M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour la réplique.
Mme Émilienne Poumirol. On ne peut pas se cacher derrière l’épidémie de bronchiolite pour parler des problèmes actuels, monsieur le ministre.
Vous avez fait des choix qu’il faut maintenant assumer : vous avez décidé de faire porter les 17,7 milliards d’euros de la dette liée à l’épidémie de covid-19 sur la sécurité sociale, créant cette année son déficit ; vous avez décidé d’exonérations de cotisations, ces exonérations étant passées, en cinq ans, de 39 milliards à 71 milliards d’euros. Dans le même temps, vous avez refusé toutes les propositions que nous avons pu vous faire pour trouver de nouvelles recettes. C’est donc que vous faites le choix, délibéré, du déficit pour la sécurité sociale, et ce peut être, on s’en doute, au profit du système privé à but lucratif.
Monsieur le ministre, nous sommes à la croisée des chemins : soit vous décidez d’abandonner l’hôpital public, soit vous engagez enfin cette réforme structurelle.
De son côté, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain est clair : il réclame une réforme urgente et pérenne, tenant compte du ratio entre patients et personnel soignant sur tous les territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
fiscalité locale
M. le président. La parole est à Mme Guylène Pantel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Guylène Pantel. Ma question s’adresse à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales.
Madame la ministre, vous êtes interpellée à intervalles réguliers, dans cet hémicycle, sur les ressources dont disposent les collectivités territoriales pour alimenter leur budget et assurer le bon fonctionnement des services publics locaux.
Après la suppression progressive de la taxe d’habitation au cours du premier mandat d’Emmanuel Macron, l’année 2023 doit être marquée par une nouvelle étape dans la transformation de la fiscalité locale, avec la disparition de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), faisant suite à la division de son taux par deux en 2021.
Naturellement, des mécanismes de compensation voient systématiquement le jour, avec plus ou moins de réactivité, comme le transfert de la part départementale de la taxe foncière sur les propriétés bâties aux communes, ainsi que l’ajout d’un coefficient correcteur dans les cas où le transfert ne suffit pas.
Or plusieurs arguments viennent se percuter avec ce système fondé sur le couple suppression-compensation. Si l’intention de ce Gouvernement est d’enclencher une « vraie décentralisation », la disparition de taxes ne doit pas avoir pour effet de restreindre les ressources fiscales des collectivités territoriales, au point d’entraver leur libre administration et leur développement.
Le contexte inflationniste nous prouve que les dotations de l’État, qui, par définition, ne sont pas dynamiques, ne peuvent seules satisfaire les besoins en fonctionnement et investissement des collectivités.
Un exemple, la commune de Montbel en Lozère perçoit une dotation globale de fonctionnement (DGF) de 25 000 euros, alors que le fonctionnement de l’école lui coûte 20 000 euros par an ! Voilà longtemps que l’on dresse de tels constats. Il est maintenant nécessaire de réinventer, à la fois, les concours financiers de l’État et la fiscalité locale, pour que les communes et collectivités rurales puissent se développer, accueillir de nouvelles populations et faciliter la création d’entreprises.
En somme, le Gouvernement a-t-il l’intention d’engager une réflexion globale, pour un système plus équilibré de ressources au bénéfice des collectivités locales, notamment les plus rurales ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Vous m’interrogez, madame la sénatrice Pantel, sur l’évolution des ressources des collectivités locales face aux suppressions des impôts locaux et au montant de la DGF des petites communes.
Je voudrais tout d’abord faire un rappel : les suppressions d’impôts sont une bonne chose pour le pouvoir d’achat des Français, car elles servent à l’augmenter…
M. Rachid Temal. La moitié d’entre eux ne paient pas d’impôt !
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. … et elles permettent également d’améliorer la compétitivité des entreprises.
Du côté des collectivités locales, des compensations à l’euro près sont prévues, pour la taxe d’habitation, comme pour la CVAE. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Ces compensations seront dynamiques. C’est le cas de la CVAE, pour laquelle, à la demande des associations d’élus, nous avons consacré une part de TVA.
