M. le président. La parole est à Mme Marie-Arlette Carlotti, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Marie-Arlette Carlotti. M. le ministre Jean-Yves Le Drian a clairement affirmé que la présence de la société Wagner n’était pas compatible avec la manière dont la France concevait la lutte contre le terrorisme au Mali. Nous sommes d’accord.
Depuis le 23 décembre, des doutes s’effacent quant à l’implication de Wagner sur le théâtre malien. La presse rapporte les premiers accrochages de ses miliciens au début de l’année 2022, près de Bandiagara. Les faits sont là, les hommes de Wagner se déploient au Mali : ils ont été repérés à Ségou.
Le silence du gouvernement malien ne pourra pas masquer longtemps le concert barbare de ces mercenaires, dans un conflit dont la complexité ne saurait être résolue par l’usage d’une milice à la solde de l’argent.
Seule l’instabilité en sortira gagnante et les conséquences seront graves pour les populations maliennes, d’autant que la junte ne prévoit plus d’élections et décide désormais de confisquer le pouvoir.
La ligne rouge a été transgressée, c’est un fait ! Pourtant, il nous semble que, désormais, l’objectif du Gouvernement est de gagner du temps. D’ailleurs, monsieur le ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l’attractivité, vous évoquiez précédemment des consultations.
C’est pourquoi nous demandons clairement une clarification quant à la position de la France. Notre pays envisage-t-il de rappeler ses troupes ? Quel avenir pour la force Takuba ? Comment la France compte-t-elle mettre en œuvre les sanctions décidées par l’Union européenne ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l’attractivité.
M. Franck Riester, ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et de l’attractivité. Comme je l’ai souligné voilà quelques minutes, madame la sénatrice Carlotti, la présence de Wagner est inacceptable, tout comme le report des élections de cinq ans par la junte. Les pays de la Cédéao ont pris des décisions très fortes, que tous les États de l’Union européenne soutiennent. Nous avons aussi décidé d’un certain nombre de sanctions, individuelles et collectives, à l’encontre de Wagner.
Cela étant, nous ne pouvons pas prendre des décisions unilatérales. Nous avons besoin de consulter nos partenaires européens et internationaux, d’échanger avec eux.
En effet, nous ne sommes pas seuls au Sahel. Nous sommes présents au sein de la force Takuba, qui bénéficie de forces spéciales issues de 11 États européens.
Nous sommes également présents aux côtés des Nations unies et de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali, la Minusma, pour veiller au respect des accords d’Alger.
Nous sommes présents, enfin, auprès de nos partenaires sahéliens dans le cadre du G5 Sahel.
Nous devons donc prendre le temps des échanges et des discussions, afin d’arrêter la meilleure décision possible. Mais il est clair, dans notre esprit, que le contexte appelle la tenue de telles discussions dans les prochains jours, afin de définir précisément la position de la France et de l’Union européenne pour l’avenir proche. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Arlette Carlotti, pour la réplique.
Mme Marie-Arlette Carlotti. C’est Jean-Yves Le Drian, lui-même, qui a défini la ligne rouge, monsieur le ministre. Maintenant que nous y sommes, il donne l’impression de ne pas avoir de solution. C’est cette improvisation qui nous inquiète !
Nous sommes à un niveau de tension rarement atteint, ayant contraint le Président de la République à annuler son déplacement à Bamako et à Gao ; on a invoqué le covid, mais on sait que ce n’est pas le cas et qu’on a surtout cherché à éviter une situation explosive, susceptible de mettre en danger nos militaires en opération.
Vous vous escrimez à convaincre la junte de renoncer à Wagner. Elle ne veut rien entendre, et les invectives ne font pas une politique.
Vous n’avez pas voulu nous répondre, monsieur le ministre, mais, d’une certaine manière, je le comprends : C’est le Président de la République qui doit désormais dire aux Français quelle politique antiterroriste il entend mener au Mali ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe Les Républicains.)
politique du gouvernement en matière de sécurité
M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Voilà cinq ans, madame la ministre, dans un livre qu’il a modestement appelé Révolution, Emmanuel Macron dévoilait son petit bréviaire de promesses électorales. À l’heure du bilan, la « révolution » est bien là, mais ce n’est pas celle que les Français espéraient !
