M. Daniel Gremillet. Avec cet amendement, nous souhaitons prendre en considération une situation qui peut malheureusement se produire, à savoir un décès.
Afin de préciser le champ d’application de l’exemption et de sécuriser in fine les transmissions familiales – enjeu majeur pour la pérennité de l’activité agricole en France et le renouvellement des générations en agriculture –, nous indiquons qu’en cas de décès du cessionnaire ses ayants cause devront remplir les deux conditions adossées à l’exemption.
J’y insiste, il faut éviter de bloquer les transmissions familiales.
M. Rémy Pointereau. Très bien !
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 83 rectifié est présenté par MM. Redon-Sarrazy, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Tissot, Devinaz, Jacquin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 109 est présenté par M. Buis, Mmes Evrard, Schillinger, Duranton et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 27
Remplacer les mots :
maintenir l’usage ou la vocation agricole des biens immobiliers ou exploités détenus par la société
par les mots :
participer effectivement à l’exploitation, dans les conditions prévues à l’article L. 411-59
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 83 rectifié.
M. Christian Redon-Sarrazy. Il s’agit certes d’un amendement de repli, mais ses dispositions ont, pour nous, une importance majeure : il s’agit de rétablir la condition de participation effective de l’acquéreur à l’exploitation pour bénéficier de l’exemption de contrôle en cas de cession entre parents ou alliés, dans les seuls cas où l’acquéreur participe effectivement à l’exploitation, en retenant les critères prévus à l’article L. 411–59 du code rural et de la pêche maritime.
Mes chers collègues, je vous rappelle ces critères : « ne pas se limiter à la direction et à la surveillance de l’exploitation » ; « participer sur les lieux aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l’importance de l’exploitation » ; et « posséder le cheptel et le matériel nécessaires ou, à défaut, les moyens de les acquérir ».
M. le rapporteur a supprimé ces dispositions et les a remplacées par une simple condition de maintien de l’usage ou de la vocation agricole. Avouez qu’un tel objet est défini de manière assez large et que de multiples situations peuvent se cacher derrière ces mots. Ce seul critère, très peu contraignant, ouvre même la voie à toutes les dérives.
Ce n’est pas le modèle agricole que les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain souhaitent encourager. Aussi, nous demandons le maintien d’une condition de participation effective à l’exploitation pour bénéficier d’une exemption au dispositif de contrôle en cas de cession intrafamiliale.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l’amendement n° 109.
M. Bernard Buis. Dans sa version adoptée par la commission, l’alinéa 27 impose au cessionnaire de « maintenir l’usage ou la vocation agricole des biens ».
Ladite vocation se caractérise par un emplacement en zone A ou N du plan local d’urbanisme (PLU), sans action particulière du propriétaire. De plus, le maintien de l’usage agricole est une condition peu contraignante et peu protectrice face aux effets potentiellement problématiques d’une concentration excessive des terres. Les termes adoptés sont donc trop vagues et nous exposent à de nombreux contentieux.
Pour ces raisons, il nous paraît important de rétablir la version selon laquelle le demandeur peut bénéficier de l’exemption familiale s’il exploite personnellement les terres dans les conditions prévues par le code rural et de la pêche maritime.
Mme la présidente. L’amendement n° 188, présenté par M. Rietmann, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 27
Remplacer le mot :
pendant
par les mots :
pour une durée d’
La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Rietmann, rapporteur. Cet amendement tend à apporter une précision rédactionnelle : les titres sociaux acquis doivent être conservés « pour une durée d’au moins neuf ans ».
Mme la présidente. L’amendement n° 148 rectifié, présenté par MM. Gremillet et Perrin, Mme L. Darcos, M. Karoutchi, Mme Belrhiti, M. Somon, Mme Goy-Chavent, MM. Anglars, Klinger, Burgoa et Chaize, Mme Thomas, M. Longuet, Mme Ventalon, MM. Milon et Pointereau, Mme Imbert, MM. Genet, Laménie, Tabarot et Bonhomme, Mme Gosselin et MM. Grosperrin et C. Vial, est ainsi libellé :
Alinéa 27
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Par exception, tout ou partie des titres acquis pourront faire l’objet d’une transmission à titre gratuit, en pleine propriété ou en démembrement, au profit de parents ou alliés jusqu’au 4e degré qui s’engagent à poursuivre les engagements en cours ;
La parole est à M. Daniel Gremillet.
