M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire dÉtat. Aux yeux du Gouvernement, l’instauration de cette contribution sur le transport routier de marchandises par les régions, et plus particulièrement par la région Grand Est, doit être traitée dans l’ordonnance qui sera prise sur le fondement de l’article 137 de la loi Climat et résilience, adoptée en 2021, article qui prévoit une présentation de cette ordonnance dans les deux ans.

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

M. André Reichardt. Monsieur Jacquin, madame Belrhiti, je veux vous assurer de mon regret de ne pouvoir poursuivre la discussion sur ce texte et, plus particulièrement, sur votre demande. En effet, pour des raisons de calendrier, nous devons procéder à un vote conforme.

Toutefois, mes chers collègues, l’article de la loi Climat et résilience, rappelé à l’instant par Mme la secrétaire d’État, permet de prendre une ordonnance visant à faire droit à votre demande.

Je le dis ici solennellement, l’Alsacien que je suis ne se dérobera pas à cette demande des Mosellans et des Lorrains. S’il y avait nécessité de soutenir ensemble une ordonnance en la matière – on sait que ce processus prend quelquefois du temps, sans compter les éventuels changements de majorité – pourquoi ne pas envisager sa rédaction pendant l’été, quel que soit le gouvernement en place ?

Personnellement, si les collègues mosellans le souhaitent, je m’associerai volontiers à une telle démarche. Je le répète, nous avons la volonté de nous montrer solidaires de nos voisins. Il ne s’agit absolument pas de faire cavalier seul, mais, bien au contraire, d’ouvrir la voie !

Bien que je ne puisse pas adopter ces amendements, d’autant que se pose le problème juridique du décret, j’estime que nous aurions pu en discuter et examiner comment trouver un accord. Tel ne sera pas le cas aujourd’hui, ce que je regrette.

M. le président. La parole est à M. Christian Klinger, pour explication de vote.

M. Christian Klinger. Mon collègue vient de présenter les arguments que je souhaitais moi-même développer !

Depuis dix-sept ans, nous attendons la mise en place de cette taxe poids lourds. Chère collègue Catherine Belrhiti, vous pourrez compter sur vos collègues alsaciens pour aider à élargir la possibilité de réduire le trafic poids lourds, s’il devait y avoir un report de trafic.

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Je voterai bien évidemment l’amendement de Mme Catherine Belrhiti, qui est la copie conforme de mon propre amendement, mais concerne la région Grand Est et non pas la Lorraine.

Même si, aujourd’hui, nous perdons une bataille, cette possibilité s’ouvrira un jour à nous ! En effet, je ne vois pas comment nous pourrions réécrire cette ordonnance dès l’été prochain. En vertu de quel calendrier, au nom de quelle motivation ? Ce serait reconnaître que nos travaux actuels n’ont que peu de valeur. Pour ma part, c’est ce que je crois et c’est la raison pour laquelle mon groupe votera contre ce texte.

Je soutiens donc ardemment l’amendement de ma collègue Catherine Belrhiti.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour explication de vote.

Mme Catherine Belrhiti. Je le précise, en Moselle, cela fait trente ans que nous avons un problème avec l’A31. Nous réclamons depuis trente ans la construction d’une A31 bis, laquelle, je l’espère, verra bientôt le jour.

La situation justifie donc la mise en place d’une écotaxe. Si quelqu’un doutait encore du report du trafic et des difficultés rencontrées en Moselle, je tenais à dissiper toutes les interrogations.

Quoi qu’il en soit, je remercie mes collègues alsaciens de nous comprendre. J’espère que nous pourrons, au plus vite, traiter cette problématique.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 1er septdecies - Amendements n° 3, n° 2 et n° 1 rectifié bis
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Article 1er novodecies

Article 1er octodecies

(Non modifié)

Un comité facilite la concertation des collectivités territoriales en matière de taxation des poids lourds.

Sont membres de ce comité :

1° Le président de la Collectivité européenne d’Alsace ;

2° Le président de l’Eurométropole de Strasbourg ;

3° Les présidents des conseils départementaux des départements limitrophes de la Collectivité européenne d’Alsace ;

4° Le président du conseil régional de la région Grand Est.

Les représentants de l’État dans la région et dans les départements concernés ainsi que les représentants des services déconcentrés de l’État participent aux séances du comité à leur demande. Le comité peut associer à ses travaux des représentants de toute autre collectivité territoriale concernée ou de tout groupement de collectivités territoriales concerné. Il peut consulter toute personne ou tout organisme qualifié.

