M. Marc Fesneau, ministre. L’article 3 a fait l’objet de nombreuses réflexions et débats, que ce soit en commission, dans cet hémicycle ou à l’Assemblée nationale.
Vous avez raison de souligner le rôle du médiateur. Notre désaccord porte sur le caractère obligatoire ou non de la médiation, étant entendu que, par définition, une médiation repose sur la volonté des deux parties, qui décident d’un commun accord de se mettre autour de la table pour trouver une voie de règlement de leur différend. Si elle devient obligatoire, elle change alors de nature.
Il me semble que vous aviez trouvé un bon point d’équilibre. Je rejoins la présidente de la commission sur le fait que nous cheminons, et que, dans cette quête du Graal – je reprends le terme qu’elle a employé –, il nous faut tendre autant que possible vers l’objectif que nous nous sommes assigné, à savoir, comme vous l’avez dit, monsieur Gremillet, acter la fin des négociations au 1er mars afin d’entrer dans un nouveau processus. Je le répète : c’est ce que permet la rédaction à laquelle est parvenue la commission.
Mme la présidente. Mes chers collègues, il nous reste quinze amendements à examiner. Je propose donc que nous prolongions nos travaux jusqu’à vingt heures trente environ afin d’achever la discussion de ce texte.
Il n’y a pas d’observation ?…
Il en est ainsi décidé.
La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Monsieur le ministre, je précise que nous ne rendons la médiation obligatoire que si demeure un litige et qu’une des deux parties décide de saisir le juge. Dans le mécanisme que nous proposons, nous espérons qu’un accord interviendra au cours de la période d’un mois. Dans le cas d’une grosse fâcherie, si l’un des deux décide de saisir le juge, alors l’appel au médiateur est obligatoire au préalable.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Et en tenant compte des conditions économiques du marché !
Mme la présidente. En conséquence, l’article 3 est ainsi rédigé, et l’amendement n° 25 n’a plus d’objet.
Article 3 bis A
L’article L. 441-6 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux deux premiers alinéas du présent article, pour les produits mentionnés au I de l’article L. 441-4, le non-respect de l’échéance du 1er mars prévue au IV de l’article L. 441-3 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 200 000 € pour une personne physique et 1 000 000 € pour une personne morale. Le maximum de l’amende encourue est porté à 400 000 € pour une personne physique et 2 000 000 € pour une personne morale en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. » – (Adopté.)
Article 3 bis B (nouveau)
Après le I de l’article L. 441-3 du code de commerce, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Les obligations réciproques en matière de logistique auxquelles s’engagent le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de service, notamment le montant des pénalités mentionnées à l’article L. 441-17 et les modalités de détermination de ce montant, font l’objet d’une convention écrite, distincte de celle mentionnée au I. Les dispositions du IV du présent article relatives à l’échéance du 1er mars ne s’appliquent pas à cette convention.
« L’arrivée à échéance de la convention mentionnée au premier alinéa du présent I bis, ne saurait entraîner la résiliation automatique, le cas échéant, de la convention écrite mentionnée au I. » – (Adopté.)