M. Daniel Gremillet. Dans le même esprit que précédemment – l’engagement de conservation des titres étant long : elle doit durer au moins neuf ans –, nous souhaitons éviter de bloquer les transmissions intrafamiliales à titre gratuit, dès lors que les bénéficiaires acceptent de s’acquitter des engagements en cours. Cette mesure me semble relever du bon sens.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 84 rectifié est présenté par MM. Redon-Sarrazy, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Tissot, Devinaz, Jacquin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 166 est présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge, Taillé-Polian et M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 28
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 84 rectifié.
M. Christian Redon-Sarrazy. Cet amendement vise à supprimer l’exemption introduite en commission par le rapporteur pour les cessions de parts sociales ou d’actions entre personnes liées par un pacte civil de solidarité (PACS).
Cette dérogation n’a absolument aucun sens et ne répond aucunement à l’objectif de contrôle accru des cessions de parts sociétaires.
Notre sentiment est toujours le même : certains estiment qu’un contrôle vaudra refus et, en conséquence, multiplient les dérogations. Mais à trop déroger, il ne sert plus à rien de légiférer !
Nous ne voyons vraiment pas en quoi le fait d’être lié par un PACS apporterait les garanties nécessaires pour répondre aux objectifs fixés dans la loi, qu’il s’agisse des installations, de la préservation des terres ou de la lutte contre les concentrations excessives.
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 166.
M. Joël Labbé. Cet amendement vient d’être parfaitement défendu. On l’a vu dans l’histoire récente : l’union par PACS peut être une stratégie de contournement du contrôle des structures. Une fois encore, ce dont il est question ici, c’est la garantie d’un contrôle effectif.
Mme la présidente. L’amendement n° 167, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge, Taillé-Polian et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 29 et 30
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à revenir sur de nouvelles exemptions au dispositif de contrôle prévu par le présent texte. En effet, nous nous inquiétons des possibles contournements qu’elles pourraient autoriser.
Ainsi, on peut imaginer que, dans une stratégie de long terme, des personnes ne participant pas aux travaux agricoles prennent des participations minoritaires sans être soumises au dispositif de contrôle – car en deçà du seuil défini –, puis réalisent des opérations d’agrandissement aboutissant à une concentration excessive des terres à l’issue des fameux neuf ans.
Une fois de plus – il est important de le répéter –, la soumission de l’opération au dispositif de contrôle et de régulation ne signifie pas qu’il y aura forcément refus.
Mme la présidente. L’amendement n° 85 rectifié, présenté par MM. Redon-Sarrazy, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Tissot, Devinaz, Jacquin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 29
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
M. Christian Redon-Sarrazy. Cet amendement vise à supprimer l’exemption introduite en commission par M. le rapporteur pour des cessions entre associés et actionnaires détenant depuis au moins neuf ans des titres sociaux d’une même société.
Cette dérogation n’a aucun fondement et ne répond pas, selon nous, aux objectifs fixés par l’article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime. Pis, elle ne vise qu’à faciliter la spéculation et la concentration des parts sociétaires.
Un salarié, même s’il est actionnaire depuis neuf ans, doit passer par le dispositif prévu en cas de prise de contrôle d’une société agricole : répétons-le une fois de plus, le contrôle n’entraîne pas systématiquement le refus.
