M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Gold, j’associe à la réponse que je m’apprête à vous faire les deux autres membres du Gouvernement avec lesquels je travaille étroitement sur ce dossier, Agnès Pannier-Runacher et Olivier Klein.
Chaque semaine, 25 000 dossiers sont traités en moyenne par l’Agence nationale de l’habitat (Anah). Depuis le lancement de MaPrimeRénov’, plus de 1,5 million de dossiers ont été accompagnés.
Compte tenu de cette masse de dossiers, il existe naturellement des axes d’amélioration, mais, avant de vous répondre sur ce sujet, je tiens à dire que beaucoup de trains arrivent à l’heure – on en entend peu parler… (M. Jérôme Bascher s’exclame.)
Quand la Défenseure des droits s’est penchée sur cette question, elle a conclu qu’environ 2 % des dossiers posaient problème. Or il arrive assez régulièrement que des dispositifs publics, que ce soit à l’échelon national ou local, aient des pourcentages de ce type plus élevés…
Néanmoins, nous devons répondre à deux enjeux pour MaPrimeRénov’ : rendre le dispositif plus efficace et plus fluide. Nous travaillons de ce point de vue sur plusieurs pistes.
En ce qui concerne l’efficacité, nous mettrons en place, à partir du 1er septembre prochain, Mon Accompagnateur Rénov’, qui devrait faciliter l’accès au dispositif. Nous voulons aussi tendre vers un reste à charge zéro pour les Français les plus modestes, ce qui devrait inclure une partie des personnes concernées par l’illectronisme.
En ce qui concerne la durée de traitement des dossiers, nous devons éviter qu’une simplification extrême du dispositif ne se traduise par des fraudes, des abus, des effets de bord – je pense que personne ici ne le souhaite –, et nous devons mieux associer les artisans – vous avez eu raison d’évoquer ce point, monsieur le sénateur. Les artisans doivent être pleinement acteurs du dispositif, ce qui suppose de raccourcir les délais.
En moyenne, les délais sont de cinq semaines : deux pour la demande de subvention et trois pour le paiement. Nous devons traiter en priorité les dossiers qui s’écartent de cette moyenne. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Éric Gold, pour la réplique.
M. Éric Gold. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, mais je vous assure que ce problème touche nombre de nos concitoyens, souvent – malheureusement ! – les plus fragiles. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
réforme des retraites (ii)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guillaume Gontard. Madame la Première ministre, lors de ses vœux, en 2021, le Président de la République louait les première, deuxième et troisième lignes qui avaient tenu notre pays durant la pandémie. Parmi ces engagés, ces solidaires, se cachent votre sœur, votre voisin, vos amis, des milliers d’anonymes, nous disait-il.
Marie, infirmière, Fouad, animateur, Rosalie, vendeuse, Thibaud, agent d’entretien, Florence, auxiliaire de vie, etc. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) : ces héros de notre République étaient hier dans la rue, ils y seront samedi et les jours suivants, ils ne lâcheront pas !
Ils ne lâcheront pas, car ils ne comprennent pas votre acharnement à leur prendre deux années de leur vie. (Mêmes mouvements.)
Ils ne lâcheront pas, car ils ne comprennent pas vos contradictions.
Ils ne lâcheront pas, car ils ne comprennent pas le sens de votre obstination.
Et je l’avoue, madame la Première ministre, je ne vous comprends pas non plus : rien de tout cela ne vous ressemble.
Vous nous disiez lors de votre déclaration de politique générale : « Les Français ont élu une Assemblée sans majorité absolue. Ils nous invitent à des pratiques nouvelles, à un dialogue soutenu et à la recherche active de compromis. »
Les pratiques nouvelles ? Le 47-1 ! Le dialogue ? Le 49.3 ! Les compromis ? « C’est non négociable » ! En résumé : déni, mépris !
Madame la Première ministre, vous savez que l’on ne gouverne pas contre le peuple.
Cessez d’appliquer une consigne que vous savez absurde, cessez de vouloir passer en force, cessez d’ignorer les syndicats, les parlementaires et le peuple, cessez d’ignorer une société qui change !
Marie, Fouad, Rosalie, sont fatigués, mais ils ne lâcheront pas.
Ils ne lâcheront pas, parce que leur combat est juste – et vous le savez.
