M. le président. Il faut conclure ! Je pense qu’on a compris !
M. Roland Lescure, ministre délégué. Construisons ensemble les critères qui nous permettront de réindustrialiser la France. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. François Calvet, pour la réplique.
M. François Calvet. Il y a peut-être des augmentations de DGF – c’est vous qui le dites –, mais que constatons-nous ? En 2007, le DGF s’élevait à 40 milliards d’euros ; en 2023, à 27 milliards d’euros, soit 13 milliards d’euros de moins. (Voilà ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Par ailleurs, nous réclamons une véritable autonomie pour les collectivités, parce que nous travaillons pour le service public local, ainsi que le respect des élus locaux. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)
relations entre l’état et les collectivités territoriales
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Mme Viviane Artigalas. Monsieur le ministre, le « pacte de confiance » désigne le nouveau dispositif de limitation des dépenses de fonctionnement des collectivités proposé par le Gouvernement. Derrière cette formule, on distingue très nettement l’esprit des contrats de Cahors, en pire ! Tant et si bien que, sur le terrain, il est renommé : « pacte de défiance ».
La démarche du Gouvernement se vit dans les territoires, qu’ils soient de banlieue, urbains ou ruraux, comme une recentralisation diffuse du fonctionnement des collectivités territoriales, dont l’État grignote de plus en plus les prérogatives.
La transformation des impôts locaux directs en compensations supprime la fiscalité dynamique des communes, entraîne une dépendance financière à l’égard de l’État et révèle la volonté sous-jacente de prendre la main sur les politiques locales.
Cet état d’esprit jacobin remet en cause le principe constitutionnel de libre administration des collectivités.
Alors que le Gouvernement se dit engagé dans un nouvel acte de décentralisation, les services de l’État, nationalement et localement, surinterprètent souvent les textes ou règlements, au détriment des exécutifs locaux. Auparavant, l’État accompagnait les maires pour réaliser leurs projets, mais nous sommes passés à la méthode de l’injonction ; désormais, nous en sommes à la contrainte.
Les maires ne sont pas les simples exécutants des priorités de l’État. Monsieur le ministre, allez-vous favoriser l’accompagnement des collectivités, leur faire confiance et stopper cette mise à mal du principe de décentralisation voulu par la loi de 1982 ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE. – M. Alain Chatillon applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.
M. Olivier Klein, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement. Madame la sénatrice Viviane Artigalas, pour compléter ce que vient de dire mon collègue Roland Lescure, je dirai que la plus belle preuve d’autonomie fiscale d’un maire, c’est de baisser systématiquement les impôts, comme je l’ai fait pendant onze ans, respectant ainsi mes engagements. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et SER.)
Mme Sophie Primas. Mais on ne peut pas !
M. Olivier Klein, ministre délégué. Le Gouvernement a fait le choix d’introduire le « pacte de confiance » dans le PLF pour 2023, sous la forme d’un rapport du Gouvernement au Parlement. Tous les acteurs publics, État comme collectivités territoriales, doivent participer à l’effort collectif pour rétablir les comptes de la Nation. Il y va de la crédibilité de notre pays à l’égard de nos partenaires européens. C’est le sens des trajectoires budgétaires inscrites en loi de programmation des finances publiques. Nous serons bien sûr attentifs aux débats qui se dérouleront ici, au Sénat, sur le sujet. Vous savez que le Gouvernement est à l’écoute des collectivités territoriales, donc de vous-mêmes, mesdames, messieurs les sénateurs, qui les représentez.
La suppression de la CVAE aura lieu en deux ans. Elle s’accompagne évidemment d’une compensation pour les collectivités concernées, c’est-à-dire le bloc communal et les départements. Cette compensation a fait l’objet de nombreux échanges avec les associations d’élus, en particulier l’Assemblée des départements de France (ADF) sur la partie départementale.
Je le répète, le PLF pour 2023 prévoit actuellement la compensation à l’euro près par une part de TVA dynamique.
M. François Bonhomme. C’est faux !
M. Olivier Klein, ministre délégué. Par ailleurs, l’État ne conservera pas un euro de la CVAE qui aurait dû être versée aux collectivités en 2023. Elle sera territorialisée pour le bloc communal et forfaitisée pour les départements, comme je l’ai rappelé tout à l’heure.