Mme la présidente. L’amendement n° 189, présenté par M. Rietmann, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I.- Alinéa 29
Remplacer le mot :
et
par le mot :
ou
II.- Alinéa 30
1° Remplacer les mots :
titres sociaux de sociétés à des salariés
par les mots :
parts sociales ou d’actions à un salarié de la société
2° Remplacer le mot :
inscrits
par le mot :
inscrit
La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Rietmann, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 140 rectifié bis, présenté par MM. Gremillet et Perrin, Mme L. Darcos, M. Karoutchi, Mme Belrhiti, M. Somon, Mme Goy-Chavent, MM. Anglars, Klinger, Burgoa et Chaize, Mme Thomas, M. Longuet, Mmes Ventalon, Pluchet et Joseph, MM. Milon et Pointereau, Mme Imbert, MM. Genet, Laménie, Tabarot et Bonhomme, Mme Gosselin et M. C. Vial, est ainsi libellé :
Alinéa 29
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Lorsque la cession des titres sociaux résulte des suites d’un décès, d’une maladie ou d’un accident entraînant une invalidité totale et définitive, le cessionnaire est exempté de la condition d’ancienneté dans la société, selon des conditions définies par décret ;
La parole est à M. Daniel Gremillet.
M. Daniel Gremillet. La vie n’étant pas toujours un long fleuve tranquille, cet amendement vise à exempter les associés et les actionnaires de l’obligation des neuf ans d’ancienneté au sein de la société lorsque le rachat des titres sociaux découle d’un décès, d’une maladie ou d’un accident entraînant une invalidité totale et définitive, selon des conditions définies par décret.
J’y insiste, de tels événements peuvent survenir au cours de l’existence : il serait regrettable que nous n’ayons rien prévu à cet égard.
M. Rémy Pointereau. Eh oui !
Mme la présidente. L’amendement n° 86 rectifié, présenté par MM. Redon-Sarrazy, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Tissot, Devinaz, Jacquin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 30
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Dans la continuité de l’amendement n° 85 rectifié, nous proposons de supprimer l’exemption introduite en commission pour les cessions à des salariés participant à l’exploitation depuis au moins neuf ans et inscrits dans un parcours d’installation ou dans le répertoire départemental d’installation.
Nous reconnaissons que cette nouvelle dérogation vise un objectif plus noble que les précédentes, car elle concerne directement l’installation, dont nous mesurons tous l’importance. Toutefois, il n’y a aucune raison d’exempter les salariés d’un contrôle en cas d’acquisition de titres sociaux d’une société.
Nous insistons sur le fait que contrôle ne signifie pas obligatoirement refus. À multiplier les dérogations, ce texte donnera inévitablement le sentiment que l’on a tout fait pour le rendre inefficace.
Mme la présidente. L’amendement n° 190, présenté par M. Rietmann, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 30
Remplacer les mots :
dans le répertoire départemental d’installation
par les mots :
au répertoire à l’installation mentionné au troisième alinéa de l’article L. 330-5
La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Rietmann, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Rietmann, rapporteur. Premièrement, cette discussion commune porte sur le principe même des exemptions.
Je considère qu’il est très important de maintenir la fluidité des transactions sociétaires sur le marché foncier agricole et que le dispositif prévu par cette proposition de loi n’a pas vocation à s’appliquer à l’ensemble des opérations.
Je considère également que nous devons garantir une souplesse spécifique pour les transactions intervenant dans le cadre familial. Rappelons-nous la discussion générale : nous souhaitons toutes et tous le maintien dans la durée des exploitations agricoles familiales.
En conséquence, je souhaite maintenir toutes les exemptions prévues par ce texte. Voilà pourquoi je suis défavorable à l’amendement n° 56, visant à toutes les supprimer ; à l’amendement n° 165, visant à supprimer l’exemption familiale ; aux amendements identiques nos 84 rectifié et 166, visant à supprimer l’exemption conjugale ; et aux amendements nos 167, 85 rectifié et 86 rectifié, visant à supprimer au moins l’une des deux exemptions applicables aux actionnaires, associés ou salariés qui ont participé à la mise en valeur des exploitations.
Deuxièmement, cette discussion commune porte sur l’exemption des cessions réalisées à titre gratuit. Il est proposé de la restreindre aux cessions entre proches parents.
À mon sens, de telles modifications porteraient atteinte de manière injustifiée aux successions et à la liberté de transmettre son patrimoine. Je suis donc défavorable aux amendements nos 80 rectifié, 53 et 164, tendant à restreindre cette exemption en fonction de la proximité du lien de parenté.
Troisièmement, cette discussion commune porte sur les modalités d’application de l’exemption familiale.
S’agissant du degré familial, cette exemption a été élargie en commission jusqu’au quatrième degré inclus, afin que les cousins et cousines germains puissent en bénéficier.
Mes chers collègues, vous aviez été nombreux à soutenir cet élargissement, et j’estime indispensable de le maintenir pour garantir la fluidité des transactions familiales et préserver les exploitations familiales. Je suis donc défavorable aux amendements identiques nos 8, 22 rectifié bis, 50 et 154 rectifié bis, qui visent à revenir au troisième degré de parenté inclus, ainsi qu’aux amendements nos 81 rectifié et 82 rectifié, tendant à revenir, sous d’autres modalités, au troisième degré inclus, voire au deuxième degré inclus.
Je l’ai précisé en commission : cette exemption doit être assortie de garde-fous, car il faut limiter les risques de contournement. Je demande donc à M. Chevrollier de retirer l’amendement n° 26, qui tend à supprimer toutes les conditions applicables. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Nous avions conservé sans modification la première condition, à savoir la détention pendant neuf ans des titres sociaux acquis. Toutefois, par mon amendement n° 188, je propose d’apporter une clarification rédactionnelle en précisant qu’il s’agit bien de la détention des titres acquis pour une durée de neuf ans, et non des titres sociaux acquis depuis les neuf dernières années.
Cette durée étant particulièrement longue, il est proposé, notamment en cas de décès, que les bénéficiaires des parts sociétaires conservent les titres sociaux hérités jusqu’à l’expiration de la durée de neuf ans et qu’ils respectent les autres conditions applicables à cette exemption. Néanmoins, une telle mesure me paraît excessive. Elle reviendrait à imposer des obligations sur plusieurs générations et, dès lors, porterait atteinte à la liberté de disposer de son héritage. Je suis donc défavorable à l’amendement n° 141 rectifié.
Quant à la seconde condition, nous l’avions assouplie en commission, car la notion de participation effective à l’exploitation me paraissait trop restrictive : cette condition ne serait pas remplie dans le cas d’un repreneur assurant seulement la direction de l’exploitation. Ainsi, elle obligerait le repreneur à détenir le cheptel et le matériel, ou encore à habiter sur l’exploitation. En conséquence, je suis défavorable aux amendements identiques nos 83 rectifié et 109, qui visent à rétablir cette condition dans sa version antérieure.
Enfin, il est proposé d’exempter de conditions les transmissions familiales à titre gratuit jusqu’au quatrième degré inclus. Cette volonté me semble déjà satisfaite par le maintien de l’exemption des cessions à titre gratuit. Je sollicite donc le retrait de l’amendement n° 148 rectifié, qui me paraît satisfait. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Quatrièmement, cette discussion commune porte sur les exemptions applicables aux actionnaires associés et salariés qui participent déjà à la mise en valeur de l’exploitation depuis au moins neuf ans. Mes amendements nos 189 et 190 visent à apporter des clarifications rédactionnelles nécessaires à la bonne compréhension du dispositif.
Enfin, je suis favorable à l’amendement n° 140 rectifié bis, qui vise à exempter les associés ou actionnaires de la condition d’ancienneté en cas de décès, de maladie ou d’accident entraînant une invalidité totale et définitive. Ces précisions me semblent relever du bon sens.
Mes chers collègues, nous sommes toutes et tous pour la défense et la pérennité de l’exploitation familiale. Les cousins germains, les conjoints et les partenaires de PACS, c’est la famille ; nous l’avons suffisamment défendu au Sénat. Les associés qui participent au développement de l’exploitation depuis plus de neuf ans font aussi partie, comme les salariés, des personnes qui méritent une exemption.
