compte rendu intégral

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

Mme Esther Benbassa,

M. Pierre Cuypers.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

J’appelle chacun de vous, mes chers collègues, à observer au cours de nos échanges l’une des valeurs essentielles du Sénat : le respect – respect des uns et des autres, mais aussi celui du temps de parole.

maires bâtisseurs

M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Frédéric Marchand. Monsieur le Premier ministre, un maire bâtisseur, c’est, pour nos concitoyens, un maire bétonneur. Voilà la sentence qu’entendent aujourd’hui nombre de maires qui ont choisi, notamment en zone tendue, de se saisir à bras-le-corps de l’épineuse question du logement.

Pour échanger régulièrement avec eux, nous connaissons, sur toutes les travées de cette assemblée, la difficulté grandissante des élus à porter devant leur population un programme de « maire bâtisseur » – et ce quelle que soit leur appartenance politique.

Les élections municipales de 2020 ont d’ailleurs montré tout le potentiel de candidatures appelant à un arrêt des constructions.

Alors que s’est ouvert, hier, le Congrès des maires – occasion pour moi de saluer les nombreux élus présents dans notre beau Sénat –, la question du logement apparaît comme centrale sur notre territoire national. Il est plus que jamais nécessaire de porter un discours politique offensif, seule façon de réhabiliter l’acte de construire dans les zones où l’offre de logement est inférieure à la demande.

Cette question est au cœur des préconisations de la commission pour la relance durable de la construction de logements, présidée par François Rebsamen et qui a remis récemment le tome II de ses conclusions. La commission, dans ses premières conclusions, recommandait aux élus d’affirmer qu’une densité heureuse était possible, à condition de veiller à la qualité des logements et des espaces urbains.

Ce discours politique doit bien évidemment s’accompagner de mesures financières concrètes de soutien aux communes et intercommunalités. Des mesures ont déjà été prises dans le cadre du plan de relance. Ainsi, 1 288 communes ont reçu 142 millions d’euros, pour plus de 67 000 logements construits : 142 millions d’euros, sur les 350 millions d’euros prévus, soit des crédits loin d’être utilisés.

Monsieur le Premier ministre, lors du congrès de l’Union sociale pour l’habitat (USH), à la fin du mois de septembre, vous avez indiqué faire évoluer l’aide à la pierre en créant un dispositif de contractualisation recentré sur les territoires tendus où l’offre de logement fait défaut, tout en optimisant le foncier disponible au regard de sa rareté et de son coût.

Les intercommunalités et communes des zones tendues sont les premières intéressées et doivent s’engager fortement sur des objectifs de production de logements neufs.

Monsieur le Premier ministre, au moment où les élus de notre pays ont rendez-vous à Paris, pouvez-vous confirmer à la représentation nationale les termes de cette contractualisation ainsi que ses modalités sur un sujet, le logement, qui doit mobiliser toutes les énergies ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Marchand, merci de me donner l’occasion devant le Sénat de partager avec vous toutes et vous tous le diagnostic suivant : la situation du logement dans notre pays est préoccupante.

Nous pourrions passer du temps à identifier les causes de cette situation. Les maires sont des bâtisseurs – c’est l’objet de votre question. Tous ne le sont cependant pas. J’ai pu constater avec vous que certaines équipes municipales issues des élections de 2020 avaient inscrit dans leur profession de foi la décision de moins construire de logements – notamment dans de grandes agglomérations.

Je le dis : cela est sans doute regrettable.

Néanmoins, il ne s’agit pas de la seule raison à cette situation ; nous pouvons en convenir.

J’ai souhaité, en lien avec la ministre déléguée chargée du logement, Mme Emmanuelle Wargon, prendre un certain nombre de dispositions pour essayer de faire face à cette situation, qui intéresse la vie quotidienne de nos concitoyens.

Vous l’avez rappelé, j’ai d’abord demandé à une commission non seulement experte, mais surtout composée d’élus et de professionnels de terrain, de tous bords, et présidée – vous l’avez souligné – par M. François Rebsamen, de faire des propositions.

Elle l’a fait, à ma demande, dans des temps record. Pourquoi ? Pour pouvoir annoncer immédiatement les décisions que le Gouvernement entendait prendre à la suite de ces préconisations.

J’ai effectué ces annonces, comme vous l’avez rappelé également, au congrès de l’USH qui s’est tenu à Bordeaux, où, je tiens à vous le faire observer, elles ont reçu un accueil positif de la part de l’ensemble des professionnels.

L’enjeu était également de pouvoir introduire dans les textes législatifs, notamment dans le projet de loi de finances pour 2022 en cours d’examen devant le Parlement, les décisions correspondantes.

Je me permets de vous les rappeler rapidement, puisque vous en avez cité quelques-unes.

Il s’agit tout d’abord de la contractualisation dans les zones tendues. Vous le savez, dans ce domaine comme dans d’autres, je crois au contrat, avec le représentant local de l’État, le préfet, et le président de la métropole, de l’agglomération ou de la ville concernée.

Comme il est toujours difficile de négocier « sans billes », nous avons redéployé 175 millions d’euros au sein du plan de relance, pour faciliter l’exercice de construction pour les maires, en les faisant aider par l’État de façon ciblée. Cette disposition concerne les territoires les plus sensibles.

Il s’agissait d’une vieille revendication, notamment, je tiens à le dire ici, du Sénat !

Il est prévu dans le projet de loi de finances la compensation intégrale par l’État de la taxe foncière sur les propriétés bâties pendant dix ans pour les logements sociaux agréés en 2021 et jusqu’à la fin de l’actuel mandat.

Mme Sophie Primas. Pourquoi dix ans ?

M. Jean Castex, Premier ministre. Autre mesure sollicitée pour ce que l’on appelle le logement intermédiaire – dont nous voulons faciliter la construction –, l’exonération de taxes sur le foncier bâti sera remplacée, si vous le décidez, par un crédit d’impôt d’un montant équivalent pour lever le principal frein au développement de cette offre complémentaire.

En effet, cette exonération n’était pas incitative – nous pouvons parfaitement le comprendre – à la réalisation de programmes de logements.

Nous allons ensuite mettre en place des dispositifs – que je ne détaillerai pas devant vous – sur le foncier possédé par l’État, en Île-de-France, mais aussi ailleurs. (M. Roger Karoutchi sexclame.) Un appel à manifestation d’intérêt sera lancé d’ici à la fin de l’année pour les activer et, ainsi, relancer le logement.

Enfin, je souhaite dire un dernier mot, très important au moment même où se tient le Congrès des maires, pour rectifier ce que j’entends dire parfois sur l’artificialisation. Je ne devrais pas avoir à le faire ici, puisque les dispositions correspondantes découlent de la loi Climat et résilience votée, et je m’en réjouis, à l’issue d’une commission mixte paritaire conclusive.

Or ces dispositions, je le rappelle, n’ont pas pour but de mettre fin à l’artificialisation !

Vous connaissez tous le constat sur lequel elles reposent. L’artificialisation progresse quatre fois plus vite que la population – quatre fois plus vite !

Ces dispositions, que vous avez votées, visent à diminuer par deux le rythme de progression de ce phénomène dans les dix ans à venir. Il ne s’agit donc pas de parvenir à « zéro artificialisation ». De plus, l’enjeu est de répartir cet effort en fonction des réalités des territoires, via les Sraddet (schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires).

Oui, monsieur le sénateur, ce sujet est majeur. Vous avez l’occasion, dans le cadre des discussions relatives au projet de loi de finances pour 2022, d’apporter une contribution majeure à la résolution de plusieurs difficultés rencontrées par les maires bâtisseurs. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et RDSE. – M. Alain Cazabonne applaudit également.)

déserts médicaux

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Patrick Kanner. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, « déserts médicaux » : cette expression est devenue le symbole d’un sentiment profond de relégation – en secteur rural, mais aussi en ville.

La question s’était imposée dans le grand débat alors que cette urgence n’avait pas été jugée prioritaire par le Président de la République. (M. le ministre des solidarités et de la santé et Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales manifestent leur désapprobation.)

Renforcée par la crise sanitaire, l’inégalité d’accès aux soins fait aujourd’hui partie des premières préoccupations de nos concitoyens. Cette inégalité n’est pas du seul fait de votre gouvernement, monsieur Castex. C’est certain. (Ah ! au banc du Gouvernement.) Mais il faut que chacun se mobilise pour la résorber.

Je salue les nombreux élus locaux présents dans ces tribunes à l’occasion du Congrès des maires. Ils sont, chaque jour, sur le terrain et luttent contre une telle désertification.

Grâce au Sénat, voilà deux ans et demi, a été voté un dispositif qui affecte les internes en fin de cursus, pour six mois, en zone sous-dense. Certes, ce n’est pas une solution exhaustive face à cette injustice territoriale ; mais c’est une avancée utile.

Ce dispositif, adopté contre votre avis, monsieur le Premier ministre, mais promulgué par le Président de la République le 24 juillet 2019, attend toujours son décret d’application. La procrastination du Gouvernement sur ce sujet est coupable : coupable, car vous n’appliquez pas la loi qui a été votée ; coupable, car vous abandonnez, de fait, des millions de Français et leurs représentants à leur sort.

En mai dernier, M. Taquet n’avait rien répondu à la même question posée ici même par Bernard Jomier. Vendredi dernier, sur l’interpellation du président Retailleau dans cet hémicycle, M. Taquet renvoyait l’éventuelle publication de ce décret au mois de mars. Toutefois, rien n’est moins sûr.

Aujourd’hui, monsieur le Premier ministre, nous vous demandons une réponse claire, un calendrier précis.

À quelle date allez-vous appliquer la loi de la République tant attendue par les Français, même si elle ne vous convient pas ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE, RDSE, UC et Les Républicains. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, monsieur le président Kanner, j’ai déjà eu l’occasion à de multiples reprises de m’exprimer, y compris devant le Sénat, sur le problème de la désertification médicale,…

Plusieurs sénateurs du groupe SER. Le décret !

M. Jean Castex, Premier ministre. … que je connais fort bien pour l’avoir vécu dans le territoire qui est le mien.

Plusieurs sénateurs du groupe SER. Le décret, le décret, le décret !

M. Jean Castex, Premier ministre. Oui, le décret ! Attendez ! Le décret, le décret, le décret ! De nombreuses personnes qui nous écoutent savent bien que, s’il suffisait d’un décret pour former et trouver des médecins, cela se saurait ! (Vives protestations à droite et à gauche. – M. Jean-Raymond Hugonet fait mine de jouer du violon.)

D’où vient le problème ? (Les protestations se poursuivent à droite et à gauche.) Je m’adresse à la population française ! D’où vient le problème ? Tout le monde le sait ! Il vient d’un numerus clausus extrêmement malthusien depuis des décennies ! (Exclamations sur les mêmes travées.)

Cela vous dérange peut-être, mais c’est la vérité absolue : absolue ! (Huées sur les travées du groupe Les Républicains.)

Voyez-vous, monsieur Kanner, vous étiez aux affaires jusqu’en 2017… (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Protestations redoublées à droite et à gauche.)

Je dérange peut-être, monsieur le président ? Je ne sais pas !

En 2017, lorsque vous étiez aux affaires, le numerus clausus – je le dis pour ceux qui nous écoutent –,… (Protestations continues.)

M. le président. S’il vous plaît, laissez répondre M. le Premier ministre !

M. Jean Castex, Premier ministre. … était encore inférieur à ce qu’il était à sa création, en 1972 !

Maintenant, on fait semblant de s’étonner qu’il manque de médecins dans ce pays ! Et l’on voudrait nous faire croire que la publication d’un décret va y remédier ! Bien sûr que non, monsieur le sénateur, bien sûr que non ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP. – M. Jean-Paul Prince applaudit également. – Huées à droite et à gauche.)

À qui ferez-vous croire cela ? Je sais bien que nous sommes en période électorale, mais vous ne nous ferez pas prendre des vessies pour des lanternes ! (La voix du Premier ministre se perd dans le brouhaha.)

Cette majorité a eu le courage d’abroger le numerus clausus, mais tout le monde comprend qu’il faudra plusieurs années avant que cette mesure fasse effet, car l’on ne forme pas un médecin en deux ans !

À côté de cela, nous mettons tout en œuvre, sur le terrain, avec les maires, et faisons tous les efforts possibles pour lutter contre ce problème. (Protestations à gauche.)

S’agissant de la disposition dont vous parliez, une réponse vous a déjà été apportée par le ministre des solidarités et de la santé (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), y compris sur ses difficultés d’application. Vous dites que je m’y suis opposé, mais elle n’a pas été votée à l’époque où j’étais Premier ministre ! Je ne me suis opposé à rien, monsieur Kanner, et vous le savez bien ! Vous le savez parfaitement !

En tenant compte de toutes les difficultés techniques de mise en œuvre qui avaient été rappelées au moment de son vote, nous nous employons à ce que cette disposition puisse se déployer le mieux possible d’ici au printemps prochain. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, ainsi que sur les travées des groupes INDEP et RDSE. – M. Jean-Paul Prince applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour la réplique.

M. Patrick Kanner. Monsieur le Premier ministre, au printemps prochain cela fera presque trois ans depuis la promulgation de la loi. Nous serons patients.

Nous voulons un parlementarisme rationalisé, et non dévitalisé. Nous ne voulons pas que le Gouvernement s’érige en veto de l’action du Parlement. C’était aussi cela, le sens de ma question, monsieur le Premier ministre ! (Applaudissements nourris sur les travées des groupes SER, CRCE et Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes GEST, RDSE et UC. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

cybersécurité des collectivités

M. le président. La parole est à M. Éric Gold, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Éric Gold. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Madame la ministre, je profite de cette semaine spéciale pour le Sénat – marquée par l’accueil de nombreux élus locaux à l’occasion du Congrès des maires et présidents d’intercommunalité – pour vous interroger sur le sujet hautement sensible de la cybersécurité, qui touche le secteur privé, mais aussi les collectivités territoriales.

L’attaque de plusieurs grandes villes a fait la une des journaux ces derniers mois : je pense notamment à La Rochelle, Évreux ou encore Bayonne. Mal informées et mal armées, elles ont pour certaines été perturbées, voire paralysées pendant des semaines.

Cependant, les petites communes sont encore plus vulnérables, par manque d’ingénierie et de services dédiés. Dans mon département, la commune de Surat, dotée de moins de 600 habitants, a été victime d’un rançongiciel, qui a bloqué l’accès à toutes les données et réclamé le paiement d’une rançon pour le rétablir.

D’après une étude, en 2020, au moins 4 % des communes françaises ont été piratées et 14 % des victimes de rançongiciels étaient des administrations. Du fait du recours massif au télétravail et à la dématérialisation, la crise sanitaire a démultiplié les cyberattaques et rendu encore plus vulnérables nos collectivités locales.

Dans le cas de Surat, la communauté d’agglomération, disposant de l’ingénierie nécessaire, a proposé un groupement de commandes pour le seul audit des installations informatiques, qui a coûté plus de 30 000 euros, sans aucun financement.

Or le Gouvernement a annoncé en février la mobilisation de 1 milliard d’euros pour une stratégie nationale de cybersécurité, dont une partie doit être consacrée aux administrations.

Madame la ministre, pouvez-vous nous éclairer sur l’utilisation de cette enveloppe ? Les données en jeu sont particulièrement sensibles : sécurité sociale, état civil, informations bancaires ou médicales.

Les conséquences peuvent être lourdes, y compris sur le plan de l’image. Nous savons que cette méthode est de plus en plus utilisée à des fins de déstabilisation politique.

Les collectivités ont besoin d’accompagnement, car elles n’ont souvent pas les compétences humaines et techniques nécessaires, dans un domaine qui évolue constamment. Aussi, madame la ministre, que peut-on faire pour mieux informer et mieux accompagner les élus face à ces nouveaux dangers ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Alain Cazabonne applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Éric Gold, en cette deuxième journée du Congrès des maires, permettez-moi tout d’abord de les saluer et, à travers eux, l’ensemble des élus locaux qui font la force de notre République.

Vous l’avez dit, nous faisons face à une augmentation très forte des cyberattaques visant nos collectivités territoriales. Une victime de rançongiciel sur cinq identifiée par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) est une collectivité.

C’est pourquoi, sous l’impulsion du secrétaire d’État chargé de la transition numérique et des communications électroniques, Cédric O, l’État accompagne les collectivités territoriales pour renforcer leur sécurité informatique.

Dans chaque région, un référent de l’Anssi est chargé de conseiller les collectivités et de répondre à leurs questions. La plateforme cybermalveillance.gouv.fr recense l’offre locale de services de sécurité informatique que peuvent mobiliser les collectivités territoriales.

Dans le cadre de France Relance, un parcours de cybersécurité est proposé aux collectivités territoriales, comprenant notamment un accompagnement opérationnel effectué par des prestataires spécialisés.

Nous avons invité toutes les associations d’élus à informer leurs membres de l’existence de ce dispositif, dont plus de 500 collectivités ont déjà profité.

De manière plus générale, l’État a mobilisé plus de 700 millions d’euros de crédits du programme d’investissements d’avenir et de France Relance sur la thématique de la cybersécurité, dont une partie est dédiée spécifiquement à la sécurisation des collectivités.

Mesdames et messieurs, vous l’avez compris, la bataille que nous menons contre les cybercriminels se joue aussi dans les territoires, avec nos élus. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

lien entre exécutif local et exécutif national

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

M. Guy Benarroche. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Madame la ministre, se tient en ce moment même le 103e Congrès des maires : celles et ceux, vous le savez, qui ont pour mission de gérer au quotidien les besoins de tous les Français.

Ils le font au plus près du terrain, alors que l’État et les autres strates administratives, bien trop nombreuses, toujours en place malgré les promesses présidentielles, doivent assurer le fonctionnement libre, égal et fraternel de nos institutions et des projets structurant nos territoires et garantir la solidarité.

« Nous réduirons le millefeuille administratif. Nous supprimerons au moins un quart des départements », avait dit Emmanuel Macron alors qu’il était en campagne. (Huées sur les travées du groupe Les Républicains.)

De ces promesses, que reste-t-il ?

Depuis cinq ans, et particulièrement pendant la crise sanitaire encore en cours, vous avez vanté le couple préfet-maire, capable de miracles, de résoudre tous les problèmes, au plus près des citoyens, avec toute la puissance de l’État.

Comment se satisfaire du pouvoir croissant du préfet dans la tenue des politiques publiques, et de cette prépondérance de la déconcentration aux dépens de la décentralisation ?

Où sont coconstruction, coopération, concertation, quand en réalité les maires n’ont de cesse d’essayer de comprendre et d’adapter des décisions venues d’ailleurs, d’un pouvoir exécutif qui n’avait plus été aussi centralisateur depuis des décennies ?

Interrogez les maires, vous serez édifiée. Interrogez les citoyens : vous savez, celles et ceux qui ne se déplacent plus pour voter, faute de croire aux réelles possibilités des élus d’influer sur leur quotidien.

Après l’étude en demi-teinte du projet de loi 3DS (projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale) et la déception ressentie à l’aune de l’attente d’une réelle réorganisation territoriale, le compte n’y est pas.

Madame la ministre, cette inaction est-elle due à un changement dans le constat initial de la plus grande efficacité de l’action de proximité ou est-elle essentiellement liée à des conjonctures et motifs électoraux ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Benarroche, pour avoir été maire pendant vingt-cinq ans, comme vous le savez, je connais bien cette question et sais bien ce qu’est cette fonction. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

Dès le début de son mandat, le Président de la République a entendu les différentes strates de collectivités territoriales. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)

Oui, bien sûr ! (Mêmes mouvements.)

Je rappelle notamment la demande des élus d’arrêter les réformes territoriales. De nombreuses réformes ont été menées au cours des dix dernières années. Je ne les passe pas en revue, vous les connaissez. Or les élus demandaient une pause dans les réformes territoriales. C’est ce qui a été fait ! (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Belin. Suppression de la taxe d’habitation !

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Nous avons conduit cependant certaines réformes. À titre d’exemple, pourquoi avons-nous fusionné les deux départements alsaciens en un seul ? Parce que les élus le demandaient, monsieur Benarroche ! Nous les avons écoutés !

En revanche, et vous le savez bien, il avait été question de fusionner les métropoles et les départements. Je me suis occupée moi-même de ce dossier. Le moins que l’on puisse dire est que les esprits n’étaient pas favorables à cette réforme – ou n’y étaient pas prêts, je ne sais pas exactement. En tout cas, en ce qui concerne Marseille, ils n’y étaient pas prêts, je peux vous le confirmer !

Néanmoins, cela ne nous empêche pas, monsieur Benarroche, de travailler beaucoup avec Marseille. Je me tourne également vers d’autres sénateurs des Bouches-du-Rhône. À la suite de la visite du Président de la République à Marseille dans le cadre de la présentation du plan « Marseille en grand » (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.), nous demandons, bien sûr, une évolution de la métropole pour améliorer son fonctionnement.

Nous avons aussi entendu les maires, qui demandaient le retour de certaines compétences au plus près du terrain, tout en renforçant par ailleurs les grands axes de la politique de la métropole en matière d’aménagement du territoire.

Tout cela pour vous dire, monsieur Benarroche, que, lorsqu’on est au Gouvernement, on essaie aussi d’écouter les élus ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

On ne peut pas à la fois nous reprocher de ne pas les écouter,…

M. le président. Il faut conclure !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. … et de ne pas faire de réformes ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour la réplique.

M. Guy Benarroche. Merci, madame la ministre. Néanmoins, au gré des lois, des amendements, des décrets et des ordonnances, vous refusez – souvent avec la droite parlementaire, d’ailleurs (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) – de donner aux maires le pouvoir d’agir pour et avec leurs citoyens : pour protéger leur santé, refuser un épandage près d’une école, promouvoir une autonomie énergétique ou alimentaire, voire consulter les habitants avant certaines décisions affectant considérablement la vie locale.