Sommaire
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Marie Mercier, M. Jean-Claude Tissot.
2. Questions d’actualité au Gouvernement
Mme Cécile Cukierman ; Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie ; Mme Cécile Cukierman.
M. Didier Rambaud ; Mme Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques.
stratégie de lutte face au covid
M. Bernard Jomier ; M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé ; M. Bernard Jomier.
M. André Guiol ; Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité.
annonces du président de la république (i)
M. Guillaume Gontard ; M. Jean Castex, Premier ministre ; M. Guillaume Gontard.
conséquences de l’inflation sur le financement des projets locaux
M. Alain Marc ; Mme Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargée de la ville ; M. Alain Marc.
situation de l’usine saint-gobain à pont-à-mousson
M. Jean-François Husson ; Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie ; M. Jean-François Husson.
stratégie de résorption de la dette covid
Mme Sylvie Vermeillet ; Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie ; Mme Sylvie Vermeillet.
annonces du président de la république (ii)
Mme Frédérique Puissat ; M. Marc Fesneau, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement et de la participation citoyenne ; Mme Frédérique Puissat.
hausse des prix de l’énergie en outre-mer
Mme Catherine Conconne ; Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité.
Mme Florence Lassarade ; M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé ; Mme Florence Lassarade.
état des négociations sur la pêche
M. Michel Canévet ; M. Clément Beaune, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes ; M. Michel Canévet.
lutte contre la pénurie de médecins
M. Stéphane Sautarel ; M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé ; M. Stéphane Sautarel.
retard de versement des aides européennes aux agriculteurs
M. Jean-Jacques Michau ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
situation des services de pédiatrie
Mme Laure Darcos ; M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé.
pénurie structurelle de soignants
Mme Nadia Sollogoub ; M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé ; Mme Nadia Sollogoub.
situation des migrants à calais
Mme Esther Benbassa ; M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur ; Mme Esther Benbassa.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Nathalie Delattre
3. Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire et à deux commissions mixtes paritaires
4. Financement de la sécurité sociale pour 2022. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales
Amendement n° 982 rectifié bis de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet.
Amendement n° 926 rectifié bis de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet.
Amendement n° 178 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 179 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 180 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 181 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 1067 rectifié du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 259 rectifié de Mme Annie Delmont-Koropoulis. – Retrait.
Amendement n° 348 rectifié de M. René-Paul Savary. – Retrait.
Amendement n° 777 de Mme Laurence Cohen. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 447 rectifié bis de M. Alain Milon. – Rejet.
5. Souhaits de bienvenue à une délégation étrangère
6. Financement de la sécurité sociale pour 2022. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Amendement n° 183 de la commission. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.
Mme Corinne Imbert, rapporteure
Amendement n° 184 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 927 rectifié bis de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet.
Amendement n° 287 rectifié de M. Olivier Henno. – Retrait.
Amendement n° 185 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 186 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 838 rectifié bis de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet.
Amendement n° 930 rectifié bis de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet.
Amendement n° 791 rectifié bis de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Marie Mercier,
M. Jean-Claude Tissot.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
J’appelle chacun de vous à observer au cours de nos échanges l’une des valeurs essentielles du Sénat, celle du respect des uns et des autres.
Mes chers collègues, je vous remercie d’avoir été si nombreux à la cérémonie rendue aujourd’hui, devant les plaques commémoratives, à la mémoire des sénateurs et des fonctionnaires du Sénat morts pour la France. Naturellement, elle s’inscrit dans ce temps de mémoire collective que nous vivrons demain, le 11 novembre.
coût de l’énergie
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le Premier ministre, selon l’association de consommateurs UFC-Que Choisir, un foyer qui s’attendait à payer 1 030 euros d’électricité pour l’année en janvier 2021 devra finalement s’acquitter d’une facture de 1 400 euros. Les 100 euros de chèque énergie ne suffiront pas, ni pour les plus pauvres ni pour tous les autres.
Il s’agit d’une baisse substantielle du pouvoir d’achat, à laquelle s’ajoute la hausse continue, depuis plusieurs semaines, du prix des carburants. Pour autant, rien n’est prévu dans le projet de loi de finances pour faire contribuer les grands groupes pétroliers et les acteurs de l’énergie au financement et, ainsi, baisser réellement, pour tous nos concitoyens, le coût de l’énergie.
Comptez-vous réellement ne pas mettre à contribution ces grands groupes pour l’effort de solidarité ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’industrie.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Madame la sénatrice Cukierman, je veux mettre en perspective cette question du pouvoir d’achat par rapport à ce que le Gouvernement a accompli sous cette mandature. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes CRCE et SER.)
Le pouvoir d’achat a beaucoup plus progressé sous cette mandature que sous les deux précédentes. D’abord parce que nous avons créé plus de 500 000 emplois, ensuite parce que nous avons veillé à ce que ces emplois permettent à chacun de vivre plus dignement.
Je vous rappelle l’augmentation de la prime d’activité, pour 4,4 millions de foyers, la suppression des cotisations chômage et maladie, pour 29 millions d’actifs, la baisse des impôts, notamment de la taxe d’habitation et de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, la revalorisation du traitement des professionnels de santé et des fonctionnaires les moins bien rémunérés. (Mme Éliane Assassi proteste.) Voilà des actions concrètes, entreprises au service des Français et de leur pouvoir d’achat.
M. Rachid Temal. Et l’assurance chômage ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Vous m’interrogez sur le coût de l’énergie.
Nous avons agi pour que ce coût de l’énergie frappe moins les personnes les plus vulnérables. Je rappelle que le Premier ministre s’est engagé, ici même, à déployer un bouclier face à l’augmentation du gaz et de l’électricité, pour permettre à une grande partie des Français – 38 millions – de bénéficier, dès le mois de décembre, d’une augmentation de 100 euros du chèque énergie, qui s’ajoute aux 150 euros déjà existants. (Exclamations sur les travées des groupes CRCE et SER.)
Mme Cécile Cukierman. Indécent !
Mme Éliane Assassi. Allez-vous répondre sur la mise à contribution des grands groupes ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Par ailleurs, investir dans l’énergie bas-carbone, dans les énergies renouvelables et dans l’énergie nucléaire…
Mme Sophie Primas. Il est temps !
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. … est notre façon de garantir aux Français de pouvoir accéder durablement à une énergie à bas coût. (Exclamations sur les travées des groupes CRCE et SER.) C’est en menant le combat de la décarbonation, en permettant à 450 000 foyers de procéder à la rénovation thermique de leur maison et de réduire les coûts de chauffage, que nous menons, sur le long terme, le combat du pouvoir d’achat. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – MM. Franck Menonville et Pierre Louault applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour la réplique.
Mme Cécile Cukierman. Madame la ministre, vous êtes dans l’autosatisfaction alors que TotalEnergies a annoncé un bénéfice net multiplié par vingt-trois au troisième trimestre !
Comme vous, nous avons écouté un président devenu candidat hier soi. Il n’a pratiquement pas abordé la première préoccupation des Français : le pouvoir d’achat. À l’inverse, il s’est livré à une stigmatisation détestable des chômeurs et a ressorti une vieille formule : travailler plus et plus longtemps. Son silence a été total sur la hausse des salaires, des pensions et des retraites. C’est pourtant de cela que les Français ont besoin !
En outre, les chèques préélectoraux ne compensent en rien la hausse de l’énergie et du carburant.
Il y a urgence à offrir, dès à présent, aux Françaises et aux Français, les moyens de vivre dignement de leur travail. Il faut sortir de cette spirale qui plonge, jour après jour, de plus en plus de nos concitoyens dans la précarité. Ces femmes et ces hommes ne sont pas les coupables des difficultés de notre pays ; ils en sont aujourd’hui les premières victimes.
La valeur travail ne se décrète pas, madame la ministre. Elle s’incarne, par l’ouverture immédiate de négociations pour la revalorisation du SMIC, des salaires et des pensions de retraite ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST. – Mme Esther Benbassa et M. Jean-Pierre Corbisez applaudissent également.)
services publics de proximité
M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe INDEP.)
M. Didier Rambaud. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques, et concerne les services publics de proximité.
Madame la ministre, selon une récente étude de l’Institut français d’opinion publique (IFOP), 75 % des Français sont attachés aux services publics de proximité.
Il y a deux jours, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2022, l’Assemblée nationale a approuvé le versement, chaque année, de 500 à 520 millions d’euros au bénéfice du groupe La Poste. Préserver la mission historique de service public attribuée à La Poste, malgré un déficit significatif lié à la baisse structurelle des volumes et aux conséquences de la crise sanitaire : l’État l’avait promis ; la promesse sera tenue ! (Marques d’ironie à gauche.)
Nos collègues Patrick Chaize, Pierre Louault et Rémi Cardon avaient estimé, dans leur rapport sénatorial, qu’une dotation budgétaire était nécessaire pour que La Poste continue à assurer un service postal universel sur tout le territoire. Cette dotation, mes chers collègues, nous l’avons ! Nous saluons le respect de cet engagement, madame la ministre.
Le Gouvernement réaffirme son action en période de crise, avec deux priorités : soutenir notre économie et préserver les services publics de proximité, auxquels les Français sont attachés.
Toutefois, des attentes, des interrogations, des inquiétudes demeurent. Elles sont nombreuses, parfois excessives, mais souvent légitimes. La peur du délitement et de l’éloignement des services publics est une réalité : nous ne pouvons la nier. Face à ces craintes, comment maintenir des services publics de proximité et de qualité dans notre pays, plus particulièrement dans les territoires ruraux ?
Les attentes de nos concitoyens sont fortes. Nous devons poursuivre nos efforts pour répondre au sentiment d’abandon ou de déclassement, qui contribue à la crise de confiance entre les citoyens et les élus. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques.
Mme Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques. Monsieur le sénateur Rambaud, maintenir des services publics de qualité et de proximité est l’une des priorités, depuis 2017, du Président de la République et du Gouvernement. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER et CRCE.)
C’est évidemment une priorité de mon ministère. Nous menons une action concrète et tangible pour que, partout sur le territoire, l’ensemble des Français puissent accéder à des services publics qui répondent à leurs besoins.
Première mesure, premier résultat : le réseau France Services. Piloté par Jacqueline Gourault, réparti dans 1 500 lieux sur l’ensemble du territoire, il assure à tous les Français un accès, à moins de trente minutes de chez eux, jusque dans des bus, à un guichet unique regroupant les neuf services publics de leur quotidien : retraites, assurance maladie, Pôle emploi, allocations familiales, etc. La Poste est, dans ce cadre, est un partenaire important, comme vous l’avez rappelé.
Dans votre département, 15 espaces France Services sont d’ores et déjà implantés. Notre objectif est de doubler ce maillage ; Jacqueline Gourault et moi-même, ainsi que les élus, déployons tous les moyens nécessaires pour y parvenir.
Bien évidemment, l’humain et la proximité sont essentiels. Mais ils ne s’opposent pas au numérique. Certains candidats à la présidence de la République affirment que le numérique serait contraire à l’accès aux services publics. Je ne peux pas l’entendre ! D’autant que la majorité des Français demande aussi à ce que l’accès aux services publics se fasse par voie numérique. Les personnes en situation de handicap ou les résidents des territoires ruraux veulent pouvoir accéder aux services publics sans être dépendants des horaires et des distances.
Oui, monsieur le sénateur, le numérique est un investissement fort, notamment dans le cadre du plan de relance. Notre combat n’est pas celui du numérique pour le numérique ni de la seule proximité. Ce que nous souhaitons, c’est que chacun trouve ce qui correspond à ses besoins et dispose toujours d’une autre solution. C’est pourquoi j’ai demandé que toute démarche en ligne puisse être réalisée par téléphone ou de manière physique.
Politiquement, nous devons être responsables. Le but est que chaque Français puisse accéder, là où il se trouve, à un service public en mesure de répondre à ses besoins. Arrêtons d’opposer les Français entre eux, les ruraux et les urbains ! Le service public doit être accessible à tous, partout, sous toutes ses formes. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
stratégie de lutte face au covid
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Bernard Jomier. Je souhaiterais que le Gouvernement nous apporte quelques précisions à la suite des déclarations du chef de l’État, hier soir, sur la crise sanitaire.
Le Président de la République a indiqué que le passe sanitaire ne pourrait continuer à être délivré aux personnes de plus de 65 ans qu’à la condition que celles-ci se voient administrer une dose de rappel. C’est la première fois qu’une borne d’âge est posée, semble-t-il.
Première question : cette mesure va-t-elle être étendue à toute la population éligible au vaccin ?
Vous estimez, dans le cadre de votre stratégie, que le passe sanitaire est l’outil qui permet de maintenir une protection collective élevée, par la vaccination.
Deuxième question : dès lors, à quelle condition le passe sanitaire pourra-t-il être levé ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé. (Ah ! sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Plusieurs sénateurs du groupe SER. C’est que vous êtes populaire, monsieur le ministre !
M. le président. Poursuivez, monsieur le ministre ! Ce sont des acclamations anticipées…
M. Olivier Véran, ministre. Peut-être n’étiez-vous pas présents et que vous ne m’avez pas vu, mais j’étais dans ce même hémicycle avant-hier et hier soir, jusqu’à vingt-trois heures ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.) Rassurez-vous, je viens au Sénat toutes les semaines pour travailler plusieurs heures avec vous.
Monsieur le sénateur Bernard Jomier, vous m’interrogez sur l’extension du passe sanitaire.
Administrer en priorité une dose de rappel aux personnes de 65 ans et plus, et bientôt de 50 ans et plus, est cohérent au moins à deux titres. Vous êtes médecin, monsieur Jomier. Vous savez que le système immunitaire est plus fragile lorsque l’on prend de l’âge. Des rappels de vaccinations sont donc nécessaires, pour le covid comme pour d’autres virus, afin de réactiver le système immunitaire, de sorte que celui ait la même capacité à synthétiser des anticorps pour assurer la protection de l’organisme.
Pourquoi avoir étendu le passe ?
D’une part, nous avons laissé du temps aux personnes âgées de 65 ans et plus pour se faire vacciner. D’ailleurs, les trois quarts d’entre elles qui étaient éligibles ont d’ores et déjà ont reçu une dose de rappel. C’est un très bon résultat, mais nombre de personnes restent encore à vacciner.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Vous ne répondez pas à la question !
M. Olivier Véran, ministre. D’autre part, la logique du passe, c’est de s’assurer que le risque de contamination de soi-même et des autres est moindre lorsque l’on entre dans un lieu recevant du public, notamment fermé. Si l’on considère que, au bout d’un moment, la protection conférée par le vaccin est moins importante, il est logique de restreindre l’accès à certains lieux via le passe sanitaire. C’est pourquoi le Président de la République a lancé cet appel.
Nous sommes en train de réduire progressivement la condition d’âge concernant la dose de rappel, de la même façon que nous avions commencé à administrer les premiers vaccins aux personnes âgées, puis par tranches d’âge.
Nous disposons de retours sur la population âgée de 65 ans et plus, ainsi que sur la population âgée de 50 ans et plus. Les populations plus jeunes, dans notre pays comme ailleurs dans le monde, ont été vaccinées plus tard : nous n’avons donc pas encore de retour sur l’évolution de l’immunité les concernant. Les scientifiques estiment qu’il sera probablement nécessaire, d’ici à quelques mois, de proposer un rappel de vaccination plus large. Dans tous les cas, nous agissons en fonction des données scientifiques pour protéger les Français.
Aujourd’hui, nous faisons face à une recrudescence de l’épidémie. Ce n’est donc certainement pas le moment de se poser la question de la suppression du passe sanitaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Exclamations sur les travées du groupe SER. – M. Vincent Delahaye proteste.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour la réplique.
M. Bernard Jomier. Monsieur le ministre, je comprends que nous nous dirigeons vers une dose de rappel pour l’ensemble de la population et que la délivrance du passe sanitaire y sera conditionnée. D’ici à un, deux ou trois ans, le passe sanitaire sera probablement toujours exigé : voilà la perspective que vous tracez.
Nous défendons l’idée que la vie en société implique des obligations, en l’occurrence la vaccination. Mais nous avons le sentiment que, avec ce passe sanitaire, vous êtes en train de changer de paradigme sur la question du contrôle. Car, de fait, vous étendez le recours à cet outil sans qu’on en perçoive bien les limites ; vous étendez le champ des contrôles systématiques, en lieu et place des contrôles aléatoires et a posteriori, qui, dans une société démocratique et de liberté, sont les plus répandus.
C’est là que se situe une interrogation profonde pour les parlementaires que nous sommes, attachés aux libertés publiques. Je constate, à regret, que le Conseil constitutionnel ne nous apporte aucune analyse contributive sur ce point. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe CRCE. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
arrêté sur les abeilles
M. le président. La parole est à M. André Guiol, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. André Guiol. Ma question s’adresse à Mme la secrétaire d’État chargée de la biodiversité.
Madame la secrétaire d’État, nous ne savons plus à quels essaims nous vouer. (Très bien ! sur les travées du groupe RDSE. – Sourires appréciateurs.) Cette année, la production de miel en France s’avère deux fois inférieure à celle de l’année dernière – la production se trouvait pourtant déjà en déclin. Les causes sont forcément multiples : météorologie, dérèglement climatique, emploi de pesticides. En dépit des immenses efforts de nos agriculteurs, elles viennent toutes participer à la perte de la richesse et de la biodiversité.
Ce phénomène ne serait pas plus alarmant que les autres signaux de ce déclin si Albert Einstein n’avait pas prédit que la fin des abeilles, véritables indicateurs biologiques, annoncerait probablement la fin de l’humanité.
Devant la baisse des populations d’abeilles, et en attendant d’en connaître les causes, l’Union européenne a eu l’intelligence de soutenir la création de l’Observatoire français d’apidologie (OFA) à Mazaugues, une localité varoise proche de mon village de Néoules, situé en Provence verte. Cet observatoire est chargé de sélectionner des espèces d’abeilles plus résistantes, dans l’attente d’un environnement moins agressif pour elles, donc pour nous.
Très prochainement, un arrêté Abeilles devrait paraître, au sujet duquel des désaccords relatifs à l’encadrement des heures d’autorisation d’épandage se font jour. Cela met en lumière la nécessité de trouver un équilibre entre une apiculture soucieuse et une agriculture vertueuse. Mais nous avons dû, dans la douleur, réintroduire l’emploi de néonicotinoïdes, notamment pour aider les agriculteurs, victimes d’une industrie sucrière toujours plus exigeante et spéculative, à maintenir le rendement betteravier.
Madame la secrétaire d’État, quel sera le poids de la biodiversité que vous défendez dans les arbitrages et la rédaction de l’arrêté Abeilles ? Avec l’emploi massif de produits tueurs d’insectes pollinisateurs par le passé, nous savions bien que nous allions dans la mauvaise direction. Aujourd’hui, au vu de la trop grande souplesse donnée à leur réemploi, nous ne donnons pas l’impression d’aller dans la bonne. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la biodiversité.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Guiol, vous m’interpellez sur la mortalité anormalement élevée des abeilles. Elle est scientifiquement établie, d’où notre vigilance accrue et la nécessité d’enrayer le déclin des abeilles et, plus largement, des pollinisateurs.
Les pollinisateurs sont indispensables à notre agriculture : 70 % des cultures dépendent de la pollinisation, qui permet la fécondation. Parce qu’il y va de notre souveraineté alimentaire et de la préservation de la biodiversité, nous demeurons pleinement mobilisés.
Dans ce contexte, un plan Pollinisateurs a été annoncé en août 2020 dans le but d’enrayer ce déclin. Ce plan a un périmètre plus étendu que l’arrêté Abeilles. Il doit à la fois englober les résultats des concertations et des consultations, qui ont été très larges, et comprendre l’origine du déclin des pollinisateurs.
En outre, ce plan doit encourager les bonnes pratiques, les faire connaître et les généraliser, là où des initiatives, telles que la plantation de ressources mellifères et les fauches tardives, ont porté leurs fruits et sont extrêmement prometteuses. Il conviendrait également d’adapter la réglementation en matière d’utilisation des produits phytopharmaceutiques et d’améliorer la santé des ruches.
L’arrêté doit préciser les modalités d’épandage en période de floraison, soit quelques jours ou quelques semaines par an, selon les cultures, durant lesquels les abeilles, qui butinent, se trouvent particulièrement exposées. Les produits phytopharmaceutiques font partie des facteurs de risque pour les pollinisateurs, qu’ils soient sauvages ou domestiques.
Deux principes évidents doivent conduire notre action : évaluer le risque et protéger les agriculteurs. Il n’est pas question de laisser ces derniers sans solution ; les réponses doivent être adaptées à chaque situation.