Enfin, il ne s’agit pas de réduire l’autonomie des collectivités. Nous passons d’un système de CVAE nationale, répartie selon des critères de territorialisation, à un autre impôt national et non pas à une dotation qui serait répartie selon les mêmes critères.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour la réplique.
Mme Viviane Artigalas. Monsieur le ministre, vous ne vous rendez pas compte de la nécessité de faire confiance aux élus locaux. Le Président de la République lui-même s’est engagé, le 10 octobre dernier, à mener réellement la décentralisation. Il vous reste à passer aux actes, ce qui doit vous conduire à nous proposer une grande loi sur les libertés locales et sur tous les moyens qui vont avec, selon le principe simple du « qui décide paie, qui paie décide ». Si vous souhaitez réindustrialiser nos territoires et assurer la transition écologique de notre pays, il vous faut entendre les élus locaux, car vous ne pourrez pas faire sans eux. Ils demeurent incontournables, comme l’a démontré la gestion de la crise sanitaire. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Laurence Cohen applaudit également.)
compétences eau et assainissement
M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Belrhiti. Monsieur le président, madame la Première ministre, chers collègues, la sécheresse historique de cet été nous rappelle combien la question de la gestion de la ressource en eau est essentielle pour notre pays.
Pour y répondre, le Sénat rendra cette semaine un rapport dans lequel nous définissons des priorités pour éviter de nous retrouver, demain, dans une situation encore plus difficile que celle d’aujourd’hui.
Nous nous interrogeons toutefois sur la motivation du Gouvernement à agir concrètement et en phase avec les attentes des territoires.
Tout d’abord, en matière de gouvernance, le Sénat s’est prononcé sur la nécessité de préserver la souplesse d’un transfert facultatif de la compétence en eau de la commune vers les intercommunalités, pour une raison très simple : l’eau répond à une logique de bassin versant et non de périmètre intercommunal.
Il est par ailleurs évident que ce transfert, qui sera rendu obligatoire d’ici à 2026, a engendré et continuera d’engendrer une augmentation substantielle du prix de l’eau pour l’usager.
En ce qui concerne la question des ressources financières, là encore, vous vous détournez de vos obligations.
Lors du débat que nous avons tenu au mois de janvier dernier au Sénat, le Gouvernement s’était engagé à présenter les grands axes du financement futur des agences de l’eau. En effet, ces dernières ont subi l’abaissement de leur plafond de recettes en 2018 et se voient ponctionner une part importante de leur budget, notamment par l’Office français de la biodiversité (OFB).
De fait, comme cela a déjà été exprimé, nous redoutons que, contrairement au principe fondateur, l’eau ne paye plus l’eau, mais que l’eau paye l’État.
Comme souvent, vos choix – ou plutôt votre absence de décisions – mettent à mal nos territoires.
Ma question est donc simple, madame la Première ministre : entendrez-vous la voix des territoires, qui demandent plus de liberté dans la gouvernance de l’eau et plus de moyens pour agir ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Michel Savin. Encore !
M. François Bonhomme. Voilà un ministre universel !
M. Olivier Klein, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement. Madame la sénatrice Belrhiti, la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, de 2015 transfère en effet les compétences de l’eau et de l’assainissement aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre. De plus, depuis 2018, les EPCI ont aussi pour compétence la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (Gemapi) et doivent, à ce titre, gérer les ouvrages de protection contre les inondations.
Dans une période transitoire, qui doit permettre de laisser aux acteurs le temps de s’organiser, l’État gérera certains ouvrages jusqu’en 2024.
Ce transfert représentera indéniablement des investissements importants pour les collectivités,…
M. Bruno Retailleau. Elles souffrent !
M. Olivier Klein, ministre délégué. … là encore, j’en sais quelque chose, puisque j’appartiens à un EPCI dont le bassin verse sur la Marne et que nous avons donc des obligations dans le cadre des jeux Olympiques de 2024 – et nous les tiendrons !
Plusieurs outils financiers sont déployés pour les accompagner : le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) appuiera jusqu’en 2027 les études et les travaux sur les anciennes digues de l’État ; la taxe Gemapi permet de prélever jusqu’à 40 euros par habitant ; le dispositif Aqua Prêt, géré par la Caisse des dépôts et consignations, mettra à disposition une enveloppe de 2 milliards d’euros au titre du financement des agences de l’eau.