Une seule question les taraude : quand ? Quand allez-vous retirer ce projet de loi aussi inutile qu’injuste ? (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le sénateur Guillaume Gontard, une fois de plus, vous avez multiplié les phrases définitives et les caricatures… (Exclamations sur les travées des groupes GEST et CRCE.)
Alors, une fois de plus, dans un esprit de responsabilité, je veux vous rappeler les faits : le nombre de personnes qui travaillent et qui cotisent diminue…
M. Pierre Laurent. Et les exonérations de cotisations ?
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. … par rapport au nombre de retraités.
Dès lors, si nous ne faisons rien, les déficits vont se creuser, menaçant la pérennité de notre système de retraite par répartition. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
La question qui se pose au sujet de cette réforme est la suivante : voulons-nous, oui ou non, conserver notre système de retraite par répartition ? (Oui ! sur des travées du groupe SER.)
M. Fabien Gay. Vous étiez pour la retraite à points !
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Pour y parvenir, il est vrai que nous demandons un effort aux Français. C’est le seul chemin pour assurer l’équilibre de nos retraites. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Ce chemin, le Sénat ne le découvre pas. Il y a en effet de réelles convergences entre notre projet et les travaux de votre assemblée, illustrées par votre adoption répétée, depuis plusieurs années, d’amendements tendant à reporter à 64 ans l’âge légal de départ à la retraite. (Exclamations sur les travées du groupe SER, où l’on pointe l’autre côté de l’hémicycle.)
M. Patrick Kanner. Ce n’est pas nous !
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. En revanche, monsieur le président Gontard, je mesure parfaitement ce que travailler plus longtemps représente pour beaucoup de Français. C’est pourquoi nous avons mené, pendant plusieurs semaines, des concertations avec les organisations syndicales et patronales, ainsi qu’avec les groupes parlementaires. (Exclamations sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
Mme Monique Lubin. Pour quel résultat ?
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Je le redis : aux termes de notre projet, quatre Français sur dix – ceux qui ont commencé à travailler tôt, ceux qui exercent des métiers pénibles – n’auront pas à travailler jusqu’à 64 ans.
Alors, je ne doute pas que Fouad, Marie et Rosalie font partie de ces Français qui n’auront pas à travailler jusqu’à 64 ans.
Or que proposez-vous à ces Français, monsieur Gontard ? Proposez-vous une baisse drastique des pensions, fruits d’une vie de travail ? (Exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE.) Ou bien proposez-vous une augmentation des impôts et des cotisations, ce qui conduirait inéluctablement à une baisse du pouvoir d’achat et à une hausse du chômage ! (Mêmes mouvements.)
M. Pascal Savoldelli. Et l’égalité salariale ?
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Alors, monsieur Gontard, vous vous trompez de cible, car les plus riches auront toujours une retraite, même sans notre réforme. (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.) En revanche, pour les classes moyennes, pour les plus modestes, ce serait plus de chômage et moins de pouvoir d’achat. Ce que nous proposons, c’est le plein emploi et de meilleures retraites !
Monsieur Gontard, je l’ai dit et je le répète : notre projet n’est pas figé, il a d’ailleurs déjà évolué, grâce aux concertations menées avec les organisations syndicales et patronales, avec les groupes parlementaires… (Huées sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
M. Pascal Savoldelli. Quel mensonge !
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Il évoluera et s’enrichira encore grâce au débat parlementaire.
Certes, je sais que la dirigeante de votre parti a appelé à faire du Parlement une « zone à défendre », une ZAD, mais j’ai confiance dans la responsabilité de chacun pour offrir aux Français un débat de bonne tenue, un débat d’idées, un débat respectueux. Je ne doute pas que le Sénat y sera particulièrement attentif. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.
M. Guillaume Gontard. Madame la Première ministre, tout d’abord, ce sont nos retraites qui sont une zone à défendre ! Oui, il y a d’autres solutions ! Il suffit d’écouter, d’écouter les syndicats, d’écouter les parlementaires. Il suffit de regarder… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
De grâce, ne nous dites pas aujourd’hui qu’il n’y a pas d’argent dans notre pays, que ce n’est pas possible aujourd’hui. Oui, on peut taxer le capital et les dividendes ! Oui, il y a d’autres possibilités ! (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
fermetures de classes dans les zones rurales (i)
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Joël Guerriau. Monsieur le ministre, l’éducation nationale vient d’informer de nombreux maires ruraux de projets de fermeture de classes, sans qu’ils aient été préalablement consultés. À titre d’exemple, en Loire-Atlantique, 29 communes rurales ont une épée de Damoclès au-dessus du toit de leur école.