La concertation, l’éclairage scientifique et la prise en compte du vécu, c’est-à-dire de l’expérience de terrain, sont autant de méthodes qu’il nous faut mettre en œuvre, ce pour éviter au maximum les traitements et protéger les abeilles, tout en respectant le travail des agriculteurs. Nous y serons particulièrement vigilants. Du reste, nous aurons l’honneur de vous présenter le plan et l’arrêté dédiés dans les semaines à venir. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
annonces du président de la république (i)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
M. Guillaume Gontard. Monsieur le Premier ministre, le monde est face à son destin. La pandémie n’est pas terminée, faute d’avoir ouvert les brevets des vaccins et joué la solidarité mondiale ; le virus continue de circuler et de nous menacer.
L’avenir de l’humanité, notre capacité à préserver une planète habitable pour l’espèce humaine, se joue en ce moment même à Glasgow. Dans ce contexte, alors que nous devons plus que jamais imaginer le monde solidaire et coopératif d’après, la France s’apprête à prendre la présidence de l’Union européenne.
C’est le moment, légitime, que choisit le Président de la République pour s’adresser à la Nation : 27 minutes de discours ; 27 minutes pour dessiner non pas le monde de demain, mais le monde d’hier, voire d’avant-hier.
Le travail invoqué comme un mantra, son corollaire de stigmatisation de toutes celles et tous ceux qui en sont exclus, la croissance, le productivisme, le nucléaire : tous ces étendards des Trente Glorieuses sonnent si faux dans la bouche d’un homme qui n’a connu que la crise structurelle d’un capitalisme incompatible avec la préservation du vivant et la justice sociale. (M. Bruno Sido lève les bras au ciel.)
L’autosatisfecit du Président de la République est sidérant : sur l’investissement en faveur de la santé, quand l’hôpital a perdu 5 700 lits au milieu de la pandémie ; comme sur la pauvreté, alors que la misère s’intensifie toujours. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Face au concours Lépine des mesures ineptes et injustes proposées par les candidats LR lundi soir sur LCI (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.), Emmanuel Macron est venu rappeler à tous ceux qui voudraient l’oublier que la droite, c’est lui !
Monsieur le Premier ministre, si le Président préfère être candidat plutôt que de mener le navire France dans la tempête, qu’il le dise et qu’il cesse d’utiliser les moyens de l’État et le prestige de la fonction pour faire campagne ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le président Gontard, j’ignore si vous me posez une question ou si vous abordez là un élément programmatique. Je vais tout de même tenter de vous répondre.
Le Président de la République n’avait pas fait d’allocution depuis le 12 juillet dernier. Il est intervenu hier soir, à un moment important, afin de fixer pour les semaines et les mois à venir la feuille de route du Gouvernement que je dirige, compte tenu de la situation du pays et du monde, ainsi que des préoccupations de nos concitoyens.
De toute évidence, vous n’en serez pas surpris, je ne partage ni votre diagnostic ni vos appréciations.
M. Marc-Philippe Daubresse. Vous n’êtes pas le seul.
M. Jean Castex, Premier ministre. Hier, le chef de l’État a appelé à notre mobilisation et à notre vigilance face à la reprise épidémique, laquelle ne concerne pas seulement la France, et a ainsi annoncé un certain nombre de dispositions. Je le rappelle, nous avons affaire à une pandémie planétaire : nous devons lutter contre elle dans toutes les parties du monde.
Au titre du mécanisme Covax, La France est le deuxième pays, après les États-Unis, à donner des doses de vaccins aux pays qui n’ont pas les moyens de se les procurer. Nous devrions collectivement en être fiers ! (M. Martin Lévrier applaudit.)
Le Président de la République a également abordé la question du pouvoir d’achat et de l’inflation. Vous le voyez toutes et tous dans vos départements : aujourd’hui, ce qui pose problème, c’est la difficulté à recruter. Là encore, nous devrions nous réjouir du fait que notre dynamique de créations d’emplois, grâce à la reprise, grâce au plan de relance et à la mobilisation de nos concitoyens, est l’une des plus fortes d’Europe. (M. Laurent Duplomb s’exclame.)
Alors qu’on nous annonçait son explosion il y a quelques mois, le taux de chômage est parmi les plus bas depuis quinze ans. Mais cela ne suffit pas ! Selon la Banque de France, plus de 300 000 emplois ne sont pas pourvus aujourd’hui. S’ils l’étaient, nous retrouverions le taux de chômage de 1982 – j’ai déjà eu l’occasion de le dire.
Oui, la mobilisation générale est nécessaire pour faire face à cette situation ; non, nous ne stigmatisons personne. On ne peut pas à la fois nous reprocher d’avoir suspendu la réforme de l’assurance chômage, alors même que le chômage montait, et de veiller à son entrée en vigueur le 1er décembre prochain.
Nous avons des emplois à proposer aux chômeurs, ce n’est en rien les stigmatiser ! Nous croyons en la valeur travail. Nous proposons à nos concitoyens de s’élever par le travail, d’obtenir un meilleur salaire et une meilleure place dans la société.
Oui, il faut faire entrer en vigueur la réforme de l’assurance chômage.
Oui, il faut que Pôle emploi multiplie les actions en direction des entreprises et des demandeurs d’emploi, y compris les contrôles – nous l’assumons –, de sorte que le travail et l’activité progressent dans notre société ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.
M. Guillaume Gontard. Nous avons compris : monsieur le Premier ministre, vous êtes satisfait ! Pourtant, on ne construira pas l’avenir avec les lunettes du passé ; on ne luttera pas contre le dérèglement climatique sans changer de modèle ; on ne réduira pas les inégalités en s’acharnant sur les plus démunis.
Notre avenir sera écologique et solidaire ou ne sera pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
conséquences de l’inflation sur le financement des projets locaux
M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe UC. – MM. Martin Lévrier et Teva Rohfritsch applaudissent également.)
M. Alain Marc. Madame la ministre, je suis très étonné que ce soit vous, la ministre déléguée chargée de la ville, qui réponde à ma question, car celle-ci porte sur la dotation d’équipement des territoires ruraux, la fameuse DETR.
Dans toute la France, les commissions des élus chargées d’allouer la DETR ont commencé leurs travaux ou s’apprêtent à le faire. Pour l’heure, leur mission consiste essentiellement à définir les critères d’attribution des subventions. Les décisions concernant les nouveaux projets seront rendues en début d’année prochaine, en janvier ou en février selon les cas, pour un versement effectif en mars 2022.
Nous le savons tous ici, il s’agit d’un moment important pour les collectivités territoriales et les élus locaux. L’attribution de la DETR a de puissants effets d’entraînement pour le tissu des entreprises situées dans les départements ruraux.
Chaque année, les procédures d’attribution sont suivies de près par les élus. Mais cette année, le contexte économique devrait donner une tournure un peu particulière à ces rendez-vous. Et pour cause, l’inflation fait son grand retour. Nous en connaissons les raisons macroéconomiques : compte tenu de la forte reprise en sortie de crise, la demande est importante et la pression s’accroît sur les matières premières et l’énergie.
De façon très concrète, cela se traduit par une augmentation très forte des coûts des projets. Les hypothèses sur lesquelles les dossiers ont été bâtis, préparés de longue date par les porteurs de projets, sont devenues caduques. Et les plans de financement risquent fortement de déraper.
Dans ce contexte, madame la ministre, ma question est assez simple : alors que le Sénat examinera tout prochainement le projet de loi de finances pour 2022, le Gouvernement envisage-t-il de réviser l’enveloppe globale de la DETR pour prendre en compte les effets de l’inflation ? Plus généralement, et au-delà de ce dispositif particulier, quelles sont les réponses que le Gouvernement peut apporter aux élus locaux, qui craignent de voir les budgets prévisionnels déraper à cause de l’inflation ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe UC.)
M. Emmanuel Capus. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la ville.
Mme Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Alain Marc, vous dites être surpris que je réponde à votre question. J’en suis étonnée, d’autant que vous interrogez le Gouvernement sur une réforme entreprise en 2005 par le ministre Daubresse et portant sur la DETR et la DSU (dotation de solidarité urbaine). En tant que ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires, je me fais un plaisir de vous répondre.
Je partage votre préoccupation concernant les conséquences de l’inflation sur les coûts des travaux publics. C’est un sujet qui concerne en premier chef les collectivités, lesquelles réalisent la majeure partie de l’investissement civil. Rappelons d’abord quelques éléments de contexte : la hausse des prix a été mesurée en 2020 à 0,5 %. Elle redémarre en 2021 et 2022, tirée par la hausse des prix de l’énergie.
Cependant, cette hausse ne se répercute pas forcément sur tous les chantiers. (M. Jérôme Bascher s’exclame.) Souvent, le coût final correspond au devis signé entre les maîtres d’ouvrage et l’entreprise. D’ailleurs, les remontées des collectivités locales sur ce sujet ne sont, à ce stade, ni massives ni très fréquentes. Ce sujet est pourtant devant nous : des entreprises répercuteront l’inflation sur les devis qu’elles proposeront aux collectivités en 2022.
L’État continuera de soutenir l’investissement local avec plus de 2 milliards d’euros supplémentaires de subventions de DETR, de DSIL (dotation de soutien à l’investissement local) et de DPV (dotation politique de la ville) en 2022. En outre, le Premier ministre a arbitré une rallonge de la DSIL de plus de 300 millions d’euros pour financer les CRTE (contrats de relance et de transition écologique). Et 95 millions d’euros supplémentaires ont été affectés sur la DSU. Cela répond, me semble-t-il, à votre demande de crédits supplémentaires en soutien aux collectivités.
Je note ensuite que l’inflation aura des conséquences positives sur certaines ressources fiscales des collectivités, ce qui leur permettra de faire face à la situation. Je pense notamment aux impôts assis sur la base locative cadastrale, revalorisés chaque année en tenant compte de l’indice des prix. Le taux d’actualisation pour l’année 2022 n’est pas encore connu, car il dépend des données de novembre 2021.
Je pense aussi à la TVA, qui dépend du prix des consommations. En 2022, la hausse du produit de la TVA pourra être de 5,8 % et rapporter 400 millions d’euros aux intercommunalités, 800 millions d’euros aux départements et la même somme aux régions.
Bien entendu, nous continuerons à regarder la situation des collectivités de près. Le Gouvernement soutiendra les collectivités, comme il l’a toujours fait depuis 2017, et surtout en ces temps très troublés. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour la réplique.
M. Alain Marc. Madame la ministre, dans votre réponse, vous nous parlez à la fois de la DSU et de la DETR. Mais nous, sénateurs, nous sommes des gens simples. Nous avons été des élus locaux, nous savons monter des projets, et il n’est pas besoin de nous faire la leçon ici, je vous le dis franchement.
Mme Florence Lassarade. Parfait !
M. Stéphane Le Rudulier. Très bien !
M. Alain Marc. Quand nous constatons des augmentations très significatives de 20 %, voire de 30 %, de 40 % ou même de 50 % comme c’est le cas pour une commune près de chez moi, nous avons besoin du soutien de l’État pour que les communes puissent réaliser leurs projets.
Je suis désolé, mais nous sommes des gens simples et il n’est pas utile de tenter de nous endormir en nous parlant de la DSU, de la DETR, etc.
M. le président. Il faut conclure !
M. Alain Marc. Nous comptons beaucoup sur le Gouvernement pour prendre des mesures supplémentaires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
situation de l’usine saint-gobain à pont-à-mousson
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Monsieur le Premier ministre, présent il y a quelques jours à l’Élysée, j’ai été ravi d’y entendre le Président de la République appeler, dans le cadre du plan France 2030, à un élan de réindustrialisation. Mais de la parole aux actes il y a parfois un fossé, comme le cas suivant l’illustre concrètement.
En Meurthe-et-Moselle, à Pont-à-Mousson, Saint-Gobain, fleuron de l’industrie française en matière de tuyaux d’eau en fonte ductile, qui emploie 2 000 personnes, qui est leader européen dans son secteur et dont 50 % de son chiffre d’affaires est constitué à l’export, est victime d’une mauvaise nouvelle. Le Gouvernement, apprend-on, se propose de favoriser et de soutenir financièrement l’implantation dans le sud de la France d’un concurrent indien se positionnant exactement sur le même marché. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jérôme Bascher. Absolument !
M. Jean-François Husson. Cela provoque une colère légitime eu égard aux efforts de l’entreprise, qui mène des travaux pour la décarbonation et le maintien de sa production en France, dans un marché en surcapacité. À cela s’ajoute le non-respect de la réciprocité normative, puisque l’Inde est un pays entièrement fermé aux exportations.
Monsieur le Premier ministre, confirmez-vous cette information, la justifiez-vous ? Surtout, quelle est votre stratégie pour parvenir à la nécessaire réindustrialisation de la France ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’industrie.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Comme vous le savez, monsieur le rapporteur général Husson – vous avez eu l’occasion de rencontrer Bruno Le Maire pour discuter de ce sujet –, nous sommes depuis le début de ce quinquennat très vigilants sur la situation du site de Pont-à-Mousson.
Vigilants sur le projet industriel, qui aurait pu changer la trajectoire de ce site, pour nous assurer que ce dernier ne tombe pas entre des mains peu favorables d’un point de vue industriel.
Vigilants pour rendre plus aisées et automatiques les clauses sociales et environnementales aux acheteurs publics locaux, qui leur permettent de mieux prendre en compte la valeur extrafinancière des conduites en fonte vendues par Pont-à-Mousson. Vigilants donc, en changeant la loi pour cela.
Vigilants en validant un soutien au titre du plan de relance de 2,5 millions d’euros…
Mme Sophie Primas. C’est généreux !
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. … pour l’installation d’un four électrique à Pont-à-Mousson, qui sera le plus grand d’Europe. Cette aide s’ajoute à l’ensemble de celles dont bénéficie Saint-Gobain au titre du plan de relance industriel, soit 10 millions d’euros au total. Dans le cadre de la rénovation thermique, on peut d’ailleurs penser que Saint-Gobain est l’un des principaux bénéficiaires du plan de relance.
Croyez bien que nous sommes totalement engagés aux côtés de cette entreprise, qui a très fortement profité de notre accompagnement industriel.
Vigilants, enfin, car nous avons œuvré pour le maintien de droits antidumping et compensateurs face à une concurrence étrangère déloyale. C’est peut-être pour cette raison que ces acteurs qui importent massivement, et dont les conduites sont achetées par des collectivités locales, cherchent aujourd’hui à s’implanter eu Europe.
De quoi est-il question ? D’avoir une entreprise qui produit en France avec des salariés français, dans des conditions de travail, des conditions sociales et environnementales françaises. Je vous rassure,…
M. Jean-François Husson. Oh non, vous ne me rassurez pas !
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. … ce n’est pas du tout la même taille de conduite de fonte, et il s’agit d’un petit site de 200 salariés. Il pourrait être créé de l’autre côté de la frontière, ou bien être créé en France.
M. Jean-François Husson. Laissez-les là où ils sont !
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Voilà de quoi il est question. Nous regardons ce projet avec raison, en ayant toujours en tête l’accompagnement de Pont-à-Mousson. Mais je ne voudrais pas que, collectivement, nous pensions que, si ce site s’installait en Allemagne, en Italie ou en Espagne, nous en serions les gagnants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Jean-Paul Prince applaudit également. – Mme Pascale Gruny proteste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour la réplique.
M. Jean-François Husson. Madame la ministre, vous avez finalement répondu à côté de la question. Vous évoquez l’Italie, où un site a fermé en 2019. Vous évoquez l’Allemagne, mais bis repetita : restructuration, fermeture d’un site.
Le marché français est en surcapacité de 50 %. Comment voulez-vous nous faire comprendre que le Gouvernement soit prêt à investir dans ce marché en surcapacité, et que dans le même temps il soutienne une entreprise vertueuse dans le cadre de France Relance ?
Nous vous demandons instamment, moi et mes collègues sénateurs, au premier rang desquels Véronique Guillotin et Philippe Nachbar, de retirer ce projet et de revoir votre copie. Le soutien du gouvernement français est inacceptable. On ne peut pas l’entendre à l’aube d’une campagne présidentielle, qui, monsieur le Premier ministre, a été annoncée hier soir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – Mme Véronique Guillotin applaudit également.)
stratégie de résorption de la dette covid
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)
Mme Sylvie Vermeillet. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, un sondage de la revue Acteurs publics vient de révéler que huit Français sur dix sont inquiets du niveau de la dette publique. Cantonner la dette covid ne suffit pas à la rembourser. Je souhaite donc savoir quelle est votre stratégie de désendettement.
Hier soir, le Président de la République s’est félicité d’avoir géré la crise sanitaire en « maîtrisant notre déficit public ».
M. Jérôme Bascher. Il a osé !
Mme Sylvie Vermeillet. Il a ajouté que ce déficit serait de moins de 5 % du PIB cette année. Or nous en étions restés à une prévision de 8,1 % du PIB.
Disposeriez-vous d’éléments que nous ignorons pour l’étude du projet de loi de finances pour 2022 ? Dans ce cas, le Parlement pourrait-il en être destinataire, au lieu de débattre de chiffres obsolètes ?
Madame la ministre, Les dépenses pour faire face à la crise sanitaire étaient nécessaires et nous les avons votées, en cautionnant ainsi l’endettement généré. Mais il s’agit maintenant de regarder l’avenir avec lucidité. C’est d’ailleurs avec cette lucidité que nous avons essayé d’envisager l’avenir de la dette publique dans le rapport que mon collègue Éric Bocquet et moi-même avons présenté tout à l’heure au nom de la délégation sénatoriale à la prospective.
Mais le PLF 2022 est-il lucide ? Où est la trajectoire vertueuse que nous devons à nos créanciers ? Y a-t-il des chiffres que nous ne connaissons pas ? La France connaît-elle le secret de l’argent magique ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’industrie.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Madame la sénatrice Vermeillet, comme vous l’avez très bien dit, nous avons effectivement, à l’aide de dispositifs de soutien à notre appareil de production et à nos salariés, fait en sorte de sauver et de faire rebondir notre économie. Cette politique a eu un coût, aujourd’hui devenu payant : nous avons la trajectoire de croissance la plus élevée d’Europe, et le taux de chômage est au plus bas depuis quinze ans. (M. Franck Montaugé proteste.)
Sincèrement, aucune personne dans cet hémicycle n’aurait imaginé il y a dix-huit mois que nous soyons dans cette situation. (Murmures sur de nombreuses travées.)
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Il est important de le préciser collectivement, car, comme vous l’avez dit, vous y avez contribué en prenant vos responsabilités.
S’agissant de la trajectoire de réduction des dépenses publiques, nous avons annoncé ces chiffres dans le PLFR (projet de loi de finances rectificative), que vous allez examiner avec Olivier Dussopt dans une semaine. Vous en avez donc les éléments, et il est très clair : l’atterrissage devrait se situer aux alentours de 8 % de déficit public en 2021 et nous visons 5 % de déficit public en 2022. Il n’y a pas de magie dans ces chiffres, ils sont publics, nous les partageons avec vous, et vous allez être amenés à vous prononcer.
Concernant la trajectoire dans la durée, vous savez que 165 milliards d’euros de dette spécifiquement liée à la covid seront amortis d’ici à 2042 par les fruits de la croissance. Ce que nous avons sauvé l’année dernière, grâce à nos mesures pour les salariés et les entreprises, va permettre à notre sentier de croissance de suivre une pente bien plus élevée. Nous pourrons donc en retirer les fruits, pour rembourser cet effort dans le temps long. C’est l’avantage de l’État tout autant que sa responsabilité : être capable de gérer et d’amortir les crises sur le long terme, ce que les acteurs privés et les ménages ne peuvent pas faire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Martin Lévrier. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour la réplique.
Mme Sylvie Vermeillet. Madame la ministre, avec 1,9 milliard d’euros de désendettement l’année prochaine, je ne vois pas comment la dette covid s’éteindrait d’ici à 2042.
Par ailleurs le FMI vient d’exhorter la France à faire des efforts, et je crois qu’il a bien raison. Si les taux d’intérêt remontent, la charge de la dette sera colossale. Il s’agit donc d’établir des budgets vertueux, qui vont honorer la signature de la France.
À la veille de l’examen du projet de loi de finances (PLF), nous apprécierions de disposer de chiffres plausibles, car je suis sûre que vous ne pourrez pas vous passer de la sagesse du Sénat. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
annonces du président de la république (ii)
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Frédérique Puissat. Ma question s’adressait à monsieur le Premier ministre et je remercie M. le ministre de la santé de me répondre, même si le sujet me semble un peu éloigné de ses préoccupations. Peut-être se sentira-t-il concerné…
En effet, monsieur le ministre, les jours passent et se ressemblent.