Le comité est présidé par le président de la Collectivité européenne d’Alsace.

Il organise librement ses travaux et leur publicité, les modalités de réunion et les règles de représentation de ses membres, dans le cadre de son règlement intérieur.

Il est convoqué par son président, au moins une fois par an jusqu’à la mise en œuvre de la taxe. – (Adopté.)

Article 1er octodecies
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Article 2 bis

Article 1er novodecies

(Non modifié)

L’article L. 330-2 du code de la route est complété par un IV ainsi rédigé :

« IV. – Les personnes mentionnées au 12° du I du présent article doivent produire à l’appui de leur demande tous éléments utiles permettant de vérifier la réalité des manquements au regard de la taxe prévus par l’ordonnance n° 2021-659 du 26 mai 2021 relative aux modalités d’instauration d’une taxe sur le transport routier de marchandises recourant à certaines voies du domaine public routier de la Collectivité européenne d’Alsace. » – (Adopté.)

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Article 1er novodecies
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Article 4

Article 2 bis

(Suppression maintenue)

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Article 2 bis
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Article 5

Article 4

(Non modifié)

Après l’article 6 de la loi n° 2019-816 du 2 août 2019 précitée, sont insérés des articles 6-1 et 6-2 ainsi rédigés :

« Art. 6-1. – Le fait, pour le conducteur d’un véhicule, de ne pas respecter la mesure, prise par l’autorité investie du pouvoir de police en application du II de l’article 6, d’interdiction d’accès de certaines routes aux véhicules en transit dont le poids total en charge est supérieur à 3,5 tonnes est puni d’une amende forfaitaire de 750 €.

« L’immobilisation du véhicule peut être prescrite dans les conditions prévues aux articles L. 325-1 à L. 325-3 du code de la route.

« Art. 6-2. – I. – Afin de faciliter la constatation de l’infraction prévue à l’article 6-1 et de permettre le rassemblement des preuves de celle-ci et la recherche des auteurs, des dispositifs fixes ou mobiles de contrôle automatisé des données signalétiques des véhicules peuvent être mis en œuvre par les services de la police nationale et de la gendarmerie nationale ou par les services de police municipale des communes membres de l’Eurométropole de Strasbourg.

« Lorsqu’elles sont effectuées au moyen de dispositifs fixes ou mobiles de contrôle automatique homologués, les constatations de l’infraction prévue à l’article 6-1 font foi jusqu’à preuve du contraire.

« II à V. – (Supprimés) – (Adopté.)

Article 4
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 5

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2021-616 du 19 mai 2021 précitée est ainsi modifiée :

1° Après l’article 2, sont insérés des articles 2-1 et 2-2 ainsi rédigés :

« Art. 2-1. – En cas de survenance de l’événement mentionné à l’article 40 du cahier des charges mentionné à l’article 1er de la présente ordonnance, la fraction de l’indemnité éventuellement due à la société concessionnaire, dont l’article 7 de la convention financière mentionnée à l’article 1er de la présente ordonnance prévoit la prise en charge, est répartie à parts égales entre l’État et l’Eurométropole de Strasbourg, à condition que l’Eurométropole de Strasbourg ait pris la décision de ne pas mettre en place l’interdiction de circulation mentionnée à l’article 2 de la présente ordonnance ou d’abroger totalement ou partiellement cette interdiction dans les cinq années suivant la mise en service de l’autoroute A 355.

« Art. 2-2. – Les obligations mentionnées aux articles 2 et 2-1 sont satisfaites dès lors que l’Eurométropole de Strasbourg a pris une mesure visant à interdire la circulation des poids lourds en transit sans l’abroger dans les cinq années suivant la mise en service de l’autoroute A 355. » ;

2° Le premier alinéa de l’article 3 est ainsi modifié :

a) Au début, est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Lorsque l’État considère que les motifs de la déchéance du concessionnaire sont susceptibles d’être réunis, il en informe sans délai l’Eurométropole de Strasbourg. » ;

b) Après la référence : « article 1er », sont insérés les mots : « ou à la transmission de l’arrêté mentionné à l’article 7 de la même convention ». – (Adopté.)

M. le président. Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l’objet de la deuxième lecture.

Vote sur l’ensemble

Article 5
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. André Reichardt, pour explication de vote.

