M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1154 rectifié bis.
Mme Monique Lubin. Voilà un bel exemple de service public qui a été peu à peu démantelé !
Quelle belle idée pourtant de distribuer l’énergie, un bien vital, partout en France grâce à un service public, donc de manière égale entre tous les Français. Je dois reconnaître que nombre de gouvernements ont une responsabilité dans ce démantèlement – certains plus que d’autres, mais j’aimerais pouvoir dire que nous n’y avons pris aucune part…
Aujourd’hui, la France est en danger en termes de fourniture d’énergie, et ce projet de loi, en s’attaquant au statut et au régime de retraite des salariés du secteur, va nous donner le coup de grâce !
Pourtant, nous avons besoin de ces salariés. Nous sommes d’ailleurs bien contents de les trouver lorsque nous subissons des coups du sort.
Je pense par exemple à la tempête Klaus, qui a frappé les Landes en 2009, durant laquelle une grande partie de notre massif forestier est tombée. Nombre de gens se sont alors retrouvés dans une situation apocalyptique que nous n’aurions jamais cru connaître ; heureusement, les agents des IEG étaient là pour faire face à cette crise.
Nous devons continuer de soutenir ces salariés !
M. le président. L’amendement n° 1209 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 1240.
Mme Victoire Jasmin. Cet amendement vise à maintenir le régime de retraite des industries du gaz et de l’électricité.
Contrairement à ce qui est proposé dans ce texte, il faut valoriser ces filières, qui sont indispensables pour le développement économique du pays.
Remettre en cause ces régimes spéciaux, c’est aussi diminuer l’attractivité des nombreux métiers des différentes filières concernées. Là encore, c’est une très grave erreur.
Il est au contraire nécessaire de mettre en adéquation la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences avec nos besoins. Nous avons voté récemment une loi sur les énergies renouvelables, et nous devons organiser correctement notre mix énergétique sur le territoire national.
Il faut de l’attractivité pour renouveler les effectifs, pérenniser les emplois et sauver notre mix énergétique. Nous devons surtout répondre à l’enjeu stratégique. Dès le mois de juillet dernier, j’ai attiré l’attention sur ce qui nous attendait dans le contexte de guerre en Ukraine et de menaces sérieuses sur le territoire hexagonal.
Nous avons encore la chance d’avoir du soleil, mais supprimer le régime de retraite des IEG serait une grave erreur. Monsieur le ministre, je vous en supplie, retirez ce texte !
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 1272.
M. Franck Montaugé. La suppression du régime spécial et la casse de fait du statut des IEG constituent un non-sens et un détournement de procédure grossier que je veux ici dénoncer.
La procédure dérogatoire pour l’adoption des projets de loi de financement de la sécurité sociale n’a jamais eu pour vocation d’introduire insidieusement de véritables réformes sociales de fond relevant par principe du domaine de la loi ordinaire.
De surcroît, les conséquences multiples de la suppression des régimes spéciaux qu’opère l’article 1er sont manifestes. Elles n’ont pas été évaluées dans toutes leurs implications productives, sociales et managériales, et leurs effets directs budgétaires ne sont pas avérés.
Les futurs salariés des IEG n’ont pas à faire les frais des difficultés actuelles d’EDF, dont le seul responsable est l’État français, en particulier ceux qui l’ont dirigé depuis des décennies.
La suppression des régimes spéciaux des IEG pour les seuls personnels recrutés à compter du 1er septembre 2023 est sans effet direct sur les dépenses et les recettes, puisqu’elle se borne à introduire un changement de régime d’affiliation de ces personnels au profit du régime général sans affecter directement le montant des cotisations versées. Elle n’a donc rien à faire dans un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.
Elle confirme simplement que le grand œuvre du président des riches et de ses gouvernements successifs est bien, depuis 2017, la suppression des statuts historiques qui ont contribué à la force industrielle et sociale de la France, telle qu’elle était issue du Conseil national de la Résistance.