Chaque jour, les annonces tombent, les millions et milliards se succèdent, si bien qu’il faut désormais une double page pour tout additionner : +30 milliards pour le plan d’investissement, +2 milliards pour le contrat d’engagement jeune, +4 milliards pour l’indemnité inflation, +2 milliards pour renflouer France Compétences… Bref, en moins de trois mois, ce sont plus de 25 milliards d’euros de dépenses supplémentaires pour la seule année 2022 qui ont été annoncés au mépris de toutes les institutions.
Chaque jour, nous sommes interpellés par les déplacements locaux des ministres, lors desquels le mélange des genres est un peu surprenant. Dernier exemple en date : en visite en Savoie, Mme la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et de l’engagement échange à midi avec les missions locales, puis évoque le contrat d’engagement l’après-midi, avant de lancer le soir même l’association « Jeunes majorité présidentielle Savoie » avec Emmanuel Macron.
Chaque jour, ont lieu des États généraux.
M. François Patriat. On travaille !
Mme Frédérique Puissat. Les plus récents portent sur la justice, alors même que six textes ont été portés par votre gouvernement et par le précédent sur ce thème.
Monsieur le ministre, je pourrais être plus longue, mais je n’ai finalement qu’une seule question : est-il moral de faire campagne avec l’argent des Français, en creusant la dette ? (Bravo ! et applaudissements prolongés sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, GEST et SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement et de la participation citoyenne.
M. Marc Fesneau, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement et de la participation citoyenne. Madame la sénatrice, je vais répondre à votre question, qui aborde au fond le sujet de la politique menée par le Gouvernement.
Jusqu’à la dernière minute, comme s’y sont engagés le Président de la République et le Premier ministre, le Gouvernement mène la politique annoncée depuis des années. Tout simplement ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, ce que vous voyez dans les territoires, ce ne sont rien d’autre que des ministres qui font leur travail, qui viennent expliquer et mettre en œuvre la politique du Gouvernement au plus près des citoyens, et qui viennent rendre compte de ce que nous faisons.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est de l’argent public !
M. Marc Fesneau, ministre délégué. Après nous avoir parfois fait le reproche de n’être pas assez sur le terrain, je m’étonne de vous voir vous émouvoir du fait que nous y remplissions notre mission. (Protestations sur de nombreuses travées.)
Madame la sénatrice, le Gouvernement est à l’œuvre, il le sera jusqu’à la dernière minute ; vous pouvez compter sur nous ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour la réplique.
Mme Frédérique Puissat. Merci de votre réponse, monsieur le ministre. Finalement, je n’en attendais pas d’autre. Dans cet hémicycle comme au Gouvernement, chacun le sait, car nous avons tous écouté le Président de la République hier. Alors que nous attendions un discours sur la covid, nous avons finalement assisté à un discours de campagne présidentielle.
Chaque jour, chaque soir, Emmanuel Macron achète son élection ! (Bravo ! et applaudissements nourris sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes GEST et SER.)
hausse des prix de l’énergie en outre-mer
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Catherine Conconne. Les prix de l’énergie flambent dans la dite outre-mer : +20 % en un an ! L’essence : plus chère ! Le gaz : plus cher !
Alors, attention ! Toutes les révoltes sociales dans la dite outre-mer, notamment celle de 2009, sont nées de la hausse des prix de l’énergie. Je vous appelle donc à agir dès maintenant, à ne pas attendre l’explosion.
Je suis consciente que l’angle d’attaque ne saurait être la fiscalité. Les taxes État sont nulles, celles des collectivités plus que raisonnables. Côté brut, on connaît les conditions du marché. J’aimerais cependant attirer votre attention sur d’autres composantes de la fixation des prix, qui semblent manquer totalement de transparence.
Arrêtons-nous un instant sur l’exemple très emblématique du gaz utilisé par de nombreux foyers – plus de 10 000 tonnes ont été consommées l’an dernier sur notre île. En deux ans, le prix du bidon a augmenté de 50 % ! Sur un montant de 32 euros, la moitié, soit 16 euros, représente des coûts de distribution. Si la part du transport et du revendeur de ce produit semble légitime – elle s’élève à un peu plus de 4 euros –, comment se décomposent les 12 euros restants sur les 32 du prix global ? Qui rémunèrent-ils, et sur quelle base ? On l’ignore, ou on en sait si peu !
Il y a une urgence de transparence. Il existe un sentiment d’injustice, qualifié de « pwofitasyon » en créole, qui perdure. Non, nos populations ne peuvent pas être toujours plus pauvres et payer toujours plus cher. Ce n’est pas acceptable !
Oui, il y a le chèque énergie. C’est un soulagement ponctuel, mais ce n’est pas la solution !
Madame la ministre, êtes-vous prête à lancer courageusement cette nécessaire mission transparence très attendue, afin de soulager les Ultramarins face à la flambée des prix ? L’État est-il prêt à enfin faire la transparence sur ces rémunérations d’intermédiaires et ces marges qui semblent frappées d’opacité ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – M. Dominique Théophile et Mme Vivette Lopez applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la biodiversité.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Madame la sénatrice Conconne, nous entendons votre émotion palpable face à cette réalité d’une précarité énergétique.
Nous répondons à cette émotion par des actions concrètes, d’abord à l’aide de mesures d’urgence agissant sur le budget des ménages, comme le chèque énergie exceptionnel de 100 euros (Mme Catherine Conconne et M. Victorin Lurel lèvent les bras au ciel.), versé à 5,8 millions de ménages déjà bénéficiaires du chèque énergie, dont 280 000 en outre-mer. (M. Victorin Lurel marque son étonnement.) Ce nouveau chèque sera automatiquement envoyé, sans démarche supplémentaire.
Mme Catherine Conconne. Et la transparence ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Il est déjà possible d’acheter des bouteilles de gaz avec le chèque énergie. (Mme Catherine Conconne s’agace.) Cette mesure sera renforcée en incitant les fournisseurs à se faire agréer pour mettre en place, si nécessaire, des systèmes d’avoirs au cas où le chèque ne serait pas totalement consommé.
Mme Cécile Cukierman. C’est comme un ticket resto !
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Une indemnité inflation de 100 euros va être distribuée, notamment pour faire face à la hausse des prix des carburants. Il s’agit clairement de la meilleure solution, car une baisse des taxes sur les carburants outre-mer n’aurait ni beaucoup d’intérêt ni beaucoup d’impact.
M. Victorin Lurel. Regardez les textes, ce sont des prix réglementés !
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Cette indemnité concernera environ 38 millions de nos concitoyens, qui touchent moins de 2 000 euros net par mois, et près d’un million d’Ultramarins en seront destinataires. Tous seront concernés : ceux qui travaillent, ceux qui sont à la recherche d’un emploi, les retraités ou les bénéficiaires des minima sociaux. (M. Victorin Lurel s’exclame.)
Ces mesures sont des mesures de justice sociale et de lutte contre la précarité énergétique. Bien entendu, nous veillons à ce que l’application stricte de la formule de calcul des prix réglementés des carburants empêche toute marge indue. Nous avons également mis en place le bouclier tarifaire sur le gaz de ville et l’électricité, qui plafonnera la hausse du prix de l’électricité à 4 %. Tous les départements et régions d’outre-mer (DROM) en bénéficieront, ainsi que Wallis-et-Futuna et les trois Saints.
Ce bouclier sera mis en place par une baisse de la taxe sur la consommation d’électricité, qui bénéficiera également aux entreprises. (M. Victorin Lurel proteste.)
Il y a donc une totale transparence. Les tarifs réglementés de vente du gaz de ville sont aussi gelés jusqu’à la fin de l’année 2022.
Le coût de ce bouclier tarifaire…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. … est de 5 milliards d’euros, le chèque énergie représente 600 millions d’euros, la prime inflation, 3,8 milliards d’euros. (Protestations à gauche.)
M. le président. Il faut conclure maintenant !
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Ce sont ainsi quelque 10 milliards d’euros qui doivent lutter contre la précarité énergétique. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Huées à gauche.)
fermeture de lits à l’hôpital
M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Florence Lassarade. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, alors que le Gouvernement a prétendu piloter la crise sanitaire en fonction du risque de saturation hospitalière, il peut sembler surprenant que des lits soient massivement fermés à l’hôpital public.
À la fin du mois d’octobre, selon une étude menée par le président du conseil scientifique, un lit sur cinq, soit 20 %, serait actuellement fermé au sein de l’hôpital public.
Mme Florence Lassarade. Vous contestez ce chiffre, monsieur le ministre, et considérez qu’il s’agirait plutôt de 5 % des lits de médecine qui seraient temporairement fermés, les situations étant hétérogènes sur le territoire. La Fédération hospitalière de France (FHF) estime quant à elle que le taux moyen de lits fermés serait de 6 %.
Comment expliquer une telle discordance ? (Ah ! au banc du Gouvernement.)
En réalité, le manque de personnel oblige à laisser inoccupés bien plus que 6 % des lits. Dans les faits, ces lits sont bien fermés, mais seuls les lits fermés administrativement sont comptabilisés dans les chiffres officiels.
À côté de cela, l’absentéisme et les démissions des professionnels de santé à l’hôpital augmentent sérieusement en raison de la dégradation progressive des conditions de travail.
Par ailleurs, les ARS (agences régionales de santé) accordent aux directeurs d’hôpitaux des primes annuelles conditionnées à la réduction de la masse salariale et des capacités des hôpitaux.
Ma question est double : combien de lits d’hôpitaux ont-ils dû être réellement fermés faute de personnel ? Pourquoi maintenir ces primes liées aux réductions de la masse salariale et des capacités hospitalières ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Anne-Catherine Loisier et Sonia de La Provôté applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Lassarade, je ne sais que vous répondre. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Vous parlez de discordance entre des chiffres et énoncez, excusez-moi de vous le dire, des contre-vérités. Vous faites un amalgame, qui me paraît probablement lié à une mauvaise information : je me permets de le dire, car le sujet est trop sérieux.
Il n’y a pas 20 % de lits fermés dans notre pays. Il n’y a pas de discordance entre deux méthodes. Une méthode consiste à compter les lits ; une autre consiste à faire une estimation au doigt mouillé. Si cette dernière était factuelle et scientifique, cela se saurait.
La puissante FHF, sur une étude élaborée à partir d’un tiers du parc hospitalier, dit qu’environ 5 %-6 % des lits sont fermés. Je dispose d’une étude factuelle, chiffrée à partir de quinze CHU (centres hospitaliers universitaires). Que nous dit-elle ?
D’abord, qu’il y a plus de soignants dans les hôpitaux à l’automne 2021 qu’à l’automne 2019. Nous recrutons du personnel.
Ensuite, elle nous dit que, sur un parc de 12 500 lits, par rapport à il y a deux ans, ce sont à peu près 50 lits supplémentaires qui sont fermés.
Mme Sophie Primas. Tout va bien…
M. Olivier Véran, ministre. Nous sommes assez loin de 20 % et même de 5 %, madame la sénatrice.
Il y a un point d’absentéisme supplémentaire, ce que l’on peut comprendre après la crise covid, qui a marqué les esprits et les physiques et qui explique que des congés soient pris et récupérés.
L’hôpital tient bon, madame la sénatrice, même si on a beau lui marteler qu’il ne tient pas – je ne sais pas d’ailleurs quel est le sens de ce discours et je ne suis pas sûr qu’il corresponde à celui qu’attendent les soignants. Croyez-moi, nous faisons le maximum pour rattraper les erreurs du passé (Mme Frédérique Puissat s’exclame.), notamment en ce qui concerne la formation des soignants et les moyens mis en place pour investir.
Votre collègue Frédérique Puissat regrettait tout à l’heure que nous dépensions trop d’argent public. Et maintenant vous dites qu’il faudrait plus d’argent public, alors même que nous dégageons 19 milliards d’euros pour investir en faveur de l’hôpital. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Quant à cette histoire de primes, les directeurs d’hôpitaux sont des gens formidables, qui ne sont pas payés pour fermer des lits ou virer du personnel. Ce n’est même pas une erreur, c’est une fake news, et je pense qu’elle est regrettable. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour la réplique.
Mme Florence Lassarade. Moins on a de lits, moins les soignants peuvent exercer leur métier et plus nos malades en pâtissent. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
état des négociations sur la pêche
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)
M. Michel Canévet. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la France est un grand pays maritime et nous avons intérêt à préserver le potentiel qui en découle.
Nous pensions que les accords liés à la sortie de la Grande-Bretagne de l’Europe avaient été bien négociés, mais nous constatons, hélas, que 200 navires ne peuvent toujours pas pêcher dans les 6 milles nautiques autour des îles anglo-normandes aujourd’hui. Est-ce normal ?
Des mesures de rétorsion avaient été annoncées par le Gouvernement la semaine passée, mais rien n’a été réglé. Pouvez-vous nous dire où en est-on précisément dans les négociations ? Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour que ce dossier soit enfin réglé et quelles mesures complémentaires pourrait-il prendre afin d’accompagner les filières maritimes de la pêche et du mareyage ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.
M. Clément Beaune, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes. Monsieur le sénateur, vous avez raison de souligner la gravité de la situation. Nous partageons votre préoccupation et nous agissons.
Je serai très précis : le problème ne tient pas à l’accord négocié jusque tard dans l’année 2020 ; celui-ci comporte un certain nombre de compromis, comme ceux qui réduisent les quotas de pêche autorisés et amènent à renégocier un certain nombre de paramètres dans six ans.
Aujourd’hui, le problème est que cet accord n’est pas respecté. Nous ne pouvons pas faire des compromis au-delà de ce qui a été négocié, signé et ratifié par les parlements européen et britannique ces derniers mois. Depuis dix mois, avec Annick Girardin, sous l’autorité du Premier ministre, nous travaillons avec l’ensemble des élus des régions concernées, les Hauts-de-France, la Normandie et la Bretagne, et surtout avec les professionnels, pour obtenir ces licences de pêche.
Nous les avons obtenues intégralement pour la zone économique exclusive, mais il en manque environ 200, vous avez raison de rappeler ce chiffre, qui correspondent soit à des licences provisoires qui devraient devenir définitives, soit à des licences qui n’ont pas du tout été octroyées.
Annick Girardin et moi-même continuons à nous battre sans relâche. C’est pour cela que nous avons indiqué, il y a quelques jours, que nous étions prêts à prendre des mesures.
Cette fermeté supplémentaire a amené à une nouvelle phase de dialogue avec les Britanniques. J’ai reçu la semaine dernière Lord Frost, qui s’occupe des négociations sur le Brexit, et je lui ai de nouveau parlé hier. Aujourd’hui même a lieu une discussion portant sur les deux points qui posent le plus de problèmes à Jersey. Concernant les petits navires de moins de 12 mètres, nous ne pouvons pas fournir des preuves liées à la géolocalisation qui n’existent pas, nous l’avons redit aux Britanniques, et cela n’est pas prévu par l’accord. Au sujet des navires de remplacement, les Britanniques ajoutent également des critères non prévus par l’accord.
Je le redis, nous demandons simplement et strictement l’application de l’accord. Nous serons d’une fermeté totale sur ce point, aussi ouverts que possible, aussi fermes que nécessaire.
Dans l’attente d’une solution, nous accompagnons le secteur de la pêche à l’aide d’un plan de 100 millions d’euros, le plus important d’Europe, pour que l’ensemble de la filière puisse faire face à ces difficultés temporaires concernant le mareyage et des activités de pêche. Nous mobiliserons toutes les sommes nécessaires. Mais ce que veulent nos pêcheurs, c’est surtout reprendre leur activité économique, et c’est cela que nous leur devons. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Colette Mélot et M. Pierre Louault applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour la réplique.
M. Michel Canévet. Monsieur le secrétaire d’État, nous partageons l’objectif que les patrons pêcheurs puissent rapidement reprendre leur travail. Cela fait onze mois que cette situation dure : il est temps que des solutions soient apportées.
La France a voulu faire preuve de fermeté à partir du début du mois de novembre. Je pense qu’il convient effectivement de mettre en œuvre des mesures de rétorsion pour obtenir satisfaction. Plus le temps passe et plus s’éloigne la perspective d’obtenir des solutions positives pour nos marins pêcheurs. Les inquiétudes ne cessent de monter sur les quais et il est important que des solutions soient amenées.
Puisque les Assises de la pêche et des produits de la mer vont se tenir à Saint-Paul-de-Léon la semaine prochaine, il est important d’avoir des réponses à ce moment-là. Sans cela, le risque est qu’un report de pêche soit dirigé sur d’autres zones de pêche, ce qui leur serait préjudiciable. Il importe d’agir très rapidement ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Sautarel. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, pas une assemblée générale d’association des maires de France – vous avez assisté à celle des maires du Cantal, monsieur le Premier ministre, il y a peu –, pas un déplacement dans une commune rurale, en milieu urbain ou en banlieue sans que la question de la santé soit abordée.
Au moment de l’examen du PLFSS (projet de loi de financement de la sécurité sociale), nous sommes nombreux sur toutes ces travées à vous alerter et à faire des propositions en matière de lutte active contre les déserts médicaux.
La loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé de 2019 a notamment prévu, à la demande du Sénat, que lors de la dernière année des études de troisième cycle de médecine ait lieu une pratique ambulatoire en autonomie, en priorité dans les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante.
Le Gouvernement n’a pas mis en œuvre cette disposition, alors qu’il s’y était engagé. Pourquoi ?
Depuis, le nombre de nos concitoyens qui n’ont plus accès aux soins ne cesse de croître. Ils seraient désormais, selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), plus de 4 millions, et sans doute bien davantage.
La Cour des comptes le préconise, les maires le réclament, les familles l’exigent, les patients en ont besoin et notre responsabilité politique l’appelle : nous devons aller au-delà des mesures incitatives, qui ont leur sens mais qui ne suffisent pas, ne suffisent plus. Dans l’attente des effets du desserrement du numerus clausus, qu’il faut amplifier, nous devons donc agir.
L’égal accès de tous aux soins ne saurait attendre ; chacun cotise, chacun contribue à une couverture de santé dont pourtant trop de personnes sont exclues, en particulier en milieu rural. Désormais, même les professionnels de santé réclament des mesures plus fortes : conventionnement sélectif, stage post-doctorat ou encore zones franches médicales.
Aussi, que comptez-vous faire, monsieur le ministre, pour répondre aux légitimes attentes de nos concitoyens ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Stéphane Demilly et Daniel Chasseing applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, vous avez raison de le souligner, dans un certain nombre de territoires, les déserts médicaux progressent.
Vous avez néanmoins dit « en attendant que les effets de la suppression du numerus clausus se fassent sentir ». (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) Donc ma première réponse consistera à indiquer que, si le numerus clausus avait été supprimé il y a dix ans, il y aurait aujourd’hui 10 000 à 15 000 médecins de plus dans les territoires et on ne parlerait pas des déserts médicaux ; c’est factuel !
Hélas, ce numerus clausus n’a pas été supprimé il y a dix, quinze ou vingt ans ! (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et SER.) Eh oui, mesdames, messieurs les sénateurs, quand on coupe un robinet, on ne peut pas regarder dans le lavabo et déplorer qu’il n’y ait pas d’eau à tomber ! C’est exactement ce qui s’est passé avec la médecine et, maintenant, vous faites le constat des dégâts provoqués par les politiques du passé… Là aussi, c’est factuel ! (Mêmes mouvements.)
Nous avons donc supprimé le numerus clausus.
Par ailleurs, nous développons les communautés professionnelles territoriales de santé, dont nombre de sénateurs que j’ai vus dans les territoires sont satisfaits, afin d’améliorer l’accès coordonné aux soins.
Nous débattons, en ce moment même, du PLFSS, qui comporte un certain nombre de dispositions prévues par le Gouvernement visant à faciliter, par exemple, l’accès des Français aux soins optiques ou l’accès direct à certaines professions. Or je m’étonne que nombre de sénateurs ici présents, pourtant très sensibles, je le sais, à la cause des déserts médicaux, déposent des amendements tendant à supprimer toute disposition permettant de favoriser les coopérations interprofessionnelles et de rendre ainsi les Français moins dépendants à l’accès direct au médecin lorsqu’il n’y a pas de praticiens dans les territoires concernés. (M. Didier Rambaud applaudit.) C’est pourtant l’occasion d’envoyer un autre signal à la population que la promotion d’un conservatisme qui ne facilite pas l’accès aux soins… (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et SER.)