M. André Reichardt. En conclusion de ce débat, je veux exprimer de nouveau le regret que des dispositions substantielles aient été supprimées par l’Assemblée nationale. Ainsi, l’anticipation de la directive Eurovignette aurait naturellement permis de régler d’importants problèmes pour l’Alsace.

Nous aurions pu, chers collègues mosellans, poursuivre les discussions sur ce texte, si nous n’avions pas été coincés par le calendrier, qui interdit la poursuite de nos travaux. Il nous faut donc voter conforme, ce que je ferai. J’appelle d’ailleurs tous mes collègues ici présents à faire de même.

En effet, dix-sept ans d’attente, c’est long ! Par ailleurs, il faut le savoir, lorsque ce texte sera définitivement adopté ici, il faudra nous accorder, en Alsace, sur les modalités de cette taxe, ce qui ne sera pas simple, cela a été dit.

Vous le savez, le président de la CEA, la Collectivité européenne d’Alsace, a décidé de recourir à l’association de la population pour la mise en œuvre de ses politiques, quelles qu’elles soient. S’est d’ailleurs terminée la nuit dernière une votation sur la pérennité de la présence de la Collectivité européenne d’Alsace au sein de la région Grand Est. Je le dis ici solennellement, mon cher collègue Olivier Jacquin, il ne s’agit en aucun cas d’un réflexe sécessionniste ! Je ne peux accepter ce terme ! Nous voulons simplement retrouver la région d’Alsace que nous avions par le passé.

De la même façon, une autre votation concernant les modalités de l’écotaxe interviendra. Il est donc fondamental que nous votions aujourd’hui ce texte, pour permettre, à l’avenir, une véritable démarche de concertation sur cette écotaxe.

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.

M. Jacques Fernique. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, avant de voter pour l’ensemble de ce texte, puisque mon groupe a choisi en responsabilité de ne pas déposer d’amendement, je voudrais insister sur la volonté qui avait motivé notre unique amendement en première lecture, lequel avait d’ailleurs été rejeté à une voix près. Afin de ne pas perdre de temps, il visait à donner un signal impérieux, en réduisant de moitié le délai de six ans laissé à la CEA pour la mise en place de la taxe.

J’espère donc que la Collectivité européenne d’Alsace et l’État feront chacun preuve d’une réactivité encore meilleure, ainsi que d’un rythme et d’une qualité d’accompagnement adéquats pour que se déroulent le plus rapidement possible toutes les étapes de concertation encore nécessaires, mais sans rétropédalage, face aux quelques réticences convenues d’organisations professionnelles, ainsi que toutes les étapes de préparation, auxquelles il a été fait allusion, de mise en place des décisions précisant les tonnages, les catégories, le réseau taxable exact, les dispositifs kilométriques, les majorations pour coûts externes, les possibilités de la directive Eurovignette, les réductions et les exonérations.

Toutes ces étapes devront se réaliser au mieux, pour tenir la promesse d’une entrée en vigueur sans perte de temps, dans un délai raisonnablement réduit, et garantir – c’est très important – le caractère transférable d’un dispositif, qui, comme me le disait hier M. le ministre chargé des transports, doit être un modèle pionnier. (M. André Reichardt applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Je serai bref. Je l’ai dit, je regrette que ce vote conforme empêche le débat et une nouvelle avancée, indispensable pour la Lorraine. Je regrette profondément cette situation, que j’ai qualifiée de véritable « spoliation » des Lorrains. Je pèse mes mots et insiste sur ce terme, particulièrement fort.

Bien évidemment, nous ne baisserons pas les bras. Nous poursuivrons cette bagarre pour l’environnement et la justice. Nous constatons d’ailleurs que, après toutes ces années de lutte pour établir un tel dispositif en Lorraine, nous avons obtenu une grande avancée avec l’article 32 du projet de loi Climat et résilience. À cet égard, je salue les travaux de la commission mixte paritaire, qui permettront aux régions frontalières subissant des reports de trafic de mettre éventuellement en place une écotaxe. Pour ce faire, il fallait que la loi 3DS soit votée. Son adoption permet désormais aux régions de faire des expérimentations en matière de gestion autoroutière.