Article 3 bis
I. – Le code de commerce est ainsi modifié :
1° L’article L. 441-17 est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa du I est ainsi rédigé :
« Les pénalités infligées au fournisseur par le distributeur sont proportionnées au préjudice subi au regard de l’inexécution d’engagements contractuels, dans la limite d’un plafond équivalent à 2 % de la valeur des produits commandés relevant de la catégorie de produits au sein de laquelle l’inexécution d’engagements contractuels a été constatée. » ;
b) Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Aucune pénalité logistique ne peut être infligée pour l’inexécution d’engagements contractuels survenue plus d’un an auparavant. » ;
c) La première phrase du quatrième alinéa du même I est ainsi rédigée : « Lorsque le distributeur, conformément au premier alinéa du présent article, informe le fournisseur de l’application d’une pénalité logistique en raison d’une inexécution d’engagement contractuel, il apporte en même temps, par tout moyen, la preuve du manquement constaté et celle du préjudice subi. » ;
d) Il est ajouté un III ainsi rédigé :
« III. – Le ministre chargé de l’économie ou le ministre chargé de l’agriculture peuvent, en cas de situation exceptionnelle, extérieure aux distributeurs et fournisseurs, affectant gravement les chaînes d’approvisionnement dans un ou plusieurs secteurs, suspendre par arrêté l’application des pénalités logistiques prévues par les contrats conclus en application du présent titre entre les distributeurs et le ou les fournisseurs intervenant dans ces secteurs et concernés par ladite situation, pour une durée maximale de six mois renouvelable. » ;
2° Les deuxième et troisième phrases de l’article L. 441-18 sont remplacées par une phrase ainsi rédigée : « Elles sont proportionnées au préjudice subi au regard de l’inexécution d’engagements contractuels, dans la limite d’un plafond équivalent à 2 % de la valeur, au sein de la commande, de la catégorie de produits commandés concernée par l’inexécution desdits engagements. »
II. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° L’article L. 631-24 est complété par un IX ainsi rédigé :
« IX. – Le contrat peut prévoir la fixation de pénalités infligées au producteur par l’acheteur en cas d’inexécution d’engagements contractuels. Il prévoit une marge d’erreur suffisante au regard du volume de livraisons prévues par le contrat. Un délai suffisant doit être respecté pour informer l’autre partie en cas d’aléa.
« Les pénalités infligées au producteur par l’acheteur sont proportionnées au préjudice subi au regard de l’inexécution d’engagements contractuels, dans la limite d’un plafond équivalent à 2 % de la valeur, au sein de la commande, de la catégorie de produits commandés concernée par l’inexécution desdits engagements. » ;
2° Après le 6°de l’article L. 631-25, il est inséré un 7°ainsi rédigé :
« 7° Le fait, pour un acheteur, de facturer au producteur des pénalités logistiques en méconnaissance des dispositions du IX de l’article L. 631-24. »
Mme la présidente. L’amendement n° 14 rectifié, présenté par MM. Tissot, Mérillou, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau, Pla et Redon-Sarrazy, Mmes S. Robert, Conconne, Bonnefoy, Espagnac et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Après le premier alinéa du I, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À titre expérimental, pour une période de deux ans à compter de la promulgation de la loi n° du visant à sécuriser l’approvisionnement des Français en produits de grande consommation, les taux de service mensuels sont fixés à 97 % pour les promotions et les produits hors promotions. À l’issue de cette période, le Gouvernement présente au Parlement un rapport dressant un bilan de cette expérimentation afin d’évaluer l’opportunité de sa généralisation. »
La parole est à M. Serge Mérillou.
M. Serge Mérillou. Cet amendement vise à diminuer les taux de service mensuel pouvant donner lieu à l’application d’amendes infligées par les distributeurs aux fournisseurs.
Les sénateurs du groupe socialiste estiment en effet que la situation sanitaire, économique et géopolitique que nous connaissons depuis 2020 engendre de forts dysfonctionnements dans la chaîne d’approvisionnement, de transport et de distribution.
En conséquence, les taux retenus dans le texte issu de l’Assemblée nationale de 98,5 % pour les produits « fond de rayon » et de 99 % pour les produits sous promotion semblent trop élevés.
La position de la rapporteure diffère sur ce point de celle de la majorité sénatoriale, Mme Loisier estimant que les taux doivent relever de la liberté contractuelle des parties. Or de nombreux acteurs de la chaîne demandent le maintien de ces taux dans la loi, mais à des niveaux revus à la baisse.
Nous considérons que, sur ce sujet, il faut faire preuve de précaution et mener des évaluations. C’est pourquoi nous proposons d’expérimenter une baisse des taux de service mensuels à 97 % pendant deux ans, à l’issue desquels un bilan sera réalisé pour en évaluer la pertinence et nous assurer qu’elle ne lèse aucune des parties.
Il s’agit de faire preuve d’objectivité, sur la base d’une expérimentation rendue nécessaire par la situation économique actuelle.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Nous avons eu, mon cher collègue, ce débat en commission. Faut-il ou non fixer dans la loi un taux de service maximum ? Depuis la loi Égalim 2, nous avons considéré que non. Je note d’ailleurs que les distributeurs ne sont pas les seuls à s’y opposer : bon nombre d’industriels que nous avons auditionnés sont du même avis.
