M. Jean-Pierre Sueur. … indique à juste titre ceci : « Si l’on avait opté pour la vaccination obligatoire des plus de cinquante ans au lieu du passe sanitaire en septembre 2021, on aurait évité 45 % des entrées en réanimation entre octobre et décembre. » (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Jean-Pierre Sueur. Après un long et riche débat, le groupe socialiste du Sénat, favorable à l’obligation vaccinale, a jugé cohérent d’approuver le passe vaccinal, qui s’en rapproche, mais nous persistons dans l’idée qu’il serait logique de votre part de soutenir notre amendement relatif à l’obligation vaccinale.
Toutefois, nous serons extrêmement vigilants sur plusieurs points, qui justifient nos dix-neuf amendements, en particulier certains d’entre eux.
D’abord, en matière de libertés publiques – à cet égard, je m’adresse particulièrement à notre rapporteur, Philippe Bas –, il doit être expressément précisé qu’il ne revient pas aux responsables des établissements recevant du public, par exemple aux restaurateurs, de procéder à des contrôles d’identité. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. Xavier Iacovelli. Quelle différence avec une vente de cigarettes ?
M. Jean-Pierre Sueur. Qu’il s’agisse du passe sanitaire ou, demain, du passe vaccinal, le contrôle d’identité doit relever de la police, de la gendarmerie, des personnes assermentées. Il ne faut pas de confusion. Je m’adresse à notre rapporteur, Philippe Bas, dont je salue le travail : j’espère qu’il sera possible d’évoluer au cours du débat. À mon sens, l’amendement que vous avez présenté comporte un certain nombre de faiblesses.
Ensuite, il nous paraît très important de travailler au dépistage dans les écoles et les collèges. Nous avions proposé deux dépistages par semaine. Nous maintenons cette position. Étant au contact des populations dans tous les départements de France, nous tenons à dire que ce qui se passe dans les écoles est incroyable. Il n’est pas possible d’avoir un ministre de l’éducation nationale qui change de position tous les deux ou trois jours, voire chaque jour !
M. Loïc Hervé. Très juste !
M. Jean-Pierre Sueur. Cela crée une confusion et une exaspération chez les enseignants et chez les parents d’élèves. Il faut vraiment en finir. Les choses ne peuvent pas continuer ainsi, monsieur le ministre de la santé ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST.) Je vous l’assure, en disant cela, nous nous faisons les représentants des populations.
Enfin, en tant que socialistes, nous sommes très attachés à la justice dans le monde entier. Nous nous battrons toujours pour cela. C’est pourquoi nous défendrons un amendement tendant à prévoir la levée des brevets. Ce qui est en cause dans cette affaire, ce sont des histoires d’argent et de profits considérables. Que les peuples dans la pauvreté n’aient pas accès à la vaccination quand certains y ont droit est une injustice. Nous devons lutter pour l’égalité ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Esther Benbassa et M. Stéphane Demilly applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Florence Lassarade. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, aujourd’hui, 90 % des Français éligibles sont vaccinés, même partiellement ; je tiens à le souligner, car voilà un an, personne n’aurait osé espérer un tel succès. Le choix de la science, le choix de la responsabilité est toujours le bon. C’est celui qui a été fait par la grande majorité des Français.
Certes, la vaccination n’empêche pas totalement d’être contaminé ou de transmettre le virus, mais elle réduit considérablement le risque d’être hospitalisé ou admis en réanimation, et même de mourir du covid.
Un tel bilan est déjà très positif, même si la vaccination ne nous a pas encore permis de reprendre une vie normale. Nous considérons que celle-ci constitue l’un des meilleurs outils pour lutter contre les dangers de l’épidémie.
Actuellement, le problème majeur est celui des effectifs à l’hôpital et de l’épuisement des soignants. La vague omicron n’en finit pas de monter. Le taux de positivité des tests a atteint un niveau inédit, 20 %. Toutes les régions et toutes les tranches d’âge sont touchées.