Partout dans notre pays, en ville comme à la campagne, ce sont, non pas des émeutes comme aurait pu s’en émouvoir Louis XVI, mais bel et bien des révolutions orchestrées par des voyous.
Au cours de ces cinq années, aucun territoire n’a été épargné – c’est une élue de Lot-et-Garonne qui le dit. Chaque jour, c’est un torrent de faits divers, de délits, de crimes, qui viennent nourrir l’actualité. (Exclamations sur les travées du groupe RDPI.)
Oui, la grande leçon de ce quinquennat, c’est bien la faillite d’Emmanuel Macron sur le plan régalien : fort avec les faibles, faible avec les forts, le Président de la République a totalement déserté le terrain de la sécurité.
Les questions que je souhaite poser au Gouvernement sont simples. Que regrettez-vous de ne pas avoir fait pendant ce mandat en matière de sécurité ? Êtes-vous vraiment fiers de cette société fracturée, abîmée, que vous allez laisser aux Français ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Je suis très étonnée par votre question, madame la sénatrice Christine Bonfanti-Dossat, (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) dans la mesure où, voilà à peine une semaine, on nous reprochait au contraire le fait que le Président de la République prenne à bras-le-corps la question de la sécurité. Il était alors en en déplacement à Nice, avec le ministre de l’intérieur et moi-même, d’ailleurs sur l’invitation du maire de Nice, Christian Estrosi, dont je salue l’engagement en matière de sécurité. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
À cette occasion, le Président de la République a formulé un certain nombre d’annonces, commençant d’abord par dresser son bilan.
Ce bilan, c’est en premier lieu le recrutement de 10 000 policiers et gendarmes sur l’ensemble du quinquennat – ces mêmes postes que la droite avait supprimés lorsqu’elle était au pouvoir (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.), lorsque Valérie Pécresse, alors ministre du budget, avait fait le choix de sabrer le budget de la sécurité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.) Nous sommes en train de travailler à compenser les décisions prises alors.
Au-delà des recrutements, il faut également évoquer le plan « Poignées de porte » et les nouveaux véhicules fournis sur le terrain pour donner plus de moyens à nos policiers et à nos gendarmes.
J’observe à cet égard, mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité sénatoriale, que vous avez voté l’augmentation considérable du budget de la sécurité et nous avez donné quitus du fait que c’était une véritable avancée.
Enfin, le Président de la République a partagé les premières grandes orientations de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), qui sera portée par le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, auprès du Premier ministre Jean Castex. Cette grande loi permettra de consolider les avancées du pays en matière de sécurité et les propositions des parlementaires seront évidemment les bienvenues pour la compléter. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Pierre Louault applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour la réplique.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. En d’autres termes, tout va très bien, madame la marquise !
Pourtant, la réalité est la suivante : 1 agression toutes les 44 secondes ; 38 % d’augmentation des agressions sexuelles depuis 2017 ; trois fois plus d’agressions et de menaces contre les élus depuis 2019 ; 85 agressions par jour contre les forces de l’ordre ; un taux d’homicides parmi les plus élevés d’Europe, etc. La liste est longue !
L’ivresse du pouvoir, madame la ministre, ne donne pas tous les droits au Président de la République ! Au contraire, sa fonction lui impose des devoirs, le premier étant de protéger les Français ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Christine Herzog et M. Stéphane Ravier applaudissent également.)
devenir du « health data hub »
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Catherine Morin-Desailly. Ma question s’adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé, que mon groupe interrogeait déjà en juillet 2020 sur le projet de plateforme des données de santé des Français, le Health Data Hub, censé regrouper à terme toutes nos données, jusqu’à celles des programmes de séquençage de notre ADN.
La question que je lui avais soumise portait sur l’attribution de la gestion de cette plateforme à la multinationale américaine Microsoft, choix imposé par son collègue Cédric O, sans appel d’offres spécifique, au prétexte incroyable qu’il n’existerait aucune entreprise française ou européenne capable !