Il est délicat pour le législateur de fixer lui-même le bon taux de service. Cela dépend d’énormément de facteurs – la situation internationale, le type de produits, la taille du fournisseur, la période de l’année, etc. Il est impossible de trouver un taux unique qui soit juste pour les dizaines de milliers de références qu’on trouve dans un supermarché.
En outre, si nous fixons dans la loi un taux maximum, il risque très rapidement de devenir la norme. Dès lors, ce qui serait le comble, le distributeur serait autorisé à infliger des pénalités à tout fournisseur qui n’atteindrait pas ce taux, alors même que nombre d’entre eux nous rapportent avoir du mal à atteindre les 75 % – je rappelle que nous discutons d’un taux à 97 %.
En outre, il est prévu dans cet article 3 bis que le Gouvernement puisse suspendre les pénalités logistiques en cas de crise affectant les chaînes d’approvisionnement, que ce soit dans un seul secteur ou dans tous.
Pour toutes ces raisons, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Marc Fesneau, ministre. Monsieur le sénateur, nous comprenons et partageons l’objectif que vous cherchez à atteindre, mais cette mesure aurait un effet contre-productif. En effet, elle légaliserait et automatiserait toutes les clauses fixant un taux de service à 97 %, alors même que le droit actuellement applicable prévoit que les taux de service doivent être adaptés.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 40, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer les mots :
informe le fournisseur de l’application d’une
par les mots :
transmet au fournisseur une facture de
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Marc Fesneau, ministre. Il ne s’agit pas, selon nous, d’un amendement rédactionnel. Remplacer les mots « informe le fournisseur de l’application d’une » par « transmet au fournisseur une facture de »…
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Bien essayé !
M. Marc Fesneau, ministre. … n’est pas sans conséquence. Cela impose l’émission d’une facture de pénalité logistique, ce qui détermine les modalités et enclenche l’obligation de paiement. La rédaction actuelle prévoit une simple information laissant la possibilité de contester l’application de celle-ci, mais pas par le mécanisme de la facture.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. Laurent Duplomb. Nous le voterons quand même !
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Cet amendement vise à ce que, au moment où le distributeur transmet la facture au fournisseur, il établisse, concomitamment, la preuve du manquement justifiant la pénalité. Peut-être devons-nous en revoir la rédaction, mais je pense que nous nous entendons sur l’objectif, qui est que la facture accompagne la demande du versement.
Mme la présidente. L’amendement n° 34, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« III. – Le Gouvernement peut, en cas de crise d’une ampleur exceptionnelle affectant gravement la chaîne d’approvisionnement, suspendre l’application des pénalités logistiques prévues par les contrats conclus en application du présent titre, par décret en Conseil d’État, pour une durée qui ne peut excéder six mois. » ;
La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre. Cet amendement vise à réintroduire le mécanisme voté par l’Assemblée nationale permettant au Gouvernement de suspendre, en cas de crise d’une ampleur exceptionnelle, l’application des pénalités logistiques.
Il ne vous a pas échappé qu’il ne s’agit pas d’un pouvoir anodin, compte tenu de l’ampleur nationale de la suspension des pénalités logistiques. C’est pourquoi il est nécessaire de procéder par décret en Conseil d’État, dont la consultation me semble indispensable pour veiller à la stricte proportionnalité d’un tel dispositif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Depuis la loi Égalim 2, le montant des pénalités logistiques tend à diminuer – ce dont nous nous réjouissons. Le fait de prévoir leur possible suspension en cas de crise grave, donc de manière exceptionnelle, n’aurait pas de conséquences considérables. Par conséquent, un arrêté doit suffire à le faire.
En outre, vous revenez sur les évolutions apportées par la commission en supprimant la possibilité que cette suspension soit décidée pour certains secteurs. Autrement dit, vous ne l’autorisez qu’à l’échelle globale et vous supprimez la possibilité de renouveler la période de suspension.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Monsieur le ministre, je vais vous faire plaisir : je soutiens votre amendement pour la simple et bonne raison qu’il traduit la réalité de ce que nous avons vécu pendant la crise. Je pense, madame la rapporteure, que vous devriez vous raviser, parce que c’est exactement ce que nous avions demandé au sein de la commission des affaires économiques pour faire face à la crise de la covid-19.