Nous déployons également la télémédecine,…
M. Olivier Véran, ministre. … qui est un élément important.
Nous développons en outre les services d’accès aux soins dans les territoires, élément central également.
Par conséquent, nous progressons, nous mettons en place toutes les solutions possibles là où elles peuvent exister.
Enfin, vous direz que c’est une pirouette, mais les parlementaires sont souvent d’accord pour que l’on empêche les médecins de s’installer dans certains endroits ; pourtant, je n’ai encore jamais rencontré un seul parlementaire, ni à l’Assemblée nationale ni au Sénat, qui considère que, dans le territoire qu’il représente, il y a suffisamment de médecins pour qu’on y empêche de nouvelles installations. Pourquoi ? Parce que la pénurie est globale…
Si vous pensez que je me trompe, monsieur le sénateur, venez me voir et nous examinerons la situation ensemble. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour la réplique.
M. Stéphane Sautarel. Monsieur le ministre, la pénurie est peut-être globale, mais la responsabilité d’aujourd’hui est d’agir.
Une loi a été adoptée en 2019, mais elle n’est pas appliquée. D’autres mesures doivent être mises en place, faute de quoi il y aura un réel problème d’accès aux soins pour nos concitoyens et la responsabilité en reviendra au gouvernement d’aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Victoire Jasmin et M. Franck Montaugé applaudissent également.)
retard de versement des aides européennes aux agriculteurs
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Jean-Jacques Michau. Monsieur le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, personne ici ne méconnaît ce fait déplorable et insupportable : bon nombre d’agriculteurs de notre pays ne vivent pas de la vente de leur production et la loi Égalim 1 (loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous), qui est un échec, ainsi que les timides avancées de la loi du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs, dite Égalim 2, n’auront qu’un effet limité sur le revenu des agriculteurs.
Ainsi, depuis de nombreuses années, c’est grâce à la PAC (politique agricole commune) que ces agriculteurs vivent ou plutôt survivent. Ce sont ces aides qui constituent leur vrai revenu, qui leur permettent de boucler leurs fins de mois et de faire face à leurs obligations.
Par conséquent, quand ces aides ne sont pas versées à la date prévue, les agriculteurs doivent négocier des emprunts auprès des banques pour combler leur besoin de trésorerie.
C’est justement le cas au moment où je parle, car les aides qui devaient être versées au 15 octobre dernier, dans mon département, l’Ariège, mais également dans d’autres territoires, notamment en Occitanie, n’ont pas encore été versées. Vos services, monsieur le ministre de l’agriculture, annoncent qu’elles ne le seront pas avant le 15 décembre prochain ! Deux mois ! Deux mois sans aide, et encore, seulement si les promesses sont tenues !
Monsieur le ministre, mes chers collègues, doit-on incriminer l’Europe pour ces retards, comme on a si souvent tendance à le faire, parfois à raison ? Dans ce cas d’espèce, ce n’est pas Bruxelles qui est en cause : l’argent est bien disponible, mais, pour qu’il soit versé aux agriculteurs, il faut que l’État français ait contrôlé l’exploitation de ces derniers.
S’agissant d’argent public, personne ici ne remet en cause la légitimité de ces contrôles, qui permettent de vérifier la conformité des productions agricoles. Ce que je déplore et qui est inadmissible, c’est que l’administration française n’ait pas les moyens d’effectuer ces contrôles dans les délais requis pour que les agriculteurs reçoivent les aides nécessaires à leur survie aux dates que vous aviez annoncées, monsieur le ministre.
Par conséquent, qu’allez-vous faire pour que nos agriculteurs reçoivent leur prime le plus rapidement possible ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – MM. Pierre Louault et Bruno Sido applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. D’abord, monsieur le sénateur Michau, le plus important, c’est de faire en sorte que, « à la fin des fins des fins », nos agriculteurs vivent de la juste rémunération de leur activité et non des aides. À cet égard, je crois pouvoir dire que les avancées que nous avons fait adopter à l’unanimité, ici, au Sénat, dans le cadre de la loi Égalim 2 vont dans le bon sens.
Ensuite, les aides de la PAC restent, effectivement, très importantes, et elles le restent d’autant plus que la bataille de la rémunération n’est pas encore gagnée, même si l’on s’y emploie.
Toutefois, votre question, monsieur le sénateur, ne reflète en aucun cas la réalité et, je dois vous le dire, venant d’un représentant de l’ancienne majorité, je trouve ça vraiment fort de café !
M. Marc Fesneau, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement et de la participation citoyenne. Oui !
M. Julien Denormandie, ministre. Aussi vais-je vous donner les vrais chiffres, monsieur le sénateur, et ils sont vérifiables partout !
Au 19 octobre dernier, dans le département de l’Ariège, 95 % des bénéficiaires avaient perçu les avances de paiement de la PAC. Sur 1 800 dossiers, il y avait donc, à cette date, 83 exploitants qui ne les avaient pas encore reçues, pour deux raisons possibles : soit parce que des contrôles étaient en cours, comme il y en a dans tous les départements ; soit du fait des dérogations liées aux SIE (surfaces d’intérêt écologique) – ceux qui connaissent ce sujet comprendront bien –, qui entraînent un décalage dans le versement.
À présent, monsieur le sénateur, je vais vous donner les chiffres nationaux : en 2020, 99,7 % des paiements de la PAC ont été faits dans les délais ; en 2017, le taux s’élevait à 4,45 % (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et SER.) ; et en 2015, il s’établissait à 0 %… (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP. – MM. Arnaud de Belenet et Pierre Louault applaudissent également.)
M. Julien Denormandie, ministre. Alors, ces leçons de morale, quand on ne donne pas les vrais chiffres, sont insupportables ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laure Darcos. Ma question s’adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur le ministre, l’hôpital public va mal et les soignants sont au bord de la crise de nerfs. Quand le Gouvernement communique sur les milliards d’euros mobilisés dans le cadre du Ségur de la santé, sur le terrain, les services peinent à assurer leurs missions auprès des patients.
Remise en cause des vocations, multiplication des burn-out, pénurie de soignants, difficultés de recrutement ou encore fermetures de lit : l’hôpital fait face à des difficultés sans fin, dans le prolongement de la crise de la covid-19.
Puisque vous avez dit à ma collègue Florence Lassarade qu’elle faisait des amalgames, je vais vous donner un exemple précis, monsieur le ministre, celui des services de pédiatrie, qui sont dans une situation de tension extrême.
Ces services doivent aujourd’hui traiter les conséquences de l’épidémie sur la santé des adolescents, dans un contexte de saturation totale des structures régionales de pédopsychiatrie.
Ils doivent aussi composer avec un départ massif des pédiatres vers le secteur privé, où ces professionnels échappent aux contraintes toujours plus lourdes de la permanence des soins. À titre d’exemple, le service de pédiatrie de l’hôpital d’Orsay, dans mon département, l’Essonne, a perdu quatre de ses six pédiatres, ce qui a conduit à la fermeture de douze lits, qui manquent désormais cruellement.
La pénurie de personnel non médical, quant à elle, entraîne le gel de lits de pédiatrie et de néonatalogie dans tous les hôpitaux comme, par exemple, à Longjumeau.
Enfin, pour ajouter à cette situation désespérante, la survenue précoce de l’épidémie de bronchiolite engendre un nombre record de consultations dans les services hospitaliers.
Dans ce contexte se pose la question cruciale de la compensation de l’extrême pénibilité des gardes de nuit pour les médecins, qui s’élève actuellement à moins de 18 euros brut par heure. Nous savons que cette pénibilité se traduit par des départs multiples de l’hôpital public, en particulier dans les secteurs ne bénéficiant pas d’un calcul horaire du temps de travail des médecins, comme la pédiatrie et la gynécologie-obstétrique. Il s’agit d’un angle mort du Ségur.
Monsieur le ministre, vous avez vous-même reconnu la situation de tension dans les services d’urgence, de pédiatrie et dans les maternités, lors de votre présence au salon de la Fédération hospitalière de France. Comptez-vous prendre une initiative forte en la matière pour éviter la catastrophe annoncée ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre-Antoine Levi applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, sans vouloir nier les tensions qui peuvent exister, que l’on retrouve chaque année pendant la période automnale et hivernale, mais qui sont, cette année, un peu exacerbées après dix-huit mois de lutte effrénée contre la covid-19, attention, là encore, aux discours alarmistes. Sur le terrain, de tels discours peuvent avoir un effet, qui n’est certainement pas voulu dans votre cas, à savoir l’apparition de tensions ou d’un découragement, alors que, selon moi, les soignants ont, au contraire, besoin de nos encouragements. Je sais que cela ne correspond pas à votre démarche, madame la sénatrice, et je respecte votre question.
D’abord, vous indiquez qu’il y a de moins en moins de pédiatres ; mais oui, puisqu’il y a de moins en moins de médecins ! Et cela va durer pendant encore un peu de temps ; c’est la conséquence du numerus clausus. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et SER.)
De nouveau, je vous renvoie, madame la sénatrice, au constat dont vous et moi souffrons aujourd’hui, comme tous les Français : c’est un fait, il faut dix ans pour former un médecin. Je ne peux donc pas, en claquant des doigts, en former 15 000 et mettre des pédiatres partout ! (M. Jean-Claude Tissot s’agace.)
La conséquence de la mauvaise maîtrise médicalisée, pendant près de cinquante ans dans notre pays, c’est que l’on manque aujourd’hui de médecins. J’en fais avec vous le constat et je le déplore, mais nous avons pris la seule décision qui vaille : la suppression du numerus clausus, qui nous permet de former 2 000 médecins supplémentaires cette année par rapport aux promotions du quinquennat précédent. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
Ensuite, il y a une charge de travail importante en pédiatrie, liée à l’activité de pédopsychiatrie que vous avez soulignée. Cette croissance de l’activité pédopsychiatrique, nous avions commencé de la constater avant la crise de covid-19, mais elle se poursuit, voire s’accentue. De fait, jusqu’à 30 % des lits de pédiatrie générale sont occupés par des enfants qui relèvent de pédopsychiatrie. Nous avons en effet une véritable pénurie médicale en pédopsychiatrie et, là encore, nous sommes déterminés à en former bien davantage dans les années à venir.
La période hivernale a effectivement commencé fort, avec une bronchiolite arrivée en avance, au moins deux ou trois semaines plus tôt que lors des années précédentes. Il n’y en a pas eu l’année dernière – il y avait peut-être un meilleur respect des gestes barrières –, donc l’immunité conférée et acquise par les enfants est moindre, ce qui provoque une épidémie assez violente.
En revanche, madame la sénatrice, pour ce qui concerne les lits d’obstétrique, toutes les enquêtes dont je dispose montrent qu’il y a, dans notre pays, autant de lits d’obstétrique ouverts qu’à la même période en 2019. Par ailleurs, l’activité de chirurgie, y compris pédiatrique, est plus importante cette année, par exemple dans le secteur privé, qu’il y a deux ans.
M. Olivier Véran, ministre. Donc, il y a bien des secteurs en tension, notamment dans les urgences ; la pédiatrie fait face à une très forte demande et, partout où il le faut, nous sommes au contact des hôpitaux afin de les aider à tenir dans cette période.
M. le président. Il faut conclure !
M. Olivier Véran, ministre. Il y a donc effectivement une situation de tension, mais celle-ci n’est pas générale et l’hôpital n’est pas en train de craquer ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
pénurie structurelle de soignants
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Marie-Pierre Richer et M. Sébastien Meurant applaudissent également.)
Mme Nadia Sollogoub. Ma question s’adresse, elle aussi, à M. le ministre de la santé. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Quel succès !
Mme Nadia Sollogoub. Monsieur le ministre, les services d’urgence fonctionnent tant bien que mal, mais certains sont tout de même amenés à fermer.
La pénurie d’urgentistes est telle qu’un système mercantile s’est mis en place, siphonnant les moyens financiers des hôpitaux et compromettant la prise en charge des patients. C’est terriblement anxiogène et, en de nombreux départements, les citoyens ont peur et se sentent abandonnés.
Mme Nadia Sollogoub. Presque partout, vous l’avez souligné, on manque cruellement de médecins.
Une prime, pas de prime, un bonus fiscal ou encore une aide à l’installation : pour trouver les perles rares que sont les médecins, un vaste mercato s’est mis en place. Les élus sont prêts à toutes les compromissions pour chiper le praticien de leur voisin. Néanmoins, ce marché est malsain et les surenchères financières ne règlent rien, bien au contraire ; c’est d’ailleurs ce que l’on constate aujourd’hui.
Depuis plus de dix ans, on nous dit chaque année qu’il suffit d’attendre un peu pour que les choses s’arrangent, mais c’est de pis en pis.
Aussi ma question est-elle simple, monsieur le ministre : quand ? Nous donnons-nous enfin les moyens, aujourd’hui, y compris du point de vue de la logistique, des enseignants, des capacités d’accueil en stage, de l’encadrement des internes ou encore de la qualité de la formation, de faire coïncider offre et demande de soins, et à quelle échéance ?
Vous avez évoqué le numerus clausus, mais, vous le savez bien, c’est en termes de temps médical qu’il faut raisonner ; je voudrais être certaine que les modélisations de vos services intègrent les changements de mode d’exercice, le salariat, la féminisation de la profession, le nombre de médecins et d’étudiants qui abandonnent, respectivement, leur profession ou leur formation, le vieillissement de la population et les besoins croissants.
Où placez-vous le curseur, pour les urgentistes, mais également pour les médecins de ville et pour les autres spécialités, pour que, partout dans le pays, les Français aient enfin la garantie de trouver un médecin quand ils en ont besoin ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, cette question est encore parfaitement pertinente et vous dressez un diagnostic que nous partageons : le numerus clausus a entraîné une pénurie globale de médecins dans notre pays… (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et SER.)
Je ne comprends pas ce qui vous énerve, mesdames, messieurs les sénateurs ! C’est un constat : si vous ne formez plus de médecins, vingt ans plus tard, il n’y en a plus ! (Exclamations continues sur les travées du groupe SER.) Et ceux qui ont décidé de ne pas former suffisamment de médecins pendant quarante ans ne peuvent pas nous reprocher, à nous qui avons enfin desserré l’étau en supprimant le numerus clausus, le manque de médecins ! Pardonnez-moi, mais pas un Français ne tombe dans ce piège ! Les gens ont parfaitement compris ! D’ailleurs, vous avez été un certain nombre à déplorer cet état de fait avec nous et à voter cette disposition.
Néanmoins, madame la sénatrice, nous faisons effectivement face à une situation de pénurie. Celle-ci entraîne des dégâts plus importants en médecine d’urgence, parce que cette pratique ne s’inscrit pas dans la durée, en raison de l’usure, de l’épuisement des urgentistes, que l’on peut comprendre. Ces praticiens s’orientent donc parfois vers une autre forme de médecine, parce qu’ils sont fatigués de cet exercice.
Cela accroît l’effet de la pénurie, mais le problème de base est le même que précédemment : si nous avions 10 000 urgentistes de plus dans ce pays, nous ne nous poserions pas cette question, de même que, si nous avions 20 000 médecins généralistes de plus, nous ne parlerions pas des déserts médicaux.
Puisqu’il y a cette pénurie, que proposons-nous, au-delà du regroupement de médecins et de paramédicaux – les fameuses CPTS, les communautés professionnelles territoriales de santé – et au-delà de la participation de la ville et de l’hôpital à la permanence des soins via le service de soins non programmés et le service d’accès aux soins (SAS) ? Eh bien, nous proposons de permettre à certains professionnels de santé non médicaux d’exercer, dans des conditions sécurisées, des actes qui ne relèvent aujourd’hui que des médecins alors que, dans quasiment tous les pays qui nous entourent, ces professionnels sont capables de les prendre en charge et ont une reconnaissance de compétence pour ce faire.
Or qu’est-ce que j’observe ? Que toutes les propositions du Gouvernement en la matière qui sont incluses dans le PLFSS font l’objet d’un à dix amendements de suppression émanant de la plupart des travées de cet hémicycle !
M. Julien Bargeton. Exactement !
M. Olivier Véran, ministre. Donc, aidez-nous, madame la sénatrice ! Aidez-nous à porter ce discours concret ! (Mme Élisabeth Doineau applaudit.) Ce n’est pas votre faute à vous, personnellement, si l’on n’a plus de médecins dans notre pays et ce n’est certainement pas la mienne non plus, puisque je me suis battu pendant des années contre le numerus clausus. Mais, face à ce constat, ne renouvelons pas les échecs, allons de l’avant ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe RDSE. – Mmes Colette Mélot et Élisabeth Doineau applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour la réplique.
Mme Nadia Sollogoub. Monsieur le ministre, je vous ai demandé : « quand ? » À partir de quand commençons-nous à compter ? Devons-nous calculer 2017 plus dix ans ? Ou 2021 plus dix ans ?
Je ne sais si vous comptez être toujours là dans dix ans, mais cela aurait été bien que l’on puisse fêter cela ensemble… (Sourires. – Mme Sylvie Vermeillet applaudit.)
situation des migrants à calais
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour la réunion administrative des sénateurs n’appartenant à aucun groupe. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le 4 novembre dernier, un migrant était retrouvé mort sur une plage de Wissant, dans le Pas-de-Calais. Le même jour, deux autres migrants retrouvés en hypothermie étaient transportés à l’hôpital et un TER percutait accidentellement quatre migrants circulant sur les voies, causant un mort et un blessé en urgence absolue.
La liste de ces tragédies est, hélas, longue.
Ils sont arrivés au péril de leur vie en France ; ils y trouvent la mort plutôt que l’accueil. Ils veulent gagner la Grande-Bretagne pour s’y construire un avenir plus décent ; on les en empêche et, en attendant, ils errent dans les rues de Calais.
Le prêtre Philippe Demeestère a fait vingt-cinq jours de grève de la faim ; deux autres personnes – Ludovic Holbein et Anaïs Vogel – l’ont accompagné dans cette action et poursuivent leur grève, afin de dénoncer la situation des quelque 1 500 migrants présents à Calais. Hier, je me suis rendue dans cette ville avec mon cabinet, pour les voir et les entendre, ainsi que les associations.
Depuis le 27 octobre dernier, un médiateur, choisi par le Gouvernement, Didier Leschi, directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII), tente de trouver un compromis, mais rien de nouveau, rien de concret n’est sorti de ces négociations. Migrants et associations, eux, attendent un moratoire sur les évacuations pour l’hiver.
Que comptez-vous faire, monsieur le ministre de l’intérieur ? Les mots « détresse » et « urgence » font-ils partie de votre vocabulaire ? La République a-t-elle, oui ou non, un devoir de fraternité à l’égard de gens, qui, avant d’être des clandestins, sont nos semblables, des humains ? (Mmes Monique de Marco, Raymonde Poncet Monge et Émilienne Poumirol applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur. Madame la sénatrice, depuis longtemps, la République exerce son devoir de fraternité.
Ainsi, depuis le 1er janvier dernier, ce sont 12 000 personnes que la République a relogées avec de l’argent public, alors qu’une très grande partie d’entre elles sont, vous le savez, en séjour irrégulier sur le territoire national. Tous les jours, l’État distribue 2 200 repas à Calais, ce qui représente 4 millions d’euros d’argent public. Tous les jours, nous intervenons pour sauver des migrants qui essaient de traverser la Manche.
Mais il y a un mot que vous n’avez pas prononcé une seule fois dans votre intervention, ce qui montre, à mon avis, un léger biais dans votre pensée, c’est « passeurs ».
Madame la sénatrice, il s’agit pourtant de criminels, qui exploitent des femmes, des enfants et des hommes, à qui ils font payer beaucoup d’argent pour les faire traverser la Manche en leur promettant l’eldorado. Or de très nombreux enfants, femmes et hommes meurent au cours de la traversée, parce que nous sommes malheureusement trop naïfs et que, en tenant des discours comme le vôtre, nous laissons ces criminels exploiter la misère humaine.
Si nous laissons la jungle s’installer de nouveau à Calais ou ailleurs, non seulement cela engendrera des conditions de vie absolument indignes pour les migrants et pour les riverains, mais surtout nous mettrons sous la main de criminels, j’y insiste, des personnes qui veulent passer de l’autre côté de la Manche, dans des conditions absolument inacceptables.
Madame la sénatrice, 70 % des migrants qui sont aujourd’hui à Calais viennent de Belgique ou d’Allemagne. La France doit, en raison de sa position géographique, être tout à la fois fraternelle et ferme, et lutter contre les criminels que sont les passeurs.