En outre, la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite loi 3DS, a ouvert une expérimentation destinée à mieux associer les établissements publics territoriaux de bassin à cette politique, par des financements dédiés. Elle permet également aux EPCI de se regrouper dans des structures dédiées afin d’atteindre la bonne échelle de gestion hydrographique.
L’État accompagne donc les collectivités dans ce transfert et – cela a déjà été dit ici par mes collègues Christophe Béchu et Bérangère Couillard – sera très attentif à la gestion de l’eau et à la capacité d’en disposer dans toutes les communes de France.
Les moyens et les capacités financières ouverts sont donc importants, tout comme les leviers de gouvernance. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour la réplique.
Mme Catherine Belrhiti. Nous réaffirmons que la décision de transférer ou non la compétence de l’eau vers un syndicat ou une intercommunalité doit rester celle de la commune.
Mme Frédérique Puissat. Très bien !
Mme Catherine Belrhiti. Par ailleurs, sans préservation des moyens de financement des agences de l’eau, il est inenvisageable de relever les défis de demain en matière de gestion de la ressource ; le pire est à redouter.
Encore un domaine dans lequel les collectivités territoriales se sentent sacrifiées. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
financement de l’apprentissage dans la fonction publique territoriale
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Stéphane Demilly. Le Gouvernement souhaite un dialogue apaisé avec les élus, mais un nouveau signal complètement inverse leur a été envoyé dans le projet de loi de finances en cours d’examen.
En effet, lors des débats à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a déposé, discrètement, un amendement tendant à revenir sur les modalités de la participation de l’État et de France compétences au financement de l’apprentissage dans la fonction publique territoriale.
Pourtant, ce financement faisait l’objet d’un accord entre le Gouvernement, le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et les employeurs territoriaux. Aux termes de cet accord, sur les 80 millions d’euros que coûtent la formation et l’apprentissage, la moitié serait payée par une cotisation des collectivités, 15 millions d’euros par l’État, 15 autres millions par France compétences et le solde par le CNFPT.
Cet accord, conclu en octobre 2021 et unanimement salué par les associations d’élus, a fait l’objet d’une signature officielle au mois de janvier dernier et a été intégré dans le code général de la fonction publique. Le Gouvernement se félicitait alors de « disposer, à compter de 2022, d’un mode de financement pérenne – j’insiste sur le mot – incitatif au recrutement d’apprentis par les collectivités territoriales ».
« Mais ça, c’était avant ! » – pour paraphraser la publicité d’une célèbre marque de lunettes… Car, dans l’exposé des motifs de l’amendement déposé et adopté il y a peu à l’Assemblée nationale grâce au recours à l’article 49.3 de la Constitution, sont cette fois-ci évoqués des « financements complémentaires et exceptionnels de l’État et de France compétences » n’ayant « pas vocation à être pérennes ».
Madame la ministre, nous avons vraiment du mal à nous y retrouver… Les budgets sont déjà compliqués à boucler – nous l’avons déjà évoqué. Si les engagements de l’État bougent au gré du vent et au gré des ministres, comment voulez-vous que les collectivités s’engagent avec assurance dans un tel processus de recrutement d’apprentis ?
L’apprentissage est une excellente approche pour former les jeunes de notre pays, que ce soit dans le public ou dans le privé. Mais encore faut-il avoir un peu de visibilité, et, permettez-moi, madame la ministre, de le dire en toute amitié, un peu de constance dans nos politiques d’emploi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Hervé Gillé et Hussein Bourgi applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnelle.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Stéphane Demilly, je vous remercie pour cette question qui nous permet de reprendre plusieurs éléments.
Je vous prie de bien vouloir excuser Stanislas Guerini pour son absence, il participe actuellement au conseil d’administration de l’Institut national du service public (INSP) et n’a donc pas pu être présent.
Vous le soulignez, monsieur le sénateur, l’apprentissage est en effet un formidable levier d’insertion pour les jeunes – nous en sommes tous pleinement convaincus dans cette assemblée. Cela vaut pour la fonction publique, au sein de laquelle nous souhaitons soutenir l’apprentissage pour promouvoir les parcours de carrière et l’attractivité qui sont propres à celle-ci.