Il faut que nous votions cet amendement, car ce mécanisme permet de traiter des situations dans lesquelles il n’y a pas de logistique possible, ce qui rend totalement inadmissible qu’on applique des pénalités logistiques. On ne pourrait pas comprendre que quelqu’un qui est empêché de faire ses livraisons en raison de la covid-19, des aléas climatiques ou d’autres circonstances, soit sanctionné. Cela reviendrait à dire à quelqu’un : « Vous n’avez pas pu livrer parce que la route était fermée, mais nous vous appliquons quand même des pénalités logistiques ! » Ce n’est pas entendable.
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Monsieur Duplomb, il me semble que le dispositif proposé par Mme la rapporteure vous donne pleine satisfaction : en se voyant octroyer la possibilité de suspendre par arrêté, et non plus par décret en Conseil d’État, l’application des pénalités, le Gouvernement pourra agir plus rapidement, étant entendu que cette mesure de suspension pourra être renouvelée et qu’elle pourra être sélective – par exemple, s’appliquer aux fruits et légumes et non pas aux boissons.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre. Cela fera certainement l’objet de discussions au cours de la navette parlementaire. Nous proposons cette mesure, car nous estimons que nous devons sécuriser ce mécanisme sur le plan juridique. Si nous prenons un arrêté, nous pouvons être à peu près certains que les distributeurs argueront auprès du Conseil d’État qu’il s’agit d’une mesure disproportionnée.
Prendre un décret en Conseil d’État – et nous pouvons, madame la présidente, le faire dans des délais restreints – évite cela, et rend la mesure immédiatement opérationnelle. L’expérience doit nous instruire : en l’occurrence, elle nous instruit que, en l’absence de sécurité juridique, les distributeurs ne manqueront pas de nous entraîner dans des procédures sur des questions de pénalités logistiques.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 34.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.)
Mme la présidente. L’amendement n° 35, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 11 à 16
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre. Cet amendement vise à supprimer l’encadrement des pénalités logistiques pour les contrats relevant du code rural et de la pêche maritime.
En effet, la vente d’un produit agricole par un agriculteur à son premier acheteur ne soulève pas les mêmes enjeux que ceux qu’on observe dans les relations entre fournisseurs et distributeurs.
De plus, la définition de règles générales applicables aux contrats régis par l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime en matière de pénalités logistiques ne paraît pas compatible avec la diversité des pratiques observées dans les différentes filières agricoles, notamment concernant les modalités de livraison des produits, et risquerait de déséquilibrer inutilement les relations entre les producteurs et leurs premiers acheteurs.
En outre, il me semble que la question des pénalités logistiques concerne très marginalement ces relations, mais principalement celles entre fournisseurs et distributeurs.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Nous sommes d’accord, les enjeux sont différents selon le type de relations. Toutefois, monsieur le ministre, n’existe-il pas un vide juridique ? Si un abus était commis à l’encontre d’un producteur, qu’en serait-il ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre. S’appliqueront les pénalités contractuellement fixées entre le fournisseur et le producteur. L’encadrement des pénalités logistiques applicables aux relations entre fournisseurs et grande distribution demeure.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3 bis, modifié.
(L’article 3 bis est adopté.)
Article 3 ter A (nouveau)
Le code de commerce est ainsi modifié :
1° L’article L. 441-17 est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – Le présent article n’est pas applicable aux relations commerciales avec les grossistes au sens du II de l’article L. 441-4. » ;
2° L’article L. 441-18 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le présent article n’est pas applicable aux relations commerciales avec les grossistes au sens du II de l’article L. 441-4. » – (Adopté.)
Article 3 ter
L’article L. 441-19 du code de commerce est complété par six alinéas ainsi rédigés :
« Chaque distributeur communique au directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou à son représentant nommément désigné, au plus tard le 31 décembre de chaque année, les montants de pénalités logistiques qu’il a infligées à ses fournisseurs au cours des douze derniers mois, ainsi que les montants effectivement perçus. Il détaille ces montants pour chacun des mois.
« Chaque distributeur communique au directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou à son représentant nommément désigné, avant le 31 décembre 2023, les montants de pénalités logistiques qu’il a infligées à ses fournisseurs respectivement en 2021 et en 2022, en les détaillant mois par mois, ainsi que les montants effectivement perçus.