La pression sur l’hôpital s’accroît, le nombre des hospitalisations est en hausse régulière. L’incidence de la covid augmente chez les plus âgés, ce qui pourrait avoir dans quelques semaines des répercussions importantes sur l’hôpital, le risque étant la saturation. Comment allez-vous faire face au manque de personnels au moment où le nombre d’hospitalisations progresse ?
Les conséquences sont déjà lourdes pour les autres patients. Les déprogrammations pourraient être évitées si les lits de réanimation n’étaient pas occupés par des personnes non vaccinées.
Une telle situation pose la question de la responsabilité individuelle et de la responsabilité collective en matière de vaccination. Face à un virus qui évolue constamment, il est nécessaire d’adapter les outils pour le combattre, mais il faut aussi anticiper. À cet égard, monsieur le ministre, nous regrettons le manque d’anticipation de la part du Gouvernement.
En effet, les personnes actuellement en réanimation sont majoritairement touchées par le variant delta, qui n’est pas apparu ces jours-ci. Le texte aurait dû être inscrit à l’ordre du jour de notre Haute Assemblée bien plus tôt et non pas au moment de la flambée de l’épidémie. Le présent projet de loi ne produira en effet ses premiers effets qu’à partir de la fin du mois de février !
Nous sommes majoritairement favorables – vous l’avez compris – à la vaccination et au passe vaccinal. D’une part, celui-ci contribue à augmenter la couverture vaccinale. D’autre part, la situation des hôpitaux nous le commande.
Les services hospitaliers sont saturés, car 5 millions de Français ont fait le choix de ne pas se faire vacciner. Il nous faut poursuivre nos efforts en transformant le passe sanitaire en passe vaccinal et en renforçant les mesures de lutte contre la fraude.
Nous proposerons aussi un certain nombre de mesures pour améliorer la protection de tous les Français face à l’épidémie. J’ai notamment proposé des amendements visant à maintenir et à renforcer la surveillance épidémiologique des eaux usées et à favoriser l’installation de purificateurs d’air dans les établissements d’enseignement. Malheureusement, ils ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution.
J’en viens au cas de l’école. Le Gouvernement a fait le choix de laisser le virus circuler en ne repoussant pas la rentrée. Mais, avec le nouveau protocole et la multiplication des tests, ni les parents, ni les enfants, ni les enseignants ne savent comment faire.
Nous avons le sentiment que la stratégie de lutte contre le covid est gérée à court terme et qu’on ne mesure pas les difficultés de mise en œuvre au quotidien des décisions qui sont prises. Pourquoi ne proposez-vous plus de tests salivaires dans les écoles ? Pourquoi ne proposez-vous pas plus largement les masques FFP2 ? Sommes-nous encore en train de gérer des pénuries ?
Enfin, au lieu d’invectiver les non-vaccinés, quelles mesures proposez-vous pour aller vers les plus vulnérables, les plus âgés, les plus isolés et les plus précaires ?
Nous attendons beaucoup des débats qui vont suivre pour améliorer la gestion de la crise sanitaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Bernard Jomier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi pose un problème de naissance : il est mal né. J’en veux pour preuve la manière dont s’est déroulé le débat à l’Assemblée nationale. Ce texte n’est pas – notre rapporteur a raison sur ce point, comme sur d’autres d’ailleurs – une réponse à la vague actuelle.
Et pourtant, le Gouvernement a tenté de passer en force, jusqu’à s’offusquer que les députés ne veuillent pas délibérer à quatre heures du matin.
M. Antoine Lefèvre. Très juste !
M. Bernard Jomier. Il est compliqué – pourtant, vous savez que nous ne sommes pas irresponsables en matière de gestion de la crise sanitaire – d’approuver un texte qui relève à ce point de la posture politique.
