié bis, présenté par MM. Rambaud, Lemoyne, Lévrier, Bargeton, Dagbert, Mohamed Soilihi, Patient et Buis, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Rédiger ainsi cet alinéa :
I. - Le deuxième alinéa de l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales est complété par les mots : « , en tenant compte, pour les schémas de cohérence territoriale approuvés avant la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, des objectifs de réduction du foncier fixés dans le schéma de cohérence territoriale lorsqu’ils ont été supérieurs à une réduction de la consommation du foncier de plus de 35 % par rapport aux dix ans précédant l’approbation du schéma de cohérence territoriale ».
La parole est à M. Michel Dagbert.
M. Michel Dagbert. Afin de garantir une meilleure prise en compte des efforts passés de réduction de la consommation du foncier dans les territoires, cet amendement vise à prendre en compte les trajectoires de réduction du foncier qui ont été actées par les élus dans les documents approuvés avant la loi Climat et résilience, dès lors que l’objectif de réduction de la consommation du foncier excède 35 % par rapport aux dix années précédant l’approbation.
Mme le président. L’amendement n° 229 rectifié, présenté par MM. J.M. Boyer, Duplomb et D. Laurent, Mmes Dumont et Thomas, M. Chatillon, Mme Bellurot, MM. Darnaud, Levi, Burgoa, Panunzi, Cadec et Grosperrin, Mme Dumas, MM. Sido et Longuet, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bascher, Mme Muller-Bronn, MM. Courtial, Louault, Meurant, de Legge, A. Marc et Genet, Mme de La Provôté, M. Allizard, Mme Imbert, MM. Saury, Wattebled et Verzelen, Mme Gosselin, M. Chasseing, Mmes Raimond-Pavero et Schalck, MM. B. Fournier, Rapin, Belin et Houpert et Mmes Estrosi Sassone et Di Folco, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
par deux phrases ainsi rédigées : «
par les mots :
par les mots et deux phrases ainsi rédigées : « à l’exception des communes soumises au règlement national d’urbanisme.
La parole est à M. Fabien Genet.
M. Fabien Genet. Cet amendement de Jean-Marc Boyer vise à instaurer une garantie rurale pleine et entière, qui tiendrait compte des spécificités des petites communes rurales afin de ne pas freiner leur développement, alors qu’elles ont peu artificialisé par rapport au reste du territoire.
Ainsi, les communes soumises au règlement national d’urbanisme (RNU) ne seraient pas incluses dans le dispositif global du ZAN. Comme vous le voyez, il s’agit d’un amendement très volontariste.
Mme le président. L’amendement n° 206 rectifié, présenté par MM. Corbisez et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire et Gold, Mme Guillotin et MM. Guiol et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Après les mots :
rédigées : «
insérer une phrase ainsi rédigée :
Il est tenu compte, pour les schémas de cohérence territoriale approuvés avant la loi n° 2021- 1104 du 22 août 2021, des objectifs de réduction du foncier fixés par ces schémas lorsqu’ils ont été supérieurs à une réduction de la consommation du foncier de plus de 35 % par rapport aux dix années précédant l’approbation du schéma.
La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Il est défendu, madame la présidente. Cet amendement est quasiment identique à celui de M. Rambaud.
Mme le président. Les amendements nos 130 et 129 ne sont pas soutenus.
L’amendement n° 198, présenté par Mmes Cukierman, Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 1, seconde phrase
Remplacer le mot :
constaté
par les mots :
ainsi que des enjeux de maintien de la population dans les communes classées en zone de revitalisation rurale ou ayant subi une perte démographique, constatés
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. L’amendement n° 217 rectifié bis tend à limiter la prise en compte par les Sraddet des efforts passés des Scot, s’ils sont inférieurs à un objectif de 35 % de réduction de consommation de foncier. Sur quels fondements repose la définition de ce seuil de 35 % ?
Il nous semble que l’adoption de cet amendement pénaliserait les territoires les moins ambitieux. Ceux-ci ne sont pourtant pas moins vertueux, dans le sens où ils ont pu appliquer un objectif de réduction de la consommation de foncier bien avant la définition d’objectifs par la loi Climat et résilience, cet objectif pouvant être supérieur à ceux des collectivités voisines.
Laissons les régions et les Scot effectuer la territorialisation des objectifs en prenant en compte les différents degrés d’efforts des collectivités. Assurons-nous simplement que ces efforts soient bien considérés.
La commission spéciale émet un avis défavorable sur l’amendement n° 217 rectifié bis.
L’amendement n° 229, déposé par Jean-Marc Boyer, vise à exempter de ZAN les communes soumises au RNU. Faut-il le redire, les communes soumises au RNU sont déjà exemptées du ZAN, dans la mesure où les objectifs de sobriété s’appliquent uniquement aux communes et EPCI couverts par un document d’urbanisme.
Je précise toutefois que cette exemption n’est pas totale : une circulaire du Premier ministre d’alors recommande fortement aux préfets de veiller à ce qu’elle s’inscrive dans une trajectoire. Pour autant, juridiquement, les communes soumises au RNU ne sont pas soumises au ZAN.
La commission spéciale émet un avis défavorable sur l’amendement n° 229 rectifié, de même que sur l’amendement n° 206 rectifié, pour les mêmes raisons.
Enfin, l’amendement n° 198 vise à intégrer les enjeux de maintien démographique aux critères de territorialisation, ce qui semble déjà le cas. Il est donc satisfait. Par conséquent, la commission spéciale émet un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Nos conclusions rejoignent celles du rapporteur.
Le Gouvernement est défavorable au seuil de 35 % pour des raisons déjà évoquées.
Pour ce qui est du RNU, si l’on explique aux communes qu’elles sont exonérées du ZAN dès lors qu’elles n’ont pas de document d’urbanisme, cela risque de poser problème. Pour votre information, mesdames, messieurs les sénateurs, 1 % de la population vit dans des communes soumises au RNU. Or ces dernières ont été à l’origine de 3 % de la consommation foncière au cours de ces dix dernières années, malgré l’exonération du ZAN.
C’est dire que, contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, ces communes n’ont pas fait preuve de davantage de sobriété. Toutefois, des disparités énormes existent, dans la mesure où 25 % du territoire est concerné. Les cas de figure sont nombreux.
Enfin, sur les zones de revitalisation rurale (ZRR), j’appelle votre attention sur le fait que le dispositif s’arrête en fin d’année. Si un nouveau dispositif de soutien sera bien évidemment créé – nous en discuterons très vraisemblablement dans cet hémicycle –, la garantie rurale a été pensée dans le même esprit et il serait bancal de rattacher celle-ci à un dispositif ZRR qui a une date de fin. Pour parvenir au même objectif, la garantie rurale nous semble plus efficace.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
M. Michel Dagbert. Je retire l’amendement n° 217 rectifié bis, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 217 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Fabien Genet, pour explication de vote.
M. Fabien Genet. Les propos qui viennent d’être tenus, à savoir que les communes soumises au RNU ne se verront pas appliquer le ZAN, mériteront énormément de pédagogie sur le terrain. En effet, cela n’incitera pas vraiment ces communes à rejoindre des documents d’urbanisme, notamment des PLU ou PLUi.
Il faudra se pencher sur cette question, car il est facile d’imaginer ce que les maires, sur le terrain, pourraient déduire de ces paroles.
Toutefois, compte tenu des avis qui viennent d’être émis, je retire l’amendement de n° 229 rectifié.
Mme le président. L’amendement n° 229 rectifié est retiré.
La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. L’article 6 me semble important et nous le voterons.
La commission spéciale a apporté une vraie avancée en comblant une faiblesse de la loi, qui ne tenait pas compte de ce qui avait été fait avant. Néanmoins, cet article demeure flou.
Par ailleurs, le débat est centré sur les petites communes, mais toutes les communes sont concernées par cet article, y compris les grandes agglomérations, qui ont aussi fait des efforts. Si certaines agglomérations ont beaucoup gaspillé, d’autres sont conscientes depuis longtemps que le foncier est rare.
Peut-être M. le ministre apportera-t-il quelques éclaircissements : au-delà du cadre fixé par cet article, comment se déclinera-t-il concrètement ? Il me semble qu’il s’agit là du débat que nous devrions avoir sur cet article, plutôt que de nous borner aux aspects relatifs aux petites communes, même si chacun est conscient des difficultés de ces dernières.
Mme le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christophe Béchu, ministre. Monsieur Dantec, vous n’obtiendrez pas d’éclaircissement ce soir ; ce n’est ni l’heure ni le moment. Toutefois, nous sommes conscients que les discussions au cours de la navette parlementaire permettront d’enrichir l’article 6.
En effet, le principal intérêt de cet article est l’effet d’appel que la commission spéciale provoque en inscrivant dans le texte la prise en compte des efforts passés. Nous avons conscience qu’il s’agit d’un point à retravailler.
Mme Cécile Cukierman. Je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 198 est retiré.
Je mets aux voix l’article 6.
(L’article 6 est adopté.)
Article 7
I. – Après le 3° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3° bis L’intégration et la déclinaison territoriale des objectifs mentionnés au présent article au sein des documents de planification et d’urbanisme ne peut avoir pour effet de conduire une commune à devoir réduire son artificialisation en deçà d’une surface minimale de développement communal. Pour la première tranche de dix années mentionnée au 1° du présent III, cette surface minimale est fixée à un hectare. Le présent 3° bis s’applique sans préjudice des modalités de comptabilisation de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers prévues au présent article ; ».
II. – Le deuxième alinéa de l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Cette déclinaison tient également compte de la diversité des territoires urbains et ruraux, des stratégies et des besoins liés au développement rural ainsi qu’à la revitalisation des zones rurales et des communes rurales caractérisées comme peu denses ou très peu denses au sens des données statistiques de densité établies par l’Institut national de la statistique et des études économiques. Cette déclinaison respecte la surface minimale de développement communale prévue au 3°bis du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. »
III. – L’article L. 141-8 du code de l’urbanisme est complété par un 8° ainsi rédigé :
« 8° De la surface minimale de développement communal devant être respectée en application du 3° bis du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. »
IV. – L’article L. 151-5 du code de l’urbanisme est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces objectifs respectent par ailleurs la surface minimale de développement communal prévue au 3°bis du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. »
V. – L’article L. 161-3 du code de l’urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’application du présent article est sans préjudice du respect de la surface de minimale de développement communal prévue au 3° bis du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. »
VI. – Au plus tard le 1er janvier 2031, au sein de la conférence mentionnée au V de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est présenté un bilan de l’application de la surface minimale de développement communal dans le cadre de la territorialisation des objectifs de réduction de l’artificialisation applicables à la première période décennale, de son adéquation avec les besoins fonciers constatés durant la période et de l’artificialisation constatée durant cette même période. La conférence formule des pistes de réduction de la surface minimale de développement communal pour les périodes décennales ultérieures, en vue d’atteindre l’objectif d’absence d’artificialisation nette à l’horizon 2050.
Mme le président. La parole est à M. Fabien Genet, sur l’article.
M. Fabien Genet. Monsieur le ministre, mardi, vous nous avez dit que cette proposition de loi cherchait non seulement à envoyer un message, mais, surtout, à changer la loi. En votant cet article 7, nous faisons les deux. Nous envoyons un message à la fois clair, attendu et légitime.
Ce message, c’est notre refus de voir le ZAN congeler le développement de milliers de communes rurales. Ce dispositif ne doit pas condamner nos concitoyens ruraux à l’hibernation, les transformant en Hibernatus que l’on ne réveillerait que pour payer leurs impôts.
Le ZAN ne peut pas punir les 10 800 communes vertueuses en matière foncière, qui ont consommé moins de un hectare en dix ans et qui craignent d’être désormais privées de tout droit à construire. Celles-ci représentent 28 % des communes et ne sont responsables que de 5 % de la consommation foncière nationale, soit un millième de leur surface.
Sur le terrain, les maires de ces communes nous interpellent. Leur commune étant très rurale, peu dense, couverte de prés, de champs, de forêts qui s’étalent à perte de vue, ils ne comprennent pas pourquoi on les prive du droit à construire une ou deux habitations au motif de la lutte contre l’étalement urbain.
L’inscription dans la loi de la garantie rurale, soit un hectare de surface minimale de développement communal, est donc une condition indispensable à l’acceptabilité du ZAN dans nos campagnes. Il s’agit aussi de l’assurance que la ruralité ne deviendra pas la variable d’ajustement du ZAN.
Dans notre esprit, la garantie rurale doit également constituer une preuve réelle de l’attachement de la nation à ses campagnes et un message volontariste adressé aux bureaux d’étude, aux administrations, aux juges administratifs comme aux entités les plus grandes, les plus puissantes : communes, villes, intercommunalités, régions ou territoires de Scot.
Moins artificialiser le pays ne signifie pas dévitaliser la ruralité, bien au contraire !
M. Jean-Michel Arnaud. Très bien !
Mme le président. La parole est à Mme Angèle Préville, sur l’article.
Mme Angèle Préville. La ruralité n’est peut-être pas celle que l’on imagine.
Le monde change très vite, y compris à la campagne. Dans mon département, le Lot, comme partout, de nombreux emplois sont à pourvoir. Dans la plupart des petites communes, à la suite du covid et à la faveur des taux d’intérêt bas de ces dernières années, tout s’est très vite vendu. Par ailleurs, très peu de logements restent disponibles à la location. En d’autres termes, très concrètement, il est difficile d’acheter ou de louer.
Nous sommes face à une équation quasiment impossible à résoudre : où allons-nous loger tous les nouveaux habitants que nous devons accueillir pour occuper les postes vacants, si nous ne donnons pas plus de souplesse à la construction ?
Le Lot est un département très peu peuplé – il ne compte que 174 000 habitants –, mais de plus en plus attractif : le tourisme est en plein essor, des entreprises internationales y prospèrent, des start-up s’y installent, le territoire bruisse d’initiatives qui ne demandent qu’à se développer. Nous avons de l’espace, une qualité de vie empreinte de sérénité et de convivialité, des paysages magnifiques… En somme, c’est un territoire où il fait bon vivre.
Mme Sophie Primas. Il faut vivre dans le Lot ! (Sourires.)
Mme Angèle Préville. Nous ne pouvons nous résoudre à devenir une sorte de réserve d’Indiens sacrifiés sur l’autel du ZAN (M. le ministre lève les yeux au ciel. – Mme Nathalie Goulet s’exclame.), au prétexte que notre territoire capte du carbone et que c’est très bien comme cela – sous-entendu, pour compenser l’artificialisation ailleurs. Nous aussi, nous avons droit au développement.
D’une certaine manière, l’application actuelle des décrets relatifs au ZAN dans les PLUi s’apparente à une forme de condamnation. Quel est notre avenir commun ? Celui de métropoles toujours plus étendues qui grandissent sur des terres fertiles et des plaines alluviales ? Quel apport sera-t-il accordé au développement de territoires agricoles plus pauvres, comme celui des Causses du Lot ?
Un tiers de la population vit dans les territoires ruraux. Pour que la lutte contre l’artificialisation des sols soit réussie, les efforts doivent être équitablement partagés. C’est l’objet de cette garantie rurale, que je défendrai. (Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.)
Mme le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, sur l’article.
Mme Sylvie Robert. Cette proposition de loi, en particulier l’article 7, me semble tout à fait décisive. Elle définit en effet concrètement le potentiel d’artificialisation et, partant, de construction et d’urbanisation dont disposeront les élus locaux dans la décennie à venir, dans la perspective d’atteindre le ZAN d’ici à 2050.
L’enjeu principal est bien celui-ci : préserver nos sols pour mieux protéger notre environnement et mieux vivre. L’exemple caricatural des entrées de villes où de vastes surfaces, notamment agricoles, ont été artificialisées n’est absolument plus soutenable.
La capacité d’aménagement de nos collectivités territoriales doit être maintenue. Il s’agit non pas de ne plus faire, mais de faire autrement. Je pense singulièrement aux territoires ruraux, qui ont bien sûr droit au développement – ce droit doit être impérativement protégé et consacré. Il n’est pas question de sacrifier les communes rurales et leurs habitants et de les priver de toute perspective d’aménagement.
Toutefois, la solidarité foncière que met en œuvre cet article, ce fameux hectare pour chaque commune rurale, aurait peut-être pu s’inscrire dans une autre dynamique, plus conforme à l’esprit du texte : celle de la différenciation territoriale, de l’intelligence collective, au travers de la conférence des maires, au service, par exemple, de la réalisation d’un projet de territoire. Quoi qu’il en soit, il est évident que les collectivités auront besoin d’être accompagnées par l’État en matière d’ingénierie.
En résumé, cette proposition de loi ne fait rien de moins qu’esquisser le visage futur de la France. Il s’agit d’un pas essentiel vers la transformation de nos manières de fabriquer la ville, les villages, la campagne et de tendre, comme je le dis souvent, vers des possibles ignorés.
Mme le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, sur l’article.
Mme Viviane Artigalas. Nous sommes parvenus au cœur de cette proposition de loi : la garantie rurale. En effet, celle-ci nous a été demandée par tous les représentants des territoires, en particulier ruraux. Il s’agit évidemment d’une garantie minimale, qui profitera le plus souvent aux communes rurales.
Je tiens à rassurer sur la question de la sobriété foncière.
Nous savons très bien que cet hectare ne sera pas consommé par toutes les communes. Certains maires me l’ont dit : ils ont déjà fait un travail de sobriété foncière, ils ont prévu le développement de leur commune et n’en ont pas forcément besoin.
Il s’agit simplement de laisser à des communes rurales la possibilité de ne pas s’inscrire dans une équation qui serait la même pour tous, à savoir 50 % de ce qui a déjà été fait. En effet, celle-ci ne laisse pas la liberté à certaines communes qui n’ont pas construit par le passé de le faire à l’avenir pour réaliser un nouveau projet. Laissons-leur a minima la possibilité de réaliser un écart, qui n’est franchement pas énorme.
En outre, une clause de revoyure est prévue : la conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l’artificialisation des sols pourra faire un point sur la situation avant la fin de la période 2022-2031, afin de déterminer quelle surface a été consommée et ce qu’il convient de décider pour la suite – réduire la surface constructible ou, au contraire, l’augmenter.
Il me semble donc que nous disposons de toutes les assurances pour que la garantie rurale profite au mieux à tous nos territoires. Ils en ont besoin !
Mme le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, sur l’article.
Mme Cécile Cukierman. Malgré l’heure qui avance, je tiens à intervenir sur cet article, car la garantie rurale est au cœur de cette proposition de loi. Elle peut et même doit faire débat. Valait-il mieux autoriser un hectare pour tous, définir un pourcentage ou recourir à d’autres dispositifs ? Ce qui est certain, et Fabien Genet l’a rappelé, c’est qu’il faut toujours veiller à l’acceptabilité de nos politiques publiques.
Or le ZAN, tel qu’il a été défini, comporte un certain degré d’inacceptabilité. Pour preuve, un sentiment d’abandon prévaut chez les élus des territoires ruraux, comme cela vient d’être rappelé, comme prévaut l’idée que, s’il était appliqué en l’état, ils se trouveraient à l’avenir dans l’incapacité de continuer d’aménager leur territoire communal.
Nous voterons pour ce principe de garantie rurale.
De là à penser que toutes les communes concernées consommeront un hectare, certainement pas !
De là à penser que, en deux ou trois ans, toute la surface sera consommée, au vu de la difficulté à construire, certainement pas non plus !
En revanche, nous envoyons le message, non pas par démagogie, mais par sens des responsabilités, qu’à l’avenir nous devrons penser autrement l’aménagement de notre territoire, tout en laissant une marge de manœuvre à chacun.
Il s’agit donc – je le dis avec beaucoup d’humilité et de responsabilité – d’une réponse qui est attendue dans toutes les communes de notre pays.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, sur l’article.
M. Jean-Michel Arnaud. Oui, nous sommes parvenus à la clé du débat de la soirée, avec la mise à disposition de cet hectare pour le développement de nos communes rurales.
Il me semble bon de rappeler une évidence : un hectare, c’est 10 000 mètres carrés. Un hectare sur dix ans, cela signifie donc, en droit de tirage, 1 000 mètres carrés par an en moyenne par commune. Quelle affaire !
Sachant que, sur ces 1 000 mètres carrés par an, il faudra construire des routes, quelques terrains multisports, quelques écoles, quelques d’aménagements publics…
Reste, monsieur le ministre, qu’il est important d’instaurer une garantie minimale de construction sur nos communes, ne serait-ce que pour laisser respirer nos espaces ruraux.
Par ailleurs, vous avez formulé une contre-proposition de 1 %, sur une base que je n’ai pas comprise et qui me semble illisible pour les maires ruraux. Quand des collègues sollicitent leur direction départementale des territoires (DDT) pour savoir à quoi correspond, commune par commune, ce 1 % de je-ne-sais quoi, ils n’obtiennent aucune réponse.
Aussi, entre 1 % de je-ne-sais-quoi et 1 000 mètres carrés par an sur dix ans révisables à l’issue de la période décennale, qui sera elle-même divisée par deux dans la décennie suivante, franchement, je trouve qu’il n’y a pas de quoi mettre son chapeau à la sortie de l’église…
J’espère que vous saurez, monsieur le ministre, écouter nos arguments. Nous devons envoyer un signal fort à nos communes rurales sur leurs perspectives de développement et laisser aux maires ruraux l’espoir de pouvoir gérer leur eau et quelques projets de proximité. Il convient de faire en sorte que les élus ne se sentent pas sous la tutelle de l’État dans la gestion de toutes leurs affaires quotidiennes.
Mme le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, sur l’article.
M. Christian Redon-Sarrazy. Nous touchons au cœur des préoccupations des élus de ces communes rurales que nombre d’entre nous visitent chaque semaine : l’urbanisme, ses conséquences sur les écoles, la gestion de l’eau… Ce sont des sujets auxquels les élus ruraux tiennent, car il s’agit du cœur de leur engagement et de leur activité quotidienne, dans les réponses qu’ils apportent à leurs administrés.
À chaque fois que je me rends dans une commune et que nous évoquons l’actualité avec les élus, le ZAN est le sujet numéro un. Il s’agit de leur principale inquiétude. Il y a trois ans, ils me parlaient plutôt de la fibre, notamment avec l’essor du télétravail, désormais, ils évoquent systématiquement le ZAN et le droit à construire.
Cette garantie rurale d’un hectare constitue un message que l’on envoie à ces élus, qui s’inquiètent de l’absence de perspectives. Ils se disent, parfois à tort, car l’inquiétude est exacerbée, que l’avenir de leur commune est stérilisé par le ZAN. Aussi, si nous ne leur redonnons pas des perspectives, nous allons au-devant de difficultés.
Ces difficultés, nous les rencontrerons dès les candidatures aux prochaines élections municipales. J’entends souvent une certaine lassitude dans les propos des élus, qui les conduira probablement à cesser de s’engager.
Ainsi, même si cet hectare ne sera souvent pas entièrement consommé, des communes ayant très peu construit ces dernières années et rien n’indiquant qu’elles accéléreront ces prochaines années, il est important de faire passer ce message aux élus.
Mme le président. La parole est à M. François Bonhomme, sur l’article.
M. François Bonhomme. L’instauration d’une enveloppe plancher d’artificialisation, ou « surface minimale de développement communal », n’est en rien contradictoire avec l’objectif de sobriété foncière. En effet, si celui-ci concerne potentiellement toutes les communes françaises, vous savez bien qu’il ne sera pas activé uniformément, loin de là.
En instaurant cette garantie, nous entendons surtout envoyer un signal fort aux communes les plus rurales, confrontées au défi du renouvellement de leur population.
Nous parlions tout à l’heure du sentiment de dépossession des maires qui affrontent le refus du Gouvernement de sortir du processus qui va les forcer, d’ici à 2026, à transférer aux intercommunalités les compétences eau et assainissement. Ce droit à un hectare s’inscrit dans le même esprit : redonner des leviers d’action aux maires confrontés à ce sentiment de déréliction.
C’est une façon de consacrer notre volonté, si souvent affirmée dans cet hémicycle, de reconnaître les spécificités des zones rurales, par une équitable répartition de l’effort attendu en matière de réduction de l’artificialisation.
Cette mesure corrige également l’application strictement comptable de l’objectif de réduction de 50 % de l’artificialisation. Les petites communes rurales ne comprendraient pas qu’on leur fasse porter l’essentiel de l’effort, au simple motif qu’elles constituent des espaces de verdure ou des lieux de promenade du dimanche. Face à la bétonisation générale des grandes métropoles, ce serait alors la double peine.
J’ajoute que le rapporteur Jean-Baptiste Blanc a largement fait justice de la fable selon laquelle cette mesure viendrait réduire de manière drastique l’enveloppe d’artificialisation.
En effet, retenir comme critère un pourcentage de la surface urbanisée existante ne serait pas satisfaisant, tout simplement parce que cet indicateur favoriserait les communes ayant le plus artificialisé dans le passé, communes déjà avantagées par le principe des 50 % de réduction.
Je vous appelle donc, monsieur le ministre, à faire réellement confiance, enfin, aux territoires les plus ruraux, qui attendent de retrouver des leviers d’action.
Mme le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, sur l’article.
M. Stéphane Sautarel. Nous sommes ici au cœur de cette proposition de loi ; à tout le moins, il s’agit d’un article majeur, qui touche à la ruralité.
Je rappellerai deux concepts que j’ai évoqués au sujet de l’article 1er, mais qui sont tout aussi pertinents pour celui-ci, à savoir le bon sens et l’espérance.
Le bon sens, c’est d’inscrire dans ce texte une mesure simple, lisible, claire et accessible à tout le monde, une mesure qui redonne confiance dans la capacité offerte à chacune commune d’aménager son territoire.
L’espérance, c’est celle que nous devons donner à nos territoires ruraux, à chacune de nos communes, qui doit être en mesure de prévoir son développement et de construire son avenir.
Je remercie la commission spéciale, en particulier sa présidente et son rapporteur, d’avoir proposé cette mesure qui me semble exprimer ces deux concepts et répondre aux enjeux de nos territoires.
J’ajoute que le risque que l’on prend en offrant cette surface d’artificialisation n’est pas bien grand : d’une part, un hectare, c’est peu ; d’autre part, on sait d’ores et déjà que cette surface ne sera pas consommée dans toutes les communes concernées.
Je vous encourage donc, mes chers collègues, à en rester à cette mesure-là et à adopter l’article 1er dans cette rédaction.
Mme le président. La parole est à Mme la présidente de la commission spéciale.
Mme Valérie Létard, présidente de la commission spéciale. Mes chers collègues, après ces prises de parole essentielles sur un article qui nous tient à tous à cœur, je vous rappelle que la très grande majorité d’entre vous souhaitent que nous terminions ce soir la discussion du texte.
Il nous reste au total 110 amendements à examiner, parmi lesquels beaucoup ont été déposés sur cet article important. Certes, chacun doit pouvoir prendre le temps de s’exprimer, mais j’invite notre assemblée à tenir un rythme soutenu, sans prises de parole superflues, de manière à ce que tous les élus qui se sont impliqués depuis le début du processus puissent le faire aboutir de manière efficace.
Mme le président. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 43 rectifié bis est présenté par MM. Cadec, Paccaud, Burgoa et Bascher, Mme Lassarade, MM. de Legge, Panunzi et Daubresse, Mmes Dumont, Ventalon et Goy-Chavent, MM. Chatillon et Bouchet, Mmes Belrhiti et Schalck, MM. D. Laurent et Brisson, Mmes Dumas, Joseph et Borchio Fontimp, MM. Levi et Rapin, Mme Noël et M. Belin.
L’amendement n° 71 rectifié bis est présenté par Mmes Micouleau, Estrosi Sassone et Bonfanti-Dossat, M. E. Blanc, Mmes F. Gerbaud et Imbert, MM. Lefèvre et Longuet, Mme M. Mercier, MM. Pellevat et Perrin, Mme Puissat et MM. Rietmann et Sido.
L’amendement n° 207 rectifié est présenté par MM. Corbisez et Artano, Mme N. Delattre et MM. Fialaire et Guiol.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le deuxième alinéa de l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales est complété par trois phrases ainsi rédigées : « Cette déclinaison tient également compte de la diversité des territoires urbains et ruraux, des stratégies et des besoins liés au développement rural ainsi qu’à la revitalisation des zones rurales et des communes rurales caractérisées comme peu denses ou très peu denses au sens des données statistiques de densité établies par l’Institut national de la statistique et des études économiques. »
II. – Après le V de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Dans les six mois suivant l’adaptation du schéma de cohérence territoriale, ou, en l’absence de schéma de cohérence territoriale, du document de planification régionale mentionné aux 1° à 4° du IV du présent article, en application respectivement de l’article L. 141-8 du code de l’urbanisme ou des articles L. 4251-1, L. 4424-9 ou L. 4433-7 du code général des collectivités territoriales ou de l’article L. 123-1 du code de l’urbanisme, la conférence des maires mentionnée à l’article L. 5211-11-3 du code général des collectivités territoriales transmet aux autorités compétentes en matière de plan local d’urbanisme du ressort de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, une proposition de quantum d’espaces naturels, agricoles et forestiers ou non artificialisés à mettre en réserve afin d’abonder des projets d’intérêt communal ou intercommunal.
« L’autorité compétente tient compte de ces propositions lorsque les documents d’urbanisme sont adoptés en application, selon le cas, des articles L. 151-5 ou L. 161-3 du code de l’urbanisme.
« Les modalités d’application du présent article sont définies par décret. »
La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour présenter l’amendement n° 43 rectifié bis.
M. Pierre-Antoine Levi. La proposition d’une garantie rurale laissant à toutes les communes la possibilité d’artificialiser au moins un hectare nous parait contre-productive au regard de l’esprit de la proposition de loi.
Selon le portail de l’artificialisation des sols, les territoires ont consommé 243 136 hectares d’espaces naturels, agricoles et forestiers entre 2011 et 2021. Ils pourront donc, selon l’objectif inscrit dans la loi Climat et résilience, consommer la moitié de cette superficie dans les dix ans à venir.
Une garantie rurale définie sur la base d’un hectare par commune représenterait 29 % de cette enveloppe. Cela réduirait d’autant les possibilités des territoires en tension, qui accueillent une population nombreuse, ainsi que des activités économiques, sans permettre d’atteindre collectivement les objectifs fixés par la loi Climat et résilience.
C’est dans les Scot et les PLUi qu’il convient d’accomplir la territorialisation qui permettra, lorsque c’est justifié, de donner des droits à construire en extension à des collectivités n’ayant pas consommé d’espaces naturels, agricoles et forestiers dans les dix dernières années. Cette solidarité territoriale doit se traduire dans la planification.
Dans le cadre du dialogue intercommunal et afin de tenir compte des besoins futurs de développement des communes rurales, nous proposons donc de créer une « enveloppe territoriale de solidarité foncière », qui aura pour objet de conserver, à l’échelle intercommunale, quelques hectares non territorialisés pour anticiper les projets encore inconnus au moment de l’approbation du document. Cette enveloppe pourrait être utilisée uniquement si le projet proposé par une commune peut être justifié par un manque de foncier et si aucune solution de renouvellement urbain n’est possible.
À titre d’exemple, une intercommunalité disposant d’une enveloppe de cent hectares à consommer dans les Enaf pourrait décider de créer une réserve de trois hectares pour les projets encore non identifiés.
Cet amendement vise donc à substituer à la garantie rurale la mise en place de cette enveloppe territoriale de solidarité foncière, de manière à tenir compte des besoins des zones rurales dans la déclinaison territoriale des objectifs de réduction d’artificialisation du Sraddet.
Mme le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour présenter l’amendement n° 71 rectifié bis.
M. Bruno Sido. Il est défendu.
Mme le président. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 207 rectifié.
M. Bernard Fialaire. Défendu !
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Ces amendements identiques présentent trois faiblesses majeures, selon moi.
Premièrement, le dispositif proposé est redondant avec l’article 8 de la proposition de loi.
Deuxièmement, la logique qui s’y exprime est une logique intercommunale, basée autour des PLUi, ce qui n’est pas celle que la commission spéciale a retenue dans ce texte.
Troisièmement, la commission spéciale a plutôt fait le choix de soutenir les petites communes rurales, qu’elles aient ou non choisi de transférer leur compétence d’urbanisme. Je détaillerai plus tard notre conception de ce « droit à l’hectare » et les qualités que nous lui trouvons.