« Chaque fournisseur communique au directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou à son représentant nommément désigné, au plus tard le 31 décembre de chaque année, les montants de pénalités logistiques qui lui ont été infligés par ses distributeurs au cours des douze derniers mois, ainsi que ceux qu’il a effectivement versés.
« Le Gouvernement transmet chaque année au président de la commission chargée des affaires économiques de chaque assemblée parlementaire une synthèse des communications prévues aux deuxième à quatrième alinéas du présent article, qui ne peut être rendue publique. Il précise, le cas échéant, les manquements aux dispositions de l’article L. 441-17 constatés par le ministre chargé de l’économie ainsi que les actions mises en œuvre pour les faire cesser.
« Tout manquement aux deuxième, troisième et quatrième alinéas est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 500 000 € pour une personne morale.
« Le maximum de l’amende encourue est porté à 150 000 € pour une personne physique et à 1 000 000 € pour une personne morale en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. »
Mme la présidente. L’amendement n° 27, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le Gouvernement transmet chaque année à la commission chargée des affaires économiques de chaque assemblée parlementaire une synthèse des communications prévues aux deuxième et quatrième alinéas du présent article. Il précise l’impact des mesures proposées, secteur par secteur, en considérant en particulier les problématiques des petites et moyennes entreprises et des filières de l’agriculture biologique. Il détaille, le cas échéant, les manquements aux dispositions de l’article L. 441-17 constatés par le ministre chargé de l’économie ainsi que les actions mises en œuvre pour les faire cesser. Il effectue, le cas échéant, des propositions réglementaires permettant de renforcer l’encadrement des pénalités logistiques, et évalue une potentielle suppression de celles-ci.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à renforcer la portée de l’article 3 ter en réintroduisant dans le rapport l’évaluation d’une interdiction des pénalités logistiques dans le cas où l’encadrement serait insuffisant pour empêcher les abus, qui demeurent très nombreux.
De plus, nous proposons qu’une analyse des effets de ces pénalités sur les petites et moyennes entreprises, qui sont les plus touchées par cette pratique, figure dans le rapport. L’évaluation portera également sur la filière bio, que le mode d’approvisionnement, local, expose à des ruptures. Les spécificités vertueuses de cette filière ne sont pas prises en compte par les distributeurs, qui se voient appliquer des pénalités injustifiées.
Par ailleurs, cet amendement tend à ce que la synthèse du rapport soit remise au Parlement et qu’elle soit rendue publique. La transparence est en effet de mise sur les pratiques illégales et les contournements de la législation par les distributeurs. Dans son dernier rapport, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a ainsi estimé que quatre grands distributeurs se rendaient coupables de pratiques abusives, sans que leur identité soit révélée au public. Or cette information aurait éclairé les citoyens dans leurs choix de consommation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Mon cher collègue, cet amendement pose plusieurs difficultés.
Premièrement, il vise à ce que la synthèse des données chiffrées soit transmise non pas uniquement au président de chacune des commissions des affaires économiques des assemblées, mais à l’ensemble du Parlement, ce qui est délicat s’agissant de données relevant du secret des affaires.
Deuxièmement, il tend à supprimer totalement le principe même des pénalités logistiques, ce à quoi nous n’adhérons pas. Les pénalités doivent être maintenues lorsque le non-respect d’un contrat entraîne un préjudice à l’encontre d’une partie.
Troisièmement, vous proposez que cet exercice complet soit réalisé chaque année, ce qui me semble excessif.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Marc Fesneau, ministre. Monsieur le sénateur, si nous comprenons votre volonté d’encadrer les pénalités, il n’est pas nécessaire, pour ce faire, de supprimer les pénalités logistiques ; nous devons trouver un point d’équilibre.
Tout d’abord, la question de la remise d’un rapport est traitée à l’article 3 ter.
Ensuite, si l’idée est bien de sortir des pratiques abusives de pénalités logistiques, nous ferions une erreur en privant totalement, au sein d’une relation contractuelle, une entreprise qui doit s’approvisionner de la possibilité de recourir à celles-ci.
Ainsi, pour les mêmes raisons que Mme la rapporteure, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.