Le combat n’est pas fini, c’est simplement la fin d’une bataille. Je profite de l’occasion qui m’est donnée, madame la secrétaire d’État, pour signaler que, dans une union transpartisane – même si je suis le seul sénateur de Meurthe-et-Moselle présent aujourd’hui ! –, tous les parlementaires du département, ainsi que la présidente de la métropole et la présidente du conseil départemental, ont écrit au Premier ministre Jean Castex, pour demander une rencontre, afin d’évoquer la question de l’A31 au sud de Nancy, qui doit être considérée avec le même degré de priorité concernant les travaux de modernisation et d’élargissement prévus par le grand débat public.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’ensemble du projet de loi ratifiant les ordonnances prises sur le fondement de l’article 13 de la loi n° 2019-816 du 2 août 2019 relative aux compétences de la Collectivité européenne d’Alsace.

J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, l’autre, du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 104 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 313
Pour l’adoption 247
Contre 66

Le Sénat a adopté définitivement le projet de loi. (Applaudissements.)

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Anglars, rapporteur. Cher collègue Jacquin, je tiens à vous assurer qu’il n’y a de notre part aucune volonté de spoliation de qui que ce soit.

Je veux surtout remercier les personnels de la commission, pour leur travail, ainsi que son président, pour sa confiance. Merci aussi aux équipes du ministère de la transition écologique, madame la secrétaire d’État ; nous avons bien travaillé ensemble.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-François Longeot, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Madame la secrétaire d’État, je souhaite vous remercier à mon tour de votre engagement ; je me félicite de l’adoption de ce projet de loi.

Merci à notre rapporteur, Jean-Claude Anglars, pour le travail important qu’il a réalisé, pour son esprit d’initiative et pour ses qualités d’excellent négociateur.

Je tiens également à saluer notre collègue Philippe Tabarot pour la force de proposition dont il a fait preuve lors de l’examen du projet de loi Climat et résilience. Il est utile de rappeler que le travail de Philippe Tabarot et de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a été décisif pour l’adoption du présent texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant les ordonnances prises sur le fondement de l'article 13 de la loi n° 2019-816 du 2 août 2019 relative aux compétences de la Collectivité européenne d'Alsace
 

4

Communication relative à une commission mixte paritaire

M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer le contrôle parental sur les moyens d’accès à internet est parvenue à l’adoption d’un texte commun.

5

 
Dossier législatif : proposition de loi visant à combattre le harcèlement scolaire
Discussion générale (suite)

Combat contre le harcèlement scolaire

Discussion en nouvelle lecture d’une proposition de loi

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à combattre le harcèlement scolaire
Discussion générale (interruption de la discussion)

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, visant à combattre le harcèlement scolaire (proposition n° 480, résultat des travaux de la commission n° 485, rapport n° 484).

Je précise à l’attention de l’ensemble de nos collègues que je suspendrai la séance, quoi qu’il advienne, entre douze heures cinquante-cinq et treize heures.

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale, de la jeunesse et des sports. Monsieur le président, monsieur le vice-président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, cette proposition de loi est le dernier texte sur l’éducation de la législature. Aussi, permettez-moi de remercier les représentants de la Nation que vous êtes pour leur travail continu et leur engagement sincère sur les sujets d’éducation.

Je me réjouis aussi que ce soit précisément cette proposition de loi visant à combattre le harcèlement scolaire que nous ayons à examiner aujourd’hui, d’abord parce que la lutte contre le harcèlement en milieu scolaire aura été l’une des grandes causes de mon action pendant ce quinquennat, ensuite parce qu’il s’agit d’un sujet qui, comme souvent lorsqu’il est question de l’école, a vocation à créer de la concorde et à nous rassembler.

Je connais la mobilisation du Sénat sur ce sujet et regrette évidemment qu’une motion tendant à opposer la question préalable ait été déposée. Ce texte émane d’une initiative parlementaire, celle du député Erwan Balanant. Nous l’avons accueillie favorablement, comme nous l’avons fait chaque fois que des propositions allaient dans le bon sens – et ce fut souvent le cas, je tiens à le souligner, de la part des représentants de la chambre haute.

La lutte contre le harcèlement, nous en sommes tous d’accord, est un enjeu de société. Cet enjeu dépasse largement le cadre scolaire et nécessite une mobilisation générale ; il renvoie tout simplement à la valeur de fraternité qui est le ciment de notre nation.

Si les actions menées depuis 2017 ont permis de contenir le harcèlement « physique » entre élèves, la progression rapide et exponentielle du cyberharcèlement nous appelle à redoubler d’efforts et de vigilance.

Nous ne nous habituerons jamais à ce que des vies d’enfants et d’adolescents soient brisées, abîmées, parfois de façon irrémédiable, par ce fléau. Nous lutterons donc sans relâche et avec la dernière énergie contre ce phénomène. En la matière, nous avons d’ailleurs beaucoup avancé.