La volonté du Gouvernement, vous le voyez, est bien de préserver l’autonomie des collectivités, et j’y suis moi-même personnellement attachée. (Mme Sophie Primas s’exclame.)
S’agissant de la dotation globale de fonctionnement, après la forte baisse sous le mandat de François Hollande, elle a été stabilisée à partir de 2018. (Protestations sur les travées du groupe SER.)
M. Rachid Temal. Qui était ministre de l’économie ?
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Avec le PLF pour 2023, ce sont 320 millions d’euros qui sont ajoutés, pour la première fois depuis treize ans, avec, notamment, 200 millions d’euros de hausse pour la dotation de solidarité rurale (DSR), dont bénéficieront les communes de Lozère. C’est un changement important, demandé par beaucoup d’élus locaux et de parlementaires depuis de nombreuses années.
Mme Sophie Primas. Ils vont être contents !
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Faut-il aller encore plus loin ? Je sais que la Cour des comptes a proposé au Sénat une réflexion très ambitieuse et, pour ce sujet, comme pour tout ce qui concerne nos collectivités locales, je reste évidemment à l’écoute de la chambre des territoires et de ses propositions.
Avant de conclure, je voudrais néanmoins rappeler que, au-delà des concours financiers de l’État, le Gouvernement a mis en place une politique ambitieuse pour accompagner et soutenir nos territoires ruraux. Je pense à l’agenda rural, qui en est un parfait exemple,… (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. … tout comme le programme « Petite ville de demain » et le déploiement des maisons France Services. (M. Patriat applaudit.)
M. le président. Madame la ministre, le respect du temps de parole fait partie de notre règle du jeu commune.
organisation des événements culturels en marge des jeux olympiques de 2024
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
Mme Monique de Marco. Madame la ministre de la culture, parlons des festivals, si c’est bien à vous que je dois m’adresser plutôt qu’au ministre de l’intérieur… J’avoue être un peu perdue ! En effet, le 25 octobre dernier, le ministre de l’intérieur M. Darmanin a présenté le dispositif de sécurité des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 : près de 45 000 policiers et gendarmes seraient mobilisés de juillet à septembre.
M. Michel Savin. Très bien !
Mme Monique de Marco. Face à l’ampleur du dispositif, il a évoqué la possible « annulation ou le report de tous les événements en France qui demandent des unités de force mobile ». Au moment d’établir les programmations, les organisateurs de festivals, les syndicats, les centaines de milliers de travailleurs du secteur et les millions de spectateurs s’inquiètent. Faute de services de sécurité suffisants, les festivals seront-ils sacrifiés aux jeux Olympiques ?
Les festivals sont l’image de la France et de son exception culturelle. Ils garantissent une offre culturelle diversifiée dans l’ensemble du territoire en attirant des millions de personnes et leurs retombées financières sont importantes. Les Francofolies de La Rochelle, par exemple, génèrent quelque 11 millions d’euros, le festival d’Avignon quelque 50 millions d’euros et les fêtes de Bayonne attirent chaque année un million de personnes…
M. Laurent Burgoa. Et les férias aussi !
Mme Monique de Marco. Si l’activité festivalière est annulée, qui en assurera les conséquences financières ?
L’annulation ou le report serait catastrophique pour un secteur qui peine à se remettre de la pandémie. La culture ne doit pas être, une nouvelle fois, la variable d’ajustement de décisions nationales.
Vous avez tenu une réunion, le 2 novembre dernier, avec les acteurs de la filière, qui n’a pas permis de répondre à leurs inquiétudes. Vous n’avez apporté ni solution ni réponse.
Madame la ministre, il ne suffit pas de dire que vous êtes consciente des enjeux. Quels festivals seront concernés, quand, comment, et dans quelle mesure ? Voilà ce que nous voulons savoir !
À l’instar de tous les acteurs du spectacle vivant et de la musique, nous attendons des réponses claires et des engagements. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE. – Mme Esther Benbassa et M. Michel Savin applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture.
Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture. Madame de Marco, vous avez raison, la France est une terre de festivals, qui sont une partie importante de son ADN culturel, notamment l’été. Vous avez également raison de mentionner que les retombées économiques sont considérables pour les territoires.
Nous savons toutefois qu’organiser des jeux Olympiques est exceptionnel – cela a lieu une fois par siècle. Ce sera un grand moment festif et populaire, qui nécessite une organisation hors normes et un dispositif de sécurité particulièrement renforcé. Or les festivals ont également besoin d’être sécurisés ; les plus grands d’entre eux, ceux qui accueillent des dizaines de milliers de personnes mobilisent des unités de force mobile. Gérald Darmanin, Amélie Oudéa-Castéra et moi-même examinons cas par cas les situations les plus sensibles afin de voir comment concilier la vitalité culturelle des festivals avec la nécessaire sécurisation des jeux Olympiques et des festivals également.
Je pense aussi aux enjeux que cela soulèverait dans tout un ensemble de domaines – en matière de moyens techniques, de personnel, de tensions sur les bénévoles et de transport de spectateurs – et qui affecteraient les festivals, d’où notre travail étape par étape avec les professionnels. Je les ai reçus assez longuement, vous l’avez dit. Je poursuis le travail dans un format bilatéral, si je puis dire, avec chacun d’entre eux, mais également avec les syndicats et les organisations professionnels.
M. François Bonhomme. Nous voilà rassurés !
Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Dans les semaines qui viennent, nous verrons se dessiner certaines solutions et je pourrai vous en faire part.
Nous sommes pleinement conscients de la nécessité de concilier la force des jeux Olympiques et la force des festivals. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
offres tarifaire et de transport de la sncf
M. le président. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – MM. Martin Lévrier et Pierre Louault applaudissent également.)
M. Pierre-Jean Verzelen. Monsieur le ministre délégué chargé des transports, que se passe-t-il à la SNCF ? Que va faire la SNCF ?
Vous n’êtes pas le président de cette entreprise publique, nous le savons bien, mais enfin l’État en est l’actionnaire unique !
En général, quand 5 % des trains sont annulés, le trafic est « normal » selon la SNCF, mais nous constatons tous que, depuis quelques mois, la situation se dégrade. Dans les Hauts-de-France, pour prendre l’exemple d’une région que je connais bien, près d’un train sur dix en moyenne est annulé chaque jour depuis le mois d’avril, sans compter les retards. Cela crée un climat de tension et d’anxiété pour tous les usagers, notamment ceux qui se rendent au travail.
La raison principale invoquée est le manque de personnel. Nous pouvons aussi pointer – et notre collègue Gérard Lahellec l’a fait – le sous-investissement chronique dans le réseau secondaire depuis trente ans. Ce manque d’anticipation de la part de dirigeants d’un grand groupe public paraît aberrant. Comment en sommes-nous arrivés là et quand la situation va-t-elle se rétablir ?
Monsieur le ministre, la SNCF subit de plein fouet la hausse des prix de l’électricité. Quid du bouclier tarifaire pour protéger les voyageurs de la hausse du prix des billets, alors même que le train, nous le savons, n’est pas forcément plus attractif que la voiture ou l’avion ?
Au moment où la France prend des engagements à la COP27, nous ne pouvons pas nous satisfaire du fait que le moyen de transport le plus économe en CO2 soit le moins intéressant financièrement.
J’ajoute que les régions, qui ont la compétence de gestion des TER, sont censées avoir un dialogue quotidien avec la SNCF. Or elles sont confrontées au manque de transparence de l’entreprise et à ce que l’on pourrait appeler le « triangle des Bermudes de la SNCF », c’est-à-dire une organisation, ou plutôt une désorganisation, où le nombre d’interlocuteurs est tellement élevé que nous ne savons plus qui fait quoi ou encore qui va nous répondre et tout cela sans que personne sache nous dire oui ou non !