Les écoles rurales sont le théâtre d’un drame qui se joue année après année. Les fermetures de classes pénalisent les familles, obligées de réaliser de plus longs trajets. Elles privent les petites communes d’un élément central de leur vitalité et de leur attractivité.
Le Président de la République avait assuré, en 2019, qu’aucune classe ne fermerait sans l’accord du maire de la commune. Récemment, votre ministère s’est engagé à mieux prendre en compte les contraintes territoriales.
La méthode actuelle de gestion de la carte scolaire n’est pas adaptée aux réalités du monde rural. Les décisions d’ouverture ou de fermeture de classes ne sont-elles pas prises, chaque année, un peu trop tôt pour la rentrée suivante ?
Il est regrettable de ne pas se projeter à moyen terme, alors que de petites communes consentent de lourds investissements financiers pour mettre aux normes des locaux scolaires. Les élus naviguent à vue et ont le sentiment que le nombre de professeurs disponibles joue le rôle de variable d’ajustement.
Enfin, le système actuel pâtit d’effets de seuil. Il suffit d’un élève manquant pour fermer une classe ; il en faut bien plus pour en ouvrir une. Au-delà d’une logique purement comptable, liée à la baisse démographique, nos petites collectivités ont besoin de leurs écoles.
Dès lors, monsieur le ministre, comment comptez-vous aider nos communes rurales, tout en prenant en considération le point de vue de leurs maires ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Pap Ndiaye, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Guerriau, votre question s’inscrit dans un contexte démographique général, celui d’une baisse accélérée des effectifs scolaires : il y aura 500 000 élèves de moins dans les cinq années à venir, entre 90 000 et 100 000 de moins dès la rentrée 2023.
Cette situation est certes regrettable ; elle conduit à des ajustements. Le travail complexe qui est mené actuellement aboutira, en août prochain, à une stabilisation de la carte scolaire pour la rentrée 2023. Notre ligne directrice est très simple : nous nous adaptons aux réalités démographiques nationales, régionales et locales, tout en accordant une considération particulière à la situation des territoires ruraux.
Dans votre département de Loire-Atlantique, entre les rentrées scolaires de 2017 et de 2022, on a compté près de 2 500 élèves en moins, mais 326 postes d’enseignants ont été créés. À la rentrée 2023, on y comptera encore 743 élèves de moins.
Par ailleurs, dans la répartition des moyens au sein de ce département, les territoires ruraux font l’objet d’une attention soutenue. Sur les 33 écoles situées dans les communes les plus rurales, les plus éloignées, le nombre moyen d’élèves par classe est de 19, soit un nombre inférieur à la moyenne du département, qui est de 22,5. À ce stade, ces 33 communes rurales sont concernées par neuf fermetures de classes, mais également par quatre ouvertures.
Ce projet de carte scolaire, qui sera arrêté d’ici à la prochaine rentrée scolaire, fait l’objet d’ajustements qui ne sont pas clos : une première étape se tiendra en février, une deuxième en juin et une troisième en août ; je suis à votre disposition pour en reparler. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour la réplique.
M. Joël Guerriau. Merci de votre réponse, monsieur le ministre.
Je veux appeler votre attention sur la différence entre, d’une part, la logique à moyen terme qui s’exprime dans l’investissement consenti, en dépit de moyens très limités, par les petites communes rurales pour rénover, agrandir et sécuriser leurs écoles et, d’autre part, la logique annuelle selon laquelle on élabore un plan d’effectifs pouvant conduire à la fermeture d’une classe qu’il conviendrait de rouvrir l’année suivante ; pourtant, pour une telle réouverture, on exige beaucoup plus d’élèves que dans le cas de la fermeture.
