M. le président. La parole est à Mme Nassimah Dindar, pour explication de vote.
Mme Nassimah Dindar. Madame la ministre, vous avez raison, nous ne sommes pas dépendants du gaz russe, mais tous les territoires ultramarins sont bel et bien dépendants des énergies fossiles. Nous vivons, dans les outre-mer, sous le régime d’une économie carbonée – « pétrodépendante », oserais-je dire.
Même à La Réunion, où l’énergie solaire et l’éolien, voire la bagasse, sont pourtant très répandus, nous n’utilisons pas suffisamment les sources d’énergie alternatives. Pour faire face à des besoins énergétiques croissants, nous continuons de consommer majoritairement des produits pétroliers, qui représentent encore 69 % des énergies fossiles importées par voie maritime.
Vous vous en doutez, je comprends très bien la situation que décrivait ma collègue Victoire Jasmin. Il est indispensable de définir une véritable trajectoire pérenne de transition énergétique dans les territoires ultramarins, qui repose prioritairement sur les ressources propres dont ils disposent.
Je pense évidemment à l’énergie solaire, mais également à l’éolien en mer, qui n’est pas encore très répandu dans nos territoires, pourtant entourés d’eaux très profondes.
C’est aussi pourquoi j’espère que nous pourrons mettre de nouveau sur le métier le projet Réunion 2030 – GERRI (Grenelle de l’environnement à La Réunion-Réussir l’innovation) qui a, hélas, été abandonné.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. À la lecture de cet amendement, madame la ministre, j’ai quelques inquiétudes. J’y vois la perspective de choix gouvernementaux qui ne seraient bons pour personne, en particulier des décisions extrêmement fortes prises dans les semaines et les mois à venir conduisant à des mesures de délestage de gaz.
Mon intuition est-elle juste, madame la ministre ? En tout cas, si elle l’était, je comprendrais mieux les raisons pour lesquelles vous souhaitez faire disparaître les notions de gravité et d’imminence du dispositif de l’article 12.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Chacun le sait, les positions des écologistes sur les thématiques énergétiques sont parfois un peu caricaturées. Il nous arrive aussi, je le reconnais, d’être taquins – je n’exclus d’ailleurs pas de formuler quelques remarques malicieuses d’ici la fin de l’après-midi. (Sourires.)
Vous l’avez constaté, tout au long de nos débats, nous avons beaucoup insisté sur le fait que notre pays s’était enfermé dans une logique trop court-termiste.
Or, face à une pénurie annoncée à l’avance, le Gouvernement prévoit justement, au travers de son amendement, de se donner de la marge et d’éviter l’entonnoir. Il préconise des délestages en amont dans les secteurs les moins stratégiques plutôt qu’un délestage brutal, de dernière minute, pour pallier le manque de gaz.
Dans la mesure où l’amendement prévoit une gestion plus étalée dans le temps, je le soutiendrai. De mon point de vue, il répond à notre souhait de sortir de l’extrême urgence en recourant à la planification. Vous le voyez, nous essayons d’être rigoureux dans notre analyse.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Mon cher collègue, ce n’est pas du tout l’objet de l’amendement.
M. Ronan Dantec. Mais si !
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Vous parliez de rigueur, restons-y ! Cet amendement ne traite absolument pas des restrictions de production.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Non ! Les propos de M. Dantec n’ont rien à voir avec le travail de réécriture de l’article 12 réalisé par la commission.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Je ne suis pas d’accord avec vous, monsieur le rapporteur pour avis. Nous sommes prêts à conserver l’intégralité du dispositif, tel que l’a remanié la commission, à l’exception de la mention d’une menace grave et imminente, et ce précisément pour les raisons que M. Dantec vient de très bien exposer à l’instant. Nous souhaitons effectivement nous donner une marge d’anticipation.
Du reste, il existe une différence notable entre cet article et les articles 15 bis et 15 ter que vous citiez tout à l’heure : ces derniers prévoient de faire appel à des groupes électrogènes la veille pour le lendemain en cas de danger grave et imminent. On comprend bien que le recours à des dispositifs autonomes de production électrique pour « effacer » la consommation d’électricité n’est pas très courant ; j’ajoute qu’il s’agit d’une procédure qui ne doit s’appliquer que pour un court moment, la réserve de diesel d’un groupe étant assez limitée.
À l’inverse, il est question, à l’article 12, de gérer par ordre de mérite – ce que l’on appelle le merit order – les différentes sources de production d’énergies disponibles.
Il s’agit de tirer toutes les conséquences du raccordement du système électrique au réseau gazier. Dans certaines situations, il sera préférable de s’appuyer sur nos centrales à gaz plutôt que sur les centrales hydrauliques, par exemple, qui constituent nos dernières réserves stables d’électricité. À d’autres périodes, il vaudra mieux repousser le moment d’avoir recours aux centrales à gaz, justement parce que nous serons à court de gaz.
Tout cela ne se décide pas du jour au lendemain et doit être anticipé au maximum. Je me permets d’insister sur ce point.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Puisqu’il s’agit d’un amendement du Gouvernement, je vais faire un peu de hors sujet…
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Pas trop, merci !
M. Victorin Lurel. Je souhaite encore une fois attirer l’attention de Mme la ministre sur les difficultés d’approvisionnement et de stockage dans les outre-mer. Nassimah Dindar a évoqué le problème de la dépendance de ces territoires aux carburants fossiles.
Je le redis, compte tenu du corpus juridique actuel, l’État dispose de tous les moyens pour baisser, voire bloquer les prix en outre-mer, pour disposer de ce que l’on appelle les facilités essentielles, c’est-à-dire les équipements, les ports et autres structures de stockage.
Depuis 2017 – disons-le ! –, le Gouvernement a refusé d’utiliser ces instruments qui sont pourtant dans le code de commerce et dans le code de l’énergie.
J’ajoute que tous les préfets des DOM-TOM peuvent décider de prélever des taxes, autrement dit des impôts qui n’ont pas été approuvés par le Parlement, c’est-à-dire sans aucune base juridique pour le faire.
Cette faculté avait été supprimée par la loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer. Or figurez-vous que cette pratique est réapparue sous la forme d’une indemnité de précarité pour les gérants de stations-service. Dans l’Hexagone, c’est la fédération des pétroliers qui paie ; dans les outre-mer, ce sont les consommateurs qui paient, en dépit de toutes les lois votées.
Saviez-vous, mes chers collègues, que sur chaque baril de pétrole de 159 litres acheminé depuis la mer du Nord les opérateurs appliquent des frais de trading, c’est-à-dire des frais de négociation, de 5 dollars ? Cette pratique concerne notamment Total. Alors, certes, je ne souhaite pas jeter l’opprobre sur cette entreprise, car je respecte le travail de la Société anonyme de la raffinerie des Antilles (SARA), mais nous n’avons jamais pu obtenir les documents justifiant un tel forfait.
J’ai remis à l’époque au Président de la République, M. François Hollande,…
M. le président. Il faut conclure !
M. Victorin Lurel. … les statuts que cette entreprise déposait aux Bermudes : celle-ci prélève l’équivalent de 32 millions de dollars sur les Antillo-Guyanais, et ce doit être la même chose pour La Réunion et Mayotte.
M. le président. Merci !
M. Victorin Lurel. Il est urgent d’agir, madame la ministre !
Mme Nassimah Dindar. C’est vrai !
M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour explication de vote.
M. Philippe Folliot. Je soutiendrai l’amendement du Gouvernement. Il me paraît en effet important que notre pays définisse un cadre lui permettant d’anticiper, tout en lui garantissant un maximum de souplesse.
Je veux aussi revenir sur les propos de nos collègues Nassimah Dindar et Victorin Lurel. La dépendance de nos outre-mer aux énergies fossiles est grave et lourde de conséquences. Aussi, il me paraît essentiel de mettre en place une stratégie nationale de développement de l’économie bleue, et plus particulièrement des énergies marines renouvelables.
Cette orientation devrait être consensuelle, car il est primordial que nos outre-mer acquièrent leur indépendance énergétique. Elle contribuerait en outre à la préservation de l’environnement via l’exploitation d’énergies renouvelables.
Dans cette perspective, il conviendrait d’encourager les expérimentations en s’appuyant sur des initiatives prises localement. Ainsi, en Polynésie française, l’hôpital de Papeete est climatisé grâce aux énergies marines renouvelables. Je pourrais citer encore beaucoup d’autres exemples comme celui-ci.
Nous pourrions faire de cette ambition un objectif partagé, d’autant que sa mise en œuvre entraînerait des retombées économiques intéressantes pour le pays, aurait des conséquences sociales positives pour nos compatriotes ultramarins, mais aussi des conséquences environnementales tout à fait vertueuses pour la planète.
M. le président. L’amendement n° 324, présenté par MM. Gontard, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« 3° En cas de menace sur la sécurité d’approvisionnement en gaz naturel ou en électricité au niveau local, national ou européen, décider de mesures de rationnement de la fourniture de certains acteurs économiques.
« À cet effet, au plus tard deux mois après la promulgation de la présente loi, le ministre chargé de l’énergie établit une liste d’activités économiques non essentielles pouvant être prioritairement concernées par les mesures prévues au 3°.
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement va dans le même sens que celui qu’a présenté tout à l’heure mon collègue Daniel Salmon. Mon intervention s’inscrit aussi dans le prolongement des propos tenus par Mme la ministre sur la nécessité d’anticiper et de planifier.
Les tensions actuelles sur le marché de l’électricité, le risque de blackout dû, précisément, à un manque d’anticipation et de planification, le retard accumulé par notre pays en matière d’énergies renouvelables, l’effet ciseaux entre l’augmentation de la consommation et la baisse de la production, liée notamment à l’état de notre parc nucléaire, nous obligent à rouvrir des centrales à charbon, à rebours des engagements pris par notre pays dans le cadre des accords de Paris. Il faut assumer collectivement cette orientation.
Cet amendement s’inscrit également dans le prolongement des propos du Président de la République qui, le 13 juin dernier, annonçait que la France était entrée dans une économie de guerre, dans le cadre de laquelle nous allions devoir nous organiser.
L’effort de sobriété doit être partagé par l’ensemble des composantes de la société, plus particulièrement les activités économiques non essentielles. Il est nécessaire d’établir une liste de ces activités, afin de prévoir des mesures de rationnement en cas de forte pénurie.
De plus, cette liste permettra de travailler à la réorganisation de ces activités non essentielles, dans un esprit de sobriété, d’efficacité énergétique et climatique. Je pense notamment aux problèmes posés par les emballages plastiques, les prospectus – les exemples sont nombreux.
À l’heure où l’on demande aux particuliers de débrancher le wifi, il me paraît normal que nous nous intéressions à un secteur qui est responsable de la majorité des dépenses énergétiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. L’article 12 prévoit déjà des pouvoirs importants de réquisition, de suspension et de restriction.
Le rationnement proposé, dont le cadre et le contenu sont flous, est attentatoire à la liberté d’entreprendre.
Par ailleurs, aucune indemnisation n’est prévue, contrairement aux cas de figure où l’on aurait recours aux pouvoirs déjà prévus par cet article.
Enfin, l’application de cette mesure conduirait à distinguer les activités économiques essentielles de celles qui ne le sont pas. Or, depuis la crise sanitaire, nous savons que ce n’est pas une mince affaire, et que cette différenciation peut entraîner beaucoup d’effets de bord.
La commission demande donc le retrait de l’amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Gontard, l’amendement n° 324 est-il maintenu ?
M. Guillaume Gontard. Oui, je le maintiens. C’est justement tout l’intérêt de notre amendement : différencier les activités essentielles et les autres.
Face au risque de blackout, nous devons pouvoir intervenir prioritairement sur les activités non essentielles. Établir une telle liste inciterait également lesdites activités à s’engager dans une démarche de transition.
M. le président. L’amendement n° 214 rectifié, présenté par M. Montaugé, Mmes Van Heghe et Artigalas, MM. Bouad et Cardon, Mmes Blatrix Contat et M. Filleul, MM. Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Lubin, Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Assouline et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. Chantrel, Mme Carlotti, M. Cozic, Mme de La Gontrie, MM. Devinaz, Féraud, Jacquin, P. Joly et Marie, Mmes Monier et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, MM. Stanzione, Temal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5
1° Après la deuxième phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Les mesures prévues aux mêmes 1° et au 2° ne s’appliquent qu’en dernier recours pour les installations de cogénération en contrat libre.
2° Quatrième phrase
Remplacer les mots :
Les mesures prévues aux mêmes 1° et au 2°
par les mots :
Ces mêmes mesures
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Pour faire face aux menaces qui pèsent sur nos approvisionnements en gaz naturel, l’article 12 offre la possibilité au ministre chargé de l’énergie de réquisitionner des centrales à gaz produisant de l’électricité ou d’en restreindre le fonctionnement.
L’Assemblée nationale a cependant prévu d’exclure du périmètre de réquisition les installations de cogénération au gaz naturel qui alimentent des réseaux de chaleur ou pour lesquels un contrat d’obligation d’achat d’électricité existe.
Or certains industriels n’entrent pas dans le champ de cette exclusion, car ils disposent de contrats dits libres. Une partie de l’électricité qu’ils produisent est autoconsommée pour les besoins du site, mais une autre partie est directement revendue à des opérateurs.
C’est cette double utilisation, autoconsommation d’un côté, revente au réseau de l’autre, qui explique que nombre de ces sites ont contractualisé avec les gestionnaires de réseaux électriques, non pas sous la forme de contrats d’obligation d’achat d’électricité, mais sous celle de contrats libres. Ces industriels considèrent l’absence de protection à laquelle ils doivent se résoudre comme une véritable discrimination à leur égard et souhaitent par conséquent figurer dans le périmètre d’exclusion dont bénéficient les centrales à gaz.
Madame la ministre, je le reconnais, nous ne savons pas si la production électrique de ces industriels pourrait être indispensable en cas de difficultés d’approvisionnement. C’est la raison pour laquelle nous avons prévu de les inclure dans le périmètre de réquisition, tout en précisant qu’on ne pourrait les appeler qu’en dernier recours.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Tout d’abord, cet amendement tend à limiter le champ des pouvoirs de restriction, de suspension ou de réquisition prévus par l’article 12, qui sont pourtant nécessaires pour faire face à la crise énergétique.
Ensuite, les installations en contrat libre sont mal définies. Si les installations de cogénération pour lesquelles un contrat d’achat est en vigueur ont été exonérées du dispositif, c’est parce que ces contrats permettent déjà d’effectuer un contrôle strict.
Lors de mes auditions, j’ai constaté que l’insertion des installations sous contrat libre dans le périmètre d’exclusion n’était pas demandée de manière consensuelle par tous les professionnels des secteurs du gaz, de la chaleur et des industries énergo-intensives.
Enfin, tel qu’il est rédigé, l’amendement, s’il était adopté, ferait passer les installations en contrat libre devant celles pour lesquelles un contrat d’achat s’applique ou celles qui sont reliées au réseau public de chaleur ou de froid, ce qui peut paraître assez paradoxal.
Pour ces raisons, la commission demande le retrait de l’amendement ; à défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Je précise que la rédaction actuelle du dispositif résulte d’un compromis, à l’origine duquel on trouve notamment la députée Marie-Noëlle Battistel. Il me semble qu’il s’agit d’un bon équilibre pour préserver de manière effective les réseaux de chaleur.
Il ne faut pas présenter cette mesure comme un dispositif punitif, bien au contraire. Encore une fois, l’enjeu est de se doter de tous les moyens pour protéger les Français. Je rappelle qu’en cas de délestage ce sont les industriels et les plus grosses installations auxquels on fera prioritairement appel, pour des raisons évidentes de pilotage et d’efficacité. C’est du reste précisément pour éviter de ne faire pression que sur ces acteurs que nous nous efforçons de nous préparer le plus en amont possible.
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. Madame la ministre, il serait intéressant de pouvoir anticiper en recourant à des systèmes de backup.
L’amendement de mon collègue Franck Montaugé, s’il était adopté, nous donnerait justement la possibilité de mettre en place de telles habilitations, c’est-à-dire de déterminer à l’avance qui pourrait définir des normes de conformité qui permettraient, en cas de besoin, de recourir à des systèmes de backup dans les endroits les plus isolés, là où les gros industriels ne seraient pas en mesure de fournir suffisamment d’électricité.
M. le président. Les amendements nos 1 et 296 rectifié ne sont pas soutenus.
L’amendement n° 216 rectifié, présenté par M. Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad et Cardon, Mmes Blatrix Contat et M. Filleul, MM. Kanner, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Lubin, Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Lurel, Assouline et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. Chantrel, Mme Carlotti, M. Cozic, Mme de La Gontrie, MM. Devinaz, Féraud, Jacquin, P. Joly et Marie, Mmes Monier et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Stanzione, Mme Van Heghe, M. Temal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La Commission de régulation de l’énergie veille au respect des dispositions du présent article en particulier s’agissant de la proportionnalité entre les décisions prises et la gravité de la menace ainsi que de leur temporalité.
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Nous sommes conscients que, dans le contexte actuel de tension sur nos approvisionnements énergétiques, il faut mettre en œuvre des dispositifs exceptionnels pouvant aller jusqu’à la réquisition d’installations produisant de l’électricité.
Néanmoins, nous pensons qu’il est nécessaire de mettre en place un contrôle effectif sur les pouvoirs exceptionnels de réquisition ainsi confiés au pouvoir exécutif.
C’est pourquoi nous souhaitons confier à la Commission de régulation de l’énergie (CRE) le contrôle, tant en termes de proportionnalité que de temporalité, de l’adéquation entre les mesures prises par le Gouvernement et l’état de la menace pesant sur la sécurité d’approvisionnement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Je ne suis pas favorable à cet amendement, tout simplement parce qu’il a pour objet de confier à la CRE le soin d’apprécier la proportionnalité et la temporalité des mesures de restriction, de suspension, de réquisition prises au regard d’une menace grave et imminente.
La CRE, dont j’ai auditionné les représentants, n’est pas demandeuse d’une telle responsabilité, d’autant qu’elle s’est vu confier une mission de régulation. Un tel pouvoir d’appréciation sur la menace existante ou les mesures prises modifierait substantiellement ses attributions.
Je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Montaugé, l’amendement n° 216 rectifié est-il maintenu ?
M. Franck Montaugé. Madame la ministre, qui effectue ce contrôle ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. C’est le juge ! Ici, l’exécutif est dans son rôle, c’est-à-dire qu’il prend les mesures dans le cadre de la loi, et le juge le contrôle. Cela s’appelle l’équilibre des pouvoirs judiciaire, législatif et exécutif.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 209, présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 10
Supprimer les mots :
notamment sa durée qui ne peut excéder cinq ans
II. – Alinéa 12
Rédiger ainsi cet alinéa :
III. – Chaque année, après la promulgation de la présente loi, le Parlement est obligatoirement saisi pour se prononcer pour la prorogation, l’abrogation ou la modification des dispositions du présent article.
La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. Notre groupe est conscient de la nécessité de mettre en place des dispositifs exceptionnels, afin que l’État puisse se prémunir des effets de la faible disponibilité – c’est peu de le dire ! – du parc électronucléaire, et de la fin progressive de nos importations de gaz naturel en provenance de Russie.
Cependant, ces mesures confèrent au ministre chargé de l’énergie des pouvoirs particulièrement importants, comme la réquisition, la restriction ou la suspension d’activités. Dès lors, il est impératif de respecter les prérogatives de contrôle du Parlement.
C’est pourquoi nous proposons qu’il revienne à ce dernier de se prononcer chaque année sur la prorogation, l’abrogation ou la modification des dispositions exceptionnelles prévues par le présent article.
Une démocratie mature ne saurait se priver d’avis, de consultations et du contrôle démocratique du Parlement. Je pense que cette position peut être largement partagée dans cette enceinte.
M. le président. L’amendement n° 217 rectifié, présenté par M. Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad et Cardon, Mmes Blatrix Contat et M. Filleul, MM. Kanner, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Lubin, Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Assouline et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. Chantrel, Mme Carlotti, M. Cozic, Mme de La Gontrie, MM. Devinaz, Féraud, Jacquin, P. Joly, Lurel et Marie, Mmes Monier et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Stanzione, Mme Van Heghe, M. Temal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Remplacer les mots :
cinq ans
par les mots
deux ans
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Nos collègues députés ont souhaité encadrer le dispositif de l’article 12 dans le temps, en le limitant à cinq ans.
Nous considérons que cette durée devrait être réduite, car durant ces cinq années le ministre chargé de l’énergie aurait la faculté de prendre des mesures exceptionnelles de restriction ou de suspension du fonctionnement des centrales à gaz.
Si notre groupe est conscient de la nécessité de mettre en place des dispositifs exceptionnels, afin que le Gouvernement puisse sécuriser nos approvisionnements électriques et gaziers face au manque de disponibilité de notre parc électronucléaire et aux menaces qui pèsent sur nos importations de gaz naturel, en provenance de Russie notamment, il estime que la durée de tels dispositifs exceptionnels ne doit pas être excessive.
Sans visibilité sur l’issue du conflit en Ukraine, il nous semble disproportionné de prolonger le dispositif au-delà de deux ans, d’autant que la production d’électricité par la combustion de gaz naturel ne constitue pas une solution souhaitable et pérenne si la France veut réellement atteindre ses objectifs en matière de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre.
Avancer la date de caducité de cette mesure contraindra le Gouvernement, comme pour les lois sur l’état d’urgence, à solliciter l’accord du Parlement avant toute prorogation. Nous pourrons alors nous prononcer en faisant le point sur la situation géopolitique, la menace existant sur notre sécurité d’approvisionnement électrique, la proportionnalité du dispositif et le respect de nos objectifs de décarbonation de notre économie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Ces deux amendements ont un même objet : limiter la durée d’application des pouvoirs de restriction, de suspension et de réquisition de l’exécutif.
Les auteurs de l’amendement n° 209 prévoient une durée de caducité d’un an, renouvelable tous les ans, tandis que les auteurs de l’amendement n° 217 rectifié proposent une durée de deux ans.
L’article 12, tel qu’il a été adopté par notre commission, prévoit une durée d’application du dispositif fixée par décret, qui ne peut excéder cinq ans. Ce délai maximum est nécessaire, car la crise énergétique pourrait durer.
Par ailleurs, un raccourcissement de cette durée est toujours possible par voie réglementaire, ce qui permettrait de s’adapter à un éventuel changement de circonstances.
Pour ces raisons, je demande le retrait de ces amendements, faute de quoi j’y serai défavorable.