Monsieur le ministre, comment retrouver cette relation de confiance entre les régions et la SNCF ? Comment rétablir l’offre de trains ? Comment la SNCF va-t-elle ou non répercuter la hausse du coût de l’énergie sur le prix des billets ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe SER. – MM. Marc Laménie et Guy Benarroche applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.
M. Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports. Monsieur le sénateur Verzelen, vous avez raison et je n’ai pas l’habitude de fuir mes responsabilités. Nous parlons d’un grand service public – une entreprise entièrement publique –, l’État ne peut donc laisser la situation sans réponse ou témoigner d’un quelconque désintérêt, et c’est d’ailleurs pourquoi j’ai dit que la situation dans les Hauts-de-France était inacceptable.
Dès lundi, je me suis rendu à Lille pour m’entretenir avec le président de la région Xavier Bertrand, puisque les TER sont effectivement à la charge des régions, et hier je me suis de nouveau entretenu avec le président de la SNCF Jean-Pierre Farandou. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
Un effort exceptionnel est en train d’être réalisé en matière de formation pour compenser la pénurie de conducteurs – vous l’avez décrite –, car c’est l’un des métiers en tension. Cette pénurie ne concerne pas seulement la région des Hauts-de-France, mais elle touche, hélas, très douloureusement ses usagers aujourd’hui.
Le plan tout à fait exceptionnel mis en place ces derniers mois prévoit en 2022-2023 le recrutement inédit de 440 collaborateurs TER en région Hauts-de-France. Face à la gravité de la situation, j’ai demandé au président Farandou d’établir un plan exceptionnel d’urgence et d’accélération de ces recrutements par tous les moyens possibles. Il sera présenté dans les prochains jours par l’entreprise, en lien avec la région.
Cette situation, qui ne peut rester sans réponse, je l’ai dit, ne peut pas être totalement réglée en quelques jours ou en quelques semaines, soyons honnêtes, mais nous devons montrer aux usagers des améliorations visibles et sérieuses dans les toutes prochaines semaines.
Monsieur le sénateur, vous m’avez interrogé sur les tarifs, ce qui mérite tout d’abord une précision : les tarifs du TER et de beaucoup de trains du quotidien ne relèvent pas de l’État. En revanche ceux des trains à grande vitesse ou des trains d’équilibre du territoire concernent le territoire national et sont donc du ressort de l’État. Dans ce cadre, j’ai demandé à la SNCF de mettre en place, pour ces trains, un bouclier tarifaire.
Concrètement, cela signifie que nous devons d’abord agir pour réduire les charges de la SNCF, ce que fait l’État par les mesures prises pour maîtriser les coûts de l’énergie. Cela a permis de réduire très fortement le montant évoqué par le président Farandou devant le Sénat – près de 2 milliards d’euros. Nous ne sommes plus du tout dans ces ordres de grandeur.
Cela signifie ensuite que nous devons avoir des hausses qui soient, en tout état de cause, inférieures à l’inflation. Enfin, nous devons préserver ceux qui ont le plus besoin du train – les ménages modestes, les utilisateurs réguliers, notamment pour se rendre au travail. C’est pourquoi j’ai demandé un effort tout particulier sur les abonnements et sur les Ouigo. Ce plan sera présenté dans quelques jours par la SNCF. (MM. François Patriat et Thani Mohamed Soilihi applaudissent.)
pénurie de médicaments
M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Belin. Monsieur le président, mes chers collègues, la France est à sec !
À sec d’argent, à sec d’eau, à sec d’électricité, à sec de gaz, à sec de nucléaire, à sec de médecins… Et maintenant à sec de certains médicaments : Spasfon et Gaviscon, nous cherchons ; amoxicilline et paracétamol aussi rares que le pétrole ; en cette période d’épidémie de bronchiolite, c’est dramatique !
Ce sont pourtant des médicaments matures, peu onéreux et essentiels tout au long de l’année.
Monsieur le ministre de la santé, ma question est si simple qu’elle inquiète les professionnels de santé et les patients : quelle est votre stratégie pour que la France puisse retrouver sa souveraineté sur les produits de santé ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Pierre Ouzoulias applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Monsieur le sénateur Belin, le Président de la République a fixé un cap lors du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS) de 2021. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Il s’agit de réindustrialiser et de garantir notre capacité d’approvisionnement et notre souveraineté, tout en maintenant un taux de croissance de l’industrie du médicament supérieur à 2 %.
Nous avons deux objectifs : favoriser l’innovation et soutenir l’accès aux médicaments innovants, d’une part, maintenir l’accès à des médicaments plus anciens, mais particulièrement utiles, tels que le paracétamol, vous en avez parlé, d’autre part. C’est un enjeu majeur de santé publique, bien sûr. S’agissant des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (MITM), nous avons renforcé les obligations, qu’il s’agisse du volume des stocks ou des moyens et des dispositifs d’alerte en cas de crainte de rupture.
Toutefois nous connaissons en ce moment – j’en conviens – des tensions sur certaines formes de médicaments, en raison de la reprise du covid-19. Par exemple, l’amoxicilline sous forme de sirop est difficile d’accès, alors que les autres formes sont facilement accessibles.
M. Bruno Belin. Pour les bébés, ce n’est pas pratique !
M. François Braun, ministre. Vous avez évoqué la bronchiolite. Je suis obligé, en cette semaine de l’antibiorésistance, de bien préciser que la bronchiolite est une maladie virale pour laquelle il ne faut pas prescrire d’antibiotiques, au risque de développer l’antibiorésistance.
M. Bruno Belin. Merci docteur !
M. François Braun, ministre. Je suis en temps réel, bien sûr, ces situations complexes, en lien avec l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).
J’ai demandé aux industriels de faire preuve de transparence. Il est difficile de faire la part des choses entre la déficience de produit actif et la déficience de capacité d’emballage, aussi bien en verre qu’en carton.
Mme Cécile Cukierman. Une plateforme est disponible en Isère !
M. François Braun, ministre. Nous avons un plan pénurie, vous le savez, sur lequel je ferai bientôt le point.
En ce qui concerne le développement d’une filière française de l’industrie du médicament, également voulue par le Président de la République, je vous rappelle que, dans le cadre du plan France 2030, quelque 7,5 milliards d’euros ont été investis dans cette filière.
Monsieur le sénateur, pour reprendre l’exemple du paracétamol dont vous avez parlé, une nouvelle usine, qui produira 10 000 tonnes de paracétamol, ouvrira l’année prochaine en Isère,…
M. Michel Savin. Très bien !
M. François Braun, ministre. … afin de couvrir largement le marché français. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, pour la réplique.
M. Bruno Belin. Dont acte ! Je pense que vous-même, monsieur le ministre, ainsi que votre collègue Agnès Firmin Le Bodo êtes de bonne volonté, mais Le sirop typhon, c’est fini !
À force d’avoir asphyxié, depuis des années, le prix du médicament, Bercy a tué une industrie nationale stratégique. (M. Gérard Longuet applaudit.) Le coup de la panne du Doliprane est révélateur d’une France exsangue.
Voici la réalité : Sanofi est incapable de faire un vaccin ; des médicaments sont contingentés tous les matins ; l’accès à la santé est plus compliqué… La réalité, c’est la régression indiscutable de la puissance sanitaire de la France ! La mascarade des masques a illustré de façon insoutenable cette impuissance – cette faiblesse –, et aujourd’hui, ce sont des médicaments qui manquent !
Il faut réindustrialiser la France, car c’est par là que passe le combat pour la santé – et donc pour la vie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – Mmes Cathy Apourceau-Poly et Cécile Cukierman applaudissent également.)
réforme du lycée professionnel
M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Rémi Cardon. Madame la Première ministre, les savoirs techniques et manuels sont essentiels à notre quotidien et à la réussite collective de notre pays. Pourtant, lors de sa présentation de la réforme de la voie professionnelle, en septembre dernier, le Président de la République a fait savoir qu’il entendait réduire le nombre d’heures consacrées aux savoirs fondamentaux dans les lycées professionnels.
Cela n’est pas sérieux. J’en veux pour preuve qu’en dix ans presque 1 400 heures d’enseignement ont été supprimées ; il reste aujourd’hui moins de 2 heures de français par semaine pour les élèves qui préparent un baccalauréat professionnel. Les heures d’enseignements fondent en réalité comme neige au soleil.
Les jeunes sont poussés de plus en plus tôt dans les bras du marché du travail, au détriment de leur ouverture culturelle et de leur émancipation. Le manutentionnaire n’aurait pas besoin de trop d’éloquence pour la basse besogne ! Peu importe si cela le met en difficulté pour défendre ses droits ou changer de carrière. Un ouvrier n’est pas fait pour devenir poète ou encore professeur ! Du reste, c’est bien connu, s’il veut s’insurger, il aura la grève ou l’abstention !
Madame la Première ministre, les inégalités commencent dès la naissance ; avec cette réforme, vous les accentuez. Pis, vous renoncez à déjouer les pronostics, ce qui est pourtant au cœur du pacte républicain.
On ne choisit pas toujours d’où l’on vient ni le métier que l’on exerce, mais, une chose est sûre : l’école est faite pour donner à tous ses élèves une formation suffisamment qualifiante pour avoir le choix de partir afin de pouvoir rebondir.
Finalement, cette réforme suit la même logique que votre réforme de l’assurance chômage, selon laquelle le travailleur doit se soumettre au marché du travail ; son émancipation, ce sera pour plus tard !
Ma question est assez simple : que comptez-vous faire pour sécuriser le parcours de vie de notre jeunesse qui est en lycée professionnel ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe GEST. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. Monsieur le sénateur Cardon, c’est la première fois, je crois, qu’un Président de la République porte aussi haut les valeurs de la voie professionnelle et place le lycée professionnel au cœur de son engagement de campagne et de ses politiques publiques. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Tout doit être entrepris, au fond, pour faire réussir la jeunesse ! Alors qu’un tiers des lycéens passent par la voie professionnelle, nous devons accompagner l’évolution de cette voie pour qu’elle mette l’ensemble de ces jeunes en situation de réussite.
Monsieur le sénateur, vous l’avez dit, notre défi est de mettre partout en place – dans tous nos territoires et dans tous les lycées professionnels – le pacte républicain,…
M. Pierre Ouzoulias. Il est trahi !
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée. … promesse que nous devons leur faire, afin de les accompagner, en tant que citoyens, pour qu’ils puissent grandir, parfaire leur éducation et devenir des citoyens éclairés qui s’engageront dans une voie professionnelle et afin de les préparer également à réussir leur insertion professionnelle.
C’est tout le défi de cette réforme de l’enseignement professionnel, qui vise à accompagner les savoirs fondamentaux – vous les avez évoqués. Comme l’ont réaffirmé à plusieurs reprises M. le Président de la République et Mme la Première ministre, nous souhaitons préserver les savoirs fondamentaux et accompagner ces élèves, souvent plus fragiles, dans leur apprentissage, car ils sont essentiels pour la citoyenneté, mais nous souhaitons également leur donner tous les moyens pour qu’ils puissent réussir leur insertion professionnelle.
Aujourd’hui, je tiens à le rappeler, l’insertion professionnelle ne concerne qu’un élève diplômé sur deux, deux ans après l’obtention du diplôme et hors poursuite d’études. Ce résultat n’est évidemment pas le fait des enseignants, qui sont pris dans un système. Il est toutefois de notre responsabilité collective d’accompagner ce changement de système pour que nous donnions tous les moyens aux enseignants d’accompagner les élèves et de les mettre pleinement en situation de réussite. (M. François Patriat applaudit. – Mme Marie-Noëlle Lienemann s’exclame.)