Donc, oui, bien sûr, nous accompagnons les migrants ; c’est la France qui subventionne les associations, qui paie les repas, qui permet à ses policiers et à ses gendarmes de sauver, tous les jours, au risque de leur vie, des migrants en mer, mais pas un seul instant nous ne souhaitons encourager ces criminels que sont les passeurs uniquement pour avoir bonne conscience. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour la réplique.
Mme Esther Benbassa. Là où il y a des migrants, il y a des passeurs ; cela a toujours été ainsi dans l’histoire. Ce ne sont donc pas les passeurs qu’il faut accuser… (Protestations véhémentes sur de nombreuses travées. – Des sénateurs du groupe Les Républicains lèvent les bras au ciel.)
Il faut accuser… (Des sénateurs du groupe Les Républicains marquent leur impatience et martèlent leur pupitre pour indiquer que l’oratrice a épuisé son temps de parole. – La voix de l’oratrice se perd dans le brouhaha.)
Écoutez, on ne peut pas parler, le débat n’est pas possible. Je le regrette.
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
La prochaine séance de questions d’actualité au Gouvernement aura lieu le mercredi 17 novembre 2021, à quinze heures.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente-cinq, sous la présidence de Mme Nathalie Delattre.)
PRÉSIDENCE DE Mme Nathalie Delattre
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
3
Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire et à deux commissions mixtes paritaires
Mme la présidente. J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, au sein de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques et de la proposition de loi ordinaire relative au Haut Conseil des finances publiques et à l’information du Parlement sur les finances publiques, ainsi qu’au sein de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur la proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d’école ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
4
Financement de la sécurité sociale pour 2022
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2022 (projet n° 118, rapport n° 130, avis n° 122).
Dans la discussion des articles, nous sommes parvenus à l’article 36.
QUATRIÈME PARTIE (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2022
TITRE Ier (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES
Chapitre III (suite)
Rénover la régulation des dépenses de produits de santé
Article 36
I. – À titre expérimental, il est instauré un dispositif dit « d’accès direct », dans lequel les entreprises exploitant des spécialités pharmaceutiques ne faisant pas l’objet, dans une indication particulière, d’une autorisation d’accès précoce mentionnée à l’article L. 5121-12 du code de la santé publique mais disposant d’une autorisation de mise sur le marché dans cette indication, sans être déjà inscrites, dans d’autres indications, sur la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale ou prises en charge au titre de l’article L. 162-16-5-2 du même code et dispensées en pharmacie d’officine à ce titre, peuvent bénéficier d’une prise en charge par l’assurance maladie, d’une durée maximale d’un an, dans certains établissements de santé mentionnés à l’article L. 162-22-6 dudit code, dans certains établissements de santé disposant d’une pharmacie à usage intérieur ou dans certains hôpitaux des armées, dans les conditions et selon les modalités mentionnées au présent article.
II. – Les spécialités pharmaceutiques mentionnées au I bénéficiant, dans des indications thérapeutiques particulières, de l’accès direct défini au présent article font l’objet d’une prise en charge par l’assurance maladie lorsque les conditions suivantes sont réunies :
1° La demande de prise en charge est déposée par l’exploitant auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale au plus tard un mois après la publication de l’avis rendu par la commission mentionnée à l’article L. 5123-3 du code de la santé publique sur la demande d’inscription sur l’une des listes mentionnées à l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale et à l’article L. 5123-2 du code de la santé publique dans la ou les indications considérées, et au plus tard deux ans après la date, fixée par décret au plus tard le 1er juillet 2022, du début de l’expérimentation prévue au présent article ;
1° bis (nouveau) L’exploitant a déposé une demande d’autorisation d’accès précoce mentionnée à l’article L. 5121-12 du code de la santé publique dans la ou les indications considérées, au plus tard lors du dépôt de sa demande d’autorisation de mise sur le marché correspondante. Une décision a été rendue par la Haute Autorité de santé sur cette demande et l’exploitant n’a ni retiré sa demande ni demandé le retrait de son autorisation le cas échéant ;
2° Lorsque la spécialité a fait l’objet d’un classement dans la catégorie des médicaments réservés à l’usage hospitalier, elle remplit les critères pour être inscrite sur la liste des médicaments mentionnée à l’article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale dans la ou les indications considérées et une demande d’inscription sur cette liste est adressée aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale concomitamment à la demande mentionnée au 1° du présent II ;
3° Le service médical rendu par la spécialité dans la ou les indications considérées, apprécié par la commission mentionnée au même 1° dans son avis, est au moins d’un niveau fixé par décret ;
4° L’amélioration du service médical rendu par la spécialité dans la ou les indications considérées, appréciée par la même commission dans son avis, est au moins d’un niveau fixé par décret ;
5° L’exploitant s’engage à permettre d’assurer la continuité des traitements initiés pendant la durée du dispositif d’accès direct et pendant une durée minimale d’un an à compter de l’arrêt, dans l’indication concernée, de la prise en charge au titre de ce dispositif, sauf si la spécialité, pour cette indication, fait l’objet d’un arrêt de commercialisation pour des raisons sérieuses relatives à la sécurité des patients.
La prise en charge est décidée par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.
III. – (Supprimé)
IV. – Lorsque la spécialité bénéficie du dispositif d’accès direct dans une indication donnée :
1° L’exploitant déclare au Comité économique des produits de santé le montant de l’indemnité maximale qu’il réclame, le cas échéant, aux établissements de santé pour la spécialité, dès lors que celle-ci ne fait l’objet ni d’un prix maximal de vente aux établissements de santé en application de l’article L. 162-16-4-3 du code de la sécurité sociale, ni d’une prise en charge au titre du deuxième alinéa de l’article L. 162-17 ou de l’article L. 162-22-7 du même code dans au moins l’une de ses indications. Le comité rend publiques ces déclarations ;
2° Avant le 15 février de chaque année, l’exploitant de la spécialité informe le comité du chiffre d’affaires correspondant à cette spécialité ainsi que du nombre d’unités fournies, dans le cadre du dispositif d’accès direct et pour chacune des indications concernées, au titre de l’année civile précédente ;
3° L’entreprise exploitant la spécialité reverse chaque année aux organismes mentionnés à l’article L. 213-1 du code de la sécurité sociale désignés par le directeur de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale des remises calculées sur la base du chiffre d’affaires hors taxes facturé aux établissements de santé, au titre de l’indication et de la période considérées. Les taux de ces remises sont définis selon un barème progressif par tranche de chiffre d’affaires, fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.
Le chiffre d’affaires facturé au titre de l’indication est obtenu en multipliant le chiffre d’affaires total facturé par l’entreprise pour cette spécialité par la part d’utilisation de la spécialité dans l’indication considérée ;
4° Aucune inscription de la spécialité sur les listes mentionnées au 1° du II ne peut avoir lieu pendant la période d’accès direct pour une indication autre que l’indication considérée ;
5° Par dérogation au premier alinéa de l’article L. 5123-2 du code de la santé publique, la spécialité peut être achetée, fournie, prise en charge et utilisée par les collectivités publiques sans figurer sur la liste mentionnée au même premier alinéa ;
6° Lorsque la spécialité n’est pas classée dans la catégorie des médicaments réservés à l’usage hospitalier, elle est réputée inscrite sur la liste mentionnée à l’article L. 5126-6 du même code ;
7° Le prescripteur porte sur l’ordonnance la mention : « Prescription au titre de l’accès direct » et informe le patient des conditions de prise en charge, par l’assurance maladie, de la spécialité prescrite ;
8° La spécialité est prise en charge par les régimes obligatoires d’assurance maladie en sus des prestations d’hospitalisation mentionnées à l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale ;
9° En cas de non-respect des règles de tarification, de distribution ou de facturation, l’article L. 133-4 du même code est applicable ;
10° Les articles L. 162-16-5-3 et L. 315-2 dudit code sont applicables.
V. – Pour chaque indication considérée, la prise en charge au titre de l’accès direct mentionné au I du présent article prend fin au plus tard un an après la date de la décision de prise en charge. Elle prend fin avant l’expiration de ce délai dans les cas suivants :
1° Lorsque cette indication est inscrite, au titre de son autorisation de mise sur le marché, sur l’une des listes mentionnées au premier alinéa de l’article L. 5123-2 du code de la santé publique ou aux deux premiers alinéas de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale et, le cas échéant, que l’avis de fixation du tarif de responsabilité ou du prix est publié ;
2° En cas de demande de l’exploitant ;
3° Par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale :
a) En cas de refus d’inscription de la spécialité, pour l’indication considérée, sur l’une des listes mentionnées au 1° du présent V ;
b) En cas de retrait de la demande d’inscription au même titre sur l’une des listes mentionnées au même 1°.
V bis (nouveau). – Pour l’application des articles L. 162-16-4, L. 162-16-5 ou L. 162-16-6 du code de la sécurité sociale, pour une spécialité bénéficiant du dispositif d’accès direct dans une indication donnée, lorsqu’aucun accord conventionnel fixant ou modifiant un prix de vente au public, un prix de cession ou un tarif de responsabilité et prix limite de vente aux établissements n’est signé dans un délai de dix mois à compter de la décision de prise en charge au titre de l’accès direct, le Comité économique des produits de santé fixe par décision, avant la fin du douzième mois, le prix de vente au public, le prix de cession ou le tarif de responsabilité et prix limite de vente aux établissements.
VI. – A. – Lorsqu’une spécialité pharmaceutique ayant fait l’objet d’une prise en charge pour une indication donnée au titre du dispositif d’accès direct est inscrite au remboursement pour cette indication, la convention ou la décision qui fixe le prix net de référence en application du C du présent VI détermine également le montant de la restitution ou de la remise supplémentaire définie selon les modalités prévues au présent A.
Le Comité économique des produits de santé calcule, après que l’entreprise exploitant cette spécialité a été mise à même de présenter ses observations :
1° Le chiffre d’affaires qui aurait résulté de la valorisation des unités vendues au titre de l’indication considérée, prises en charge au titre du dispositif d’accès direct, au prix net de référence sur l’ensemble de la période considérée de prise en charge ;
2° Le chiffre d’affaires facturé aux établissements de santé après déduction des remises prévues au 3° du IV au titre de l’indication considérée et de l’année civile pour laquelle les remises avaient été versées sur l’ensemble de la période considérée de prise en charge.
Si le montant mentionné au 1° du présent A est inférieur à celui mentionné au 2° du présent A, l’exploitant verse une remise supplémentaire aux organismes mentionnés à l’article L. 213-1 du code de la sécurité sociale désignés par le directeur de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, égale à la différence entre ces deux montants. Dans le cas contraire, est restituée au laboratoire la différence entre ces deux montants, dans la limite de la remise versée au titre du 3° du IV du présent article pour l’indication considérée sur l’ensemble de la période de prise en charge au titre du présent article.
B. – Pour chaque indication considérée, l’intégralité des remises dues au titre du A du présent VI est versée en une seule fois. Ces remises sont versées au titre de l’année au cours de laquelle l’inscription au remboursement pour l’indication considérée a eu lieu.
C. – Les conventions conclues au titre des spécialités ayant bénéficié, pour l’une de leurs indications, de l’accès direct incluent les remises portant uniquement sur les unités vendues à compter de la signature de la convention et des prévisions relatives aux volumes de vente, le cas échéant indication par indication, pour les trois prochaines années.
Sur la base de ces éléments et après que l’exploitant a été mis en mesure de présenter ses observations, le Comité économique des produits de santé fixe un prix net de référence pour chaque spécialité. Ce prix net de référence est calculé en défalquant les remises mentionnées aux I et II de l’article L. 162-18 du code de la sécurité sociale, qui pourraient être dues au titre de la prochaine année, du prix ou du tarif de remboursement mentionnés aux articles L. 162-16-4, L 162-16-5 ou L. 162-16-6 du même code.
Les conventions peuvent déterminer un prix net de référence plus bas que celui qui résulterait de l’application du deuxième alinéa du présent C.
À défaut de convention ou de décision prévoyant des remises, le prix ou tarif de remboursement tient lieu de prix net de référence.
VII. – Les A et B du VI sont applicables lorsque, pour une indication thérapeutique, la prise en charge au titre de l’accès direct prend fin ou lorsqu’il y est mis fin sans que soit mis en place un remboursement pour cette indication.
Dans ce cas, pour l’application des mêmes A et B, le Comité économique des produits de santé peut retenir un prix de référence en fonction des critères de fixation et de modification des prix et tarifs prévus aux articles L. 162-16-4, L. 162-16-5 et L. 162-16-6 du code de la sécurité sociale.
VIII. – Les deux derniers alinéas du II de l’article L. 162-18 du même code sont applicables aux spécialités bénéficiant de l’accès direct.
IX. – A. – Durant la période de continuité de traitement postérieure à la prise en charge au titre de l’accès direct :
1° Lorsque la spécialité pharmaceutique qui a bénéficié de la prise en charge est inscrite sur l’une des listes mentionnées à l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale ou à l’article L. 5123-2 du code de la santé publique dans l’indication considérée, les conditions de dispensation et de prise en charge au titre de l’inscription sur ces listes s’appliquent ;
2° Lorsque la spécialité qui a bénéficié de la prise en charge n’est inscrite sur aucune des listes mentionnées au 1° du présent IX dans l’indication considérée, les dernières conditions de dispensation sont maintenues. L’exploitant permet alors l’achat de la spécialité pour les continuités de traitement à un tarif qui n’excède pas le prix de référence mentionné au second alinéa du VII, le cas échéant au moyen de remises.
Par dérogation au premier alinéa de l’article L. 5123-2 du code de la santé publique, la spécialité peut être achetée, fournie et utilisée par les collectivités publiques sans figurer sur la liste mentionnée au même premier alinéa.
Lorsque la spécialité n’est pas classée dans la catégorie des médicaments réservés à l’usage hospitalier, elle est réputée inscrite sur la liste mentionnée à l’article L. 5126-6 du même code.
B. – En cas de manquement de l’exploitant à l’engagement prévu au 5° du II du présent article, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale peuvent prononcer, après que l’exploitant a été mis en mesure de présenter ses observations, une pénalité financière à sa charge. Le montant de cette pénalité ne peut être supérieur à 30 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France par l’entreprise au titre de la spécialité mentionnée au I au cours des deux ans précédant la constatation du manquement.
La pénalité est recouvrée par les organismes mentionnés à l’article L. 213-1 du code de la sécurité sociale désignés par le directeur de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Son produit est affecté à la Caisse nationale de l’assurance maladie. Les articles L. 137-3 et L. 137-4 du même code sont applicables au recouvrement de la pénalité. Le recours présenté contre la décision prononçant cette pénalité est un recours de pleine juridiction.
X. – Les modalités d’application du présent article sont définies par décret en Conseil d’État.
XI. – Dans un délai de vingt et un mois à compter de la date de début de l’expérimentation mentionnée au 1° du II, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport portant sur l’évaluation du dispositif d’accès direct prévu au présent article. Le contenu de cette évaluation est précisé par décret.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l’assurance maladie. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d’engager la discussion des amendements, je souhaite clarifier les termes du débat qui s’annonce tant ce sujet est important et les équilibres de ces dispositifs fragiles.
L’année dernière, nous avons adopté, en loi de financement de la sécurité sociale, une réforme majeure de l’accès précoce. Cette réforme, qui a profondément revu les mécanismes de prise en charge dérogatoire, a rénové le cadre de l’accès des patients à l’innovation, et ce même très en amont d’une autorisation de mise sur le marché (AMM).
Pour être éligible à l’accès précoce, le médicament doit être destiné à traiter des maladies graves, rares ou invalidantes et répondre à trois conditions : il n’existe pas de traitement approprié disponible ; la mise en œuvre du traitement ne peut être différée ; enfin, bien évidemment, le médicament doit être présumé innovant.
L’article 36 ouvre un nouveau dispositif, dit « d’accès direct », issu des recommandations du conseil stratégique des industries de santé (CSIS) en 2021. Ce dispositif est bienvenu et complémentaire – j’insiste sur ce second point. Il tend à permettre une prise en charge post-AMM, et après évaluation de la Haute Autorité de santé, sans condition de gravité de la pathologie ni d’urgence. Il pourra, en outre, être ouvert à des spécialités présentant un service médical rendu important, mais avec une amélioration, même mineure, du service médical rendu, de I à IV.
Nous devons veiller – cela a été notre préoccupation en commission et je m’en préoccupe encore en ma qualité de rapporteure – à ce que le nouveau dispositif présenté sous forme d’expérimentation s’articule correctement avec l’accès précoce, compte tenu des amendements qui ont été déposés. Il ne faut pas que cette expérimentation conduise à bouleverser la réforme de l’accès précoce, mise en œuvre depuis juillet dernier seulement, et dont tous les acteurs se félicitent. Derrière ces dispositifs, il y a des patients qui attendent : ne risquons pas de retarder l’accès des patients atteints de pathologies graves à des médicaments innovants.
L’année dernière nous avons mis en place l’accès précoce : un médicament peut être autorisé, avant l’AMM, pour des maladies graves, rares ou invalidantes et sans autre alternative thérapeutique. En l’occurrence, nous parlons d’un accès direct : le médicament a obtenu son AMM et la Haute Autorité de santé a rendu son avis. Il s’agit donc de raccourcir le délai pour permettre l’accès des patients à ce médicament pendant que les négociations continuent de se dérouler entre l’industriel et le comité économique des produits de santé (CEPS).
Mme la présidente. L’amendement n° 982 rectifié bis, présenté par Mme Poumirol, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou, Michau, Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Un an seulement après le vote de la réforme des autorisations temporaires d’utilisation (ATU) et la création des dispositifs d’accès précoce et d’accès compassionnel, le Gouvernement propose un nouvel étage avec le dispositif expérimental d’accès direct.
L’accès précoce et l’accès compassionnel ne sont applicables que depuis le 1er juillet dernier. Comment le Gouvernement peut-il déjà évaluer que ces deux modalités de mise à disposition de médicaments innovants sont insuffisantes pour « garantir un accès et une prise en charge immédiats des patients tout en assurant la soutenabilité financière du dispositif » ?
En outre, la réforme adoptée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 visait à simplifier et harmoniser les procédures. En les empilant de nouveau et en déstabilisant le système chaque année, le Gouvernement va à rebours de son objectif.
La critique d’une complexité due à de multiples modifications incrémentales, utilisée pour justifier la réforme de l’an passé, peut tout à fait s’appliquer, cette année, à celle de l’accès direct.
Enfin, l’inquiétude et les incertitudes soulevées par cette nouvelle expérimentation résident dans le fait que cet article dépasse les restrictions posées dans loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, puisqu’il autorise l’accès au marché et le remboursement de médicaments venant soigner des maladies qui ne sont pas rares ou graves et de médicaments n’étant pas évalués comme innovants, contrairement aux exigences du dispositif d’accès précoce. Dès lors, ne s’agirait-il pas d’une simple mesure de dérégulation ?
Pour toutes ces raisons, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain propose de supprimer l’article 36.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet article est la traduction d’une recommandation du CSIS. Il est complémentaire, comme je l’ai souligné, de la procédure d’accès précoce, en apportant une réponse à d’autres besoins.
Il y a bien un sujet concernant l’articulation avec la réforme des ATU, que nous avons votée l’an dernier, mais cela ne justifie pas la suppression de l’article.
Encadrons correctement cette expérimentation et veillons au bon partage des rôles entre accès précoce et accès direct, comme j’ai essayé de vous l’expliquer dans mon propos liminaire, mais ne rejetons pas ce dispositif par principe.
La commission est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 982 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 926 rectifié bis, présenté par Mme Poumirol, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou, Michau, Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Après les mots :
des armées
insérer les mots :
selon des modalités définies par la Haute Autorité de santé garantissant l’égal accès de la population cible à ces spécialités pharmaceutiques sur l’ensemble du territoire national
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement de repli vise à garantir une égalité d’accès, sur l’ensemble de notre territoire, aux spécialités pharmaceutiques bénéficiant du nouveau dispositif expérimental d’accès direct.
Le texte dispose que seuls certains établissements pourront bénéficier de ces spécialités : nous souhaitons étendre cet accès à l’ensemble des établissements.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’intention des auteurs de cet amendement est louable, mais le dispositif proposé est dénué de portée opérationnelle : avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 926 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L’amendement n° 349 est présenté par M. Savary.
L’amendement n° 446 rectifié est présenté par MM. Milon et D. Laurent, Mme L. Darcos et MM. Chatillon, Karoutchi, Bouchet, Charon, Daubresse, B. Fournier, Klinger et Bonne.
L’amendement n° 1035 est présenté par le Gouvernement.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° 349.
M. René-Paul Savary. Je voudrais tout d’abord remercier Mme la rapporteure d’avoir clarifié le débat. Il s’agit d’une situation relativement complexe.
Un dispositif est à peine sur pied qu’on veut en mettre un autre en place ! Et plutôt que de l’huile, il me semble bien que l’Assemblée nationale a déposé des grains de sable dans les rouages !
C’est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement, qui vise à déconnecter la demande d’autorisation d’accès précoce du dispositif de l’accès direct, afin de rendre ce dernier effectivement utilisable.
Rien ne justifie cette restriction : l’alinéa 4, que je vous propose de supprimer, réserve le bénéfice de l’accès direct à une mise à disposition des patients, après l’évaluation de la Haute Autorité de santé, aux seuls médicaments n’ayant pu bénéficier de l’accès précoce tout en y étant éligibles.
Il existe de nombreux médicaments, dont le caractère innovant a été reconnu par la HAS, qu’il conviendrait de mettre rapidement à disposition des patients.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 446 rectifié.
M. Alain Milon. J’ai écouté avec beaucoup d’attention les explications de Mme la rapporteure auxquelles j’adhère totalement.
Elle nous propose avant tout de protéger le patient dans le cadre de l’accès au médicament : je retire mon amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 446 rectifié est retiré.
La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 1035.
M. Olivier Véran, ministre. Il s’agit également de supprimer l’obligation de dépôt préalable d’une demande d’autorisation d’accès précoce pour pouvoir bénéficier de l’accès direct.
Toutefois, en raison de la lourdeur de la procédure tant pour les agences que pour les laboratoires, le Gouvernement envisage de mettre en place une grille de remise augmentée pour l’accès direct par rapport à celle de l’accès précoce, et ce afin d’éviter que les laboratoires ne privilégient l’accès direct au détriment de l’accès précoce.
Comme l’a très bien expliqué Mme la rapporteure, il s’agit de deux mécanismes différents, qui doivent se compléter dans des situations également différentes. L’un ne doit pas prévaloir sur l’autre. C’est la raison pour laquelle nous proposons de mettre en place un dispositif plus incitatif pour l’accès précoce.
Mme la présidente. L’amendement n° 178, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 4
1° Première phrase
Rédiger ainsi le début de cette phrase :
1° bis Lorsque la spécialité répond aux critères d’éligibilité d’une autorisation d’accès précoce, l’exploitant a déposé une demande (le reste sans changement)
2° Seconde phrase
Après les mots :
cette demande
insérer les mots :
d’autorisation d’accès précoce
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Le dispositif d’accès direct concerne un champ de spécialités qui ne répondent pas toutes aux critères de l’accès précoce. Aussi, il ne convient d’exiger le dépôt d’une demande préalable d’accès précoce que dans le cas où ces critères pourraient être remplis.
Le présent amendement vise à préciser ce champ et à procéder à une clarification rédactionnelle.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 256 rectifié est présenté par Mme Delmont-Koropoulis, M. Bascher, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Burgoa, Gremillet, Klinger, D. Laurent, Longuet et Tabarot.
L’amendement n° 289 rectifié est présenté par MM. Henno, Moga et Capo-Canellas, Mme Létard, M. Le Nay, Mme Dindar, MM. Janssens, Canévet, Duffourg et J.M. Arnaud, Mmes Jacquemet et Billon et M. Mizzon.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4, première phrase
Supprimer les mots :
, au plus tard lors du dépôt de sa demande d’autorisation de mise sur le marché correspondante
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour présenter l’amendement n° 256 rectifié.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Un amendement gouvernemental, adopté en première lecture à l’Assemblée nationale, a précisé que l’accès direct s’appliquait aux traitements innovants n’ayant pas obtenu au préalable une autorisation d’accès précoce.
Cependant, le délai imposé aux industriels pour effectuer cette demande d’accès précoce apparaît peu réaliste et risque de rendre l’accès direct inopérant.
En effet, les laboratoires pharmaceutiques, et à plus forte raison les petites entreprises et start-up, ne seront pas en mesure de déposer un dossier de demande d’accès précoce en France avant même la demande d’autorisation de mise sur le marché, surtout lorsqu’il s’agit d’une procédure centralisée européenne – les AMM européennes sont parfois délivrées près de deux ans après le dépôt de la demande.
À ce stade, dans la grande majorité des cas, les entreprises ne disposent pas encore d’une vision suffisamment fine pour leur permettre de savoir si le traitement peut répondre aux exigences du dispositif d’accès précoce.
Il convient donc de lever cette limite temporelle tout en conservant l’obligation d’avoir déposé une demande préalable d’autorisation d’accès précoce.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 289 rectifié.
M. Olivier Henno. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 179, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 4, seconde phrase
Après le mot :
cette
insérer le mot :
dernière
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements en discussion commune, à l’exception de ceux qu’elle a elle-même présentés ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. En tant que rapporteure, il me revient de conseiller le Sénat et de lui proposer une position cohérente en vue d’assurer la solidité du dispositif.
Cette situation ne me gêne aucunement, mais je me dois de souligner que le débat ouvert sur cet alinéa 4 se présente dans des termes qui ne sont satisfaisants ni sur la forme ni sur le fond.
Lors de nos auditions, nous avions identifié une lacune de ce dispositif et un risque non négligeable de déport de l’accès précoce vers l’accès direct, ce qui risque d’entraîner in fine un retard dans l’accès à l’innovation pour les patients atteints de maladies graves, rares ou invalidantes.
Le Gouvernement avait constaté cette lacune, comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre. Toutefois, cet alinéa 4 a été modifié à l’Assemblée nationale avec le soutien du rapporteur général.
Comme je l’ai dit en commission, nous partageons l’intention des auteurs de l’amendement, mais nous n’approuvons pas la rédaction retenue : l’accès précoce et l’accès direct n’ayant pas vocation à concerner les mêmes spécialités, il est nécessaire d’assurer la bonne répartition des médicaments sur les bons dispositifs et de prévenir le déport.
Partant du principe que l’essentiel des médicaments concernés par l’accès direct ne devrait pas être éligible à l’accès précoce, il ne nous paraît pas opportun – ce serait même contre-productif – de prévoir le dépôt systématique d’une demande d’accès précoce comme condition nécessaire.
Par ailleurs, une question de cohérence des calendriers se pose avec une date butoir fixée à la date de demande d’autorisation de mise sur le marché qui ne semble pas en adéquation avec le fonctionnement réel des industriels et des autorités sanitaires.
C’est la raison pour laquelle la commission a déposé l’amendement n° 178, qui vise à ce que cette demande d’accès précoce demeure une condition nécessaire, mais dans les seuls cas d’une éligibilité à ce premier dispositif.
C’est également la raison pour laquelle la commission a émis un avis favorable sur les amendements identiques nos 256 rectifié et 289 rectifié visant à lever la date limite de dépôt de la demande d’accès précoce fixée.
Disons-nous les choses, monsieur le ministre : que comprendre de cette proposition de suppression, soutenue par le Gouvernement ? Ce dernier se dédit-il ? Nous demande-t-il de nous dédire également, alors que nous avions soulevé cette lacune ? Face à un problème manifeste, le Gouvernement préfère-t-il l’absence de solution plutôt que la précision apportée par l’amendement de la commission ? Devons-nous comprendre que les craintes des autorités sanitaires indépendantes sont infondées ?
Il faut certainement faire confiance aux industriels et le Gouvernement veillera, par l’incitation des barèmes tarifaires à l’attractivité de l’accès précoce vis-à-vis de l’accès direct – croisons les doigts !
La solution de la commission n’est peut-être pas parfaite, monsieur le ministre, mais nous avons l’humilité de le reconnaître. Nous étions ouverts à la discussion, prêts à l’affiner. C’est la raison d’être du débat parlementaire.
Face à une fin de non-recevoir et au dépôt de ces amendements, je ne suis pas dupe : la négociation sur cet article semble nous dépasser, et peut-être même vous dépasser aussi. Je m’interroge sur le signal incompréhensible qu’envoie le Gouvernement et qui nous laisse penser que le dispositif proposé ne tourne pas, qu’il n’est ni calibré ni finalisé. Or cela ne va pas sans risque : l’accès précoce, que nous nous félicitions de voir mis en place voilà un an, pourrait être écrasé.
Ce débat ne traduit pas une opposition politique, mais seulement une crainte concernant l’accès à l’innovation des patients souffrant de maladies rares graves, invalidantes et sans alternative thérapeutique et qui, pardonnez-moi de le rappeler, n’ont pas le temps d’attendre ! Ma seule préoccupation est d’éviter tout risque de déport vis-à-vis de l’accès précoce.
Si je ne peux présumer l’option que retiendra le Sénat dans sa sagesse, j’émets un avis favorable sur les amendements identiques nos 289 rectifié et 256 rectifié et défavorable sur les amendements identiques nos 349 et 1035.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Mme la rapporteure a bien expliqué l’enjeu initial de cet article.
Imaginez un patient atteint d’une leucémie sans traitement disponible sur notre territoire à ce jour. Un traitement innovant arrive des États-Unis, mais il est encore en cours d’étude et loin d’obtenir une autorisation de mise sur le marché. L’accès précoce permettrait alors, à titre compassionnel, la prise en charge et la prescription de ce médicament.
Imaginons ensuite un traitement qui soit éprouvé, expérimenté, et qui bénéficie d’une autorisation de mise sur le marché, mais qui n’est pas encore disponible. La Haute Autorité de santé s’est prononcée et a déclaré qu’il s’agit d’un médicament très intéressant, qui va sauver des vies et qu’il faut prescrire en France. Jusqu’alors, il fallait attendre la fin des négociations entre le comité économique des produits de santé et l’industriel concerné pour faire bénéficier les malades de ce traitement innovant.
Avec l’adoption de cet article, et donc de l’accès direct, dès lors que le service médical rendu est suffisant – de type I, II ou III –, il doit être possible d’en faire bénéficier les patients avant la fin des négociations. Cela permettra de gagner des mois extrêmement précieux.
J’ai eu l’occasion d’autoriser la vente et le remboursement, cette année, d’un traitement très innovant et très prometteur contre la mucoviscidose. Avec le dispositif d’accès direct, on aurait encore pu gagner du temps. La France a été l’un des premiers pays à autoriser ce traitement, mais il aura tout de même fallu quelques mois de négociations. En votant cet article, les patients seront gagnants. J’imagine que nous sommes tous favorables à ce dispositif d’accès direct.
La discussion que nous avons eue avec nous-mêmes – cela peut arriver, madame la rapporteure, sur de tels sujets – portait sur la nécessité de corréler ou non accès direct et accès précoce. En gros, faut-il autoriser l’accès direct aux médicaments ayant déjà fait l’objet d’un accès précoce, alors qu’il s’agit de deux mécanismes différents ?
Nous étions tout d’abord favorables à la création d’un tel lien, mais le risque était grand de monter une usine à gaz et de mobiliser beaucoup d’énergie au sein des administrations de santé et donc de perdre en réactivité.
En outre, il faut avant tout éviter qu’un laboratoire préfère attendre l’accès direct pour commercialiser son médicament assez largement plutôt que tenter l’accès précoce.
Nous avons donc préféré jouer sur la désincitation financière afin de favoriser l’accès précoce et d’éviter que les laboratoires ne jouent cette dernière carte. Il s’agit alors d’un dispositif « gagnant-gagnant-gagnant ».
Il nous a donc semblé plus sage, à l’issue de cette réflexion, de supprimer toute notion de corrélation entre accès direct et accès précoce, ce qui va nous faire gagner du temps et de l’énergie.
L’esprit de l’amendement défendu par Mme la rapporteure est presque le même. Elle suggère toutefois que cette corrélation pourrait exister dans certaines situations et qu’il importe de le vérifier, ce qui risque donc de nous faire perdre du temps et de l’énergie.
Nous faisons un saut vers un dispositif qui n’existe pratiquement qu’en Allemagne. Il ne s’agit pas de déréguler, mais de se dire que les questions de prix, qui seront réglées à terme, ne doivent pas empêcher les patients d’accéder au traitement. Tout ce qui peut entraîner une perte de temps dans cette démarche me semble accessoire.
Je veux bien reconnaître que le Gouvernement a mené cette réflexion avec lui-même. Je tiens d’ailleurs à remercier les sénateurs qui ont partagé cette réflexion : comme nous, vous aviez identifié ce sujet. Toutefois, avant d’arriver à un équilibre qui nous permettrait de garder une sacro-sainte sensation de contrôle, nous aurons perdu trop de temps et ce sont les patients qui paieront, in fine.
Pour ces raisons, le Gouvernement vous appelle à adopter son amendement et l’amendement identique n° 349, et émet un avis défavorable sur les autres amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Que les choses soient bien claires : je suis favorable à l’accès direct. Ma seule préoccupation est l’intérêt des patients.
Toutefois, le risque de déport existe. Autrement, monsieur le ministre, vous ne vous seriez pas interrogé.
L’amendement de la commission vise à maintenir la corrélation entre l’accès précoce et l’accès direct pour les médicaments destinés à des patients atteints de maladies graves, rares ou invalidantes pour lesquelles il n’existe pas d’alternative thérapeutique.
Le dossier d’autorisation d’accès direct étant moins lourd, je ne voudrais pas que les laboratoires privilégient ce dispositif au détriment de l’accès précoce. Ce serait alors une réelle perte de temps, mais pour les patients !
Mme Émilienne Poumirol. Exactement !
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Dans cette affaire relativement complexe, nous devons choisir entre deux solutions : celle brillamment exposée par Mme le rapporteur et celle tout aussi brillamment exposée par M. le ministre.
Si nous suivons M. le ministre, il n’y aura plus de discussion ; si nous suivons Mme le rapporteur, la discussion pourra se poursuivre, ce qui me paraît d’autant plus important qu’elle évolue de jour en jour.
Je retire donc mon amendement en demandant à nos collègues de soutenir la position de notre rapporteure afin d’aller encore plus avant dans la discussion et de trouver la meilleure solution sur ces questions complexes, dans l’intérêt des malades.
M. Olivier Rietmann. Excellent !
Mme la présidente. L’amendement n° 349 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 1035.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 256 rectifié et 289 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 180, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Après le mot :
décidée
insérer les mots :
dans un délai de six semaines au plus
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Alors que le dispositif tend à permettre un accès rapide à l’innovation, il est important de garantir une rapidité de publication des actes réglementaires nécessaires.
Le présent amendement vise donc à prévoir un délai maximum concernant l’arrêté de prise en charge.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Dans la mesure où il s’agit d’une expérimentation en complément de l’accès précoce, nous veillerons à ce que la décision relative à la prise en charge au titre de l’accès direct intervienne dès que possible, afin de garantir l’effectivité du dispositif.
La question d’un accès rapide pour les patients reste du niveau réglementaire. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 181, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéas 9, 14, seconde phrase, et 26
Après le mot :
arrêté
insérer le mot :
conjoint
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, qui n’est pas uniquement rédactionnel.
Mme la présidente. L’amendement n° 1067 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Rétablir le III dans la rédaction suivante :
III. – La prise en charge directe d’une spécialité pharmaceutique prévue au I peut, au vu des exigences de qualité et de sécurité des soins mettant en œuvre cette spécialité, énoncées le cas échéant par la commission prévue à l’article L. 5123-3 du code de la santé publique, être assortie de conditions concernant la qualification ou la compétence des prescripteurs, l’environnement technique ou l’organisation de ces soins et d’un dispositif de suivi des patients traités. La prise en charge peut également être assortie de conditions particulières de prescription, de dispensation ou d’utilisation, notamment de durées de prise en charge, ou de délivrance lorsque cette spécialité est prescrite sur une ordonnance de dispensation conditionnelle mentionnée à l’article L. 5121-12-1-1 du même code.
La parole est à M. le ministre.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Favorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 259 rectifié, présenté par Mme Delmont-Koropoulis, MM. D. Laurent, Klinger et Burgoa, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Bascher, Longuet et Tabarot, est ainsi libellé :
Alinéa 29
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Cet amendement vise à supprimer la faculté qu’a le CEPS de fixer unilatéralement le prix d’un produit bénéficiant de l’accès direct, faute d’accord avec l’exploitant au bout de douze mois. Cette disposition a été introduite par amendement gouvernemental en séance à l’Assemblée nationale.
Néanmoins, elle contribuerait à biaiser la négociation de prix. Le CEPS a désormais intérêt à ne pas arriver à un accord sur le prix, puisqu’il prendra la décision finale.
Par ailleurs, c’est extrêmement dissuasif pour l’entreprise, qui pourrait se voir imposer unilatéralement un prix.
Une telle mesure, qui possède donc un caractère désincitatif pour les entreprises, risque de rendre le dispositif inopérant. Faute d’accord sur le prix, il semble préférable de conserver l’accord-cadre négocié entre le CEPS et les industriels et de proposer un mécanisme de médiation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise donc à revenir sur la disposition, introduite à l’Assemblée nationale, prévoyant la possibilité, en cas d’inscription au remboursement à l’issue de l’accès direct, de fixation du prix de manière unilatérale par le CEPS, faute d’accord dans un délai de dix mois.
Il ne semble pas pertinent de revenir sur ce dispositif subsidiaire, qui préserve tout de même la durée des négociations avec le CEPS.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Je retire cet amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L’amendement n° 259 rectifié est retiré.
L’amendement n° 348 rectifié, présenté par M. Savary, Mme Lassarade, MM. Bascher et Belin, Mmes Belrhiti et Berthet, M. J.B. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonne et Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Burgoa et Charon, Mmes Chauvin et L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Demas et Dumont, M. Duplomb, Mme Férat, MM. B. Fournier, Genet et Gremillet, Mme Joseph, MM. Karoutchi, Klinger, D. Laurent, Lefèvre et Longuet, Mme Malet, MM. Milon et Pellevat, Mmes Puissat et Raimond-Pavero et MM. Sido, Sol, Somon, Tabarot et J.P. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 30
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. La faculté pour le CEPS de fixer unilatéralement le prix faute d’un accord avec l’exploitant au bout de dix mois a été introduite par voie d’amendement. Il ne faudrait pas que la décision devienne unilatérale, le CEPS ayant désormais tout intérêt à ce que la négociation n’aboutisse pas. Cela irait à l’encontre de la discussion avec les entreprises et pourrait dissuader ces dernières de se développer en France.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement est semblable au précédent. Au surplus, il est mal référencé.
La commission en demande donc le retrait ; à défaut, elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. René-Paul Savary. Le délai prévu est-il de dix mois ou de douze mois ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. À partir de dix mois !
M. René-Paul Savary. Je retire donc cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 348 rectifié est retiré.
L’amendement n° 777, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 51, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, notamment sur l’amélioration du service médical rendu
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Toutes nos interventions dans l’hémicycle ont montré notre attachement au fait que l’accès précoce aux médicaments doit se faire au bénéfice des patients, et seulement au bénéfice des patients.
Or, selon une étude, entre 2007 et 2017, 268 médicaments ont été autorisés sur l’avis de l’Agence européenne des médicament, dont 39 au terme d’une procédure accélérée. Seuls 31 % de ces médicaments avaient une valeur thérapeutique élevée.
Dans ce contexte, la mise en œuvre d’un tel mécanisme pourrait contribuer à ce que la sécurité sociale solvabilise des médicaments qui n’amélioreraient pas réellement le service rendu. C’est un point auquel nous sommes, je crois, toutes et tous attachés.
Par cet amendement, il s’agit donc de préciser à l’article 36 que l’évaluation intègre la dimension du service médical rendu. En effet, il convient que les procédures visant à réduire les délais de mise sur le marché des produits de santé garantissent une réelle amélioration du service médical rendu à l’ensemble de la population et sur l’ensemble du territoire national.
Vous me répondrez que c’est une évidence. Pourtant, il est parfois nécessaire de rappeler certaines évidences dans la loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Si je comprends l’idée ayant présidé à la rédaction de cet amendement, celui-ci prête à confusion. En effet, il s’agit d’une demande de rapport, notamment sur l’« amélioration du service médical rendu ». Or une telle appellation, propre aux médicaments, est déjà déterminée au moment où le dossier du médicament est déposé.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Nous sommes tous mobilisés en faveur d’une amélioration thérapeutique. Il convient donc de veiller à ce que cette volonté n’ouvre pas la porte à des abus, notamment en matière de prix, par un certain nombre de laboratoires.
Toutefois, à partir du moment où Mme la rapporteure me dit que notre amendement prête à confusion et va à l’encontre de notre souhait, je le retire.
Mme la présidente. L’amendement n° 777 est retiré.
Je mets aux voix l’article 36, modifié.
(L’article 36 est adopté.)