Par conséquent, la commission spéciale émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 43 rectifié bis, 71 rectifié bis et 207 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je suis saisie de dix amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 160, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 3° bis L’intégration et la déclinaison territoriale des objectifs mentionnés au présent article au sein des documents de planification et d’urbanisme ne peut avoir pour effet de priver une commune peu dense ou très peu dense au sens de la grille communale de densité publiée par l’Institut national de la statistique et des études économiques et couverte par un plan local d’urbanisme intercommunal, un plan local d’urbanisme, un document en tenant lieu, ou une carte communale, d’une capacité de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers en deçà d’une surface minimale de développement communal. Pour la première tranche de dix années mentionnée au 1° du présent III, cette surface minimale est fixée à 1 % des espaces déjà urbanisés de chacune de ces communes. Le présent 3° bis s’applique sans préjudice des modalités de comptabilisation de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers prévues au présent article ; ».
La parole est à M. le ministre.
M. Christophe Béchu, ministre. Le 29 août dernier, lors d’une visioconférence, j’ai indiqué que le Gouvernement était favorable à la mise en place d’une garantie rurale. Il y a, de ce point de vue, un accord complet entre le Gouvernement et le Sénat. Le sujet du débat, c’est la méthode pour y parvenir.
M. Jérôme Bascher. Et le calendrier !
M. Christophe Béchu, ministre. Premièrement, je formule le vœu que nous fassions attention – moi le premier – à ce que nous disons. Quand on dit « zéro artificialisation nette », on entend d’abord « zéro ». Or ce n’est pas zéro ! Ce ne l’était pas l’an dernier, ce ne l’est pas aujourd’hui, ce ne le sera pas dans les années qui viennent, car on est dans une trajectoire globale. La preuve en est bien que nous discutons de la manière dont il convient de répartir ces 125 000 hectares, ce qui laisse de la marge ! Relayer ce message, c’est aussi un moyen d’éviter que des élus ruraux aient le sentiment que le « zéro » soit déjà appliqué, ce qui n’est pas le cas.
Deuxièmement, j’ai un problème avec le principe du « un hectare ». Je n’ai jamais été très fan de l’idée selon laquelle, en donnant la même chose à tout le monde, on faisait œuvre de justice. Je suis pour que l’on tienne compte de la situation des territoires.
Le critère de « 1 % des espaces déjà urbanisés » que nous proposons exprime plutôt la philosophie suivante. Dans notre pays, il existe des communes rurales de un habitant – vous en connaissez tous – et d’autres qui, tout en restant rurales, en ont 1 000 ou 2 000. Pour les premières, un hectare représente beaucoup ; pour les secondes, cela représente peu.
Il existe un site, UrbanSIMUL, sur lequel vous pouvez connaître de manière instantanée la superficie urbanisée de chaque commune. Outre cette information en temps réel, nous avons transmis le nombre d’hectares correspondant à 1 % de cette superficie, pour chaque commune de France, à toutes les DDT, ainsi qu’à votre commission spéciale, qui nous l’avait demandé.
Il résulte de ces informations que les superficies globales concernées par le « un hectare » et le « 1 % » sont comparables. On compte environ 3,5 millions d’hectares d’espaces urbanisés ; 1 % de cette superficie représente donc 35 000 hectares, quand un hectare par commune correspond à une superficie totale de 35 500 hectares.
Nos positions ne sont donc pas si éloignées, puisque le Gouvernement est prêt à mettre en place un dispositif qui s’apparente, en volume, à celui que vous proposez.
Troisièmement, quelle est la porte d’entrée du dispositif ? La garantie rurale s’adresse-t-elle à tout le monde ou aux seules communes rurales ? Dans la seconde hypothèse, la superficie totale concernée n’est plus que de 22 000 hectares. J’aboutis à ce chiffre en me fondant sur la définition, par l’Insee, des communes peu denses et très peu denses, et non pas seulement de ces dernières ; en d’autres termes, nous reprenons la grille élaborée par l’Association des maires ruraux de France (AMRF) pour la définition du seuil de déclenchement de la garantie rurale.
Voilà le sens de cet amendement et, globalement, de la position du Gouvernement sur l’article 7 : il est favorable à une garantie rurale, offerte à toutes les communes rurales, au sens de l’Insee et de l’AMRF, et fondée sur le critère de « 1 % » plutôt que de « un hectare ».
Mme le président. L’amendement n° 127 rectifié n’est pas soutenu.
L’amendement n° 60 rectifié bis, présenté par MM. Brisson, Longuet et Pointereau, Mme Belrhiti, MM. Tabarot, Bouchet, Chatillon, Burgoa et Reichardt, Mmes L. Darcos et Jacques, M. Bascher, Mme Puissat, MM. Charon, Genet, D. Laurent et Joyandet, Mme Dumont, MM. Mandelli, Saury et Darnaud, Mmes Ventalon et Dumas, M. Piednoir, Mmes Bonfanti-Dossat et Joseph, MM. Belin, Gremillet et Rapin, Mme Borchio Fontimp, MM. Somon et Favreau, Mme Canayer et MM. Rietmann, Rojouan et Klinger, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Après le mot :
commune
insérer les mots :
, y compris lorsqu’elle est soumise au règlement national d’urbanisme ou à une carte communale,
La parole est à M. Max Brisson.
M. Max Brisson. Cet amendement a pour objet de préciser que le dispositif de surface minimale de développement communal créé à cet article s’applique également aux communes qui, n’ayant pas de plan local d’urbanisme communal ou intercommunal, s’appuient sur le règlement national d’urbanisme et leur carte communale.
M. le rapporteur me répondra très certainement que cette demande est largement satisfaite, mais une clarification et des précisions de sa part sont attendues.
Mme le président. L’amendement n° 225 rectifié quater, présenté par M. Delcros, Mmes Vermeillet, Vérien et Loisier, MM. Le Nay et Laugier, Mme N. Goulet, M. de Belenet, Mme Sollogoub, M. Longeot, Mme Férat, MM. Chauvet, Kern, Duffourg et Maurey, Mme Saint-Pé, MM. Détraigne et Folliot, Mme Gacquerre, M. Moga, Mme Morin-Desailly, MM. J.M. Arnaud, Canévet, P. Martin, Levi et Henno, Mme Perrot, M. Hingray et Mmes Espagnac et Billon, est ainsi libellé :
Alinéa 2, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Cette surface minimale de développement communal ne peut être inférieure à un hectare auquel s’ajoutent les surfaces artificialisées au titre des constructions et installations nécessaires au maintien de l’activité agricole dans des conditions définies par un décret en Conseil d’État.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Je remercie mon collègue Jean-Michel Arnaud d’avoir bien voulu me laisser défendre cet amendement de M. Delcros ; de fait, j’ai connaissance de telles situations dans mon département.
Cet amendement vise à exclure les bâtiments agricoles et leurs abords du calcul de la surface minimale de développement communal de un hectare garantie à cet article, de manière à éviter des situations locales particulièrement préjudiciables aux territoires ruraux, à l’avenir de l’agriculture et, évidemment, à la souveraineté alimentaire que nous défendons tous.
En effet, d’une part, les communes pourraient se trouver dans l’impossibilité d’installer de jeunes agriculteurs sur leur territoire ; d’autre part, les maires pourraient se voir contraints de choisir entre la construction d’une habitation et celle d’un bâtiment agricole, question évidemment complexe.
Enfin, rappelons que les constructions et installations nécessaires à l’exploitation agricole, à la transformation, au conditionnement et à la commercialisation des produits agricoles, ainsi qu’au stockage et à l’entretien du matériel constituent déjà des dérogations au droit commun de l’urbanisme, dans la mesure où ce type de constructions et d’installations est autorisé en dehors des espaces urbanisés de la commune, dans le cadre du règlement national d’urbanisme, d’une carte communale ou d’un plan local d’urbanisme.
C’est un amendement extrêmement important pour les territoires ruraux !
Mme le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 65 rectifié bis est présenté par M. Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Gold et Guérini, Mme Guillotin, MM. Guiol, Requier, Roux, Chasseing, Folliot, Grand, Houpert et A. Marc et Mmes Noël et Vermeillet.
L’amendement n° 118 rectifié sexies est présenté par MM. Le Nay, Kern, Maurey, Moga, Duffourg et Delcros, Mme Saint-Pé, MM. Canévet et Chauvet, Mme Devésa et M. Hingray.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2, deuxième phrase
Remplacer les mots :
un hectare
par les mots :
deux hectares
La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 65 rectifié bis.
Mme Maryse Carrère. Je retire cet amendement de M. Bilhac, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 65 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 118 rectifié sexies n’est pas soutenu.
L’amendement n° 237 rectifié quinquies, présenté par MM. Folliot, Bonnecarrère, Le Nay, Kern, Maurey, Moga, Duffourg et Delcros, Mme Saint-Pé, M. Canévet, Mme Férat, MM. J.M. Arnaud et Chauvet, Mme Billon, M. Levi, Mme Devésa et M. Hingray, est ainsi libellé :
Alinéa 2, après la deuxième phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Cette surface minimale de développement communal peut être transférée à une autre commune membre d’un même établissement public de coopération intercommunale avec l’accord de la commune cédante, de la commune bénéficiaire, ainsi que de l’établissement public de coopération intercommunale.
La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.
M. Jean-Michel Arnaud. Cet amendement de M. Folliot vise à préciser qu’il est possible de transférer la surface minimale de développement communal à une autre commune membre d’un même établissement public de coopération intercommunale, avec l’accord de la commune cédante, de la commune bénéficiaire, ainsi que de l’établissement public de coopération intercommunale.
Nous entendons ainsi laisser une possibilité de souplesse – vous nous y avez d’ailleurs invités, monsieur le ministre – au sein d’un territoire et d’un bassin de vie cohérents.
Mme le président. L’amendement n° 80 rectifié, présenté par MM. C. Vial, Bacci et Bascher, Mmes Bellurot et Belrhiti, M. E. Blanc, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa, Charon et Chatillon, Mme L. Darcos, M. Darnaud, Mmes Di Folco, Dumas et Dumont, M. Genet, Mmes Gosselin et Goy-Chavent, M. Gremillet, Mmes Jacques et Joseph, MM. D. Laurent, Lefèvre et Longuet, Mmes Garriaud-Maylam et Noël, MM. Paccaud et Pellevat, Mme Puissat, M. Rapin, Mme Schalck, MM. Somon et Tabarot et Mme Ventalon, est ainsi libellé :
Alinéa 2, après la deuxième phrase
Insérer deux phrases ainsi rédigées :
Pour les communes nouvelles, dont l’arrêté de création a été pris à partir du 1er janvier 2011, une majoration de 0,5 hectare sera appliquée par commune déléguée. Cette majoration est plafonnée à deux hectares.
La parole est à M. Cédric Vial.
M. Cédric Vial. Cet amendement vise à prendre en compte la situation particulière des communes nouvelles.
En effet, si la garantie rurale d’un hectare, dans la rédaction proposée par la commission spéciale, doit bénéficier à toutes les communes rurales, elle ne prend en revanche pas en compte la spécificité des communes nouvelles, ce qui risque de nuire à l’attractivité de ces regroupements.
Notre démarche rejoint d’ailleurs la volonté du Gouvernement, puisque Mme Faure participe avec nous à un groupe de travail sur les communes nouvelles et leur attractivité. De fait, de moins en moins de communes s’engagent dans cette démarche, parce que les contraintes deviennent trop lourdes par rapport aux avantages du regroupement.
Selon le dispositif proposé, trois communes rurales ont droit à trois hectares pour leur développement – un hectare chacune – ; en revanche, si elles fusionnent, elles n’auront plus droit qu’à un seul hectare.
M. Jérôme Bascher. Le Maine-et-Loire !
M. Cédric Vial. Par cet amendement – il est vrai qu’il trouvera particulièrement à s’appliquer dans le Maine-et-Loire ! (Sourires.) –, nous proposons, pour toute commune nouvelle créée depuis 2011, d’ajouter un demi-hectare par commune déléguée. Cette majoration serait plafonnée à deux hectares, de telle sorte que nulle commune ne pourrait au total avoir plus de trois hectares. Ainsi, on tiendra tout de même compte de l’objectif du ZAN et on ne développera pas outre mesure.
Nous avons fait procéder à des simulations, en lien avec l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalités (AMF). Malheureusement, on ne dispose pas de données spécifiques aux communes nouvelles rurales, permettant de distinguer celles-ci des communes nouvelles considérées comme denses. Si l’ensemble des communes nouvelles étaient concernées, ce que nous proposons représenterait environ 800 hectares. Si l’on en retire les communes considérées comme denses, il est probable que l’effort, à l’échelle nationale, soit plutôt de l’ordre de 400 à 500 hectares.
Cette approche permettrait de fournir aux communes un argument supplémentaire en faveur de la poursuite de ces regroupements.
Mme le président. Les amendements nos 183 et 184 ne sont pas défendus.
Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Je commencerai par demander le retrait de l’amendement n° 225 rectifié quater, qui vise à ajouter à la surface minimale de développement communal celle des bâtiments agricoles ; j’émettrai tout à l’heure un avis favorable sur un amendement à l’objet similaire.
Sur l’amendement n° 60 rectifié bis, pour répondre à la demande d’explication supplémentaire formulée par M. Brisson, je rappelle que les communes régies par le RNU ne sont pas soumises à un objectif communal de réduction de l’artificialisation ni concernées par le processus de territorialisation ; elles ne sont donc pas incluses dans le champ de notre dispositif. Il faut bien noter que nous ne parlons pas ici de droit à construire général : on touche simplement à ce qui sera décompté ou non comme de l’artificialisation et pas aux règles de constructibilité du droit de l’urbanisme. C’est pourquoi la commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.
La commission spéciale demande également le retrait de l’amendement n° 237 rectifié quinquies ; à défaut, elle émettra un avis défavorable. En effet, il est déjà satisfait en ce qui concerne les intercommunalités disposant d’un PLUi, puisqu’elles n’auront qu’un objectif intercommunal mutualisé qui pourra être ventilé entre les communes au cours de la période décennale. En outre, l’idée est de créer une garantie communale et non un marché d’échanges de droits à construire. À ce titre, je le redis : il faut faire confiance aux élus !
L’amendement n° 80 rectifié de M. Vial vise les 784 communes nouvelles créées au cours de la dernière décennie, qui auraient de facto une garantie un peu moindre, car elles regroupent plusieurs communes. La commission spéciale émet un avis favorable sur cet amendement, notamment parce qu’il a été retravaillé, après nos échanges en commission spéciale, de manière à limiter son coût en nombre d’hectares, comme M. Vial lui-même l’a expliqué.
Enfin, monsieur le ministre, en réponse à votre amendement, je développerai un peu plus longuement la position de la commission spéciale sur la garantie de un hectare que nous proposons. Comment sommes-nous arrivés à cette idée ?
Rappelons d’abord que, lors de l’examen de la loi Climat et résilience, en ce qui concerne le ZAN, l’Assemblée nationale avait privilégié une approche de dérogation. Elle avait commencé par les projets d’intérêt national, puis leur avait ajouté les projets d’intérêt régional, qui sont ensuite devenus autre chose ; au cours des débats, on avait même voulu des dérogations pour les zones de revitalisation rurale (ZRR), ou encore pour le photovoltaïque.
Quand le texte est arrivé au Sénat, plutôt que de poursuivre dans cette logique de dérogation, nous avons adopté une autre approche, en votant la territorialisation des objectifs de réduction de l’artificialisation. Cette territorialisation s’est traduite par un droit de proposition qui devait s’exercer à l’échelle de chaque Scot ; à ce moment-là de l’histoire, nous avons fait le choix des Scot plutôt que des PLUi et des intercommunalités.
Bien que le Premier ministre d’alors ait envoyé une circulaire aux préfets leur demandant d’accompagner les élus, de mettre de l’ingénierie à leur disposition et de créer des espaces de dialogue, pour les aider à élaborer une stratégie de territoire, avec nombre d’outils à la clé, il se trouve que ce droit de proposition n’a pas pu s’exercer partout de la même façon, parce que les élus n’ont pas toujours eu l’ingénierie ou l’information requises pour ce faire.
Certes, la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite 3DS, a prolongé les délais – ces propositions ont pu être déposées jusqu’au 22 octobre dernier ; elles l’ont été, bon gré mal gré, mais elles n’ont pas pu faire l’objet de réelles discussions entre cette date et le 22 février, délai beaucoup trop court.
Par ailleurs, il y a en la matière deux types de régions : d’une part, celles qui ont bien intériorisé la transition écologique et le fait qu’elles étaient peu à peu devenues chefs de file sur le sujet, celles qui avaient une vision nette de la transition écologique, de la loi Climat et résilience et en particulier du ZAN ; d’autre part, celles qui n’ont pas vraiment procédé à cet exercice d’accueil des propositions, de territorialisation, de différenciation.
Tout cela explique que nous tous ici – sur toutes nos travées, je pense pouvoir le dire – avons été saisis de ce problème par les élus de très nombreuses communes – petites, rurales, périphériques, littorales, de montagne –, qui nous ont exprimé qu’ils n’étaient pas associés au ZAN et se sentaient perdants.
C’est bien pourquoi nous avons créé une mission conjointe de contrôle, devenue notre commission spéciale, de manière à réfléchir aux outils qui permettraient de raccrocher ces communes à la loi Climat et résilience et au ZAN. Tel est, je le réitère, notre objectif : il ne s’agit pas de déroger au ZAN, d’en sortir ou de le détricoter, comme cela a été dit ou écrit à tort, il s’agit au contraire de trouver des outils, des solutions, pour que tout le monde s’inscrive dans cette trajectoire.
Nous avons donc mené une réflexion sur les petites communes, en particulier sur les toutes petites communes rurales, et c’est de cette réflexion qu’est issue notre idée de garantie de un hectare. Certes, cet objectif est égalitaire, mais au moins il est clair, net, précis et simple. Nous l’avons tous testé dans nos départements et il nous semble que les élus le comprennent, l’acceptent et, maintenant, le veulent.
Je tiens à remercier M. le ministre des échanges que nous avons depuis de très nombreuses semaines sur ce sujet ; nous n’avons pas toujours bénéficié d’une telle disponibilité du Gouvernement, je tenais donc à le relever. C’est au cours de ces échanges qu’a émergé l’idée alternative du 1 %.
Permettez-moi donc d’exposer quelques arguments sur notre proposition et celle du Gouvernement.
On accuse d’abord le dispositif de un hectare que nous proposons de consommer beaucoup trop d’hectares. Tel n’est pas vraiment le cas, d’abord parce que c’est une garantie universelle et non pas un droit. L’indépendance des procédures est évidemment maintenue : on va bien séparer l’application du ZAN et, plus largement, du droit de l’environnement, de celle du droit de l’urbanisme. L’un ne peut se faire au détriment de l’autre.
Ce dispositif n’est donc ni un droit de tirage, ni une incitation à consommer, ni une obligation de consommer ; c’est la préservation d’un potentiel universel, qui garantit aux communes qu’elles pourront répondre à leurs besoins émergents. Au-delà, cela me semble de nature à rassurer tous les élus, qui seront ainsi incités à s’inscrire dans cette trajectoire, comme nous l’avons tous vu dans nos départements.
Ce n’est pas non plus une dérogation à la compatibilité du ZAN. Il ne faut pas tomber dans cette caricature, car cette surface garantie sera bel et bien prélevée sur l’enveloppe du Sraddet ou du Scot. C’est simplement un mécanisme de péréquation, de solidarité, en faveur de territoires moins urbains qui, de surcroît, ont souvent été plus sobres par le passé et dont les élus voient dans l’objectif à atteindre une forme de double peine.
Quant au critère de 1 % proposé par le Gouvernement, il nous a évidemment fait beaucoup réfléchir, monsieur le ministre, au sein de la commission spéciale, mais une question demeure : en quoi serait-il un meilleur indicateur des dynamiques locales que ce que nous proposons ?
Se baser sur la surface aujourd’hui urbanisée, c’est en quelque sorte récompenser les gros consommateurs de foncier d’hier. Plutôt que de corriger les effets de bord de l’application du ZAN, on les renforcera !
M. Jérôme Bascher. Eh oui !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Bien sûr !
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. En outre, ce critère ne prend nullement en considération les dynamiques démographiques, d’emploi, ou de développement. Son seul avantage, aux yeux du Gouvernement, est d’offrir une garantie plus limitée en volume.
Je rappelle aussi qu’il n’existe pas, à ce jour, de données fiables sur la surface urbanisée de chaque commune française. Comment la calculer, alors ?
Pour le dire plus simplement, avec ce 1 %, on ne sait pas où l’on va concrètement, on ne sait pas comment il atterrit exactement. Il y a un doute que vous pourriez peut-être dissiper, monsieur le ministre, il y a une petite musique qui laisse entendre que le droit au 1 % pourrait plutôt s’exercer à l’échelle intercommunale… C’est du moins ce qui ressort quelque peu de plusieurs interventions gouvernementales, selon lesquelles il s’agirait d’un dispositif intercommunal, qui viserait à favoriser des projets intercommunaux. Pourquoi pas, mais c’est une autre approche que la nôtre ! Notre logique, si elle est égalitaire, est aussi véritablement communale, car nous sommes très attachés à cet échelon pour l’application du ZAN.
Je terminerai mon propos en balayant quelques fausses idées sur la garantie de un hectare que nous proposons.
Je le redis, ce dispositif n’entraînera pas mécaniquement la consommation additionnelle de 35 000 hectares par rapport au droit existant.
En effet, tout d’abord, 19 878 communes disposeront déjà d’un hectare sur la décennie 2021-2031 parce qu’elles ont consommé plus de deux hectares au cours de la période précédente : pour elles, il n’y aura pas de surcroît d’enveloppe. En réalité, ce sont donc 15 050 communes qui sont réellement concernées par notre garantie.
Précisons même que, au total, celle-ci n’ajouterait que 9 200 hectares à leurs enveloppes théoriques pour les compléter jusqu’à un hectare chacune. Cette surface de 9 200 hectares, ce n’est pas une dérogation, cela ne sort ni de l’enveloppe ni de la trajectoire. Surtout, 9 200 hectares, c’est l’épaisseur du trait au regard des 125 000 hectares d’enveloppe décennale d’artificialisation à l’échelle nationale.
Considérer que réserver 7 % de l’artificialisation de la prochaine décennie à plus de 43 % des communes françaises est disproportionné, c’est avouer qu’il est bien prévu que le ZAN se fasse sur le dos de la ruralité ! (M. Jean-Michel Arnaud applaudit.)
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. C’est bien ce pour quoi nous sommes là : faire en sorte, au travers de cette proposition de loi, que rien ne se fasse sur le dos de la ruralité, et même que tout se fasse avec elle, pour que tous puissent s’inscrire dans la trajectoire ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, SER et CRCE.)
En résumé, la commission spéciale émet un avis défavorable sur l’ensemble des amendements en discussion commune, sauf retrait par leurs auteurs, à l’exception de l’amendement n° 80 rectifié, auquel elle est favorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. J’ai commencé ce débat en vous disant que mon souhait était que nous en sortions avec un texte. Si l’on entre dans les procès d’intentions, ce sera difficilement le cas.
Je n’ai jamais dit que le dispositif que vous proposiez était dérogatoire, monsieur le rapporteur, je ne vous ai pas fait ce procès. Je n’ai jamais dit que la garantie rurale était illégitime, car je la défends depuis le début !
Quant à l’argument selon lequel nous aurions l’intercommunalité comme arrière-pensée, il ne me semble pas très juste, puisque nous proposons de cibler notre dispositif sur les seules communes peu denses et très peu denses… (M. Jérôme Bascher s’exclame.) Si nous ne retenions pas cette maille, vous pourriez avoir un doute, mais, dès lors que nous l’écrivons ainsi, honnêtement, je ne vois pas quelle marge d’interprétation il peut y avoir.
Concernant les bases statistiques retenues, nous avons retenu la base la plus objective que nous ayons, à savoir les données consolidées de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Cette base a le mérite d’être précise, fiable, stable et de pouvoir donner lieu à des comparaisons. En outre, ainsi, on exclut le foncier non bâti en zones rurales, qui ne compte pas dans les trajectoires de réduction de l’artificialisation puisqu’il est compris dans les Enaf.
Cela justifie d’ailleurs l’avis défavorable du Gouvernement sur l’amendement n° 225 rectifié quater : il est satisfait, dans les faits, par la définition actuelle du ZAN.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur les amendements nos 60 rectifié bis et 237 rectifié quinquies, pour les raisons qu’a développées M. le rapporteur.
Enfin, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 80 rectifié de M. Vial, à qui je veux faire remarquer ceci : pour le coup, le dispositif du 1 % est plus favorable aux communes nouvelles que la règle qu’il propose, selon laquelle une commune déléguée d’une commune nouvelle compterait pour la moitié d’une commune ancienne, ce à quoi s’ajoute un plafonnement à deux hectares, de sorte que, si six communes fusionnent, la sixième n’aura pas même droit à un demi-hectare. Or il y a dans mon département des communes rurales qui ont fusionné par groupes de six ou sept…
Mme Cécile Cukierman. Eh oui !
M. Christophe Béchu, ministre. Vous me direz que c’était leur choix, mais, si vous souhaitez être dans une démarche d’équité, je ne comprends pas le double plafonnement proposé, qui désavantage de manière objective les communes qui se sont ainsi regroupées. Le 1 % a au moins le mérite de s’appliquer sur tous les territoires et de nous permettre d’examiner ces situations dans le détail.
Ne surjouons pas nos différences sur ce point ! Ce sera en effet l’un des éléments pivots si nous voulons aboutir à un texte qui puisse s’appliquer le plus vite possible, si nous voulons que cette garantie entre en vigueur. C’est tout ce que je vous demande, mesdames, messieurs les sénateurs, car en venir à dire qu’il y aurait, d’un côté, ceux qui défendent les communes rurales, de l’autre, ceux qui ne les défendent pas, causera une tension considérable, alors que ce n’est pas du tout l’esprit du Gouvernement, comme en témoigne le fait qu’il a de lui-même proposé, dès le 29 août dernier, une garantie rurale.
M. Michel Dagbert. Très bien !
Mme le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Je formulerai deux remarques.
Sur les chiffres annoncés par le Gouvernement, comprenez que, depuis quelques jours ou quelques semaines, nous soyons très circonspects – si vous voyez ce que je veux dire… Nous en avons discuté assez longuement !
Si une commune compte cent logements, l’application du 1 % signifierait qu’elle ne peut pas construire plus d’un nouveau logement ! Par conséquent, toutes les communes ayant, par exemple, 150 habitants ne pourront plus rien faire…
M. Bruno Sido. Il est écrit : « 1 % des espaces déjà urbanisés ». Dès lors, s’il y a moins de 100 logements, rien ne sera possible. C’est inacceptable !
Les petites communes ont besoin d’une certitude. La garantie d’un hectare – elles ne le consommeront pas en entier – est au moins une certitude pour elles. C’est tout au moins, monsieur le ministre, ce que l’on me dit dans mon département, où il y a des communes hyperrurales.
Mme le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. Monsieur le ministre, avec votre 1 %, tout simplement, vous limitez notre croissance à 1 % !
Voilà peut-être un projet pour le Gouvernement que de limiter la croissance de l’ensemble du pays à 1 %, mais je ne peux croire que ce soit le vôtre. Toutefois, vous voyez bien où nous pousse cette logique, notamment pour les communes rurales.
La garantie proposée par le rapporteur est, elle, compréhensible et limitée, contrairement à votre approche fondée sur les critères de l’Insee. Vous ne connaissez peut-être pas assez bien mon parcours, monsieur le ministre, mais c’est mon métier, j’ai travaillé à l’Insee et je connais très bien ces normes, qui ne sont pas opérantes sur le terrain. Il vaut donc mieux quelque chose de clair ; c’est ce que nous propose la commission spéciale et c’est cela que je soutiendrai. (Mme Muriel Jourda applaudit.)
Mme le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.
M. Cédric Vial. Permettez-moi de vous répondre, monsieur le ministre, au sujet de mon amendement n° 80 rectifié.
Sur 782 communes nouvelles, 112 seulement seraient concernées par la majoration de 0,5 hectare que je propose, c’est-à-dire moins de 14 % d’entre elles. Sur ces 112 communes nouvelles, un certain nombre sont probablement considérées comme denses.
En définitive, mon amendement pourrait ne s’adresser qu’à une soixantaine de communes qui, pour beaucoup, se situent peut-être dans le Maine-et-Loire. C’est possible, monsieur le ministre, car votre département est certainement celui où l’on trouve le plus grand nombre de communes nouvelles de grande taille.
Toutefois, si cette majoration n’est pas mise en place, si notre assemblée se range à votre avis défavorable, cela veut dire que toutes ces communes nouvelles devront se contenter d’une surface minimale d’un hectare, alors que nous leur proposons un développement plus harmonieux.
Ces villes ont choisi de se marier et de ne plus former qu’une seule commune nouvelle : il est donc logique que leur trajectoire de réduction de l’artificialisation des sols ne soit pas la même que celle qu’elles auraient suivie si elles n’avaient pas fusionné. Il ne serait pas responsable de les limiter à ce seuil d’un hectare, notamment dans votre département.
Je vous crois bien volontiers, monsieur le ministre, quand vous nous dites, comme vous l’avez fait tout à l’heure, que votre objectif n’est pas d’avancer vers davantage d’intercommunalisation.
Mais combien y a-t-il de gouvernements différents au sein du Gouvernement ? Dominique Faure était présente au banc que vous occupez à cet instant, lorsque nous avons examiné la proposition de loi sur la compétence « eau et assainissement » : je peux vous dire que nous n’avons pas entendu tout à fait le même son de cloche de sa part !
Dans un autre cadre, nous avons travaillé, toujours avec Mme Faure, pour trouver des solutions pour les communes nouvelles : il s’agissait de les aider à devenir plus attractives et à continuer de se développer, de sorte qu’elles n’aient pas à regretter d’avoir faire le choix de la fusion et qu’elles ne soient pas pénalisées par une baisse de leur DGF, de leurs subventions ou par les contraintes en matière foncière.
Le Gouvernement a-t-il une position bien définie sur tous ces sujets-là ou existe-t-il autant de positions que de ministres ? On peut se poser la question quand on compare vos propos et ceux que Mme Faure a tenus cet après-midi.
Je vous crois volontiers à propos des intercommunalités et je dois dire que je préfère votre position à celle de Mme Faure ; en revanche, pour ce qui est des communes nouvelles, je préfère la sienne.
Mme le président. La parole est à M. Fabien Genet, pour explication de vote.
M. Fabien Genet. Monsieur le ministre, vous nous avez expliqué que, au départ, vous avez eu la même idée que le Sénat, celle d’offrir une garantie rurale aux collectivités. De plus, à vous écouter, votre dispositif aboutirait au même volume de surface minimale de développement communal que le nôtre.
Je crois pourtant qu’il existe une vraie différence d’appréciation, d’état d’esprit, voire de philosophie entre le 1 % et le un hectare, parce que votre 1 % s’applique aux surfaces déjà urbanisées.
Or ce que l’on vous répète depuis mardi, monsieur le ministre, c’est que l’objectif ZAN suscite beaucoup d’appréhension et d’inquiétude, et qu’il constitue désormais une sorte de terrain allergique. Nous avons en effet l’impression que les communes qui ont déjà beaucoup urbanisé y gagneront davantage que celles qui ont été vertueuses ou qui ont, depuis plusieurs années, urbanisé beaucoup moins.
J’ajoute que le ressenti des élus s’inscrit dans un contexte particulier, monsieur le ministre, celui de la fermeture des services publics, mais aussi celui que reflète le rapport de la Cour des comptes que l’on évoquait dans cette assemblée mercredi dernier : quand les maires lisent que la Cour dénonce la persistance d’un trop grand nombre de trop petites communes, la dispersion et l’absence de masse critique de la grande majorité de celles-ci, sans parler de ce passage extraordinaire du rapport qui indique que « la taille des petites communes est devenue un handicap lorsque l’acte I de la décentralisation a supprimé la tutelle préfectorale et leur a confié de nouvelles compétences, notamment en matière d’urbanisme », comment voulez-vous qu’ils ne deviennent pas allergiques ?
Le seuil d’un hectare, comme l’a dit notre collègue Bascher, est une proposition à la fois clairement énoncée, compréhensible et, surtout, concrète, sans compter qu’elle diffère de tout ce qui a été fait jusqu’ici. Il s’agit d’une réelle garantie pour l’ensemble des communes rurales. C’est pourquoi nous sommes très attachés à cette proposition. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.
M. Stéphane Sautarel. Monsieur le ministre, c’est tout le sens du travail conduit par le Sénat pour adapter l’objectif ZAN que nous restituons dans cet article 7. Dans ce domaine, nous avons besoin de lisibilité, de clarté, d’une réponse qui soit compréhensible et opérationnelle pour tous.
Deux points majeurs sont à noter dans ce texte, faute de quoi il serait totalement dévitalisé et perdrait tout son sens : c’est le caractère non prescriptif du Sraddet, qui est essentiel pour nos territoires, nos communes, et la garantie rurale, qui se traduit par ce seuil minimal d’un hectare.
Tout tourne autour de ces deux questions absolument essentielles pour nous, même s’il en existe bien d’autres, et il vous faut l’entendre, monsieur le ministre. (M. Jérôme Bascher applaudit.)
M. Max Brisson. Je retire mon amendement, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 60 rectifié bis est retiré.
Mme Nathalie Goulet. Je retire aussi le mien !
Mme le président. L’amendement n° 225 rectifié quater est retiré.
M. Jean-Michel Arnaud. Je retire également mon amendement, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 237 rectifié quinquies est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 80 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
Mme le président. L’amendement n° 178 rectifié, présenté par MM. Gold, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez et Guérini, Mme Guillotin et MM. Guiol, Requier et Roux, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° En l’absence de document d’urbanisme, la prise en compte des objectifs mentionnés au présent article ne peut conduire une commune à devoir réduire son artificialisation en deçà de la surface minimale de développement communal prévue au 3° bis ; ».
La parole est à M. Jean-Yves Roux.
M. Jean-Yves Roux. Si l’article 7 prévoit un droit à l’hectare pour toutes les communes dans le cadre de la déclinaison des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols, il n’évoque pas le cas spécifique des communes qui ne sont pas dotées d’un document d’urbanisme.
Le présent amendement tend à garantir expressément ce droit à l’hectare aux communes qui ne sont pas dotées d’un tel document.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement pour les raisons déjà énoncées.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° 234 rectifié septies, présenté par MM. A. Marc, Capus, Malhuret, Menonville, Chasseing et Verzelen, Mmes Paoli-Gagin et Mélot et MM. Lagourgue, Wattebled, Decool et Médevielle, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le 5° du même III est complété par une phrase ainsi rédigée : « N’est pas comptabilisée, pour cette même tranche, une surface d’un hectare d’espaces naturels, agricoles ou forestiers consommés sur le territoire de chaque commune dont le taux d’artificialisation est inférieur à 3 % à la date de publication de la loi n° … du … visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de “zéro artificialisation nette” au cœur des territoires. »
La parole est à M. Claude Malhuret.
M. Claude Malhuret. L’augmentation de la surface artificialisée en France est une évidence, mais nous constatons que les territoires ont tous contribué de façon différente à cet étalement urbain.
Or l’objectif national des mesures de freinage annoncées, appliqué de manière uniforme – au moins 50 % de réduction de l’artificialisation des sols par rapport aux dix dernières années –, pénalise les communes qui n’ont que très peu artificialisé.
De nombreuses communes rurales où l’on avait peu construit redeviennent attractives grâce non seulement au télétravail et à la fibre, mais aussi en raison de la qualité de vie ; elles risquent d’être trop lourdement pénalisées par l’objectif fixé.
La surface artificialisée est de 7,9 % à l’échelon national. Nous proposons que les communes dont le taux d’artificialisation est inférieur à 3 % puissent bénéficier d’un hectare supplémentaire à construire pour les dix années à venir.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Votre dispositif nous semble à la fois redondant avec celui de la commission et plus restrictif.
Je vous demanderai donc, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Je comprends la philosophie de cet amendement.
Cependant, comme nous ne sommes pas encore parvenus à un accord et qu’il nous faudra réexaminer un certain nombre de points, le fait d’ajouter une nouvelle pondération et de proposer une subtilité supplémentaire ne me semble pas de nature à clarifier le texte.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 234 rectifié septies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. L’amendement n° 252, présenté par M. J.B. Blanc, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Après le mot :
territoriales
insérer les mots :
, dans sa rédaction résultant de l’article 6 de la présente loi,
II. – Alinéa 6, au début
Remplacer les mots :
L’article
par les mots :
Le quatrième alinéa de l’article
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Madame la présidente, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos 252 et 253.
Mme le président. J’appelle donc également en discussion l’amendement n° 253, présenté par M. J.B. Blanc, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
Alinéa 3, deuxième phrase
Remplacer le mot :
communale
par le mot :
communal
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Il s’agit, pour ce qui est de l’amendement n° 252, d’un amendement de coordination et de précision juridique et, s’agissant de l’amendement n° 253, d’un amendement rédactionnel.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° 208 rectifié, présenté par MM. Corbisez, Cabanel, Fialaire et Gold, Mme Guillotin et M. Guiol, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Après l’article L. 141-8 du code de l’urbanisme, il est inséré un article L. 141-8-… ainsi rédigé :
« Art. L. 141-8-…. – Le document d’orientation et d’objectifs définit une surface minimale de développement communal, applicable sur son périmètre pour chaque tranche de dix années prévues au second alinéa de l’article L. 141-3. Cette surface minimale de développement communal est définie en fonction de la typologie des communes et des besoins des différentes politiques publiques traitées dans la stratégie territoriale du schéma de cohérence territoriale. »
La parole est à M. Bernard Fialaire.
M. Bernard Fialaire. L’article 7 confère un droit à l’hectare à toutes les communes, sans faire de distinction.
Les élus chargés de l’élaboration des Scot n’ont pas l’intention d’interdire tout droit au développement aux communes rurales.
Or le décompte de la consommation du foncier sur la période 2021-2031 a déjà débuté : il devra donc être déduit lors de la modification des Scot, des plans locaux d’urbanisme (PLU) et des cartes communales. Environ 30 % de l’enveloppe de cette décennie serait ainsi mobilisée par ce droit à l’hectare.
Le présent amendement vise donc à préserver une définition plus souple de la surface minimale de développement communal, en supprimant la référence à l’hectare dans le cadre des Scot.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Il nous semble plus pertinent d’inscrire cette surface minimale d’un hectare dans la loi, charge ensuite à chaque commune de la respecter aux différentes étapes de territorialisation.
Quoi qu’il en soit, le Scot restera l’échelon de la territorialisation.
Je vous demande donc, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° 30 rectifié bis, présenté par Mmes Vermeillet et Guidez, MM. Le Nay et Bonneau, Mmes Vérien et Saint-Pé, MM. Vanlerenberghe, Mizzon et Louault, Mmes N. Goulet et Devésa, MM. Levi et Prince, Mme Sollogoub, MM. Kern, Canévet, Chauvet, Duffourg et Maurey, Mme Perrot, MM. Longeot, Delcros et Détraigne, Mme Jacquemet, M. Folliot, Mme Gacquerre et MM. Hingray et J.M. Arnaud, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ces objectifs tiennent compte de la réalité de la maîtrise foncière communale ou intercommunale des zones urbaines, à urbaniser, agricole, naturelle et forestière organisées aux articles R. 151-17 à R. 151-26 du présent code. À défaut, les parcelles ne peuvent être prises en compte dans le calcul d’objectifs chiffrés.
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Cet amendement vise, dans ce contexte de réduction de l’artificialisation des sols, à s’assurer que les collectivités ont bien la maîtrise foncière des zones ouvrant droit à construire en vertu des documents d’urbanisme, a fortiori lorsqu’il est question, comme c’est le cas avec le présent article, d’établir la surface minimale de développement communal.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Je suis défavorable à votre amendement, mon cher collègue, car nous ne voulons pas que le dispositif retenu ouvre des droits à construire inconditionnels. Ce droit à l’hectare constitue plutôt un garde-fou dans la répartition des enveloppes d’artificialisation.
Pour autant, la question du foncier est fondamentale : c’est pourquoi une mission sera très prochainement lancée sur le sujet, ce qui nous permettra de nous pencher collectivement sur ce point, j’en suis sûr.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Longeot. Je retire cet amendement, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 30 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’article 7, modifié.
(L’article 7 est adopté.)
Article 8
I. – Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° L’article L. 141-8 est complété par un 9° ainsi rédigé :
« 9° De la part réservée au développement territorial prévue à l’article L. 141-8-2. » ;
2° Après le même article L. 141-8, il est inséré un article L. 141-8-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 141-8-2. – I. – Le document d’orientation et d’objectifs définit une part réservée au développement territorial pour chaque tranche de dix années prévue au second alinéa de l’article L. 141-3.
« La part réservée au développement territorial a pour objet de réserver une partie de l’artificialisation ou de la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers permise en application des objectifs prévus au même second alinéa à des projets qui revêtent un intérêt supracommunal, dont la réalisation conduirait à dépasser l’artificialisation autorisée pour la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale d’implantation en application des objectifs mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 151-5 ou à l’article L. 161-3, sans que cette part réservée ne fasse l’objet de la déclinaison prévue à l’article L. 141-8. Le présent I s’applique sans préjudice des modalités de comptabilisation de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers et de l’artificialisation des sols prévues à l’article L. 101-2-1 et à l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
« II. – La qualification de projet d’intérêt pour le développement territorial est établie, après avis de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale compétent, par l’organe délibérant de l’établissement mentionné à l’article L. 143-1.
« La délibération motivée justifie de l’intérêt du projet au regard des besoins d’habitat, de revitalisation des zones rurales, de développement économique et agricole ou de services publics du territoire. Elle justifie de l’impossibilité de réaliser ce projet dans les espaces déjà urbanisés de la commune et de l’incompatibilité du projet avec les objectifs fixés à la commune ou à l’établissement public de coopération intercommunale en application du quatrième alinéa de l’article L. 151-5 ou de l’article L. 161-3. Elle présente l’impact de ce projet en termes d’artificialisation, au regard notamment du résidu de part réservée de développement territorial qui resterait disponible pour des projets ultérieurs sur le périmètre du schéma de cohérence territoriale.
« III. – L’artificialisation ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers résultant des projets d’intérêt pour le développement territorial mentionnés au I n’est pas prise en compte pour l’évaluation de l’atteinte des objectifs mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 151-5 ou à l’article L. 161-3. Elle est toutefois prise en compte pour l’évaluation de l’atteinte des objectifs mentionnés à l’article L. 141-3.
« L’artificialisation ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers totale résultant de l’ensemble des projets d’intérêt pour le développement territorial définis en application du présent article ne peut être supérieure au niveau de la part réservée au développement territorial définie par le schéma de cohérence territoriale ou par le plan local d’urbanisme en application des I ou II du présent article. » ;
3° Après le quatrième alinéa de l’article L. 151-5, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le plan local d’urbanisme est élaboré à l’initiative d’un établissement public de coopération intercommunale, il définit une part réservée au développement territorial, dans les mêmes modalités que celles qui sont prévues au I de l’article L. 141-8-2 et applicable sur son périmètre. La part réservée a pour objet de réserver une partie de l’artificialisation ou de la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers permise en application des objectifs prévus au quatrième alinéa du présent article à des projets qui revêtent un intérêt supracommunal, sans préjudice des modalités de comptabilisation de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers et de l’artificialisation des sols prévues à l’article L. 101-2-1 du présent code et à l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Dans ce cas, la qualification de projet d’intérêt pour le développement territorial est établie par l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale, qui motive sa décision au regard des critères mentionnés au deuxième alinéa du II de l’article L. 141-8-2 du présent code. L’artificialisation ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers totale résultant de l’ensemble des projets d’intérêt pour le développement territorial définis en application du présent alinéa ne peut être supérieure au niveau de la part réservée au développement territorial définie par le plan local d’urbanisme. »
II. – Le deuxième alinéa de l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales est complété par quatre phrases ainsi rédigées : « Le schéma fixe également une part réservée au développement territorial, au sens de l’article L. 141-8-2 du même code, applicable aux communes non couvertes par un schéma de cohérence territoriale ou par un plan local d’urbanisme intercommunal. La part réservée a pour objet de réserver une partie de l’artificialisation ou de la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers permise en application des objectifs prévus au présent alinéa à des projets qui revêtent un intérêt supracommunal, sans préjudice des modalités de comptabilisation de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers et de l’artificialisation des sols prévues à l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme et à l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Dans ce cas, la qualification de projet d’intérêt pour le développement territorial est établie par l’organe délibérant de l’autorité chargée de l’élaboration du schéma, qui motive sa décision au regard des critères mentionnés au deuxième alinéa du II de l’article L. 141-8-2 du code de l’urbanisme. L’artificialisation ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers totale résultant de l’ensemble des projets d’intérêt pour le développement territorial définis en application du présent alinéa ne peut être supérieure au niveau de la part réservée au développement territorial définie par le schéma. »
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 44 rectifié bis est présenté par MM. Cadec, Paccaud, Burgoa et Bascher, Mme Lassarade, MM. de Legge, Panunzi et Daubresse, Mmes Dumont, Ventalon et Goy-Chavent, MM. Chatillon et Bouchet, Mmes Belrhiti et Schalck, MM. D. Laurent, Brisson et Savary, Mmes Dumas, Joseph et Borchio Fontimp, MM. Levi et Rapin, Mme Noël et M. Belin.
L’amendement n° 72 rectifié bis est présenté par Mmes Micouleau, Estrosi Sassone et Bonfanti-Dossat, M. E. Blanc, Mmes F. Gerbaud et Imbert, M. Longuet, Mme M. Mercier, MM. Pellevat et Perrin, Mme Puissat et MM. Rietmann et Sido.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jérôme Bascher, pour présenter l’amendement n° 44 rectifié bis.
M. Jérôme Bascher. Je le retire !
Mme le président. L’amendement n° 44 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Bruno Sido, pour présenter l’amendement n° 72 rectifié bis.
M. Bruno Sido. Je profite de l’occasion qui m’est donnée pour préciser que, dans certains départements, comme celui de la Haute-Marne, il existe un certain nombre de friches industrielles qu’il conviendrait de réhabiliter. Elles existent depuis plus d’une centaine d’années et personne n’y touche !
Il faudrait que le Gouvernement, dans la mesure où je ne vois pas un établissement public foncier le faire, s’intéresse à cette question, afin de soulager les départements dans leurs efforts pour réduire l’artificialisation des sols.
Je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 72 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 179 rectifié, présenté par MM. Gold, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :
Alinéa 6, première phrase
Après le mot :
supracommunal
insérer les mots :
ou qui sont nécessaires au respect des obligations de production de logements sociaux prévues à l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation
La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Cet amendement vise à ce que la part réservée au développement territorial, prévue à l’article 8, tienne compte des besoins liés à la construction de logements sociaux.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Dans la mesure où cet amendement est satisfait, j’y suis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Maryse Carrère. S’il est satisfait, je le retire !
Mme le président. L’amendement n° 179 rectifié est retiré.
L’amendement n° 254, présenté par M. J.B. Blanc, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
I.- Alinéa 10
Remplacer les mots :
ou par le plan local d’urbanisme en application des I ou II
par les mots :
en application
II.- Alinéas 11 et 12
Supprimer ces alinéas
III.- Alinéa 13
Supprimer les mots :
ou par un plan local d’urbanisme intercommunal
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° 255, présenté par M. J.B. Blanc, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Après le mot :
territoriales
insérer les mots :
, dans sa rédaction résultant des articles 6, 7 et 10 de la présente loi,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Il s’agit également d’un amendement de coordination.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’article 8, modifié.
(L’article 8 est adopté.)
Après l’article 8
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 145 rectifié, présenté par Mme Préville, MM. Pla, Devinaz et Bourgi et Mme Poumirol, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Le 2° de l’article L. 151-5 est complété par les mots : « de préservation de la biodiversité et de préservation et de remise en état des continuités écologiques » ;
2° Au 1° de l’article L. 151-11, après le mot : « atteinte », sont insérés les mots : « à la préservation de la biodiversité, » ;
3° À l’article L. 151-17, après le mot : « locales », sont insérés les mots : « et de l’objectif de préservation de la biodiversité » ;
4° À l’article L. 151-18, après le mot : « patrimoine », sont insérés les mots : « , à la préservation de la biodiversité » ;
5° Le premier alinéa de l’article L. 151-23 est ainsi rédigé :
« Le règlement identifie et localise et délimite les sites et secteurs à protéger pour des motifs d’ordre écologique, notamment pour la préservation de la biodiversité ainsi que pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation. » ;
6° À l’article L. 151-41, après le 6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Des emplacements réservés pour des opérations de renaturation pour la création d’espaces favorables à la biodiversité. »
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Le déclin de la biodiversité n’a jamais été aussi alarmant.
La politique de l’urbanisme joue un rôle important en la matière en participant à la préservation des milieux naturels et à la protection de la biodiversité.
Pour ce faire, les collectivités territoriales doivent inscrire dans le schéma de cohérence territoriale leurs orientations et les modalités de leurs actions en matière de préservation de la biodiversité.
Dans le cadre des plans locaux d’urbanisme, il est prévu seulement qu’elles inscrivent, dans le plan d’aménagement et de développement durable, les orientations des politiques de maintien ou de remise en état des continuités écologiques.
Le présent amendement vise, dans un premier temps, l’inscription de la politique de préservation de la biodiversité dans les plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUi), afin d’encourager la déclinaison d’une stratégie en matière de biodiversité adaptée au territoire.
Dans un second temps, il tend à modifier les règles d’aspect du bâti, afin que cette biodiversité puisse être prise en considération. Ainsi, la prise en compte des différentes espèces, d’oiseaux notamment, qui cohabitent avec nous pourrait être prescrite pour les constructions nouvelles et les opérations de rénovation dans les règlements des PLUi.
Mme le président. L’amendement n° 123 rectifié, présenté par Mmes Bonnefoy et Blatrix Contat, MM. Cozic, Devinaz et Bourgi, Mmes Harribey et S. Robert, MM. Temal et Jomier, Mme Van Heghe et MM. Vaugrenard, Roger et Jeansannetas, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Au 2° de l’article L. 151-5, après le mot : « forestiers », sont insérés les mots : « de préservation de la biodiversité. » ;
2° Au 1° de l’article L. 151-11, après le mot : « atteinte », sont insérés les mots : « à la préservation de la biodiversité et » ;
3° À l’article L. 151-17, après le mot : « locales », sont insérés les mots : « et de l’objectif de préservation de la biodiversité » ;
4° À l’article L. 151-18, après le mot : « patrimoine », sont insérés les mots : « , à la préservation de la biodiversité » ;
5° Au premier alinéa de l’article L. 151-23, après le mot : « notamment », sont insérés les mots : « pour la préservation de la biodiversité ainsi que » ;
6° Après le 6° de l’article L. 151-41, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Des emplacements réservés pour des opérations de renaturation pour la création d’espaces favorables à la biodiversité. »
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement, très proche du précédent, est défendu.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. La proposition de loi n’a pas pour objet de créer de nouvelles obligations en matière de biodiversité – cela viendra sans doute un jour.
En outre, beaucoup des mesures proposées sont déjà satisfaites. Je pense à la loi Climat et résilience, qui a déjà permis d’identifier des zones prioritaires de renaturation, sujet sur lequel il faudra continuer à avancer – sans compter que les PLU permettent déjà de réglementer les projets et d’identifier des zones d’intérêt écologique.
Pour ces raisons, je suis défavorable à ces deux amendements.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. La préservation de la biodiversité est au cœur de toutes les actions que nous menons pour faire en sorte de limiter l’étalement urbain et l’artificialisation des sols.
Mais, en l’espèce, ces deux amendements sont satisfaits par les articles L. 100-1, L. 101-2, L. 101-3, L. 155-1, L. 151-8 et L. 141-10 du code de l’urbanisme, qui correspondent aux obligations fixées dans les projets d’aménagement et de développement durables (PADD), des Scot et des PLUi.
Par conséquent, je suis défavorable à ces amendements.
Mme le président. Madame Préville, l’amendement n° 145 rectifié est-il maintenu ?
Mme Angèle Préville. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 145 rectifié est retiré.
Madame Robert, l’amendement n° 123 rectifié est-il maintenu ?
Mme Sylvie Robert. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 123 rectifié est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 15 rectifié est présenté par MM. Kern et Longeot, Mme Herzog, MM. Levi, Le Nay, Laugier, Canévet, Chauvet, Duffourg et Détraigne, Mmes Jacquemet et Billon, MM. Folliot, Delcros et Moga, Mme Morin-Desailly et MM. J.M. Arnaud et S. Demilly.
L’amendement n° 35 rectifié est présenté par M. Bascher, Mmes Estrosi Sassone et Noël, MM. Sido, Paccaud et Sol, Mme Demas, M. Burgoa, Mme Puissat, MM. Perrin, Rietmann et Savary, Mmes Lopez et Ventalon, MM. Cuypers, E. Blanc, Darnaud, Cadec, Panunzi et Sautarel, Mme Malet, M. Somon, Mme Gruny, M. Genet, Mme Imbert, M. Pellevat, Mme Dumont, MM. Chatillon et Bouchet, Mmes Canayer et F. Gerbaud, M. Tabarot, Mmes Schalck et Bellurot, MM. Lefèvre, Brisson et Mouiller, Mme Dumas, M. Longuet, Mme Joseph, MM. Piednoir, Gueret et Pointereau, Mme de Cidrac, M. Rapin, Mmes Garriaud-Maylam et Borchio Fontimp et MM. Belin et Gremillet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le taux d’artificialisation d’un projet lié à la gestion des déchets est pondéré à la baisse au regard de l’intégration d’éléments réputés répondre aux objectifs mentionnés à l’article L. 100-4 du code de l’énergie ou à l’article L. 541-1 du code de l’environnement.
II. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par voie réglementaire dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi.
La parole est à M. Jean-François Longeot, pour présenter l’amendement n° 15 rectifié.
M. Jean-François Longeot. Cet amendement vise à prendre en compte les objectifs de la politique énergétique et de la politique nationale de prévention et de gestion des déchets dans le calcul du taux d’artificialisation des sols.
En effet, dans un contexte d’urgence climatique, il est essentiel de favoriser le développement de projets qui contribuent à la transition écologique locale, afin de poursuivre et d’accompagner les efforts engagés par les territoires en la matière, tout en respectant les objectifs de « zéro artificialisation nette » à l’horizon de 2050.
C’est particulièrement le cas des activités de gestion des déchets et de production d’énergies renouvelables.
Compte tenu de l’importance de ces projets dans la mise en œuvre de la transition écologique de nos territoires, et en parfaite cohérence avec les objectifs de la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables et de notre politique de transition vers une économie circulaire, il est nécessaire de les valoriser dans le cadre de l’application de l’objectif « zéro artificialisation nette ».
Mme le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour présenter l’amendement n° 35 rectifié.
M. Jérôme Bascher. Nous sommes là au cœur du sujet : les injonctions paradoxales normatives !
Il se trouve qu’il faut encourager – et je suis mille fois pour ! – l’économie circulaire, les énergies renouvelables, mais tout cela sans consommer de terrain… Nous en sommes arrivés à un tel point que votre ministère lui-même se mord, non plus la queue, mais la nuque ! (Sourires.) Voilà tout le problème : l’enfer est parfois pavé de bonnes intentions.
Ces bonnes intentions, c’est évidemment le ZAN, le recyclage ou les énergies renouvelables. Mais chacun voit bien que ces objectifs ne sont plus réalisables ! À un moment donné, il faut accepter de desserrer la contrainte de ces injonctions paradoxales : tel est le sens de mon amendement.
M. Bruno Sido. Très bien !
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. La commission entend parfaitement vos arguments, mes chers collègues. Néanmoins, le cadre qu’elle s’est fixé lui impose de ne pas accepter les initiatives qui s’inscrivent dans une logique de pondération ou de dérogation.
Malheureusement, j’émettrai donc un avis défavorable sur vos deux amendements.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. J’ai eu le grand bonheur de signer aujourd’hui même, à treize heures, avec le président du Sénat, une charte destinée à limiter l’inflation normative et à lutter contre la complexité des normes.
M. Jérôme Bascher. Justement !
M. Christophe Béchu, ministre. Je compte, au moins ce soir, avant de me coucher, faire en sorte de respecter cette charte en n’engageant pas la responsabilité du Gouvernement sur quoi que ce soit qui complexifierait le texte, ce à quoi conduirait l’adoption de vos amendements, indépendamment des difficultés éventuelles qu’ils peuvent soulever ! (Sourires.)
M. Jérôme Bascher. Je retire mon amendement, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 35 rectifié est retiré.
M. Jean-François Longeot. Je retire également le mien !
Mme le président. L’amendement n° 15 rectifié est retiré.
Article 9
I. – L’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° Au début du neuvième alinéa, est ajoutée la mention : « II. – » ;
3° Au début du douzième alinéa, est ajoutée la mention : « III. – » ;
4° Après le b, sont insérés des c et d ainsi rédigés :
« c) Non artificialisée une surface à usage résidentiel, de loisirs, ou d’infrastructures de transport, dont les sols sont couverts par une végétation herbacée ;
« d) Artificialisée une surface dont l’état de pollution des sols est incompatible en l’état avec un usage résidentiel, récréatif ou agricole. » ;
5° Au début du dernier alinéa, est ajoutée la mention : « IV. – ».
II. – Après l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme, il est inséré un article L. 101-2-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 101-2-2. – I. – L’établissement public de coopération intercommunale ou la commune compétente en matière de document d’urbanisme peut délimiter au sein du document d’urbanisme, dans les conditions prévues au présent article, des périmètres de densification et de recyclage foncier.
« Au sein de ces périmètres, les aménagements, les constructions, les installations ou les travaux ayant pour effet de transformer des surfaces non artificialisées mentionnées au c du III de l’article L. 101-2-1 en surfaces artificialisées n’est pas prise en compte pour évaluer l’atteinte des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols fixés par la loi ou par les documents de planification.
« II. – Dans les communes couvertes par un plan local d’urbanisme, les périmètres de densification et de recyclage foncier sont délimités par le règlement. Ils peuvent inclure des parcelles situées :
« 1° Au sein des zones urbaines identifiées par le règlement ;
« 2° Au sein des secteurs de taille et de capacité d’accueil limitées délimités par le règlement en application de l’article L. 151-13 ;
« 3° Au sein des secteurs déjà urbanisés identifiés délimités en application de l’article L. 121-8 ;
« 4° Au sein des hameaux et des groupes d’habitations nouveaux intégrés à l’environnement mentionnés à l’article L. 122-7 ;
« 5° Sur une friche au sens de l’article L. 111-26.
« Pour la délimitation ou la révision des périmètres mentionnés au présent II, il peut être recouru à la procédure de modification simplifiée prévue aux articles L. 153-45 à L. 153-48.
« Lorsque le plan local d’urbanisme est élaboré ou modifié à l’initiative d’un établissement public de coopération intercommunale, la délimitation ou la révision des périmètres est soumise à l’avis des communes membres.
« III. – Dans les communes couvertes par une carte communale, les périmètres de densification et de recyclage foncier sont identifiés au sein d’un document graphique simplifié annexé à la carte communale. Ils peuvent inclure des parcelles situées :
« 1° Au sein des secteurs constructibles délimités par la carte communale ;
« 2° Au sein des secteurs déjà urbanisés identifiés délimités en application de l’article L. 121-8 ;
« 3° Au sein des hameaux et des groupes d’habitations nouveaux intégrés à l’environnement mentionnés à l’article L. 122-7 ;
« 4° Sur une friche au sens de l’article L. 111-26.
« IV. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »
Mme le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, sur l’article.
M. Jean-Claude Anglars. Je me conformerai à la demande de la présidente de la commission spéciale, Valérie Létard, en écourtant mon intervention. Permettez-moi simplement de préciser que nous allons parler d’agriculture, de bâtiments agricoles et que nous aurons dans quelques instants à examiner un amendement, issu d’un travail transpartisan, et élaboré de concert avec la commission spéciale – mais j’y reviendrai.
Mme le président. L’amendement n° 161, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le b de l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme est complété par les mots : « ou à usage de parc ou jardins publics ».
La parole est à M. le ministre.
M. Christophe Béchu, ministre. Nous proposons que les surfaces végétalisées qui sont à usage de parcs ou de jardins publics soient considérées comme non artificialisés.
M. Jérôme Bascher. Très bien !
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Je rappelle tout d’abord que c’est le décret du 29 avril 2022 relatif à la lutte contre l’artificialisation des sols qui, après avoir suscité un certain émoi, est à l’origine de cet article 9.
Depuis, monsieur le ministre, vous avez sifflé la fin de la récréation, ou plutôt – car ce terme de « récréation » n’est pas très approprié – décidé d’une pause qui a été très appréciée par tout le monde, dans la mesure où elle a permis de calmer les esprits et de reprendre cette question de la nomenclature des sols à zéro, et ce d’autant plus que nous avions eu le sentiment que votre décret revenait sur les mesures que nous avions votées – je ne le redirai pas mille fois, mais c’était un peu l’idée.
Par la suite, la Fédération nationale des agences d’urbanisme (Fnau) a été saisie et a remis un rapport que chacun a pu consulter, ce qui laisse présager la parution d’un nouveau décret, dont la commission a parfaitement conscience.
C’est dans ce contexte, et avant la parution d’un prochain décret, qu’a été élaboré l’article 9, qui vise aussi à donner une forme de liberté aux élus en matière de densification ou de renaturation des sols – j’y reviendrai.
Dans sa rédaction actuelle, votre amendement ne peut recueillir qu’un avis défavorable de notre part en ce sens qu’il tend à réécrire des dispositions consensuelles, issues des travaux transpartisans de la mission conjointe de contrôle du Sénat, en particulier la qualification des surfaces couvertes par une végétation herbacée comme non artificialisées et la possibilité de déterminer des « périmètres de densification et de recyclage foncier ».
Ce double dispositif est un axe majeur de notre proposition de loi. C’est pourquoi la commission émet bel et bien un avis défavorable sur votre amendement, monsieur le ministre.
Mme le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christophe Béchu, ministre. Je ne vois absolument pas en quoi l’amendement du Gouvernement contredit le dispositif de l’article 9.
Je vous demande simplement de choisir entre deux options : soit vous acceptez que ces dispositions soient introduites dans la loi, afin d’éviter qu’elles ne figurent dans un décret ; soit vous le refusez, mais il ne faudra pas nous reprocher ensuite de fixer les règles par voie réglementaire.
Je précise que cet amendement fait l’objet d’une position commune avec la Fnau et l’AMF, avec lesquels nous avons travaillé de concert. J’ai donc du mal à comprendre votre rigidité.
Pourquoi vous abriter derrière les travaux de la commission spéciale, alors que vous saviez que le Gouvernement avait engagé en parallèle une réflexion avec l’Association des maires de France et la Fédération nationale des agences d’urbanisme pour aboutir à une rédaction claire, qui empêche toute interprétation problématique ?
Cette position vous conduit à émettre un avis défavorable sur des dispositions qui, en l’occurrence, pourraient être définies par la simple voie réglementaire.
Mme le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. Merci beaucoup, monsieur le ministre ! En vous exprimant ainsi, vous appliquez en quelque sorte la charte que vous avez signée tout à l’heure.
Alain Lambert, lors de son audition par la mission d’information sur l’impact des décisions réglementaires et budgétaires de l’État, que j’ai l’honneur de présider, a indiqué que les propos des ministres avaient pour vocation d’éclairer les débats : désormais, si je vous suis bien, le Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) refusera d’office les projets de décret qui comporteront des mesures du type de celle que vous venez de proposer.
Mme le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Je voudrais revenir sur certaines affirmations de M. le rapporteur. L’article 9 n’a pas fait l’objet d’un consensus au sein de la commission spéciale : nous sommes un certain nombre à être foncièrement défavorables au dispositif retenu !
Du reste, je voterai votre amendement, monsieur le ministre, mais ce sujet a posé problème dès le départ – on en a parlé il y a quelques instants –, dans la mesure où la nomenclature des sols s’appliquera au bout de dix ans.
M. le ministre s’est ému tout à l’heure de ce que je proposais une trajectoire de réduction de l’artificialisation des sols à l’horizon de 2050. Il nous a répondu qu’il était bien plus urgent de trouver une solution pour les dix prochaines années, et que l’on verrait pour la suite.
S’agissant de la nomenclature, on aurait pu raisonner de la même manière.