Nous ne nous résignerons pas. Nous pouvons atteindre un objectif de zéro harcèlement à l’école, c’est possible ! Certains pays, certains établissements, certains professeurs y réussissent chaque jour, y compris en France. Cet objectif est donc à notre portée. Et je me réjouis que cette proposition de loi nous permette d’avancer en ce sens.

Du plan de lutte contre le harcèlement à l’école, en 2018, à la généralisation du programme de lutte contre le harcèlement à l’école (pHARe), en 2022, nous n’avons pas attendu pour prendre à bras-le-corps ce phénomène.

Dès 2018, nous avons engagé un plan volontariste et ambitieux pour combattre le harcèlement à l’école autour de trois grands axes : prévenir, intervenir, former.

Prévenir, tout d’abord : nous avons pris en la matière un certain nombre de mesures fortes, comme l’interdiction du téléphone portable au collège, qui est désormais effective – c’est très important –, le dialogue avec les plateformes de réseaux sociaux, le lancement de cinq campagnes de prévention autour des thèmes suivants : revenge porn, rôle des témoins, dynamiques de groupe, école primaire, cyberharcèlement. J’ai effectué, sur cette question, de nombreux déplacements au sein des établissements, souvent avec Mme Macron, qui en a fait un thème de mobilisation.

Face à ces agissements, nous l’avons toujours dit, aucun élève ne doit être laissé seul. C’est pourquoi le ministère finance deux numéros d’écoute, le 3020 pour le harcèlement et le 3018 pour le cyberharcèlement, en partenariat avec l’association e-Enfance.

J’étais justement en déplacement avec Mme Macron, tout récemment, pour promouvoir une nouvelle étape du 3018 via le lancement d’une application pour téléphone mobile permettant aux élèves de signaler en temps réel un cyberharcèlement dont ils sont l’objet. Cette application est facile d’accès et d’utilisation ; elle permet notamment les échanges par courriel, tchat et WhatsApp.

Il est nécessaire aussi de développer un réseau d’acteurs dont la prise en charge du harcèlement est en quelque sorte le « métier ». C’est pourquoi nous avons travaillé à améliorer la prise en charge des situations de harcèlement en renforçant la formation initiale et continue des professeurs, qui intègre désormais cette dimension de façon systématique, et en développant le dispositif des élèves ambassadeurs, qui permet la sensibilisation entre pairs, mais aussi en publiant des ressources et des guides pour les personnels, les élèves et leurs familles.

Nous avons également, à la rentrée 2021, complété le dispositif en lançant ce que nous appelons le « carré régalien », organisé selon quatre axes ayant trait à la vie scolaire des élèves : la laïcité et les valeurs de la République, la lutte contre la radicalisation, la lutte contre les violences, la lutte contre le harcèlement. Des professionnels affectés au traitement de ces sujets viennent en appui des établissements dès que cela s’avère nécessaire.

À la rentrée 2022, nous aurons franchi un nouveau cap avec la généralisation, au cours de la présente année scolaire, du programme pHARe à toutes les écoles et à tous les collèges. Celui-ci s’inspire en partie du programme finlandais KiVa, la Finlande faisant partie des pays qui ont particulièrement bien réussi dans le domaine de la lutte contre le harcèlement. Notre pays peut devenir ainsi un exemple de ce qui se fait de mieux au monde en la matière.

Très concrètement, nous dotons les établissements d’un référent harcèlement, de personnels formés à la détection et au traitement des situations, ainsi que d’élèves ambassadeurs pour le signalement. Ce programme est déjà une réalité sur le terrain, dans une bonne partie des établissements.

Les familles sont associées à cet effort collectif, via la mise à disposition de ressources accessibles en ligne ou l’organisation de moments de rencontre avec les professeurs et les personnels de direction. Ces initiatives importantes rejoignent ce que j’avais moi-même mis en place, lorsque j’occupais d’autres fonctions, avec la « mallette des parents », car on sait combien l’implication des familles est décisive pour prévenir ce type de situation.

La méthode utilisée, appelée Pikas, a fait ses preuves, car elle permet aux adultes de repérer les « signaux faibles » et d’intervenir rapidement pour protéger les victimes, tout en amenant les auteurs à une prise de conscience. Lorsque vient le moment de la sanction, en effet, il est souvent déjà trop tard…

Une méthode s’applique, donc, établissement par établissement, avec des équipes formées et un traitement de chaque situation.

L’objectif est très simple : aucun cas de harcèlement ne doit rester sans réponse.

Si nous voulons lutter efficacement contre le harcèlement en milieu scolaire, nous devons sortir d’une logique exclusivement défensive pour passer à l’offensive, ce qui revient à dire que nous menons une politique du « climat scolaire ». En effet, le harcèlement est d’une certaine façon le résultat d’une dégradation du climat scolaire. Ce que nous devons viser, c’est tout simplement l’installation d’un climat scolaire fraternel, à base d’engagement notamment.

Avec le Conseil d’évaluation de l’école, que nous avons créé par la loi pour une école de la confiance, nous sommes désormais en mesure d’évaluer le climat scolaire dans chaque établissement, afin de disposer d’un état des lieux et, le cas échéant, de prendre des mesures adéquates.

Il nous faut également chercher à promouvoir l’engagement des élèves, leur sens de l’intérêt général, du civisme et de l’empathie, ces « compétences douces » qui sont si importantes. C’est ce que nous faisons en menant un travail sur les compétences psychosociales dès l’école maternelle. Lorsque j’ajoute « respecter autrui » à « lire, écrire, compter », cet ajout participe évidemment de cet objectif. Nous élevons ce « respecter autrui » au rang de compétence fondamentale dès l’école primaire ; cela va de pair avec le renforcement de l’enseignement moral et civique et de l’éducation aux médias et à l’information.

Nous avons par ailleurs créé, outre les ambassadeurs « Non au harcèlement », 250 000 écodélégués, afin de diversifier les formes d’engagement des élèves. Nous avons aussi promu les prix « Non au harcèlement », que nous avons étoffés en créant un prix spécifique à la lutte contre le cyberharcèlement. Ces prix donnent lieu chaque année à des travaux remarquables dans les classes ; je vous invite par exemple à consulter la vidéo réalisée par les élèves lauréats du prix « Non au harcèlement » 2020, qui a fait, depuis, le tour du monde – 48 millions de vues !

Il faut citer également, en bout de chaîne, le service national universel (SNU) et les services civiques, à 16 ans et au-delà, qui constituent une forme d’accomplissement du parcours citoyen, avec un effet rétroactif sur tout ce qui précède – le service national universel, rappelons-le, permet d’envoyer un signal quant à l’engagement des élèves en amont du SNU lui-même. C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité que de jeunes engagés en service civique puissent être mobilisés pour participer à la mise en œuvre du programme pHARe dans les écoles et les établissements – ce sont souvent ces jeunes qui parlent le mieux aux élèves de tels sujets.

La proposition de loi qui vous est soumise vient donc couronner cette dynamique générale.

Elle apporte une nouvelle pierre à l’édifice, en élargissant la base légale du harcèlement scolaire, que nous avions déjà commencé à poser via la loi pour une école de la confiance, et en créant un délit spécifique de harcèlement scolaire.

Sur plusieurs autres points, elle complète l’action engagée à travers le programme pHARe notamment. Je pense en particulier au rôle des associations, dont certaines ont participé activement à l’élaboration de ce dispositif.

Elle permet surtout, mesdames, messieurs les sénateurs, d’envoyer un message très clair à la Nation tout entière : non, le harcèlement n’a pas sa place dans nos établissements. Oui, l’école doit rester, selon la fameuse formule de Jean Zay, cet « asile inviolable où les querelles des hommes ne pénètrent pas ».

Durant ces cinq années, nous avons beaucoup fait pour l’égalité : école à 3 ans, classes dédoublées, opérations Devoirs faits et Vacances apprenantes, cités éducatives, internats d’excellence, petits-déjeuners gratuits… Nous avons beaucoup fait, également, pour la liberté : personnalisation des parcours, avec les réformes du lycée et de la voie professionnelle – offrant ainsi beaucoup plus de choix aux élèves –, refonte de l’orientation pour ouvrir le champ des possibles, autonomie accrue des établissements, création d’une fonction de directeur d’école – là aussi, le Sénat a pris toute sa part…

La liberté et l’égalité ont donc été des clés de notre politique scolaire.

Avec cette proposition de loi, on voit aussi que la troisième valeur de notre devise républicaine est au centre de l’action menée. Cette valeur si essentielle pour notre République, donc pour notre école, j’y ai fait référence pour évoquer le climat scolaire ; il s’agit bien sûr, vous l’avez compris, de la fraternité.