Monsieur le ministre, vous aviez la possibilité de revenir devant le Parlement au mois de janvier ou de février pour faire un point sur la situation, comme nous vous l’avions proposé ; vous ne l’avez pas voulu.
À la fin de l’année dernière, alors que l’épidémie devenait hors de contrôle, vous avez délibérément laissé circuler le virus, notamment dans les écoles. Nous ne cesserons de rappeler que le ministre de l’éducation nationale a allégé le protocole quand le nombre de classes fermées augmentait. Et la situation a totalement dérapé avec le variant omicron. Certes, celui-ci aurait circulé – aucun pays n’y échappera –, mais nous aurions pu échapper à un pic d’une telle intensité.
Le texte a un autre défaut. Certes, il faut s’adapter, mais il faut aussi que la loi se projette dans la durée. Monsieur le ministre, légiférer dans la durée, c’est peut-être faire part à nos compatriotes du scénario optimiste, mais c’est aussi leur dire qu’il vaudrait mieux prévoir le maintien d’une protection collective élevée dans la durée pour notre population.
Pour cela, nous vous proposons une méthode : adopter un principe sans le déguiser, celui de l’obligation vaccinale universelle. Cela rassemble. Cela ne crée pas de clivage entre les Français en décrétant que les membres de telle profession, par exemple les gendarmes, y seraient soumis quand d’autres, par exemple les policiers, en seraient exemptés. Nous signifions ainsi, et c’est le rôle de la politique, que, tous ensemble, nous faisons face à l’épidémie, que nous devons tous protéger les soignants de notre pays, protéger notre système de santé et nous protéger les uns les autres.
Pour les modalités d’application, nous verrons ensuite, mais n’opposons pas convaincre et contraindre : c’est un piège. Oui, il y a une part de contrainte, et le passe vaccinal, ou le certificat de vaccination – appelons-le comme on veut –, peut être un des outils de contrôle. Nous ne l’excluons pas. Nous en discuterons les modalités, mais dans un cadre bien posé. Mais il faut aussi convaincre ; personne ne veut y renoncer. Ceux qui répètent que l’on ne mène pas assez le travail d’« aller vers » ont également raison.
Si le cadre était posé en ces termes, nous pourrions débattre et légiférer sereinement, de manière beaucoup plus durable, et non pas pour les quinze jours à venir, de surcroît sans efficience.
Notre position est simple, elle est claire. Elle a toujours été la même. C’est dans cette perspective que nous étudierons le projet de loi et tenterons d’y apporter – mon collègue Jean-Pierre Sueur l’a souligné – les améliorations indispensables pour pouvoir le voter et ainsi respecter les Français. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Muriel Jourda. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Muriel Jourda. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il m’appartient de faire valoir la position des sénateurs du groupe Les Républicains qui, malgré les efforts patents de nos deux rapporteurs, ne partagent pas l’opinion majoritaire et ne voteront pas le passe vaccinal.
Beaucoup de choses ont été dites. Mais beaucoup de choses resteraient à dire, par exemple sur la manière dont ont été caricaturés ceux qui étaient opposés à la position du Gouvernement, avec des propos tenant parfois plus des pires travers des réseaux sociaux que d’une méthode digne de gouvernement.
M. Loïc Hervé. Très bien !
Mme Muriel Jourda. Beaucoup de choses resteraient à dire aussi sur la gestion parfois trop sanitaire de la crise. Cela a occulté les autres enjeux, y compris le fait que la santé ne se résume pas à attraper ou à ne pas attraper le virus du covid ; parlez-en donc aux pédopsychiatres…
Beaucoup de choses resteraient également à dire sur l’étrange philosophie de société qui nous pousse à faire courir tous les risques d’un vaccin somme toute assez récent à nos enfants au lieu de convaincre les plus âgés de se faire vacciner. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Loïc Hervé applaudit également.)
Mais le temps m’est compté.
J’évoquerai donc ceux de nos concitoyens qui sont opposés au passe vaccinal. Ceux que j’ai rencontrés ne sont ni irresponsables ni égoïstes. Ils ne sont pas contre la science. Pour un certain nombre d’entre eux, ils ne sont même pas contre le Gouvernement. Il convient, me semble-t-il, de le rappeler : les mêmes ont accepté la plus importante atteinte aux libertés portée dans le cadre de la gestion de la pandémie, c’est-à-dire le confinement. Ils ont compris une telle décision. À l’époque, nous ne connaissions pas le virus et nous ne disposions pas de moyen préventif ni curatif. Le confinement semblait alors la moins mauvaise des solutions. S’ils s’opposent aujourd’hui au passe vaccinal, c’est parce qu’ils ne comprennent pas une telle décision.
M. André Reichardt. Très bien !
Mme Muriel Jourda. Le problème de fond ne réside pas dans les déclarations antérieures du Président de la République qui avait dit que nous n’en viendrions jamais à ce passe vaccinal. Après tout, il serait malhonnête de prétendre qu’il est simple de gérer une telle pandémie. Il faut pouvoir changer d’opinion lorsque les faits et la réalité objective nous y conduisent. Mais quelle est aujourd’hui la réalité qui nous conduirait à changer d’opinion ?
Chacun ici l’a souligné, et je crois que tout le monde en est convaincu, le vaccin n’est que peu efficace. En tout cas, il ne permet pas d’atteindre l’immunité collective. Plus nous sommes vaccinés, plus nous sommes contaminés ; c’est une évidence sur laquelle personne ne revient.
En revanche, et ce n’est pas un petit apport, le vaccin permet de limiter les formes graves de ce virus. Or, au bout de deux ans, nous savons qui développent ces formes graves : ce sont les personnes les plus fragiles, du fait soit de leur âge, soit de leur état de santé, soit en raison des deux. Et ce sont ces personnes qui, nous dit-on, sont le plus majoritairement dans les services de soins critiques, aujourd’hui en grande difficulté.
Entre parenthèses, quand le système de santé d’un pays de 67 millions d’habitants n’arrive pas à supporter un peu moins de 4 000 personnes en soins critiques, on peut se demander si ce qui pose problème, c’est bien le virus ou si ce ne serait pas plutôt le système de santé ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Loïc Hervé applaudit également.)
M. Xavier Iacovelli. À qui la faute ?
Mme Muriel Jourda. Ce sont nos concitoyens les plus à risque, les plus susceptibles de développer des formes graves qu’il faut, me semble-t-il, aller chercher. Or, dans notre pays, le taux de vaccination des personnes âgées n’est pas maximal. Il faut le savoir, les 18-24 ans sont mieux vaccinés que les personnes âgées. Nous aurions souhaité une politique tendant à la vaccination des personnes qui peuvent le mieux bénéficier des effets du vaccin, et non pas de la population entière, et à quel prix !
Car le deuxième écueil de ce texte est qu’il attaque frontalement l’État de droit. L’État de droit, c’est la fin de l’arbitraire. Or, aujourd’hui, on nous propose de punir des personnes parce qu’elles ne se vaccinent pas alors même qu’il n’y a aucune obligation vaccinale ; c’est tout à fait arbitraire ! Quelles que soient les envies de nos dirigeants, nous ne pouvons pas y être soumis.
Voilà pourquoi, mes chers collègues, un certain nombre d’entre nous et un certain nombre de Français sont opposés au passe vaccinal. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Loïc Hervé et Stéphane Ravier applaudissent également. – M. Xavier Iacovelli hue l’oratrice.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite apporter quelques éléments de réponse.
D’abord nous répondons à toute la demande de tests dans notre pays ; il faut le reconnaître et s’en satisfaire. La semaine dernière, les 12 millions de Français qui souhaitaient ou avaient besoin d’être testés ont pu l’être. Bien entendu – j’en ai pleinement conscience –, cela crée parfois des files d’attente dans les pharmacies. Je remercie d’ailleurs les pharmaciens de leur mobilisation extraordinaire. Ils ont permis de tenir cette montée en charge des dispositifs de dépistage.
J’entends surgir un nouveau débat dans notre pays : certains se demandent – ce n’était pas le sens de vos propos, mesdames, messieurs les sénateurs – si la France ne teste pas trop et s’il ne faudrait pas limiter les tests à certaines catégories de population.
J’ai l’impression d’un retour deux ans en arrière, lorsque nous ne testions que les cas graves, douteux ou spécifiques, réservant aux autres un diagnostic clinique, à l’instar de ce qui existe habituellement s’agissant de la grippe. À l’époque, on nous demandait de tester tout le monde. Pour moi, les Français qui ont un doute doivent pouvoir recevoir une réponse en bonne et due forme et savoir s’ils sont, ou non, atteints du covid. Ne cassons pas le thermomètre. Notre système tient.
Il y a eu beaucoup de débats à l’Assemblée nationale – cela ne signifie pas que ce doit nécessairement être le cas au Sénat – sur la question du passe pour les adolescents. Le choix de ne pas l’exiger pour les activités sportives, culturelles, périscolaires et extrascolaires a tout de même été approuvé – je le souligne, parce que c’est la première fois en douze textes que cela m’arrive – par les 360 députés présents, à l’unanimité moins deux voix. Un équilibre a été trouvé. Nous avons considéré que la présentation du passe vaccinal dans les bars et dans les restaurants par les adolescents se justifiait : la plupart des adolescents non vaccinés ont souvent des parents eux-mêmes non vaccinés, qui ne peuvent donc pas les emmener dans des bars ou des restaurants. Mais vous aurez l’occasion d’en débattre.
J’entends parfaitement la logique qui conduit certains à prôner la fixation dans la loi d’un seuil de péremption du passe vaccinal. Il est cohérent de se dire qu’en deçà d’un certain niveau de charge sanitaire ou épidémique, l’outil ne se justifie plus. Toutefois, l’inscription d’une telle disposition dans la loi me pose problème. Nous voyons vague après vague que les situations sont imprévisibles. Imaginez si nous avions dû envisager, par exemple, un seuil de contaminations dans notre pays déclenchant des mesures sanitaires. Qui aurait pu prédire qu’un jour, nous aurions 350 000 contaminations en vingt-quatre heures ? Le seuil, surtout fixé dans la loi, est rigide et nous empêche d’agir.
Toutefois, les dispositions actuelles relatives à l’application du passe vaccinal reposent sur la notion d’urgence sanitaire. Elles ne sont légitimées que par des motifs sanitaires. Si la situation épidémique et sanitaire n’était plus jugée compatible avec le maintien du passe, la justice ordonnerait que de tels dispositifs tombent. La loi qui a été adoptée prévoit déjà un garde-fou : un citoyen peut à tout moment saisir la justice s’il considère que l’outil n’est plus justifié au regard de la situation sanitaire et qu’il ne faut plus l’utiliser.
Le débat sur les dispositifs de repentir – faut-il passer par la loi ou par une circulaire ? – est légitime. Mais je souhaite adresser aux Français le message que vous me demandez de leur envoyer. Vous me dites qu’il faut convaincre tous les réticents ? Oui, nous faisons de l’« aller vers » ! Les médecins, les pharmaciens, les infirmiers à domicile, les sages-femmes, les kinésithérapeutes, les étudiants, les personnels des centres au domicile, les collectivités territoriales – comment les oublier au Sénat ? – et les associations sont mobilisés pour aller chercher les personnes non vaccinées.
Mais il y a aussi des personnes qui, après avoir disposé d’un faux passe ou d’un faux certificat, regrettent aujourd’hui de ne pas être vaccinées. Quand elles arrivent dans un centre de vaccination, on leur dit qu’elles sont déjà vaccinées. Elles doivent alors expliquer qu’elles n’ont en réalité pas reçu leurs doses, qu’elles ont un passe qu’elles ont payé 100 balles et qu’on leur a bidouillé. Cela arrive…
Nous leur adressons un message : « Faites-vous vacciner – c’est l’essentiel –, et nous effaçons l’ardoise. » Cela ne signifie évidemment pas que les auteurs ou les utilisateurs actuels de faux passes seront exemptés de rendre des comptes devant la justice. Mais nous avons travaillé avec les députés le dispositif de repentir.
Le virus peut circuler dans les écoles – il peut circuler partout – et les enfants peuvent se contaminer. D’ailleurs, le taux d’incidence chez les enfants est élevé. Fort heureusement, les enfants développent très peu de formes graves, même si cela arrive. Par ailleurs, ils peuvent, malgré eux – cela va de soi – transmettre le virus à des adultes. Vous connaissez certainement dans votre entourage des personnes qui ont été contaminées par leurs enfants.
Nous sommes donc obligés de continuer d’assurer un suivi épidémique et épidémiologique chez les enfants. C’est un dispositif de droit commun. Nous ne lançons pas des opérations de tests dans toutes les classes, dans toutes les écoles, car cela nécessiterait des effectifs astronomiques. Simplement, nous vaccinons et nous testons beaucoup.
Trois tests sont demandés aux enfants : un test initial antigénique ou PCR le premier jour, puis deux autotests réalisés à la maison. L’autotest est en train de devenir une pratique dans un certain nombre de familles françaises.
Dans cette période d’épidémie galopante, tout le monde est saturé. Mais, je le répète, les pharmacies et les laboratoires ont tenu : 12 millions de tests, c’est un exploit. Dans nos projections au ministère, nous tablions sur 7 millions ou 8 millions de tests au mieux. Les pharmaciens sont en train de nous montrer que nous avions tort. Je les remercie : ils ont donné un gros coup de boost la semaine dernière.
Il y a des files d’attente. Nous ne voulons pas que les parents attendent pendant des heures devant les pharmacies et soient pénalisés parce qu’ils ne pourraient pas aller travailler. Nous leur disons donc avec pragmatisme qu’ils peuvent basculer en autotest, puisque nous savons désormais que cela fonctionne. Je préfère mille fois que nous soyons capables d’adapter notre dispositif pour tenir compte de la réalité plutôt que de nous embêter avec des mesures susceptibles de nous poser plus de difficultés.
Monsieur le sénateur Jean-Pierre Sueur, tout à l’heure, vous avez fait référence à la Drees. Permettez-moi de vous indiquer, puisque les vidéos au Sénat font parfois foi…
M. Loïc Hervé. C’est normal !
M. Olivier Véran, ministre. Certes, monsieur Hervé, mais lorsque des choses inexactes sont dites, les gens peuvent les prendre pour argent comptant. Je fais donc très attention !
La Drees n’a jamais publié de données attestant qu’il y aurait eu 45 % de réanimations en moins si la vaccination des personnes âgées de plus de 50 ans avait été rendue obligatoire. Elle ne s’est strictement jamais prononcée sur cette question. Au demeurant, monsieur Sueur, le logo figurant sur le document que vous avez eu la gentillesse de me fournir – et je vous en remercie – n’est pas le bon : il est fait référence à la « Dress », et non à la Drees.
M. Xavier Iacovelli. Serait-ce une fake news ?
M. Olivier Véran, ministre. Je me demande de quoi il s’agit. En tout cas, ce ne sont en aucune manière des données qui proviennent de mon ministère.
M. le président. La discussion générale est close.
Monsieur le président de la commission des lois, de combien de temps souhaitez-vous disposer pour examiner les amendements sur le projet de loi ?
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Nous avons besoin d’une heure, monsieur le président.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à dix-sept heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à dix-sept heures trente, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)