Après l’article 36
Mme la présidente. L’amendement n° 447 rectifié bis, présenté par MM. Milon et D. Laurent, Mme L. Darcos, MM. Chatillon, Karoutchi, Bouchet, Charon, Daubresse, B. Fournier, Klinger, Bonne, Belin et J.B. Blanc, Mme Bourrat, MM. Brisson, Burgoa, Darnaud, Genet, Laménie et Longuet, Mmes Malet, Puissat et Ventalon et MM. J.P. Vogel, Sol, Gremillet et Sido, est ainsi libellé :
Après l’article 36
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 165-1-5 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 165-1-5-… ainsi rédigé :
« Art. L. 165-1-5-…. - I. – Un produit mentionné aux articles L. 5211-1 ou L. 5221-1 du code de la santé publique, dont le caractère innovant justifie un usage préliminaire au sein des établissements de santé mentionnés aux a, b, c et d de l’article L. 162-22-6 du présent code, peut faire l’objet d’un financement au titre de la dotation prévue à l’article L. 162-22-13. Le produit doit disposer d’un marquage « CE » et ne fait l’objet d’aucune autre prise en charge au titre des articles L. 165-1, L. 165-1-1- et L. 165-1-5.
« II. – Les établissements bénéficiant du financement mentionné au I répondent aux critères d’encadrement fixés par décret en application de l’article L. 1151-1 du code de la santé publique.
« III. – Le financement mentionné au I est conditionné à la collecte et au partage par l’établissement, de données sur l’utilisation du dispositif médical et de l’acte associé, ainsi que sur leur impact en vie réelle. Ces données peuvent être utilisées dans le cadre d’une procédure d’inscription du produit sur la liste mentionnée à l’article L. 165-1 du présent code ainsi que, le cas échéant, dans le cadre de la tarification de l’acte associé à son utilisation, lorsque la demande d’inscription est déposée dans un délai de cinq ans à compter de l’octroi du financement prévu au I. »
II. – Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État.
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Afin de favoriser l’émergence, l’adoption et l’utilisation précoce d’innovations pionnières, il est ainsi proposé la mise en place d’un budget ad hoc, décentralisé et dédié aux équipes pionnières. Ce budget serait strictement fléché vers des équipes hospitalières pionnières de centres de référence, et octroyé en contrepartie d’une collecte et du partage des données préliminaires quant à l’utilisation du dispositif médical innovant et de l’acte qui y est associé.
L’accès à un dispositif médical innovant pour un patient et un professionnel de santé est théoriquement possible dès que le marquage CE est obtenu. Mais sa prise en charge par l’assurance maladie n’intervient toutefois qu’après évaluation par la Haute Autorité de santé (HAS) et inscription sur la liste des produits et prestations remboursables (LPPR), ou financement dans le cadre d’un groupe homogène de séjours (GHS).
Or, d’une part, les délais d’évaluation et d’inscription ne sont pas compatibles avec l’accès précoce aux innovations pionnières. D’autre part, les méthodologies d’évaluation sont difficiles à satisfaire à un stade d’usage précoce d’un dispositif.
La trop forte centralisation et le contrôle a priori de l’accès aux budgets limitent par ailleurs fortement la rapidité d’accès au financement et freinent considérablement l’émergence de nouveaux usages positifs des innovations.
De même, il est également très complexe pour un établissement hospitalier et ses équipes pionnières de financer de manière ad hoc ces innovations pour permettre leur usage.
Ces constats traduisent l’absence, aujourd’hui, en France, d’un modèle d’accès à l’innovation précoce, c’est-à-dire en phase de diffusion pionnière, en milieu hospitalier. Cet amendement vise à remédier à une telle situation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à permettre un nouveau circuit de financement de l’innovation, par le biais des dotations dédiées aux missions d’intérêt général (MIG).
Une telle idée pourrait sembler pertinente. Toutefois, elle pose deux problèmes. Tout d’abord, elle ouvre un nouveau circuit parallèle du financement des médicaments innovants, qui risque de nuire à la lisibilité et à la cohérence de l’ensemble du dispositif. Ensuite, les crédits MIG sont limités et permettent d’assurer de nombreuses missions, notamment d’enseignement et de recherche, mais aussi de vigilance et de veille épidémiologique : veille sanitaire, prévention et gestion des risques, intervention d’équipes pluridisciplinaires et coordination pour certaines pathologies spécifiques.
Ces enveloppes sont donc particulièrement contraintes. Elles ne me paraissent pas constituer le bon canal de financement de l’innovation. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, je me verrai contrainte d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 447 rectifié bis est-il maintenu, monsieur Milon ?
M. Alain Milon. Comme le dit mon collègue René-Paul Savary, il semblerait que je nuise à la cohérence. Mais j’ai l’intention de nuire jusqu’au bout !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 447 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
5
Souhaits de bienvenue à une délégation étrangère
Mme la présidente. J’ai le plaisir de saluer, dans la tribune d’honneur du Sénat, une délégation conduite par Mme Sheikh Hasina, Première ministre du Bangladesh. Elle est accompagnée par nos collègues Mathieu Darnaud, président du groupe d’amitié France-Asie du Sud-Est, et Jérôme Durain, président délégué pour le Bangladesh. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le ministre des solidarités et de la santé, se lèvent.)
Son Excellence Sheikh Hasina est en visite en France pour participer au Forum de la Paix, qui se tiendra à la fin de cette semaine à Paris.
Elle échangera cet après-midi avec les sénateurs membres du groupe d’amitié France-Asie du Sud-Est.
Le Sénat entretient d’excellentes relations avec le Bangladesh et avec le Parlement bangladais en particulier. Une délégation du groupe d’amitié s’y est rendue en 2019. Nos collègues avaient été reçus par la présidente du Parlement et le ministre des affaires étrangères, Son Excellence AK Momen, que nous avons accueilli au Sénat la même année pour un Forum économique France-Bangladesh.
Le Bangladesh fête cette année le cinquantième anniversaire de son indépendance, mais aussi le centenaire de la naissance du « Père de la Nation, Bangabandhu », père de la Première ministre.
Les relations entre la France et le Bangladesh sont anciennes ; elles se sont intensifiées récemment avec, en particulier, le développement de coopérations dans le domaine de la défense et de la lutte contre le terrorisme.
Mes chers collègues, en votre nom à tous, permettez-moi de souhaiter à Mme la Première ministre et à sa délégation la plus cordiale bienvenue, ainsi qu’un excellent et fructueux séjour. (Applaudissements.)
6
Financement de la sécurité sociale pour 2022
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2022.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 36 bis.
Article 36 bis (nouveau)
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport visant à présenter l’avancement de la révision des actes hors nomenclature et de leur financement. Ce rapport s’attache notamment à examiner les possibilités de création d’une enveloppe consacrée à la prise en charge des actes de médecine génomique, conditionnée à la réalisation d’un recueil prospectif de données d’usage.
Mme la présidente. L’amendement n° 183, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l’assurance maladie. Le présent article prévoit qu’un rapport est remis au Parlement sur l’avancement de la réforme des actes hors nomenclature et de leur financement, afin notamment d’étudier les possibilités de créer une enveloppe consacrée à la prise en charge des actes de médecine génomique.
La commission alerte depuis plusieurs années sur la nécessité de réviser le référentiel des actes innovants hors nomenclature (RIHN), afin de prévoir une meilleure prise en charge de certains actes comme les tests compagnons.
Toutefois, conformément à la position habituelle de la commission sur les demandes de rapport, il s’agit, par cet amendement, de supprimer l’article.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Ni pour ni contre, bien au contraire !
Nous devons publier un rapport sur cette question, nous nous y sommes d’ailleurs engagés. À l’Assemblée nationale, les députés avaient proposé que le rapport soit remis au Parlement, et le Gouvernement ne s’y était pas opposé.
Sur cette question, la Gouvernement s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 36 bis est supprimé.
Article 37
I. – L’article L. 5125-23-2 du code de la santé publique est ainsi rétabli :
« Art. L. 5125-23-2. – Par dérogation au I de l’article L. 5125-23, le pharmacien peut délivrer, par substitution au médicament biologique prescrit, un médicament biologique similaire lorsque les conditions suivantes sont remplies :
« 1° Le médicament biologique similaire délivré appartient au même groupe biologique similaire, au sens du b du 15° de l’article L. 5121-1, que le médicament biologique prescrit ;
« 2° Ce groupe biologique similaire figure sur une liste, accompagnée le cas échéant de conditions de substitution et d’information du prescripteur et du patient à l’occasion de cette substitution de nature à assurer la continuité du traitement avec le même médicament, fixée par un arrêté des ministres de la santé et de la sécurité sociale pris après avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ;
« 3° Lorsqu’elles existent, les conditions mentionnées au 2° peuvent être respectées ;
« 4° Le prescripteur n’a pas exclu la possibilité de cette substitution par une mention expresse et justifiée portée sur l’ordonnance, tenant à la situation médicale du patient ;
« 5° Si le médicament prescrit figure sur la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, cette substitution s’effectue dans les conditions prévues à l’article L. 162-16 du même code.
« Lorsque le pharmacien délivre par substitution au médicament biologique prescrit un médicament biologique similaire du même groupe, il inscrit le nom du médicament qu’il a délivré sur l’ordonnance et informe le prescripteur et le patient de cette substitution.
« Lorsqu’un grand conditionnement est disponible pour la forme biologique similaire du médicament et que le traitement en est prescrit pour une durée d’au moins trois mois, y compris par renouvellement multiple d’un traitement mensuel, le pharmacien délivre un grand conditionnement. »
II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le V de l’article L. 162-16 est ainsi rétabli :
« V. – Lorsque le pharmacien d’officine délivre, en application de l’article L. 5125-23-2 du code de la santé publique, une spécialité figurant sur la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 162-17 du présent code autre que celle qui a été prescrite, cette substitution ne doit pas entraîner une dépense supplémentaire pour l’assurance maladie supérieure à la dépense qu’aurait entraînée la délivrance du médicament biologique similaire le plus onéreux du même groupe. » ;
2° Le 5° de l’article L. 162-16-1 est complété par les mots : « et biologiques similaires » ;
3° Le premier alinéa de l’article L. 162-16-7 est ainsi modifié :
a) (nouveau) Après la seconde occurrence du mot : « pharmaciens », sont insérés les mots : « , d’une part, » ;
b) Sont ajoutés les mots : « et, d’autre part, de médicaments biologiques similaires figurant dans un groupe biologique similaire, au sens du b du 15° de l’article L. 5121-1 du code de la santé publique, pour lequel la substitution est autorisée en application de l’article L. 5125-23-2 du même code ».
III (nouveau). – Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport identifiant la liste des dispositifs médicaux en nom de marque ayant des caractéristiques techniques et cliniques similaires et qui peuvent faire l’objet d’une substitution.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je souhaite faire un point en amont de la discussion de l’article 37, qui porte sur les biosimilaires. Il s’agit d’un point de méthode, puisque cet article constitue un exemple supplémentaire des conditions d’examen de ce texte.
Nous connaissons les dispositions sur les biosimilaires introduites par l’article 37, puisqu’elles rétablissent des dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, qui n’avaient jamais été mises en application, faute de parution du décret nécessaire.
Le Gouvernement nous a demandé, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, de les abroger, mais nous nous y sommes alors opposés. Si, sur le fond, la commission considère ce rétablissement comme bienvenu, dans la mesure où les biosimilaires apportent des garanties d’efficacité comparables aux médicaments biologiques de référence et qu’ils représentent un potentiel en termes tant d’approvisionnement que d’économies pour l’assurance maladie, j’ai pourtant un regret, monsieur le ministre.
Le Gouvernement se réfère, dans l’exposé des motifs de cet article, comme dans l’étude d’impact de ce PLFSS, à de nouvelles recommandations de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) qui justifieraient cet article. Où sont ces recommandations ? Nous avons demandé au Gouvernement et à l’ANSM l’actualisation du rapport de 2016, qui ne nous a pas été transmise. J’estime que cela nuit à la sincérité de l’examen de ces dispositions.
Comment demander au Parlement d’abroger des dispositions, pour les rétablir deux ans après, sans étayer davantage sa motivation ? Si les échanges informels que j’ai pu avoir avec l’ANSM sont tout à fait rassurants sur les positions de l’agence et l’encadrement du dispositif et nous permettent de voter cet article, je déplore une nouvelle fois le traitement réservé au Parlement.
M. Laurent Burgoa. Très bien !
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 53 rectifié est présenté par Mme Delmont-Koropoulis, M. Bascher, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Burgoa, Gremillet, Klinger, D. Laurent, Longuet et Tabarot.
L’amendement n° 356 rectifié bis est présenté par M. Savary, Mme Lassarade, MM. Babary et Belin, Mmes Belrhiti et Berthet, MM. J.B. Blanc, Bonne et Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Brisson et Charon, Mmes Chauvin et L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Demas et Deseyne, M. Détraigne, Mme Dumont, M. Duplomb, Mme Férat, MM. B. Fournier et Genet, Mme Joseph, MM. Karoutchi et Lefèvre, Mme Malet, MM. Milon, Pellevat, Piednoir et Pointereau, Mme Puissat et MM. Sido, Sol, Somon et J.P. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Après le mot :
liste
insérer les mots :
, identique à la liste des molécules substituables par le prescripteur
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour présenter l’amendement n° 53 rectifié.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Depuis l’arrivée du premier biosimilaire sur le marché français en 2006, le recours à ces médicaments, équivalents aux médicaments biologiques, mais, en moyenne, 30 % moins chers que leurs médicaments de référence, reste limité. Si la pénétration des biosimilaires à l’hôpital est estimée à 69 % en 2020, en médecine de ville, le taux de pénétration de ces médicaments n’est que de 23 %, bien loin de l’objectif de 80 % que le Gouvernement souhaitait atteindre d’ici 2022.
Le présent amendement prévoit donc que la liste des biosimilaires substituables par les pharmaciens soit identique à celle des biosimilaires substituables par les médecins prescripteurs.
Cette création logique d’un binôme prescripteurs-pharmaciens pour un suivi coordonné ne peut qu’améliorer l’accompagnement et l’information du patient. C’est une mesure de bon sens.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° 356 rectifié bis.
M. René-Paul Savary. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Les recommandations de l’ANSM ne vont pas dans ce sens.
Par ailleurs, le médecin prescripteur dispose d’une marge d’appréciation et d’adaptation à la situation du patient plus fine que celle du pharmacien au moment de la dispensation.
Je suis donc défavorable à ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Si le rapport de l’ANSM n’a pas été transmis au Parlement, c’est parce que sa dernière mouture n’a pas été finalisée. Néanmoins, je suis certain que l’ANSM, dans le cadre des auditions que vous avez menées, vous en a présenté les grandes lignes. En effet, tel a été le cas pour les professionnels de santé prescripteurs, pour les pharmaciens et pour les représentants des usagers, qui se sont montrés favorables à ses conclusions.
Pour ce qui concerne la méthode, nous n’avons pas souhaité attendre que le rapport soit parfaitement finalisé pour proposer ce dispositif, qui est attendu.
En pratique, la substitution par un biosimilaire sera possible, après avis de l’ANSM, sur décision du ministre, avec acceptation des patients – nous ne sommes donc pas dans la logique adoptée pour les génériques –, et accord des médecins prescripteurs. Par ailleurs, chaque molécule devra faire l’objet d’une concertation avec les patients, les médecins, les pharmaciens et les industriels. C’est une nouvelle voie de passage !
À l’heure actuelle, les conditions sont meilleures qu’il y a deux ans. À cet égard, je me souviens que le premier article relatif aux biosimilaires remonte à 2013. Néanmoins, bon an, mal an, nous progressons ! Avec ce texte, l’étape est tout de même importante.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements identiques, pour les mêmes raisons que celles qui ont été évoquées par Mme la rapporteure.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je vais retirer cet amendement, compte tenu des explications données.
L’important, c’est d’ancrer dans les esprits que la possibilité de substitution existe. Elle entraîne des économies non négligeables. Nous ne pourrons pas éternellement financer à crédit notre modèle social. Il faut rechercher des sources d’efficience. Les biosimilaires pourraient en être une et engendrer un certain nombre d’économies, tout en protégeant nos malades.
Mme la présidente. L’amendement n° 356 rectifié bis est retiré.
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour explication de vote.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Permettez-moi, madame la présidente, mes chers collègues, d’argumenter ma position.
Les molécules concernées par l’interchangeabilité et figurant sur la liste du médecin sont connues de longue date. Leur structure est beaucoup moins complexe que celle d’autres biosimilaires, qui pourraient peut-être entraîner de mauvais résultats par rapport aux molécules d’origine. Je pense notamment aux anticorps monoclonaux, dont la structure dans l’espace peut être différente.
Dans le cursus d’études des docteurs en pharmacie, la biochimie occupe une place au moins aussi importante que dans celui des médecins. Ils sont donc largement qualifiés pour assurer l’accompagnement et le suivi de leurs patients.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 52 rectifié est présenté par Mme Delmont-Koropoulis, M. Bascher, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Burgoa, Gremillet, Klinger, D. Laurent, Longuet et Tabarot.
L’amendement n° 898 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre et MM. Fialaire, Gold, Guérini, Requier et Roux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 4
1° Supprimer les mots :
avec le même médicament
2° Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Cet arrêté prévoit également le calendrier d’intégration de groupes biologiques similaires additionnels sur la liste susvisée, échelonné sur une période de deux ans à compter de la publication de la présente loi. Il est publié au plus tard le 1er février 2022.
II. – Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour présenter l’amendement n° 52 rectifié.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Cet amendement s’inscrit dans la lignée de mon amendement précédent.
Il est nécessaire de lever les freins potentiels, afin de permettre une mise en œuvre rapide, effective et ambitieuse de ce dispositif. Le présent amendement vise donc à fixer par arrêté un échéancier précis, sur une période de deux ans, pour faire évoluer la liste des groupes biologiques similaires substituables, sur recommandation de l’ANSM. Cela permettra de tirer le plein potentiel de cette mesure, et d’apporter la lisibilité et la prévisibilité nécessaires aux acteurs, professionnels de santé et patients.
L’application de ces mesures assurera ainsi le développement rapide de la pénétration des médicaments biosimilaires sur le marché de ville, en cohérence avec les objectifs déterminés par la stratégie nationale de santé.
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 898 rectifié.
Mme Véronique Guillotin. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Si l’intention d’un renforcement de la prévisibilité pour les industriels est partagée, il ne paraît pas pertinent de prévoir une publication par arrêté d’un calendrier, laquelle, par ailleurs, n’emporterait pas nécessairement de valeur contraignante.
Je demande donc le retrait de ces amendements. À défaut, je me verrai contrainte d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 52 rectifié est-il maintenu, madame Annie Delmont-Koropoulis ?
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 898 rectifié est-il maintenu, madame Guillotin ?
Mme Véronique Guillotin. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. Les amendements identiques nos 52 rectifié et 898 rectifié sont retirés.
L’amendement n° 184, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le mot :
arrêté
insérer le mot :
conjoint
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 927 rectifié bis, présenté par Mme Poumirol, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou, Michau, Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
l’avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé est pris après consultation des associations de patients concernées ; l’avis et les critères retenus pour l’inclusion sur la liste sont publiés sur le site internet de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Nous soutenons la mesure présentée dans ce PLFSS visant à substituer et à promouvoir les médicaments biosimilaires. Comme l’a rappelé M. le ministre, nous avions évoqué ce sujet lors de l’examen du PLFSS pour 2013.
Néanmoins, le nouveau dispositif de substitution des médicaments biosimilaires en pharmacie d’officine prévoit de circonscrire la possibilité de cette substitution aux seules molécules inscrites sur une liste fixée par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale et établie après avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.
Eu égard à son importance, à son impact sur la santé des patients et les parcours de soins, cet avis devrait être encadré dans son contenu comme dans ses modalités de publication. Il est ainsi essentiel que l’avis rendu par l’ANSM soit pris après consultation des associations de patients concernées. Les critères retenus par l’ANSM pour déterminer les groupes biologiques substituables doivent être publics, afin de pouvoir être connus des patients, de façon à garantir leur confiance comme la transparence des arbitrages rendus.
Avec 69 % de pénétration à l’hôpital et seulement 23 % en ville, le marché des médicaments biosimilaires est encore loin de l’objectif, fixé dans la stratégie nationale de santé, d’un recours aux biosimilaires à hauteur de 80 % en 2022.