L’État s’est formidablement engagé sur la question de l’apprentissage, que ce soit dans les collectivités territoriales ou pour amorcer l’apprentissage dans la fonction publique. Il a ainsi appuyé financièrement les collectivités territoriales, en engageant 15 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 15 millions d’euros engagés par France compétences en 2022.
Cet engagement a porté ses fruits, puisque l’objectif de 8 000 apprentis, que nous avions fixé ensemble, a été largement dépassé : 12 000 apprentis ont en effet été recrutés dans la fonction publique. Il s’agit, sans conteste, d’un succès, que nous pouvons tous saluer ici, de même que l’engagement des collectivités, en tant qu’employeurs, pour favoriser l’attractivité des métiers et des parcours de carrières.
Si cela a fonctionné, c’est aussi parce que nous avons choisi de prolonger de nouveau ces dispositions : le vote d’un amendement du Gouvernement dans le cadre de l’examen de la loi de finances a garanti un engagement supplémentaire en 2023 – toujours 15 millions d’euros de l’État et 15 millions d’euros de France compétences, notamment au travers des cotisations des entreprises.
Cela nous donnera donc du temps, en 2023, pour tenir une discussion sereine et constructive avec l’ensemble des associations d’élus et le CNFPT sur les modalités de financement…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée. … à venir pour l’apprentissage dans les collectivités.
Nous devons travailler sur l’attractivité et les parcours, et nous réfléchirons donc tous ensemble en 2023 sur les futures modalités de financement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu le mercredi 7 décembre, à quinze heures.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt-cinq, est reprise à seize heures quarante, sous la présidence de M. Alain Richard.)
PRÉSIDENCE DE M. Alain Richard
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
6
Loi de finances pour 2023
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.
Dans la discussion des articles de la première partie, nous poursuivons l’examen des amendements portant articles additionnels après l’article 11 octies.
Après l’article 11 octies (suite)
M. le président. L’amendement n° I-1176 rectifié, présenté par Mme Gréaume, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l’article 1388 nonies du code général des impôts, il est inséré un article 1388 … ainsi rédigé :
« Art. 1388 …. – I. – Sur délibération de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, prise dans les conditions prévues au I de l’article 1639 A bis, la base d’imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties des habitats inclusifs au sens de l’article L. 281-1 du code l’action sociale et des familles peut être minorée par un abattement compris entre 20 % à 50 %.
« II. - Le bénéfice de l’abattement mentionné au premier alinéa est subordonné au respect du règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis. »
II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Cet amendement vise à remédier à une injustice fiscale consistant à assujettir les établissements d’habitat inclusif, introduits par la loi Élan, à la TFPB au titre de locaux professionnels. Or la seule activité de ce type d’habitat est de loger des personnes souvent âgées et seules, souhaitant privilégier un cadre convivial.
Les services à la personne proposés dans les parties communes de ces lieux ne sont pas exercés par les bailleurs, lesquels ne tirent pas de rémunération dans ce cadre. Dès lors, pour quelle raison leurs loyers devraient-ils relever de la taxe foncière au titre d’une activité professionnelle ?
C’est tout un modèle économique vertueux qui est ainsi menacé : l’habitat inclusif constitue une solution résidentielle intermédiaire entre l’Ehpad ou le foyer-logement et le maintien à domicile. Le développement de cette solution de substitution aux établissements médicalisés, plébiscitée par les résidents et leurs familles, est fortement encouragé par les pouvoirs publics.
Nous proposons donc, dans le respect de la souveraineté des collectivités territoriales, que celles-ci puissent décider d’un abattement de 20 % à 50 % afin d’encourager l’installation et la pérennisation de ce type de structures sur leur territoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Demande de retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme. Monsieur le sénateur Bocquet, le nouvel abattement sur délibération de taxe foncière sur les propriétés bâties que vous proposez ne manquerait pas d’être revendiqué par d’autres contribuables tout aussi dignes d’intérêt, ce qui risquerait d’affecter directement les ressources des collectivités concernées.
L’efficacité du dispositif semble incertaine, dans la mesure où l’abattement serait attribué au bénéfice du seul propriétaire, sans que soit prévue, en contrepartie, une déduction du loyer mis à la charge du résident. Il n’est pas certain que l’allégement de TFPB soit l’outil le plus adapté pour répondre à l’objectif louable que vous poursuivez.