Telle est ma préoccupation centrale, monsieur le ministre, et je vous remercie de bien vouloir entendre les maires ruraux, qui sont très inquiets à ce sujet. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
dispositif « zéro artificialisation nette »
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Je veux d’abord, au nom de Bruno Retailleau et de l’ensemble de notre groupe, exprimer de nouveau ici notre solidarité pleine et entière avec les populations de Turquie et de Syrie ; nous exprimons également notre reconnaissance vis-à-vis des secouristes français partis en soutien. C’est bien sûr notre devoir, mais c’est aussi notre honneur !
Mesdames, messieurs les ministres, vous avez tous une feuille de route et de grands objectifs à atteindre : pour vous, monsieur Le Maire, la réindustrialisation et de belles gigafactories ; pour vous, monsieur Fesneau, la souveraineté alimentaire et la sauvegarde de nos terres agricoles ; pour vous, monsieur Beaune, de nouvelles lignes à grande vitesse, des pistes cyclables, le canal Seine-Nord et d’autres projets encore ; pour vous, madame Couillard, la sauvegarde de la biodiversité et, naturellement, la protection des espaces naturels ; pour vous, monsieur Klein, les très ambitieux 400 000 logements supplémentaires par an ; pour vous, madame Pannier-Runacher, l’accélération des installations d’énergies renouvelables et de centrales nucléaires ; pour vous, monsieur le garde des sceaux, la construction de nouvelles prisons, ce qui est excellent ; enfin, pour vous, monsieur Béchu, le challenge de répondre aux conclusions de la modérément inspirée Convention citoyenne pour le climat et l’atteinte du fameux « zéro artificialisation nette ».
Toutefois, mesdames, messieurs les ministres, vous rendez-vous compte qu’au bout de vos priorités élaborées en silo se trouvent ceux qui doivent appliquer tout cela, en même temps, sur leur territoire, à savoir les élus locaux ?
Sur les maires, des priorités qui sont toutes prioritaires et des injonctions qui sont toutes contradictoires tombent comme à Gravelotte… (Rires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Franck Menonville applaudit également.) S’ils ne les exécutent pas toutes, ils sont sanctionnés !
Aucune planification territoriale n’est désormais possible tant les priorités sont nombreuses !
Gouverner, c’est prévoir, c’est choisir ses priorités, c’est donner un cap ; alors, madame la Première ministre – car c’est à vous que je pose cette question –, je voudrais savoir une chose : dans l’exécution des politiques publiques, quelles sont vos priorités ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, RDSE et INDEP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. (Huées sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Mesdames, messieurs les sénateurs, je comprends votre déception… (Mêmes mouvements.)
M. Jean-François Husson. Sors de ton silo !
M. Christophe Béchu, ministre. Je vais néanmoins tâcher de satisfaire aux exigences de Mme Primas, qui vient de résumer la feuille de route qu’Élisabeth Borne nous a donnée ; il aurait donc été contradictoire que Mme la Première ministre vous réponde, madame la sénatrice, en rappelant précisément la manière dont tout cela doit se faire dans le respect de la planification écologique, tâche qui, par ailleurs, lui a été confiée par le Président de la République. (Murmures persistants sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je vous répondrai d’abord que, parmi ces injonctions contradictoires, il y a ce qui relève du Gouvernement, mais aussi ce que la représentation nationale a pu décider, à une écrasante majorité dans cet hémicycle, en juin 2021, en votant la loi Climat et résilience, qui contient les dispositions relatives à l’objectif de zéro artificialisation nette.
M. Marc-Philippe Daubresse. Le problème, c’est le décret !
M. Christophe Béchu, ministre. Les échanges que nous avons sur ce sujet, de manière intense, portent à la fois sur la réécriture des décrets – elle est actée (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), elle interviendra le mois prochain – et sur certains points d’ordre législatif, qui ont d’ailleurs été mis en lumière par la proposition de loi déposée sur ce sujet par Valérie Létard et Jean-Baptiste Blanc. S’il n’y avait pas à corriger la loi que vous avez votée, nous ne serions pas en train d’avoir cette discussion ici !
Ainsi, il n’était pas prévu, dans la loi telle qu’elle a été votée par le Parlement, de compter à part les grands projets d’envergure nationale ; il n’était pas prévu, dans la loi telle qu’elle a été votée par le Parlement, de mettre en place une garantie rurale pour tenir compte des besoins qui peuvent s’exprimer en milieu rural ; il n’était pas prévu, dans la loi telle qu’elle a été votée par le Parlement, de considérer le solde.