Par ailleurs, madame la présidente, la commission demande que le Sénat se prononce par priorité sur l’amendement n° 188.
Mme la présidente. Je suis saisie d’une demande de la commission tendant au vote par priorité de l’amendement n° 188.
Selon l’article 44, alinéa 6, de notre règlement, la priorité est de droit quand elle est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
Mme la présidente. La priorité est donc ordonnée.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements en discussion commune ?
M. Julien Denormandie, ministre. La famille joue un rôle essentiel dans notre société et revêt un caractère tout particulier dans le domaine agricole. Il convient de préserver ce rôle et de le mettre en avant, en particulier via une exemption spécifique. Je suis donc défavorable aux amendements nos 56, 80 rectifié, 53, 164 et 165.
Cela étant, il faut déterminer le bon équilibre à cet égard. Certains proposent d’opter pour le deuxième degré. Le texte soumis à la commission retenait le troisième degré et le texte issu de ses travaux opte pour le quatrième degré.
Pour ma part, je milite pour le troisième degré. En effet, dans le contrôle des structures, l’exemption familiale existe d’ores et déjà, au troisième degré. Nous sommes tous d’accord pour instituer une exemption familiale : par cohérence, nous devons retenir un seul et même degré, qu’il s’agisse du contrôle des structures ou du contrôle des parts sociétaires.
Je sollicite donc le retrait de l’amendement n° 81 rectifié au profit de l’amendement n° 82 rectifié (M. Christian Redon-Sarrazy opine.), qui vise à rétablir à la fois le troisième degré et la participation effective à l’exploitation, disposition chère à cette assemblée.
Pour les mêmes raisons, je demande le retrait des amendements nos 8, 22 rectifié bis, 50 et 154 rectifié bis au profit de l’amendement n° 82 rectifié.
J’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 26 et un avis de sagesse sur l’amendement n° 141 rectifié de M. Gremillet, qui tend à permettre la reprise des conditions d’exemption par les ayants droit en cas de décès du cessionnaire.
Je suis favorable aux amendements nos 83 rectifié et 109, qui visent à conditionner l’exemption familiale à la participation effective de l’exploitation, comme à l’amendement rédactionnel n° 188.
Monsieur Gremillet, s’agissant de l’amendement n° 148 rectifié, je suis très gêné : je suis d’accord avec vous sur le fond, mais dans la mesure où vous retenez le quatrième degré je ne peux pas émettre un avis favorable. Je vous propose de retravailler ces dispositions en vue de la commission mixte paritaire. (M. Daniel Gremillet acquiesce.)
Je suis défavorable aux amendements nos 84 rectifié et 166.
Je m’en remets à la sagesse du Sénat pour ce qui concerne l’amendement n° 167 de M. Labbé, qui a pour objet l’exemption relative aux salariés. Il en est de même pour l’amendement n° 85 rectifié de M. Redon-Sarrazy.
Je suis favorable à l’amendement n° 189.
J’émets un avis de sagesse sur l’amendement n° 140 rectifié bis, qui vise à supprimer la condition de détention des titres sociaux pendant neuf ans. De même, pour ce qui concerne l’amendement n° 86 rectifié, je m’en remets à sagesse de la Haute Assemblée.
Enfin, je suis favorable à l’amendement n° 190.
Mme la présidente. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour explication de vote.
M. Rémy Pointereau. Mes chers collègues, je tiens à revenir sur les amendements de mes collègues Guillaume Chevrollier et Daniel Gremillet relatifs au quatrième degré inclus sans condition.
Mettez-vous à la place d’un chef d’exploitation. Vos enfants – un garçon et une fille par exemple – prennent votre suite. À leur tour, ils ont des enfants, qui reprennent l’exploitation. À un moment, ils ne s’entendent plus : l’un d’eux veut céder ses parts à tel ou tel de ses cousins germains.
Si l’on ne vote pas ces amendements, on soumettra l’intéressé au contrôle administratif,…
M. Christian Redon-Sarrazy. Et alors ?
M. Rémy Pointereau. … au risque de démembrer le travail de plusieurs générations. (Marques de désaccord sur des travées du groupe SER.)
M. Christian Redon-Sarrazy. Pas forcément !
M. Rémy Pointereau. Ce n’est pas acceptable : il faut conserver le quatrième degré sans condition, faute de quoi les familles pourront être placées dans des situations inextricables. Le but, c’est de défendre les installations agricoles grâce aux exemptions familiales. Votons ces amendements !
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Rietmann, rapporteur. Il faut également protéger les exploitations familiales des effets de bord de ce texte.
Les auteurs d’un certain nombre d’amendements souhaitent limiter fortement l’exemption pour raisons familiales. Ainsi, ils veulent faire entrer les exploitations familiales dans un processus qui risquerait parfois de conduire à un démantèlement partiel,…
M. Rémy Pointereau. Eh oui !
M. Olivier Rietmann, rapporteur. … alors même que ces exploitations ne s’inscrivent pas dans une démarche d’accaparement de terres.
Prenons l’exemple de deux associés qui détiennent chacun 50 % des parts d’une exploitation. L’un d’eux prend sa retraite et vend ses parts à un cousin. Ces associés ne reprennent pas d’autres exploitations agricoles ; ils ne s’étendent pas. (M. Alain Houpert manifeste son approbation.) Mais la taille de leur exploitation dépasse légèrement le seuil décrété par le préfet de région.
Ils entrent dans le système de contrôle administratif. (M. Rémy Pointereau acquiesce.) Le préfet pourra dire « oui », « non », ou « oui, mais avec des compensations » qui pourront conduire à un démantèlement.
Ainsi, l’associé en question pourra vendre ses parts à son cousin ou à son salarié ; mais, au motif que, depuis quelques générations, l’exploitation est un peu excessive, on lui imposera abandonner cinq, dix, vingt ou cinquante hectares.
Nous ne sommes pas face à des mesures compensatoires pour des exploitations qui s’agrandissent dans un contexte d’accaparement de terres : de telles décisions sont prises à l’encontre d’exploitations qui dépassent un certain seuil en conservant les mêmes surfaces.
Il faut protéger les exploitations familiales contre ce risque de démantèlement. (M. Jean-Claude Tissot lève les bras au ciel.)
Enfin, qu’elles soient constituées sous forme sociétaire ou individuelle, les exploitations sont des entreprises comme les autres, qui ont besoin de stabilité pour être pérennes. Les exemptions pour les salariés présents depuis plus de neuf ans, les conjoints ou les cousins apportent une certaine stabilité, a fortiori à la suite d’un accident, d’un décès ou d’une maladie entraînant une invalidité. De tels événements sont déjà humainement très éprouvants : n’y ajoutons pas l’obligation de se soumettre à un système de contrôle, qui risque de mettre l’entreprise en péril,…
M. Jean-Claude Tissot. Mais précisément, c’est un contrôle !
M. Olivier Rietmann, rapporteur. … alors même qu’elle ne s’agrandit pas.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.
M. Alain Houpert. Mes chers collègues, nous parlons de foncier agricole. Or qu’est-ce que la ruralité ? C’est le fait de bien traiter la terre, de bien la cultiver, mais surtout de la transmettre, et préférence à un proche – frère, sœur, enfant, cousin, etc.
Gardons en tête ce mot clé : la transmission !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai été très clair sur ce point : il nous faut préserver la dimension familiale de la terre et notamment de la terre agricole. À cet égard, la seule question qui se pose, c’est le degré de préservation : faut-il aller jusqu’à l’arrière-grand-père ou jusqu’à l’arrière-arrière-grand-père ?
J’attire votre attention sur le fait que vous avez déjà débattu de ces questions au titre du contrôle des structures. Or vous avez adopté des exemptions familiales jusqu’au troisième degré.
Pourquoi le contrôle sociétaire ne s’exercerait-il, quant à lui, qu’à partir du quatrième degré, là où le contrôle des structures, qui somme toute est le plus développé, se fait à partir du troisième degré ?