J’alertais sur les risques pour nos libertés publiques d’un tel choix, la crise sanitaire ayant, en plus, mis une loupe sur ce sujet hypersensible des données de santé.
Récemment, nous apprenions le retrait en rase campagne de ce projet encore en gestation, puisqu’il n’y aura pas de demande d’habilitation auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
Peut-on espérer la remise à plat complète du projet ? Ou le Gouvernement fait-il le dos rond le temps de la campagne électorale, une sorte de « pause » pour arranger par la suite un appel d’offres, qui irait toujours à Microsoft via le consortium Bleu constitué avec Orange et Capgemini, sur l’invitation de Cédric O ?
Quel est le bilan de cette opération ? Je pense surtout à son coût – on parle de 80 millions d’euros, tout de même. Au vu du coup d’arrêt opéré, on peut comprendre que les Français se posent des questions : ce sont leurs données personnelles, mais ce sont aussi leurs impôts et leurs cotisations ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Madame la sénatrice Catherine Morin-Desailly, la sécurisation des données et la confiance – j’insiste sur ce point – sont essentielles au développement de la plateforme des données de santé, dite Health Data Hub.
Depuis sa création par la loi de juillet 2019, les équipes de plateforme sont pleinement mobilisées pour accompagner les projets de recherche, notamment sur sa plateforme technologique.
En accord avec le ministère, le Health Data Hub a retiré provisoirement sa demande d’autorisation pour héberger la base principale du système national des données de santé.
Cette décision est prise dans un contexte où la CNIL a commencé à instruire l’arrêté définissant la composition de ces bases de données, sensibles par essence. Cette instruction, une fois finalisée, consolidera l’ensemble du dispositif de mise à disposition des données, comme prévu par le décret de juin 2021.
Nous souhaitons assurer notre souveraineté sur les données de santé des Français et nous poursuivrons ce déploiement à compter du moment où ces conditions de confiance et de sécurité seront réunies.
Entre-temps, nous mobilisons tous les leviers disponibles pour avancer. Le ministère a demandé à l’assurance maladie, en lien avec cette plateforme, d’élaborer un plan d’action pour accélérer la fourniture des données liées au système national concerné.
Les premiers résultats sont déjà là, avec une centaine de projets pour 2021, témoignant à la fois de la très forte demande et de l’utilisation croissante des données.
Notre objectif, qui sera précisé au cours du mois de janvier, est de doubler le volume de données mises à disposition pour les projets de recherche, afin de concilier les attentes des porteurs de projets.
Le Health Data Hub se met donc bien en place ; il n’est pas à l’arrêt et porte ses premiers fruits. Mais ces avancées sont réalisées dans un cadre légal sécurisé et renforcé par les avis de la CNIL, avec le soutien constant du Gouvernement.
Nous ne faisons pas de pari sur les données de santé des Français. Nous voulons des résultats tangibles pour notre recherche, dans un cadre sécurisé et de confiance. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour la réplique.
Mme Catherine Morin-Desailly. Madame la ministre, vous ne m’avez pas répondu sur la question financière, qui est très importante. Quel est le coût de cette plateforme, censée permettre à terme des économies ?
Nous venons d’apprendre que l’assurance maladie refusait de verser sa quote-part de 11,5 millions d’euros pour alimenter le budget de 2022, car elle se pose de nombreuses questions sur la mise à l’arrêt du projet.
Je veux rappeler au Gouvernement que, si la souveraineté est bien son objectif, les données de santé des Français représentent un actif stratégique majeur, donc très convoité par les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft). Or il leur confie tout ou presque sans état d’âme. Les affaires, avant tout !
Dès lors, et je pense que tous mes collègues ici présents se joindront à moi, nous exigeons désormais la plus grande transparence et la plus grande rigueur dans tout projet d’utilisation de nos données, indépendamment du ministère ou de l’organisme concerné.
Nous exigeons aussi le stockage et le traitement de nos données sur le sol européen par des entreprises européennes, qui respectent notre législation et protègent nos libertés fondamentales. Le projet actuel de Health Data Hub ne respecte pas ces conditions.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Catherine Morin-Desailly. Enfin, nous exigeons une refondation complète de ce projet, s’il devait se poursuivre. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
menaces de l’azerbaïdjan contre valérie pécresse
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Valérie Boyer. Monsieur le ministre, ma question porte sur les « menaces de mort » du président autocrate de l’Azerbaïdjan, Ilham Aliyev, à l’encontre de notre candidate Valérie Pécresse lors de son déplacement en Arménie et en Artsakh.
Je veux saluer sa démarche sincère et courageuse, cohérente avec ses engagements.
Valérie Pécresse, Michel Barnier et Bruno Retailleau se sont rendus à plusieurs reprises au chevet des chrétiens d’Orient, des Yézidis et des Kurdes en Irak, au Kurdistan, témoignant un soutien que nombre d’entre nous ont aussi exprimé.
C’est le Parlement, avec Gérard Larcher, Bruno Retailleau, l’ensemble des groupes du Sénat, qui a été l’honneur de la diplomatie française, le 25 novembre 2020, en faisant voter une résolution et en nous rendant dès le mois d’avril 2021 en Artsakh.
Alors que la France préside le Conseil de l’Union européenne, le silence du Gouvernement est d’autant plus condamnable et inquiétant.
Nous ne pouvons pas nous contenter d’une réponse en catimini du chef de l’État, qui nous rappelle la loi en vigueur dans cette dictature, ne la condamne même pas et ne soutient pas ses élus. Pourquoi ne pas exiger des excuses solennelles de l’Azerbaïdjan ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l’attractivité.
M. Franck Riester, ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et de l’attractivité. Madame la sénatrice Valérie Boyer, vous attirez mon attention sur les déclarations du président Aliyev dans une interview qu’il a accordée le 12 janvier et qui faisait suite, d’ailleurs, au déplacement de Mme Pécresse au Haut-Karabakh.
Jean-Yves Le Drian l’a hier très clairement rappelé dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale : ces propos sont inacceptables. Cette position du gouvernement français a d’ailleurs été rappelée à l’ambassadeur d’Azerbaïdjan en France.
Pour autant, je veux vous le dire, nous n’avons pas attendu le déplacement de Mme Pécresse pour agir en solidarité avec le peuple arménien et pour faire en sorte que la crise dans cette région du monde s’apaise. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
La France, en effet, madame la sénatrice, est au rendez-vous de la solidarité avec le peuple arménien depuis ce terrible conflit de l’automne 2020 – j’ai d’ailleurs eu l’occasion de le souligner voilà peu à la suite de l’une de vos questions. Nous le sommes en raison du lien historique et culturel qui nous lie avec le peuple arménien, auquel une assistance humanitaire importante a d’ailleurs été fournie, à la demande du Président de la République.
Mme Valérie Boyer. Ce n’est pas la question, monsieur le ministre !
M. Franck Riester, ministre délégué. Jean-Baptiste Lemoyne, au nom de la France, a signé il y a quelques semaines une feuille de route bilatérale pour le développement de notre coopération économique.
Notre pays est aussi au rendez-vous de la responsabilité pour trouver une solution durable à ce conflit en tant que coprésident du groupe de Minsk. Ces efforts se poursuivent aujourd’hui, en lien avec l’Europe, dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne.
Je vous rappelle que le Président de la République a réuni à Bruxelles, le 15 décembre dernier, le premier ministre Pachinian et le président Aliyev pour justement rechercher des solutions à ce conflit. Et c’est cela, madame la sénatrice, sans polémique, sans essayer d’instrumentaliser quoi que ce soit dans une visée électorale, qui est notre responsabilité.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour la réplique.
Mme Valérie Boyer. Malgré vos explications, monsieur le ministre, l’ambassadeur azerbaïdjanais nie toujours ces menaces et nous nargue en considérant que Valérie Pécresse n’a pas respecté la loi azerbaïdjanaise sur un territoire qui ne lui appartient même pas, en diffusant des fake news et des photos truquées.
Mais qui a violé les lois en bombardant civils et églises, en utilisant des armes interdites, en ne rendant pas les prisonniers de guerre ? Qui qualifie nos alliés arméniens de « chiens » ? Qui envoie des mercenaires djihadistes ? Qui menace la paix en attaquant ce territoire souverain qu’est l’Arménie ?
Valérie Pécresse s’est rendue en Artsakh, car elle croit en la dignité des peuples, elle croit aux nations souveraines, qui doivent maîtriser leurs décisions et protéger leur peuple et leur civilisation. Valérie Pécresse préfère la sobriété de l’action, la fidélité à ses engagements plutôt que l’agitation, la communication et les compromissions.
Comme de nombreux parlementaires qui sont rendus en Artsakh, comme Jaurès au Parlement en 1896 (Exclamations amusées sur les travées du groupe SER.), Valérie Pécresse a voulu témoigner en femme d’État : « Quoi, devant tout ce sang versé, devant ces abominations et ces sauvageries, devant cette violation de la parole de la France et du droit humain, pas un cri n’est sorti de vos bouches, pas une parole n’est sortie de vos consciences, et vous avez assisté, muets et, par conséquent, complices, à l’extermination complète. »
Monsieur le ministre, en tant que membres du groupe de Minsk, nous ne pouvons plus nous réfugier derrière cette neutralité ; être neutre, c’est choisir son camp, et jamais nous ne pourrons choisir celui de la dictature et de l’abjection. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
année européenne de la jeunesse
M. le président. La parole est à Mme Laurence Harribey, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Laurence Harribey. En France, chaque année, 100 000 jeunes quittent le système scolaire sans diplôme ni qualification.
Les jeunes sont aussi les plus touchés par le chômage et la précarité ; de surcroît, ils sont exclus des minima sociaux, au contraire de ce qui prévaut dans vingt-trois des vingt-sept pays que compte l’Union européenne.
Madame la secrétaire d’État, 2022 a été proclamée Année européenne de la jeunesse ; c’est aussi le trente-cinquième anniversaire d’Erasmus. Or, dans le programme de la présidence française, une seule présidence, une seule proposition concrète : le service civique européen. Mais je m’étonne et je me demande d’ailleurs si vous le savez : le service volontaire européen existe depuis vingt ans déjà et a été transformé en 2018 en corps européen de solidarité.
Alors, quel est le sens de cette annonce ? Demain, devant l’agence Erasmus+ France seront présentées les propositions issues des consultations « jeunes » dans le cadre de la conférence sur l’avenir de l’Europe : visiblement, ils aspirent à du concret et à une amplification des actions en faveur de tous les jeunes. Quelle réponse leur ferez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’éducation prioritaire.
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de l’éducation prioritaire. Madame la sénatrice Laurence Harribey, je vous remercie de cette question, qui me permet de présenter devant le Sénat les orientations de notre ministère pour la jeunesse à l’occasion de la présidence française du Conseil de l’Union européenne.
La Commission a publié le 14 octobre dernier une proposition de décision du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne sur une Année européenne de la jeunesse pour 2022. Cette initiative est destinée à mieux accompagner les jeunes dans la sortie de la crise sanitaire et à les aider à surmonter son impact négatif.
Cette décision fixe quatre objectifs, que je vais rappeler et que nous aurons à cœur de mettre en œuvre.
Tout d’abord, les transitions verte et numérique offrent une nouvelle perspective et des possibilités de contrer l’impact négatif de la pandémie sur les jeunes.
Ensuite, nous entendons encourager tous les jeunes, en particulier ceux qui sont issus des milieux défavorisés, à devenir des citoyens actifs et engagés ainsi que des acteurs du changement. Je pense là bien sûr à l’engagement civique.
Nous voulons également promouvoir les possibilités offertes par les politiques publiques, au niveau européen, national, régional et local, afin de soutenir leur développement personnel, social et professionnel dans un monde vert, numérique et, surtout, inclusif.
Enfin, il s’agit d’intégrer la politique de jeunesse dans tous les domaines pertinents de la politique de l’Union, afin d’encourager la prise en compte du point de vue des jeunes dans l’élaboration des politiques publiques à tous les niveaux. Il s’agit de la clause d’impact jeunesse, que nous appliquons déjà.
Madame la sénatrice, à l’occasion de cette présidence, la France sera aux côtés des institutions européennes, des États membres et de l’ensemble des parties prenantes pour piloter, à l’échelle européenne, durant ces six mois, quelques sujets d’intérêt pour la jeunesse européenne et, bien sûr, pour les mettre à l’ordre du jour du Conseil.
Je pense évidemment au soutien à la mobilité des jeunes dans un autre pays de l’Union européenne afin qu’elle soit plus inclusive, et ce en lien avec les annonces du Président de la République française sur le service civique européen. Vous l’avez dit, nous fêtons d’ailleurs aujourd’hui les trente-cinq ans d’Erasmus.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d’État. Je pense également au mentorat, sujet sur lequel le Gouvernement travaille et qui pourrait être porté à l’échelle européenne.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Harribey, pour la réplique.
Mme Laurence Harribey. Madame la secrétaire d’État, je vous interroge sur les priorités de la présidence française ; vous me répondez en évoquant les priorités de la Commission européenne ! C’est étrange…
Je vous parlais du service volontaire européen ; vous me répondez en vous référant à une annonce du gouvernement français sur le service civique, qui existe déjà. Il s’agit là donc d’un effet d’annonce, d’un gadget.
Une politique de la jeunesse ne se mène pas à coups d’annonces ou de gadgets. Elle suppose une politique de fond, qui s’inscrit dans la durée. Elle suppose surtout d’accompagner les acteurs associatifs et de leur permettre d’être encore plus performants pour ce qui est de l’implication dans les programmes européens, ce qu’ils essayent de faire depuis trente ans.
C’est un enjeu de taille, mais c’est un enjeu qui vaut le coup. Ce matin, le Président disait qu’il fallait faire de l’Europe une puissance démocratique, culturelle et d’éducation. On ne peut pas faire l’impasse sur la jeunesse pour aboutir à ce résultat. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)
finances des communes de montagne
M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Martine Berthet. Madame la ministre, il y a un an, le 27 janvier 2021, je vous interpellais en séance – comme aujourd’hui – sur l’inquiétude des communes de station de nos massifs montagneux quant à leurs difficultés budgétaires et de trésorerie. Des réponses ont été apportées par les lois de finances pour 2021 et de finances rectificatives de juillet 2020 et de juillet 2021, mais rien ne leur a été versé, ou si peu, et sans commune mesure par rapport aux pertes subies et aux dépenses nouvelles de gestion de la crise sanitaire.
Si des compensations ont été apportées aux professionnels de la montagne, ce dont chacun se félicite, les communes n’ont pas été compensées des pertes de recettes de taxes professionnelle et touristique – taxe de séjour, taxe sur les remontées mécaniques, etc. Or la baisse catastrophique d’activité sur l’hiver 2020-2021 a provoqué pour ces collectivités des pertes de recettes, en moyenne, de 70 %, voire de 90 %.
Ces exemples, madame la ministre, vous les connaissez puisque vous avez vérifié auprès des trésoreries la véracité des plaintes des maires de communes de montagne.
Pour la seule année 2021, une perte de 500 000 euros pour Saint-Lary-Soulan, dans les Hautes-Pyrénées ; de plus de 300 000 euros pour Isola, dans les Alpes-Maritimes ; de 1 million d’euros pour Valloire ; de 5 millions d’euros pour Bourg-Saint-Maurice, en Savoie.
La commune Les Belleville, sur 6 millions d’euros de pertes, a perçu un acompte de 100 000 euros en novembre 2021, calculé sur la base de 30 % de la somme perçue en 2020, ce qui représente, vous le voyez, une somme dérisoire au regard des pertes réelles.
Admettez que cette situation n’est pas tenable.
Ces communes, qui se demandent comment équilibrer leur budget de fonctionnement surdimensionné pour la population touristique, ne seront plus en capacité d’investir, ce qui affectera alors gravement l’économie. Pour autant, leur contribution au fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) est toujours exigée.
Madame la ministre, comment vont-elles faire ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)