En tout état de cause, si l’on en était resté à la prise en compte de la consommation des Enaf sur l’ensemble de la période, nous n’aurions pas à débattre aujourd’hui de toutes ces questions, y compris le problème des bâtiments agricoles. À mon avis, le dispositif serait beaucoup plus lisible.
Pour en revenir à cet amendement, si l’on inclut les pelouses dans la nomenclature, cela signifie que, à partir de 2030, certains lotissements seront considérés comme moins denses qu’ils ne l’étaient durant la décennie précédente. C’est une aberration totale !
Mes chers collègues, je vous informe – M. le ministre ne l’a pas évoqué – qu’une directive de la Commission européenne sur la nature en ville, parvenue à un stade très avancé, est dans les tuyaux. Celle-ci devrait justement insister sur la nécessité d’encourager la biodiversité dans l’espace public – j’insiste sur le terme de « public ».
Réintégrer les surfaces privées dans cette classification des sols n’aurait aucun sens, car, dans ce cas, les collectivités reconsommeront de l’espace à partir de 2030. En ville, elles seront même obligées de définir des zones de densification spéciales, de sorte à exclure les surfaces artificialisées en zone urbaine du décompte de la consommation de l’espace.
On va créer une véritable usine à gaz, alors qu’il suffirait d’en rester, pour ce qui est de la définition des surfaces non artificialisées, aux seuls parcs et jardins publics.
Un tel dispositif incitera les collectivités à poursuivre la densification du tissu urbain par le développement de la biodiversité au sein des espaces publics, qui seront gérés par les communes.
Mme le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.
M. Laurent Somon. Permettez-moi de vous contredire, mon cher collègue : le dispositif proposé par la commission spéciale n’accroîtra pas la consommation foncière, puisqu’elle est généralement limitée dans le cadre des Scot.
M. Ronan Dantec. Pas du tout !
M. Laurent Somon. Mais si ! Les Scot offriront toujours aux collectivités cette liberté de limiter la surface des constructions pour satisfaire l’ensemble de leurs besoins dans le cadre de la consommation de l’espace et du nécessaire respect de l’objectif ZAN.
Mme le président. Je suis saisie de vingt-cinq amendements et de deux sous-amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 126 rectifié, présenté par Mmes Bonnefoy et Blatrix Contat, MM. Cozic, Devinaz et Bourgi, Mmes Harribey et S. Robert, MM. Temal et Jomier, Mme Van Heghe et MM. Vaugrenard, Roger et Jeansannetas, est ainsi libellé :
Alinéas 1 à 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement vise à modifier la nomenclature des surfaces artificialisées, telle que l’article 9 la définit.
Dans sa rédaction actuelle, cet article risque de contrevenir à l’objectif ZAN et à la perte de ce que représente un sol préservant l’ensemble de ses fonctions écologiques et véritablement non artificialisé, aux termes de l’article L. 102-2-1 du code de l’urbanisme.
Les associations environnementales s’opposent à cette évolution du droit qui pourrait dénaturer, au sens propre comme au sens figuré, ce qu’est un sol non artificialisé.
Le présent amendement tend à rétablir le droit actuel, qui respecte davantage la qualité des sols et le vivant.
Une surface à usage résidentiel, de loisirs, de production secondaire ou tertiaire, recouverte d’une végétation herbacée, peut présenter peu d’intérêt pour la biodiversité faunistique et floristique. Elle ne remplit pas les mêmes fonctions écologiques qu’un espace végétalisé, géré de manière diversifiée.
Cette modification du droit en vigueur ouvrirait même la porte à un certain nombre de dérives et pourrait créer des effets de bord par rapport à l’objectif de « zéro artificialisation nette », défini par la loi Climat et résilience.
Assouplir la loi ne veut pas dire la dénaturer : c’est la raison pour laquelle nous sommes un certain nombre à vous demander, mes chers collègues, de voter cet amendement.
Mme le président. L’amendement n° 75 rectifié bis, présenté par MM. Longeot et Le Nay, Mmes Gacquerre et Dumas, MM. Delcros, Kern et Duffourg, Mmes F. Gerbaud et Muller-Bronn, MM. Chatillon, Moga, Menonville et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
3° … Le a est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les friches au sens de l’article L. 111-26 sont considérées comme artificialisées ; »
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. L’amendement vise à clarifier le statut des friches, qui est incertain en l’état actuel du droit, en précisant que celles-ci doivent être regardées comme des surfaces artificialisées au sens de la stratégie de sobriété foncière et de lutte contre l’artificialisation des sols.
Cette disposition permettrait de favoriser la réhabilitation et le recyclage foncier des friches commerciales, artisanales ou industrielles. La réutilisation d’emprises foncières enfrichées n’entraînera aucune consommation d’espace ni d’artificialisation au sens de la loi Climat et résilience.
À l’inverse, leur renaturation améliorerait le solde net d’artificialisation de la collectivité.
La mesure que nous proposons est conforme à l’esprit de l’objectif ZAN, qui repose sur l’utilisation prioritaire de friches et de terrains déjà artificialisés ou situés dans un périmètre urbain, dans une logique de densification et de limitation de l’étalement urbain.
Mme le président. L’amendement n° 195, présenté par MM. Dantec, Benarroche et Breuiller, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« c) Non artificialisée une surface à usage public récréatif dont la superficie est supérieure à 2 500 mètres carrés et les sols sont couverts par une végétation herbacée ;
II. - Alinéas 9 à 25
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Cet amendement s’inscrit dans le même esprit que les deux précédents.
J’irai dans le même sens que les propos de mes collègues : je crains que vous n’ayez pas bien compris le fait que, si l’on en reste à la nomenclature fixée par l’article 9, on ne comptabilisera, après 2030, comme surface artificialisée dans un lotissement que l’emprise de la maison et la voirie. On exclura désormais le jardin du décompte !
Cela signifie que, demain, une entreprise qui voudra conserver de la réserve foncière en vue d’un développement à venir, même hypothétique, fera pousser du gazon sur son terrain, parce que celui-ci ne sera pas considéré comme une surface artificialisée.
À l’inverse, mon amendement, qui est en lien très direct avec la directive européenne dont je viens de parler, repose sur l’idée que, demain, dans le cadre d’opérations de densification en ville – en sachant qu’actuellement les surfaces sont calculées selon la méthode de la « tache urbaine », c’est-à-dire qu’il n’y a pas d’Enaf –, la création d’un parc de 2 500 mètres carrés, qui jouera un vrai rôle en termes de biodiversité, beaucoup plus qu’une simple pelouse, redonnera à la commune un droit d’artificialiser ailleurs. Un tel dispositif redonnera un droit au développement !
Telle était la logique initiale du ZAN, celle qui prévaut aujourd’hui à l’échelon européen. Je regrette vraiment que vous envisagiez un tel changement de nomenclature, qui n’est pas du tout nécessaire, et qui va dans le sens d’une rigidification supplémentaire.
Sans compter que vous remettez plusieurs pièces dans la machine d’un seul coup en termes de complexification des normes au niveau des zones de densification urbaine.
Restons-en, mes chers collègues, à la définition initiale des surfaces non artificialisées en ne retenant que les parcs et jardins publics et, si possible, d’une certaine taille, pour favoriser véritablement la biodiversité.
Mme le président. L’amendement n° 226 rectifié ter, présenté par M. Delcros, Mmes Vermeillet, Vérien et Loisier, MM. Le Nay, Laugier et de Belenet, Mme Sollogoub, MM. Longeot, Chauvet, Kern et Duffourg, Mme Saint-Pé, MM. Maurey, Détraigne, Folliot et Moga, Mme Morin-Desailly, MM. J.M. Arnaud, S. Demilly, Canévet, P. Martin, Levi et Henno, Mme Espagnac et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après le mot :
usage
insérer le mot :
agricole,
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Il s’agit, par cet amendement, de faire du critère de l’usage agricole une condition déterminante pour qualifier, ou non, une surface d’artificialisée.
Mme le président. L’amendement n° 117 rectifié quinquies, présenté par MM. Folliot, Le Nay, Kern, Moga, Duffourg et Delcros, Mmes Saint-Pé et Vermeillet, MM. Canévet et Henno, Mme Férat, MM. J.M. Arnaud, Vanlerenberghe et Chauvet et Mmes Billon et Devésa, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après le mot :
résidentiel,
insérer les mots :
de production secondaire ou tertiaire,
La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.
M. Jean-Michel Arnaud. Les jardins particuliers, potagers ou d’agrément constituent des espaces verts propices à la biodiversité et participent ainsi aux objectifs nationaux et internationaux en matière de climat et de protection de la biodiversité. Cet amendement vise à exclure ces surfaces de la notion d’artificialisation, ce qui aura notamment pour effet d’inciter les constructeurs à continuer de proposer des espaces végétaux au sein de leurs projets.
Mme le président. L’amendement n° 241 rectifié bis, présenté par Mme Eustache-Brinio, M. Bazin, Mme Belrhiti, MM. Tabarot, Daubresse et Mandelli, Mmes Malet et Dumas, M. Mouiller, Mme Joseph, M. Longuet, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bascher, Mmes Dumont et Muller-Bronn, M. Charon, Mme L. Darcos, M. Brisson, Mme Canayer, MM. Genet, Savin et E. Blanc, Mme Gruny, MM. Duplomb et Favreau, Mme Gosselin, MM. Bouchet, B. Fournier, Rapin, Gremillet et Belin et Mme Di Folco, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après le mot :
transport
insérer les mots :
à l’exception des plateformes aéroportuaires
La parole est à M. Philippe Tabarot.
M. Philippe Tabarot. Cet amendement est défendu.
Mme le président. L’amendement n° 155 rectifié, présenté par MM. Somon, Rapin et Burgoa, Mme Dumas, M. Mouiller, Mme Ventalon, MM. Courtial et Brisson, Mmes Belrhiti, Canayer et Bonfanti-Dossat, MM. Klinger, Paccaud, de Legge, Bascher et Genet, Mmes Gruny, Imbert et Goy-Chavent, M. Sido, Mme Gosselin, MM. Wattebled, Bouchet, Cadec, Panunzi et Savary et Mme Noël, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après le mot :
transport
insérer les mots :
, les jardins familiaux au sens de l’article L. 561-1 du code rural et de la pêche maritime, les espaces verts, les jardins pavillonnaires
La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Dans la même veine qu’un amendement précédemment défendu, nous proposons d’ajouter à la catégorie des surfaces non artificialisées les jardins et jardins ouvriers participant à la préservation de la biodiversité dans nos territoires.
Je rappelle que l’artificialisation se caractérise par une altération, une perte des fonctions du sol, ayant des conséquences sur la biodiversité et l’accroissement des émissions de gaz à effet de serre. Je crois que tous les équipements paysagers mentionnés, notamment les jardins ouvriers, participent justement à la captation du carbone et à la préservation de la biodiversité. À ce titre, ils méritent d’être exclus de la nomenclature.
M. Ronan Dantec. Nous parlons d’espaces publics !
Mme le président. L’amendement n° 146 rectifié, présenté par Mme Préville, MM. Pla, Bourgi et Tissot et Mme Poumirol, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par les mots :
et qui ne fait l’objet d’aucun traitement contenant des produits phytosanitaires
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Cet amendement tend à prévoir que, pour que les surfaces végétalisées à usage résidentiel, secondaire ou tertiaire soient considérées comme non artificialisées, elles ne devront faire l’objet d’aucun traitement contenant des produits phytosanitaires.
En effet, les intrants sont une des causes principales de baisse de la biodiversité. Sans les animaux, le vivant, la nature n’est rien d’autre que des paysages, et c’est parce que les sols sont vivants qu’ils stockent le carbone. Tout est lié !
Je voudrais rappeler quelle est la spécificité française en la matière, en citant cet extrait d’un livre écrit par un naturaliste et un biologiste : « À la grande loterie de la valse des continents et des climats, la France a tiré le gros lot. Trois bonnes fées se sont penchées sur son berceau : la fée Géologie, la fée Géographie et la fée Biodiversité. Elles lui ont offert, rassemblée dans un mouchoir de poche, une extraordinaire diversité de paysages. »
Mme le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 16 est présenté par Mme Espagnac.
L’amendement n° 25 rectifié quinquies est présenté par Mme Noël, MM. Bascher, Joyandet, Panunzi et Cadec, Mme Belrhiti, MM. Reichardt, Courtial, C. Vial, J.M. Boyer et Genet, Mme Berthet, M. D. Laurent, Mme Puissat, MM. Saury, Bouchet et Chatillon, Mmes Garriaud-Maylam et Dumont, MM. Savin et Mandelli, Mme Dumas, MM. Duplomb et Charon, Mme Borchio Fontimp et M. Houpert.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Non artificialisée une surface végétalisée utilisée l’hiver comme piste de ski ;
L’amendement n° 16 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Jérôme Bascher, pour présenter l’amendement n° 25 rectifié quinquies.
M. Jérôme Bascher. Cet amendement est défendu.
Mme le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 26 rectifié est présenté par MM. Pellevat et Paccaud, Mmes Berthet, Noël et Chauvin, MM. Bascher, Mandelli, H. Leroy et Darnaud, Mme Ventalon, MM. Perrin, Le Rudulier et Bacci, Mmes Imbert, Gosselin, Puissat et Belrhiti, M. Panunzi, Mmes Goy-Chavent, Estrosi Sassone, M. Mercier et Malet, M. Cambon, Mmes Lassarade et Thomas, M. B. Fournier, Mme Lopez, MM. Bouchet, Genet, Somon et Saury, Mmes Schalck et Dumont, M. Chatillon, Mmes Jacques et Garriaud-Maylam, MM. Charon et Brisson, Mme Dumas, MM. Pointereau, Sido et Gremillet, Mme Borchio Fontimp, M. Rapin et Mme Di Folco.
L’amendement n° 27 rectifié bis est présenté par MM. J.M. Arnaud et Laugier, Mme Devésa, MM. Levi et Prince, Mme Loisier, M. Canévet, Mme Férat, M. Duffourg, Mme Jacquemet, M. Chauvet, Mme Billon, MM. Folliot, Le Nay, Moga et les membres du groupe Union Centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Non artificialisée une surface végétalisée utilisée l’hiver comme piste de ski alpin telle que définie à l’article R. 122-4 du code de l’urbanisme. La présence sur ladite surface d’installations et de constructions utilisées pour l’exploitation de remontées mécaniques telles que définies à l’article L. 342-7 du code du tourisme ou de tapis roulants tels que définis à l’article L. 342-17-1 du même code ne fait pas obstacle à ce qu’elle soit considérée comme non artificialisée ;
La parole est à M. Jérôme Bascher, pour présenter l’amendement n° 26 rectifié.
M. Jérôme Bascher. Cet amendement est également défendu.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour présenter l’amendement n° 27 rectifié bis.
M. Jean-Michel Arnaud. Cet amendement tend à classer les surfaces végétalisées utilisées, l’hiver, comme pistes de ski alpin parmi les surfaces non artificialisées.
Je précise qu’une piste de ski se transforme, l’été, en alpage réceptacle de biodiversité. Il est donc particulièrement difficile d’imaginer que l’on intègre ces espaces au contingent des sols artificialisés et c’est pourquoi, mes chers collègues, je compte sur vous pour apporter cette correction.
Mme le président. L’amendement n° 20 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 33 rectifié bis, présenté par MM. Longeot, Le Nay et Folliot, Mme Dumas, MM. Kern et Duffourg, Mme Muller-Bronn, MM. Chatillon, Moga et Menonville, Mme Jacquemet, MM. Louault et A. Marc, Mme Saint-Pé, M. S. Demilly, Mme Vermeillet, MM. Canévet, Henno, Chasseing, Wattebled et Belin, Mmes Garriaud-Maylam et Perrot et M. Hingray, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Non artificialisée une surface sur laquelle est implantée une scierie ou une installation concourant à l’exploitation sylvicole ;
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. La valorisation de nos ressources sylvicoles est vertueuse sur un plan écologique et constitue un enjeu de souveraineté. Il est ainsi proposé que les surfaces nécessaires à la construction de nouvelles scieries et autres équipements sylvicoles dans notre pays ne soient pas décomptées au titre du ZAN.
Mme le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 29 rectifié septies est présenté par M. Delcros, Mmes Vermeillet, Vérien et Loisier, MM. Le Nay, Laugier et de Belenet, Mmes N. Goulet et Sollogoub, MM. Longeot et Maurey, Mme Saint-Pé, MM. Duffourg, Kern, Chauvet, Détraigne et Folliot, Mme Gacquerre, M. Moga, Mme Morin-Desailly, MM. J.M. Arnaud, S. Demilly, Canévet, P. Martin, Levi, Henno et les membres du groupe Union Centriste.
L’amendement n° 66 rectifié ter est présenté par MM. Anglars, J.M. Boyer et D. Laurent, Mme Ventalon, MM. Sautarel, Retailleau et Bas, Mme Noël, MM. Bonhomme, E. Blanc, Darnaud, Sol et Bacci, Mme Belrhiti, MM. Bouloux, Panunzi, Cadec et J.P. Vogel, Mme Malet, M. Bascher, Mmes Puissat et Berthet, M. Chevrollier, Mmes Goy-Chavent et Richer, MM. Somon, Cuypers et Hugonet, Mme Gruny, MM. Genet et Courtial, Mme Imbert, M. Burgoa, Mmes Garnier, Garriaud-Maylam et Estrosi Sassone, M. Chatillon, Mmes Lassarade, Thomas et F. Gerbaud, M. Tabarot, Mmes Schalck, Bellurot, Primas et Gosselin, MM. Mandelli, Brisson et Mouiller, Mme Dumas, MM. Lefèvre, Longuet, Piednoir et C. Vial, Mme Joseph, MM. Charon et Babary, Mme Canayer, MM. Duplomb, Saury, Favreau et Husson, Mmes Chauvin, Deseyne et Raimond-Pavero, MM. Gremillet, Rapin, Houpert, Belin et de Legge, Mme Dumont, M. Reichardt, Mmes Drexler et M. Mercier, MM. Bouchet et Pointereau, Mme Muller-Bronn, M. B. Fournier, Mme Lopez et MM. Pellevat, Grand, Segouin et Sido.
L’amendement n° 175 rectifié est présenté par Mmes Préville et Espagnac, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. J. Bigot, P. Joly, Kerrouche, Kanner, Michau, Jacquin, Montaugé et Tissot, Mme Monier, M. Mérillou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Non artificialisée une surface occupée par des constructions, installations et aménagements nécessaires à l’exploitation agricole. »
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l’amendement n° 29 rectifié septies.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement, présenté sur l’initiative de notre collègue Bernard Delcros, devrait en toute probabilité correspondre à l’amendement que le rapporteur m’a suggéré de retirer à l’article 7. Il s’agit effectivement de considérer comme non artificialisée une surface occupée par des constructions, installations et aménagements nécessaires à l’exploitation agricole.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour présenter l’amendement n° 66 rectifié ter.
M. Jean-Claude Anglars. Cet amendement vise à exclure des surfaces artificialisées les bâtiments nécessaires aux exploitations agricoles et leurs abords.
En vertu des dispositions de la loi Climat et résilience du mois d’août 2021, les bâtiments agricoles seront considérés comme des surfaces artificialisées à partir de 2031. Dans un contexte de sobriété foncière, cette disposition ne manquera pas de soulever de nombreuses difficultés et soumettra les élus locaux à des dilemmes en matière d’aménagement. Les maires pourraient devoir choisir entre la construction d’habitations et le développement ou la création d’exploitations agricoles.
Nous rappelons que les entreprises agricoles, socles non délocalisables de l’économie des territoires ruraux, auront à répondre au cours des prochaines années aux obligations de mise aux normes pour le bien-être animal, entraînant l’extension éventuelle des bâtiments existants. Les exploitations agricoles devront également s’adapter aux enjeux climatiques, ce qui supposera des infrastructures nouvelles pour la préservation de leur production et leur diversification.
Les emprises artificialisées nécessaires à l’exploitation agricole constituent déjà des dérogations au droit commun de l’urbanisme, dans la mesure où ce type de constructions et d’installations est autorisé en dehors des espaces urbanisés de la commune, dans le cadre du règlement national d’urbanisme, d’une carte communale ou d’un plan local d’urbanisme.
Mme le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 175 rectifié.
Mme Angèle Préville. Avec cet amendement, nous proposons – c’est primordial – de sauvegarder nos exploitations agricoles et de préparer l’avenir, en permettant l’implantation de structures nouvelles plus modernes, conçues pour affronter les aléas climatiques et pour assurer la souveraineté alimentaire de notre pays.
Il s’agit de préciser qu’une surface occupée par des constructions, installations et aménagements nécessaires à l’exploitation agricole sera considérée comme non artificialisée.
Notre objectif est de donner aux jeunes l’envie de s’installer et des perspectives de développer durablement une activité agricole.
Dans le prolongement de nos échanges en commission, nous souhaitons aussi aborder ce sujet essentiel qu’est l’avenir des exploitations agricoles, notamment éclaircir le changement de destination des bâtiments agricoles.
Sans création de surfaces nouvelles, une réhabilitation ne doit pas être considérée comme une nouvelle artificialisation. L’objectif est bien de favoriser la réappropriation du bâti existant pour, par exemple, répondre à des besoins en logement ou créer de nouvelles activités dans les territoires ruraux. Il existe en effet, sur nos territoires, des centaines de granges, de bâtiments d’élevage ou encore de bâtiments de stockage qui peuvent avoir une seconde vie sans consommation d’espace supplémentaire. Ce sont des opportunités à saisir ; il faut les encourager !
Dans l’idéal, j’aurais donc été tentée de rectifier mon amendement pour apporter un léger ajout, mais, comme il est inséré dans une liasse d’amendements identiques, j’en reste là.
Mme le président. Le sous-amendement n° 263 rectifié, présenté par MM. Mandelli et Somon, est ainsi libellé :
Amendement n° 66 rectifié, alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
, notamment des unités de méthanisation
La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Ce sous-amendement vise à compléter l’alinéa 3 des amendements identiques qui viennent d’être présentés pour prendre en compte explicitement les unités de méthanisation comme des installations nécessaires au fonctionnement d’une exploitation agricole et, au même titre que les autres bâtiments agricoles, les exclure du comptage des surfaces artificialisées.
Mme le président. Le sous-amendement n° 264 rectifié, présenté par MM. Mandelli et Somon, est ainsi libellé :
Amendement n° 66 rectifié bis, alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
, notamment des installations photovoltaïques
La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Nous proposons ici de considérer les installations photovoltaïques comme des installations nécessaires au fonctionnement d’une exploitation agricole et, donc, de les exclure du comptage des surfaces artificialisées. Ces surfaces sont d’ailleurs signalées comme des surfaces à usage agricole lorsque, sous les panneaux photovoltaïques, on pratique la culture ou l’élevage. (M. Philippe Tabarot applaudit.)
Mme le président. L’amendement n° 31 rectifié bis, présenté par Mmes Vermeillet et Guidez, MM. Le Nay et Bonneau, Mmes Vérien et Saint-Pé, MM. Vanlerenberghe, Mizzon et Louault, Mmes N. Goulet et Devésa, M. Levi, Mme de La Provôté, M. Prince, Mme Sollogoub, M. Kern, Mme Gatel, MM. Canévet, Chauvet, Duffourg et Maurey, Mme Perrot, MM. Longeot, Delcros et Détraigne, Mme Jacquemet, M. Folliot, Mme Gacquerre et MM. Hingray et J.M. Arnaud, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Non artificialisée une surface à protéger pour des considérations écologiques telle qu’identifiée à l’article L. 151-23 du présent code. » ;
La parole est à M. Pierre-Antoine Levi.
M. Pierre-Antoine Levi. L’article 9 de la proposition de loi prévoit explicitement que les surfaces végétalisées à usage résidentiel, secondaire ou tertiaire – jardins particuliers, parcs, pelouses – soient considérées comme non artificialisées.
L’article L. 151-23 du code de l’urbanisme prévoit, quant à lui, l’identification d’espaces à protéger pour des considérations écologiques dans les zonages des plans locaux d’urbanisme, notamment les trames vertes et bleues. Ce sont des zones inconstructibles, mais elles peuvent être intégrées dans un zonage à urbaniser ou une zone urbaine.
Aussi, afin de ne pas pénaliser le développement des communes qui s’engagent dans la création d’espaces protégés, nous proposons par cet amendement de considérer ces espaces comme non artificialisés. Dès lors, ils ne doivent pas être retenus dans l’assiette déterminant les futurs droits à construire.
Mme le président. L’amendement n° 138 rectifié quater, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Prince, Duffourg, Kern, Chauvet, Delcros, Le Nay, Moga et Henno et Mmes Vermeillet et Perrot, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Non-artificialisée une surface dégradée mais pourvue d’installations de production ou de stockage d’énergie à partir des sources renouvelables ou bas-carbone mentionnées à l’article L. 211-2 du code de l’énergie. » ;
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Avec cet amendement, nous continuons l’inventaire à la Prévert… Nous proposons que les surfaces dégradées, mais pourvues d’installations de production ou de stockage d’énergie renouvelable soient considérées comme non artificialisées.
Il serait injuste de pénaliser les communes qui se battent pour le développement des énergies renouvelables. L’adoption de cet amendement permettrait au contraire d’inciter les communes à recouvrir des sites dégradés d’installations de production ou de stockage d’énergie renouvelable.
Mme le président. L’amendement n° 177 rectifié, présenté par MM. Gold, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Guérini, Mme Guillotin et MM. Guiol et Requier, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Non artificialisée une surface à usage de bassin de rétention des eaux pluviales ou de bassin tampon. » ;
La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Dans la série des exclusions de la nomenclature, cet amendement vise à considérer comme non artificialisées les surfaces occupées par des ouvrages de stockage temporaire des eaux, comme les bassins tampons ou les bassins d’orage.
Mme le président. L’amendement n° 173, présenté par M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, M. J. Bigot, Mme Espagnac, MM. P. Joly et Kerrouche, Mme Préville, M. Kanner, Mme S. Robert, MM. Michau, Jacquin, Montaugé et Tissot, Mme Monier, M. Mérillou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 101-2-2. – I. – L’établissement public de coopération intercommunale ou la commune compétente en matière de document d’urbanisme répertorie, dans un état annexé à son document d’urbanisme, les friches potentiellement mobilisables situées sur son territoire. Il peut délimiter au sein du document d’urbanisme, dans les conditions prévues au présent article, des périmètres de densification et de recyclage foncier.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
M. Christian Redon-Sarrazy. Je veux, pour ma part, évoquer la question des friches.
La commission spéciale a adopté un amendement de notre groupe, tendant à ce que l’État recense les terrains à renaturer à l’échelle du territoire national. Il est également prévu que celui-ci précise leur localisation, leur qualité et l’estimation du coût des opérations de renaturation.
En effet, indépendamment de leur nature, les friches ne sont aujourd’hui qu’imparfaitement recensées. Entre rareté du foncier et lutte contre l’artificialisation des sols, la reconversion des espaces constitue pourtant un véritable enjeu dans la mise en œuvre de l’objectif ZAN, reposant sur une logique de réduction de l’artificialisation nette des sols. Les opérations de renaturation produiront donc des droits nouveaux à artificialiser.
C’est pourquoi il nous semble essentiel d’avoir une meilleure connaissance de ces terrains.
Pour compléter l’avancée réalisée, nous proposons donc que les EPCI ou les communes compétentes en matière d’urbanisme répertorient, dans un état annexé à leurs documents d’urbanisme, en particulier lors de la révision de ces documents, les friches potentiellement mobilisables situées sur leur territoire. Ce travail pourrait, par exemple, être mené par des bureaux d’études, qui sont déjà compétents en la matière.
Notre objectif est que le potentiel de revalorisation de ces terrains puisse être plus facilement identifié, étudié et, donc, utilisé.
Mme le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 209 rectifié est présenté par MM. Corbisez, Cabanel, Fialaire et Gold, Mme Guillotin et M. Guiol.
L’amendement n° 218 rectifié bis est présenté par MM. Rambaud, Lévrier, Bargeton, Dagbert, Mohamed Soilihi, Patient et Buis.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 10, au début
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Des espaces préférentiels de densification et leur volume sont identifiés dans le schéma de cohérence territoriale, en préservant la trame verte et bleue du territoire.
La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 209 rectifié.
M. Bernard Fialaire. L’article 9 permet de délimiter des périmètres de densification et de recyclage du foncier dans lesquels l’utilisation des espaces végétalisés ne sera pas prise en compte pour évaluer l’atteinte des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols. Or, le calibrage de la trajectoire d’artificialisation conditionnant l’enveloppe de renaturation nécessaire à la mise en œuvre de la stratégie territoriale se fera à l’échelle du Scot. Avec le présent amendement, il est donc proposé que des espaces préférentiels de densification, ainsi que leur volume soient identifiés dans le Scot, en articulation avec la trame verte et bleue du territoire.
Mme le président. La parole est à M. Michel Dagbert, pour présenter l’amendement n° 218 rectifié bis.
M. Michel Dagbert. Cet amendement est défendu.
Mme le président. L’amendement n° 222 rectifié, présenté par MM. Corbisez, Cabanel, Fialaire et Gold, Mme Guillotin et M. Guiol, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Après le mot :
périmètres
insérer les mots :
et sur les friches au sens de l’article L. 111-26 du présent code
La parole est à M. Bernard Fialaire.
M. Bernard Fialaire. L’article 9 prévoit que toutes les surfaces végétalisées à usage résidentiel, de loisirs, ou d’infrastructures de transport soient considérées comme non artificialisées.
Si cette évolution permet de répondre aux nombreuses inquiétudes quant à la comptabilisation de l’artificialisation des projets en extension urbaine, elle obère très fortement la capacité de densification dans l’enveloppe urbaine existante et va à l’encontre du principe visant à « refaire la ville sur la ville ».
L’introduction de périmètres de densification et de recyclage foncier par les communes et EPCI constitue une contrepartie pour permettre les projets de densification.
Afin de favoriser davantage le recyclage urbain, il est donc proposé d’intégrer les friches aux périmètres pouvant être définis par les EPCI aux termes des modifications apportées au texte par la commission.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. L’amendement n° 126 rectifié vise à supprimer des dispositions consensuelles issues de nos travaux, sachant que, dans cette proposition de loi, nous n’avons voulu que réaffirmer l’intention première inscrite dans la loi Climat et résilience. L’avis est donc défavorable.
Il est favorable sur l’amendement n° 75 rectifié bis.
Par ailleurs, l’amendement n° 195 me semble satisfait. J’y suis donc également défavorable.
L’avis sur l’amendement n° 226 rectifié ter est en revanche favorable.
La disposition prévue à l’amendement n° 117 rectifié quinquies me semble entrer en contradiction avec la position de la commission spéciale, qui a voulu considérer ces pelouses comme artificialisées afin de favoriser la densification. L’avis sera défavorable.
Il le sera également sur l’amendement n° 241 rectifié bis. Il ne paraît pas opportun de retenir une qualification spécifique aux aéroports dans le cadre de la loi.
Je demande en outre le retrait de l’amendement n° 155 rectifié, qui me paraît satisfait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Je tiens à souligner le caractère extrêmement louable de l’amendement n° 146 rectifié. Néanmoins, celui-ci présente plusieurs difficultés pratiques sous l’angle de la mise en œuvre du ZAN, déjà relativement complexe, il faut le dire. D’une part, le dispositif concerne un grand nombre de surfaces privées, ce qui pose la question du contrôle de son effectivité. D’autre part, il soulève une interrogation quant aux moyens humains et financiers nécessaires à ce contrôle. Sa mise en œuvre ferait monter d’un grade la complexité que je viens d’évoquer, d’où l’avis défavorable exprimé sur cet amendement.
La discussion commune portant sur les pistes de ski est évidemment importante. Toutefois, je m’interroge sur le caractère sectoriel de l’approche et sur la liste à la Prévert qui pourrait être induite par la multiplication de telles approches. En outre, la disposition est-elle du ressort de la loi ou du règlement ? C’est une autre question… Enfin, un certain nombre d’articles issus du droit de l’urbanisme démontrent qu’il y a matière à s’interroger, de par leurs aménagements ou leurs terrassements, sur le traitement des pistes de ski au regard de la nomenclature à venir de l’artificialisation des sols. Je n’irai pas plus loin dans la réflexion sur ce point, mais, pour toutes ces raisons, ces amendements recueillent à ce stade un avis défavorable.
Mme le président. Pouvez-vous préciser le numéro des amendements concernés, monsieur le rapporteur ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Cet avis défavorable concerne l’amendement n° 25 rectifié quinquies, ainsi que les amendements identiques nos 26 rectifié et 27 rectifié bis.
L’avis sera également défavorable sur l’amendement n° 33 rectifié bis.
J’en viens aux amendements nos 29 rectifié septies, 66 rectifié ter et 175 rectifié, sur lesquels j’émets un avis favorable. Ce sera l’unique dérogation sectorielle – je me contredis un peu puisque, venant de refuser toute dérogation sectorielle, j’en propose une à l’assemblée.
Mais, si nous avons bien compris au sein de la commission spéciale que, durant la première décennie, la question des bâtiments agricoles pourra être appréhendée via la consommation d’Enaf, il faudra assurer la réussite du ZAN dans les territoires ruraux à partir de 2031, ce que permet la présente disposition.
Afin de favoriser le développement des exploitations et l’installation des jeunes agriculteurs, il nous semble important d’instaurer une règle de continuité et d’éviter un effet couperet à compter de 2031, qui pourrait nuire au dynamisme agricole et à notre souveraineté alimentaire.
Je réitère donc mon avis favorable sur ces amendements identiques nos 29 rectifié septies, 66 rectifié ter et 175 rectifié.
Le sous-amendement n° 263 rectifié, tendant à élargir la qualification de bâtiments nécessaires à l’exploitation agricole aux unités de méthanisation qui leur sont complémentaires, n’a pas pu être examiné par la commission spéciale. J’émets donc un avis personnel, qui est défavorable, car je préfère que l’on se limite à la dérogation déjà adoptée.
Il en va de même pour le sous-amendement n° 264 rectifié. La dérogation proposée a déjà été prévue par la loi Climat et résilience. Sur le fond, il est difficile de déterminer si des installations photovoltaïques sont nécessaires, ou pas, à une exploitation agricole – le débat mériterait des heures. Le sous-amendement n’ayant pas non plus été examiné par la commission spéciale, j’émets à titre personnel un avis défavorable.
L’amendement n° 31 rectifié bis me semble satisfait par le droit en vigueur. J’en demande donc le retrait ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Je suis par ailleurs défavorable à l’amendement n° 138 rectifié quater, car il introduit des paramètres complémentaires et alternatifs qui me semblent complexifier encore la caractérisation de l’artificialisation.
Je suis défavorable à l’amendement n° 177 rectifié, toujours au titre de Jacques Prévert et de son inventaire.
S’agissant de l’amendement n° 173 de M. Redon-Sarrazy, dont je salue l’implication depuis le début sur le dossier du ZAN et de l’artificialisation des sols – lorsque nous avons rendu notre premier rapport sur ce thème, mon cher Christian, nous étions loin d’imaginer que la question passionnerait autant cet hémicycle et la République des élus –, le sujet des friches est un sujet dont nous avons beaucoup débattu.
Bien évidemment, avec la présidente Valérie Létard, nous comprenons l’intention plus que louable de l’auteur de l’amendement, mais, d’une part, un avis favorable est exprimé sur un autre amendement, d’autre part, le présent amendement nous paraît engendrer une charge supplémentaire pour les communes ou les EPCI en matière d’obligations relatives au ZAN. Nous pourrons revenir sur le sujet. En l’état, il nous semble préférable d’attendre les travaux des observatoires de l’habitat et du foncier mis en place par la loi Climat et résilience. Avec toutes mes excuses, mon cher collègue, j’exprime donc, pour l’instant, un avis défavorable sur l’amendement n° 173.
L’avis est également défavorable sur les amendements identiques nos 209 rectifié et 218 rectifié bis. Nous pensons qu’il ne faut pas multiplier les contraintes autour des dernières libertés qui sont laissées aux maires.
Enfin, nous demandons le retrait de l’amendement n° 222 rectifié ; sans cela, l’avis sera défavorable. D’une part, la disposition nous semble satisfaite par la rédaction actuelle de l’article 9, dans la mesure où les friches peuvent d’ores et déjà être incluses dans les périmètres de densification. D’autre part, l’adoption de l’amendement n° 75 rectifié bis, visant à considérer les friches comme artificialisées, nous semble répondre à l’intention des auteurs de l’amendement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 126 rectifié.
Je vous le dis comme je le pense, mesdames, messieurs les sénateurs : en adoptant l’article 9 tel quel, vous en viendriez à considérer que c’est, non plus la surface du terrain, mais celle de la construction sur le terrain qui compte !
À l’heure actuelle, pour 8 logements à l’hectare – ce qui est, je vous le rappelle, le cas dans la moitié des espaces artificialisés de ce pays –, nous comptons 10 000 mètres carrés d’artificialisation. Si votre texte passe, ce niveau sera ramené à 800 mètres carrés, en considérant que les 8 maisons font 100 mètres carrés au sol. Le potentiel d’artificialisation peut donc être multiplié par dix !
Vous ne pouvez pas, dans le discours, affirmer votre accord sur la trajectoire et rédiger un article qui constitue une telle porte ouverte, et ce d’autant qu’une forme de raffinement me semble faire dévier votre volonté initiale. Ainsi, compte tenu de la possibilité offerte, par la suite, d’urbaniser au titre de la densification, il y a tout intérêt à prévoir, en première phase, un habitat très extensif, qui ne comptera qu’à hauteur de 100 mètres carrés ; une fois cela réalisé, il suffira de transformer l’espace en zone de densification.
Vraiment, je le dis, c’est là la dérogation la plus lourde et la plus éloignée de l’esprit de la loi Climat et résilience. Elle provoquera la stupeur de tous ceux qui pensent qu’il faut simplifier le dispositif et le rendre applicable dans les petites communes. Potentiellement, on arrive à l’exact opposé !
Les conséquences de la rédaction de cet article sont donc graves : nous sommes au-delà de la ligne rouge ! Les partisans de la limitation de l’étalement urbain ne comprendront pas et cela va fragiliser la cohérence globale des ajustements et assouplissements nécessaires pour aller dans le sens du monde rural. Il y a là un vrai sujet !
Pour le reste, l’inventaire dressé me dérange, car on mélange des cas différents. La demande concernant les pistes de ski, par exemple, est satisfaite :…
M. Jérôme Bascher. Très bien !
M. Christophe Béchu, ministre. … les pistes de ski ne sont pas artificialisées toute l’année et se trouvent sur un espace naturel. Mais, si on les cite précisément, ne faudra-t-il pas ajouter d’autres sports, pratiqués en temps normal dans des conditions similaires ? Ne risquons-nous pas d’aboutir à la création d’une sorte de catégorie à part ?
J’ai donc une difficulté avec le degré de précision retenu, que je considère comme superfétatoire par rapport au caractère objectif.
La seule chose qui me semblerait pouvoir être prise en considération s’agissant des pistes de ski, c’est l’emprise au sol du téléphérique, dès lors qu’on dépasse les 50 mètres carrés. Voilà ce sur quoi on pourrait discuter en termes de critères d’artificialisation… Autant dire que c’est mineur !
Je donne très brièvement mes avis sur les amendements restants.
Sur l’amendement n° 75 rectifié bis, l’avis est défavorable. Je demande le retrait de l’amendement n° 195, au profit de l’amendement n° 126 rectifié, que le Gouvernement soutient. L’avis est défavorable sur l’amendement n° 226 rectifié ter, pour des raisons identiques à celles que je viens d’évoquer. Il l’est également sur les amendements nos 117 rectifié quinquies et 241 rectifié bis. L’amendement n° 155 rectifié est satisfait, puisque les jardins familiaux sont bien comptabilisés comme le demandent ses auteurs.
S’agissant de l’amendement n° 146 rectifié concernant l’emploi de produits phytosanitaires, je comprends l’intention des auteurs, mais il faudrait entrer dans un niveau de détail bien supérieur. Certaines personnes suggèrent que l’on ne classe pas tous les Enaf à 100 % et que l’on utilise des pondérations en fonction du caractère plus ou moins intensif de l’agriculture.
Mme Sophie Primas. Oh là là !
M. Christophe Béchu, ministre. Il en va de même ici : en apportant cette précision sur l’utilisation de produits phytosanitaires dans le système, on introduit des degrés de complexité qui ne me semblent pas souhaitables.
Je poursuis avec l’amendement n° 25 rectifié quinquies, que je considère comme satisfait, au même titre que les amendements identiques nos 26 rectifié et 27 rectifié bis. Il s’agit des dispositions concernant les pistes de ski. Je suis par ailleurs défavorable à l’amendement n° 33 rectifié bis.
J’en arrive ainsi à la question des bâtiments agricoles, à laquelle je vous sais très attachés, mesdames, messieurs les sénateurs.
Toute la philosophie du ZAN, c’est la préservation des espaces agricoles ! Mais la rédaction retenue m’inquiète au titre du mitage…
M. Ronan Dantec. Exact !
M. Christophe Béchu, ministre. Il ne s’agit pas de la première génération ; c’est l’étape d’après. En tant que président d’un département rural, j’ai eu l’expérience de l’arrivée dans d’anciens bâtiments agricoles transformés de néo-urbains qui, ensuite, sont venus se plaindre du chant du coq ou des dispositifs d’effarouchement. Si je fais entrer les bâtiments agricoles dans la dérogation et qu’il y a, ensuite, un changement d’usage, comment vais-je gérer cette situation ?
Si je comprends l’intention des auteurs des trois amendements identiques portant sur le sujet, je vous alerte : même s’il est légitime d’envisager une telle porte d’entrée, il y a un risque que cela se retourne in fine contre le monde agricole, du fait du mitage consécutif à la facilité accordée. Il me semble qu’il faut y réfléchir, peut-être pas aujourd’hui, puisque j’ai compris qu’il était important pour vous d’envoyer ce message, mais au cours de la navette parlementaire.
Je suis défavorable aux sous-amendements afférents à ces amendements, notamment s’agissant des panneaux photovoltaïques, qui ne comptent pas en tant que tels s’ils sont placés sur un bâtiment.
Je suis défavorable à l’amendement n° 31 rectifié bis relatif aux surfaces à protéger dans les zonages des plans locaux d’urbanisme, ainsi qu’aux amendements nos 138 rectifié quater et 177 rectifié. Enfin, l’avis est défavorable sur l’amendement n° 173, sur les amendements identiques nos 209 rectifié et 218 rectifié bis, sur l’amendement n° 222 rectifié, au titre d’une complexification inutile.
Mme le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.
M. Stéphane Sautarel. Je souhaite intervenir sur deux sujets.
D’abord, j’indique soutenir l’amendement n° 66 rectifié ter, sur lequel vous êtes revenu, monsieur le ministre, et qui mérite sans doute des précisions.
Je partage avec vous l’argument selon lequel la finalité même de la politique du ZAN, consiste à la fois à préserver la biodiversité et à faciliter l’usage agricole. Il convient donc d’adapter l’exploitation agricole et de procéder à la modernisation nécessaire des bâtiments. Je pense que c’est là le principal objectif visé par les auteurs de l’amendement. On s’intéresse essentiellement aux nouveaux bâtiments agricoles. Leur diversification future ou éventuelle évolution vers un autre usage peut être discutée ou encadrée, mais je retiens que, sous réserve de précisions sur ce sujet, majeur pour répondre aux enjeux de nos territoires, vous êtes plutôt favorable à la finalité.
Il reste le sujet évoqué par Mme Angèle Préville de la réaffectation des bâtiments agricoles anciens qui, eux, soulèvent d’autres interrogations. Celles-ci ne sont pas réglées aujourd’hui, mais nous parlons là de surfaces déjà artificialisées.
Ensuite, je souhaite rebondir sur votre première observation, monsieur le ministre. En effet se pose en permanence la question de la définition de ce qui est « artificialisable » ou pas.
Prenons une parcelle sur laquelle se trouve un pavillon et qui est, par ailleurs, intégralement herbagée ou recouverte de pelouse. Peut-on considérer que cette parcelle est artificialisée ? Je ne le pense pas, mais le débat mériterait de se tenir. Nous pourrions ainsi nous donner plus de latitude, sans remettre en cause l’objectif du ZAN.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier – une fois n’est pas coutume – des précisions que vous nous apportez au sujet des stations de sports d’hiver.
Vous êtes beaucoup moins en retrait que M. le rapporteur, qui n’a pas la même position que vous. Puisque la vôtre nous satisfait pleinement, j’ai le plaisir de vous informer que vous avez droit à un forfait à vie…
M. Jérôme Bascher. Mais l’été ! (Sourires.)
M. Jean-Michel Arnaud. … dans l’une des vingt-cinq stations des Hautes-Alpes et, par extension, dans tous les massifs français. (Nouveaux sourires.)
Dans notre département, qui totalise 1 200 kilomètres de pistes, vous pourrez faire non seulement du ski de piste, mais aussi du ski de fond.
Les propos extrêmement clairs que vous avez prononcés ce soir sont précieux : vous confirmez que ces domaines n’entrent pas dans les surfaces artificialisées, à l’exception des socles des remontées mécaniques et des téléphériques, à hauteur de 50 mètres carrés. Sans cette mise au point, un grand nombre de stations de sports d’hiver de France perdaient toute possibilité de construction et de densification.
Mon ami Vauclusien Jean-Baptiste Blanc sera, lui, interdit de ski dans les Alpes du Sud… (Sourires.)
M. Jérôme Bascher. Il ira à Gstaad ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le ministre, je vous remercie une nouvelle fois de ces précisions particulièrement attendues par les responsables de stations de sports d’hiver de nos massifs.
Mme le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Je remercie M. le ministre de la grande clarté de son propos.
Nous assistons bel et bien à un changement de logique : au sujet des parcelles privées, l’article 9 remet tout simplement en cause le ZAN.
D’une certaine manière, c’est le terme d’artificialisation qui pose problème. Mardi, au début de notre discussion, j’ai posé cette question restée sans réponse : pourquoi ne pas s’en être tenu à la distinction entre les taches urbaines, d’une part, et les Enaf, de l’autre ?
L’espace naturel a une valeur écosystémique, au service de la biodiversité : ce n’est pas un jardin de fond de parcelle. Nous sommes face à deux logiques différentes. Et, pour traiter de l’imperméabilisation, l’on dispose d’autres outils, comme des coefficients spécifiques. Ces dispositifs sont pertinents, y compris quand on entend rester dans une logique de jardin privé dans les communes.
Je le répète, nous n’avions pas besoin de remplacer la notion d’Enaf. Je n’ai toujours pas compris l’origine de ce choix.
Si nous en étions restés aux Enaf, nous n’aurions pas à débattre, à ce titre, des bâtiments agricoles. Dans sa rédaction actuelle, la loi préserve l’agriculture française, y compris l’agriculture la plus productiviste et la moins écolo : c’est cela, la logique du ZAN. En revanche, en faisant entrer les parcelles privées des lotissements dans la nomenclature à partir de 2030, on va grignoter l’espace agricole, en totale contradiction avec ce que défend généralement la majorité sénatoriale.
M. le ministre s’est montré on ne peut plus clair et, sur ce point, il faut au moins en revenir à la nomenclature initiale, qui est assez proche de la logique des Enaf. Surtout, n’ouvrons pas la boîte de Pandore : procéder ainsi reviendrait à détricoter le ZAN en créant une complexité administrative incommensurable. Ce débat est donc réellement éclairant.
Mme le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Tout d’abord, j’insiste sur les grands changements que notre agriculture a connus dans nos territoires, notamment dans le mien.
La polyculture-élevage fut longtemps la norme : c’est la raison pour laquelle on trouve, dans les fermes, beaucoup de petites granges en pierre qui ne servent plus et ne serviront plus jamais. On peut très bien les transformer en logements : ce changement de destination ne sera en rien préjudiciable, puisque les espaces dont il s’agit sont déjà artificialisés.
Ensuite, pour traiter la question des jardins, il faut se pencher sur la nature du sol : est-il vivant ou non ? La question sous-jacente, c’est le stockage du carbone. Or, que ce soit dans les océans ou dans le sol, ce stockage est impossible sans présence du vivant. Il s’agit donc du sujet crucial.
Comme le souligne Ronan Dantec, le flou persiste entre artificialisation et imperméabilisation. Je le répète, un sol vivant est un sol qui n’est pas compact ; un sol habité par toute une petite faune, qui exerce toutes ses fonctions écologiques.
Mme le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. La question des stations de ski est extrêmement importante : j’insiste sur ce point. Certaines d’entre elles vont tout simplement fermer faute de neige. Elles devront être considérées comme des espaces renaturés afin que l’activité puisse se développer ailleurs.
Cette précision étant apportée, je retire les amendements nos 25 rectifié quinquies et 26 rectifié.
Mme le président. Les amendements nos 25 rectifié quinquies et 26 rectifié sont retirés.
La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Anglars. Monsieur le ministre, je salue votre compréhension des problèmes que connaît notre agriculture, en particulier dans les zones d’élevage.
Vous exprimez une crainte au sujet des bâtiments agricoles non utilisés. Je vous le rappelle, ce sont les élus qui, dans le cadre des PLU, peuvent décider de leur changement de destination.
Ce sont vraiment les élus locaux qui ont la main. Demain comme aujourd’hui, c’est après avoir examiné un ensemble de paramètres qu’ils autoriseront ou non les changements de destination.
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Mes chers collègues, je tiens à vous apporter quelques précisions de forme afin d’éclairer notre discussion.
Monsieur le ministre, je l’ai dit : le mal originel vient du premier décret. Nous savons tous que la nomenclature va faire l’objet d’un nouveau décret. La commission spéciale a dû mener son travail dans cet entre-deux et, au travers de l’article 9, elle entend exprimer sa position.
À l’évidence, cet article est déjà obsolète, car il ne correspond pas au prochain décret. Vous m’en avez indiqué les principes directeurs et je vous en remercie. Toujours est-il que nos travaux s’entrechoquent, d’autant qu’à l’évidence nous n’avons pas tout à fait la même approche.
Je le répète, pourquoi ne ferait-on pas confiance aux élus pour définir des périmètres de densification et de recyclage foncier ? (M. le ministre manifeste son incompréhension.) Annoncer une nomenclature via un prochain décret revient à dire que l’on ne fait pas confiance aux élus locaux.
Entre cette proposition de loi et le décret à venir, les calendriers se télescopent. Le travail gouvernemental donnera lieu à une nouvelle concertation et nous aidera sans doute à progresser sur ce sujet décisif. De quelle catégorie un jardin pavillonnaire relève-t-il ? Quel seuil fixe-t-on à ce titre ? Ce jardin relève-t-il d’une enveloppe urbaine ou d’une zone agglomérée ? Qu’en est-il des pistes cyclables ?
Ce sont là autant de points que nous ne pouvions traiter quand nous avons entrepris ce travail. Ils commencent à émerger, grâce aux informations que vous nous donnez au fil de l’eau depuis quelques jours.
Telle est la difficulté de forme à laquelle nous nous heurtons au sujet de l’article 9. La discussion va se poursuivre et, je n’en doute pas, elle permettra d’enrichir nos positions respectives. Mais, en l’état, je me dois de défendre le texte de la commission spéciale. Il est le fruit de plusieurs semaines de travail, mené après la parution d’un premier décret très problématique et avant la publication d’un second décret dont nous ne connaissions pas les termes.
Nous répétons ce que nous disons depuis le début : il faut faire confiance aux élus pour définir des trajectoires. Voilà pourquoi nous proposons qu’ils puissent délimiter, via les documents d’urbanisme, des périmètres de densification et de recyclage foncier.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 117 rectifié quinquies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. Philippe Tabarot. Je retire l’amendement n° 241 rectifié bis !
Mme le président. L’amendement n° 241 rectifié bis est retiré.
M. Laurent Somon. Je retire l’amendement n° 155 rectifié, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 155 rectifié est retiré.
Mme Angèle Préville. Je retire l’amendement n° 146 rectifié.
Mme le président. L’amendement n° 146 rectifié est retiré.
Monsieur Arnaud, l’amendement n° 27 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Michel Arnaud. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 27 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 33 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 263 rectifié.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 264 rectifié.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 29 rectifié septies, 66 rectifié ter et 175 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 31 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 138 rectifié quater.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 209 rectifié et 218 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je mets aux voix l’article 9, modifié.
(L’article 9 est adopté.)
Après l’article 9
Mme le président. L’amendement n° 134 rectifié bis, présenté par MM. Canévet, Bonneau, de Belenet, Mizzon, Laugier, Longeot et Le Nay, Mmes N. Goulet et Jacquemet, M. Kern, Mme Férat, M. Louault, Mme Devésa, MM. Levi, Prince, Chauvet et Duffourg, Mme Perrot, M. Folliot, Mme Morin-Desailly, M. J.M. Arnaud et Mme Herzog, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 151-7 du code de l’urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Identifier le bâtiment à usage de friche pouvant faire l’objet d’une renaturation, de façon à réorganiser le bâti en zone rurale à superficie constante. »
La parole est à M. Pierre-Antoine Levi.
M. Pierre-Antoine Levi. D’anciens bâtiments agricoles constituent, en milieu rural, des friches qu’il est important de déconstruire, notamment pour éviter des pollutions à l’amiante.
Cette renaturation de l’espace doit permettre de réorganiser le patrimoine bâti agricole ou d’ouvrir des droits d’extension à superficie urbanisée constante. Il s’agit d’assurer l’évolution des activités agricoles tout en incitant à la suppression d’anciens bâtiments d’exploitation.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Je le répète à l’attention de M. le ministre, selon nous, c’est à l’État de produire les données relatives aux friches. Sur ce sujet, les attentes sont très fortes – on le constate amendement après amendement.
Mme Valérie Létard, présidente de la commission spéciale. Bien sûr.
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Par cohérence, la commission spéciale émet un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. En vertu de l’article L. 151-7 du code de l’urbanisme, les orientations d’aménagement et de programmation (OAP) peuvent déjà définir les actions nécessaires pour mettre en valeur les paysages et le patrimoine, ainsi que les secteurs à mettre en valeur, à restructurer ou à réaménager, comme les friches. Cet amendement est donc satisfait et j’en demande le retrait.
M. Pierre-Antoine Levi. Je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 134 rectifié bis est retiré.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est presque minuit. Je vous propose de prolonger notre séance afin d’achever l’examen de ce texte.
Il nous reste cinquante-trois amendements à examiner : nous devrions pouvoir terminer nos travaux vers deux heures du matin si chacun d’entre vous fait un effort de concision. D’ailleurs, Mme la présidente de la commission spéciale a déjà lancé un appel en ce sens.
Il n’y a pas d’observation ?…
Il en est ainsi décidé.
Article 10
I. – Après le 3° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est inséré un 3° ter ainsi rédigé :
« 3° ter En vue de favoriser la mise en œuvre d’une gestion intégrée du trait de côte et la recomposition spatiale du littoral face au risque d’érosion côtière, les surfaces artificialisées rendues impropres à l’usage en raison de l’érosion côtière ayant fait l’objet d’une renaturation au sens de l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme sont décomptées de l’artificialisation ou de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers constatée sur la période de dix ans concernée.
« Dans ces mêmes communes, l’artificialisation des sols ou la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers résultant des projets de relocalisation des aménagements, des équipements, des constructions et des installations sises sur des parcelles exposées au recul du trait de côte n’est pas prise en compte pour évaluer l’atteinte des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols ou de la consommation d’espaces prévus au présent article et intégrés aux documents de planification mentionnés au présent article. Une étude de densification des zones déjà urbanisées détermine les espaces les plus appropriés pour la relocalisation des aménagements, des équipements, des constructions et des installations et la recomposition spatiale induite par le recul du trait de côte ; ».
II. – Le deuxième alinéa de l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette déclinaison tient également compte des spécificités propres aux zones de montagne définies à l’article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne et aux communes littorales au sens de l’article L. 121-1 du code de l’urbanisme. »
II bis (nouveau). – Le troisième alinéa de l’article L. 4433-7 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette trajectoire tient compte des contraintes propres et des efforts déjà réalisés par les communes littorales au sens de l’article L. 121-1 du code de l’urbanisme soumises aux prescriptions particulières d’un schéma de mise en valeur de la mer. »
III. – Le 3° de l’article L. 141-8 du code de l’urbanisme est complété par les mots : « , et en particulier des spécificités propres aux zones de montagne définies à l’article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne et aux communes littorales au sens de l’article L. 121-1 du présent code ».
IV. – Le quatrième alinéa de l’article L. 151-5 du code de l’urbanisme est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces objectifs tiennent compte des spécificités propres aux zones de montagne définies à l’article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne et aux communes littorales au sens de l’article L. 121-1 du présent code. »
V. – Dans un délai de douze mois, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif à l’impact de l’application aux territoires ultramarins de l’objectif de « zéro artificialisation nette » en 2050. Ce rapport présente des éléments chiffrés d’appréciation de cet impact, ainsi que des propositions visant à améliorer la prise en compte des spécificités ultramarines, notamment en termes de droit de l’urbanisme, d’insularité, de diversité des types d’habitat, de recul du trait de côte, de topographie et de développement économique et touristique.
Mme le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin, sur l’article.
Mme Béatrice Gosselin. Mes chers collègues, il est absolument nécessaire de prendre en compte l’articulation entre les objectifs du zéro artificialisation nette et l’enjeu majeur de la recomposition des territoires littoraux : c’est précisément l’objet de l’article 10.
Les communes concernées se sont engagées depuis plusieurs années dans une réflexion transversale sur la recomposition de leur littoral, face au recul du trait de côte et au changement climatique. Or de nombreuses questions restent sans réponse concrète : il était urgent d’entendre les territoires littoraux afin de ne pas faire subir une double peine aux secteurs frappés par le recul du trait de côte.
Les dispositions de cet article qui visent à décompter de l’artificialisation constatée sur la période les terrains « perdus à la mer » du fait du recul du trait de côte, c’est-à-dire rendus inutilisables, et qui décomptent les opérations de recul stratégique visant à relocaliser les activités sont donc primordiales. Les élus de nos communes littorales les attendent avec impatience.
À titre d’exemple, pour la communauté de communes Coutances Mer et Bocage, les surfaces disponibles pour l’habitat, les équipements et les aménagements sont estimées à trente hectares pour les douze années à venir ; et, selon certaines estimations, soixante hectares urbanisés seraient menacés par le recul du trait de côte à l’horizon de cent ans !
Plus précisément, pour la commune de Gouville-sur-Mer, les surfaces urbanisables sont évaluées à moins de quatre hectares pour la période 2021-2031, alors que nous devons relocaliser sept à huit hectares d’infrastructures touristiques dans le cadre du projet partenarial d’aménagement (PPA). Vous imaginez bien que, sans ce décompte, le seul effort de relocalisation grèverait toute possibilité de développement.
Face à l’érosion côtière, que nous ne contrôlons évidemment pas, les communes littorales doivent préserver leur attractivité et leurs perspectives. C’est notre responsabilité. Ces territoires doivent notamment conserver, autant que possible, leurs activités économiques.
Mme le président. Je suis saisie de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 162 est présenté par le Gouvernement.
L’amendement n° 202 rectifié bis est présenté par MM. Guerriau, Capus, Malhuret, Chasseing et Wattebled, Mme Paoli-Gagin, MM. Menonville, A. Marc, Grand et Chatillon, Mme Mélot et M. Lagourgue.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéas 1 à 3
Rédiger ainsi ces alinéas :
« I. - Après le 5° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 5° … Pour la fixation des objectifs chiffrés de lutte contre l’artificialisation des sols, il est tenu compte des enjeux d’adaptation et de recomposition spatiale du territoire des communes figurant sur la liste mentionnée à l’article L. 121-22-1 du code de l’urbanisme.
« Pour l’évaluation des objectifs chiffrés de lutte contre l’artificialisation des sols fixés dans les documents de planification et d’urbanisme, les surfaces artificialisées des biens situés dans une zone exposée au recul du trait de côte délimitée en application du 1° de l’article L. 121-22-2 du code de l’urbanisme peuvent être considérées comme désartificialisées au sens de l’article L. 101-2-1 du même code dès lors que ces biens ont été acquis par l’État, une collectivité locale ou son groupement, un établissement public y ayant vocation ou un concessionnaire d’une opération d’aménagement dans le seul but de procéder à court terme à leur renaturation dans le cadre d’un projet de recomposition spatiale du territoire littoral exposé et faisant l’objet d’un projet partenarial d’aménagement au titre de l’article L. 312-8 code de l’urbanisme. »
II. - Alinéas 4 à 7
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 162.
M. Christophe Béchu, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vais m’efforcer d’être bref et, bien entendu, je vous épargnerai la liste des 975 communes concernées, à un titre ou un autre, par l’érosion du trait de côte.
Les dispositions de cet amendement sont simples : elles reviennent à dire que l’on a tout de suite le droit d’urbaniser et d’artificialiser des surfaces équivalant à celles qui seront grignotées par la mer pendant les trente prochaines années. Ce faisant, on anticipera les relocalisations.
Cet écart significatif par rapport à la trajectoire générale permettra aux territoires de s’organiser tout de suite, en conciliant le ZAN et le recul du trait de côte à un horizon particulièrement lointain.
En la matière, nous devons bien sûr faire preuve d’humilité. Si l’érosion est plus prononcée que prévu, si telle ou telle situation locale évolue, le même principe pourra être décliné ou adapté. Mais ces prévisions à trente ans ménagent déjà de grandes marges de manœuvre.
Telle est la philosophie que nous suivons. D’autres amendements déposés sur cet article nous semblent, à ce titre, redondants. Le Gouvernement tient compte très précisément des préoccupations exprimées par le Sénat.
Mme le président. L’amendement n° 202 rectifié bis n’est pas soutenu.
L’amendement n° 152 rectifié, présenté par MM. Somon et Burgoa, Mme Dumas, M. Mouiller, Mme Ventalon, MM. Courtial et Brisson, Mmes Belrhiti, Canayer et Bonfanti-Dossat, MM. Klinger, Paccaud, de Legge et Bascher, Mme Gruny, M. Genet, Mmes Imbert et Goy-Chavent, M. Sido, Mme Gosselin, MM. Wattebled, Bouchet, Cadec, Panunzi, Vanlerenberghe et Savary et Mme Noël, est ainsi libellé :
Alinéa 2
1° Après les mots :
d’érosion côtière
insérer les mots :
, et notamment les zones rétro-littorales,
2° Supprimer les mots :
ayant fait l’objet d’une renaturation au sens de l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme
La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Cet amendement a été excellemment défendu par Mme Gosselin !
Mme le président. L’amendement n° 81 rectifié, présenté par Mmes de La Provôté et N. Goulet, M. Louault, Mme Vérien, M. Le Nay, Mme Sollogoub, M. Delcros, Mme Billon, MM. Kern, Longeot, Maurey, Chauvet, Folliot, Levi, S. Demilly et Henno, Mmes Morin-Desailly et Gacquerre, MM. Canévet, J.M. Arnaud, Vanlerenberghe et Détraigne, Mme Guidez, M. Prince et Mme Saint-Pé, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ces actions ou opérations de renaturation au sens de l’article L. 101-2-1 du même code peuvent, le cas échéant, être financées par le fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires prévu par la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Il a été parfaitement défendu !
Mme le président. L’amendement n° 153 rectifié, présenté par MM. Somon et Burgoa, Mme Dumas, M. Mouiller, Mme Ventalon, MM. Courtial et Brisson, Mmes Belrhiti, Canayer et Bonfanti-Dossat, MM. Klinger, Paccaud, de Legge, Bascher et Genet, Mmes Gruny, Imbert et Goy-Chavent, M. Sido, Mme Gosselin, MM. Wattebled, Bouchet, Cadec, Panunzi et Savary et Mme Noël, est ainsi libellé :
Alinéa 3, première phrase
Après le mot :
constructions
insérer les mots :
, des ouvrages anti-submersion maritime
La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Dans ce cadre, n’oublions pas les ouvrages destinés à protéger les habitations face à la submersion marine. Je pense en particulier aux digues, qui ne sauraient être assimilées à des espaces artificialisés.
Mme le président. L’amendement n° 256, présenté par M. J.B. Blanc, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
Alinéa 3, seconde phrase
Remplacer les mots :
Une étude de densification des zones déjà urbanisées
par les mots :
L’étude de densification des zones déjà urbanisées prévue à l’article L. 151-5 du code de l’urbanisme
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 82 rectifié, présenté par MM. C. Vial, Bacci et Bascher, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, M. E. Blanc, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa, Charon et Chatillon, Mme L. Darcos, M. Darnaud, Mmes Dumas et Dumont, M. Genet, Mmes Gosselin et Goy-Chavent, MM. Gremillet et Gueret, Mme Jacques, MM. D. Laurent, Lefèvre et Longuet, Mmes Garriaud-Maylam et Noël, MM. Paccaud, Pellevat et Pointereau, Mme Puissat, MM. Rapin et Savin, Mme Schalck, MM. Somon et Tabarot et Mme Ventalon, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« En vue de favoriser le maintien de la population dans les communes touristiques au titre des articles L. 133-11 et L. 133-12 du code du tourisme, une majoration de 50 % est accordée pour toutes les surfaces artificialisées qui sont strictement réservées aux logements permanents ou aux logements des travailleurs saisonniers. »
La parole est à M. Cédric Vial.
M. Cédric Vial. Cet article traite des communes littorales et de montagne, dont il faut prendre en compte les spécificités ; et, avec notre amendement, nous appelons l’attention sur les différences entre logement permanent et logement saisonnier.
Dans ces territoires qui connaissent déjà une forte tension immobilière, ce texte de loi risque d’accroître encore les difficultés que les habitants permanents connaissent pour se loger. En parallèle, il faut veiller à l’accueil des saisonniers.
Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, nous proposons une pondération de 50 % des surfaces utilisées dans ces zones. Je sais que telle n’est pas, selon vous, la meilleure solution, mais nous souhaitons attirer votre attention sur cet enjeu bien particulier.
Il est déjà très difficile de se loger dans ces territoires : sans réponse spécifique, ces problèmes y seront encore plus grands demain. La solution que je propose n’est peut-être pas la bonne – vous me le direz –, mais, en tout cas, il faut en trouver une. J’y insiste, cette proposition de loi risque de rendre la situation de ces territoires tout simplement infernale.
Mme le président. L’amendement n° 257, présenté par M. J.B. Blanc, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le mot :
territoriales
insérer les mots :
, dans sa rédaction résultant des articles 6 et 7 de la présente loi,
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission spéciale sur les autres amendements en discussion.
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
J’en viens à l’avis de la commission spéciale.
Notre collègue Béatrice Gosselin a parfaitement résumé la situation : les communes littorales affectées par l’érosion ont le sentiment de subir une double peine.
Si la commission spéciale est défavorable à l’amendement n° 162, c’est parce que ses dispositions semblent se limiter à prendre en compte les objectifs fixés : elles ne sont pas créatrices de droits spécifiques en faveur des communes littorales. En outre, alors que la commission spéciale a ouvert le bénéfice de ce dispositif à toutes les communes littorales, le Gouvernement a opté pour une liste limitative.
De même, la commission spéciale est défavorable aux amendements nos 152 rectifié et 81 rectifié.
Nous sommes défavorables à l’amendement n° 153 rectifié, même si nous comprenons parfaitement l’intention de son auteur.
Enfin, nous sommes défavorables à l’amendement n° 82 rectifié, même si nous comprenons aussi totalement son auteur.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 152 rectifié.
J’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 81 rectifié, que je considère comme satisfait.
J’émets également un avis défavorable sur l’amendement n° 153 rectifié, car les surfaces des digues donneraient lieu à des calculs trop complexes.
Je suis défavorable à l’amendement n° 256 de M. le rapporteur, car son adoption conduirait à un double décompte des surfaces.
Je suis défavorable à l’amendement n° 82 rectifié, qui tend à appliquer une pondération. Cela étant, j’ai entendu M. Vial et, en ce sens, le dépôt de cet amendement d’appel a joué son rôle. Nous en tiendrons compte dans le cadre de différentes réflexions que nous menons, qu’il s’agisse d’Airbnb, de la question des zones tendues ou de la décentralisation des compétences en matière de logement, en particulier d’un certain nombre d’autorisations.
Enfin, je suis défavorable à l’amendement n° 257, qui tend, lui aussi, à mettre en œuvre une double prise en compte.
Mme le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Mes chers collègues, je me garderai d’aborder la question du recul du trait de côte, mon territoire étant bien éloigné de la mer : quel que soit le scénario retenu, il est peu concerné par cette conséquence du réchauffement climatique.
En revanche, je tiens à revenir sur l’amendement n° 82 rectifié, déposé par Cédric Vial, pour insister à mon tour sur l’enjeu que représente aujourd’hui le logement des saisonniers.
Notre collègue propose une décote de 50 % en faveur des communes concernées. Jusqu’à la preuve du contraire, les saisonniers sont rarement hébergés dans des maisons individuelles consommatrices d’espace. Ils logent plutôt dans des appartements, dont l’emprise au sol est somme toute réduite.
Cela étant, il est indispensable d’accompagner ces communes, qu’elles soient littorales ou montagnardes, pour répondre à un double défi : d’une part, offrir un hébergement de qualité à ces saisonniers, qui sont indispensables à l’activité touristique ; d’autre part, leur proposer des logements à un prix abordable.
Ce n’est pas ce soir que nous trouverons le moyen d’inverser la tendance, mais gardons en tête que, dans ces communes touristiques, les prix du foncier et du logement sont souvent très élevés. Diverses logiques spéculatives concourent à cette situation, mais ces territoires ne peuvent se passer des saisonniers et il est inconcevable que ces derniers dorment, comme il y a trente ans, dans des caravanes, voire dans des voitures.
Mme le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote sur l’amendement n° 82 rectifié.
M. Cédric Vial. Madame Cukierman, je tiens à vous remercier de vos propos. Cet enjeu concerne effectivement toutes les communes touristiques.
Monsieur le ministre, il s’agit bel et bien d’un amendement d’appel et je vous remercie d’en tenir compte.
Face à ce problème majeur, nous comptons sur vous. Il est indispensable de mener une réforme de l’urbanisme afin de créer des zones spécifiques pour l’habitat permanent. Si l’on ne prévoit pas une majoration ou une pondération pour inciter à construire ce type de logements, les promoteurs et les communes concernés privilégieront toujours d’autres projets, beaucoup plus rentables.
Enfin – je le souligne, même s’il s’agit d’un chantier de nature réglementaire –, ces communes doivent passer de la catégorie C à la catégorie A, pour être classées en zone tendue. J’avais déposé un amendement en ce sens, mais il a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution.
Nous avons besoin d’outils…
M. Cédric Vial. … pour faire face à cet enjeu majeur pour nos territoires.
Ces précisions étant apportées, je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 82 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 257.
(L’amendement est adopté.)
Mme le président. L’amendement n° 83 rectifié, présenté par Mmes de La Provôté et Billon, MM. Longeot et Kern, Mme N. Goulet, M. Louault, Mme Vérien, M. Le Nay, Mme Sollogoub, MM. Delcros, Maurey, Chauvet, Folliot, S. Demilly, Levi et Henno, Mmes Morin-Desailly et Guidez, M. J.M. Arnaud et Mme Gacquerre, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Dans un délai de douze mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement sur l’estimation des coûts et le financement de la renaturation, au sens de l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme, des surfaces artificialisées rendues impropres à l’usage en raison de l’érosion côtière.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement vise à renforcer l’effectivité de la renaturation en prévoyant la remise d’un rapport.
Nous souhaitons ainsi conforter un amendement de M. le rapporteur, que la commission spéciale a déjà adopté et qui était lui numéroté 83.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. La commission spéciale ne souhaite pas donner suite à cette énième demande de rapport. D’ailleurs, nous sommes encore dans l’attente d’un grand nombre de documents dont la loi Climat et résilience a prévu la remise.
Cela étant – je le signale à Mme de La Provôté –, le financement de la renaturation fait partie intégrante du financement du ZAN et nous serons bien sûr appelés à nous pencher sur ce sujet considérable : c’est la prochaine étape de notre travail.
J’émets un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nathalie Goulet. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 83 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 10, modifié.
(L’article 10 est adopté.)
Après l’article 10
Mme le président. L’amendement n° 164 rectifié bis, présenté par MM. Longeot et Le Nay, Mme Dumas, MM. Delcros, Kern et Duffourg, Mmes F. Gerbaud et Muller-Bronn, MM. Chatillon, Moga et Menonville, Mme Jacquemet, MM. Louault et A. Marc, Mmes Saint-Pé et de La Provôté, M. S. Demilly, Mme Vermeillet, MM. Canévet et Henno, Mme Férat, MM. Chasseing, Vanlerenberghe et Belin, Mmes Garriaud-Maylam et Perrot et M. P. Martin, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° L’avant-dernière phrase est ainsi modifiée :
a) les mots : « ainsi que, par tranche de dix années » sont supprimés ;
b) sont ajoutés les mots : « par tranches de dix années, ainsi que par un objectif de recyclage des friches de 5 % par an jusqu’en 2050 » ;
2° À la dernière phrase, les mots : « Cet objectif est décliné » sont remplacés par les mots : « Ces objectifs sont déclinés ».
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Cet amendement vise à assortir la trajectoire de réduction du rythme de l’artificialisation d’un objectif de reconversion des friches, afin d’aboutir au zéro artificialisation nette des sols à l’horizon de 2050.
Les friches, qui sont en cours d’inventaire, représentent un potentiel foncier considérable, de l’ordre de 100 000 à 150 000 hectares. Leur recyclage permettrait non seulement de soulager les efforts de sobriété foncière demandés aux collectivités territoriales, mais aussi de répondre aux besoins de logements, d’infrastructures et de réindustrialisation.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Ces dispositions et la nouvelle obligation qui en découlerait pourraient être contraires à la territorialisation que nous appelons de nos vœux.
Mon cher collègue, même si votre intention est plus que louable, j’émets, en conséquence, un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Par cohérence, j’émets moi aussi un avis défavorable : je ne voudrais pas donner le sentiment d’apporter des réponses différences à la même question selon la personne qui la pose.
Il y a quarante-huit heures, j’ai répondu à Cédric Vial qu’un objectif annuel de réduction de 5 % des friches posait difficulté, même s’il relevait des régions. En effet, rien ne garantit que l’on puisse l’atteindre : nous n’avons aucune certitude à ce titre.
Cet amendement n’est pas rédigé dans les mêmes termes, mais ses dispositions aboutissent au même résultat. Elles créent de la complexité ; elles fixent un objectif annuel qui n’est pas forcément réaliste ou souhaitable compte tenu de la nature des friches existantes. De surcroît, que faire si de nouvelles friches apparaissent dans l’intervalle ?
Concentrons-nous sur le ZAN. Les friches sont un sujet à part entière. À l’instant où nous parlons, les recensements, qui ne sont sans doute pas exhaustifs, font état de 171 000 hectares. J’ajoute que ces friches présentent des problématiques distinctes selon qu’elles sont en zone tendue ou non.
Je salue les intentions des auteurs de cet amendement. Il faudra travailler en ce sens au titre du fonds vert, du fonds Friches et, demain et après-demain, via différents dispositifs budgétaires et financiers. Mais j’insiste sur de la complexité de ces dispositions : commençons par assurer le bouclage financier du ZAN, dont nous avons déjà dit un mot.
Mme le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Selon moi, les dispositions proposées par M. Longeot ont un véritable intérêt.
Il faut forcer l’État à dimensionner les moyens budgétaires consacrés à la réhabilitation des friches. Sans objectif quantitatif, on peut avoir un discours sur les friches, on peut insister sur leur grand potentiel, mais on ne calibrera pas l’effort que l’État doit consentir.
En outre, il est évident que, dans les premières années d’application du dispositif, l’objectif de 5 % sera facilement atteint. Les difficultés se présenteront plutôt après une décennie ; mais, alors, la réhabilitation des friches sera entrée dans les mœurs.
Même si j’entends les arguments techniques de M. le ministre, je voterai cet amendement.
M. Jean-François Longeot. Je retire mon amendement, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 164 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 197, présenté par Mmes Cukierman, Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Durant trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, les surfaces résultant du rattrapage du taux de logements sociaux tels que prévus au I de l’article L. 302-8 du code de la construction et de l’habitation ne sont pas comptabilisés dans les objectifs mentionnés à l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, lorsqu’un contrat de mixité sociale, tel que prévu à l’article L. 302-8-1 du code de la construction et de l’habitation, est signé entre l’État et la collectivité.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Nous avons travaillé sur cet amendement avec un certain nombre de maires concernés par le sujet.
Certaines communes sont considérées comme étant en situation de carence au regard de la loi SRU et leurs maires ont entrepris des actions de rattrapage à ce titre.
Ces communes peuvent être classées en trois catégories. Tout d’abord, celles dans lesquelles les équipes municipales successives ont engagé un rattrapage pour remédier à la carence ; celles, ensuite, qui sont issues de la création d’une commune nouvelle et n’étaient pas concernées auparavant en raison de la taille de leur population, mais qui se voient désormais soumises aux contraintes de la loi SRU ; enfin, les communes, dont le nombre est plus faible sans être négligeable, qui étaient membres d’une communauté de communes jusqu’en 2017 et qui, parfois contre leur volonté, ont été intégrées dans une communauté d’agglomération et, de ce fait, soumises auxdites obligations.
Pour nombre d’entre elles, des problèmes de foncier disponible subsistent, en raison de risques d’inondation, de risques industriels ou de la présence de zones agricoles, et très peu d’hectares demeurent constructibles.
Néanmoins, ces communes se sont engagées dans un processus de rattrapage en nouant des contrats de mixité sociale, notamment dans le cadre de la loi 3DS et des dispositions adoptées au Sénat.
Cet amendement vise à les exonérer, pour les trois années à venir et pour ce qui concerne le rattrapage en matière de construction de logements sociaux, des objectifs de ZAN.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Au cours des discussions tenues en commission et tout au long de ces semaines, cette question a été abordée.
Finalement, la commission a décidé de ne pas accorder de dérogations supplémentaires, en se limitant à celle qui a déjà été évoquée, concernant les bâtiments agricoles. Bien que le sujet soit légitime et que d’autres dérogations soient envisageables, il a été décidé, à ce stade, de ne pas les retenir.
L’introduction de critères fondés sur la finalité ou des discussions sans fin sur le bien-fondé des projets d’artificialisation présenteraient un risque de mise en concurrence des politiques publiques et des arbitrages.
C’est pourquoi, malheureusement, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. Néanmoins, je tiens à saluer votre implication sur le sujet et la force de vos propositions, dont je ne doute pas qu’elles finiront par prospérer.
Pour l’heure, l’avis demeure défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Je tiens à préciser que cet amendement ne constitue pas une exonération.
Mme Cécile Cukierman. Et nous allons continuer à en débattre !
À mon sens, il vise à offrir la possibilité aux communes de se conformer à la loi qui préexistait à la question du ZAN. Il ne s’agit pas d’une exonération, quel que soit l’avis que l’on puisse avoir sur ce type de mesure, car nous ne sommes pas dans le même registre. Ici, il s’agit d’accompagner les communes dans leur mise en conformité avec la loi, laquelle, quoi que nous en pensions, s’impose à tous.
En outre, cet amendement vise à permettre aux communes qui n’auront plus de foncier disponible une fois cette mise en conformité opérée de conserver comme les autres leur droit à construire et à aménager.
L’objectif est donc de parvenir à un équilibre, et non pas à une exemption, entre la mise en conformité avec la loi, pour les communes engagées dans cette démarche, et la possibilité de poursuivre les aménagements qui relèvent de la liberté locale.
Mme le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.
M. Cédric Vial. Les semaines se suivent et ne se ressemblent pas : je suis de nouveau en accord avec Mme Cécile Cukierman sur ce sujet, qui représente une véritable problématique.
En effet, pour les communes franchissant le seuil de 3 500 habitants, ou pour celles qui, à la suite d’une fusion, se retrouvent confrontées aux contraintes de la loi SRU, la situation est particulièrement difficile.
Deux approches sont envisageables pour aborder cette question.
La première, proposée par Mme Cukierman, consiste à exempter totalement ou partiellement ces communes des contraintes du ZAN, leur laissant ainsi la possibilité de satisfaire aux obligations imposées par la loi SRU.
Une autre option, que j’avais proposée, mais qui a été frappée d’irrecevabilité au titre de l’article 45 de la Constitution, consisterait à faire l’inverse : respecter l’obligation du ZAN en exemptant ces communes des contraintes de la loi SRU. La commission spéciale a toutefois jugé que cette approche n’était pas compatible avec le texte.
Il est essentiel de trouver une solution pour ces communes. Si nous ne pouvons pas les aider en les exonérant du respect du ZAN, il convient alors de les exempter de certaines conditions imposées par la loi SRU.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
Mme le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à zéro heure vingt, est reprise à zéro heure trente.)
Mme le président. La séance est reprise.
Chapitre IV
Prévoir les outils pour faciliter la transition vers le « ZAN »
Avant l’article 11
Mme le président. L’amendement n° 112 rectifié, présenté par MM. Genet, Rojouan et Mandelli, Mmes Lassarade et Dumas, M. Longuet, Mme Schalck, MM. E. Blanc, Darnaud, Brisson, Pellevat et Chatillon, Mme Belrhiti, M. Burgoa, Mme Goy-Chavent, MM. Paccaud et Somon, Mme Bonfanti-Dossat, MM. H. Leroy, Bascher, Sautarel et Charon, Mme Dumont, M. Sido, Mmes Borchio Fontimp et Chauvin, M. Gremillet et Mme M. Mercier, est ainsi libellé :
Avant l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le b du 1° du I de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets est ainsi rédigé :
b) Le même deuxième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : « En matière de lutte contre l’artificialisation des sols, ces objectifs sont traduits par une trajectoire permettant d’aboutir à l’absence de toute artificialisation nette des sols, par un objectif de réduction du rythme de l’artificialisation par tranches de dix années, ainsi que par un objectif de recyclage des friches de 5 % par an jusqu’en 2050. Ces objectifs sont déclinés entre les différentes parties du territoire régional. » ;
La parole est à M. Fabien Genet.
M. Fabien Genet. Cet amendement vise à inscrire dans le texte, parallèlement à la trajectoire de réduction du rythme d’artificialisation, un objectif de reconversion des friches, pour parvenir à une absence d’artificialisation nette des sols à l’horizon de 2050.
Nous venons d’avoir un débat similaire à la suite de l’amendement de M. Longeot ; la principale différence que présente le mien tient à sa position, avant l’article 11, tandis que le précédent se situait après l’article 10. Cette nuance illustre bien la profondeur de nos échanges sur ce sujet ! (Sourires.)
Je tiens néanmoins à appeler l’attention de M. le ministre sur le fait qu’il a mentionné un certain nombre de dispositifs d’aide déjà en place pour les friches. Il me semble important de s’intéresser particulièrement aux territoires situés en zone détendue, dans lesquels l’équilibre financier des opérations est beaucoup plus difficile à atteindre.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Avec les mêmes arguments que précédemment, l’avis est défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Monsieur Genet, l’amendement n° 112 rectifié est-il maintenu ?
M. Fabien Genet. Non, je le retire.
Mme le président. L’amendement n° 112 rectifié est retiré.
L’amendement n° 147 rectifié, présenté par Mme Préville, MM. Pla, Bourgi et Tissot et Mme Poumirol, est ainsi libellé :
Avant l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Le dixième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle est effective lorsque le sol a retrouvé ses fonctions nourricières et épuratives. » ;
2° Au onzième alinéa, après le mot : « renaturation » est inséré le mot « effective ».
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à préciser une notion du code de l’urbanisme : la renaturation, à laquelle il manque une dimension temporelle.
Ce processus ne peut être considéré comme effectif que lorsque les sols ont retrouvé l’ensemble de leurs fonctions nourricières et propices, notamment, à la recolonisation par des espèces vivantes.
Un sol vivant ne se résume pas à de la terre : il ne doit être ni compact, ni inerte, ni stérile ; il doit être vivant, c’est-à-dire aménager l’espace pour permettre notamment aux vers de terre de favoriser la création d’humus, à base d’argile et d’eau.
Il est nécessaire de repenser globalement les écosystèmes en termes de fonctionnalités et de naturalité, sous peine de manquer complètement nos objectifs communs.
N’oublions pas non plus la préservation des écosystèmes encore naturels, qui présentent une biodiversité importante et un fort captage de carbone. C’est une priorité. En Allemagne, ainsi, 200 000 hectares de forêts sont intégralement protégés, avec un objectif à terme de 500 000 hectares. Nous ne pouvons pas nous contenter, en France, de 20 000 hectares de réserves biologiques intégrales, alors que nous disposons d’un potentiel extraordinaire à préserver absolument.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. On ne peut qu’être favorable à cette démarche ; pour autant, à ce stade, cet amendement me paraît être d’une grande complexité. Outre le contrôle de la qualité de la restauration, la question des moyens et du personnel nécessaires se pose également.
Néanmoins, des textes européens – règlements et directives – sont en cours d’élaboration sur ce sujet, et je vous propose que nous travaillions ensemble à une résolution européenne en ce sens au sein de la commission des affaires européennes.
Avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 147 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 11
Le 2° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Afin de permettre aux collectivités territoriales de disposer d’un référentiel commun pour l’établissement des trajectoires et des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols et de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers prévus au présent article et intégrés aux documents de planification, l’État met gratuitement à leur disposition, au format numérique, commune par commune et selon des modalités fixées par décret, les données complètes et continues de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers, d’artificialisation et de renaturation des sols constatées sur une période de dix ans précédant la promulgation de la présente loi, ainsi que les données et les cartographies relatives aux friches établies par l’État. À compter de la promulgation de la loi n° … du … visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires, l’État actualise périodiquement ces données et les met à disposition des collectivités dans les mêmes conditions, selon une périodicité et des conditions fixées par décret.
« Les collectivités territoriales ou les groupements de collectivités territoriales compétents pour élaborer les documents de planification mentionnés au présent article peuvent également utiliser les données de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers recueillies à leur initiative au niveau communal, intercommunal ou régional, pour évaluer le respect des trajectoires et des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols et de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers qui s’imposent à eux.
« Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi n° … du … visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires, le Gouvernement remet au Parlement un rapport recensant, sous la forme d’une classification, le stock de terrains disponibles pour des actions ou opérations de renaturation sur l’ensemble du territoire national, en précisant leur appartenance, leur localisation par département, leur nature et leur qualité, ainsi que l’estimation du coût des opérations de renaturation. »
Mme le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin, sur l’article.
Mme Béatrice Gosselin. L’observatoire de l’artificialisation du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) n’est pas encore finalisé. Nous savons que ce travail de référencement est technique et prend du temps. Cela a conduit à la proposition d’amendement autorisant le choix d’un observatoire local lorsque les territoires le jugent plus complet, ce que je peux comprendre.
Un observatoire national permet néanmoins d’assurer une unité de traitement commune à l’observation foncière sur l’ensemble du territoire national. Pour une équité entre les territoires, j’aurais souhaité, pour ma part, que l’on accélère les travaux destinés à le rendre opérationnel.
À défaut, ne pourrait-on pas prévoir que le choix des observatoires soit soumis à la conférence régionale de gouvernance ? En effet, tous ne partent pas d’une même définition et ne comptabilisent pas de la même manière les surfaces.
Ainsi, dans le département de la Manche, des différences notables sont relevées entre trois EPCI, variant de 23 % à 80 % selon les données de l’un ou de l’autre des observatoires. Ces interprétations différentes donneront inévitablement lieu à des inégalités de traitement.
Le volet ZAN doit être considéré comme une révolution en termes d’urbanisme. Il est donc particulièrement nécessaire que des moyens techniques et financiers soient mobilisés par l’État pour sa mise en œuvre. Les enjeux sont colossaux pour les collectivités que nous représentons, mais aussi pour les professionnels du bâtiment, les aménageurs et les entreprises, avec lesquelles il faudra travailler pour qu’elles intègrent un changement de modèle qui ne leur permettra plus de capitaliser, les collectivités étant soumises à des enjeux très forts de préservation de la qualité des sols.
Des enjeux s’imposent aussi aux habitants, avec le surenchérissement du coût des acquisitions foncières. Cette partie est encore trop cachée derrière des effets attendus en matière de biodiversité et d’autonomie alimentaire, qui sont les seuls à être bien identifiés aujourd’hui.
Mme le président. L’amendement n° 58 rectifié bis, présenté par M. E. Blanc, Mme Thomas, MM. Tabarot et Pellevat, Mme Di Folco, MM. Bascher, D. Laurent, Brisson et Mandelli, Mmes Goy-Chavent et Dumas, M. Longuet, Mmes Muller-Bronn, Bonfanti-Dossat et Lassarade et MM. Charon, Bouchet, Rapin et Somon, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Remplacer le mot :
loi
par les mots :
lois. Sont également mises à disposition gratuitement des collectivités territoriales les données de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers non cadastrés, de consommation d’espaces au sein des emprises portuaires et d’espaces supportant des infrastructures,
La parole est à M. Philippe Tabarot.
M. Philippe Tabarot. Le sénateur Étienne Blanc entend, par cet amendement, retenir les mêmes origines de consommation d’espace pour la période de référence et pour les projets à venir.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Je demande l’avis du Gouvernement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Il est défavorable, considérant que l’intention est satisfaite, puisque les données de consommation d’espace sont déjà intégrées dans les données issues des fichiers fonciers.
Toutefois subsiste le sujet des données non cadastrées, que nous sommes actuellement incapables de fournir, puisqu’un retraitement est nécessaire pour la mesure de la consommation d’espace à l’échelon communal.
Les données d’occupation du sol à grande échelle permettront d’avoir une couverture complète du territoire, indépendamment du cadastre. Cependant, elles ne pourront être mises à disposition que progressivement, dans le courant de l’année 2024.
Par conséquent, l’avis est défavorable.
Mme le président. Monsieur Tabarot, l’amendement n° 58 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Philippe Tabarot. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 58 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 54 rectifié, présenté par Mme Ract-Madoux et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après le mot :
intercommunal
insérer le mot :
, départemental
La parole est à Mme Daphné Ract-Madoux.
Mme Daphné Ract-Madoux. L’article 11 permet aux collectivités ayant la compétence en matière d’urbanisme d’utiliser les données collectées localement en attendant, comme l’indiquait M. le ministre, la généralisation du référentiel de l’État, notamment celle de la cartographie de l’occupation du sol à grande échelle (OCS GE).
Toutefois, de nombreuses cartographies existent et des comptabilités sont réalisées ; nous le constatons en Île-de-France, avec l’inventaire du mode d’occupation des sols (MOS) et sa déclinaison très précise, le MOS+.
Cependant, certaines données pourraient être collectées à l’échelle départementale, par exemple par un office foncier, et il serait dommage de se priver de cet apport.
Cet amendement vise ainsi à ajouter l’échelle départementale, afin de permettre l’utilisation de ces données lorsque celles-ci existent.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Favorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’article 11, modifié.
(L’article 11 est adopté.)
Après l’article 11
Mme le président. L’amendement n° 87 rectifié, présenté par Mmes de La Provôté, Billon et N. Goulet, M. Louault, Mme Vérien, M. Le Nay, Mme Sollogoub, MM. Delcros, Kern, Longeot, Maurey, Chauvet, Folliot, Levi, S. Demilly et Henno, Mmes Morin-Desailly et Guidez et MM. P. Martin, Détraigne, Vanlerenberghe et Canévet, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 3° de l’article L. 141-8 du code de l’urbanisme, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« … ° De l’existence de friches au sens de l’article L. 111-26, le cas échéant localisées au sein des annexes visées au 3° de l’article L. 141-2 ; ».
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement présenté par Mme de La Provôté vise à mettre en place des outils pour faciliter la transition vers le ZAN.
Cet article entend permettre aux collectivités territoriales de disposer de données fiables, nous en avons beaucoup parlé ; si j’ai le sentiment que le problème ne sera pas résolu ce soir, il me semble néanmoins que cet amendement mérite d’être défendu.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° 233 n’est pas soutenu.
Article 12
Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 210-1, après le mot : « naturels, », sont insérés les mots : « à favoriser la renaturation et le recyclage foncier, » ;
2° Après le chapitre VI du titre Ier du livre II, il est inséré un chapitre VI bis ainsi rédigé :
« CHAPITRE VI BIS
« Droit de préemption sur les espaces propices à la renaturation ou au recyclage foncier
« Art. L. 216-2. – Pour mettre en œuvre les objectifs mentionnés au 6° de l’article L. 101-2, est instauré un droit de préemption dans les espaces propices à la renaturation ou au recyclage foncier, applicable dans les conditions fixées au présent article.
« La commune ou l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de document d’urbanisme peut délimiter, au sein du règlement du plan local d’urbanisme, des zones à fort enjeu pour la politique de lutte contre l’artificialisation des sols. Le projet de plan local d’urbanisme justifie de la manière dont ces zones :
« 1° Contribuent à la préservation de la nature en ville, notamment lorsqu’il s’agit de surfaces végétalisées ou naturelles situées au sein des espaces urbanisés ;
« 2° Présentent un potentiel fort en matière de renaturation, notamment dans le cadre de la préservation ou de la restauration des continuités écologiques ;
« 3° Présentent un potentiel fort en matière de recyclage foncier ;
« 4° Constituent des friches au sens de l’article L. 111-26.
« Au sein de ces zones, la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale précité peut préempter les biens et les droits mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 213-1 et aux articles L. 213-1-1 et L. 213-1-2.
« Le droit de préemption institué par le présent article peut être délégué dans les conditions fixées par l’article L. 213-3.
« Le chapitre III du présent titre est applicable au droit de préemption institué par le présent article. » ;
3° Après le premier alinéa de l’article L. 421-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Avant l’entrée en vigueur du plan local d’urbanisme ou de la carte communale modifiée ou révisée pour prendre en compte les objectifs de réduction de l’artificialisation des sols en application du 5° du IV de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, le permis de construire ou d’aménager peut être refusé s’il est justifié que les travaux, les constructions ou les installations faisant l’objet de la demande d’autorisation ont un impact significatif en matière de consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers ou d’artificialisation des sols, et que cet impact est de nature à compromettre la capacité de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale compétent à répondre, dans le respect des objectifs chiffrés qui lui sont fixés par la loi et par les documents de planification en matière de réduction du rythme de l’artificialisation des sols ou de la consommation d’espaces agricoles, naturels ou forestiers, aux besoins d’aménagement et de construction anticipés sur son périmètre. » ;
4° L’article L. 424-1 est ainsi modifié :
a) Après le 3°, il est inséré un 4° ainsi rédigé :
« 4° Lorsque des travaux, constructions ou installations sont susceptibles de compromettre l’atteinte des objectifs de réduction de la consommation d’espaces agricoles, naturels ou forestiers devant être intégrés à la carte communale ou au plan local d’urbanisme en application du 5° du IV de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Le présent 4° s’applique jusqu’à l’adoption du plan local d’urbanisme ou de la carte communale modifiée, et au plus tard jusqu’au 22 août 2028. » ;
b) La première phrase du septième alinéa est ainsi modifiée :
– après le mot : « statuer », sont insérés les mots : « prévu aux 2° et 3° du présent article » ;
– les mots : « 2° et 3° du présent article » sont remplacés par les mots : « mêmes 2° et 3° » ;
c) Après le même septième alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Il peut être sursis à statuer en application du 4° dès lors que les conditions cumulatives suivantes sont réunies :
« a) Lorsque la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale est membre d’un établissement public mentionné à l’article L. 143-1, le schéma de cohérence territoriale modifié afin d’y intégrer les objectifs de réduction de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers a été adopté. Dans le cas contraire, une délibération de l’organe délibérant de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de document d’urbanisme fait état pour son périmètre, par délibération, d’un plafond indicatif de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers jusqu’au 21 août 2031, en l’attente de l’intégration au sein du document d’urbanisme des objectifs mentionnés au 5° du IV de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 précitée ;
« b) Il est justifié par l’autorité compétente que l’impact en termes de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers des travaux, des constructions ou des installations faisant l’objet du sursis à statuer est significatif au regard des objectifs de réduction fixés par le schéma de cohérence territoriale ou du plafond indicatif mentionné au a du présent article, et que cet impact est de nature à compromettre la capacité de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale à répondre, dans les limites de ce même plafond, aux besoins d’aménagement et de construction anticipés sur son périmètre jusqu’au 21 août 2031 ;
« c) La décision de sursis à statuer fait état, le cas échéant, des modifications du projet qui pourraient être envisagées en vue de limiter son impact en termes de consommation d’espaces agricoles, naturels et forestiers ou de résoudre son incompatibilité avec l’atteinte des objectifs de réduction précités. » ;
d) Après le huitième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au septième alinéa du présent article, le sursis à statuer décidé en application du 4° ne peut excéder une durée de quatre ans. Lorsque l’adoption du plan local d’urbanisme ou de la carte communale modifiée intervient avant l’échéance de cette durée de quatre ans, l’autorité compétente se prononce sur la demande d’autorisation dans un délai de deux mois à compter de l’adoption dudit document. »
Mme le président. L’amendement n° 57 rectifié, présenté par Mme Ract-Madoux et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Alinéa 7
1° Première phrase
a) Remplacer les mots :
délimiter, au sein du règlement du plan local d’urbanisme, des
par les mots :
, par délibération, identifier les
b) Compléter cette phrase par les mots :
, dans lesquelles sera applicable le droit de préemption mentionné au premier alinéa
2° Seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
La délibération justifie de la manière dont ces zones :
La parole est à Mme Daphné Ract-Madoux.
Mme Daphné Ract-Madoux. L’article 12 instaure un droit de préemption au nom du ZAN, ce qui est une bonne chose.
Cependant, l’institution sur nos territoires de droits de préemption urbains ou liés aux espaces naturels sensibles, passe par l’adoption, en conseil municipal, communautaire ou départemental, d’une délibération motivée assortie d’une cartographie des zonages.
En l’état actuel de la rédaction de l’article, il est nécessaire de passer par une modification du document d’urbanisme, ce qui est inefficace et peu adaptable.
Cet amendement vise donc, par parallélisme des formes avec les autres droits de préemption, à permettre d’instaurer ce droit par délibération.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Très favorable !
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° 56 rectifié, présenté par Mme Ract-Madoux, MM. Longeot, Prince, Chatillon et Kern, Mme Saint-Pé, M. Détraigne, Mme Gacquerre, M. Chauvet, Mme Jacquemet, M. Le Nay, Mme Morin-Desailly, M. Vanlerenberghe, Mme Garriaud-Maylam, MM. Levi, Henno et Buis, Mme Perrot et M. Delcros, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Après les mots :
au sein
insérer les mots :
ou en périphérie
La parole est à Mme Daphné Ract-Madoux.
Mme Daphné Ract-Madoux. Le droit de préemption spécifique au ZAN vise à permettre aux collectivités de maîtriser, en complément du sursis à statuer, les évolutions de consommation du ZAN sur le territoire et de choisir des secteurs pour favoriser la renaturation.
Or de nombreuses communes sont confrontées à un manque de maîtrise des acquisitions, notamment en secteur naturel, boisé et agricole, avec des détournements d’usage de ces espaces verts non artificialisés, souvent situés en lisière des espaces urbanisés.
Il convient de conférer des moyens préalables aux collectivités pour lutter contre la dégradation d’espaces libres pouvant aller jusqu’à leur artificialisation et réduisant ainsi à néant tous les efforts réalisés par ailleurs pour renaturer ou désartificialiser. Les outils actuels, dans bien des cas, ne sont pas réellement opérants.
L’amendement n° 56 rectifié vise donc à ajouter d’insérer les mots « ou en périphérie » des espaces urbanisés.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Je considère que cet amendement est satisfait par la rédaction de l’article. J’en demande donc le retrait ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Madame Ract-Madoux, l’amendement n° 56 rectifié est-il maintenu ?
Mme Daphné Ract-Madoux. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 56 rectifié est retiré.
L’amendement n° 55 rectifié, présenté par Mme Ract-Madoux, MM. Longeot, Prince, Chatillon et Kern, Mme Saint-Pé, M. Détraigne, Mme Gacquerre, M. Chauvet, Mme Jacquemet, M. Le Nay, Mme Morin-Desailly, M. Vanlerenberghe, Mme Garriaud-Maylam, MM. Levi, Henno et Buis, Mme Perrot et M. Delcros, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Après le mot :
renaturation
insérer les mots :
au regard des atteintes existantes ou du risque d’atteintes futures
La parole est à Mme Daphné Ract-Madoux.
Mme Daphné Ract-Madoux. Cet amendement a le même objectif que le précédent, mais cible des atteintes existantes ou des risques d’atteinte future.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Je demande également le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Je ne souhaite pas créer de nouveaux droits de préemption visant à protéger la nature ou les espaces agricoles, car les départements et les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) sont déjà en charge de cela via leurs droits de préemption respectifs. Notre objectif est différent et nous ne devons pas créer de conflits entre les droits de préemption existants.
Par ailleurs, il existe de nombreux autres outils pour protéger les espaces naturels, agricoles et forestiers, tels que le règlement national d’urbanisme et les documents d’urbanisme. L’instauration de nouveaux droits de préemption ne semble pas être la solution adéquate pour répondre à ces enjeux.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Madame Ract-Madoux, l’amendement n° 55 rectifié est-il maintenu ?
Mme Daphné Ract-Madoux. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 55 rectifié est retiré.
L’amendement n° 258, présenté par M. J.B. Blanc, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 3° Présentent un potentiel fort en matière de recyclage foncier, de renouvellement urbain ou d’optimisation de la densité ;
La parole est à M. le rapporteur.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 47 rectifié ter est présenté par M. Burgoa, Mmes Lopez et Belrhiti, MM. Paccaud, Daubresse, Bascher et Darnaud, Mmes Goy-Chavent et Richer, MM. Genet et Reichardt, Mme Dumont, MM. Chatillon et Tabarot, Mme Ventalon, MM. D. Laurent et Savary, Mme Dumas, MM. Longuet, Rietmann et Favreau, Mme Borchio Fontimp, MM. Somon, C. Vial, Pointereau et Sido, Mme Garriaud-Maylam et M. Belin.
L’amendement n° 140 rectifié quater est présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet et MM. Prince, Duffourg, Kern, Chauvet, Delcros, Le Nay, Moga et Henno.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 15 et 16
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Fabien Genet, pour présenter l’amendement n° 47 rectifié ter.
M. Fabien Genet. Cet amendement, présenté par notre collègue Laurent Burgoa, concerne le droit général de refus de permis dans le cadre de l’article 12.
Ce droit général semble insuffisamment encadré juridiquement, notamment en raison de l’absence de définition précise de la notion d’impact significatif en matière de consommation des espaces naturels, agricoles ou forestiers. Il risque ainsi d’aboutir à des divergences d’interprétation entre les collectivités, ainsi qu’à de nombreux contentieux consécutifs à des refus de permis sur ce motif.
De plus, ce droit général n’apparaît pas nécessaire au regard du régime actuel de sursis à statuer, prévu par l’article L. 424-1 du code de l’urbanisme, qui permet déjà aux collectivités de suspendre la délivrance d’un permis dès lors que celui-ci est de nature à compromettre la réalisation des objectifs du plan local d’urbanisme en cours d’élaboration ou de révision.
Mme le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l’amendement n° 140 rectifié quater.
Mme Nathalie Goulet. Il a été parfaitement défendu.
Mme le président. L’amendement n° 220 rectifié bis, présenté par Mme Berthet, MM. Bascher et Belin, Mme Belrhiti, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa et Chatillon, Mmes Dumas, Dumont et Garriaud-Maylam, M. Genet, Mmes F. Gerbaud, Gosselin et Goy-Chavent, M. Gremillet, Mme Lassarade et MM. Sido, Somon et C. Vial, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Après le mot :
aménager
insérer les mots :
, s’il ne fait pas l’objet d’un projet compensé par une action de renaturation au sens de l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme,
La parole est à M. Max Brisson.
M. Max Brisson. Par cet amendement, Martine Berthet nous invite à considérer la notion induite par l’épithète « nette », en sortant de l’article 12 la possibilité de refuser, d’ici à la mise en conformité des documents d’urbanisme, la délivrance d’un permis d’aménager dans le cadre de la mise en place du ZAN, dans le cas où l’opérateur justifierait de l’ensemble des éléments nécessaire à la réalisation d’un projet de compensation environnementale équivalent.
Cet amendement vise donc à créer une dynamique, au niveau des permis d’aménager et de renaturation sur les territoires, pour faire de l’objectif ZAN une opportunité.
Mme le président. L’amendement n° 182 rectifié, n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. L’intention de la commission est bien de mettre un certain nombre d’outils à la disposition des élus – sursis à statuer, droit de préemption et refus de permis.
L’avis sur les amendements identiques nos 47 rectifié ter et 140 rectifié quater est donc défavorable.
En ce qui concerne l’amendement n° 220 rectifié bis, l’avis est favorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Le Gouvernement est favorable aux amendements identiques nos 47 rectifié ter et 140 rectifié quater, car la précision qu’ils tendent à apporter paraît utile.
En revanche, l’adoption de l’amendement n° 220 rectifié bis aurait pour conséquence de rendre le dispositif proposé par la commission spéciale moins efficace. L’avis est donc défavorable.
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 47 rectifié ter et 140 rectifié quater.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je suis saisie de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 49 rectifié bis est présenté par M. Burgoa, Mmes Lopez et Belrhiti, MM. Paccaud, Daubresse, Bascher et Darnaud, Mmes Goy-Chavent et Richer, MM. Genet et Reichardt, Mme Dumont, MM. Chatillon et Tabarot, Mmes Ventalon et Perrot, MM. D. Laurent et Savary, Mme Dumas, MM. Longuet, Rietmann et Favreau, Mme Borchio Fontimp, MM. C. Vial, Pointereau et Sido, Mmes Joseph et Garriaud-Maylam et M. Belin.
L’amendement n° 142 rectifié quinquies est présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Prince, Duffourg, Kern, Chauvet, Delcros, Le Nay, Moga et Henno et Mme Vermeillet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 25
Rédiger ainsi cet alinéa :
« a) La modification ou la révision du plan local d’urbanisme a été engagée pour prendre en compte les objectifs de réduction de l’artificialisation des sols en application du 5° du IV de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. À défaut, une délibération de l’organe délibérant de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de document d’urbanisme fait état pour son périmètre d’un plafond indicatif de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers jusqu’au 21 août 2031, en l’attente de l’intégration au sein du document d’urbanisme des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols précités ;
II. – Alinéa 26
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L’impact est considéré comme significatif, dès lors que la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers des travaux constructions ou installations, faisant l’objet du sursis à statuer, représente, pour le périmètre de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale, plus de 30 % au regard des objectifs ou du plafond indicatif précités.
III. – Alinéas 28 et 29
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Fabien Genet, pour présenter l’amendement n° 49 rectifié bis.
M. Fabien Genet. Le présent amendement tend à conditionner le caractère « significatif » de l’impact des projets de travaux ou de construction sur l’enveloppe des droits à construire de la commune ou de l’EPCI à la consommation de plus de 30 % du plafond indicatif de consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers retenu jusqu’au 21 août 2031 sur le périmètre de la commune ou de l’EPCI.
Il vise également à supprimer la durée dérogatoire de quatre ans pendant laquelle le sursis à statuer pourrait être prononcé. Le délai de droit commun de deux ans est en effet suffisant dès lors que la procédure de révision ou de modification du document d’urbanisme a été engagée.
Mme le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l’amendement n° 142 rectifié quinquies.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement vise à encadrer l’utilisation du nouveau cadre de sursis à statuer spécifique à la mise en œuvre du ZAN pour les élus communaux et intercommunaux et, partant, à éviter des détournements de procédure.
Mme le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 45 rectifié bis est présenté par MM. Cadec, Paccaud, Burgoa et Bascher, Mme Lassarade, MM. de Legge, Panunzi et Daubresse, Mmes Dumont, Ventalon et Goy-Chavent, MM. Chatillon et Bouchet, Mmes Belrhiti et Schalck, MM. D. Laurent, Brisson et Savary, Mme Dumas, MM. Levi et Rapin, Mme Noël et M. Belin.
L’amendement n° 73 rectifié bis est présenté par Mmes Micouleau, Estrosi Sassone et Bonfanti-Dossat.
L’amendement n° 210 rectifié est présenté par MM. Corbisez et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire et Gold, Mme Guillotin et M. Guiol.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 26
Supprimer les mots :
est significatif au regard des objectifs de réduction fixés par le schéma de cohérence territoriale ou du plafond indicatif mentionné au a du présent article, et que cet impact
La parole est à M. Max Brisson, pour présenter l’amendement n° 45 rectifié bis.
M. Max Brisson. Cet amendement vise à sécuriser juridiquement et à simplifier le sursis à statuer « spécial ZAN ». En effet, la notion « d’impact significatif », outre qu’elle paraît fragile d’un point de vue juridique, ne répond pas aux difficultés, très courantes dans les territoires, notamment les territoires urbains, relatives au mitage engendré par une succession d’opérations de petite taille.
Mme le président. L’amendement n° 73 rectifié bis n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 210 rectifié.
Mme Maryse Carrère. Il est défendu.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Les amendements identiques nos 49 rectifié bis et 142 rectifié quinquies visent à restreindre fortement l’utilisation du sursis à statuer spécifique au ZAN, quand les amendements identiques nos 45 rectifié bis et 210 rectifié tendent au contraire à alléger ce dispositif.
L’avis est défavorable sur ces quatre amendements.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Sur les amendements nos 49 rectifié bis et 142 rectifié quinquies, je m’en remets à la sagesse du Sénat, et j’émets un avis défavorable sur les amendements nos 45 rectifié bis et 210 rectifié.
M. Max Brisson. Je retire l’amendement n° 45 rectifié bis, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 45 rectifié bis est retiré.
Qu’en est-il de l’amendement n° 210 rectifié, madame Carrère ?
Mme Maryse Carrère. Je le retire également, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 210 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 49 rectifié bis et 142 rectifié quinquies.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. L’amendement n° 223 rectifié, présenté par MM. Corbisez, Cabanel, Fialaire et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
…) Après le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le sursis à statuer ne peut être opposé pour les projets incluant une part majoritaire de logement locatif social. »
La parole est à M. Bernard Fialaire.
M. Bernard Fialaire. Cet amendement vise à empêcher l’application du sursis à statuer spécifique au ZAN aux projets incluant une part majoritaire de logement locatif social. Cet outil pourrait en effet être utilisé pour retarder la réalisation de tels projets.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Au regard de ce que j’ai évoqué précédemment, l’avis est défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’article 12, modifié.
(L’article 12 est adopté.)
Article 12 bis (nouveau)
Après le 5° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est inséré un 5° bis ainsi rédigé :
« 5° bis La consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers résultant de travaux, constructions, aménagements ou installations réalisés au sein du périmètre d’une zone d’aménagement concerté créée avant le 22 août 2021 et compris dans le programme de ladite zone n’est pas prise en compte pour évaluer l’atteinte des objectifs de réduction du rythme de la consommation d’espaces prévus au présent article pour la première tranche de dix années mentionnée au 1° du présent II. Cette consommation est toutefois comptabilisée comme étant intervenue au cours de la période décennale s’achevant le 22 août 2021.
« Le présent 5° bis est également applicable aux travaux, constructions, aménagements ou installations réalisés au sein du périmètre d’une grande opération d’urbanisme ou d’une opération d’intérêt national créée avant le 22 août 2021 en application des articles L. 312-4 ou L. 102-12 du code de l’urbanisme.
« Le présent 5° bis est également applicable aux travaux, constructions, aménagements ou installations ayant fait l’objet d’une autorisation d’urbanisme délivrée avant le 22 août 2021 ; ».
Mme le président. L’amendement n° 259 rectifié, présenté par M. J.B. Blanc, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
Alinéa 2
1° Remplacer le mot :
créée
par les mots :
dont l’acte de création est intervenu
2° Après le mot :
programme
insérer les mots :
global prévisionnel de l’acte de création
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 50 rectifié bis est présenté par M. Burgoa, Mmes Lopez et Belrhiti, MM. Paccaud, Daubresse, Bascher et Darnaud, Mmes Goy-Chavent et Richer, MM. Genet et Reichardt, Mme Dumont, MM. Chatillon et Tabarot, Mmes Ventalon et Perrot, MM. D. Laurent et Savary, Mme Dumas, MM. Longuet, Rietmann et Favreau, Mmes Borchio Fontimp et Lassarade, MM. Somon, C. Vial et Sido, Mmes Joseph et Garriaud-Maylam, MM. Belin et Rojouan et Mme Estrosi Sassone.
L’amendement n° 143 rectifié sexies est présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Prince, Duffourg, Kern, Chauvet, Delcros, Détraigne, Le Nay et Moga, Mme Morin-Desailly, M. Henno, Mme Vermeillet et les membres du groupe Union Centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
ayant fait l’objet d’une autorisation d’urbanisme délivrée
par les mots :
dont la demande d’autorisation d’urbanisme a été déposée
La parole est à M. Fabien Genet, pour présenter l’amendement n° 50 rectifié bis.
M. Fabien Genet. Le présent amendement vise à sécuriser l’ensemble des projets déjà lancés. Ces derniers pourraient en effet être remis en cause en raison des incertitudes liées à la mise en œuvre du ZAN.
Collectivités territoriales comme porteurs de projets inscrivent leurs opérations dans le temps long. Or, la loi Climat et résilience prévoit d’imputer l’artificialisation – ou la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers, pour la première période – résultant d’un projet à la période décennale où celui-ci sort effectivement de terre.
Une telle disposition est extrêmement problématique pour les collectivités territoriales qui avaient décidé, avant que ne soit présentée la loi Climat et résilience, l’ouverture de zones à l’urbanisation pour y réaliser des projets structurants.
Les exigences nouvelles du ZAN pourraient conduire ces collectivités à renoncer à ces projets de peur d’amputer trop fortement leur enveloppe d’artificialisation autorisée, déjà réduite de moitié, alors même que les collectivités ou opérateurs fonciers ont souvent lourdement investi pour acquérir le foncier d’assiette de ces projets.
Mme le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l’amendement n° 143 rectifié sexies.
Mme Nathalie Goulet. L’amendement a été très bien défendu.
J’ajoute que nous serons confrontés à des difficultés d’application de la loi en raison du conflit que pourront provoquer certaines dispositions de la présente proposition de loi avec la loi en vigueur.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Avis favorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Je rappelle que le ZAN se fonde sur la consommation effective d’espace.
Par ailleurs, la disposition proposée amoindrirait considérablement la portée des dispositions votées par le Parlement afin de favoriser les collectivités qui ont déjà défini d’importantes zones d’extension urbaine.
À l’inverse, les collectivités qui ont déjà fait l’effort de réduire leur consommation seraient pénalisées par cette disposition, alors que depuis environ une heure, nous insistons dans ce débat sur la nécessité de tenir compte des efforts passés.
M. Fabien Genet. C’est le « en même temps » !
M. Christophe Béchu, ministre. Voter une telle disposition nous éloignerait encore un peu plus de la possibilité de disposer d’un texte cohérent à la fin de nos travaux.
L’avis est donc défavorable.
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 50 rectifié bis et 143 rectifié sexies.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme le président. L’amendement n° 128 rectifié sexies, présenté par Mmes Noël et Belrhiti, MM. Pellevat, Mandelli et Panunzi, Mmes F. Gerbaud et Joseph, MM. Chatillon, Piednoir, Bascher et Bouchet, Mme Puissat, MM. Courtial, C. Vial, D. Laurent, Brisson, Klinger, Charon et Husson, Mme Goy-Chavent, MM. Gremillet et Houpert, Mme Garriaud-Maylam, M. Rojouan et Mmes Del Fabro et Drexler, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent 5° bis est également applicable aux travaux, constructions, aménagements ou installations ayant fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique ou d’une déclaration de projet au titre du code de l’environnement antérieure au 22 août 2021. »
La parole est à M. Cédric Vial.
M. Cédric Vial. Le présent amendement vise à sécuriser les projets déjà autorisés par le biais de déclarations d’utilité publique ou de déclarations de projets au titre du code de l’environnement.
La loi Climat et résilience prévoit d’imputer l’artificialisation – ou la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers, pour la première période – résultant d’un projet à la période décennale où celui-ci sort effectivement de terre.
Une telle disposition est extrêmement problématique, par exemple, pour les maîtres d’ouvrage d’infrastructures linéaires qui inscrivent leurs opérations dans le temps long : certains projets déjà autorisés ne sortent de terre que plusieurs années après avoir obtenu une déclaration d’utilité publique (DUP) ou une déclaration de projet, le temps de poursuivre les études détaillées et d’obtenir les autorisations environnementales ou d’urbanisme nécessaires à leur réalisation effective.
L’adoption du présent amendement serait donc de nature à « apaiser » la mise en œuvre du ZAN dans certains territoires, en limitant l’insécurité juridique et pratique qui en résulte pour ce type de projet.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Avis favorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° 90 rectifié, présenté par MM. C. Vial, Bacci et Bascher, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, M. E. Blanc, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa, Charon et Chatillon, Mme L. Darcos, M. Darnaud, Mmes Di Folco, Dumas et Dumont, MM. B. Fournier et Genet, Mme Gosselin, M. Gremillet, Mmes Goy-Chavent, Jacques et Joseph, MM. D. Laurent et Longuet, Mmes Garriaud-Maylam et Noël, MM. Paccaud et Pellevat, Mme Puissat, MM. Rapin, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Somon et Tabarot et Mme Ventalon, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« 5° … Pour l’application du présent article, la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers résultant de projets de construction, d’aménagement ou d’installation réalisés sur le territoire de communes situées en zones de montagne peut être pondérée selon des modalités prévues par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Cédric Vial.
M. Cédric Vial. La proposition de loi prévoit de prendre en compte la spécificité de certains territoires – les communes littorales ou les zones de montagne, notamment – au regard de l’application du ZAN, sans toutefois préciser l’implication de cette spécificité sur la mise en œuvre du ZAN.
Par cet amendement, et afin d’être agréable au ministre (Sourires.), je propose que la prise en compte de cette spécificité soit précisée dans un décret en Conseil d’État.
Nous avons cité l’exemple des logements saisonniers ou permanents, mais la topographie doit également être prise en compte, car il est bien entendu que construire dans la pente n’emporte pas les mêmes contraintes foncières que construire sur un terrain plat.
S’il n’est pas opportun de lister de telles spécificités dans la loi, je fais toute confiance au Gouvernement pour y procéder dans le cadre d’un décret, et pour réaliser les concertations préalables qui s’imposeront.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Vous entendez vous en remettre au pouvoir réglementaire pour introduire une pondération, cher collègue.
Or le fil conducteur de la commission consiste à éviter à ce stade toute disposition relevant de la pondération, afin notamment de ne pas ajouter de complexité.
Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Monsieur Vial, l’amendement n° 90 rectifié est-il maintenu ?
M. Cédric Vial. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 90 rectifié est retiré.
L’amendement n° 91 rectifié, présenté par MM. C. Vial, Bacci et Bascher, Mmes Bellurot et Belrhiti, M. E. Blanc, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa, Charon et Chatillon, Mme L. Darcos, M. Darnaud, Mmes Di Folco, Dumas, Dumont et Estrosi Sassone, M. Genet, Mmes Gosselin, Goy-Chavent et Jacques, MM. D. Laurent et Longuet, Mmes Garriaud-Maylam et Noël, MM. Paccaud et Pellevat, Mme Puissat, MM. Rapin, Reichardt, Rietmann, Rojouan et Sautarel, Mme Schalck, MM. Somon et Tabarot et Mme Ventalon, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« 5° … Pour l’application du présent article, la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers résultant de projets l’implantation d’installations de production ou de stockage d’énergies renouvelables, y compris leurs ouvrages de raccordement aux réseaux de transport et de distribution d’énergie ainsi que les ouvrages connexes qui leur sont directement liés, n’est pas prise en compte pour évaluer l’atteinte des objectifs de réduction du rythme de la consommation d’espaces prévus au présent article pour la première tranche de dix années mentionnée au 1° du présent II. »
La parole est à M. Cédric Vial.
M. Cédric Vial. Je réessaie ! Cet amendement devrait recevoir l’approbation de mes collègues, puisqu’il a déjà été voté dans le cadre de ce qui est devenu la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables.
Il vise à réintroduire la spécificité de l’implantation d’installation de production ou de stockage d’énergies renouvelables afin d’exonérer celles-ci des contraintes liées au ZAN.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Une telle exonération étant déjà prévue, l’amendement est satisfait.
J’en demande donc le retrait. À défaut, l’avis sera défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Monsieur Vial, l’amendement n° 91 rectifié est-il maintenu ?
M. Cédric Vial. Si l’amendement est satisfait, je lui suis aussi. Je retire donc l’amendement, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 91 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 12 bis, modifié.
(L’article 12 bis est adopté.)
Après l’article 12 bis
Mme le président. L’amendement n° 1 rectifié sexies, présenté par Mme Noël, MM. Bascher, Joyandet, Panunzi et Cadec, Mme Belrhiti, MM. Reichardt et Courtial, Mme Puissat, MM. Pellevat, Saury et Bouchet, Mmes Richer et Berthet, MM. Sautarel, Genet, J.M. Boyer, C. Vial et Chatillon, Mme Dumont, M. Savin, Mme Dumas et MM. Pointereau, Duplomb, Charon, Gremillet et Houpert, est ainsi libellé :
Après l’article 12 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les projets déjà autorisés et engagés dont les permis d’aménager et les permis de construire ont été déposé avant le 22 août 2021 sur la base des documents d’urbanisme antérieurs à la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, et dont la consommation effective interviendra sur la période 2021-2031, seront comptés sur la période de consommation foncière 2011-2021.
La parole est à M. Fabien Genet.
M. Fabien Genet. Par le présent amendement, il est proposé de tenir compte des coups partis, qui correspondent aux projets déjà autorisés et engagés avant le 22 août 2021 sur la base des documents d’urbanisme antérieurs à la loi Climat et résilience, et dont la consommation effective interviendra sur la période 2021-2031.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. L’amendement étant satisfait, j’en demande le retrait. À défaut, l’avis sera défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Monsieur Genet, l’amendement n° 1 rectifié sexies est-il maintenu ?
M. Fabien Genet. J’appliquerai la même doctrine que M. Vial. Puisque l’amendement est satisfait, je le retire, madame la présidente ! (Sourires.)
Mme le président. L’amendement n° 1 rectifié sexies est retiré.
L’amendement n° 107 rectifié ter, présenté par MM. Genet, Rojouan, Mandelli et C. Vial, Mme Lassarade, M. Longuet, Mme Schalck, MM. E. Blanc, Darnaud, Brisson, Pellevat et Chatillon, Mme Belrhiti, M. Burgoa, Mme Goy-Chavent, MM. Paccaud et Somon, Mme Bonfanti-Dossat, MM. H. Leroy, Bascher, Sautarel et Charon, Mmes Dumont, Dumas et Chauvin, M. Sido, Mme Borchio Fontimp, M. Gremillet et Mmes M. Mercier et Joseph, est ainsi libellé :
Après l’article 12 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Au sein d’une zone d’aménagement concerté dont l’acte de réalisation est intervenu avant le 22 août 2021, l’imputation de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers résultant de la réalisation des travaux, constructions ou installations se fait sur la période décennale s’arrêtant au 22 août 2021. »
La parole est à M. Fabien Genet.
M. Fabien Genet. Il convient de s’assurer que la consommation effective d’espaces par les zones d’activité commerciale (ZAC) lancées avant la loi Climat et Résilience soit imputée sur la période de lancement de ces projets.
Cela permettra de préserver les efforts des élus locaux engagés en faveur du développement économique et de la planification écologique avant le changement de règle en matière d’artificialisation, et de ne pas les pénaliser pour des règles dont ils ne pouvaient avoir connaissance, et qu’ils ne pouvaient donc pas prendre en compte au moment de leur prise de décision.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Cet amendement est également satisfait. J’en demande donc le retrait. À défaut, l’avis sera défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Monsieur Genet, l’amendement n° 107 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Fabien Genet. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 107 rectifié ter est retiré.
Article 13
Le III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets est ainsi modifié :
1° Le 5° est complété par une phrase ainsi rédigée : « Sont retranchées de cette consommation les surfaces des espaces urbanisés ayant fait l’objet d’actions de renaturation au sens de l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme. » ;
2° Il est ajouté un 9° ainsi rédigé :
« 9° À compter de 2031, les surfaces non artificialisées utilisées temporairement pour les besoins de travaux ou d’aménagements puis restituées, dans les conditions d’origine, à la même catégorie de surface non artificialisée ne sont pas comptabilisées comme des surfaces artificialisées. Les modalités de mise en œuvre du présent 9° sont précisées par décret en Conseil d’État. »
Mme le président. Je suis saisie de quatre amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 260, présenté par M. J.B. Blanc, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
Sont retranchées de cette consommation les surfaces des espaces urbanisés ayant fait l’objet d’actions de renaturation au sens de l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme
par les mots :
Sur ce même territoire, la commune ou l’EPCI peut retrancher de cette consommation la transformation effective d’espaces urbanisés ou construits en espaces naturels, agricoles et forestiers du fait d’une renaturation
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Par cet amendement, je propose d’améliorer et de rendre plus cohérente la prise en compte des efforts de renaturation effectués par les collectivités avant 2031 en considérant la renaturation d’espaces effectuée avant 2031 comme une transformation, non pas en espace non artificialisé, mais en espace naturel, agricole ou forestier, ce qui paraît plus logique.
Je propose également, après une réflexion conjointe avec les associations d’élus, de ne pas rendre automatique la prise en compte d’une opération de renaturation, ce qui pourrait poser des difficultés, par exemple, dans le cas d’une friche envahie par la végétation. Les renaturations effectuées avant 2031 seront donc prises en compte sur décision de la commune ou de l’EPCI qui le jugent nécessaire.
Je précise que ce sujet, qui a fait l’objet de nombreuses remontées de terrain, a été étudié attentivement par la commission.
Mme le président. Le sous-amendement n° 265, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Amendement 260, alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
Sur ce même territoire, la transformation effective d’espaces urbanisés ou construits en espaces naturels, agricoles et forestiers du fait d’une renaturation peut être comptabilisée en déduction de cette consommation sur ledit territoire
La parole est à M. le ministre.
M. Christophe Béchu, ministre. D’autres collectivités locales que les communes et les EPCI, notamment les départements, peuvent mener un projet de renaturation. Le présent sous-amendement vise donc à introduire une rédaction permettant de ne pas les exclure.
Mme le président. L’amendement n° 148 rectifié, présenté par Mme Préville, MM. Pla, Devinaz, Bourgi et Tissot et Mme Poumirol, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
et de mesures de protection contre l’artificialisation pendant une durée d’au moins dix ans
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à s’assurer que les surfaces renaturées qui seront retranchées de la consommation d’espaces ne soient pas de nouveau artificialisées pendant une durée d’au moins dix ans.
Il ne présente en effet aucun intérêt de renaturer une surface pour la réartificialiser ensuite à court terme.
Mme le président. L’amendement n° 165 rectifié bis n’est pas soutenu.
L’amendement n° 122 rectifié ter, présenté par MM. Sido, Joyandet, Bacci et Bascher, Mme Belrhiti, MM. Brisson, Burgoa, Bouchet, Cadec, Calvet, Cambon, Chatillon, Charon, Courtial et B. Fournier, Mme Gacquerre, M. Genet, Mmes F. Gerbaud, Goy-Chavent, Jacques et Joseph, MM. D. Laurent, Lefèvre, Longuet, Panunzi, Paccaud et Pointereau, Mme Puissat, MM. Rapin, Saury, Folliot, Houpert, Belin et Rojouan et Mmes Di Folco et Espagnac, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée :
ainsi que les surfaces situées sur le territoire d’une commune hyper-rurale. La liste des communes hyper-rurales est fixée par décret sur la base de critères notamment fondés sur la densité de population des communes concernées.
La parole est à M. Bruno Sido.
M. Bruno Sido. Avec une densité de trois habitants au kilomètre carré, certaines zones hyper-rurales de notre territoire sont moins peuplées que le Sahara. Dans ces zones, appliquer le ZAN ne présente aucun intérêt.
Par cet amendement, il s’agit donc, comme le président Pompidou y invitait ses ministres, de ne pas « embêter les Français ».
Mme le président. Il ne le disait pas tout à fait ainsi… (Sourires.)
Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. En ce qui concerne le sous-amendement n° 265, il importe à mon sens de préciser le rôle des communes et EPCI dans la décision de renaturer ou non une surface avant 2031. Si ce sont certes les collectivités qui constateront la transformation de l’espace urbanisé en espace agricole, naturel ou forestier, il importe que la décision ne puisse être imposée aux communes et aux EPCI ni par la région ni par le schéma de cohérence territoriale (Scot).
L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 148 rectifié tend à conditionner la prise en compte d’une opération de renaturation à l’application par la commune ou l’EPCI d’une mesure de protection contre l’artificialisation sur la surface concernée.
Une telle disposition contribuerait à contraindre les opérations de renaturation entreprises par les collectivités avant 2031 et, surtout, elle les inciterait à décaler celles-ci à compter de 2031, ce qui serait une perte de temps pour la biodiversité et pour le climat.
L’avis est donc défavorable sur l’amendement n° 148 rectifié, de même que sur l’amendement n° 122 rectifié ter.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. L’avis défavorable du rapporteur sur le sous-amendement n° 265 nous éloigne encore un peu plus de la possibilité d’élaborer un texte qui soit applicable, et qui ne se résume pas aux règles régissant déjà le ZAN complétées par des décrets.
J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° 260.
L’avis est par ailleurs également défavorable sur les amendements nos 148 rectifié et 122 rectifié ter.
Mme le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 265.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. En conséquence, les amendements nos 148 rectifié et 122 rectifié ter n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 102 rectifié quater, présenté par MM. Tabarot et Pellevat, Mme Belrhiti, M. Chatillon, Mme F. Gerbaud, MM. Burgoa, Mandelli, Cadec, Bascher et Brisson, Mme Gosselin, MM. E. Blanc, Karoutchi et Grosperrin, Mme Dumont, M. Daubresse, Mme Dumas, M. Longuet, Mme Bonfanti-Dossat, M. Piednoir, Mmes Joseph et Lassarade, MM. Lefèvre et Pointereau, Mme Canayer, M. Bouloux, Mme Eustache-Brinio, MM. Charon, C. Vial, Genet, Somon, Sido et Gueret, Mme Garriaud-Maylam, M. Gremillet, Mme Borchio Fontimp, M. Belin et Mmes Demas et Di Folco, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
Remplacer les mots :
, dans les conditions d’origine, à la même
par les mots :
à une
La parole est à M. Philippe Tabarot.
M. Philippe Tabarot. Membre du Conseil d’orientation des infrastructures, j’ai remis à la Première ministre, avec notre collègue Michel Dagbert, un rapport prospectif sur les mobilités placé sous le signe de la planification écologique et faisant du train le pilier de la mobilité verte de demain.
Cet amendement tend à ce titre à favoriser les travaux d’évolution, par exemple du réseau ferroviaire. Je propose en effet de reprendre les principes, retenus par le rapporteur, d’une non-comptabilisation de l’artificialisation temporaire résultant de travaux d’aménagement, en assouplissant la condition de restitution et en prévoyant que la surface soit une surface non artificialisée, sans qu’elle corresponde nécessairement à la catégorie d’origine.
Un chantier temporaire peut occuper des surfaces initialement agricoles qui seront restituées, après chantier, en surfaces naturelles, et inversement.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Avis favorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Cet amendement tend à complexifier la rédaction de l’alinéa 4 tel qu’il a été adopté par la commission spéciale, qui entraînera déjà des difficultés de mise en œuvre et de suivi dans les bilans réalisés. La durée des chantiers et l’utilisation des zones de chantier ne correspondant pas, cela revient à ajouter de la complexité à la complexité, ce qui nous éloigne de notre objectif premier.
L’avis est défavorable.
Mme le président. L’amendement n° 238 rectifié bis, présenté par MM. Somon et Burgoa, Mme Dumas, M. Mouiller, Mme Ventalon, MM. Courtial et Brisson, Mmes Belrhiti, Canayer et Bonfanti-Dossat, MM. Klinger, Paccaud, de Legge, Bascher et Genet, Mmes Gruny, Imbert et Goy-Chavent, MM. Sido, Rapin et Chasseing, Mme Gosselin et MM. Wattebled, Bouchet, Cadec, Panunzi et Savary, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les carrières, après leur exploitation, sont considérées comme des surfaces renaturées et viennent en compensation de la consommation foncière. »
La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Si vous le permettez, madame la présidente, je défendrai en même temps l’amendement n° 239 rectifié bis.
Mme le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 239 rectifié bis, présenté par MM. Somon et Burgoa, Mme Dumas, M. Mouiller, Mme Ventalon, MM. Courtial et Brisson, Mmes Belrhiti, Canayer et Bonfanti-Dossat, MM. Klinger, Paccaud, de Legge, Bascher et Genet, Mmes Gruny, Imbert et Goy-Chavent et MM. Sido, Rapin, Wattebled, Bouchet, Cadec, Panunzi et Savary, et ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les surfaces d’enfouissement des ordures ménagères après la fin de leur exploitation sont considérées comme des surfaces renaturées et viennent en compensation de la consommation foncière. »
Veuillez poursuivre, cher collègue.
M. Laurent Somon. Ces amendements visent à considérer les carrières et les surfaces d’enfouissement des ordures ménagères comme des surfaces renaturées après leur exploitation.
En effet, même en l’absence de retraitement des sols, qui est aujourd’hui la condition pour que ces surfaces ne soient pas considérées comme artificialisées, la nature finit par reprendre ses droits.
J’en citerai d’ailleurs un exemple si ces amendements reçoivent un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. L’amendement n° 238 rectifié bis étant satisfait, j’en demande le retrait. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Pour ce qui concerne l’amendement n° 239 rectifié bis, je rappelle que l’enfouissement des ordures ménagères, même après la fin de l’exploitation de la surface concernée, a un impact sur les fonctions écologiques des sols.
Actuellement considérées comme des surfaces artificialisées, les surfaces d’enfouissement des ordures ménagères pourront être considérées comme non artificialisées si elles font l’objet d’une opération de renaturation qui restaure les fonctionnalités écologiques des sols.
Il ne doit pas être fait d’exception en matière de renaturation des sols lorsque l’altération est durable. Soyons cohérents avec l’article 9 : il faut veiller à la qualité de la renaturation, et ne pas accorder de renaturation automatique sans prendre en compte la qualité des sols. De fait, l’arrêt de l’exploitation ne signifie pas l’amélioration immédiate de la fonctionnalité des sols.
L’avis est donc défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.
M. Laurent Somon. Au Crotoy, dans la Somme, le département a creusé des casiers dans un bassin d’infiltration pour y enfouir les produits du dragage du bassin de chasse. Trente ans plus tard, quand on a procédé au dégagement des casiers afin de draguer de nouveau les bassins de chasse, cette surface a été considérée comme renaturée. Entre-temps, des choux de mer et d’autres espèces avaient en effet poussé, redonnant à cette zone son caractère naturel et sensible, et ce, sans qu’aucun traitement ait été effectué.
Il en est de même pour les zones d’enfouissement des ordures ménagères : la nature finit par reprendre ses droits, et l’on peut éventuellement y installer des animaux.
Je ne comprends pas que l’avis sur ces amendements soit défavorable.
Mme le président. Monsieur Somon, l’amendement n° 238 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Laurent Somon. Oui, je le maintiens. Dans la mesure où les carrières ne sont pas des surfaces artificialisées, elles ne peuvent pas être considérées comme renaturées. L’amendement n’est donc pas satisfait.
Mme le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christophe Béchu, ministre. La réversibilité des carrières entraîne leur classement en Enaf. L’amendement est donc bien satisfait.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 238 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 239 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je mets aux voix l’article 13, modifié.
(L’article 13 est adopté.)
Après l’article 13
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 92 rectifié bis est présenté par Mme de La Provôté et les membres du groupe Union Centriste.
L’amendement n° 244 rectifié bis est présenté par Mme Pantel, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin et MM. Requier et Roux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif au renforcement des outils d’ingénierie publique territoriale nécessaires à la mise en œuvre des objectifs de zéro artificialisation nette des sols par les collectivités territoriales. Ce rapport portera sur les outils destinés à la planification foncière, au portage des projets et aux stratégies de maîtrise globale du foncier, notamment pour les communes peu denses et très peu denses au sens de la grille communale de densité publiée par l’Institut national de statistiques et des études économiques.
La parole est à M. Jean-François Longeot, pour présenter l’amendement n° 92 rectifié bis.
M. Jean-François Longeot. Cet amendement a pour objet de demander la remise d’un rapport d’ingénierie publique territoriale.
Il est en effet nécessaire que les territoires disposent d’outils d’ingénierie de qualité afin d’être accompagnés juridiquement, techniquement et opérationnellement. Cet amendement vise donc à encourager l’État à donner une impulsion politique et financière au renforcement de ces outils d’ingénierie publique locale par la remise d’un rapport au Parlement sur ce sujet.
Mme le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 244 rectifié bis.
Mme Maryse Carrère. Il est défendu.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Le président Longeot soulève le problème majeur de l’ingénierie. L’avis est favorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 92 rectifié bis et 244 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 13.
L’amendement n° 158 rectifié bis, présenté par MM. Wattebled, Malhuret, Decool, Chasseing et Capus, Mme Paoli-Gagin, M. Guerriau, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Chatillon, Reichardt et Guérini, Mme Noël, MM. Panunzi et Cadec, Mme Schalck et MM. Longeot et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport analysant les moyens envisagés pour atteindre l’objectif « zéro artificialisation nette » en 2050 en parallèle des obligations liées à la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, ainsi que les effets des pénalités et de sanctions prévues par cette même loi sur ces objectifs.
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Il est défendu.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Monsieur Longeot, l’amendement n° 158 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-François Longeot. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 158 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 93 rectifié, présenté par MM. C. Vial, Bacci et Bascher, Mmes Bellurot et Belrhiti, M. E. Blanc, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa, Charon et Chatillon, Mme L. Darcos, M. Darnaud, Mmes Di Folco, Dumas et Dumont, MM. B. Fournier et Genet, Mmes Gosselin, Goy-Chavent et Garnier, MM. Gremillet et Gueret, Mme Jacques, MM. D. Laurent et Longuet, Mmes Garriaud-Maylam et Noël, MM. Paccaud et Pellevat, Mme Puissat, MM. Rapin, Reichardt, Rietmann, Rojouan et Sautarel, Mme Schalck, MM. Somon et Tabarot et Mme Ventalon, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif à l’impact de l’obligation de modifier l’ensemble des PLU, PLUi, et SCOT sur les finances des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale et des syndicats mixtes compétents en matière d’urbanisme. Cette étude analysera également l’impact sur les cabinets d’ingénierie privés, les capacités des services de l’État et les moyens nécessaires qui devront y être dédiés pour faire face à l’obligation concomitante de modifications de l’ensemble des documents d’urbanisme de notre pays.
La parole est à M. Cédric Vial.
M. Cédric Vial. Cet amendement vise à demander la remise d’un rapport. Le Sénat n’a pas pour habitude de voter de tels amendements, pourtant, quarante-deux collègues ont accepté de le cosigner,…
M. François-Noël Buffet. Ils ne l’ont pas lu !
M. Cédric Vial. … car le rapport demandé porte sur un sujet essentiel, qui mérite d’être débattu avant que nous n’achevions l’examen de ce texte, monsieur le ministre.
Il s’agit en effet de demander au Gouvernement d’évaluer le coût, pour les collectivités locales, de l’obligation qui leur est faite, par la loi Climat et résilience, de réviser l’ensemble des Scot, plans locaux d’urbanisme (PLU) et plans locaux d’urbanismes intercommunaux (PLUi) dans le délai restreint d’une année et dix-huit mois.
La charge pour les collectivités sera d’autant plus importante que les cabinets d’architecte et d’ingénierie seront fortement sollicités, ce qui renchérira les coûts.
Il est également demandé que soit étudié l’impact de la mesure sur ces opérateurs qui devront modifier l’ensemble des documents d’urbanisme et de planification de notre pays dans un temps restreint, ainsi que sur les services de l’État qui devront instruire l’ensemble de ces demandes la même année – directions départementales des territoires (DDT), directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal), services environnementaux, etc. Compte tenu des spécificités de chaque territoire et des difficultés que les communes ne manqueront pas de rencontrer, l’instruction des dossiers risque d’être particulièrement difficile et de nécessiter allers-retours et négociations.
Au regard des moyens actuels de l’État dans nos territoires, comment l’instruction de ces demandes pourra-t-elle être assurée, monsieur le ministre ? Avez-vous prévu de former des armadas d’agents ? De procéder à de nombreux recrutements ? À ce stade, cela me paraît relever de la magie. (Mme Sophie Primas applaudit.)
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Les demandes formulées par notre collègue Cédric Vial sont plus que légitimes : je les ai même entendues des dizaines de fois lors de mes déplacements. Il s’agit donc d’un débat de fond dont l’enjeu va sans doute au-delà de cet amendement.
Mais il se trouve qu’un rapport similaire est attendu depuis la loi Climat et résilience et qu’une telle demande n’entre pas strictement dans le périmètre de la commission spéciale.
Pour toutes ces raisons, je suis malheureusement contraint d’émettre un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Monsieur Vial, l’amendement n° 93 rectifié est-il maintenu ?
M. Cédric Vial. Pour le plaisir et puisque nous allons bientôt nous séparer, je maintiens mon amendement. (Sourires.)
Plus sérieusement, monsieur le rapporteur, comme vous l’avez rappelé, nous avons déjà formulé une demande presque similaire dans la loi Climat et résilience et celle-ci n’a toujours pas obtenu de réponse. C’est un vrai sujet. Tout le monde est très inquiet : nous-mêmes comme les élus des territoires. Cela nuit à la crédibilité des objectifs de la loi.
En effet, compte tenu du fonctionnement des services préfectoraux et de l’état des cabinets d’ingénierie tels que nous les connaissons, nous avons de grosses craintes quant à la manière dont la situation pourrait évoluer et au le coût que cela représentera pour les collectivités locales, un coût supplémentaire, imposé d’en haut par le Gouvernement et par la loi sans que ces dépenses soient compensées.
Qu’il y ait ou non un rapport, j’espère que nous aurons des réponses de la part du Gouvernement.
Mme le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christophe Béchu, ministre. Tout d’abord, comme l’a dit le rapporteur, la loi Climat et résilience prévoit un rapport ; nous n’avons juste pas encore atteint le délai dans lequel celui-ci doit être remis.
Il me semble pour le moins baroque de demander un rapport avant même que celui qui est prévu dans une précédente en cours d’application ait été produit.
Mme Cécile Cukierman. Cela s’est déjà vu.
M. Christophe Béchu, ministre. En plus, cela créerait un niveau de charge supplémentaire.
On pourrait également s’intéresser au coût de l’inaction ou d’un écart de trajectoire d’artificialisation, et plus précisément aux surcoûts pour nos concitoyens dus à l’accentuation d’une partie des difficultés et à l’augmentation des risques que les conséquences des sécheresses entraîneront, puisqu’il faudra faire face à une diminution des nappes phréatiques. Il faudrait donc comparer le coût éventuel d’une adaptation qui permettrait de minorer l’étalement urbain avec celui de l’inaction qui consisterait à rester sur les trajectoires telles que nous les connaissons, en tenant compte des prévisions déjà établies sur un certain nombre d’items au titre des catastrophes naturelles et des sécheresses ; selon les dernières estimations, cela dépasse les 10 milliards d’euros. Je pense qu’on sera loin du compte. Nous sommes là à discuter de points très précis, à propos de pistes de ski et de bâtiments en pierre, mais, en réalité, depuis le début, le sujet est bien celui que je viens d’indiquer.
Mme le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le ministre, au-delà des éléments qui pourraient nous faire sourire, vous venez de pointer le véritable problème.
Le sujet dont nous discutons – l’enjeu est réel – a été soulevé lors de l’examen d’un amendement portant sur la loi Climat et résilience, texte pour lequel une étude d’impact et une réflexion globale ont cruellement manqué. Les différents orateurs l’ont souligné.
Je le rappelle très concrètement, l’objectif est de ne plus artificialiser, de réduire ce processus et de maîtriser notre espace et notre environnement pour les années à venir.
En réalité, nous pouvons tous être agacés ce soir de devoir débattre pour savoir s’il y a assez ou pas assez d’exemptions au principe du ZAN. Nous avons travaillé jusque tard dans la nuit mardi dernier et aussi ce soir. Quand on fait passer des mesures un peu à la va-vite, sans étude d’impact et sans prendre le temps de mesurer les conséquences dans les territoires, on finit en effet par se retrouver un an et demi plus tard à devoir refaire les choses. Cela n’est satisfaisant ni pour nous qui siégeons ici ni pour vous, monsieur le ministre. Nous doutons tous collectivement de l’efficacité de l’application du dispositif dans les années à venir et nous aurons de toute façon à reprendre rendez-vous parce que les enjeux d’aménagement du territoire et les enjeux climatiques demeureront.
Je voterai donc cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Maryse Carrère et Daphné Ract-Madoux applaudissent également.)
Mme le président. L’amendement n° 150 rectifié, présenté par Mme Préville, MM. Pla, Devinaz, Bourgi et Tissot et Mme Poumirol, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de douze mois, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif à l’impact sur la biodiversité de l’application de l’objectif de « zéro artificialisation nette » en 2050 et des politiques publiques de rénovation des bâtiments en particulier celle de la rénovation énergétique. Ce rapport présente des éléments chiffrés d’appréciation de cet impact, ainsi que des propositions visant à améliorer la prise en compte de la biodiversité afin de tendre vers une absence de perte nette de biodiversité pour l’application de ces politiques.
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Il s’agit d’une nouvelle demande de rapport, cette fois pour mesurer l’impact de l’objectif de zéro artificialisation nette en 2050, qui va amener à reconstruire la ville sur la ville, à densifier et donc à détruire de l’ancien pour faire du neuf.
Cette destruction d’anciens bâtiments a un impact important sur la biodiversité. La majorité des espèces inféodées au bâti sont des espèces protégées. Malgré la législation sur le sujet ainsi que les sanctions en cas de destruction d’habitats, elles ne sont que trop peu souvent prises en compte, quel que soit le type d’opérations, et les sanctions restent souvent inappliquées.
De ce fait, les espèces du milieu bâti connaissent un déclin important avec une diminution des populations de 27,6 % en trente ans : les martinets noirs, les hirondelles de fenêtre et les hirondelles rustiques sont particulièrement touchés, et leur population diminue respectivement de 46 %, 23 % et 25 %.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Avis défavorable.
J’indique toutefois à notre collègue qu’une commission d’enquête présidée par Mme Estrosi Sassone et rapportée par M. Gontard est en cours. Certes, elle ne porte pas strictement sur le sujet.
Nous attendons toujours le rapport prévu dans la loi Climat et résilience sur l’impact sur la biodiversité.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Angèle Préville. Je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 150 rectifié est retiré.
L’amendement n° 245 rectifié n’est pas soutenu.
Vote sur l’ensemble
Mme le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Finalement, nous allons achever l’examen de ce texte à une heure presque raisonnable par rapport à nos estimations les plus pessimistes.
En réalité, j’ai l’impression que nous allons voter sur deux lois différentes. La première, nécessaire, tend à améliorer la partie de la loi Climat et résilience consacrée au ZAN, grâce à l’introduction de très bons articles, et je rends hommage au rapporteur et à la présidente de la commission spéciale, qui ont réalisé un gros travail, par exemple sur l’article 6 ou sur les dispositions visant à intégrer les renaturations depuis la période précédente. Un certain nombre d’articles dans ce texte rendent la loi Climat et résilience plus facilement applicable. S’il n’y avait que ceux-là, nous voterions bien évidemment le texte.
Mais il y a un deuxième ensemble d’articles qui remettent tout de même en cause la loi Climat et résilience, par exemple sur le rapport de compatibilité, sujet dont nous avons parlé mardi dernier. De même, après la discussion au Sénat, le texte intègre une liste extrêmement importante de projets qui remonteraient à l’échelon national et qui partiraient en pertes et profits puisqu’il n’est pas prévu, à ce stade, de les remutualiser à l’échelon des régions. Enfin, l’article 9 reste pour moi totalement incompréhensible. Mais M. le ministre a très bien expliqué qu’il constituait une véritable remise en cause du ZAN et une machine à gaspiller et, si j’ose dire, à « bouffer » de l’espace agricole.
Il y a donc tout de même un détricotage de la loi Climat et résilience. Je le regrette d’autant plus que je considère que la commission spéciale a réalisé un travail nécessaire pour rendre le ZAN beaucoup plus applicable.
Comme nous l’avions annoncé dans la discussion générale, le groupe écologiste votera contre cette proposition de loi.
Mme le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote.
M. Christian Redon-Sarrazy. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera cette proposition de loi, d’une part, parce qu’elle a été coproduite au sein de cette commission spéciale, d’autre part et, surtout, parce qu’elle répond aux attentes des élus.
À de nombreuses reprises, mardi soir et ce soir encore, il a été fait état de leurs inquiétudes face à l’application du ZAN, qu’ils ne contestent pas par ailleurs. Or nous savons tous que la capacité que nous aurons à atteindre ces objectifs dépend en grande partie de leur acceptabilité et de leur appropriation par les élus locaux.
Mme Cécile Cukierman. Exactement.
M. Christian Redon-Sarrazy. Cette proposition de loi est donc une première réponse, que je qualifierais de réponse « d’urgence ». En effet, comme nous l’avons évoqué à plusieurs reprises, le volet sur la fiscalité, celui sur l’aspect financier, sur la situation des friches, sur les objectifs en matière de logement social ou sur la réindustrialisation sont autant de sujets que nous serons amenés à traiter probablement dans les mois à venir.
Cependant, grâce à cette proposition de loi, nous avons aujourd’hui la possibilité de rassurer tous ceux qui sont impliqués dans le ZAN.
Pour dédouaner les élus, en terminant par une pirouette, reconnaissez tout de même, monsieur le ministre, que leur demander des efforts pour tendre vers le zéro, alors que c’est la plus mauvaise note d’après ce que l’on nous apprend depuis le plus jeune âge, ce n’est pas leur rendre la vie facile. (Sourires.)
Mme le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour explication de vote.
Mme Maryse Carrère. Je tenais à remercier au nom du groupe du RDSE le rapporteur et la présidente de la commission spéciale de cette proposition de loi coconstruite, comme l’a dit mon collègue à l’instant ; elle vient concrétiser le travail substantiel réalisé dans le cadre de la mission d’information. Je les remercie aussi pour l’esprit transpartisan qui a guidé ces travaux et qui prouve que, lorsqu’on s’attache à travailler pour les collectivités et les territoires, le Sénat sait parler d’une voix apaisée, constructive et assez unanime à quelques exceptions près.
Aujourd’hui, nous aurons voté deux propositions de loi qui correspondent et qui répondent aux préoccupations des collectivités, notamment les plus rurales. À travers elles, nous avons essayé de traiter deux irritants qui préoccupent les maires et les élus et qui soulèvent – je peux vous l’assurer, monsieur le ministre – des questions récurrentes que l’on nous pose au quotidien. Il s’agit, d’une part, du transfert de la compétence eau et assainissement aux communautés de communes, d’autre part, du ZAN.
Aujourd’hui, les élus ne parviennent pas à envisager l’avenir de leur commune avec confiance, parce qu’ils se sentent dépossédés de la possibilité de développer leur territoire et leur commune.
Je n’ose imaginer que ces deux propositions de loi ne trouvent pas la concrétisation d’un examen à l’Assemblée nationale. Les attentes sont fortes. Dans les territoires, les élus nous regardent. Ils souhaitent une juste répartition des efforts que nous avons à faire en matière d’artificialisation.
C’est la raison pour laquelle, avec enthousiasme et reconnaissance, le groupe du RDSE votera cette proposition de loi unanimement.
Mme le président. La parole est à M. Michel Dagbert, pour explication de vote.
M. Michel Dagbert. Les élus du groupe RDPI sont, comme de nombreux collègues, sensibles à la notion d’acceptabilité par les maires, dont un certain nombre s’est manifesté auprès de nous.
Cependant, l’ensemble des dérogations qui ont été examinées et les avis qui ont été rendus ce soir nous amènent à reconsidérer l’abstention, choix que nous envisagions initialement. Finalement, le groupe RDPI votera contre cette proposition de loi.
Mme le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Malgré les conditions d’examen particulières du point de vue tant des horaires que de l’ambiance politique, le Sénat achève ce soir ses travaux sur un texte extrêmement attendu par les élus.
Les maires partagent tous l’ambition d’une plus grande sobriété foncière, qui est déjà engagée depuis plusieurs années – surtout à Digoin, cher Fabien Genet –, mais pour que le ZAN ne se transforme pas en un corset paralysant qui briderait toute liberté d’action, il convenait que le Sénat agisse. Je veux moi aussi remercier la commission spéciale, son rapporteur, sa présidente, et son équipe de collaborateurs.
En revenant sur les décrets d’application contestés – je sais de quoi je parle, ayant participé à la commission mixte paritaire, qui fut trahie ensuite –, en créant un droit à l’hectare pour chaque commune, en prévoyant un compté à part pour les projets nationaux, nous envoyons un signal d’espoir à tous les élus locaux.
Nos débats l’ont montré : l’objectif de transition écologique, au cœur du ZAN, ne peut pas être atteint sans décentralisation, sans adaptation et sans prise en compte des réalités locales.
Monsieur le ministre, la balle est désormais dans votre camp. Nous avons compris que nous avons quelques désaccords, que vous étiez contrarié, et peut-être même agacé, mais chacun est fatigué ce soir. Il n’est nul besoin de menace. La discussion parlementaire est faite pour cela, pour mûrir ensemble ce projet. Il reste à savoir, bien évidemment, qui siégera à l’Assemblée nationale.
Néanmoins, l’engagement de la procédure accélérée est un signal fort qui manifeste la pertinence de nos travaux et l’urgence d’apporter des réponses ensemble.
Aussi, le groupe Les Républicains votera ce texte, qui fait honneur à notre assemblée, et nous en avons bien besoin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à Mme la présidente de la commission spéciale.
Mme Valérie Létard, présidente de la commission spéciale. Tout d’abord, je veux très sincèrement remercier M. le rapporteur Jean-Baptiste Blanc de l’investissement et de l’engagement considérables dont il a fait preuve tout au long de ces travaux qui ont commencé voilà des mois. (Applaudissements.)
Ensuite, je veux vous remercier toutes et tous, parce qu’il n’y a sur ces travées, depuis la gauche jusqu’à la droite de l’hémicycle, que des gens passionnés et engagés, qui ont été extrêmement présents et à l’écoute de toutes celles et tous ceux que nous avons entendus en audition. Ces personnes nous ont fait entendre, monsieur le ministre, la voix des territoires : celle des experts et de tous ceux qui auront à mettre en œuvre le zéro artificialisation nette.
Monsieur le ministre, je sais que vous nourrissez des interrogations par rapport à la distance qui nous sépare de la position du Gouvernement, du texte initial et de la direction que vous souhaiteriez prendre. Mais c’est là tout l’objet du débat et du travail parlementaire. Nous affirmons un certain nombre de choses qui sont ni plus ni moins la traduction de ce que nous avons entendu. Toutefois, nous savons bien que la navette parlementaire, les échanges avec l’Assemblée nationale et ceux que nous aurons avec vous doivent conduire à la voie du compromis. Nous l’espérons en tout cas.
Cependant, comme Sophie Primas l’a souligné, il y a des fondamentaux qui ont été rappelés à de nombreuses reprises dans le débat : le compté à part ou le droit à l’hectare, etc. Toutes ces questions, vous le savez, sont essentielles.
D’autres sujets pourront être travaillés, nous en sommes conscients, mais aujourd’hui il n’était pas question – loin de nous cette idée ! – de nous éloigner ou pas de la position du Gouvernement. Il s’agissait de poser les sujets, de relayer ce que nous avons entendu dans les territoires et d’affirmer ce que nous souhaitons défendre. Cheminons ensemble sur un sujet qui est au cœur des préoccupations de nos concitoyens, après celui des retraites qui a donné lieu à des débats animés et qui a durci le sentiment général à l’égard de ce que le Parlement pouvait faire.
Aujourd’hui, de façon transpartisane et également consensuelle – du moins, je l’espère – montrons un visage uni en privilégiant le sens de l’intérêt général pour faire atterrir dans nos territoires un texte essentiel, celui de la loi Climat et résilience qui est peut-être encore trop éloignée de la réalité du terrain. Respectons les objectifs fixés – et c’est le cas, monsieur le ministre, vous le savez, car nous n’y avons pas touché –, mais rendons le texte applicable au plus grand nombre, dans chacun de nos territoires en tenant compte de leurs différences et de leur complémentarité. (Applaudissements.)
Mme le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christophe Béchu, ministre. Nous nous sommes éloignés. Vous aviez commencé en disant que vous ne vouliez pas toucher à la trajectoire. Mais nous aboutissons à un article 9 qui, sans étude d’impact, peut entraîner une augmentation de la trajectoire d’artificialisation ; à un compté à part qui, sans étude d’impact, peut nous éloigner de la trajectoire de réalisation. De plus, sur la quasi-totalité des amendements, vous avez systématiquement décidé par rapport à des positions d’entrée.
J’avais pourtant pris soin de faire en sorte qu’un texte soit déposé à l’Assemblée nationale pour que vous ayez une idée claire des quelques lignes rouges à ne pas franchir. J’ai aussi précisé au fur et à mesure de la discussion les éléments sur lesquels il me semblait que nous pourrions bouger et ceux sur lesquels ce serait plus complexe.
Indépendamment de ce que peut être l’esprit d’une navette parlementaire, mon inquiétude reste la suivante : s’il n’y a pas d’accord entre les deux assemblées – et le sujet n’est pas de savoir ce que le ministre pense, même compte tenu de la position actuelle de l’Assemblée nationale – hormis en faisant les modifications par décret, une partie des évolutions que nous souhaitons collectivement seront complexes à obtenir dans le cadre du vote final.
M. Fabien Genet. Il y a des commissions mixtes paritaires pour cela !
Mme Sophie Primas. Comment pouvez-vous préempter l’issue de la commission mixte paritaire ?
M. Christophe Béchu, ministre. Je vous explique ici ce qui a pu être ressenti comme un agacement. En effet, je suis entré dans cet hémicycle en souhaitant réellement que l’on puisse disposer d’un texte qui serait à moyen terme appliqué et pas seulement voté, pour envoyer un message aux élus locaux. Mon inquiétude ce soir, je le redis, c’est que la façon dont il risque d’être accueilli, en particulier s’agissant de l’article 9 et de l’élargissement de la catégorie des grands projets d’envergure nationale, complexifiera le travail.
Je suis convaincu qu’il faut à la fois aller vers la sobriété et trouver des assouplissements pour les élus locaux. Je m’efforcerai donc dès demain d’œuvrer à rapprocher les points de vue.
Mme Sophie Primas. C’est surtout le travail des parlementaires.
M. Christophe Béchu, ministre. Mais je vous indique qu’il faudra aussi, dans ce dialogue, envoyer des signaux…
Mme Cécile Cukierman. C’est aussi aux députés de faire un pas vers nous !
M. Christophe Béchu, ministre. … pour montrer qu’au-delà du texte, il sera encore possible de faire bouger les lignes.
M. Stéphane Sautarel. Que le Gouvernement écoute aussi !
M. Christophe Béchu, ministre. Sinon, nous nous retrouverons devant une impasse, ce que personne ne souhaite. (Exclamations.)
M. Cédric Vial. C’est scandaleux !
Mme Sophie Primas. Ce n’était pas le soir de dire cela, monsieur le ministre !
M. Max Brisson. Non, vraiment pas le soir ! Ne vous étonnez pas de ce qui est en train d’arriver dans le pays !
Mme le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi relative aux objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires.
(La proposition de loi est adoptée.)
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Ordre du jour
Mme le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 21 mars 2023 :
À neuf heures trente :
Questions orales.
À quatorze heures trente et le soir :
Deux conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :
Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord de sécurité sociale du 6 novembre 2014 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Serbie (procédure accélérée ; texte de la commission n° 431, 2022-2023) ;
Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas relatif à la coopération en matière de défense et au statut de leurs forces sur les territoires caribéens et sud-américain de la République française et du Royaume des Pays-Bas (texte de la commission n° 409, 2022-2023) ;
Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à ouvrir le tiers-financement à l’État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique (texte de la commission n° 422, 2022-2023) ;
Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs (texte de la commission n° 429, 2022-2023) ;
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales (texte de la commission n° 401, 2022-2023) ;
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier et amplification des encarts publicitaires destinés à informer le public sur la transition écologique (texte de la commission n° 426, 2022-2023).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le vendredi 17 mars 2023, à une heure trente-cinq.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER