Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, c’est dans un moment très particulier qu’intervient l’examen de ce texte, et je m’associe aux paroles de Mme la ministre sur l’Ukraine.
Notre histoire contemporaine est le résultat du dévouement des fantassins, des tankistes de la ligne Maginot. Notre futur dépend du courage de ceux qui défendent, en ce moment même, les intérêts stratégiques de la France, mais aussi les valeurs et principes de la Nation.
L’histoire du monde combattant, c’est tout simplement l’histoire de France. L’histoire du monde combattant a irréversiblement forgé une part de notre identité collective.
Alors que nous débattons, de nombreux militaires sont engagés sur des théâtres d’opérations extérieurs. Je salue leur bravoure, leur engagement pour préserver la paix et les populations.
J’aimerais également profiter de ce moment pour saluer la mémoire du brigadier Alexandre Martin, militaire du 54e régiment d’artillerie d’Hyères, mort il y a un mois à l’âge de 24 ans dans le cadre d’une attaque au mortier contre ce qui constituait la principale base de l’opération Barkhane, près de Gao.
Bien évidemment, nous soutenons l’initiative de Jocelyne Guidez et de plusieurs de ses collègues, qui ont déposé cette proposition de loi. En visant à renommer l’« Office national des anciens combattants et victimes de guerre » en « Office national des combattants et des victimes de guerre », ce texte crée ce trait d’union entre le passé, le présent et la transmission de la mémoire à notre jeunesse.
Anciens combattants, militaires de l’armée française, victimes civiles d’actes de guerre ou de terrorisme, associations et fondations : ces acteurs constituent le monde combattant dans sa diversité, et ont toujours été écoutés par les parlementaires.
Ici, au Sénat, nous nous accordons de manière transpartisane sur la nécessité d’une reconnaissance des droits à réparation et sur l’enjeu de la transmission de la mémoire. Je n’imagine pas une issue négative à ce texte qui correspond parfaitement à toutes les mesures mises en place sous ce quinquennat et votées par le Parlement.
Je pense notamment au plan Ambition armées-jeunesse, présenté en mars 2021 et visant à renforcer les dispositifs existants en faveur de la citoyenneté, de l’attractivité et de l’égalité des chances.
Je pense aussi au projet de loi de finances pour 2022, qui a renforcé les droits des anciens combattants par une mesure d’ampleur touchant les pensions militaires d’invalidité et la retraite du combattant, et a également amélioré l’effort de solidarité en faveur des rapatriés, parmi lesquels, à titre principal, les supplétifs, leurs conjoints survivants et leurs enfants. Ainsi, 27 millions d’euros seront consacrés à ces personnes au titre des dispositifs actuels.
Je me dois aussi de rappeler que le programme 169 de la loi de finances, « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation », a été renforcé par les actions concernant les liens armées-Nation, avec des crédits alloués à la Journée défense et citoyenneté, au service militaire volontaire ou encore aux politiques mémorielles.
Je pense aussi à la hausse de 2 points de la retraite du combattant dans la loi de finances pour 2018, à l’attribution de la carte du combattant au profit des militaires déployés en Algérie entre le 3 juillet 1962 et le 1er juillet 1964, ou bien encore à l’extension de la reconnaissance des conjoints survivants des grands invalides de guerre.
Madame la ministre, depuis votre arrivée au ministère des armées, vous avez répondu à nombre de demandes des associations jusqu’alors restées sans réponse. Ces mesures, ces dispositifs et cette proposition de loi ont une forte portée qui n’est pas que symbolique, et ils témoignent de notre attachement profond au système de reconnaissance, de réparation et d’accompagnement mis en œuvre en faveur de ceux qui ont porté et portent encore nos armes.
Nous voterons donc pour ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue.
M. Jean-Louis Lagourgue. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nos forces armées sont engagées dans des opérations au Sahel, dans la lutte contre le djihad, et contribuent à notre sécurité. Elles constituent la seule armée complète en Europe.
J’aimerais saluer l’engagement extraordinaire des femmes et des hommes qui composent notre armée. Ils assurent la défense du territoire national, ainsi que la protection des intérêts de notre pays, au péril de leur vie. J’ai également une pensée pour les familles qui les soutiennent dans leurs engagements, mais aussi après le retour.
La modification du nom de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre s’inscrit dans une volonté qui dépasse le changement de nomination.
Cet office centenaire a pour but principal d’accompagner les anciens combattants ainsi que leurs familles. Tout au long de son histoire, ses missions se sont transformées au fur et à mesure des évolutions du monde combattant. Nous entrons dans une nouvelle phase de transformation pour l’Office et ses missions. Les objectifs restent cependant les mêmes et correspondent aux prérogatives de ce dernier : la reconnaissance et la réparation, la solidarité et la mémoire.
Je profite du temps qui m’est accordé pour saluer l’action de l’Office et son implantation essentielle dans nos territoires. Chacun sait combien il est important d’aller au plus près de nos concitoyens.
Ce texte, bien loin d’être symbolique, propose donc le changement de nom de l’Office dans toutes les dispositions législatives qui s’y rapportent. À ce titre, les modifications effectuées par les deux chambres du Parlement permettent de couvrir les différents codes et de revenir sur des erreurs d’appellation qui subsistaient dans certaines parties de ceux-ci.
Je soutiens également l’évolution, depuis le dépôt du texte, intervenue en première lecture, ici au Sénat, laquelle consistait, à la fois, à conserver le sigle de l’Office et sa sonorité, et à répondre aux attentes du tissu associatif, très impliqué sur ce dossier.
Nous comprenons la demande d’adoption conforme de ce texte : d’abord, parce qu’il est équilibré et qu’il atteint l’objectif fixé ; ensuite, parce qu’il prévoit une entrée en vigueur des dispositions le 1er janvier prochain.
Je tiens à saluer le travail qui a été effectué tout au long de la navette parlementaire, et particulièrement ce qui a été fait au Sénat jusqu’à cette seconde lecture. La commission et notre rapporteure ont posé le cadre de débats constructifs.
La paix n’est jamais acquise. Les tensions mondiales s’exacerbent et nous pouvons compter sur la volonté et l’action de nos forces armées. C’est inestimable et nous devons, nous aussi, leur apporter notre soutien.
L’Office contribue à ce soutien. Nous devons lui donner des moyens suffisants pour remplir ses missions, et permettre un meilleur accompagnement de nos combattants, tout particulièrement pour ce qui est du retour à la vie civile. Ce point me paraît essentiel et il concourt aux évolutions multiples que nous vivons.
Le groupe Les Indépendants votera donc en faveur de l’adoption de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI.)
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Marc Laménie. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite m’associer, moi aussi, aux propos de Mme la ministre sur l’Ukraine et affirmer notre soutien au peuple ukrainien.
Hier, dans cet hémicycle, le Gouvernement a fait une déclaration, suivie d’un débat, en application de l’article 50-1 de la Constitution, relative à l’engagement de la France au Sahel. Sont intervenus, à ce titre, le Premier ministre, la ministre des armées, le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, ainsi que le président de la commission des affaires étrangères du Sénat, Christian Cambon, et des collègues de tous les groupes de notre assemblée. À cette occasion furent évoqués, comme aujourd’hui, le respect que nous devons à nos militaires qui ont donné leur vie, notamment au cours d’opérations extérieures dans le cadre de l’engagement de la France au Sahel, et le devoir de mémoire.
Nous soutiendrons la présente proposition de loi relative au monde combattant.
En janvier dernier, madame la ministre, vous avez participé à nos débats dans cet hémicycle sur le projet de loi portant reconnaissance de la Nation et réparation des préjudices subis par les harkis, par les autres personnes rapatriées d’Algérie anciennement de statut civil de droit local et par leurs familles du fait des conditions de leur accueil sur le territoire français, et notamment des articles 3 et 4 relatifs à l’instruction des dossiers par l’ONACVG, lequel joue un rôle important à cet égard.
L’ONACVG est également au service de l’ensemble des associations patriotiques et de mémoire. Je veux citer ainsi l’œuvre du Bleuet de France et ses ventes caritatives annuelles des 8 mai et 11 novembre, et l’engagement auprès des jeunes, comme le Concours national de la résistance et de la déportation et les liens établis avec l’éducation nationale, autant d’acteurs pour lesquels l’Office est un interlocuteur important.
Madame la ministre, je tiens à vous remercier de nous recevoir, ma collègue Jocelyne Guidez et moi-même, une ou deux fois par an, pour travailler sur la mission « Anciens combattants, mémoire et lien avec la Nation » dans le cadre de la préparation de la loi de finances. Nous apprécions ce travail en commun, comme celui effectué avec Mme la ministre des armées.
L’ONACVG est l’un des deux principaux opérateurs de l’État pour ce qui concerne ce budget qui s’élève au total à un peu moins de 2 milliards d’euros – nous le regrettons –, l’autre opérateur étant l’Institution nationale des Invalides. Nous regrettons également la baisse des effectifs de l’ONACVG, qui sont passés de 1 636 équivalents temps plein (ETP) en 2016 à 805 actuellement.
Vous vous êtes engagée, madame la ministre, à maintenir un maillage du territoire, afin que l’Office soit représenté partout dans notre pays. On compte ainsi 104 services déconcentrés sur l’ensemble des départements de métropole et d’outre-mer, ainsi qu’en Algérie et au Maroc. Cela représente une masse financière de 123 millions d’euros consacrée à l’ONACVG. Je veux saluer, en outre, le contrat d’objectifs et de performance pour les années 2020 à 2025, ainsi que l’important volet social de l’Office.
À titre personnel, et au nom du groupe Les Républicains, je soutiendrai cette proposition de loi, en insistant sur le rôle de relais de l’ONACVG, sur le terrain, en faveur du monde combattant. Nous approuvons, par ailleurs, la nouvelle dénomination de l’Office.
Nous saluons le travail qui a été réalisé et voterons ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDSE, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je ne comptais pas évoquer de nouveau l’Ukraine, mais je suis obligé de le faire au vu de l’évolution de la situation. Je suis persuadé que le gouvernement français fera preuve de solidarité envers l’Ukraine – tout au moins je l’espère – et de fermeté vis-à-vis de Poutine. Je sais que nos concitoyens se sont mobilisés à Paris, à midi, et se mobiliseront de nouveau à dix-huit heures.
En tant que représentants du peuple français, notre rôle consiste également à nous mobiliser pour défendre l’Ukraine, ce qui veut dire aussi défendre l’Europe.
Nous examinons donc une seconde fois la proposition de loi relative au monde combattant. L’Assemblée nationale a jugé utile de modifier légèrement la rédaction du Sénat et en a profité pour corriger quelques incohérences entre les normes, ce qui ne change ni la nature ni l’objectif de ce texte que le groupe écologiste votera, comme en première lecture.
Depuis maintenant plus d’un siècle, l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre œuvre auprès de nos combattantes, de nos combattants et de leurs familles pour leur apporter l’assistance et la reconnaissance qui leur sont dues.
Pour assurer la pérennité et la mise en œuvre de ses missions, l’ONACVG doit refléter une image fidèle de toutes celles et de tous ceux qui forment le monde combattant, afin qu’elles et ils puissent s’y reconnaître.
Or, si aujourd’hui 30 000 personnes éligibles à la carte du combattant n’en ont pas fait la demande, si les associations du monde combattant peinent à fédérer la jeune génération, un constat s’impose : l’Office national des anciens combattants renvoie à un imaginaire collectif quelque peu dépassé.
En effet, avec l’arrivée de la quatrième génération du feu, engagée dans des opérations extérieures depuis la décennie 1990, le monde combattant change progressivement de visage : il est plus jeune, plus féminisé, plus diversifié. Les membres de cette génération, moins nombreux que les anciens de la guerre d’Algérie, ont été engagés sur une plus grande variété d’opérations et ont un rapport exclusivement professionnel à leur service, très différent de celui des générations précédentes. Il est donc entièrement légitime que le nom de l’Office national chargé de leurs dossiers reflète cette évolution. C’est pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires accueille favorablement la présente proposition de loi.
Bien que ce changement de dénomination ne modifie pas les missions de l’Office, nous soutenons les initiatives visant à engager une réflexion sur le futur de la politique pour le monde combattant. L’entretien et la transmission de la mémoire des anciens combattants en sont des composantes essentielles, mais pas les seules.
Si cette évolution ne s’accompagnait pas d’une attention supplémentaire aux besoins et demandes de ses nouveaux ressortissants, cette institution perdrait de sa pertinence. Cela se concrétisera notamment par des besoins accrus dans le domaine de l’accompagnement au retour à la vie civile et à la vie professionnelle ou par la reconnaissance des militaires engagés en opération intérieures.
L’essentiel du travail reste donc à accomplir.
Enfin, nous regrettons toujours l’abandon de la formulation originelle de la proposition de loi – Office national du monde combattant –, qui permettait d’éviter le retour de la mention du genre des personnels de l’armée française dans ce nouveau nom. Si nous comprenons l’attachement au symbole qu’est le sigle ONACVG ainsi conservé, nous regrettons que ce symbole contribue à perpétuer le peu de visibilité des femmes au sein de nos armées.
Une meilleure inclusion et une meilleure représentation des jeunes combattantes par l’ONACVG et par les associations du monde combattant s’imposent pourtant, particulièrement depuis le lancement du plan Mixité par le ministère des armées en mars 2019. Notre armée est, paraît-il, la quatrième armée la plus féminisée du monde. En tant que pacifiste invétéré, je ne sais pas si je dois m’en réjouir, mais les faits sont là ! Plus de femmes, moins d’hommes : peut-être arriverons-nous un jour à l’équilibre !
Malgré cette réserve sémantique, et pour permettre une adoption conforme de ce texte avant la suspension, nous n’avons pas déposé d’amendement et nous voterons donc en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements au banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi du groupe Union Centriste modifie l’intitulé de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, afin de tenir compte de l’évolution des conflits armés au XXIe siècle.
L’actualité ukrainienne illustre malheureusement la résurgence des menaces militaires dans le monde et sur notre continent. Notre groupe exprime, lui aussi, sa solidarité pleine et entière à l’égard du peuple ukrainien.
En France, l’extinction progressive des générations entraîne une diminution du nombre d’anciens combattants qui représentent environ un million de personnes, pour l’essentiel des anciens combattants de la guerre d’Algérie.
Le Sénat a adopté définitivement, le 9 février dernier, la loi portant reconnaissance de la Nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d’Algérie.
Alors qu’auront lieu le 19 mars prochain les commémorations du soixantième anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie, il est indispensable, dans un mouvement d’apaisement, de continuer le travail de mémoire des historiens et des chercheurs sur la colonisation et la guerre d’Algérie.
Cette proposition de loi reprend une demande des associations tendant à moderniser l’image de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre pour attirer les jeunes militaires qui ne se reconnaissent pas dans la notion actuelle d’« ancien combattant ».
En renommant l’« Office national des anciens combattants et victimes de guerre » en « Office national des combattants et des victimes de guerre », ce texte cherche à sortir l’Office de l’image négative de la notion d’ancien combattant.
Cette modification est symbolique – beaucoup l’ont rappelé ici –, mais nécessaire, car le monde combattant n’englobe pas seulement les militaires qui ont servi la France lors des deux premiers conflits mondiaux, mais aussi de nombreux citoyens engagés sur des théâtres d’opérations extérieurs. Je pense notamment au Tchad, à la Côte d’Ivoire, au Liban, à l’Afghanistan, sans oublier nos forces mobilisées dans le cadre de l’opération Barkhane au Sahel et au Sahara.
La reconnaissance des militaires dépasse le cadre sémantique ; elle prend aussi la forme d’une amélioration de la situation sociale et financière des personnes concernées et de leurs familles.
Alors que la réduction du nombre de bénéficiaires de la carte d’ancien combattant sert de justification, depuis des années, à la réduction des moyens de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre pour accomplir ses missions, il est impératif de réfléchir à l’amélioration de la prise en charge des combattants blessés, notamment les victimes de psychotraumatismes.
Enfin, je voudrais rappeler le rôle indispensable des associations dans l’accompagnement social, financier et culturel des anciens combattants. Je pense en particulier à l’Association républicaine des anciens combattants (ARAC), créée en 1917 par Henri Barbusse et Paul Vaillant-Couturier, qui traverse actuellement des difficultés pour financer son journal Le réveil des combattants. Le Gouvernement doit soutenir l’ARAC, comme toutes les associations, pour qu’elle poursuive son engagement centenaire en faveur de la lutte contre le fascisme, pour l’amitié et la paix entre les peuples, contre les inégalités et pour la défense de tous les droits sociaux.
Les associations d’anciens combattants ne se contentent pas d’assurer la présence de porte-drapeaux au moment des cérémonies ; elles représentent surtout un engagement en faveur de la paix, de l’histoire, de la mémoire et de la citoyenneté. Nous profitons de cette occasion pour leur rendre hommage.
Pour toutes ces raisons, nous voterons cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et au banc des commissions. – M. Marc Laménie applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Devésa. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Brigitte Devésa. Madame la présidente, madame la ministre, madame la rapporteure, chère Jocelyne Guidez, qu’il me soit permis, en ce jour où l’Ukraine a été réveillée par le bruit sourd de la guerre, de rappeler que la guerre est là, en Europe. Alors que j’ai une pensée pour nos combattants, nos héros et les victimes de guerre, je souhaite adresser le salut de la patrie au peuple ukrainien.
Mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui en deuxième lecture la proposition de loi que notre rapporteure a déposée et qui vise à modifier l’intitulé de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, pour qu’il devienne l’Office national des combattants et des victimes de guerre.
Cette proposition a fait l’objet d’un consensus dès sa genèse : elle a été cosignée par de nombreux sénateurs au-delà de notre groupe centriste, après avoir été construite avec les associations du monde combattant et en lien avec le ministère. Je m’en réjouis.
La modification de l’intitulé n’est pas qu’un symbole. L’auteure a proposé une modification qui tend, à la fois, à ne pas altérer la valeur de l’acronyme pour les anciens combattants et à permettre aux jeunes combattants de se reconnaître dans cet Office national. Je le rappelle, celui-ci délivre la carte du combattant à ceux qui ont servi au moins quatre mois, soit la durée d’une campagne d’OPEX, et leur propose un guichet d’accompagnement dès leur première mission.
L’Office a bien pour objectif de s’occuper de tous ceux qui ont servi la France, qui ont choisi le métier des armes, ou encore les appelés qui ont servi sous les drapeaux. Nous parlons des anciens combattants tels que l’inconscient collectif les imagine : je songe à ceux de la Grande Guerre, qui a fait 1,5 million de morts ou de disparus, à ceux de 39-45 ou encore à ceux des conflits plus récents d’Indochine et d’Afrique du Nord.
Mais nous parlons aussi des anciens combattants des OPEX actuelles, ceux que l’on appelle la quatrième génération du feu. Je veux leur apporter tout mon soutien.
Aujourd’hui, les anciens combattants d’Algérie, dont les plus jeunes approchent des 80 ans, sont près d’un million à être titulaires d’une carte du combattant selon les données des questionnaires budgétaires.
Les guerres d’aujourd’hui ont changé de visage. Nos soldats se battent désormais sur les théâtres extérieurs, en OPEX. Nous débattions justement hier de l’implication de la France au Sahel. Comme l’exprime le Président de la République, ils sont « à la fois nos sentinelles et notre bouclier ».
Les missions de l’ONACVG ne sont en rien modifiées par cette proposition de loi : reconnaissance et réparation, solidarité et mémoire. L’Office assure la reconnaissance de la Nation par l’octroi du titre de combattant et de la carte du combattant, qui compte actuellement un million de titulaires, un chiffre qui va malheureusement en décroissant. De plus, on estime à 30 000 le nombre de combattants qui n’ont pas demandé cette carte à laquelle ils ont pourtant droit.
Cela a été dit, l’ONACVG assure l’accompagnement de ses ressortissants : vétérans des conflits et victimes civiles d’actes de guerre ou de terrorisme, mais également leurs descendants - pupilles de la Nation – et ascendants.
Il assure, en complémentarité avec le ministère des armées, le retour à la vie civile et l’insertion professionnelle des combattants – des missions amenées à prendre une place croissante dans l’action de l’Office.
Enfin, cette appellation combattante, active, permettra – je l’espère – de sensibiliser les jeunes soldats au devoir de mémoire envers les générations qui les ont précédés, mais aussi à la transmission de leur propre engagement auprès des jeunes générations et des associations et fondations pour entretenir et faire vivre ensemble cette mémoire dans les territoires.
La mémoire des actions menées par nos militaires, leur engagement pour la France, parfois au péril de leur vie, constituent sans nul doute une composante importante de notre sentiment partagé d’appartenance à un grand État démocratique, en somme à l’idée que l’on se fait de la France.
Cette proposition de loi sur la modification de l’intitulé de l’ONACVG est plus que symbolique, mais je crois à la force du symbole, car cette prise de position volontaire et engagée amorce une évolution nécessaire de la politique en faveur du monde combattant et, surtout, comme le souligne notre rapporteure, « impulse une évolution dans le regard que la société porte sur les vétérans des conflits ».
Madame la ministre, nous n’ignorons pas que le Gouvernement souhaitait déposer lors de cette navette un amendement malheureusement irrecevable : il devait modifier les conditions de nomination du président du conseil d’administration du futur Office national des combattants et des victimes de guerre, qui est un établissement public à caractère administratif sous tutelle du ministre de la défense.
Actuellement, la gouvernance de l’Office est assurée par « le ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre ». Cette situation porte atteinte au principe d’autonomie de l’établissement public en plaçant l’autorité de tutelle à la tête de l’organe détenant le pouvoir de décision le plus général en son sein. Il faudra, à la faveur d’un autre texte, tirer les conséquences des remarques de la haute juridiction administrative pour que le président du conseil d’administration soit nommé par décret en conseil des ministres, à l’instar du directeur général. Soyez assurée de trouver le soutien du groupe de l’Union centriste lorsqu’une telle modification sera présentée.
Enfin, je salue le travail de coordination mené par nos collègues députés qui nous adressent un texte amélioré.
Ainsi, notre groupe votera conforme cette proposition de loi qui, au-delà de l’intitulé, contribuera à renforcer la reconnaissance et le respect envers nos combattants, qui défendent, au prix de leur vie, nos valeurs et notre pays. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et SER, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ceux de 14, ceux de 39-45, ceux d’Indochine, ceux d’Algérie et d’Afrique du Nord, et ceux d’aujourd’hui, nos soldats en opérations extérieures : tout ce monde combattant, qui conjugue à la fois le passé et le présent, fait la fierté de notre pays.
Je n’oublie pas le rôle particulier des forces supplétives en Algérie dont nous avons récemment discuté dans le cadre du projet portant reconnaissance de la Nation et réparation des préjudices subis par les harkis.
Tous les sacrifices que ces catégories ont consentis pour la France justifient à la fois les hommages et les attentions. Depuis longtemps, l’État a mis en place une politique ambitieuse à l’égard du monde combattant déclinée par un volet mémoriel, d’une part, et un volet réparation, d’autre part. Régulièrement, au Sénat, nous tenons à l’enrichir, parce que, en tant qu’élus des territoires, nous recevons bien souvent le témoignage des combattants.
Ce texte, qui vise à renommer l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, recueillera l’approbation du RDSE, car il répond à une attente, même si, fort logiquement, les combattants d’aujourd’hui seront les anciens de demain. Il traduit néanmoins une évolution, avec la disparition de ceux qui se sont engagés dans les grandes guerres ou les guerres d’indépendance.
Ce qu’on appelle l’attrition naturelle ne doit en aucun cas conduire à l’oubli. Chaque année, le débat budgétaire nous invite à discuter des moyens de la politique de mémoire – M. Laménie le sait bien, puisqu’il en est le rapporteur spécial. Il est essentiel de les conserver afin de tenir éclairée la conscience de nos jeunes citoyens et de pousser certains d’entre eux à une forme d’engagement.
Aujourd’hui, les anciens combattants ancrés dans notre imaginaire laissent la place aux soldats des opérations extérieures. Plus de 27 000 cartes ont été attribuées aux militaires ayant exercé leurs missions en Afghanistan. J’en profite pour saluer celles accomplies par les hommes et les femmes de l’opération Barkhane au Mali. Bien que la situation au Sahel soit encore très difficile, ils ont remporté des succès opérationnels qui méritent d’être soulignés, ne serait-ce que par respect pour les 53 morts pour la France et tous les blessés qu’il ne faut pas oublier.
Au sein de ce nouveau monde, on le sait, il y a plus de femmes, plus d’actifs et moins d’invalides de guerre. Ce changement induit des besoins nouveaux, notamment en matière d’action sociale.
Je ne doute pas que l’Office national des combattants et des victimes de guerre saura y répondre, tant que l’on préserve ses moyens et son maillage territorial. Madame la ministre, en tant que membre de la commission des finances, je suis heureux de voir que le contrat d’objectifs et de performance pour les années 2020 à 2025 de l’Office va dans ce sens.
Mes chers collègues, de la première à la quatrième génération du feu, si le monde a changé, celui des combattants demeure, et la guerre n’est jamais loin, comme on le voit aujourd’hui en Ukraine, pays que nous soutenons bien entendu. Depuis toujours, ce monde représente un havre de fraternité, de mémoire et de solidarité, des valeurs qui nous sont chères et qui, au-delà d’un changement de nom, symbolisent la France, la patrie et la République. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, SER, UC et Les Républicains.)