Il y a des enjeux sectoriels très concrets qui ne sauraient être résolus par la poursuite de l’artificialisation au rythme que nous connaissons. Ce serait gager l’avenir que de prétendre que, au nom des feuilles de route sectorielles, nous devrions continuer à grignoter nos espaces agricoles et naturels. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Ce n’est pas ma question !
M. Christophe Béchu, ministre. Si vous demandez comment, précisément, l’on va s’y prendre pour développer des projets tout en tenant compte de l’enjeu de l’artificialisation,…
M. Marc-Philippe Daubresse. Vous verrez la crise du logement !
M. Christophe Béchu, ministre. … alors, vous recevrez la réponse dans quelques jours, quand le texte défendu par une large majorité de votre assemblée permettra d’engager le dialogue autour de points au sujet desquels Mme la Première ministre a déjà indiqué, lors du Congrès des maires, le 24 novembre dernier, que nous étions prêts à bouger et sur lesquels je travaille à l’heure actuelle avec Valérie Létard et Jean-Baptiste Blanc, avant ce rendez-vous que nous aurons dans cet hémicycle au mois de mars. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
fermetures de classes dans les zones rurales (ii)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Marc Boyer. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le ministre, sur la suppression de centaines de classes en milieu rural, vous avez répondu par des chiffres : diminution du nombre d’élèves, taux d’encadrement, ratios… En même temps, vous fixiez comme priorité l’amélioration des conditions d’enseignement et d’encadrement. En même temps, le candidat Macron – aujourd’hui Président de la République – déclarait : « Il n’y aura plus de fermeture de classe sans l’aval du maire. »
M. Hervé Berville, secrétaire d’État auprès de la Première ministre, chargé de la mer. Non, de fermeture d’école ! Cela n’a rien à voir !
M. Jean-Marc Boyer. Pourtant, monsieur le ministre, la réalité est tout autre : les critères que vous appliquez accélèrent la fermeture de classes et d’écoles rurales, avec la suppression de 2 000 postes ! En même temps, le soutien à la ruralité est affiché comme une priorité par les ministres Dominique Faure et Christophe Béchu…
Les maires des territoires demandent que se tienne la concertation promise depuis plusieurs mois, mais aussi que soient prises en considération les contraintes territoriales, par la définition d’un indice d’éloignement, ainsi que la spécificité des classes multi-âges.
Pourquoi, alors que vous poursuivez le dédoublement des classes en zone sensible prioritaire, le monde rural devrait-il payer le tribut d’une approche comptable déséquilibrée ?
L’école rurale est une chance pour nos enfants, car elle conjugue proximité et qualité de l’enseignement.
Nos petites communes rurales sont, elles aussi, des zones sensibles prioritaires qui devraient, elles aussi, bénéficier du dédoublement des classes.
M. Max Brisson. Bravo !
M. Jean-Marc Boyer. C’est pourquoi, monsieur le ministre, je vous demande un moratoire sur la fermeture de classes et d’écoles en milieu rural. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Anne-Catherine Loisier et MM. Joël Guerriau et Claude Kern applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Pap Ndiaye, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Boyer, depuis la rentrée 2019, conformément à l’engagement du Président de la République, aucune fermeture d’école ne peut intervenir sans l’accord du maire. Je dis bien « d’école » et non « de classe », ce n’est pas la même chose… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Dans le contexte démographique général que j’ai évoqué à l’instant en réponse à M. Guerriau, votre département du Puy-de-Dôme va perdre 616 élèves à la rentrée 2023. Dès lors, si nous devions adopter une approche comptable, pour reprendre votre expression, on compterait 25 postes d’enseignants en moins à la rentrée 2023. Or, dans le Puy-de-Dôme, nous ne retirons que 9 postes d’enseignement, de sorte que le taux d’encadrement – le rapport entre les enseignants et les élèves – va s’améliorer.
Nous examinons très attentivement les 491 écoles de votre département, ce qui nous conduit à envisager la fermeture d’une trentaine de classes, mais aussi l’ouverture d’une vingtaine d’autres. En effet, quand nous évoquons les suppressions de classes, nous parlons également d’un solde, c’est-à-dire d’une différence entre les ouvertures et les fermetures.
Enfin, puisque vous mentionnez à juste titre la question de l’éloignement, question tout à fait cruciale dans les territoires ruraux, je vous rappellerai que nous avons créé les territoires éducatifs ruraux ; il y en a d’ailleurs un qui fonctionne très bien dans le Puy-de-Dôme, en associant collèges et écoles dans des dispositifs qui permettent d’avancer sur la question de la distanciation rurale. Nous travaillons aux modalités d’extension de cette expérimentation, qui est une forme parallèle, si j’ose dire, des solutions mises en œuvre dans les villes ; ainsi, on pourra faire de ces territoires éducatifs ruraux un point d’appui pour améliorer la situation de nos élèves. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour la réplique.
M. Jean-Marc Boyer. Monsieur le ministre, vos actions amplifient la fracture territoriale et suscitent la colère des maires et des citoyens qui subissent déjà les déserts médicaux, la fracture numérique, le zéro artificialisation nette (ZAN), dont on a parlé tout à l’heure, la défiguration de la France par les éoliennes (Protestations sur les travées du groupe GEST.), l’idée de La Poste de ne procéder à la tournée des facteurs qu’un jour sur deux, le transfert imposé de l’eau et de l’assainissement aux intercommunalités ou encore l’accessibilité insuffisante de nos territoires par le train et l’avion…
Je ne vous parle pas de chiffres, mais je vous parle d’élèves, d’humains ! Cessez ce mépris pour les habitants des territoires ruraux, cessez ce sacrifice de la ruralité sur l’autel des quotas et des normes ! Sinon, mesdames, messieurs les ministres, les « Gaulois réfractaires » risquent de se réveiller ! (Bravo ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
meublés de tourisme et parc locatif
M. le président. La parole est à M. Mickaël Vallet, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Mickaël Vallet. Monsieur le ministre chargé de la ville et du logement, les nouvelles plateformes numériques ont des effets parfois revitalisants sur l’économie la plus réelle, mais ces outils se révèlent parfois une menace profonde pour la cohésion républicaine. La puissance publique doit alors reprendre la main, fermement.
Ainsi, certaines villes touristiques font les frais d’une concurrence insupportable entre les logements classiques et les meublés de tourisme. Ne serait-ce qu’en Charente-Maritime, on constate, à Oléron, des abus énormes dénoncés par les élus concernant la collecte et le reversement des taxes de séjour ; à La Rochelle, le phénomène explose, avec, rien qu’en 2022, plus de 1 700 meublés de tourisme nouvellement déclarés qui évincent autant de travailleurs et d’étudiants en mal de logement.
La Rochelle a attaqué le mal à la racine, et ce dès 2019, en soumettant à autorisation préalable la mise sur le marché de meublés de tourisme, grâce à un numéro d’enregistrement unique, et en instaurant, pour les personnes physiques, un dispositif d’autorisation de changement d’usage temporaire des locaux destinés à l’habitation pour des locations de courte durée.
Cependant, aujourd’hui, ces mesures ne suffisent plus. La Rochelle a donc voulu aller plus loin en 2022, en élargissant son dispositif au changement d’usage permanent, ce qui permet de toucher aussi les personnes morales, notamment les sociétés civiles immobilières (SCI), en exigeant des mesures de compensation comme l’obligation de transformer un local en logement à l’année pour chaque logement de tourisme mis sur le marché, ou encore en favorisant la réservation des logements de petite taille par les étudiants ou jeunes actifs vivant seuls.
Malheureusement, cette agglomération, comme d’autres, se heurte à un cadre légal et réglementaire dont jouent parfaitement les utilisateurs de plateformes, ainsi qu’à l’appréciation négative par les juridictions de la proportionnalité des mesures mises en œuvre.
Pourtant, avoir un toit pour étudier ou travailler et pouvoir vivre près des siens est le premier élément d’insertion dans la communauté nationale.
Alors, monsieur le ministre, quelles mesures vous engagez-vous à proposer, avec le concours de ces collectivités volontaristes et du Parlement ? On ne peut plus laisser la « plateformisation » du logement miner le pacte républicain ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Sophie Primas ainsi que MM. Max Brisson et Pierre Ouzoulias applaudissent également.)