M. le président. Mes chers collègues, si chacun d’entre vous pouvait s’en tenir à son temps de parole, ce serait merveilleux…
La parole est à M. Hervé Maurey. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Hervé Maurey. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre pays est affecté par une inflation qu’il n’avait pas connue depuis des années. La hausse des prix de l’énergie représente à elle seule la moitié de cette inflation : les prix du litre de gazole et d’essence atteignent des niveaux historiques, supérieurs à ceux qui ont conduit à l’émergence du mouvement des gilets jaunes en janvier 2018. De même, le tarif du gaz a augmenté de 40 % en 2021 et celui de l’électricité, malgré les mesures prises, a encore augmenté hier matin de 4 %.
Face à ces hausses, le Gouvernement n’est pas resté immobile. Malheureusement, les mesures prises sont largement insuffisantes, souvent inadaptées, quand elles ne sont pas purement et simplement néfastes.
Elles sont insuffisantes et inadaptées de par leur caractère général et peu ciblé. Le chèque inflation, d’un montant de 100 euros, attribué uniformément, quelles que soient les situations, en témoigne.
Une fois de plus, le Gouvernement semble ignorer que les habitants des territoires ruraux sont particulièrement affectés par ces hausses de prix. Un logement en zone rurale consomme 33 % d’énergie de plus qu’un logement en centre-ville. Le surcoût moyen des dépenses de carburant des ménages en milieu rural est de 40 % par rapport à la moyenne nationale.
Pourquoi ne pas avoir institué un dispositif qui intègre cette réalité ?
Au-delà de cette question, pourquoi, alors que plus de la moitié du prix du litre d’essence à la pompe revient aujourd’hui à l’État, par le biais de la fiscalité, le Gouvernement n’a-t-il pas souhaité utiliser ce levier pour alléger la charge qui pèse sur nos concitoyens ? Comment ne pas être choqué de voir les recettes de l’État augmenter grâce à la hausse des prix de l’énergie ?
La fiscalité énergétique représente 900 euros par an pour les ménages et 1 165 euros pour les ménages en milieu rural. Cette situation est d’autant plus insupportable que ces ressources, malgré les demandes réitérées de notre assemblée depuis un certain nombre d’années, ne sont pas affectées à la transition écologique ni aux économies d’énergie.
Je souhaite également attirer votre attention sur une question importante, dont le Gouvernement ne semble pas jusqu’à présent se préoccuper, à savoir les conséquences de la hausse du prix de l’énergie pour les collectivités locales.
Ces dernières, notamment les communes, voient leur facture énergétique augmenter fortement. Elles seront très certainement obligées, à un moment donné, soit de répercuter ces dépenses supplémentaires sur la fiscalité locale, soit d’abandonner des projets d’intérêt local.
Que compte faire le Gouvernement pour éviter la double peine de l’augmentation et des prix de l’énergie et de la fiscalité locale ?
Autre question : qu’en est-il du rattrapage du blocage des prix de l’électricité, qui a été évoqué par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) à horizon 2023 ?
Enfin, je voudrais dénoncer à mon tour les décisions néfastes et irresponsables qui ont été prises concernant EDF. L’augmentation du volume d’électricité d’origine nucléaire vendu à prix réduit coûtera 8 milliards d’euros à EDF, soit l’équivalent du prix estimé d’un nouveau réacteur EPR 2.
Ce choix est tout simplement insupportable, alors qu’EDF est endettée à hauteur de 40 milliards d’euros et qu’elle doit faire face à un mur d’investissements de 80 à 100 milliards d’euros dans les années qui viennent.
Ces décisions viennent malheureusement parachever un quinquennat de politique erratique en matière de nucléaire, qui a fragilisé l’un des plus beaux fleurons de notre industrie.
De toute évidence, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les choix du Gouvernement ne sont pertinents ni pour les ménages ni pour EDF. Il est donc grand temps de revoir ces décisions, pour répondre réellement aux attentes et aux besoins de nos concitoyens ainsi qu’aux enjeux énergétiques de notre pays.
M. le président. Vous avez parfaitement respecté votre temps de parole, mon cher collègue : impeccable !
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Je voudrais réagir à cette dernière intervention et à celles qui ont précédé.
Il est faux de prétendre que le Gouvernement n’a pas eu recours à la fiscalité pour amortir la hausse du coût de l’énergie pour les ménages : l’une des principales mesures que nous avons prises a consisté à abaisser la TICFE de 21,5 % à 0,5 %, ce qui représente un manque à gagner de 8 milliards d’euros pour l’État.
Par ailleurs, face à une augmentation des cours encore plus importante, nous avons effectivement demandé à EDF de produire davantage au titre de l’Arenh, pour un nouveau coût de 8 milliards d’euros.
J’entends les interventions de ceux qui s’inquiètent des conséquences de cette décision pour EDF.
Tout d’abord, c’est une décision que nous avons prise en pesant l’ensemble des avantages et des inconvénients.
Ensuite, je n’ai pas entendu de contre-propositions destinées à éviter aux ménages d’avoir à faire face à une augmentation de 40 % de leur facture d’électricité au mois de février. Or c’est ce qui se serait produit si nous n’avions pas pris les décisions que nous avons prises, qu’il s’agisse de la minoration de la TICFE ou de l’augmentation des volumes de l’Arenh.
Enfin, pour ce qui concerne les collectivités, que vient d’évoquer à l’instant M. Maurey, je rappelle que 30 000 communes environ bénéficient du tarif réglementé, celui-ci s’appliquant à toutes les collectivités ayant une section de fonctionnement inférieure à 2 millions d’euros ou comptant moins de 10 équivalents temps plein.
Quant aux autres communes, je l’ai indiqué précédemment, le bénéfice de la baisse de la TICFE leur est acquis, tout comme les conséquences de l’augmentation du volume de l’Arenh.
Je l’ai dit également, en 2022, la fiscalité augmentera mécaniquement de 3,4 % du fait de la révision des valeurs locatives, en application de la formule arrêtée à la fin de l’année 2017 lors du vote du projet de loi de finances pour 2018. Par ailleurs, la part de TVA dont bénéficient les collectivités augmentera de plus de 800 millions d’euros pour les régions, de plus de 800 millions d’euros pour les départements et de plus de 400 millions d’euros pour les intercommunalités.
Un sénateur du groupe LR a souligné que les différentes associations estimaient le surcoût engendré par la hausse des prix de l’énergie à 1 milliard d’euros. Les quelques chiffres que je viens de rappeler montrent, et c’est rassurant, que les collectivités devraient pouvoir y faire face, ce qui ne nous empêche pas de rester extrêmement attentifs à cette question.
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour la réplique.
M. Hervé Maurey. J’ai bien écouté vos propos, monsieur le ministre.
En ce qui concerne EDF, vous n’apportez aucun élément concret. Hier, en commission des finances, M. le ministre Bruno Le Maire nous a dit : « Nous serons aux côtés d’EDF pour l’avenir ! » Qu’est-ce que cela signifie ? Rien de concret n’est dit sur l’effort que le Gouvernement demande à EDF. Je le répète, alors que cette entreprise est un fleuron important de notre industrie, on la met aujourd’hui en difficulté.
Enfin, je ne suis pas le seul à m’inquiéter des conséquences de l’augmentation du prix de l’énergie pour les collectivités locales. Toutes les associations d’élus, notamment les maires ruraux, l’ont dit, elles seront extrêmement difficiles à supporter.
Malheureusement, monsieur le ministre, vous ne m’avez pas pleinement rassuré.
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour un rappel au règlement.
Je n’ose vous demander, mon cher collègue, sur quel article de notre règlement vous vous fondez pour prendre la parole. (Sourires.)
M. Fabien Gay. L’article qui vous sied le mieux, monsieur le président ! (Rires.)
Nous essayons aujourd’hui une nouvelle forme de débat.
Monsieur le ministre, soit vous répondez à chaque intervenant, ce qui permet à chacun de bénéficier d’un temps de parole supplémentaire pour la réplique, soit vous ne répondez à personne ! M. Husson, M. Gontard et moi-même méritons, nous aussi, une réponse. Il me paraît incohérent, politiquement, de choisir les intervenants à qui l’on répond et, ce faisant, d’interdire aux autres de reprendre la parole.
M. le président. Peut-être conviendra-t-il en effet, mon cher collègue, de revoir l’organisation de ce type de débat. Chaque orateur devrait peut-être bénéficier d’une minute supplémentaire lorsque le ministre ne répond qu’à un orateur sur quatre, par exemple, mais il ne m’appartient pas d’en décider en cet instant. Je transmettrai votre demande, monsieur Gay.
Suite du débat d’actualité
M. le président. La parole est à Mme Guylène Pantel. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Guylène Pantel. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les prix de l’énergie s’emballent dans le monde.
Après deux ans de pandémie, la reprise de l’économie et, donc, de la demande en gaz, combinée à la faiblesse des stocks et aux crises géopolitiques, crée des tensions sur les marchés de gros de l’énergie, entraînant une forte inflation, au détriment du pouvoir d’achat des Français.
Selon la note de conjoncture publiée par l’Insee en décembre, les prix de l’énergie ont augmenté de 18,6 % dans l’ensemble : 41 % pour le gaz, 21 % pour l’essence et 4 % pour l’électricité. Alors que la précarité énergétique touche 5,6 millions de ménages en temps normal, cette envolée des prix risque malheureusement d’en faire basculer beaucoup d’autres.
Nous payons, à l’instar de nos voisins européens, le prix de notre dépendance aux énergies fossiles. Nous payons, en ce qui concerne le prix de l’électricité, l’application du principe du « coût marginal », que la France souhaiterait, semble-t-il, réviser dans le cadre d’une éventuelle réforme du marché européen de l’énergie.
Il faut le reconnaître, le Gouvernement a réussi pour l’instant à contenir l’inflation au-dessous de la moyenne européenne et à préserver une partie du pouvoir d’achat des Français, grâce à plusieurs mesures : le chèque énergie supplémentaire de 100 euros, l’indemnité de 100 euros pour environ 38 millions de personnes ; le bouclier tarifaire avec le gel des tarifs réglementés du gaz et la limitation de la hausse des tarifs réglementés de vente de l’électricité ; la baisse de la taxe sur l’électricité, la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité étant à son niveau minimum ; enfin, la revalorisation de 10 % du barème de l’indemnité kilométrique.
Au total, l’addition pour éteindre les étincelles d’une crise sociale s’élève à plus de 15 milliards d’euros.
Jusques à quand pourra-t-on tenir ainsi ? Ces mesures ne sont que des pansements à faible adhérence, face à une évolution structurelle. De surcroît, elles ratent une partie de leur cible, puisque les aides versées ont été saupoudrées sans tenir compte des critères d’éloignement, ce qui pénalise de fait les territoires hyper-ruraux. Aussi, quid des mesures de soutien aux collectivités territoriales, qui souffrent tout autant de ces hausses des prix ?
Notre groupe a régulièrement l’occasion de le dire, les particularités géographiques et climatiques de ces territoires doivent être prises en compte à leur juste mesure. À l’heure où s’achève la législature, monsieur le ministre, nous déplorons la faiblesse de votre engagement en la matière, et ce malgré nos nombreuses interpellations. Il est encore temps de reconnaître que ces dépenses pèsent plus lourdement sur les Français des zones rurales.
J’en conviens, une réduction des taxes énergétiques ou de la TVA est complexe à appliquer, notre pays étant très dépendant de ces taxes. En outre, de telles réductions ne permettraient pas de viser spécifiquement les ménages modestes ou issus de certains territoires.
La transition énergétique ne pourra malheureusement se faire qu’au moyen d’un effort considérable et n’aura pas pour effet de réduire la facture de nos concitoyens.
Les prix de l’énergie continueront inévitablement leur ascension, car l’énergie a un prix. Les investissements massifs dans la décarbonation, le développement des réseaux intelligents, ou encore le stockage auront un coût, que ce soit pour le consommateur ou le contribuable. Nous sommes véritablement sur le fil du rasoir.
Parallèlement, il est urgent de redoubler d’efforts en matière d’économies d’énergie. Nous le savons, l’une des principales causes de la précarité énergétique réside dans la mauvaise isolation des logements. Accélérons donc leur rénovation, notamment dans les territoires hyper-ruraux !
Si l’État doit tout faire pour préserver le pouvoir d’achat des Français et les finances des collectivités locales, quelles réponses durables envisagez-vous d’apporter ? Comment comptez-vous vous coordonner avec nos partenaires, les États membres de l’Union européenne ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Jean-Claude Tissot. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis de nombreux mois, dans un profond désarroi, les Françaises et les Français sont confrontés à une hausse continue du prix des produits du quotidien et à une explosion de leurs factures énergétiques.
Selon la note de conjoncture du mois de décembre 2021 de l’Insee, les prix à la consommation du gaz, des carburants et de l’électricité ont respectivement augmenté de 41 %, 21 % et 3 % entre décembre 2020 et octobre 2021.
D’après cette même étude, la hausse des prix depuis le début de l’année 2021 a conduit à un surcroît des dépenses mensuelles d’énergie d’un peu plus de 40 euros en moyenne par ménage, dont 20 euros pour les carburants.
Toutefois, ces moyennes cachent de fortes disparités entre les foyers, selon les lieux de résidence. En deux ans, la facture énergétique a grimpé en moyenne de 43 euros dans les communes rurales, contre 30 euros dans l’agglomération parisienne.
De même, la facture énergétique pèse plus lourdement sur le budget total des ménages à faibles revenus. Cette dépense contrainte ne fait donc que renforcer les inégalités sociales et territoriales.
De plus, dans un contexte de relance progressive de notre économie, cette flambée des prix des énergies a de très lourdes conséquences sur la compétitivité de nos entreprises. Elle vient s’ajouter à l’augmentation du coût des matières premières, qui se répercute indéniablement sur le prix d’achat pour les consommateurs.
Face à ce constat, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, le Gouvernement a fait le choix de prendre des décisions court-termistes, sans s’attaquer aux réelles difficultés et aux enjeux du marché de l’énergie. Le bouclier tarifaire, l’augmentation du chèque énergie et la création de l’indemnité inflation sont des premières mesures pertinentes pour soulager le budget des ménages. Si nous ne contestons pas le bien-fondé de ces mesures, nous nous interrogeons sur le ciblage et le niveau de chacune de ces aides.
Dans une récente étude, l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, dite Agence de la transition écologique) recommandait de fixer le montant du chèque énergie à 710 euros afin de le rendre réellement utile pour les foyers en situation de précarité énergétique.
L’envoi d’un chèque énergie de 100 euros durant le mois de décembre a certainement été un soulagement pour les ménages concernés, mais ce n’est pas assez pour les foyers qui ont vu leurs dépenses d’énergie augmenter de 40 euros par mois en 2021.
Vous me répondrez très certainement que l’indemnité inflation et l’augmentation du barème de l’indemnité kilométrique, récemment annoncée par le Premier ministre, viennent compléter ce dispositif. Malheureusement, leur ciblage est lui aussi incertain.
L’indemnité inflation crée des inégalités entre des salariés d’une même entreprise, parfois au sein d’un même foyer. Le rehaussement de 10 % de l’indemnité kilométrique est également une demi-mesure. Elle ne concerne que les Français imposables qui peuvent déclarer leurs frais professionnels.
En vous concentrant sur les gros rouleurs, vous semblez malheureusement oublier les 17 millions de Français contraints de prendre tous les jours leur voiture pour aller travailler, tout simplement parce qu’ils n’ont pas accès à des transports en commun. Sur ces 17 millions, la moitié gagne moins de 1 700 euros net par mois. Face aux prix record que les carburants ont atteints ces dernières semaines, le Gouvernement doit impérativement agir pour ces Français, qui sont les premiers de cordée.
Face à la hausse des prix des énergies depuis plusieurs mois, notre groupe, ainsi que nos collègues socialistes de l’Assemblée nationale, vous a proposé plusieurs mesures à effet immédiat : la création d’un bouclier tarifaire énergétique permettant l’accès à un volume minimal de gaz, de fioul ou d’électricité à un tarif très bas, le doublement du chèque énergie, qui serait versé automatiquement, afin de mettre fin au non-recours.
Malheureusement, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, cette crise met en lumière les impensés et l’impréparation du Gouvernement en matière énergétique. Cette situation était pourtant prévisible.
Dès le début de la pandémie de la covid-19, nous vous alertions, avec mes collègues de la commission des affaires économiques du Sénat, sur le risque inflationniste en sortie de crise. Nous avions dit que les prix pourraient flamber si l’offre d’énergie ne parvenait pas à accompagner la demande.
Cette impréparation, comme celle des gouvernements précédents, conduit aujourd’hui à dépenser au moins 15 milliards d’euros dans des mesures d’urgence plutôt que dans des projets de long terme.
Sans critiquer le montant consacré, nous nous étonnons davantage, au sein du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, que vous ne tiriez pas des enseignements de cette crise.
La libéralisation à l’extrême du marché de l’énergie, qui se trouve tiraillé entre injonctions européennes et influences géopolitiques, est la cause de cette crise profonde.
Le relèvement du plafond de l’Arenh, décidé en ce début d’année, est un nouvel exemple de votre orientation ultralibérale. Cette mesure bénéficiera uniquement aux fournisseurs, au détriment de l’opérateur historique EDF, qui a pourtant besoin de fonds pour investir durablement.
Vous refusez votre rôle d’État actionnaire et vous préférez sacrifier une entreprise publique, qui est pourtant indispensable à la planification énergétique pour les décennies à venir.
Pourtant, dans un rapport de novembre 2021 sur les choix de production électrique, la Cour des comptes a rappelé la nécessité d’anticiper le renouvellement de notre mix énergétique.
Ainsi, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, pour qu’une telle crise ne se reproduise plus et n’ait plus d’effets aussi durs sur nos concitoyens, permettez-nous de vous donner trois conseils afin d’anticiper les évolutions à long terme.
Premièrement, revenons à une politique énergétique volontariste de l’État et du Gouvernement, avec une puissance publique assumée investissant massivement dans ses entreprises publiques.
Deuxièmement, réformons le marché européen de l’énergie. Le Gouvernement doit profiter de la présidence du Conseil de l’Union européenne pour imposer une nouvelle direction.
Troisièmement, planifions à très long terme, après avoir conduit une large concertation citoyenne et parlementaire, pour assurer un bouquet énergétique permettant la nécessaire transition écologique, la préservation du pouvoir d’achat des Français et la souveraineté énergétique de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Cécile Cukierman applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud.
M. Didier Rambaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’inflation est là, c’est vrai ! Elle touche particulièrement le secteur de l’énergie. Malheureusement, à bien observer les dernières nouvelles, elle est en train de s’installer dans le quotidien des Français et des Françaises.
Selon la dernière estimation provisoire de l’Insee, les prix de l’énergie ont bondi de 19,7 % sur une période d’un an ! Gaz, électricité, carburants : aucune énergie n’est épargnée.
Alors, si la situation est à prendre au sérieux, est-elle pour autant catastrophique ? Est-ce que tout va mal, comme certains le clament à longueur de journée depuis quelques semaines ? Je ne le pense pas. Si la situation actuelle est difficile pour un certain nombre de Français, de telles descriptions ne me paraissent pas conformes à la réalité.
En effet, la situation économique doit être vue dans sa globalité. Peut-on évoquer ici un taux de croissance de 7 %, du jamais-vu depuis 1969 ?
Mme Sophie Primas. Après 8 % de décroissance ? Soyons sérieux !
M. Didier Rambaud. Avec une telle croissance, la France devrait signer l’une des meilleures performances de la zone euro : deux points au-dessus du taux de croissance moyen, estimé à 5 %. Cette croissance se traduit par un taux de chômage historiquement faible, proche du plein-emploi. (M. Patrick Kanner s’exclame.)
Saluons au passage la politique du « quoi qu’il en coûte », reconnue pas les observateurs économiques, qui a permis de sauvegarder nos entreprises et nos emplois.
Pour autant, qui dit croissance dit inflation par la demande, surtout dans le contexte international et sanitaire que nous connaissons. Après une année 2020 de paralysie économique en raison du covid-19, le rebond de la consommation des ménages et la reconstitution des stocks des entreprises ont fait exploser la demande, entraînant une hausse du cours de nombreuses matières premières.
Le contexte international est certes pour beaucoup dans l’explosion des prix de l’énergie, mais n’oublions pas qu’un retour de l’inflation est la conséquence d’un retour de la croissance.
Aussi, le Gouvernement s’est penché sur chaque problème pour y apporter une solution. Dans chaque secteur énergétique touché par l’inflation, le Gouvernement est intervenu et a créé des dispositifs ciblés et adaptés, il a travaillé à des solutions concrètes, tant sur l’inflation que pour le porte-monnaie de nos concitoyens.
J’évoquerai d’abord la question du gaz. Le 30 septembre dernier, le Premier ministre a annoncé le gel des tarifs réglementés du gaz. Autrement dit, il a été décidé de bloquer les prix jusqu’en avril 2022. Je parle bien entendu du bouclier tarifaire, dont l’objet est de protéger l’ensemble des ménages de la flambée historique que nous connaissons en ce moment. Sans ce bouclier tarifaire, l’inflation aurait été insupportable, les prix du gaz auraient aujourd’hui augmenté de 66 % ! Financièrement, la mesure permet d’éviter une hausse de la facture de gaz d’environ 900 euros.
Pour ce qui concerne l’électricité, qui, vous le savez, est un secteur intimement lié à celui du gaz, le bouclier tarifaire porte ses fruits : sans ce dispositif, le prix de l’électricité, en hausse de 4 % aujourd’hui, aurait augmenté de 44 %.
Mes chers collègues, rendez-vous compte ! Nous limitons autant que possible les dégâts. Observez un instant la situation de nos voisins européens. En Espagne, la facture d’électricité passe de 1 000 euros à 1 700 euros ; en Italie, de 1 000 euros à 2 290 euros ; en France, le gel des prix permet d’éviter en moyenne une hausse de 300 euros des factures d’électricité.
Je m’interroge : à combien s’élèveraient aujourd’hui les factures de gaz et d’électricité des Français sans le bouclier tarifaire ? La mesure était donc nécessaire et adaptée pour protéger le pouvoir d’achat et les fins de mois.
Mieux encore, le Gouvernement ne s’est pas contenté de ce bouclier. Il a ensuite été question de créer des dispositifs ciblés pour accompagner les ménages les plus modestes dans la situation délicate que nous vivons.
Je pense, d’une part, au chèque énergie exceptionnel, un chèque de 100 euros versé à 6 millions de ménages en décembre dernier. Je pense, d’autre part, à l’indemnité inflation de 100 euros versée aux 38 millions de Françaises et de Français qui gagnent moins de 2 000 euros net par mois.
L’objectif est clair : limiter les effets de l’inflation sur le porte-monnaie. Le résultat semble également clair : les mesures sont saluées par bon nombre de Français.
Enfin, je reviens sur un sujet explosif : le prix des carburants. Incontestablement, la hausse est impressionnante. Depuis le mois de septembre dernier, les prix du litre de l’essence sans plomb 95, sans plomb 98 ou du gazole frôlent en ce moment les 2 euros. Ce montant est peut-être déjà atteint dans certains territoires.
Face à cela, le Gouvernement a décidé de prendre une mesure supplémentaire, large et protectrice, pour celles et ceux qui utilisent quotidiennement leur voiture pour travailler, alors qu’ils ne bénéficient pas toujours d’un réseau de transports en commun.
Telle est la raison d’être de la revalorisation du barème kilométrique de 10 %. Cette mesure volontairement ciblée permettra à chaque bénéficiaire de réaliser une économie moyenne de 150 euros. Toutefois, il convient d’examiner la situation de celles et ceux qui ne payent pas l’impôt sur le revenu.
Mes chers collègues, toutes ces mesures adaptées ont déjà des effets sur le quotidien de nos concitoyens, alors que la baisse des taxes proposée par certaines oppositions aurait sans doute été plus longue à mettre en place. Cette dernière aurait donc été inefficace aux yeux de l’opinion publique, déraisonnable d’un point de vue économique et particulièrement peu sage d’un point de vue environnemental.
Enfin, je veux le souligner, le Gouvernement n’a attendu ni l’inflation ni la crise sanitaire pour se préoccuper du pouvoir d’achat des Français, comme en témoignent la suppression de la taxe d’habitation, les baisses des impôts sur les sociétés comme sur les ménages, la revalorisation des retraites agricoles, la mise en place des dispositifs Pass’Sport et pass Culture, la défiscalisation des heures supplémentaires, la revalorisation de la prime d’activité et des salaires des soignants dans le cadre du Ségur de la santé.
Depuis 2017, le Gouvernement a fait ce qu’aucun autre n’a été capable de faire sur la même période en matière de pouvoir d’achat, comme en témoignent les mesures concrètes qui produisent leurs effets sur la vie des Français.
Lorsqu’on ajoute à ce tableau le rebond de croissance de 7 %, qui n’est en rien automatique, on peut, me semble-t-il, regarder l’avenir avec vigilance, certes, mais surtout avec optimisme !