On savait que le ruissellement vers le bas était une fable. On voit ici que le ruissellement vers le haut est la nouvelle forme de spoliation de ce qui reste du capital social. Les Français l’ont compris, et ils vont vous le rappeler dans les jours à venir !
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 1318.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial de retraite des industries électriques et gazières.
Le secteur de l’énergie est d’une importance stratégique ; c’est d’autant plus vrai aujourd’hui que le mur des investissements dans les installations de production d’électricité est devant nous.
La fermeture de ce régime spécial des métiers de l’énergie est un non-sens absolu, car ces métiers sont durs. Fermer ce régime est particulièrement brutal.
Jusqu’à présent, les six derniers mois étaient pris en compte ; on va passer aux vingt-cinq meilleures années. Le départ était à 62 ans au plus tard ; il va passer à 64 ans. Les durées de cotisation ont évolué : de 37,5 ans en 2007, on est passé à 43 ans.
Or nous avons besoin de salariés qui se sentent bien dans leur travail ; c’est notre intérêt et c’est le leur. Nous avons tout simplement besoin de salariés de l’énergie et la question de l’attractivité se pose. La dureté du travail est évidente pour ces salariés ; or certains critères de pénibilité – températures extrêmes, bruits, travail de nuit et en équipes successives, agents chimiques dangereux – semblent être supprimés. Il y a un flou, et il serait bon que nous ayons des éclaircissements à ce sujet.
Autrement dit, tous ceux qui assurent notre approvisionnement en énergie et qui sont là pour rétablir l’énergie, par exemple lors d’une tempête, d’une inondation, d’un incendie ou d’une catastrophe industrielle, doivent être protégés.
Nous avons bénéficié jusqu’à présent de leur travail et du service qu’ils nous ont rendu. En effet, nous avons toujours pu compter sur eux. Ils travaillent dans des environnements particulièrement extrêmes, par tous les temps, et je salue leur amour du bel ouvrage. Ils sont fiers de ce qu’ils font, et nous sommes satisfaits des services qu’ils rendent.
C’est pourquoi ce régime spécial doit être maintenu.
M. le président. L’amendement n° 1342 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Hussein Bourgi, pour présenter l’amendement n° 1375.
M. Hussein Bourgi. Toutes et tous nous sommes témoins de l’engagement et de l’abnégation des agents dont nous parlons depuis plusieurs minutes.
Souvenons-nous de 1999 et de la tempête Lothar dans le nord de la France, puis, le lendemain, de la tempête Martin dans le sud du pays. Ma collègue Monique Lubin a fait référence à la tempête Klaus de 2009. Dans nos départements, nous subissons régulièrement des épisodes cévenols ou méditerranéens, ainsi que des inondations.
Chaque fois que les élus et les ministres arrivent, ils rencontrent trois types de personnes pour les saluer et les remercier : les agents de la sécurité civile, en particulier les sapeurs-pompiers ; les agents des services des routes, qui sont là pour déblayer et ôter les arbres qui bloquent la circulation ; enfin, les agents qui sont là pour rétablir l’électricité.
À chaque fois, les élus et les ministres saluent ces agents et tirent une légitime fierté de ce service public qui sait se mobiliser pour rétablir des conditions de vie et de travail normales pour les Françaises et les Français.
Ce régime spécial est mérité. Il vient saluer l’engagement et la pénibilité de ce travail. J’ai parlé des périodes exceptionnelles, mais je pourrais vous parler de l’engagement de ces hommes et de ces femmes au quotidien : c’est moins spectaculaire, il n’y a pas de caméra de télévision, pas d’élu qui va à leur rencontre, mais, chaque fois qu’il y a un accident sur la route, qu’un camion rentre dans un pylône ou qu’un arbre tombe sur une ligne électrique, ce sont ces hommes et ces femmes qui se mobilisent pour rétablir le courant.
Voilà la réalité ! Le régime spécial vient sanctionner positivement la pénibilité du travail et l’engagement de ces hommes et de ces femmes au quotidien. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
M. le président. Les amendements nos 1408, 1438, 1506, 1545 et 1594 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 1624.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial de retraite des industries électriques et gazières, qui s’applique aux 156 entreprises de la branche des IEG, dont EDF et Engie, et qui compte plus de 135 000 cotisants au 31 décembre 2021. EDF est le principal employeur du secteur, avec 44,7 % des effectifs des IEG.
La réforme va supprimer les notions de service actif et de service insalubre, qui donnent droit à des majorations de durée permettant une retraite anticipée à ceux qui occupent ces postes pénibles.
Le régime d’EDF prévoit une meilleure prise en compte de la pénibilité, car certains de ses travailleurs subissent une espérance de vie inférieure à la moyenne des Français ou des incapacités de travail importantes.
Pour notre part, nous souhaitons que ces mesures protectrices, qui tiennent compte de la pénibilité des métiers, puissent être appliquées à l’ensemble des Français dont les conditions de travail sont pénibles et usantes.
Une nouvelle fois, la notion de pénibilité au travail semble négligée par le Gouvernement.
M. le président. Les amendements nos 1654 et 1664 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 1695.
M. Jean-Yves Leconte. Nous parlons ici du régime spécial des entreprises électriques et gazières.
Nous sommes devant un paradoxe assez stupéfiant : d’un côté, pas un jour ne se passe depuis un an sans que nous fassions, ici même, un bilan désastreux de la politique énergétique menée depuis vingt-cinq ans dans notre pays ; de l’autre, on nous propose, aujourd’hui, de supprimer ce régime.
Nous savons tous que cette politique énergétique nous mène dans le mur. Or voter la suppression du régime spécial en constitue en fait un prolongement !
Il conviendrait pourtant de changer de politique énergétique et de tirer les conséquences de ce que nous constatons depuis un an.
Hussein Bourgi a rappelé que ces agents sont mobilisables à chaque instant, en astreinte permanente, pour effectuer des tâches pénibles et souvent dangereuses. Le système en place prend en compte la pénibilité de ce travail, et vous voudriez voir ces agents basculer dans le régime général ! Ce n’est pas logique.
Nous avons besoin de ces compétences. Nous devons maintenir cette attractivité, la prise en compte de la pénibilité et les exigences à l’égard des personnels des entreprises électriques et gazières.
Savons-nous combien nous avons besoin de compétences dans ce domaine ?
M. le président. Il faut conclure !
M. Jean-Yves Leconte. Savons-nous combien les centrales nucléaires ont besoin de ces compétences ?
Dès lors, pourquoi ne changeons-nous pas la politique énergétique en donnant un coup d’arrêt à ce que nous faisons depuis vingt-cinq ans dans ce domaine et en refusant de passer au régime général ?
M. le président. Les amendements nos 1751 et 1793 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 1821.
M. Patrick Kanner. Les alinéas 14 à 16 de l’article 1er de ce projet de loi constituent la quatrième pierre à l’entreprise de démolition et de déconstruction de notre histoire sociale.
Monsieur le ministre, pour reprendre une expression maintenant consacrée par l’un de vos collègues, vous avez donc décidé de « bordéliser » un secteur majeur de notre souveraineté énergétique !
C’est un choix extrêmement lourd, et les mobilisations ont commencé dès aujourd’hui chez ces personnels, qui ont été décrits avec beaucoup de force, de vigueur, de justice et de justesse par nos collègues.
Ce régime de retraite ne date pas d’hier : il a été fondé en 1859 par les salariés de la compagnie parisienne du gaz à partir d’une caisse de secours et de prévoyance – d’autres entreprises ont ainsi pu créer leur régime.
Au moment de la création du régime général des assurances sociales en 1930, puis en 1945, certains travailleurs bénéficiant de régimes de retraite plus protecteurs ont été reconnus. Et il est vrai que le régime spécial des IEG est gravé dans la loi fondatrice du 22 juin 1946.
Dès lors, monsieur le ministre, le régime de retraite des IEG symbolise finalement une période chère à notre cœur à toutes et tous, celle du Conseil national de la Résistance et des jours heureux.
Vous vous y attaquez ce soir par ces alinéas, monsieur Dussopt. Vous allez, vous, entrer dans l’histoire des fossoyeurs de notre protection sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. L’amendement n° 1847 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour présenter l’amendement n° 1994.
Mme Laurence Rossignol. J’ai déjà eu l’occasion de dire ce matin quelle était à mon sens la philosophie – ou plutôt l’idéologie, car cela ne mérite pas le mot « philosophie » – qui sous-tend cet acharnement contre les régimes spéciaux.
Et j’ai dit ce matin que vous raisonniez à l’inverse, en pensant que la suppression des régimes spéciaux allait aplanir les conflits d’identité dans notre société : je crains, au contraire, qu’elle ne les exacerbe.
En fait, ce qu’il y a derrière, dans cette idéologie, c’est l’idée d’un salarié souple, flexible, totalement mobile et capable de passer d’un métier à un autre ou d’un poste à un autre.
L’autre jour, alors que quelqu’un lui demandait s’il pensait qu’une infirmière pouvait exercer son métier jusqu’à 64 ans, le Président de la République a eu cette réponse étonnante : à 64 ans, elle aura déjà changé de métier. Non ! Les gens ne changent pas de métier tout le temps ; cela ne marche pas ainsi dans la vie. Leur savoir-faire, leur expérience, leur stabilité ne font pas d’eux des êtres totalement adaptés en permanence aux besoins du marché.
En fait, en vous attaquant aux régimes spéciaux, vous dévalorisez l’identité, le savoir-faire et la fierté que donnent un métier et l’appartenance à une entreprise aussi importante dans le service public des Français que celle qui fait l’objet de cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 2073 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour présenter l’amendement n° 2261.
Mme Frédérique Espagnac. Mes chers collègues, en vous entendant, depuis ce matin, sur la suppression des régimes spéciaux, je me dis que nous ne devons pas être nombreux à avoir des parents ayant exercé des métiers pénibles.
Enfant, je voyais mon père partir la nuit comme le jour, en cas de tempêtes, d’inondations, de feux, de neige, quarante-huit heures durant, et parfois plus même, sans compter ses heures, pour réparer et rebrancher au plus vite les installations électriques en haut des pylônes.
La pénibilité et la dangerosité, c’était son quotidien, de même que le stress permanent qu’un incident intervienne pendant les dépannages ou qu’il mette en danger la vie d’un membre de son équipe ou la sienne.
Comme l’a dit mon collègue Hussein Bourgi, combien de nous, en tant qu’élus, ont rendu hommage, au lendemain des tempêtes, dans nos territoires, à ces hommes et ces femmes qui travaillent pour le bien et la sécurité de tous nos concitoyens, souvent dans les pires conditions ?
Vous demandez aujourd’hui la suppression de leurs régimes spéciaux, qui est une mesure de justice sociale et d’équité prenant en compte la pénibilité de leur travail.
Chers collègues, auriez-vous la mémoire courte ? Bruno Retailleau, que je respecte, a dit tout à l’heure que les régimes spéciaux abîmaient le commun. Au contraire ! Dans ce cas, ils le garantissent, ainsi que le bon fonctionnement de notre pays et de ses services publics.
Nous avons besoin de ces hommes et de ces femmes, de ces personnels qui sont aujourd’hui un enjeu stratégique pour notre pays.
Enfin, le régime de retraite des industries gazières et électriques est adossé au régime général depuis 2008. Il ne doit rien à la solidarité nationale ; au contraire, il y contribue, en lui apportant des recettes.
Au travers du slogan « on meurt plus tôt, on part plus tôt », ce régime est présenté comme un régime pionnier par ses bénéficiaires, prenant en compte la pénibilité au travail liée à une espérance de vie entamée et au bouleversement des conditions de vie.
Mes chers collègues, leur régime si spécial doit être maintenu. Je vous le demande solennellement. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3197.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je veux rebondir sur les tempêtes.
Dans le domaine de la reconnaissance purement symbolique et verbale, on peut tracer un parallèle avec ce que l’on a connu durant la covid-19 : au final, les métiers de soins et d’aide n’ont rien obtenu de plus ! De même, malgré les propos tenus après la tempête de 1999, on remet aujourd’hui en cause le système des électriciens et des gaziers.
On pourrait répéter mot pour mot ce qui a été dit pour la RATP : ce sont, en fin de compte, des régimes qui reconnaissent et préviennent l’exposition à des risques et à des facteurs de pénibilité spécifiques. Ce sont donc des systèmes protecteurs, et même pionniers au sens où ils devraient constituer un exemple ou un modèle pour les autres branches.
Comme cela nous a été dit lors des auditions en commission, nous sommes passés, en très peu de temps, pour les industries électriques et gazières, de 15 ans de service actif pour pouvoir partir à 55 ans à 17 ans de service actif pour partir à 57 ans, puis à 17 ans pour partir à 59 ans.
On nous parle du C2P, mais, comme je l’ai dit tout à l’heure au sujet de la RATP, le C2P permet un départ anticipé deux ans avant ! Avec un âge légal à 64 ans, on va passer d’un départ à 59 ans, reconnaissant 17 ans de pénibilité et d’exposition aux risques, à un départ à 62 ans.
En outre, le taux d’invalidité permanente, contenu jusqu’alors par la prévention que permettait le départ précoce, rejoindra celui du régime général.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Raymonde Poncet Monge. Il y aura donc 20 % d’invalides permanents à 62 ans.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 3932 rectifié.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Les retraités des IEG, qui représentent un peu moins de 1 % de l’ensemble des retraités, ont un régime qui n’a jamais été tributaire ni de l’État ni des autres régimes. Pourquoi cet acharnement à le supprimer ?
Pour des raisons financières ? Non, car le régime est excédentaire.
Pour des raisons d’équité ? Non, car le régime participe au financement d’autres régimes, qui comptent moins d’actifs que de retraités, comme ceux des agriculteurs et des artisans.
En raison de la contribution tarifaire d’acheminement, censée coûter 1,7 milliard d’euros aux usagers ? Pourtant, cette contribution est une imposition de toute nature, et non une aide d’État qui se substitue – c’est le choix qui a été fait lors de la libéralisation du secteur en 2004 par le gouvernement Raffarin – à la part du tarif d’électricité et de gaz naturel, qui a assuré son financement, la part des droits spécifiques passés correspondant aux activités régulées. La CTA est acquittée sur le prix global par le client final, donc par le contribuable.
Comment pouvez-vous garantir la pérennité du régime, alors que nous savons que la fameuse clause du grand-père conduira à appliquer le régime général à tout nouvel entrant, avec par conséquent de moins en moins de cotisants ? Ce régime ne pourra pas survivre.
Aucune des raisons que vous invoquez ne tient donc la route.
Ne nous y trompons pas : aujourd’hui comme en 2004, la suppression du régime des IEG est à chercher dans votre volonté de démantèlement du service énergétique français, c’est-à-dire dans vos intentions de dépeçage et de dislocation d’EDF via un plan Hercule qui peut revenir à chaque instant, malgré l’opposition unanime des organisations syndicales et de ceux qui défendent un service à 100 % public.
Engie, entreprise privée, n’a jamais caché son rêve de sortir du statut national. C’est la seule justification de l’article 1er, que ce soit pour les IEG ou la RATP.
M. le président. L’amendement n° 3964 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 15 et 16
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Le régime des électriciens et gaziers est profondément lié à l’importance que notre pays accordait à la question énergétique et à la volonté de bâtir des entreprises publiques puissantes, capables de relever les défis de l’électrification de notre pays de l’après-guerre.
Ce régime s’est consolidé au fil du temps pour garantir aux électriciens et aux gaziers un haut niveau de droits, correspondant aux contraintes et à la pénibilité de leur mission.
On parle ici de femmes et d’hommes profondément engagés dans le service public de l’électricité et du gaz.
Aujourd’hui, nous sommes de nouveau face à des défis majeurs : relance du nucléaire en France, construction de nouveaux EPR, nécessité de renforcer nos réseaux de distribution pour faire face à l’essor des énergies renouvelables, déploiement au niveau industriel du véhicule électrique… La liste est loin d’être exhaustive.
Pour assurer cette transition énergétique, il faudra des agents de plus en plus qualifiés. Il sera nécessaire de consolider les compétences et les savoir-faire et de recréer un tissu industriel de qualité. En effet, aujourd’hui, le régime spécial de retraite des IEG fait partie d’un pacte global, qui reflète notamment un certain nombre d’astreintes et de difficultés au travail.
Dès lors, quelle erreur historique que de vouloir supprimer un régime qui est aussi un vecteur d’attractivité dans un secteur essentiel ! La suppression du régime spécial des IEG ne traduit, en vérité, que votre volonté de remettre en cause leur statut et d’achever, par là même, les missions de service public.
En effet, la caisse des IEG, comme nous l’avons dit à plusieurs reprises, était excédentaire. Elle a largement contribué à alimenter les comptes du régime général ces dernières années.
Les électriciens et les gaziers cotisent à un niveau supérieur et se constituent mutuellement des droits à la retraite correspondant à leur situation. C’est un modèle vers lequel il faut se tourner. Il s’agit, à nos yeux, non pas de régimes spéciaux, mais, je le réaffirme, de régimes pionniers.
Nous sommes attachés à la défense de ces conquis sociaux. C’est pourquoi nous demandons la suppression des alinéas 15 et 16.
M. le président. L’amendement n° 3937 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
avant une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après accord des organisations syndicales et patronales
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Le sujet dont nous débattons est grave. En effet, nous discutons non pas d’un régime de retraite, mais du pacte que nous allons passer pour l’avenir, ou que nous allons rompre, avec l’ensemble des salariés des industries électriques et gazières.
Nous savons tous que la sécurité de l’approvisionnement énergétique du pays est de nouveau une question d’avenir et qu’elle est sur la table. Il va falloir procéder à la plus grande mutation de notre système électrique depuis la construction du parc électronucléaire et du parc hydraulique de la France.
Soit nous sommes capables de réussir cette mutation, et nous répondrons possiblement aux enjeux d’industrialisation, de souveraineté et d’urgence climatique, avec du nucléaire et avec des EnR, soit nous n’en sommes pas capables, et alors rien ne sera possible. Or nous n’y parviendrons pas sans une mobilisation générale et durable de l’ensemble des professions IEG dans le pays.
Votre projet fait exactement l’inverse : il propose, au travers de cette question de régime de retraite, de rompre le pacte national qui a été passé avec les salariés des IEG depuis la Libération. Et il est en train de provoquer la plus grande grève du secteur depuis des années – pendant que nous discutons ici, elle est en train de s’étendre dans tout le pays –, pour s’opposer au projet que vous voulez passer en force.
Ce pacte, vous l’avez déjà beaucoup abîmé. La question qui est devant nous est de savoir si vous allez l’achever ou si, au contraire, nous allons le relancer pour l’étendre à toutes les professions IEG d’aujourd’hui et à celles que nous devrons embaucher et former pour construire la réussite du nouveau projet énergétique pour la France. (Mmes Cathy Apourceau-Poly, Laurence Cohen et Émilienne Poumirol applaudissent.)
M. le président. L’amendement n° 3016 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2050
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Monsieur le président, nous avions envie de continuer le débat – encore qu’il n’y en ait pas vraiment… – sur les régimes spéciaux, notamment sur celui des gaziers. C’est pourquoi nous avions décliné un certain nombre d’amendements, visant à proposer différentes dates.
Toutefois, comme il nous semble que notre parole a été entendue sur le sujet dans cet hémicycle, nous considérons que cet amendement, ainsi que les suivants, sont défendus.