Pour ces raisons, le Gouvernement vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Bocquet, l’amendement n° I-1176 rectifié est-il maintenu ?
M. Éric Bocquet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° I-1176 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° I-639 rectifié bis est présenté par Mme Blatrix Contat, MM. Redon-Sarrazy, Assouline, Bouad, Bourgi, Cardon, Chantrel et P. Joly, Mmes G. Jourda et Le Houerou, M. Marie, Mme Poumirol et MM. Tissot et Mérillou.
L’amendement n° I-883 rectifié bis est présenté par MM. Cabanel, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article L. 1396 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – La taxe foncière sur les parcelles de terrains en nature de bois et forêts d’une superficie inférieure à quatre hectares est d’un montant minimal de treize euros. » ;
2° L’article L. 1394 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« … ° Les parcelles en nature de bois et forêt d’un seul tenant d’une surface inférieure ou égale à quatre hectares, et les ensembles de parcelles en nature de bois et forêt d’une surface inférieure ou égale à quatre hectares appartenant à un même propriétaire, situées sur le territoire d’une même commune, dont le propriétaire en a fait l’apport à un groupement forestier au titre de l’article L. 331-1 du code forestier ou à un groupement d’intérêt économique et environnemental forestier au titre de l’article L. 332-7 du code forestier. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.
Mme Florence Blatrix Contat. Notre forêt a particulièrement souffert ces dernières années, en raison du changement climatique : crise sanitaire, sécheresses, dépérissement, risques accrus d’incendies…
Or elle constitue un atout majeur dans la lutte contre ce changement climatique, car elle est à la fois un puits de carbone et un réservoir de biodiversité.
En France, trois millions de propriétaires détiennent une ou plusieurs parcelles forestières d’une superficie inférieure ou égale à 4 hectares. Certains propriétaires ne savent même pas qu’ils le sont ; d’autres n’envisagent pas la gestion de leur parcelle du fait d’une trop petite superficie.
En réalité, l’extrême fragmentation des parcelles de terrain empêche la bonne gestion de la forêt, notamment la mise en place d’actions de protection de la biodiversité et de valorisation économique et écologique.
Cet amendement vise ainsi à encourager les propriétaires forestiers détenant de petites parcelles à confier la gestion de leur propriété à un groupement forestier en instaurant, d’une part, un montant minimal de taxe foncière pour les parcelles de terrain en nature de bois et forêt d’une superficie inférieure ou égale à 4 hectares et, d’autre part, en exonérant de taxe foncière sur les propriétés non bâties les propriétaires de ces parcelles qui rejoindraient un groupement forestier.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° I-883 rectifié bis.
M. Jean-Claude Requier. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Si l’on suivait toutes les propositions d’exonération, nous aurions chaque année moins de ressources pour les collectivités territoriales après le vote du PLF.
Quel que soit le motif invoqué – en l’occurrence parfaitement entendable, comme d’autres l’étaient aussi ce matin –, la préservation des ressources des collectivités locales nous paraît être l’ADN même du Sénat.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Au-delà de l’argument, important, que vient de donner M. le rapporteur général, je précise que l’adoption de ces amendements identiques conduirait à mettre en place deux systèmes de calcul d’imposition pour une seule et même taxe. Elle présenterait ainsi un risque de rupture d’égalité devant la loi et les charges publiques.
L’objet de ces amendements se trouve par ailleurs en opposition avec des dispositifs qui ont été institués en matière de taxe foncière sur les propriétés non bâties en faveur des espaces naturels, agricoles et forestiers.
En cohérence avec les objectifs de protection de la biodiversité, les terrains ensemencés, plantés ou replantés en bois, les terrains boisés présentant un état de futaie irrégulière en équilibre de régénération sont en effet exonérés.
En réalité, une telle mesure conduirait à plus de complexité dans la gestion de la fiscalité directe locale, sans pour autant que son efficacité soit assurée. En effet, l’application d’un montant minimal de 13 euros de taxation ne paraît pas susceptible de susciter des ventes ou des regroupements de parcelles.
Pour être complète, la mise en place de bonnes pratiques de gestion forestière relève plus de dispositifs non fiscaux, à l’instar d’outils de planification tels que le programme national de la forêt et du bois ou les schémas régionaux de gestion sylvicole.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.