Je tiens à témoigner devant vous de l’importance de la transparence et de la pédagogie dans la substitution des médicaments. Il en avait été de même au moment du développement des médicaments génériques. Ces derniers ne représentent toujours que 40 % du marché pharmaceutique remboursable en ville. Cette proportion s’élève à trois boîtes sur quatre dans d’autres pays européens comme l’Allemagne ou le Royaume-Uni.
Il y a encore un vrai effort de promotion, d’explication et de pédagogie à faire tant auprès des médecins que des pharmaciens et des patients.
Il est indispensable de renforcer le rôle des patients, en leur permettant d’être consultés et de prendre connaissance des critères retenus pour déterminer les groupes biologiques similaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission est défavorable à cet amendement.
En effet, l’ANSM ne prend pas ses décisions à la légère, puisqu’elle doit étayer ses décisions par une expertise scientifique.
Si la consultation des patients répond à un souci de meilleure participation et de meilleure acceptabilité, il ne me semble cependant pas souhaitable qu’elle soit inscrite dans la loi. Ce sujet relève d’une discussion entre le patient et le médecin, ainsi qu’entre le patient et le pharmacien.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 927 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 287 rectifié, présenté par MM. Henno, Moga et Capo-Canellas, Mme Létard, M. Le Nay, Mme Dindar, MM. Janssens, Détraigne, Canévet, Duffourg et J.M. Arnaud, Mmes Jacquemet et Billon et M. Mizzon, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Compléter cet alinéa par les mots :
et le patient ne s’y est pas opposé
II. – Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le médicament biologique de référence prescrit ne l’a pas été pour le traitement d’une pathologie lourde dont la liste est fixée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et n’est pas inclus dans le dispositif d’intéressement prévu par la convention prévue à l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale.
III. – Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Un médicament biologique similaire ne peut pas être substitué à un autre médicament biosimilaire. »
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Cette disposition autorise la substitution par le pharmacien en initiation de traitement d’un médicament biologique par son biosimilaire. Cette substitution n’est possible que lorsque le prescripteur n’en a pas exclu la possibilité, mais le patient doit également pouvoir s’y opposer.
Par ailleurs, la possibilité de substitution ne doit pas être ouverte dans le cas de pathologies lourdes et ne doit pas concerner les substances actives prévues dans le cadre de l’avenant 9 à la convention médicale parue au Journal officiel du 25 septembre 2021.
À ce jour, cela concerne les six substances actives suivantes : étanercept, adalimumab, follitropine alfa, énoxaparine, tériparatide et insuline asparte.
Enfin, un médicament biologique similaire ne peut pas être substitué à un autre médicament biosimilaire, car cela augmente fortement l’effet nocebo, à savoir, notamment, l’absence de confiance et la moindre observance.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. En travaillant sur cet article, nous nous sommes posé la question de savoir s’il fallait ou non restreindre la possibilité de substitution à certaines pathologies lourdes ou, au contraire, exclure les maladies graves.
Nous en sommes arrivés à la conclusion suivante. Il ne semble pas souhaitable, a priori, d’exclure certaines pathologies. Là encore, c’est bien la recommandation scientifique de l’ANSM qui doit primer : ses critères scientifiques doivent être notre boussole. C’est un gage de crédibilité.
Quant à la proposition de rendre impossible la substitution d’un biosimilaire à un autre biosimilaire, elle ne paraît pas opportune. Ne permettre la substitution d’un biosimilaire qu’au médicament biologique de référence n’est pas justifié. En effet, la logique du biosimilaire et des groupes biosimilaires est d’avoir des produits présentant une efficacité réputée identique et, donc, substituables.
Par conséquent, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, je me verrai contrainte d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je comprends bien la prudence de Mme le rapporteur. Elle souhaite que les patients aient confiance dans les biosimilaires, afin de permettre leur introduction progressive sur le marché.
Il faut bien en prendre conscience, c’est une voie de substitution non négligeable, car économiquement intéressante. Toutefois, comme pour les génériques, elle suppose l’adhésion des patients. Dans un premier temps, il est donc souhaitable de leur demander leur avis et de prendre toutes les précautions nécessaires.
On peut faire confiance à l’ANSM – j’ai l’honneur de représenter le Sénat au conseil d’administration de cette agence –, pour prendre les avis aussi bien des patients que des spécialistes sur les conditions dans lesquelles ces molécules pourraient être mises à disposition des patients.
Pour autant, nous devons être incitatifs ! Les biosimilaires peuvent représenter une économie majeure. Il vaut mieux économiser sur le prix des médicaments plutôt que dans d’autres domaines, comme on le fait trop fréquemment.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteur. Cet article est important, puisqu’il permet la substitution de médicaments biologiques par un biosimilaire. Selon moi, c’est un premier pas. René-Paul Savary a raison, c’est une source d’économie importante pour l’assurance maladie. Toutefois, en termes d’acceptation par les patients et de prise en main du dispositif par les médecins, il convient de se laisser une année. Nous en reparlerons, du moins je l’espère, lors de l’examen du PLFSS pour 2023 – M. le ministre acquiesce, ce qui est une bonne chose…
Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour explication de vote.
Mme Chantal Deseyne. J’avoue que j’ai un peu de mal à comprendre ! Moi, quand je vais chez le médecin, ce n’est pas pour rédiger l’ordonnance ! Si le médecin me prescrit un produit et que le pharmacien me propose de le remplacer par un biosimilaire, cela ne me pose aucun problème, parce que je fais confiance aux professionnels de santé. (Mme Annie Delmont-Koropoulis applaudit.)
Mme la présidente. L’amendement n° 287 rectifié est-il maintenu, monsieur Henno ?
M. Olivier Henno. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 287 rectifié est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 453 rectifié bis est présenté par MM. Milon et D. Laurent, Mme L. Darcos, MM. Chatillon, Karoutchi, Bouchet, Charon, Daubresse, B. Fournier, Klinger, Bonne, Belin et J.B. Blanc, Mme Bourrat, MM. Brisson, Burgoa, Darnaud, Genet, Laménie et Longuet, Mmes Malet, Puissat et Ventalon et MM. J.P. Vogel, Gremillet et Sido.
L’amendement n° 688 est présenté par M. Lévrier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° La substitution est réalisée en initiation de traitement ou afin de permettre la continuité d’un traitement déjà initié avec le même médicament biologique similaire.
La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 453 rectifié bis.
M. Alain Milon. Cela a déjà été dit, mais il n’est pas inutile de le répéter : l’arrivée progressive de médicaments biosimilaires pourrait engendrer d’importantes économies pour notre système de santé. Les enjeux sont importants et les travaux sur ce sujet doivent s’inscrire dans un climat de confiance.
Les médicaments biosimilaires sont non pas identiques, mais équivalents aux médicaments biologiques de référence ; les changements de traitement ne sont donc pas sans conséquence pour les personnes malades.
Cet amendement vise à limiter la faculté accordée au pharmacien de substituer à un médicament biologique un médicament biosimilaire aux seules situations d’initiation de traitement, conformément aux premières dispositions en la matière prévues dans la LFSS pour 2014.
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, pour présenter l’amendement n° 688.
M. Martin Lévrier. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cette question s’est bel et bien posée lorsqu’il s’est agi d’analyser cet article.
Mais il apparaît que cette limitation, qui était prévue – le sénateur Milon vient de le rappeler – dans les dispositions abrogées de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, n’est plus pertinente aujourd’hui, au regard des recommandations de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.
Pour cette raison, mes chers collègues, je demande le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Il est proposé de limiter la possibilité de substitution aux situations d’initiation de traitement.
Or, imaginons que vous prescriviez de l’insuline à un patient diabétique. Si nous décidons que l’on ne peut délivrer un biosimilaire qu’à l’initiation du traitement, cela signifie que, faute de l’avoir fait au départ, on ne pourra jamais substituer, même si le malade l’est depuis vingt ans ! Cette limitation peut même s’avérer dommageable pour le patient…
Tout en comprenant l’esprit de ces amendements, je demande à leurs auteurs de bien vouloir les retirer.
Mme la présidente. Monsieur Lévrier, l’amendement n° 688 est-il maintenu ?
M. Martin Lévrier. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 688 est retiré.
Monsieur Milon, l’amendement n° 453 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Alain Milon. Par souci de cohérence, je le retire également.
Mme la présidente. L’amendement n° 453 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 185, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 16
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° La première phrase du même article L. 162-16-7 est ainsi modifié :
…) Après les références : « L. 162-16-1 » et « L. 162-16 », sont insérés les mots : « du présent code » ;
…) Après la référence : « L. 861-1 », les mots : « du présent code » sont supprimés.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination rédactionnelle, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 186, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’alinéa 17 de l’article 37 prévoit la remise d’un rapport identifiant la liste des dispositifs médicaux en nom de marque ayant des caractéristiques techniques et cliniques similaires.
Conformément à la position constante adoptée, en la matière, par la commission des affaires sociales, je vous propose, mes chers collègues, de supprimer cet alinéa.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. De nouveau, « ni pour ni contre, bien au contraire », madame la présidente ! (Sourires.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 37, modifié.
(L’article 37 est adopté.)
Article 38
Le titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa du I de l’article L. 162-16-4 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle peut également tenir compte de la sécurité d’approvisionnement du marché français que garantit l’implantation des sites de production. » ;
2° Le dernier alinéa du I de l’article L. 165-2 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les produits ou prestations inscrits sous forme de nom de marque ou de nom commercial, la fixation de ce tarif peut également tenir compte de la sécurité d’approvisionnement du marché français que garantit l’implantation des sites de production. »
Mme la présidente. L’amendement n° 838 rectifié bis, présenté par Mmes Poumirol et Bonnefoy, M. Bourgi, Mme Conway-Mouret, MM. Leconte, Montaugé et Tissot, Mme Briquet, M. Gillé et Mme Le Houerou, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet article prévoit de valoriser les relocalisations en France et en Europe par des prix plus élevés pour les produits de santé issus des industries concernées. Nous partageons l’ambition du Gouvernement de relocaliser en France la production, le conditionnement et la distribution des médicaments – c’est le cas, me semble-t-il, sur toutes les travées.
Mais le dispositif proposé dans ce texte n’est à mon sens pas satisfaisant. Il apparaît davantage comme un symbole que comme une mesure efficace.
Plusieurs points méritent d’être abordés.
Tout d’abord, il nous semble fortement dommageable que l’assurance maladie, dont le déficit est toujours considérable et promis à le rester, soit ainsi mise à contribution pour financer une politique industrielle. D’autres outils plus pertinents existent à cet effet, comme le crédit d’impôt recherche.
Le prix des médicaments supporté par le budget de l’assurance maladie, ensuite, ne saurait tenir lieu d’incitation appropriée pour régler les défaillances de la politique industrielle, notamment celles qui sont liées aux pénuries et ruptures de stock.
Par ailleurs, cette mesure introduit dans le droit commun une disposition figurant déjà dans l’accord-cadre signé en mars dernier entre le comité économique des produits de santé (CEPS) et le syndicat professionnel Les Entreprises du médicament (LEEM), qui court jusqu’en 2024.
Elle sanctuarise donc inutilement une mesure qui a été pensée dans l’urgence de la crise sanitaire, en réponse aux nombreux dysfonctionnements des chaînes d’approvisionnement de médicaments essentiels provoqués par la hausse de la demande mondiale. Ce dispositif n’a encore à ce jour fait aucune preuve de son efficacité.
Enfin, cet article 38 laisse les contribuables sans aucun garde-fou quant aux critères qui seraient retenus pour analyser ce que signifie « l’implantation des sites de production » et ne dit pas qui serait chargé de produire une telle analyse. Cette imprécision nous semble particulièrement problématique compte tenu de l’absence de transparence qui caractérise la détermination des prix des médicaments.
Pour toutes ces raisons, je demande la suppression de cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable sur cet amendement contraire à la position de la commission, madame la présidente.
La prise en compte de critères relatifs à l’empreinte industrielle dans la fixation du prix du médicament est une préoccupation récurrente du Sénat. Je me réjouis, monsieur le ministre, qu’après avoir reçu défavorablement, dans un passé récent, une initiative de notre assemblée en ce sens vous vous saisissiez à votre tour de cette idée.
Vous l’aurez compris, nous sommes donc défavorables à la suppression de cet article ; il s’agit maintenant d’en examiner la rédaction.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. C’est là un très bel article, vraiment fondamental, du PLFSS pour 2022 ! La France est le premier pays européen à s’engager dans cette voie ; j’en ai d’ailleurs parlé avec mes homologues européens, qui estiment qu’il s’agit d’une bonne mesure.
Nous voulons garantir la sécurité d’approvisionnement du marché français en médicaments ; nous nous donnons les moyens de tenir compte, dans les négociations de prix, de la capacité des laboratoires à approvisionner correctement le marché français – entendez par là une production sinon française, du moins implantée pas très loin de chez nous…
Cette mesure participe de notre volonté de restaurer notre souveraineté en matière de fabrication des médicaments et des produits de santé. Elle n’emporte aucune malice ni ne s’assortit d’aucun codicille rédigé en petits caractères. Je vous invite vraiment, madame la sénatrice, à examiner cet article, dans son principe comme dans ses effets.
Je ne désespère pas, madame la présidente, d’un vote conforme – pourquoi pas ? – sur cet article 38.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 838 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 930 rectifié bis, présenté par Mme Poumirol, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou, Michau, Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À la seconde phrase du premier alinéa du I de l’article L. 162-16-4, après la première occurrence du mot : « médicaments », sont insérés les mots : « , des investissements publics en recherche et développement biomédicale » ;
II. – Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le III du même article L. 162-16-4 est complété par les mots : « tenant compte des investissements publics en recherche et développement biomédicale » ;
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement vise à rendre publics les investissements en recherche et développement réalisés par l’État et à les prendre en compte – il s’agit d’une demande récurrente – dans la définition du prix des médicaments.
La course au vaccin contre la covid-19 a révélé avec une ampleur sans précédent le rôle joué depuis toujours par la puissance publique dans le financement de la recherche et développement en santé.
L’État contribue en effet très largement, de manière directe ou indirecte, au développement des médicaments mis sur le marché, par le financement d’un système d’enseignement supérieur d’excellence formant des scientifiques et des chercheurs, par l’octroi de subventions aux entreprises telles que le crédit d’impôt recherche, par son investissement propre dans la recherche publique, par le partage des découvertes scientifiques, par le remboursement des produits de santé par la sécurité sociale.
Ces sommes considérables investies par l’État ne sont pas rendues publiques ni prises en compte dans la négociation des prix des produits de santé avec les entreprises pharmaceutiques ; lesdits produits, faute d’une négociation éclairée, sont finalement payés au prix fort.
Actuellement, les investissements réalisés par les industriels en recherche et développement et en production peuvent être pris en compte dans la définition du prix, en vertu de l’accord-cadre signé entre le LEEM et le CEPS. Cet amendement vise, symétriquement, à prendre en compte les investissements en recherche et développement réalisés par l’État dans la fixation du prix des médicaments.
Ainsi ce prix serait-il déterminé de façon plus juste et plus transparente ; c’est aussi une manière d’encourager la démocratie sanitaire…
Mme la présidente. L’amendement n° 791 rectifié bis, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
… ° À la seconde phrase du premier alinéa du I de l’article L. 162-16-4, après la première occurrence du mot : « médicament, », sont insérés les mots : « des investissements publics en recherche et développement biomédicale, ».
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement est quasi identique à celui qui vient d’être présenté. Nous avons déjà parlé du crédit d’impôt recherche (CIR) et du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Mais, si l’État participe très largement, directement ou indirectement, au développement des médicaments avant leur arrivée sur le marché, cette contribution passe également par le financement de l’enseignement supérieur et de la recherche publics ou par l’octroi d’aides publiques aux entreprises.
Alors que nous examinons le PLFSS pour 2022, il me semble que les informations dont disposent les parlementaires et les administrateurs des organismes de sécurité sociale sur le contenu des prix des médicaments continuent d’être particulièrement opaques. Il est urgent de répondre au besoin de transparence !
Il faut arriver à mieux corréler le prix des médicaments à leur coût réel de recherche et de production. Or, aujourd’hui, de tels paramètres n’entrent pas en ligne de compte dans la fixation des prix et dans les décisions de remboursement prises par le CEPS.
Nous demandons que l’investissement public dans la recherche biomédicale soit défalqué du prix des médicaments afin d’éviter que nos concitoyens ne paient deux fois, comme c’est le cas actuellement : une première fois en payant des impôts dont une partie sert à financer les entreprises pharmaceutiques et la recherche et développement en matière de médicaments, une seconde fois à la pharmacie.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il convient de ne pas alourdir la rédaction de cet article. Surtout, l’accord-cadre signé par le CEPS et le LEEM permet d’intégrer dans la détermination du prix différentes modalités de valorisation de la recherche et développement. Le code de la sécurité sociale prévoit déjà la transmission et la publication du montant des investissements dont ont bénéficié les entreprises.
Avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Quand j’étais député, j’avais fait adopter un amendement de transparence tendant à ce que les entreprises transmettent au CEPS le montant des aides publiques de recherche et développement dont elles ont bénéficié pour la fabrication d’un médicament. Bonne nouvelle : l’arrêté est sorti et la première liste sera publiée le 31 janvier 2022.
Cette partie-là de vos amendements est donc satisfaite, mesdames les sénatrices.
Quant à déterminer le prix en fonction des coûts de recherche et développement notamment, cela me paraît assez peu pertinent, pardonnez-moi : ce n’est pas parce que la fabrication d’un médicament a coûté très cher que celui-ci est forcément très efficace, justifiant un prix plus élevé, et réciproquement…
Avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 930 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 791 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Organisation des travaux
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous en arrivons à une discussion commune de vingt et un amendements. Compte tenu du temps restant avant l’heure prévue de la levée, précédemment fixée à dix-huit heures, êtes-vous prêts à ne consacrer qu’une minute à chacun de ces amendements ?
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Le budget de la sécurité sociale dépasse celui de l’État. Le PLFSS mérite qu’on s’y attarde un minimum ! Le règlement du Sénat a été modifié pour faire passer notre temps de parole de deux minutes trente, durée déjà insuffisante, à deux minutes. Et on voudrait désormais que nous ne parlions qu’une minute ?
Mme la présidente. Précisément, ma chère collègue, mon propos était de vous faire participer à cette décision !
Mme Laurence Cohen. Loin de moi l’idée de prolonger les débats pour prolonger les débats ! Simplement, ces sujets étant primordiaux, notre discussion ne doit pas être bâclée ; s’il le faut, nous reviendrons vendredi, samedi et dimanche.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. C’est pourquoi nous souhaitons que la séance soit levée.
Mme la présidente. Il en est ainsi décidé.
Mes chers collègues, nous avons examiné 30 amendements au cours de la journée ; il en reste 244.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
7
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au vendredi 12 novembre 2021 :
À neuf heures trente, quatorze heures trente, le soir et la nuit :
Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, adopté par l’Assemblée nationale (texte n° 118, 2021-2022).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-sept heures quarante-cinq.)
nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire et de deux commissions mixtes paritaires
La liste des candidats désignés par la commission des affaires sociales pour faire partie de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 a été publiée conformément à l’article 8 quater du règlement.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire sont :
Titulaires : Mmes Catherine Deroche, Élisabeth Doineau, Corinne Imbert, MM. Philippe Mouiller, Bernard Jomier, Mme Monique Lubin et M. Dominique Théophile ;
Suppléants : M. René-Paul Savary, Mmes Pascale Gruny, Chantal Deseyne, M. Olivier Henno, Mmes Michelle Meunier, Véronique Guillotin et Laurence Cohen.
La liste des candidats désignés par la commission des finances pour faire partie de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques et de la proposition de loi ordinaire relative au Haut Conseil des finances publiques et à l’information du Parlement sur les finances publiques a été publiée conformément à l’article 8 quater du règlement.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire sont :
Titulaires : MM. Claude Raynal, Jean-François Husson, Mme Christine Lavarde, M. Jérôme Bascher, Mme Sylvie Vermeillet, MM. Rémi Féraud et Didier Rambaud ;
Suppléants : MM. Sébastien Meurant, Philippe Dominati, Charles Guené, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Jean-Claude Requier et Éric Bocquet.
La liste des candidats désignés par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication pour faire partie de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d’école a été publiée conformément à l’article 8 quater du règlement.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire sont :
Titulaires : MM. Laurent Lafon, Julien Bargeton, Max Brisson, Jacques Grosperrin, Cédric Vial, Mmes Marie-Pierre Monier et Sylvie Robert ;
Suppléants : Mmes Else Joseph, Toine Bourrat, Anne Ventalon, M. Yan Chantrel, Mme Sonia de La Provôté, M. Bernard Fialaire et Mme Céline Brulin.
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER