Sommaire
Présidence de M. Georges Patient
Secrétaires :
M. Daniel Gremillet, Mme Patricia Schillinger.
tests salivaires réalisés dans les écoles
Question n° 1616 de M. Olivier Henno. – Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement ; M. Olivier Henno.
Question n° 1707 de Mme Angèle Préville. – Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement ; Mme Angèle Préville.
organisation des global games en france
Question n° 1752 de M. Michel Savin. – Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement ; M. Michel Savin.
pertinence de soumettre certaines productions traditionnelles au système du nutri-score
Question n° 1736 de Mme Denise Saint-Pé. – Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement ; Mme Denise Saint-Pé.
difficultés d’organisation des concours colombophiles depuis le brexit
Question n° 1751 de M. Jean-Pierre Decool. – Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement ; M. Jean-Pierre Decool.
stage dans une petite entreprise pour les étudiants des grandes écoles
Question n° 1450 de M. Yannick Vaugrenard. – Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ; M. Yannick Vaugrenard.
suppression d’une licence professionnelle consacrée au bois
Question n° 1676 de M. Bruno Sido. – Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ; M. Bruno Sido.
manque de places dans les structures pour enfants handicapés
Question n° 1572 de Mme Corinne Imbert. – Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées ; Mme Corinne Imbert.
contrôle des structures agricoles aux frontières
Question n° 1599 de Mme Corinne Imbert, en remplacement de Mme Catherine Belrhiti. – Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées ; Mme Corinne Imbert.
Question n° 1720 de Mme Sabine Van Heghe. – Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées ; Mme Sabine Van Heghe.
zone frontalière franco-espagnole et bassin d’emploi de l’hôpital transfrontalier de cerdagne
Question n° 1710 de M. François Calvet. – Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie ; M. François Calvet.
PRÉSIDENCE DE Mme Nathalie Delattre
recensement prévu en 2021 de la population légale en guyane
Question n° 1539 de M. Georges Patient. – Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie ; M. Georges Patient.
taxe sur la première cession d’un terrain rendu constructible
Question n° 1725 de Mme Annick Billon. – Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie ; Mme Annick Billon.
PRÉSIDENCE DE M. Georges Patient
reprise de la papeterie normande chapelle darblay
Question n° 1753 de M. Didier Marie. – Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie ; M. Didier Marie.
Question n° 1704 de M. Joël Labbé. – Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie ; M. Joël Labbé.
implantation d’une pharmacie en milieu rural
Question n° 1421 de M. Bernard Delcros. – Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie ; M. Bernard Delcros.
réforme des études de santé et pénurie de médecins
Question n° 1660 de Mme Céline Brulin. – Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie ; Mme Céline Brulin.
difficultés de constatation d’un décès en zone rurale
Question n° 1675 de M. Bernard Fournier. – Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie ; M. Bernard Fournier.
fin de l’obligation du port du masque à l’école primaire
Question n° 1735 de Mme Kristina Pluchet. – Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie ; Mme Kristina Pluchet.
vaccination des français de l’étranger dans leur pays de résidence
Question n° 1742 de Mme Évelyne Renaud-Garabedian. – Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie.
arrêt de travail et élus locaux
Question n° 1682 de Mme Dominique Vérien. – M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité ; Mme Dominique Vérien.
retard de traitement des dossiers de retraite des français établis hors de france
Question n° 1684 de M. Ronan Le Gleut. – M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité ; M. Ronan Le Gleut.
interdiction de l’écriture dite inclusive
Question n° 1672 de Mme Toine Bourrat. – M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité.
expérimentation pour la réouverture des lieux culturels et des salles de spectacles
Question n° 1689 de Mme Émilienne Poumirol. – M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité ; Mme Émilienne Poumirol.
implantation des commissariats dans les départements ruraux
Question n° 1538 de M. Olivier Rietmann. – Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté.
déploiement de voitures radars banalisées
Question n° 1708 de M. Édouard Courtial. – Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté ; M. Édouard Courtial.
effectifs et conditions de travail des fonctionnaires de police au commissariat de gap
Question n° 1723 de M. Jean-Michel Arnaud. – Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté.
multiplication des inondations sur la route nationale 19
Question n° 1755 de Mme Catherine Procaccia. – Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité ; Mme Catherine Procaccia.
Question n° 1658 de M. Frédéric Marchand. – Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité.
problématique des « ruisseaux couverts » de l’ex-bassin houiller cévenol
Question n° 1490 de M. Laurent Burgoa. – Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité ; M. Laurent Burgoa.
Question n° 1524 de M. Rémy Pointereau, en remplacement de M. Louis-Jean de Nicolaÿ. – Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité.
multiplication des projets d’implantation de parcs éoliens dans les territoires ruraux
Question n° 1569 de M. Stéphane Sautarel. – Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité ; M. Stéphane Sautarel.
rapports entre l’office français de la biodiversité et les élus locaux
Question n° 1585 de M. Rémy Pointereau. – Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité ; M. Rémy Pointereau.
responsabilités engagées à la suite d’une pollution environnementale
Question n° 1690 de Mme Martine Filleul. – Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité ; Mme Martine Filleul.
conséquences de l’arasement des vannages des moulins
Question n° 1724 de M. Jean-Marie Janssens. – Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité ; M. Jean-Marie Janssens.
mode de gestion de la forêt usagère de la teste de buch
Question n° 1651 de Mme Monique de Marco. – Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité ; Mme Monique de Marco.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Pierre Laurent
3. Conventions internationales. – Adoption en procédure d’examen simplifié de deux projets de loi dans les textes de la commission
4. Différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 261 rectifié bis de M. Pierre Laurent. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 26
Amendement n° 71 rectifié bis de Mme Nassimah Dindar. – Rejet.
Amendement n° 246 rectifié de Mme Céline Brulin. – Rejet.
Demande de réserve des articles 27 à 27 quater et de l’article 29, ainsi que des amendements portant articles additionnels rattachés. – Mme Catherine Di Folco ; Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. – La réserve est ordonnée.
Articles additionnels après l’article 27 (réservés)
Article 27 bis (nouveau) (réservé)
Article additionnel après l’article 27 bis (réservé)
Articles 27 ter et 27 quater (nouveaux) (réservés)
Amendement n° 762 rectifié bis de Mme Nathalie Delattre. – Retrait.
Amendement n° 1454 rectifié bis de Mme Angèle Préville. – Retrait.
Amendement n° 1224 de Mme Dominique Estrosi Sassone. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 28
Amendement n° 1085 rectifié ter de M. Rémi Féraud. – Rejet.
Amendement n° 250 rectifié bis de M. Pierre Laurent. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 28 bis
Amendement n° 748 rectifié de M. Paul Toussaint Parigi. – Rejet.
Amendement n° 1538 rectifié de M. Dany Wattebled. – Retrait.
Amendement n° 1210 de Mme Dominique Estrosi Sassone. – Adoption.
Amendement n° 1536 rectifié de M. Dany Wattebled. – Retrait.
Amendement n° 1213 de Mme Dominique Estrosi Sassone. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 30
Amendement n° 1535 rectifié bis de M. Dany Wattebled. – Retrait.
Amendement n° 1664 rectifié ter de M. Bernard Buis. – Rejet.
Amendement n° 277 de Mme Cécile Cukierman. – Retrait.
Amendement n° 1087 rectifié ter de M. Rémi Féraud. – Retrait.
Amendement n° 1412 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 193 rectifié de M. Max Brisson. – Retrait.
Amendement n° 1211 de Mme Dominique Estrosi Sassone. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article 30 ter (nouveau) – Adoption.
Amendement n° 1212 de Mme Dominique Estrosi Sassone. – Adoption.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques
Adoption de l’article modifié.
Article 27 (précédemment réservé)
Amendement n° 1411 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 27 (précédemment réservés)
Amendement n° 697 rectifié bis de M. Bernard Delcros. – Retrait.
Amendement n° 1086 rectifié ter de M. Rémi Féraud. – Rejet.
Amendement n° 150 rectifié de M. Jean-Marie Mizzon. – Rejet.
Article 27 bis (nouveau) (précédemment réservé) – Adoption.
Article additionnel après l’article 27 bis (précédemment réservé)
Amendement n° 694 rectifié bis de M. Philippe Folliot. – Retrait.
Articles 27 ter et 27 quater (nouveaux) (précédemment réservés) – Adoption.
Article 29 (précédemment réservé)
Adoption de l’article modifié.
Demande de priorité des articles 75 à 83 bis, sauf l’article 78, et des amendements portant articles additionnels rattachés. – Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales ; M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois. – La priorité est ordonnée.
Renvoi de la suite de la discussion.
Amendement n° 701 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
compte rendu intégral
Présidence de M. Georges Patient
vice-président
Secrétaires :
M. Daniel Gremillet,
Mme Patricia Schillinger.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Questions orales
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
tests salivaires réalisés dans les écoles
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, auteur de la question n° 1616, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Olivier Henno. Madame la secrétaire d’État, ma question peut paraître anachronique après l’intervention du chef de l’État hier soir sur l’incitation vaccinale, puisqu’elle concerne les tests salivaires et les autotests dans les écoles.
Cependant, il se pourrait bien que les autotests et les tests salivaires deviennent, dès la rentrée prochaine, le complément indispensable de la politique en faveur du vaccin, pour les plus de 12 ans et plus encore pour les enfants au-dessous de cet âge.
Alors que le rythme de croisière de 300 000 tests par semaine, prévu initialement pour la mi-mars, a été atteint tardivement en fin d’année scolaire, des équipes enseignantes ont relevé de nombreux couacs dans la mise en œuvre de cette stratégie de tests sur le terrain.
Les délais entre la flambée des cas dans certaines écoles et l’arrivée des tests salivaires ont souvent été un peu longs. Les difficultés de mise en place de cette politique de tests massifs dans les écoles se couplent à un autre sujet particulièrement alarmant : la menace d’une nouvelle vague avec le variant delta, qui est – on l’a entendu hier soir – au cœur de l’actualité.
Il semble donc urgent de préparer dès à présent les mesures sanitaires qui seront appliquées dans nos écoles à la rentrée, car elles seront un vecteur important de lutte contre la propagation du virus. Il semble aussi opportun de donner l’autorisation aux collectivités locales de lancer des campagnes massives de tests et d’autotests. Laissons faire les élus locaux, qui sont sur le terrain : leur organisation plus souple permettra de faire réaliser ces tests de manière plus performante, pour casser plus rapidement les chaînes de contamination et renforcer la sécurité sanitaire.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement. Monsieur le sénateur Olivier Henno, vous avez tout à fait raison : les tests et les autotests sont un outil d’évaluation de la situation sanitaire complémentaire des décisions annoncées hier par le Président de la République. Depuis le démarrage en février 2021 des campagnes massives de dépistage par test PCR sur prélèvement salivaire, plus de 4 millions de tests ont été proposés aux élèves et aux personnels travaillant dans les écoles et les établissements scolaires.
Mieux adaptés aux plus jeunes enfants que d’autres catégories de tests, ces tests sont proposés majoritairement dans les écoles maternelles et élémentaires. L’objectif du Gouvernement de réaliser 600 000 tests par semaine a été atteint à la mi-mai, conformément aux échéances fixées. Ces campagnes ont permis, vous l’avez dit, monsieur le sénateur, de dépister plus massivement chez les mineurs et de lutter contre les contaminations en milieu scolaire.
Sur ce point, je vous invite à consulter les données mises en ligne par Santé publique France sur le portail Géodes, et en particulier le focus par niveau scolaire qui est extrêmement intéressant parce qu’il est régulièrement mis à jour avec les données issues d’un certain nombre de laboratoires. Vous pourrez constater par exemple qu’entre le début du mois de février et la mi-mai le taux de dépistage des 6-10 ans, une tranche d’âge que vous avez évoquée, a presque été multiplié par trois tandis que, dans le même temps, celui des plus de 18 ans diminuait légèrement.
Massivement déployés, ces tests ont bien été acceptés par le corps enseignant et les parents, avec un taux d’adhésion de 60 % à 70 % pour les élèves des écoles élémentaires. Le taux de positivité s’établissait en moyenne à 0,3 %.
L’organisation de ces tests PCR sur prélèvement salivaire reposait sur une coopération extrêmement étroite entre les services académiques et les agences régionales de santé, ce qui a permis l’application de la stratégie « tester, alerter, protéger » en milieu scolaire, notamment au retour des vacances d’hiver, un moment important.
Après le déploiement des tests, le ministère a pris contact avec l’ensemble des associations d’élus locaux : c’est avec ces derniers que nous pouvons mettre en place sur les territoires un déploiement encore plus massif des tests. Depuis le début du mois, nous travaillons, toujours en lien extrêmement étroit et renforcé avec les associations d’élus, pour préparer la rentrée scolaire.
Dans mon périmètre d’action, je vous indique que nous déployons cet été plus de 6 millions de tests et d’autotests dans les colonies de vacances, les centres aérés et les centres d’accueil de jour, afin de poursuivre cette détection massive et lutter contre le virus.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour la réplique.
M. Olivier Henno. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État. Nous sommes d’accord sur l’utilité des tests et des autotests, et votre réponse est nette et claire.
J’ajouterai un point complémentaire : il est nécessaire de permettre l’intervention souple et adaptée des communes, et particulièrement des maires, qui ont une responsabilité dans le domaine scolaire.
éducation manuelle
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, auteure de la question n° 1707, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Mme Angèle Préville. Madame la secrétaire d’État, j’évoquerai un enseignement qui a quasiment disparu, l’éducation manuelle. Tout enfant doit pouvoir être en mesure d’acquérir des savoirs et des savoir-faire. C’est pourquoi il a droit à une éducation manuelle, qui est un levier puissant pour comprendre, apprendre, progresser et se construire.
La main et le cerveau sont liés et travaillent ensemble. Nous sommes nés de cela, nous avons évolué grâce à cette synergie, et ce depuis l’aube de l’humanité.
Alors que notre société est de plus en plus informatisée, numérisée, dématérialisée, alors que nous avons tant besoin de prise directe avec la réalité, alors que nos enfants grandissent beaucoup trop devant les écrans, pourquoi les priver de ce ressort magnifique de connexion avec le réel, de ce chemin de facilité vers la connaissance ?
Faire avec ses mains permet d’aider à acquérir toutes les notions et à les consolider, y compris les notions les plus abstraites et les plus intellectuelles. Sinon comment un élève qui n’a pas la chance d’avoir des parents artisans ou bricoleurs, qui n’a donc pas vu, senti, vécu ni essayé le travail manuel et qui n’a plus goût à l’école peut-il savoir qu’il est fait pour travailler manuellement, qu’il va aimer cela et qu’il sera heureux d’embrasser une profession manuelle, laquelle lui permettra de se réaliser ?
Nous sommes nombreux à avoir grandi en suivant des cours d’éducation manuelle. De tels cours manquent cruellement aujourd’hui. Si tous les enfants pouvaient, durant leur scolarité, s’essayer à la menuiserie, à la couture, à la poterie, à la cuisine, au tricot, à la vannerie et à mille autres choses, ils pourraient s’orienter en connaissance de cause. Ils seraient alors certains qu’ils peuvent trouver là les moyens de s’accomplir.
La pandémie a été riche d’enseignement : l’éducation manuelle aurait été d’un grand secours, ne serait-ce que pour faire un masque. Imaginez comment les enfants auraient pu participer, s’investir dans l’élan de solidarité nationale et dans cette situation si difficile à vivre en tant qu’acteurs impliqués, être reconnus et faire partie de ceux qui ne sont pas restés uniquement sidérés !
Lors de la discussion du projet de loi pour une école de la confiance, j’avais fait inscrire dans le code de l’éducation la nécessité de favoriser l’éducation manuelle. Le ministre Jean-Michel Blanquer partageait alors mon point de vue, puisqu’il avait été favorable à mon initiative. Ne serait-il pas temps maintenant d’inscrire concrètement dans les programmes de l’éducation nationale l’éducation manuelle, de l’école maternelle jusqu’au lycée ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement. Madame la sénatrice Préville, je vous remercie de votre question. J’estime très sincèrement que vous avez raison de remettre en lumière une méthodologie d’acquisition des compétences qui n’a, en réalité, rien de désuet. Vous connaissez peut-être l’association L’Outil en Main, qui se déploie un peu partout sur nos territoires : cette association, avec laquelle mon ministère travaille très étroitement, accompagne les jeunes dans la découverte des métiers de l’artisanat.
Je vous remercie d’autant plus pour cette question que je sais que le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports a à cœur de déployer plus fortement une acquisition des compétences par le savoir-faire, la découverte des métiers et un enseignement complémentaire à l’éducation théorique ou technique.
Ces compétences sont présentes dans le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, dans les programmes de toutes les disciplines, mais elles ont vocation à être complétées.
Dans les informations qui m’ont été transmises par le ministre de l’éducation nationale, il est indiqué que, dès le cycle 1, c’est-à-dire la maternelle, les compétences manuelles sont enseignées par le biais de manipulations simples pour les tout-petits, et vont jusqu’à la construction d’objets et la découverte des métiers comme ceux que vous avez cités – je pense à la vannerie en particulier.
Ces modalités permettent aux élèves de progresser dans l’acquisition de ces compétences et des savoirs associés, mais également d’affiner l’habileté manuelle, qui n’est malheureusement parfois pas pratiquée à la maison. Comme nous ne vivons pas tous dans le même type d’environnement ou de territoire, on constate une certaine inégalité d’accès à ce type d’activités.
L’éducation manuelle est plus particulièrement une priorité dans l’enseignement intégré de science et technologies proposé en classe de sixième et de cinquième. Dans le cadre de projets pluridisciplinaires ou non, les enseignants sont amenés à proposer de faire de la construction au sens très large : maquettes, jardin, élevage, affiches. L’expérience et la définition d’une procédure requérant des gestes maîtrisés au service de la recherche sont au cœur des enseignements de spécialité de sciences de la vie et de la terre et de physique-chimie au lycée général, et sont aussi présentes dans les lycées technologiques, avec la dynamique du chef-d’œuvre en CAP.
L’idée du ministre de l’éducation nationale est d’intégrer l’acquisition des compétences manuelles dans l’ensemble des parcours, qu’ils soient technologiques ou généraux, dès le plus jeune âge, c’est-à-dire à la maternelle, et jusqu’au lycée.
En conséquence, l’éducation manuelle comprise comme l’ensemble des « activités d’investigation, de conception, de modélisation et de réalisation » est présente et a vocation à être renforcée, de la maternelle au lycée.
Cette omniprésence permettra aux élèves d’acquérir des compétences encore plus larges au sens pédagogique, dites « d’analyses distanciées et critiques », mais également de développer cette habileté si chère aux plus jeunes enfants.
Voilà, madame la sénatrice, les éléments que je souhaitais vous indiquer pour répondre à votre question.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour la réplique.
Mme Angèle Préville. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, mais je voudrais insister sur le sujet.
Je suis d’accord, l’éducation manuelle est pratiquée dans les écoles primaires et les écoles maternelles, mais elle est cruellement absente au collège ! Si elle était une matière à part entière, elle permettrait aux jeunes de développer leur autonomie et de réaliser des projets. Ce que j’aurais voulu, c’est que l’éducation manuelle soit inscrite aux programmes.
organisation des global games en france
M. le président. La parole est à M. Michel Savin, auteur de la question n° 1752, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée des sports.
M. Michel Savin. Madame la secrétaire d’État, je souhaite aujourd’hui vous interroger sur l’engagement du Gouvernement concernant les Global Games.
Alors même que les échéances de France 2023 et de Paris 2024 se dessinent, l’action du Gouvernement en faveur de la pratique sportive pour les personnes en situation de handicap, visible ou invisible, n’est pas très claire.
La Fédération française du sport adapté organisera à Vichy en 2023 les Global Games, accueillant ainsi près de 1 000 athlètes du monde entier dans dix différentes disciplines sportives.
En 2024, Paris accueillera les jeux Paralympiques, qui rassembleront, quant à eux, plus de 10 000 athlètes pour près de 330 épreuves.
Les Global Games sont un événement phare et une chance pour les sportifs de haut niveau ayant une déficience intellectuelle. Cet événement doit montrer la place que la France donne au sport, qui, au-delà de son impact sur la santé et le bien-être, est également, par les valeurs qu’il incarne, un élément moteur de cohésion sociale pour notre société.
Malgré un réel engagement pour Paris 2024 et les jeux Paralympiques, il est regrettable qu’aucune action de promotion ou de soutien n’ait été prise pour le moment par le Gouvernement pour cet événement majeur qui se déroulera à quelques mois des jeux Paralympiques.
Madame la secrétaire d’État, comment le Gouvernement compte-t-il concrètement soutenir cet événement et s’engager auprès des athlètes de sport adapté, qui, au vu de leurs parcours difficiles et de leurs performances sportives exceptionnelles, sont vraiment exemplaires ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement. Monsieur le sénateur Michel Savin, permettez-moi de vous faire part de la réponse transmise par ma collègue Roxana Maracineanu, ministre des sports, qui ne pouvait pas être parmi vous ce matin.
Portée par la Fédération française du sport adapté, la candidature de Vichy pour l’accueil de la plus grande compétition internationale de sport adapté avait été dévoilée des 2019 par Laurent Wauquiez, président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, et par Sandrine Chaix, conseillère spéciale régionale au handicap.
Le savoir-faire du centre de ressources d’expertise et de performance sportive (Creps) Auvergne-Rhône-Alpes de Vichy et des acteurs locaux a ainsi été reconnu et conforté. Les Global Games sont organisés tous les quatre ans et réunissent le plus grand nombre d’athlètes de sport adapté, qu’ils soient en situation de handicap physique ou mental, visible ou invisible.
Vous l’avez dit, l’édition 2019 s’est déroulée à Brisbane avec une délégation française composée de 83 sportifs, qui ont participé à 7 des 9 disciplines. La France a remporté plus de 87 médailles, dont 39 titres, 23 médailles d’argent, 25 médailles de bronze, et s’est classée au deuxième rang des nations participantes.
Le Gouvernement reconnaît l’importance de cet événement, qui constitue la plus grande compétition internationale pour les sportifs déficients intellectuels. Les Global Games 2023 sont inscrits au calendrier des grands événements paralympiques internationaux par la délégation interministérielle aux grands événements sportifs, et sont soutenus à hauteur de 700 000 euros pour un budget de 3,256 millions d’euros, soit 21 % de taux de soutien.
L’Agence nationale du sport accompagne également la Fédération française du sport adapté et tous ses sportifs de haut niveau au travers d’un contrat de performance, à hauteur de 900 000 euros en 2021.
Depuis 2019, l’accompagnement a été fortement renforcé par l’Agence nationale du sport, sachant que la Fédération française du sport adapté a fait le choix de recevoir, non pas des aides personnalisées versées par le Comité national olympique et sportif français, mais une enveloppe de 75 000 euros gérée directement par la Fédération dans le cadre de l’enveloppe de son contrat de performance.
L’opérateur, qui est l’Agence nationale du sport, accompagne donc les sportifs de haut niveau des sports adaptés au travers de la Fédération, que ce soit pour les trois sports paralympiques – athlétisme, natation, tennis de table – ou pour les sports non paralympiques reconnus de très haut niveau.
J’espère, monsieur le sénateur, que ces éléments d’information ont pleinement répondu à votre question.
M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour la réplique.
M. Michel Savin. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Vous avez souligné l’engagement fort de la région Auvergne-Rhône-Alpes, avec son président Laurent Wauquiez et sa vice-présidente Sandrine Chaix, qui se mobilisent fortement pour l’organisation de l’édition 2023.
Vous avez évoqué l’édition 2019, et les excellents résultats de la délégation française. Vous reconnaissez l’importance des Global Games, mais, lorsque j’entends que le taux de participation de l’État français à leur organisation est de 20 %, est-ce bien à la hauteur d’un tel événement ? Il aurait mérité un effort supplémentaire de la part du gouvernement et de l’État français.
Vous n’avez pas répondu à un point, sur lequel il faudrait peut-être se pencher : il faudrait faire la promotion de cet événement et le mettre en valeur pour valoriser l’engagement de ces jeunes filles et de ces jeunes hommes, qui se mobilisent et qui s’impliquent complètement dans la préparation malgré leur handicap, lequel est souvent important.
C’est la plus belle image que l’on pourrait envoyer de l’organisation de cette manifestation !
pertinence de soumettre certaines productions traditionnelles au système du nutri-score
M. le président. La parole est à Mme Denise Saint-Pé, auteur de la question n° 1736, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Mme Denise Saint-Pé. Madame la secrétaire d’État, permettez-moi de questionner la pertinence de soumettre des productions traditionnelles telles que l’Ossau-Iraty au système du Nutri-score.
Ce fromage au lait de brebis, fabriqué dans les Pyrénées-Atlantiques, est classé en appellation d’origine contrôlée (AOC) depuis 1980 et en appellation d’origine protégée (AOP) depuis 1996.
Il s’agit d’un produit traditionnel, de grande qualité, tant par sa fabrication – du lait cru non chauffé – que par le mode d’élevage de la filière ovine concernée : le pâturage en estives basco-béarnaises.
Or cette spécialité est aujourd’hui confrontée à un déficit d’image en raison du dispositif Nutri-score qui lui est appliqué. En effet, elle est classée D dans cette grille, alors que des produits industriels transformés se voient paradoxalement attribuer des notes bien meilleures.
À un moment où le consommateur souhaite légitimement être informé des produits qu’il va trouver dans son assiette, il est paradoxal que le Nutri-score, qui limite l’information à la simple composition nutritionnelle, devienne prédominant.
Il convient de le rappeler, le cahier des charges des AOC et AOP est très strict et les modes de fabrication ainsi que la composition des produits ne peuvent pas être modifiés, ce qui ne permet pas d’adapter leur composition pour répondre aux exigences du Nutri-score.
De plus, Santé publique France envisage d’interdire la publicité des aliments notés D et E pour préserver les enfants et adolescents du marketing publicitaire, ce qui entraînera l’impossibilité d’assurer la promotion de tels produits sous indication géographique.
Cette situation me semble aller à l’encontre de la préservation de notre agriculture traditionnelle, alors même qu’elle paraît répondre à une demande du consommateur qui privilégie les circuits courts.
Aussi, madame la secrétaire d’État, serait-il envisageable de ne pas soumettre les productions traditionnelles au système du Nutri-score, celui-ci paraissant inadapté dans ces cas-là ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement. Madame la sénatrice Denise Saint-Pé, notre gastronomie est la plus belle des richesses de notre pays. La France, c’est d’abord ses fromages, ses paysages, ses terroirs et ses agriculteurs. J’apporterai à votre question la réponse qui m’a été fournie par le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, dont je vais vous faire lecture pour être la plus exhaustive possible.
Le logo Nutri-score, issu d’une démarche scientifique innovante et inclusive et fondé sur le dialogue entre les parties prenantes, offre aux consommateurs une information lisible, qui facilite la compréhension.
La démarche d’engagement de chaque producteur en faveur du Nutri-score est volontaire, en conformité avec le droit européen. Le Nutri-score est aujourd’hui plébiscité par les Français. En juillet 2020, plus de 415 entreprises étaient engagées dans cette démarche en France, et les parts de marché des produits affichant le Nutri-score représentaient environ 50 % des volumes de ventes ; 94 % des Français ont déclaré être favorables à la présence de cette information sur les emballages.
Sa diffusion rapide suscite toutefois des questions légitimes, que vous avez soulevées, madame la sénatrice. Vous avez évoqué celle des fromages sous AOP. D’autres sont apparues : pourquoi les frites n’ont-elles pas de Nutri-score ? Le Nutri-score prend-il en compte les additifs ? Une large campagne de communication de Santé publique France est en cours de diffusion pour répondre à ces questions.
Le Nutri-score et les signes officiels d’identification de la qualité et de l’origine (SIQO) répondent à des objectifs différents. Les SIQO constituent une garantie pour les consommateurs en termes de qualité, de savoir-faire, de protection de l’environnement, d’origine et de terroir, alors que le Nutri-score les informe sur la qualité nutritionnelle des produits transformés et permet donc de les comparer.
Si les fromages sont classés, dans leur très grande majorité, en D et parfois en E, c’est parce qu’ils contiennent des quantités importantes de graisses saturées de sel et qu’ils sont également caloriques.
Le ministère de l’agriculture et de l’alimentation a toutefois demandé, en lien avec le ministère de la santé, que le comité scientifique institué au niveau européen se saisisse de la question des fromages, afin de mieux traduire la corrélation entre les teneurs en protéines et en calcium des fromages.
Quoi qu’il en soit, cela ne doit pas pour autant exclure ces produits de notre consommation équilibrée : le Nutri-score est une information supplémentaire donnée aux consommateurs ; il ne saurait être l’unique paramètre de leur choix.
Ce n’est en tout cas pas la position du Gouvernement. Je l’ai rappelé au début de mon propos, notre pays est riche de ses terroirs, de ses produits sous signe de qualité, et de sa gastronomie reconnue dans le monde entier, qu’il faut protéger et soutenir.
Nous pensons qu’il vaut mieux nous pencher sur les spécificités nutritionnelles des produits sous AOP. Ainsi, sept pays sont désormais engagés dans cette démarche : la France, la Belgique, l’Espagne, l’Allemagne, les Pays-Bas, le Luxembourg et la Suisse. Un comité composé d’experts scientifiques, réuni pour la première fois le 12 février dernier, aura pour mission d’évaluer la pertinence scientifique des propositions d’évolution du mode de calcul du Nutri-score. La France tentera d’influer, dans le cadre de ce comité, pour que soient prises en compte les spécificités de nos AOP.
Voilà, madame la sénatrice, des éléments de réponse en faveur de notre ambition collective de protéger nos produits agricoles et les femmes et les hommes qui font vivre les savoir-faire.
M. le président. La parole est à Mme Denise Saint-Pé, pour la réplique.
Mme Denise Saint-Pé. Madame la secrétaire d’État, il faut absolument que la France arrive à obtenir de l’Union européenne qu’elle reconnaisse cette spécificité de l’économie montagnarde, comme le demandent nos concitoyens.
difficultés d’organisation des concours colombophiles depuis le brexit
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, auteur de la question n° 1751, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Jean-Pierre Decool. Madame la secrétaire d’État, au Nord, il n’y a pas que les corons, il y a aussi les coulonneux. C’est comme cela que l’on appelle les colombophiles, ces passionnés de courses de pigeons voyageurs. En effet, dans les Hauts-de-France, on joue énormément « à pigeons », on enchaîne les courses. Les colombiers cultivent le bien-être animal, la convivialité et la compétition sportive.
Si j’ai décidé d’introduire mon propos de cette façon, c’est pour mettre en exergue un aspect important de ce sport : le lien social. C’est un lien fort et unique qui lie entre eux les colombophiles non seulement européens, mais aussi britanniques.
Toutefois, comme chacun sait, le Brexit est arrivé et avec lui son cortège de complications. Les pigeons voyageurs en provenance du Royaume-Uni bénéficiaient, jusqu’alors, d’une autorisation d’introduction sur le territoire français. Dorénavant, ils ne peuvent plus être transportés aussi facilement et le lien qui unit les passionnés des deux côtés de la Manche en pâtit.
C’est le règlement européen 2020/692 qui régit dorénavant les importations d’oiseaux captifs, dont les pigeons voyageurs. Ce dernier impose une quarantaine de trente jours, mettant en difficulté la tenue des compétitions colombophiles. Je sais que cette problématique a été prise en compte et que le texte européen est en cours de modification.
En attendant, les pigeons voyageurs sont naturellement soumis aux dispositions nationales. À ce jour, les postes de contrôle frontaliers des Hauts-de-France – Dunkerque, Calais port et Calais tunnel – ne sont pas en mesure d’assurer le contrôle à l’importation de ces animaux.
Madame la secrétaire d’État, j’aimerais donc vous poser deux questions. Pouvez-vous m’informer, d’une part, de l’état d’avancement de la modification du texte européen ? Acceptez-vous, d’autre part, de prendre des dispositions pour permettre aux postes de contrôle frontaliers des Hauts-de-France d’assurer le contrôle à l’importation de ces animaux et permettre ainsi à ce sport traditionnel de reprendre son cours ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement. Monsieur le sénateur Jean-Pierre Decool, nous avons tellement été privés de lien social que, dès que nous en avons l’occasion, nous nous attachons à rebâtir ce lien !
Je vous fais part de la réponse du ministre de l’agriculture et de l’alimentation, qui ne pouvait malheureusement pas être là ce matin pour vous répondre, sur ce sujet qui lui tient à cœur. Si vous le permettez, comme pour Mme Saint-Pé, je vous en ferai lecture car il s’agit d’une question technique.
Les services du ministère de l’agriculture et de l’alimentation ont bien pris en compte les difficultés engendrées par la mise en place de ce nouveau règlement, qui concerne les importations de pigeons voyageurs. Vous l’avez dit, des travaux sont actuellement engagés par la Commission européenne : ils devraient conduire à la parution d’un acte délégué modificatif du règlement, spécifiquement dédié aux nouvelles modalités d’importation en provenance des pays tiers.
La date de parution de cet acte délégué ne nous a pas encore été transmise. Je sais que c’est l’information que vous espériez obtenir, mais les services de la Commission européenne nous ont fait part de leur souhait d’une parution « rapide », au sens diplomatique du terme, laquelle reste toutefois soumise au processus de validation des actes modificatifs prévu par la législation européenne.
Dans l’attente de cette publication, les importations sont actuellement possibles sous couvert du respect des dispositions nationales fixées par l’arrêté ministériel du 19 juillet 2002. Ce texte impose notamment que tous les animaux vivants en provenance des pays tiers soient soumis aux fameux contrôles vétérinaires d’introduction dans un poste de contrôle frontalier.
À ce jour, et cela répond à votre seconde question, seuls les postes de contrôle frontalier de Caen-Ouistreham, de Cherbourg et de Saint-Malo sont désignés et disposent des infrastructures adaptées pour le contrôle de ces animaux sur la façade Manche. Vous l’avez dit, ce n’est pas tenable en l’état.
Les demandes d’extension du champ de désignation d’autres postes de contrôle frontaliers relèvent non pas de la compétence du ministère de l’agriculture et de l’alimentation, mais de celle des gestionnaires des points d’entrée – ports et tunnels – au regard de leur appréciation de l’opportunité d’investir dans des infrastructures nécessaires, considérant les flux attendus.
Aussi, si ces derniers l’estiment opportun, ils peuvent présenter un dossier de désignation, qui sera bien évidemment étudié par les services du ministère de l’agriculture et de l’alimentation avec attention, en particulier par le service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières, puis transmis à la Commission européenne afin de recueillir son accord.
Monsieur le sénateur, je tiens à vous assurer que le ministre de l’agriculture et de l’alimentation est attaché comme vous au lien social que cette activité permet de créer dans nos territoires, mais il est aussi le garant du respect des règles sanitaires applicables à l’entrée de l’Union européenne.
Soyez convaincu que les services suivent de très près ce dossier et reprendront au plus vite la désignation de nouveaux postes. Nous vous tiendrons évidemment au courant des évolutions.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour la réplique.
M. Jean-Pierre Decool. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie pour cette réponse du ministre de l’agriculture dont je ne peux, vous l’imaginez bien, me satisfaire.
Je vous invite à relayer mon attente pour être plus rapide que les rapides. La saison colombophile internationale est déjà bien entamée ; dans un mois et demi, elle sera achevée. J’ai le sentiment que, lorsque les réponses vont arriver, les compétitions seront terminées.
Au-delà du lien social, nous avons aussi avec les Britanniques des relations économiques. Je vous adresse cette supplique : il faut tout faire pour que nous obtenions une réponse extrêmement rapide.
stage dans une petite entreprise pour les étudiants des grandes écoles
M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 1450, transmise à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
M. Yannick Vaugrenard. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la possibilité de rendre obligatoire un stage en PME pour les étudiants des grandes écoles, comme l’École nationale d’administration (ÉNA), l’École polytechnique ou encore l’École nationale supérieure des Mines de Paris.
En effet, bien que la situation sanitaire actuelle occupe une grande partie des actions menées par le Gouvernement, il est essentiel de ne pas mettre de côté des initiatives qui pourraient aider les entreprises, notamment les plus petites, les PME et les très petites entreprises (TPE).
En 2015, 63 % des salariés étaient employés dans une PME, mais ces entreprises embauchent beaucoup moins de jeunes diplômés que les grandes sociétés. Or cela leur porte préjudice, car de nombreuses études montrent l’importance de ces profils pour le développement mais aussi pour le dynamisme des entreprises.
D’autres pays européens, comme le Royaume-Uni, se sont saisis du problème et ont mis en place des programmes spécifiques associant grandes universités et PME et facilitant les stages. En Allemagne, le niveau moyen d’encadrement des entreprises est bien meilleur que celui des PME et entreprises de taille intermédiaire (ETI) françaises, notamment parce que les jeunes diplômés s’y orientent naturellement à la sortie de leurs études.
Il paraît donc opportun de faire découvrir aux futurs grands décideurs ce qui fait notre richesse économique. Trop souvent, les étudiants des grandes écoles intègrent directement de grands établissements, privés ou publics, ce qui ne les confronte pas à la diversité économique de notre pays et de nos territoires. Nos dirigeants sont par ailleurs très demandeurs de ce type d’initiative et la Banque publique d’investissement, Bpifrance, y a déjà travaillé. C’est une volonté forte exprimée par les réseaux de petites et moyennes entreprises.
Il me semble donc primordial d’instaurer, de manière systématique, au moins un stage dans une petite entreprise dans le cursus des étudiants de nos grandes écoles françaises.
Je vous saurais gré de bien vouloir m’indiquer, madame la ministre, ce que le Gouvernement compte faire sur ce sujet.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Monsieur le sénateur Vaugrenard, les grandes écoles, notamment celles du service public, ont toujours attaché une importance particulière aux expériences en milieu professionnel de leurs étudiants.
Ainsi, à l’ÉNA, les élèves suivent un stage de sept mois en préfecture ou en collectivité territoriale, au cours duquel ils effectuent une « mission entreprise » de deux mois, au sein d’une PME ou d’une PMI du territoire. Il s’agit d’une nouveauté, datant de 2019, mise en place sous l’impulsion du directeur de l’école, car, auparavant, les stages en entreprise avaient lieu majoritairement dans de grandes entreprises françaises. Les retours d’expérience de ce nouveau stage sont particulièrement positifs, de la part tant des élèves que des entreprises.
En outre, dans le cadre de l’Institut national du service public, qui sera créé au 1er janvier 2022, ces stages en entreprise seront pérennisés et l’ouverture des élèves sur le secteur privé sera renforcée par la création d’un tronc commun à toutes les écoles de service public.
Toujours dans la même dynamique, l’Institut national des études territoriales prévoit un stage d’ouverture de quatre semaines pouvant s’effectuer dans le secteur privé. Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) met à la disposition des employeurs de la documentation sur les modalités de transmission des offres de stage.
Cela correspond aussi à la volonté de Polytechnique, école dans laquelle les élèves ingénieurs participent, dès la première année, comme dans toutes les écoles d’ingénieurs, à un stage de terrain dans les territoires. Ils effectuent également un stage en entreprise durant leurs deuxième et quatrième années de formation. Ainsi, les élèves ingénieurs de l’École supérieure des Mines ParisTech passent au minimum douze mois en entreprise sur les trois années de formation.
Le Gouvernement est par ailleurs attaché au renforcement des liens entre l’ensemble des étudiants et le tissu des PME de nos territoires. Les volontariats territoriaux en entreprise permettent, par exemple, à des étudiants du supérieur d’avoir des expériences en PME industrielle, avec des soutiens financiers. L’apprentissage est également un levier puissant d’accueil d’étudiants dans des PME. L’innovation des PME est également encouragée via le renforcement des partenariats public-privé.
Le Gouvernement est donc mobilisé pour établir un lien fort et durable des étudiants avec les petites et moyennes entreprises. J’encourage l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur, universités et écoles, à signer des partenariats, en lien avec les collectivités et les PME-PMI qui les entourent.
M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour la réplique.
M. Yannick Vaugrenard. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.
Vous avez indiqué, au début de votre intervention, que les élèves de l’ÉNA faisaient des stages en sous-préfecture – c’est le cas la plupart du temps – et un stage de quelques semaines en entreprise. Il me semblerait préférable d’inverser ce ratio, afin que les étudiants passent beaucoup plus de temps dans nos petites et moyennes entreprises et dans nos entreprises de taille intermédiaire. Cela leur permettra probablement d’être beaucoup plus conscients, lorsqu’ils occuperont des postes importants dans la haute administration et qu’ils rédigeront des décrets d’application ou des projets de loi ou de directives, des réalités du terrain et de l’« applicabilité » des mesures que nous décidons, à l’échelon national.
Il est donc important de renforcer ce qui a déjà été commencé. Il existe une fracture culturelle, territoriale et sociale ; une telle mesure éviterait ou, tout au moins, diminuerait ce type de fracture, que chacun regrette.
suppression d’une licence professionnelle consacrée au bois
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, auteur de la question n° 1676, adressée à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
M. Bruno Sido. Madame la ministre, j’appelle votre attention sur la licence professionnelle consacrée au bois et à l’ameublement du lycée Charles-de-Gaulle de Chaumont, en Haute-Marne.
Cette licence professionnelle consacrée au bois et à l’ameublement, avec option « création et design du cadre de vie » ne devait plus être dispensée dans le lycée, à partir de la rentrée 2021. Cette décision a provoqué une grande incompréhension dans le département, alors que cette formation est dispensée depuis huit ans et que, l’année dernière, pas moins de 70 candidatures ont été reçues pour seulement 15 places.
Fort heureusement, cette décision ministérielle a été annulée après la mobilisation de nombreux acteurs contre cette fermeture, et je m’en réjouis.
Ce que je regrette, en revanche, c’est le manque de concertation entre le Gouvernement, l’université et ses enseignants, ainsi que les élus locaux et les chambres consulaires. Si cette décision avait été justifiée, elle aurait été acceptée, probablement. Dans ce cas précis, elle ne l’était pas, bien au contraire.
La filière bois a un réel avenir sur notre territoire, puisque notre département possède désormais le premier parc national des forêts de plaines et de nombreux atouts dans ce domaine. Des efforts ont été réalisés pour dynamiser notre territoire et offrir des formations post-bac aux jeunes du territoire, en adéquation avec notre environnement et nos projets économiques et touristiques. Par conséquent, il était incompréhensible de mettre fin, sans concertation, à une formation qui offre aux jeunes diplômés des débouchés immédiats en Haute-Marne. Proposer des formations post-bac permet à nombre de jeunes d’étudier dans le département puis d’y rester pour y travailler.
Madame la ministre, il faut promouvoir les formations pourvoyeuses d’emplois.
Par conséquent, que compte faire le Gouvernement pour que les formations en lien avec la filière bois perdurent dans le département de la Haute-Marne et que les jeunes puissent ensuite y travailler et y vivre ? D’une manière générale, les enseignants, les élus locaux et le monde professionnel seront-ils dorénavant consultés sur les filières post-bac, afin que les jeunes s’engagent dans des filières d’avenir avec des emplois à la clé ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur Sido, les licences professionnelles sont proposées par les universités et l’université de Reims Champagne-Ardenne a été accréditée, en 2018, pour délivrer le diplôme de licence professionnelle Bois et ameublement, dont l’enseignement est dispensé au lycée Charles-de-Gaulle de Chaumont.
Comme vous le soulignez, il s’agissait d’une formation innovante, répondant à une réelle demande territoriale ; c’est bien pour cela que mon ministère soutenait cette formation.
Néanmoins, la formation proposée n’était pas conforme à la réglementation applicable aux licences professionnelles, avec notamment un nombre trop faible d’enseignants-chercheurs ou d’enseignants universitaires au sein de l’équipe pédagogique. L’accréditation avait par conséquent été donnée pour trois ans et assortie d’une demande de réexamen à mi-parcours ; ces trois années devaient permettre à l’université de se mettre en conformité avec la réglementation, en garantissant le caractère universitaire de la formation.
L’université de Reims Champagne-Ardenne a transmis, en octobre 2020, un dossier de demande de prolongation de l’accréditation pour cette licence. Cette demande a été instruite par le collège des conseillers scientifiques et pédagogiques de la direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (DGESIP), qui a sollicité des compléments d’information auprès de l’université, notamment des données chiffrées portant sur l’insertion professionnelle et sur la composition de l’équipe pédagogique.
L’université a répondu à cette demande, mais la réponse apportée a été jugée insatisfaisante sur les deux aspects cruciaux de la formation professionnalisante : d’une part, l’implication de l’université demeurait trop faible, seuls 8 % des enseignements étant dispensés par des enseignants-chercheurs ou enseignants de l’université ; d’autre part, la relation avec le tissu économique était réduite à l’évocation d’une seule et unique entreprise locale, ce qui est assez peu, vous en conviendrez, en matière de perspectives d’insertion professionnelle pour les étudiants…
La DGESIP a donc émis un avis défavorable sur le renouvellement de cette accréditation. Néanmoins, j’ai été sensible aux réactions que cela a suscitées et qui m’ont touchée ; j’ai donc décidé de surseoir, pour un an, à la fermeture de cette licence.
L’accréditation de l’université a ainsi été prolongée jusqu’à 2022, avec une liste très claire d’exigences, dont la réalisation sera vérifiée dans six mois, portant tant sur l’implication de l’université que sur les perspectives d’insertion professionnelle des étudiants.
Chaque année, environ 2 000 licences professionnelles sont accréditées par le ministre, ce qui représente plus de 52 000 étudiants. Il s’agit d’un diplôme phare de l’université, parce qu’il permet une réelle insertion professionnelle. C’est dans cet esprit et en concertation avec les acteurs locaux que mes services continueront d’instruire ce dossier.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour la réplique.
M. Bruno Sido. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre ; je comprends désormais mieux le problème.
Je conçois parfaitement que l’on ferme des formations qui ne trouvent pas de débouché, mais, en l’occurrence, il y a des débouchés et les demandes en faveur de cette formation sont nombreuses. Il appartient donc à l’université de Reims Champagne-Ardenne de régler les problèmes internes, mais nous tenons au maintien de cette formation en Haute-Marne.
manque de places dans les structures pour enfants handicapés
M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, auteure de la question n° 1572, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Mme Corinne Imbert. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les difficultés liées au manque de place en institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (ITEP) et en institut médico-éducatif (IME), structures accueillant des enfants et des adolescents en situation de handicap.
À l’inverse, depuis plusieurs années, on observe une augmentation importante du nombre de places en service d’éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad). Cette évolution s’explique par une volonté d’accompagner les enfants dans les différents lieux dans lesquels ils évoluent quotidiennement et de développer l’école inclusive, démarche qui est à saluer.
Toutefois, l’augmentation du nombre de places en Sessad se fait au détriment du nombre de places en ITEP et en IME. Or nombre d’enfants en situation de handicap ne peuvent être accompagnés dans ce format externalisé et doivent être suivis dans des établissements spécifiques et équipés pour les accueillir. C’est pourquoi de nombreux enfants et adolescents se retrouvent actuellement sur liste d’attente, pour une éventuelle admission dans un ITEP ou dans un IME.
Aussi, madame la secrétaire d’État, je souhaite savoir si le Gouvernement entend procéder à une augmentation des moyens ou à un rééquilibrage du nombre de places entre, d’un côté, les ITEP et les IME, et, de l’autre, les Sessad, afin de répondre aux besoins spécifiques des enfants en situation de handicap.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice, je salue l’attention que vous portez à la transformation de l’offre médico-sociale pour les enfants.
Cette transformation conduit à réviser les équilibres de répartition de places entre solutions d’hébergement en structure spécialisée et services d’accompagnement à domicile et en milieu ordinaire, c’est-à-dire à l’école.
Cela dit, nous préservons aussi les offres destinées aux enfants qui ont les besoins les plus complexes. Je tiens à vous le signaler, depuis quatre ans, 1 368 places ont été créées dans les ITEP, IME et instituts médico-professionnels (IMPro) ; cela représente une augmentation de plus de 2 % et nous permet d’atteindre près de 70 000 places pour répondre à ces besoins.
Cette dynamique de transformation est nécessaire pour répondre aux nouveaux besoins des enfants et pour aller dans le sens de l’école inclusive, que vous mentionnez, qui se fonde sur la coopération entre l’école ordinaire et le médico-social. C’est ainsi que Jean-Michel Blanquer et moi promouvons cette trajectoire, consistant à ouvrir largement les portes des établissements spécialisés et de l’éducation nationale afin que cette coopération soit une réalité pour les enfants et pour leurs familles, qui plaident pour une telle évolution.
Aujourd’hui, nous créons des unités d’enseignement spécialisé – les classes adaptées pour les autistes et les classes externalisées – afin de mettre en œuvre cette coopération si indispensable. Nous créons aussi des formations conjointes entre les enseignants et le secteur médico-social pour mieux répondre aux besoins, même les plus complexes, des enfants.
C’est ainsi que nous créons – je tiens à souligner cette grande avancée – des classes externalisées pour les enfants polyhandicapés, dont le rapport à l’apprentissage est complexe mais qui ont le droit d’apprendre au milieu des autres.
C’est comme cela que nous transformons le regard sur la différence et sur la grande différence, et c’est ainsi que nous ferons croître le degré d’acceptation de la différence en France, afin de permettre au handicap de « circuler » plus facilement. Cela permettra également aux familles de changer de regard sur leurs enfants, même ceux dont les besoins sont les plus complexes.
Donc, oui, nous devons répondre.
Par ailleurs, nous sommes aussi confrontés à une grande urgence : la résolution de la situation des jeunes relevant de l’amendement Creton – communément appelés les « amendements Creton », ils sont près de 6 000 en France –, qui bloque des entrées en IME ou en ITEP. Pour beaucoup, cela se fait en coopération avec les départements, car nombre de notifications concernent des foyers de vie. Nous répondrons différemment, avec l’habitat inclusif ; nous développons plus de 10 000 places, qui sortiront beaucoup plus vite pour ces jeunes adultes, dont la prise en charge est, elle aussi, inadaptée.
Cette transformation est massive et mise en œuvre en pleine coopération avec l’éducation nationale, les organisations gestionnaires, les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et les départements, car c’est ainsi que nous pourrons répondre à tous les besoins des enfants.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour la réplique.
Mme Corinne Imbert. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de votre réponse.
Oui à l’inclusion, bien sûr ! Vous vous en doutez, je partage votre sentiment sur ce point ; je sais à quel point vous êtes impliquée dans vos fonctions. Je ne suis évidemment pas du tout opposée à la transformation de l’offre destinée aux enfants en situation de handicap.
Pourquoi ai-je posé cette question ? Parce que je me suis appuyée sur l’exemple du département dont je suis élue et que vous connaissez bien, madame la secrétaire d’État, la Charente-Maritime, et je sais la qualité des relations que vous entreteniez avec le président Dominique Bussereau. Or, récemment, on comptait 74 jeunes inscrits sur liste d’attente pour intégrer un institut médico-éducatif et environ 13 jeunes en attente d’une place en ITEP.
Face à ce manque de place, les enfants étaient redirigés vers les unités localisées pour l’inclusion scolaire, les fameuses ULIS, en lien avec l’éducation nationale. Parfois, parce que les choses sont compliquées et qu’il faut du temps pour les mettre en route, on ne pouvait pas forcément prendre en charge comme il se devait ces enfants, qui relevaient d’un autre type d’établissement mais qui se retrouvaient, par défaut, en ULIS, où ils ne bénéficiaient pas de l’accompagnement souhaité.
Voilà ce sur quoi je souhaitais attirer votre attention, madame la secrétaire d’État. C’est un travail de longue haleine, je le sais, mais attention à ne pas réduire trop le nombre de places en IME !
Par ailleurs, vous évoquiez les « amendements Creton ». Le département a redéployé des moyens pour créer des places en foyer occupationnel, de façon à libérer des places en IME. La première année, cela a fonctionné, les résultats étaient bons, mais, avec la baisse des places en IME, nous avions l’impression que nos efforts étaient anéantis.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Corinne Imbert. Je souhaitais donc appeler l’attention du Gouvernement sur ce sujet.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, en remplacement de Mme Catherine Belrhiti, auteure de la question n° 1599, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Mme Corinne Imbert. Madame la secrétaire d’État, je pose effectivement cette question au nom de ma collègue Catherine Belrhiti, retenue dans le département dont elle est élue et qui vous prie de bien vouloir excuser son absence.
Nous allons changer totalement de sujet.
Le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) régule l’accès des exploitants au foncier agricole en fonction des enjeux nationaux et locaux. Ce schéma, encadré par les articles L. 331-1, R. 331-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, soumet certaines opérations de mise en valeur des terres – installation, agrandissement ou réunion d’exploitations – à autorisation préalable.
Il est particulièrement utilisé pour permettre aux petites structures d’être privilégiées par rapport aux grandes exploitations, dans l’obtention de l’autorisation d’acquérir et d’exploiter les terres agricoles libérées. Il permet de lutter contre la concentration excessive des terres et de consolider les petites exploitations.
Il paraît néanmoins que, même si le schéma permet aux agriculteurs français d’être mis en concurrence dans des conditions justes et équitables, ce n’est pas le cas lorsqu’il s’agit d’agriculteurs étrangers frontaliers, qui sont nombreux, notamment dans la région Grand Est. Alors que le contrôle des structures est pleinement appliqué pour un agriculteur français et que l’ensemble des terres agricoles qu’il cultive sont prises en compte, seules les terres exploitées par un agriculteur étranger en France sont comptabilisées et soumises au contrôle administratif du préfet.
Les agriculteurs étrangers sont donc favorisés si la majeure partie de leur exploitation est située à l’étranger. Il en résulte une distorsion flagrante de concurrence puisque les agriculteurs français ont plus de difficultés à obtenir l’autorisation d’exploiter de nouvelles terres agricoles.
Cette situation ne peut se résoudre uniquement à l’échelon national. Même si le code rural exige de prendre en considération l’ensemble des superficies mises en valeur par le candidat, sous quelque forme que ce soit et toutes productions confondues, le Gouvernement français doit agir à l’échelon européen pour faire respecter l’équité et la libre concurrence entre tous les agriculteurs.
Je souhaite donc savoir, madame la secrétaire d’État, si le Gouvernement compte agir afin de faire en sorte que l’ensemble des terres des agriculteurs puissent être contrôlées, qu’elles soient situées en France ou dans des pays limitrophes.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Je réponds également au nom de l’un de mes collègues, M. le ministre de l’agriculture.
Comme vous le mentionnez, madame la sénatrice, l’application, aux agriculteurs étrangers, de la réglementation du contrôle des structures peut poser certaines difficultés. Si tout agriculteur, quelle que soit sa nationalité, doit respecter les dispositions du contrôle des structures sur notre territoire, la loi française est soumise au principe de territorialité. Les terres exploitées à l’étranger ne sont ainsi pas soumises au contrôle administratif du préfet.
Mme Belrhiti défend l’idée d’une action à l’échelon européen pour résoudre ces difficultés. L’Union européenne a marqué son intérêt, au cours des dernières années, pour les questions relatives à la régulation du foncier agricole : d’une part, avec la publication du Rapport sur l’état des lieux de la concentration agricole dans l’Union européenne : comment faciliter l’accès des agriculteurs aux terres ?, ayant donné lieu à une résolution adoptée par le Parlement européen en avril 2017 ; d’autre part, en septembre 2017, au travers de la communication interprétative de la Commission sur l’acquisition de terres agricoles et le droit de l’Union européenne. La réflexion mérite d’être poursuivie.
Pour autant, l’article 345 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dispose : « Les traités ne préjugent en rien le régime de la propriété dans les États membres. » Les règles régissant l’utilisation des terres agricoles relèvent ainsi de la compétence des États membres. La possibilité de tendre vers un cadre de réglementation harmonisé à l’échelon européen me semble donc très hypothétique au regard de la complexité du sujet et de contextes différents, y compris entre pays frontaliers.
Si les circonstances locales le justifient, des solutions peuvent être toutefois trouvées dans la coopération transfrontalière. Je peux ainsi citer les travaux menés dans le cadre de la conférence transjurassienne : à cette occasion, les autorités françaises et suisses ont mis en place une commission technique de conciliation foncière, qui permet de coordonner la régulation du foncier entre les deux pays. Cette commission a permis de mettre en place un protocole de suivi des exploitants suisses en France relevant d’une collaboration entre l’administration française, dans les départements du Doubs et du Territoire de Belfort, et le service des douanes suisses. Cela ne résout pas tous les problèmes juridiques, mais cela permet de fluidifier les échanges dans le traitement des dossiers.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour la réplique ; vous avez vingt-deux secondes et pas une de plus, ma chère collègue !
Mme Corinne Imbert. Je serai brève, monsieur le président.
Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État. Ma collègue Catherine Belrhiti en prendra connaissance avec beaucoup d’attention, même si j’ai bien compris qu’il y avait peu d’espoir en cette matière, sauf à faire appel à l’intelligence locale, au travers de coopérations transfrontalières.
Il est curieux que cela fonctionne avec la Suisse, qui n’est pas membre de l’Union européenne, mais, après tout, ceci explique peut-être cela… (Sourires.)
difficultés liées aux épisodes de sécheresse-réhydratation des sols et fonds exceptionnel de soutien aux victimes
M. le président. La parole est à Mme Sabine Van Heghe, auteure de la question n° 1720, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement.
Mme Sabine Van Heghe. Madame la secrétaire d’État, depuis maintenant deux ans, je me mobilise pour des familles demeurant dans le département dont je suis élue, le Pas-de-Calais, plus particulièrement dans la commune de Leforest, victime de l’épisode de sécheresse-réhydratation des sols de 2018.
En août 2019, le maire de cette commune a été contraint de prendre un arrêté de péril imminent relatif à certaines habitations, forçant ainsi des familles à quitter leur domicile. En effet, ces logements étant construits sur une zone argileuse, qui se gonfle ou se rétracte au gré des épisodes météorologiques, d’importantes fissures sont apparues sur les murs intérieurs et extérieurs des bâtiments, à la suite de l’épisode de sécheresse de 2017 ; depuis lors, elles ne cessent de s’étendre.
Or les familles continuent de payer des traites pour les maisons qu’elles ne peuvent plus habiter et doivent, en outre, s’acquitter des loyers des logements dans lesquels elles ont dû évacuer.
Les difficultés semblaient inextricables jusqu’à une excellente nouvelle, datant de samedi dernier : la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pour des communes supplémentaires touchées par la sécheresse de 2018, dont Leforest. Je me réjouis de cette annonce, qui récompense la mobilisation des élus, des associations et de la commission interparlementaire créée à cette occasion, pour que justice soit rendue à ces communes touchées.
Reste toutefois un problème de taille pour certaines familles : leurs assureurs les ont lâchées en résiliant leur contrat d’habitation, en raison de l’importance du risque à supporter. La toute récente reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pour la commune de Leforest doit maintenant permettre l’indispensable indemnisation de ces familles.
Je vous demande donc, madame la secrétaire d’État, que le Gouvernement soit très attentif à l’implication et à l’accomplissement du devoir des assureurs, dont certains ont abusé du droit à résiliation. Il y va de l’avenir de ces familles, déjà très durement éprouvées.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice, vous interrogez ma collègue ministre déléguée chargée du logement, dont je vous prie d’excuser l’absence, sur la situation des victimes de l’épisode de sécheresse-réhydratation des sols de 2018.
Le Gouvernement est très attentif à cette question. Il convient d’abord de rappeler que le Gouvernement, en application de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ÉLAN) et par arrêté du 22 juillet 2020, a pris des mesures préventives concernant la construction neuve, en imposant des études géotechniques dans les zones d’aléas pour le retrait-gonflement d’argile. Il s’agit d’assurer que ce type de dégâts ne se reproduise pas pour les constructions à venir.
À plus court terme, afin de remédier à certaines situations d’urgence liées à la sécheresse de 2018, la loi de finances pour 2020 a prévu la mise en place exceptionnelle, à hauteur de 10 millions d’euros, d’un dispositif de soutien aux victimes les plus affectées par la sécheresse de 2018. Ce fonds, forcément limité, doit en priorité aider les ménages qui se trouvent dans les situations les plus difficiles. Ainsi, sont éligibles uniquement les travaux lourds et coûteux, qui nécessitent une intervention sur la structure ou les fondations. Il a également paru nécessaire de cibler prioritairement les propriétaires aux revenus modestes, qui n’auraient pu réaliser de tels travaux sans cette aide.
Cela étant, comme vous le soulignez, la typologie des demandes reçues depuis la mise en place de ce fonds a conduit à étudier son ouverture à des ménages aux revenus intermédiaires. Aussi, le Gouvernement a élargi par décret, fin mai dernier, le périmètre d’attribution de l’aide, pour y inclure les ménages aux revenus intermédiaires, compris entre les cinquième et huitième déciles de l’échelle des revenus, et a prolongé l’ouverture du dépôt des demandes jusqu’au 31 juillet 2021.
Plus largement, le régime de catastrophe naturelle s’avère être un dispositif ancien, dont les critères s’adaptent difficilement à la multiplication des sécheresses. Aussi, dans une perspective de plus long terme, pour concevoir une solution structurelle et pérenne face aux dégâts qui en découlent, le Gouvernement a mandaté plusieurs inspections – Inspection générale des finances, Inspection générale de l’administration et Conseil général de l’environnement et du développement durable –, qui ont remis leur diagnostic et leurs propositions en mai dernier.
Sur le fondement de ce travail, certaines dispositions législatives nouvelles pourraient être introduites, via la proposition de loi du député Stéphane Baudu portant sur ce sujet. Ce texte, après avoir été adopté à l’unanimité, en première lecture, à l’Assemblée nationale, en janvier dernier, doit désormais être examiné au Sénat. Vous aurez donc l’occasion d’y revenir.
M. le président. La parole est à Mme Sabine Van Heghe, pour la réplique.
Mme Sabine Van Heghe. Je vous remercie de vos propos, madame la secrétaire d’État. La reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle va permettre l’indemnisation des victimes par les assurances, sous réserve que celles-ci jouent leur rôle.
Cette décision est récente ; cela fait trois ans que ces familles vivent dans l’angoisse, il est temps que la lueur d’espoir se transforme en apaisement et en un retour à la vie normale. Je compte sur le Gouvernement pour les accompagner jusqu’au bout.
zone frontalière franco-espagnole et bassin d’emploi de l’hôpital transfrontalier de cerdagne
M. le président. La parole est à M. François Calvet, auteur de la question n° 1710, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
M. François Calvet. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur la nécessité d’accorder le périmètre prévu par la convention fiscale franco-espagnole du 10 octobre 1995, déterminant la qualité de travailleur frontalier, au bassin d’emploi de l’hôpital transfrontalier de Cerdagne.
Cet établissement a été institué sous la forme d’un groupement européen de coopération territoriale (GECT) par la convention du 26 avril 2010, signée par la France, l’Espagne et la Généralité de Catalogne. Cette convention a été suivie par la ratification de l’accord-cadre de coopération sanitaire transfrontalière entre la République française et le Royaume d’Espagne, autorisée par le Parlement, au travers de la loi du 28 avril 2014.
La vocation première de l’hôpital transfrontalier de Cerdagne, situé côté espagnol, dans la commune de Puigcerdà, est de fournir des soins médicaux aux habitants du plateau de Cerdagne, de part et d’autre de la frontière franco-espagnole. Il s’agit d’une population d’environ 30 000 personnes, qui n’avaient pas d’accès facile aux soins, leur région montagneuse étant enclavée.
De façon logique, le bassin d’emploi de l’hôpital correspond à sa zone de compétence : le plateau de Cerdagne est un peu plus étendu que la zone frontalière prévue par la convention fiscale franco-espagnole. Le rayon prévu par cette convention n’est que de 20 kilomètres de part et d’autre de la frontière, mais il s’avère manifestement insuffisant, car nombre d’employés de l’hôpital habitent au-delà, quelquefois même plusieurs kilomètres plus loin, et ne peuvent par conséquent bénéficier du statut de travailleur frontalier, ce qui leur est particulièrement préjudiciable. À titre de comparaison, j’observe qu’un rayon de 30 kilomètres avait été retenu pour définir les déplacements transfrontaliers lors des derniers confinements liés à la pandémie de la covid-19.
Je souhaite donc savoir, madame la ministre, si le Gouvernement envisage de modifier la convention fiscale franco-espagnole afin d’élargir cette zone transfrontalière et, dans l’affirmative, dans quel délai.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Monsieur le sénateur François Calvet, vous l’avez évoqué, afin de sécuriser la situation de leurs travailleurs frontaliers, la France et l’Espagne se sont accordées dès les années 1960 sur un régime frontalier spécifique. Ce régime a été modifié à plusieurs reprises, puis intégré dans sa forme actuelle dans la convention, actuellement en vigueur, du 10 octobre 1995.
Le point 12 du protocole de la convention garantit aux travailleurs frontaliers d’être imposés sur leurs revenus d’activité dans l’État dont ils sont résidents.
Conformément à l’article 2 de l’accord complémentaire entre la France et l’Espagne relatif aux travailleurs frontaliers, le statut de frontalier est reconnu aux travailleurs résidant dans une liste limitative de communes situées à une distance de 20 kilomètres au plus de la frontière espagnole. Il est précisé que ce régime est tout à fait comparable, sous cet aspect, à celui qui a été conclu avec les autres pays frontaliers, la Belgique et l’Allemagne par exemple.
La question des travailleurs frontaliers, et plus particulièrement la révision du régime prévu, peut difficilement être envisagée sous le seul angle des besoins exprimés par les travailleurs de l’hôpital transfrontalier de Cerdagne. En effet, une extension à 30 kilomètres de la zone frontalière aurait, par construction, des conséquences plus larges et générales.
La modification de ces règles devrait nécessairement passer par un accord bilatéral, ce qui suppose un accord de nos partenaires espagnols et une révision de la convention, dont la ratification prendrait plusieurs années. Je vous rappelle qu’il a fallu près de trente-cinq ans pour parvenir à l’accord consolidé de 1995 !
Par ailleurs, aucun accord fiscal temporaire n’a été conclu avec nos voisins espagnols pour prévenir les conséquences de la crise sanitaire, car ils ne l’ont pas souhaité.
C’est pourquoi, au regard de l’ensemble de ces éléments, l’extension de la zone transfrontalière que vous évoquez dans votre question, et dont la pertinence est pleinement reconnue, n’est pas envisagée à ce jour.
M. le président. La parole est à M. François Calvet, pour la réplique.
M. François Calvet. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
Nous avons réussi, avec l’hôpital, à avancer sur de nombreux sujets, notamment sur l’agrément des médecins. Je n’y insiste pas.
Cela dit, je souhaite que ce point soit inscrit à l’ordre du jour d’un prochain sommet franco-espagnol.
(Mme Nathalie Delattre remplace M. Georges Patient au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE Mme Nathalie Delattre
vice-présidente
recensement prévu en 2021 de la population légale en guyane
Mme la présidente. La parole est à M. Georges Patient, auteur de la question n° 1539, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
M. Georges Patient. Madame la ministre, je veux attirer l’attention du Gouvernement sur la sous-évaluation de la population de Guyane. Cette sous-évaluation, importante et persistante, est, par ricochet, très préjudiciable pour les ressources des collectivités quand on sait que le montant des dotations qui leur sont attribuées est fonction de leur nombre d’habitants.
On peut affirmer avec certitude que le chiffre réel de la population est nettement au-dessus des 280 000 habitants que lui attribue l’Insee : le chiffre de 350 000, voire de 400 000 habitants correspondrait plus à la réalité du territoire.
La cause en est le recensement fait par l’Insee, qui, certainement par nécessité, continue à appliquer les mêmes méthodes que dans l’Hexagone, alors que la situation de la Guyane est toute particulière et, surtout, très différente.
Effectivement, contrairement à ce qui se passe dans les communes de l’Hexagone, il y a, en Guyane, une forte croissance démographique, de nombreux quartiers d’habitat spontané, des zones forestières difficiles d’accès et à forte dangerosité, en raison de la présence de garimpeiros – les chercheurs d’or – et d’une forte immigration clandestine.
Dans ces conditions, utiliser les seules sources administratives est loin de suffire : il faudrait y ajouter les enquêtes de terrain, les données sur la consommation d’eau et d’électricité et le volume des déchets si l’on veut parvenir à une fiabilité en matière de recensement.
Pour illustrer mes propos, et à titre d’exemple, alors que la croissance annuelle moyenne sur les dix dernières années est de 2,6 %, l’Insee n’a pas hésité à publier une croissance de la population négative pour 2020, à –0,26 % ! C’est une première. Qui peut le croire, à part l’Insee ?
Aussi, madame la ministre, j’aimerais savoir quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour assurer un contrôle des données de 2020, d’une part, et pour améliorer la fiabilité des données issues du recensement en Guyane, d’autre part.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Monsieur le sénateur Georges Patient, votre question m’invite à vous répondre en deux temps.
En ce qui concerne la croissance de la population guyanaise en 2020, les populations légales des communes de Guyane intègrent, depuis le début de l’année 2020, une rénovation dans la méthode de recensement des zones d’orpaillage clandestines. Cette rénovation vise à en améliorer la précision et à assurer l’égalité de traitement des communes guyanaises entre elles et avec le reste du territoire français, afin de fiabiliser les chiffres utiles pour l’édiction des dispositions réglementaires qui en découlent.
Désormais, la collecte dans ces zones fait l’objet de contrôles qualité renforcés de l’Insee. Lorsque, pour des raisons de sécurité, la collecte sur le terrain n’est pas possible, la population de ces zones est mise à jour via la préfecture de Guyane, à partir des données de l’Observatoire de l’activité minière. Ce n’était pas le cas auparavant, ce qui conduisait à une surestimation du nombre de personnes résidant dans les zones d’orpaillage.
L’évolution des populations légales des communes guyanaises entre 2019 et 2020 traduit l’ajustement opéré pour corriger cette surestimation. Elle ne doit pas être confondue avec l’évolution démographique de la population résidant sur ces territoires, qui s’est poursuivie selon la même dynamique.
En ce qui concerne le report des opérations de recensement sur le terrain en 2021 et l’actualisation des populations légales au 1er janvier 2022, l’Insee a engagé des travaux méthodologiques pour disposer d’estimations fiables, en l’absence de collecte sur le terrain.
Les premiers résultats ont fait l’objet d’une présentation devant la Commission nationale d’évaluation du recensement de la population le 13 avril dernier. La qualité des estimations de populations obtenues est pleinement satisfaisante et lève les craintes que l’actualisation des populations légales, dans le contexte d’un report de l’enquête annuelle de recensement, a pu susciter.
Mme la présidente. La parole est à M. Georges Patient, pour la réplique.
M. Georges Patient. Madame la ministre, votre réponse ne me satisfait pas. On ne parvient pas à corriger la sous-estimation de la population que nous ressentons tous. Voilà pourquoi j’insiste pour qu’il y ait davantage d’enquêtes sur le terrain.
J’espère que l’Insee finira par prendre l’attache des exécutifs locaux et procédera à un recensement exhaustif satisfaisant tout le monde et, surtout, sécurisant les ressources des collectivités locales.
taxe sur la première cession d’un terrain rendu constructible
Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Billon, auteure de la question n° 1725, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics.
Mme Annick Billon. Madame la ministre, comme le prévoit l’article 1605 nonies du code général des impôts (CGI), une taxe sur la première cession d’un terrain rendu constructible s’applique indifféremment de la qualité du cédant, qu’il soit une personne physique ou morale.
À ce titre, une commune doit acquitter la taxe dès lors qu’elle réalise une plus-value sur la vente d’un terrain qu’elle aura rendu constructible.
Or la plus-value est calculée sur la différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition. Ainsi, l’ensemble des travaux inhérents à la viabilisation du ou des terrains, les études d’urbanisme et autres frais engagés pour la réalisation d’un lotissement, par exemple, ne sont pas pris en compte dans le calcul de la plus-value.
L’augmentation du prix de vente du terrain, qui permettrait d’imputer indirectement la taxe afin que la commune ne réalise pas une opération déficitaire, ne constitue pas une solution de substitution pertinente pour de nombreuses communes rurales qui souhaitent développer leur territoire et qui manquent de logements pour répondre aux besoins des salariés des entreprises environnantes. Cela est d’autant plus irréaliste dans le cas de logements sociaux.
Les débats que nous avons eus hier soir sur l’urbanisme et le logement attestent des difficultés et des freins rencontrés par de nombreuses communes, lesquels s’ajoutent au désintérêt des opérateurs.
C’est pourquoi, madame la ministre, je vous demande s’il est envisageable de revoir la méthode de calcul de la taxe prévue à l’article 1605 nonies du CGI.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Madame la sénatrice Annick Billon, comme vous l’indiquez, la taxe prévue à l’article 1605 nonies du code général des impôts s’applique aux cessions de terrains nus rendus constructibles.
Les cessions de terrains nus faisant l’objet d’un lotissement sont soumises à cette taxe, qui s’applique quelle que soit la qualité du cédant – personne physique ou personne morale de droit privé ou de droit public – et sans égard pour le régime fiscal de celui-ci.
La taxe est assise sur un montant égal au prix de cession diminué du prix d’acquisition. Ce prix d’acquisition correspond au prix stipulé dans l’acte ou, à défaut, à la valeur vénale réelle à la date d’entrée dans le patrimoine du cédant.
Le prix de cession est calculé d’après les mêmes règles que celles qui sont applicables en matière d’imposition des plus-values immobilières à l’impôt sur le revenu.
Ainsi, ce prix de cession peut être réduit, sur justificatifs, du montant de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée et de certains frais supportés par le vendeur à l’occasion de cette cession. Les frais engagés pour la cession peuvent donc être déduits, sous réserve qu’ils soient explicitement listés par le code général des impôts.
Par exemple, peuvent être déduits les frais versés à un intermédiaire ou à un mandataire, les frais liés aux certifications et diagnostics rendus obligatoires par la législation en vigueur au jour de la cession, les honoraires versés à un architecte à raison des études de travaux permettant d’obtenir un accord préalable au permis de construire ou encore les frais de mainlevée d’hypothèque.
En revanche, ce droit à déduction ne s’étend pas, comme à l’impôt sur le revenu, à des dépenses telles que les frais de viabilisation des terrains cédés, qui ne sont pas directement liés à la cession.
Par ailleurs, il convient de relativiser les inconvénients de ces règles de calcul pour les collectivités.
Tout d’abord, cette taxe ne s’applique que lorsque le rapport entre le prix de cession et le prix d’acquisition ou la valeur vénale est supérieur à 10, c’est-à-dire pour les plus-values substantielles. Ensuite, les règles de calcul de la taxe assurent que le montant dû ne soit pas trop élevé, via un abattement de 10 % par année de détention au-delà de la huitième année suivant la date à laquelle le terrain a été rendu constructible, avec des taux modérés.
Il est difficilement envisageable de modifier ces règles uniquement pour les collectivités, qui ne constituent que des redevables de la taxe parmi d’autres, au risque de créer une rupture d’égalité devant l’impôt.
En outre, autoriser la déduction des frais de viabilisation serait incohérent avec les objectifs de cette taxe, qui, je vous le rappelle, a pour effet de freiner la transformation de terres agricoles en terrains à bâtir. Son produit est ainsi affecté à un fonds qui finance des mesures en faveur de l’installation et de la transmission en agriculture.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Billon, pour la réplique.
Mme Annick Billon. Je vous remercie de ces réponses, madame la ministre.
Vous affirmez que ces contraintes sont prévues pour limiter la consommation de terres agricoles. Or cette dernière est d’ores et déjà limitée dans les documents d’urbanisme, plans locaux d’urbanisme (PLU) et schémas de cohérence territoriale (SCoT).
Comme je l’ai dit, il existe des dérogations, mais celles-ci sont bien souvent inapplicables aux communes qui souhaitent les faire valoir.
Bien entendu, nous ne demandons pas que les communes puissent se soustraire au paiement de l’impôt. Nous demandons simplement qu’elles aient la possibilité de développer du logement, notamment social.
Je pense à certaines communes de Vendée, comme Les Brouzils ou encore Pouzauges, laquelle compte énormément d’entreprises, notamment d’entreprises de taille intermédiaire (ETI), et un certain nombre de salariés qui ne trouvent pas de logement.
Les communes ont besoin de produire du logement et de viabiliser les terrains. Elles n’en ont pas les moyens, ces travaux représentant un coût substantiel.
(M. Georges Patient remplace Mme Nathalie Delattre au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Georges Patient
vice-président
reprise de la papeterie normande chapelle darblay
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, auteur de la question n° 1753, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
M. Didier Marie. Madame la ministre, en juin 2020, la papeterie normande Chapelle Darblay, unique entreprise à fabriquer du papier 100 % recyclé en France, fermait, malgré sa rentabilité, en raison, selon son propriétaire finlandais UPM, d’un manque de compétitivité et du déclin structurel du papier journal.
Cette usine, fleuron de l’économie circulaire en activité depuis près d’un siècle, pouvait absorber jusqu’à 480 000 tonnes de papier à recycler par an, soit le résultat du tri de 24 millions d’habitants. Dans l’espoir d’une reprise, elle n’a pas été démantelée. Depuis sa fermeture, ses machines et sa chaudière biomasse sont dormantes, mais restent utilisables.
Les repreneurs avaient jusqu’au 30 juin 2021 pour se signaler. Or, le 2 juillet, le propriétaire de l’usine a présenté, dans le cadre d’un comité social et économique exceptionnel, une offre de rachat pour le moins étonnante, puisqu’il s’agit d’une transformation du site en une unité de production d’hydrogène.
Cette offre, issue d’un acteur qui se positionne partout en France, reprendrait seulement partiellement les pièces des machines du site. Elle n’implique ni fret maritime ni fret fluvial et prévoit seulement 70 emplois – pour rappel, ce sont 230 personnes qui ont été licenciées en juin 2020, lors de la fermeture du site.
Référence en matière de transition écologique, Chapelle Darblay représente un important savoir-faire en matière de recyclage, secteur dont l’avenir ne fait aucun doute.
Dans une lettre d’intention, Veolia, géant du traitement de l’eau et des déchets, a présenté, avec deux partenaires, un projet de reprise sérieux et cohérent, qui permettrait de prolonger son activité papetière. Ce groupe a besoin de trois mois pour finaliser ce projet et le transformer en offre concrète. Je me réjouis, dans ce contexte, que, grâce à la mobilisation des salariés de l’usine, la décision finale ait été retardée au mois de septembre prochain.
Compte tenu de l’intérêt de ce projet, qui préserve les compétences de Chapelle Darblay, et de l’engagement pris par le Gouvernement en matière de transition écologique, je vous demande, madame la ministre, de bien vouloir intervenir auprès du propriétaire de ce site pour en assurer la sauvegarde à tous points de vue et de m’indiquer les mesures que le Gouvernement compte prendre en ce sens.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Monsieur le sénateur Didier Marie, je vous remercie de votre question, qui me permet de rappeler l’engagement, sur ce dossier, de la ministre chargée de l’industrie, Agnès Pannier-Runacher. Celle-ci travaille activement à la reconversion du site emblématique de Chapelle Darblay, en instance de cession par son propriétaire, le groupe finlandais UPM.
Je ne vous apprends rien : ce site a dû fermer il y a un an faute de repreneur, dans un contexte sanitaire défavorable. Le Gouvernement a œuvré pour favoriser une reprise, aux côtés des représentants du personnel, dont nous saluons l’implication décisive. L’État a engagé une troisième prospection internationale au début du mois de septembre 2020, via Business France, aux côtés de la région Normandie.
En parallèle, ma collègue a confié une mission au Conseil général de l’économie pour déterminer des pistes de reconversion durable pour Chapelle Darblay.
Le marché du papier journal étant en forte décroissance, la pérennité de l’emploi et de l’activité industrielle exigeait de nouvelles perspectives.
De plus, des pistes de valorisation des actifs présents sur le site, en particulier de la chaudière de biomasse et de la station d’épuration, ont été recherchées. Le Gouvernement et les services de l’État sont en contact direct avec plusieurs acteurs industriels.
Enfin, la convention de revitalisation conclue entre l’État et UPM prévoit le versement de 500 000 euros par UPM, attribués au projet de reprise du site.
Comme vous le savez également, à quelques kilomètres de Chapelle Darblay, une autre papeterie produisant du papier d’impression et comptant 180 emplois, Alizay, se trouvait en grande difficulté.
Nous avons pu garantir la reprise de ces deux sites papetiers normands. Pour chacun d’eux, nous avons une solution d’avenir.
Alizay est reprise par le cartonnier VPK et deviendra un grand pôle de recyclage, avec la production de papier carton pour emballage et la construction d’une usine de recyclage de papiers. Ces productions bénéficieront de l’énergie verte produite par une chaudière biomasse.
À Chapelle Darblay, l’offre de reprise que vous avez mentionnée est portée par deux groupes, Samfi et Paprec, dont les activités sont complémentaires. Alors que 70 emplois seront créés à court terme par l’entreprise Paprec, spécialiste du recyclage et de la valorisation des déchets, 140 emplois supplémentaires seront créés par le groupe Samfi et sa filiale H2V, pour la production d’hydrogène. Nous parlons donc de 210 emplois au total.
Quant à l’entreprise Veolia, présente dans la procédure depuis plus d’un an, elle n’a pas souhaité déposer d’offre ferme pour la reprise de Chapelle Darblay. La lettre d’intention transmise à quelques jours de la fin de la procédure n’a pas suffi à assurer un caractère sérieux.
Nos objectifs sont néanmoins remplis : la filière du recyclage en Normandie, l’activité industrielle à Chapelle Darblay et Alizay et 400 emplois seront maintenus et assurés.
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour la réplique.
M. Didier Marie. Je vous remercie, madame la ministre, mais votre réponse ne me satisfait pas.
Le groupe Veolia, associé à deux autres entreprises, a rédigé une lettre d’intention qui ne l’engage pas juridiquement, mais a demandé trois mois de plus pour finaliser sa proposition.
Le préfet a indiqué que le dépôt de projet était reporté au mois de septembre prochain, ce qui nous convient. Nous souhaitons que le Gouvernement s’engage fortement en faveur d’une reprise par Veolia, en accompagnant ce projet dans tous les domaines qui puissent le faire aboutir.
décision du conseil constitutionnel sur les chartes relatives à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, auteur de la question n° 1704, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Joël Labbé. Madame la ministre, ma question concerne les pesticides.
La protection des riverains face aux épandages des pesticides est un enjeu de santé publique majeur.
Dans son dernier rapport, publié à la fin du mois de juin dernier, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) rappelle et alimente ce triste constat : l’exposition aux pesticides a bien un effet sur la santé – en premier lieu, sur celle des utilisateurs, mais aussi sur celle des riverains.
Malgré les vifs débats suscités par la loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous – la loi Égalim –, malgré une injonction du Conseil d’État de 2019 à revoir la réglementation sur les pesticides, la réponse apportée est toujours plus que décevante. Elle consiste, en effet, à la mise en place de chartes départementales, supposées définir des règles de « bon voisinage », mais dont la fonction essentielle, sur le terrain, est de permettre de déroger aux distances d’épandage fixées par les textes, pourtant très réduites.
Sources majeures de tension à l’échelon local, ces chartes ont été attaquées et, en mars dernier, le Conseil constitutionnel les a jugées non conformes, estimant que la procédure de participation prévue pour leur élaboration ne respectait pas la Charte de l’environnement.
Pas plus tard qu’hier, dans le cadre d’un nouveau recours, le rapporteur public, présentant ses conclusions, appelait le Conseil d’État à annuler les textes encadrant l’épandage des pesticides, en demandant notamment l’information du public avant tout épandage, une distance de 20 mètres sans pulvérisation pour les pesticides CMR 2 – substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction de catégorie 2 – et une protection pour les travailleurs à proximité des zones d’épandage.
Le Gouvernement vient pourtant – au cœur du mois de juillet – d’inviter les préfets à mettre en consultation de nouvelles chartes, sans attendre la décision du Conseil d’État, prévue d’ici à quelques semaines.
Ce passage en force est, pour nous, inacceptable. Aussi, le Gouvernement prévoit-il de sortir de l’inaction sur ce sujet et de mettre en place de nouveaux textes qui soient réellement protecteurs ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Monsieur le sénateur Joël Labbé, comme vous le rappelez, dans la décision n° 2021-891 QPC qu’il a rendue le 19 mars dernier à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnelles les dispositions relatives à la mise en consultation des chartes d’engagements prévues par le code rural. Plus précisément, le Conseil constitutionnel a relevé que la procédure particulière de concertation introduite dans le code rural par la loi Égalim du 30 octobre 2018 ne répondait pas aux exigences imposées par l’article 7 de la Charte de l’environnement, laquelle figure en préambule de notre Constitution.
En conséquence, les chartes qui n’ont pas été mises en consultation conformément aux dispositions du code de l’environnement doivent faire l’objet d’une consultation adaptée, donc de nouvelles discussions.
Il me semble important de préciser que cette décision ne remet pas en cause les chartes, qui ont pour objet de formaliser les engagements des acteurs sur un territoire. C’est la manière dont elles ont été concertées, avec les parties prenantes, qui n’est pas conforme aux attendus du droit.
Il convient également de rappeler que l’adaptation des distances de sécurité repose sur une série de mesures apportant des garanties en matière d’exposition des résidents par rapport aux conditions normales d’application des produits.
Le Gouvernement a pris acte de la décision du Conseil constitutionnel et s’est rapidement mis en capacité de se conformer à cette décision. Un recensement des modalités précises de mise en consultation publique des chartes a ainsi été effectué.
Monsieur le sénateur, je vous confirme l’ambition du Gouvernement de préserver la démarche vertueuse que constituent les chartes élaborées dans les départements. Celles-ci favorisent le dialogue entre les parties prenantes, dans l’intérêt de tous.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour la réplique.
M. Joël Labbé. Madame la ministre, la réponse du ministre de l’agriculture et de l’alimentation ne me satisfait pas vraiment.
Nous parlons, en effet, de pesticides cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction.
Le ministre met en avant le label Haute Valeur environnementale (HVE), mais ce dernier permet de poursuivre l’utilisation de ces substances, particulièrement toxiques.
On se rend compte que le Gouvernement aide à ce que l’on appelle « la modernisation de l’agriculture », en baissant les aides à l’agriculture qui n’utilisent pas ces produits.
Nous espérons que les choses évolueront dans le bon sens !
implantation d’une pharmacie en milieu rural
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, auteur de la question n° 1421, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Bernard Delcros. Madame la ministre, au début de l’année 2018, j’avais questionné Mme la ministre des solidarités et de la santé de l’époque sur la demande d’installation d’une pharmacie faite par la commune de Vézac, dans le Cantal.
Ce petit bourg a su mettre en œuvre, avec efficacité, une politique de développement qui porte ses fruits et il veut compléter son offre de services en créant un pôle santé. Il a déjà réussi à installer un cabinet d’infirmiers, de kinésithérapeutes et des discussions sont en cours en vue de l’installation d’un médecin.
Mais, alors qu’un pharmacien est prêt à rejoindre ce pôle santé, l’autorisation d’ouverture d’une officine lui a été refusée.
Dans sa réponse à ma question, la ministre avait ouvert une perspective d’assouplissement des critères, au travers de l’ordonnance du 3 janvier 2018. Depuis, le maire a sollicité le directeur général de l’agence régionale de santé (ARS), que j’ai moi-même saisie. Dans sa réponse, cette dernière motive son refus par la non-parution du décret d’application de l’ordonnance.
Comment peut-on empêcher des professionnels de santé de s’installer dans des territoires ruraux, alors même que ces territoires doivent relever le défi de leur attractivité et d’une offre de soins qui s’est considérablement dégradée ?
Madame la ministre, je vous poserai donc deux questions.
Pouvez-vous me dire quand paraîtra le décret d’application de l’ordonnance de janvier 2018, que nous attendons depuis trois ans ?
Le Gouvernement est-il prêt à réviser les critères de façon à répondre à la réalité des besoins des populations du secteur rural – dans le cas présent, en autorisant l’implantation d’une pharmacie dans la commune de Vézac ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Monsieur le sénateur Bernard Delcros, je vous remercie de votre question. Je partage votre préoccupation : venant d’un territoire très rural, je suis moi aussi confrontée à ce genre de difficultés.
La France est plurielle. Elle fait d’ailleurs une richesse de la diversité de ses territoires. Mais il nous faut prendre en compte cette diversité pour adapter les politiques publiques en conséquence et répondre à l’aspiration légitime de nos concitoyens à l’égalité dans l’accès aux soins et aux traitements.
Le décret relatif aux territoires fragiles doit permettre aux agences régionales de santé, selon une méthodologie définie, d’identifier les territoires pour lesquels l’accès au médicament n’est pas assuré de manière satisfaisante.
Ainsi, les transferts d’officines dans ces territoires seront facilités et pourront se traduire par une installation, à proximité, par exemple, d’une maison de santé pluriprofessionnelle ou d’un centre commercial, sans être contraints par un seuil de population résidente.
Des transferts d’officines pourront être autorisés vers un ensemble de communes contiguës listées par arrêté de l’ARS, dès lors que ces communes sont dépourvues d’officine, que l’une d’elles comprend au moins 2 000 habitants et que l’ensemble atteint le seuil de population global requis.
Ce choix d’un seuil de 2 000 habitants pour au moins l’une des communes a pour objectif d’assurer une offre pharmaceutique qui, d’une part, réponde aux besoins d’une population, et, d’autre part, garantisse les conditions de survie économique de l’officine sur ce territoire.
D’ores et déjà, une première version de la méthodologie de zonage a été partagée et testée auprès de quatre ARS.
La méthodologie nationale envisagée tient compte du rapport IGAS-IGF de 2016, confirmé par un rapport de la Cour des comptes, qui ont constaté un maillage officinal satisfaisant, avec 97 % de la population vivant à moins de dix minutes en voiture d’une officine et 99,5 % à moins de quinze minutes.
Ce constat partagé avec la profession nécessite de bien mesurer le choix de la maille, si vous me permettez l’expression, et des indicateurs consacrés.
Le projet de décret relatif aux territoires fragiles vise ainsi à permettre aux ARS d’identifier, à partir de critères précis, les territoires pour lesquels l’accès à une pharmacie pour la population ne serait pas satisfaisant.
L’évolution de la situation sanitaire devrait permettre de finaliser ces travaux réglementaires dans le courant de l’année 2022 avec l’ensemble des acteurs mobilisés.
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour la réplique.
M. Bernard Delcros. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, mais la réalité nous impose de déroger à la règle des 2 000 habitants.
Cette règle n’est pas la bonne, ainsi que je vais le démontrer rapidement.
Mon département compte aujourd’hui 25 pharmacies installées dans de petits bourgs ruraux et apportant une offre de services à un bassin de vie composé de 10 à 15 communes rurales autour de ce bourg-centre. Ces pharmacies sont installées dans des communes de moins de 2 000 habitants, voire, pour certaines d’entre elles, de moins de 1 000 habitants. Elles ont fait la démonstration de leur utilité et de leur viabilité économique.
Avec les critères en vigueur aujourd’hui, ces pharmacies seraient interdites d’installation. C’est bien la meilleure preuve qu’il faut revoir les conditions d’installation des pharmacies en milieu rural !
Je compte vraiment sur le Gouvernement pour tenir compte de cette réalité.
Sachez que le maire et les élus de la commune de Vézac attendent avec impatience de pouvoir déroger à la règle des 2 000 habitants.
réforme des études de santé et pénurie de médecins
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, auteure de la question n° 1660, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Mme Céline Brulin. Madame la ministre, la fin du numerus clausus devait permettre de former plus de médecins.
Mais la mise en œuvre chaotique de la réforme des études de santé, l’insuffisance de places pour accueillir à la fois les redoublants de l’ancien système et les nouveaux entrants conduisent à une tout autre réalité.
C’est en premier lieu insupportable pour les jeunes qui s’engagent dans des études de santé et voient leur parcours semé de tant d’embûches. Ils ont passé leurs examens dans le flou et l’incertitude, sans connaître le nombre de places ouvertes en deuxième année, sans savoir s’ils pourront continuer leur parcours ni où et comment.
C’est en second lieu quand tant de nos territoires manquent de médecins et de professionnels de santé.
L’université de Rouen voit ainsi le nombre de places en deuxième année de médecine augmenter de 6 % seulement – 9 % si l’on prend l’ensemble des filières médecine, maïeutique, odontologie, pharmacie. On est loin des 14 % d’augmentation annoncés par le Gouvernement et encore plus de certaines universités parisiennes, alors que la Normandie est l’une des régions les plus déficitaires en médecins.
Le Conseil d’État vient d’enjoindre à quinze universités, dont celles de Rouen et de Caen, d’augmenter de 20 % leurs capacités d’accueil. Pour ce faire, il leur faut impérativement des postes de chefs de clinique, par exemple, mais aussi de quoi réaliser des investissements.
La faculté de médecine de Rouen a augmenté ses capacités d’accueil de plus de 220 % depuis le début des années 2000, à moyens constants. Pour accueillir davantage d’étudiants, il lui faut plus de moyens.
Madame la ministre, que compte faire le Gouvernement, sachant que le projet de loi de finances rectificative que nous venons d’examiner ne comprenait aucun crédit supplémentaire en faveur des études de santé ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Madame la sénatrice Céline Brulin, vous l’avez rappelé vous-même, le Gouvernement a agi sans tarder en supprimant le numerus clausus, qui grevait le nombre de professionnels de santé formés année après année. La question du nombre et de la répartition des professionnels de santé sur le territoire est donc une préoccupation majeure du Gouvernement.
Pour l’année 2021, 16 750 places sont offertes pour accéder à la deuxième année des études médicales, soit une augmentation sans précédent, au niveau national, de 12 % par rapport à l’année dernière. Cette augmentation s’inscrit dans la trajectoire prospective proposée par la conférence nationale du 26 mars 2021 en remplacement du numerus clausus, au travers des objectifs nationaux pluriannuels de professionnels de santé à former.
Cette conférence, qui réunit l’ensemble des acteurs de la santé et les représentants d’élus locaux, a proposé de former 81 055 professionnels de santé, toutes filières médicales confondues, pour la période 2021–2025, soit une augmentation de plus de 14 % des effectifs sur cinq ans qui sera arrêtée par le Gouvernement. Pour la région Normandie, ce seront plus de 4 140 professionnels de santé qui seront ainsi formés.
C’est un véritable changement de paradigme dans la régulation de la démographie médicale, désormais définie au plus près des territoires. Le choix s’opère sur la base d’un large éventail d’indicateurs. Leur planification pluriannuelle visera à mieux répondre aux besoins de santé identifiés à l’échelon de chaque région, tout en tenant compte des capacités de formation des universités et des centres hospitaliers universitaires.
Cette augmentation ne se décrète pas simplement : nous devons accompagner la transformation des capacités d’accueil et de formation hospitalière pour donner corps à notre ambition. Cela ne peut se faire, vous en conviendrez, qu’en maintenant la qualité de ces formations, qui nécessitent un haut niveau d’exigence.
Par ailleurs, en plus du pilotage territorial, nous maintiendrons des objectifs nationaux pour disposer d’une capacité de suivi quantitatif.
Notre action en matière de régulation s’apprécie également à travers l’ouverture des postes d’internat. Depuis 2017, nous opérons un rééquilibrage territorial en augmentant chaque année le nombre de postes offerts dans les régions les moins bien dotées en médecins, tout en stabilisant les effectifs dans les régions les mieux dotées.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.
Mme Céline Brulin. Madame la ministre, nous connaissons tous ces chiffres, que l’on nous répète à l’envi.
Votre région étant particulièrement concernée, vous savez, comme moi, que certains services d’urgences, par exemple, vont devoir fermer cet été ou ne pas respecter leur amplitude habituelle. De même, des praticiens, des médecins de ville ne vont pas pouvoir être remplacés durant leurs congés… Il y a donc une urgence absolue à former davantage de médecins.
Certes, les capacités d’accueil ne se décrètent pas, mais le Gouvernement n’y consacre pas suffisamment de moyens. Je rappelle que le Conseil d’État a demandé à une quinzaine d’universités d’accroître ces capacités de 20 % dès la prochaine rentrée. Il faut donc débloquer des moyens en urgence.
difficultés de constatation d’un décès en zone rurale
M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier, auteur de la question n° 1675, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Bernard Fournier. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention et celle du Gouvernement sur les difficultés de constatation d’un décès en zone rurale.
En zone rurale, faire constater un décès par un médecin devient un exercice de plus en plus difficile, en particulier le week-end et les jours fériés, où le manque de médecins disponibles est encore plus flagrant.
Le 15 avril dernier, le maire de la commune de Les Salles, dans mon département, M. Jean-Hervé Peurière, a vécu cette expérience très difficile et désagréable. Entouré de pompiers et de gendarmes, après avoir contacté, pendant plusieurs heures, cinq cabinets médicaux, le médecin du SMUR (structure mobile d’urgence et de réanimation), le bureau du procureur, sans aucun résultat, il a dû appeler son médecin personnel pour faire constater le décès d’une personne de 81 ans.
Face à cette situation, les maires sont en première ligne et sont régulièrement interpellés par leurs administrés. Ils se retrouvent seuls, souvent démunis, confrontés à des situations humaines extrêmement douloureuses et compliquées à gérer. La seule solution possible est actuellement de procéder à une réquisition administrative, procédure exceptionnelle et lourde pour un élu local.
Cette responsabilité pesante pour les maires n’est satisfaisante ni humainement ni juridiquement. De plus en plus d’élus souhaitent l’évolution des modalités de constatation d’un décès en cas d’absence d’un médecin disponible sur un territoire, et ce dans des délais raisonnables. Certains proposent de faire exceptionnellement appel aux pompiers ou aux infirmiers. Ce serait aussi une avancée considérable pour les familles, qui, dans ce moment de deuil, ne comprennent pas ces carences.
Ainsi, madame la ministre, je souhaite connaître les mesures que le Gouvernement envisage d’adopter pour répondre aux préoccupations des élus et à la souffrance des familles.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Monsieur le sénateur Bernard Fournier, pour venir d’un territoire rural, je mesure toute la difficulté qu’une telle situation peut représenter et ajouter à la douleur des familles éprouvées par le deuil. De même, je connais la volonté d’engagement de nos édiles, déjà très investis au quotidien.
Le ministère a procédé à une modification du code général des collectivités territoriales, afin d’étendre à d’autres professionnels pleinement compétents la possibilité d’établir un certificat de décès – médecins retraités, étudiants de troisième cycle ayant validé deux semestres au titre de la spécialité qu’ils poursuivent, praticiens à diplôme étranger hors Union européenne, à compter de la deuxième année de leur parcours de consolidation.
Cette extension permet de répondre à un double enjeu : celui d’une diversification des personnes susceptibles d’être présentes sur le territoire tout en respectant le caractère médical d’un certificat de décès. L’établissement de ce certificat suppose en effet un diagnostic sur les causes de décès après examen du corps du défunt. Ce diagnostic est d’autant plus important qu’il est utilisé pour la veille sanitaire.
Les données figurant sur les certificats de décès sont utilisées pour établir les statistiques de décès et servent à identifier des alertes de santé publique de nature à appeler des mesures de la part des autorités sanitaires nationales ou régionales.
Il emporte également des conséquences sur les opérations funéraires dans la mesure où un obstacle médico-légal peut venir les retarder. Les médecins sont formés à évaluer la présence ou non d’un obstacle médico-légal, ce qui n’est pas le cas des pompiers ou des infirmiers.
Pour l’ensemble de ces raisons, une évolution nouvelle des catégories de professionnels susceptibles d’établir un certificat de décès n’est pas actuellement envisagée. Cependant, le ministère des solidarités et de la santé est à l’écoute de toutes les propositions constructives que vous pourriez formuler.
M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier, pour la réplique.
M. Bernard Fournier. Madame la ministre, je vous remercie et de votre réponse et de votre écoute.
Toutefois, la modification du code général des collectivités territoriales que vous avez évoquée me semble encore insuffisante. Il faudra poursuivre la recherche de solutions innovantes.
fin de l’obligation du port du masque à l’école primaire
M. le président. La parole est à Mme Kristina Pluchet, auteure de la question n° 1735, transmise à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Mme Kristina Pluchet. Madame la ministre, voilà presque un an que le masque est obligatoire à l’école primaire en France métropolitaine. Cette décision reposait sur une hypothèse sanitaire, qui n’a pas donné lieu à réévaluation.
Depuis, de nombreuses études sont parues sur le sujet. Les enfants d’âge primaire participent très faiblement à la circulation du virus. Les clusters sont surtout familiaux et non scolaires, comme l’ont confirmé les campagnes de tests. Sans compter les difficultés de port du masque à cet âge.
A-t-on pris en compte ces éléments ? Les professionnels de l’enfance alertent et s’interrogent. Une étude allemande du 30 juin dernier a mis en évidence des taux de CO2 expiré après port du masque de cinq à six fois supérieurs à la normale. Quel impact sur le cerveau en construction de nos enfants ?
Pédiatres, psychologues, pédopsychiatres, ORL, ophtalmologistes relatent divers troubles de la croissance et pathologies dus au port quotidien du masque par un enfant en développement.
Enfin, le masque met en difficulté les élèves les plus fragiles, inhibe les interactions entre enfants et est pourvoyeur de retards d’apprentissage pour la lecture et l’écriture. Voix forcée, baisse de l’écoute et de l’intelligibilité, altération de la conscience phonologique, somnolence sont le quotidien de nos enfants. Tout cela a-t-il fait l’objet d’une étude d’impact pluridisciplinaire ?
Compte tenu des enjeux de développement de toute une génération, les sociétés savantes de pédiatrie ont appelé, le 17 juin dernier, à une fin d’année à visage découvert sans être entendues, alors même que nos voisins belges et anglais, à circulation virale plus intense, ont statué – avec réactivité – sur la suppression du masque pour les enfants à l’école primaire dès le printemps.
Ne pourrait-on imaginer une politique de bon sens, qui ajuste le port du masque en fonction de la saisonnalité du virus ? En outre, en cas de pic épidémique, des campagnes de dépistage salivaire territorialisées permettraient de limiter le masque aux seules classes touchées.
La covid et tous ses variants ne sont pas des maladies pédiatriques. Les adultes doivent protéger les enfants et non faire peser sur ces derniers le soin de leur protection, et ce d’autant moins que nous disposons maintenant de différents moyens de lutter contre le virus.
Madame la ministre, quelle sera la politique du Gouvernement en matière de port du masque à l’école primaire pour la rentrée prochaine ? J’espère votre réponse courageuse ; elle est attendue par des millions de Français.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Madame la sénatrice Kristina Pluchet, depuis septembre 2020, les élèves ont été accueillis au sein des écoles maternelles et élémentaires dans le respect du protocole sanitaire élaboré sur la base des avis du Haut Conseil de la santé publique.
Depuis le début de la crise sanitaire, notre ligne de conduite vise non seulement à protéger, mais aussi à permettre le plus possible la scolarisation des élèves, en particulier des plus jeunes.
Pour tâcher de concilier ces impératifs, une foire aux questions a été établie pour adapter la mise en œuvre du protocole sanitaire dans chaque territoire, en fonction de la configuration des établissements et de la situation sanitaire locale.
Ce choix de garder les classes ouvertes, dans la mesure du possible, selon l’intensité de circulation du virus, et la mobilisation de tous les acteurs ont permis à l’ensemble des élèves du primaire de bénéficier des enseignements en présentiel. La continuité a permis d’atténuer l’impact des confinements et restrictions depuis le début de la crise. Le ministre de l’éducation nationale nous confirme que les résultats des évaluations nationales mi-CP et CE1 témoignent de l’effet positif de cette décision.
Face à la circulation du virus et à l’apparition de différents variants plus contagieux, tous les moyens ont été mobilisés : réalisation de tests salivaires, respect des distanciations sociales, port du masque en classe. Le risque avéré de transmission du virus entre les enfants demeure, particulièrement dans les écoles, qui sont des lieux clos et des zones de brassage de la population.
Tant la Société française de pédiatrie, en accord avec les recommandations de l’OMS, que le Haut Conseil de la santé publique se sont prononcés en faveur du port du masque pour les enfants de plus de 6 ans.
Dans son avis du 29 octobre 2020, le Haut Conseil a souligné qu’il n’existe pas de contre-indications dermatologiques, pneumologiques, ORL, phoniatriques ou psychiatriques au port du masque.
Pour autant, l’obligation du port du masque dans les établissements scolaires n’est pas absolue. Les élèves de l’école maternelle, en plein apprentissage du langage, n’en portent pas, et des masques inclusifs ont été mis à disposition de leurs enseignants. Un décret prévoit également des exceptions sur avis médical, notamment pour les enfants en situation de handicap.
Par ailleurs, lors de la prise des repas, de la pratique d’une activité sportive, le port du masque n’est pas obligatoire. Dans ces situations, une attention particulière est portée à la limitation du brassage.
À ce jour, le développement rapide du variant delta ne nous permet pas d’apprécier précisément la situation de la rentrée scolaire prochaine. Le protocole sanitaire au sein des écoles sera adapté en fonction de la situation que nous connaîtrons.
Plusieurs scénarios pédagogiques sont d’ores et déjà élaborés afin d’organiser la rentrée des élèves de la façon la plus sereine possible.
De nouveau, notre priorité est double, et je pense que vous en partagerez les objectifs : allier sécurité sanitaire et ouverture des écoles. Jusqu’ici, le pari est tenu, notre pays ayant maintenu ses classes plus ouvertes que nombre de nos voisins.
M. le président. La parole est à Mme Kristina Pluchet, pour la réplique.
Mme Kristina Pluchet. Les variants, madame la ministre, il y en aura encore beaucoup d’autres.
La vaccination avance pour les populations à risque, dont les enfants ne font pas partie. Pouvons-nous laisser encore des années ces enfants muselés et sous-oxygénés huit heures par jour, alors que les professionnels nous alertent sur des répercussions inquiétantes ?
vaccination des français de l’étranger dans leur pays de résidence
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, auteur de la question n° 1742, transmise à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Madame la ministre, un plan de vaccination pour les Français de l’étranger avait été annoncé en janvier 2021. Il comportait une classification des pays en trois catégories, selon qu’ils recevaient ou non le vaccin. Qu’en est-il de cette liste ?
Le ministère des affaires étrangères ne nous l’a toujours pas transmise. Or nous en avons besoin pour comprendre l’action du Gouvernement. Des doses ont été envoyées dans certains pays, mais sans cohérence apparente.
Ainsi, certains pays ont reçu des doses de Johnson & Johnson – vaccin réservé aux plus de 55 ans –, alors même qu’ils avaient commencé leur campagne vaccinale avec un vaccin homologué. Que faire des doses qui restent ? Envisagez-vous d’en envoyer de nouvelles ?
À l’inverse, la France n’a envoyé aucune dose dans des pays où aucun vaccin homologué n’est disponible, comme en Argentine, par exemple, qui utilise Spoutnik V et Sinopharm. Quels sont les critères retenus pour l’envoi des vaccins ?
Interrogée à ce sujet, vous avez expliqué devoir attendre les autorisations d’importation des pays concernés. Aujourd’hui, de nombreux pays, comme la Tunisie, acceptent l’importation. Il ne doit plus y avoir de retard.
La France, dans le cadre du programme Covax, a envoyé des vaccins en Afrique et en Asie – je pense notamment à la Côte d’Ivoire, au Togo, à l’île Maurice – avec recommandation aux Français de se faire vacciner. Or il s’agissait de vaccins AstraZeneca manufacturés en Inde, non homologués par l’Union européenne. Les Français de l’étranger, qui n’ont pas été prévenus, se sentent bien évidemment trompés.
Et quid des difficultés rencontrées par les Français de l’étranger, qui rentrent en France pour se faire vacciner sans carte vitale active, avec des tests qu’on leur fait toujours payer ? Ou de ceux, effectivement vaccinés avec un vaccin homologué en France et en Europe, qui ne peuvent obtenir de QR code, alors que le passe sanitaire va devenir vital et indispensable à la suite des annonces du Président de la République, hier soir ?
Madame la ministre, compte tenu de l’introduction des motifs impérieux, pouvez-vous nous indiquer si les Français de l’étranger vont être abandonnés ? Comment faire pour les rassurer ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Madame la sénatrice Évelyne Renaud-Garabedian, nous partageons une volonté commune d’une vaccination collective, massive. Dès lors, nous pouvons faire l’économie de procès d’intention. Les ministres Le Drian et Lemoyne, qui m’ont demandé de vous répondre, sont particulièrement investis sur le déploiement de notre stratégie vaccinale.
Je voudrais rappeler tous les efforts que la France déploie depuis le début de la crise pour que la vaccination soit accessible à tous et dans tous les pays – en somme, pour faire de ce vaccin un bien public mondial.
La solidarité vaccinale, dont la facilité Covax est la meilleure incarnation, est un impératif moral, mais aussi la seule façon de mettre fin, ensemble, à la pandémie.
Par ailleurs, et c’est un principe intangible, la France est aux côtés de ses citoyens, où qu’ils soient dans le monde. Elle est le seul pays à avoir lancé la vaccination de ses communautés à l’étranger, là où n’existe pas de solution locale de vaccination avec des vaccins reconnus par l’Agence européenne des médicaments. En comparaison, certains de nos partenaires européens et internationaux ont des plans de vaccination, certes, mais uniquement pour leurs agents publics expatriés.
Dès le mois de décembre dernier, nous avons lancé des travaux en ce sens, avant même que la vaccination ne démarre sur le territoire national. Les premières doses ont été envoyées début mai, en Inde et à Madagascar. Deux mois plus tard, des doses ont été envoyées dans plus de cinquante pays et des envois supplémentaires sont étudiés pour de nombreux autres pays.
Jusqu’ici, cette vaccination a été organisée en s’appuyant sur les ressources propres des ambassades et des consulats généraux, avec l’appui de structures sanitaires locales partenaires. Comme vous le savez, il s’agit d’opérations logistiquement lourdes et complexes, qui supposent l’accord des pays dans lesquels elles sont réalisées. Les autorisations ne sont parfois pas encore données et nous travaillons activement avec ces pays pour résoudre les freins dans les meilleurs délais.
Par ailleurs, conjointement avec le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, nous allons amplifier nos efforts dans les semaines à venir, en lien avec l’élargissement de la politique vaccinale nationale. L’avis de la Haute Autorité de santé du 9 juillet dernier sur la vaccination des Français de l’étranger avec le vaccin Janssen nous invite à nous inscrire à la fois dans une géographie plus vaste et dans une autre temporalité.
En outre, lors de leur passage en France, par exemple pour leurs congés, cet été, nos compatriotes de l’étranger peuvent tous se faire vacciner gratuitement. Je rappelle que les délais d’injection entre deux doses ont été réduits au plus court, à savoir 21 jours, ce qui permet un recours le plus vaste possible à cette opportunité pour nos concitoyens résidant le reste de l’année à l’étranger.
Ceux de nos compatriotes qui reviennent d’un pays en liste rouge et qui seraient soumis à une quarantaine administrative, et non à un isolement, peuvent sortir quelques heures par jour pour des raisons essentielles, dont la vaccination – je vous invite, madame la sénatrice, à le rappeler à nos concitoyens concernés.
Enfin, seuls les vaccins homologués…
M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. … par l’Agence européenne des médicaments sont reconnus. Notre unique préoccupation est l’efficacité vaccinale et la protection de nos concitoyens.
arrêt de travail et élus locaux
M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, auteure de la question n° 1682, transmise à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mme Dominique Vérien. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaitais vous alerter sur les difficultés rencontrées par les élus locaux dans l’interprétation et l’application de leur avis d’arrêt de travail pour congé maladie.
De nombreux élus, de bonne foi, convaincus de pouvoir continuer à exercer leur mandat, se voient réclamer a posteriori le remboursement intégral des indemnités perçues au titre de leur travail salarié pour seulement quelques heures passées à exercer un mandat local – et, comme vous le savez, pour une indemnité de quelques euros seulement…
En effet, très peu d’élus savent qu’ils doivent préalablement solliciter auprès de leur médecin une autorisation spécifique d’exercer une fonction élective pendant le congé maladie. Il est d’ailleurs important de noter que les praticiens eux-mêmes ne sont bien souvent pas au courant de cette subtilité, contrairement à ce que prétend la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM).
Il n’est pas acceptable que ces élus, qui ne comptent pas leurs heures au service de leurs concitoyens, soient sanctionnés de la sorte, d’autant que les voies de recours sont limitées.
Une autorisation du médecin a posteriori n’est pas recevable et le droit à l’erreur n’est pas non plus applicable, dans la mesure où ce serait le médecin, et non l’élu, qui aurait commis l’erreur en remplissant incorrectement le formulaire… À moins que ce ne soit l’élu qui commette une erreur en oubliant d’indiquer sa qualité, ce que ne reconnaît pas la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM).
Cette situation n’est pas nouvelle: le ministère de la santé et la Caisse nationale de l’assurance maladie ont été maintes fois alertés par le passé, notamment par mes soins.
L’année dernière, le Gouvernement avait reconnu un défaut d’information des élus et des médecins. La CNAM avait annoncé une campagne de communication à destination des praticiens, ainsi qu’une évolution de la rédaction du formulaire Cerfa d’avis d’arrêt de travail, avec l’apparition distincte d’une mention autorisant l’activité de l’élu local, à l’instar des dispositions existantes en matière d’horaires de sortie.
Malheureusement, force est de constater que la situation n’a pas changé. Les exemples récents d’élus qui se heurtent à l’inflexibilité de l’administration sont encore trop nombreux. Il paraît donc urgent de concrétiser les engagements pris.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Madame la sénatrice Dominique Vérien, je connais les difficultés que rencontrent parfois les élus locaux en arrêt maladie, notamment dans les petites communes.
Lorsqu’ils exercent une activité professionnelle, les élus locaux placés en congé maladie perçoivent des indemnités journalières, dont le bénéfice est subordonné au respect des dispositions de l’article L. 323-6 du code de la sécurité sociale : le salarié placé en congé maladie doit observer les prescriptions du praticien, se soumettre aux contrôles organisés par le service du contrôle médical, respecter les heures de sorties autorisées par le praticien et s’abstenir de toute activité non autorisée.
Ainsi, un salarié par ailleurs élu local placé en congé maladie ne peut régulièrement exercer son mandat électif que si son médecin l’y autorise expressément sur l’arrêt de travail. Dans le cas contraire, il peut se voir réclamer le remboursement des indemnités journalières, la Cour de cassation assimilant les indemnités de fonction à une rémunération d’activité.
Cette difficulté, que des élus de toute bonne foi ont pu rencontrer, a été soulignée par les travaux de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation sur les conditions d’exercice des mandats locaux. Elle était le fruit d’un défaut d’information des élus sur la nécessité de préciser à leur médecin de mentionner, le cas échéant, qu’ils sont autorisés à exercer leur mandat électif pendant leur arrêt de travail.
Cette réglementation a déjà fait l’objet d’un très large débat à l’occasion du vote de la loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dont l’article 103 a modifié le code de la sécurité sociale, qui dispose que « les élus locaux peuvent poursuivre l’exercice de leur mandat, sous réserve de l’accord formel de leur praticien ».
Il ressort des débats qu’un renversement de ce principe aurait soulevé de nouvelles difficultés. En effet, si un patient ne prévient pas son médecin qu’il est également élu local, le médecin n’indiquera pas, de toute bonne foi lui aussi, l’incompatibilité de l’état de son patient avec son mandat, ou les réserves partielles qu’il pourrait y opposer. C’est alors la responsabilité du médecin qui serait engagée.
Pour répondre de façon efficace à ce problème, nous avons cherché à mieux informer les élus sur leurs droits en cas de maladie. Dans ce cadre, la direction générale des collectivités locales (DGCL) et la direction de la sécurité sociale ont conjointement rédigé une fiche pratique sur cette thématique, que l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité, que je remercie, a intégrée en page 23 de son guide sur le statut de l’élu local.
Enfin, cette information est également présente sur Ameli, le site internet de l’assurance maladie, que vous connaissez bien.
Madame la sénatrice, sachez que nous sommes prêts à regarder avec vous comment poursuivre l’amélioration de cette information.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, pour la réplique.
Mme Dominique Vérien. Je répondrai à votre invitation avec grand plaisir, monsieur le secrétaire d’État.
Quand un élu et son médecin se rendent compte de leur erreur et qu’ils sont prêts à la corriger, l’assurance maladie reste inflexible. Ce n’est pas normal !
retard de traitement des dossiers de retraite des français établis hors de france
M. le président. La parole est à M. Ronan Le Gleut, auteur de la question n° 1684, transmise à M. le secrétaire d’État auprès de la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion, chargé des retraites et de la santé au travail.
M. Ronan Le Gleut. Monsieur le secrétaire d’État, ma question est double et porte sur les difficultés multiples endurées par les retraités ou futurs retraités français établis hors de France.
Les retraités français qui résident à l’étranger subissent de trop lourds retards dans le traitement de leurs dossiers, ce qui laisse certains d’entre eux sans ressources, parfois pendant plusieurs mois.
Si chacun peut comprendre qu’il faut éviter la fraude et produire des certificats de vie ou attestations d’existence, les tracasseries administratives et refus de certificats de vie pourtant valables entraînent des suspensions indues de versement de retraite. Pourtant, nos compatriotes établis à l’étranger soulignent souvent qu’ils envoient leurs certificats de vie ou attestations d’existence par la poste et par voie électronique, parfois à plusieurs reprises. Malgré cela, des difficultés demeurent et ils ne touchent pas un centime de leur retraite.
La mise en place récente d’un centre unique pour toutes les réclamations devrait apporter quelques améliorations, mais de grands problèmes demeurent.
En ce qui concerne les futurs retraités, on constate également de nombreux cas de blocages ou de retards importants dans le traitement des rachats de trimestres des périodes à l’étranger.
Ce type de rachat permet aux assurés, qui ont exercé une activité dans un pays sans convention avec la France ou dans plusieurs pays étrangers, et qui sont alors sous le coup de la règle de non-cumul des conventions, d’atteindre le taux plein pour le calcul des retraites françaises.
La Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) se doit de leur proposer un devis correspondant aux trimestres rachetables. Or les demandes restent sans réponse – dans certains cas, depuis des mois.
Monsieur le secrétaire d’État, pour traiter ces multiples retards, ne peut-on envisager un renforcement de personnels au groupement d’intérêt public Union Retraite et à la CNAV, afin d’apurer ces nombreux dossiers en souffrance et de mettre fin à cette situation aussi inacceptable qu’injuste ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur Ronan Le Gleut, vous interrogez le Gouvernement sur le délai de traitement par la CNAV des dossiers de Français établis hors de France pour la liquidation des retraites, mais aussi pour des dispositifs tels que le rachat de trimestres de périodes réalisées à l’étranger.
Les délais de traitement de liquidation de retraite se sont en effet récemment allongés, bien que plus des trois quarts des dossiers restent traités en moins de 120 jours. Cet allongement résulte essentiellement de spécificités liées à la conjoncture : la crise sanitaire a eu des effets sur le processus de liquidation, en particulier pour les assurés ne maîtrisant pas les outils numériques et n’utilisant pas la demande de liquidation en ligne, qui est facultative.
Ainsi, les échanges pour consulter les dossiers ont été plus complexes, et les délais de traitement allongés.
J’évoquerai également la hausse conjoncturelle des demandes de liquidation. On a en effet observé une hausse des demandes de plus de 50 % au premier semestre 2021 par rapport à l’année précédente.
Des plans d’action sont actuellement déployés pour le traitement de ces demandes. L’ensemble des leviers à disposition de la CNAV sont mobilisés : formation d’agents redéployés, recours à des CDD, augmentation du nombre d’heures supplémentaires, voire modification des méthodes de traitement.
Plus globalement, le Gouvernement, bien conscient du problème, a saisi la CNAV depuis plusieurs mois pour améliorer sa qualité de service. Nous souhaitons en effet réduire les délais de traitement, mais aussi assurer la justesse du calcul de la pension, qui est parfois particulièrement complexe, en particulier pour les assurés ayant une partie significative de leur carrière réalisée à l’étranger.
Sur ce plan, les premiers mois de l’année 2021 sont plutôt encourageants.
M. le président. La parole est à M. Ronan Le Gleut, pour la réplique.
M. Ronan Le Gleut. Il convient effectivement, monsieur le secrétaire d’État, de reconnaître ces retards.
Derrière les numéros de dossiers se cachent parfois des drames humains. Nous avons des témoignages de femmes et d’hommes qui ne touchent plus un centime de retraite. Puisque vous reconnaissez ces retards, il faut agir vite et fort !
interdiction de l’écriture dite inclusive
M. le président. La parole est à Mme Toine Bourrat, auteure de la question n° 1672, adressée à Mme la ministre de la culture.
Mme Toine Bourrat. Il est aujourd’hui un bien triste constat : notre langue française est étrillée par l’écriture dite inclusive.
En effet, un nombre croissant d’établissements universitaires contreviennent à la circulaire du 21 novembre 2017, en usant du point médian ou de la syntaxe dite épicène. Parmi eux – la liste n’est pas exhaustive -, la faculté de droit de Nanterre, où les panneaux d’affichage, les mails de la présidence ou des supports de travaux dirigés sont affectés, l’université Paris Dauphine, où ce sont les sujets de partiels ou les polycopiés de cours qui sont touchés.
Ce phénomène concerne à la fois des communications internes adressées aux étudiants et des publications destinées au public.
Mais il y a plus grave encore : des rapports publiés par un certain nombre d’institutions relaient eux aussi cette orthographe néfaste.
Pourtant, en février 2019, le Conseil d’État avait rejeté un recours soumis à son appréciation et confirmé l’esprit de la circulaire Philippe, en enjoignant aux administrations de respecter les règles grammaticales et syntaxiques en vigueur dans la rédaction de leurs actes administratifs.
Cette jurisprudence ne doit pas être minimisée, car elle vient consacrer les conclusions d’un rapport de l’Académie française mettant en garde depuis près de trois ans contre « un péril mortel pour la langue nationale ».
Le 2 mai dernier, Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, a étendu l’interdiction de l’écriture inclusive aux usages pédagogiques. C’est une avancée louable, mais encore insuffisante, alors qu’un nombre substantiel d’administrations, de rectorats ou de directions d’établissements publics d’enseignement s’en exonère.
Vous inaugurerez en mars prochain la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts, où fut prise l’ordonnance généralisant l’utilisation du français dans les actes administratifs. Or c’est précisément par ces actes administratifs que l’écriture inclusive bafoue aujourd’hui notre héritage culturel.
Au regard de la violation flagrante de la circulaire Philippe, n’est-il pas temps d’initier une réponse législative pour consacrer définitivement les principes posés par notre académie ? C’est un patrimoine sensible que nous avons à préserver. Comme l’écrivait la philosophe Simone Weil, « nous sentons vivement que les choses vraiment belles devraient être assurées d’une existence éternelle et ne le sont pas. » Il en va de même pour notre langue, aujourd’hui en péril.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser Mme la ministre de la culture, qui m’a chargé expressément de vous répondre.
Avec la circulaire du Premier ministre du 21 novembre 2017 que vous avez citée, le Gouvernement a clairement rappelé les principes de rédaction des textes officiels. Cette circulaire invite au maintien des règles en usage, qu’elles soient typographiques, par l’exclusion du recours aux formes abrégées par un point médian ou par tout autre séparateur graphique faisant ressortir l’existence d’une forme féminine en complément de la forme masculine, ou grammaticales, avec le masculin comme forme neutre.
Les administrations de l’État doivent se conformer à ces règles, pour des raisons d’intelligibilité et de clarté, non seulement parce que la complexité de la typographie dite inclusive pénalise les personnes affectées d’un handicap, mais aussi parce que la majorité de nos concitoyens en ignore les mécanismes et ne reconnaît plus d’ailleurs sa propre langue.
L’apprentissage et la maîtrise de la langue française relevant des missions fondamentales de l’école, il était important que le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports rappelle les principes de rédaction dans la circulaire du 5 mai 2021, adressée aux rectrices et aux recteurs d’académie, aux directrices et directeurs de l’administration centrale et à leur personnel.
La langue française apprise et pratiquée par les élèves et les lycéens reste soumise à la règle commune. L’exclusion de la typographie inclusive ne saurait cependant accréditer l’idée que la langue française conforte les inégalités entre les femmes et les hommes. Nous devons renforcer notre engagement pour l’égalité, et privilégier les recommandations de la circulaire du 21 novembre 2017 en faveur de la féminisation de notre langue.
Cela passe notamment par la promotion du recours à la féminisation systématique des noms de métier ou de fonction exercés par une femme ou à des mots épicènes.
L’application systématique de ces préconisations, qui accorde aux femmes, à l’écrit comme à l’oral, autant de visibilité et d’égards qu’aux hommes, contribue à la consolidation et à l’évolution de la langue française, sans pour autant la dénaturer.
expérimentation pour la réouverture des lieux culturels et des salles de spectacles
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, auteure de la question n° 1689, adressée à Mme la ministre de la culture.
Mme Émilienne Poumirol. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les salles de spectacles et les lieux culturels ont rouvert depuis le 19 mai pour la plus grande joie des acteurs du secteur.
Cependant, le virus menace toujours, notamment depuis l’apparition du variant Delta, plus contagieux, en particulier dans les lieux clos.
Le constat est simple : malgré l’accélération de la vaccination, il nous faudra désormais apprendre à vivre avec la covid et ses variants pour les années à venir.
Pour faciliter l’organisation du secteur culturel et de l’événementiel, des solutions innovantes émergent. Parmi elles, je veux citer l’expérimentation menée par le centre de congrès et d’exposition de Labège, Diagora, en Haute-Garonne, dans mon département, en partenariat avec Dassault Systèmes, sur l’analyse des flux d’air et la simulation numérique pour la réouverture des salles de spectacles et d’événementiel.
Ce dispositif, développé par un jeune ingénieur toulousain, s’appuie sur le logiciel de Dassault Systèmes, déjà utilisé par plusieurs hôpitaux à travers le monde pour lutter contre les contaminations.
Cette expérimentation permettrait que les lieux culturels puissent accueillir du public dans les meilleures conditions, avec des mesures sanitaires adaptées et des conditions de placement scientifiquement démontrées. Cette solution innovante permettrait non seulement d’améliorer la sécurité des spectateurs avec une ventilation optimisée, mais également de répondre à la souffrance du secteur culturel sur l’ensemble de notre territoire.
Elle consiste à construire un « jumeau numérique » de la salle pour y étudier les flux d’air. Ces derniers sont ensuite modifiés en fonction des résultats, afin d’empêcher qu’ils atteignent les personnes dans la salle. Il ne serait ainsi plus nécessaire d’instaurer une jauge limitant le nombre de spectateurs présents.
Ce dispositif serait une mesure complémentaire au passe sanitaire actuellement en vigueur et garantirait une assurance supplémentaire pour les spectateurs.
Pour que cette expérimentation puisse aboutir, il est nécessaire de l’élargir au plus grand nombre d’acteurs culturels et événementiels, afin de leur permettre de reprendre au plus vite leurs activités de manière pérenne.
Monsieur le secrétaire d’État, ma question est la suivante : le Gouvernement entend-il soutenir cette expérimentation, qui faciliterait le bon déroulement des spectacles et événements culturels, et comment ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Madame la sénatrice, le Gouvernement a été particulièrement mobilisé sur cet enjeu des expérimentations dans les salles de spectacles et de concerts dès le début de l’année 2021. Mme la ministre de la culture a eu l’occasion d’annoncer un soutien à plusieurs d’entre elles au mois de février.
Ces expérimentations consistent en une démarche scientifique encadrée par des protocoles stricts. Vous l’avez rappelé, elles visent à évaluer les risques de contagion ou de surexposition à la covid-19 au sein des salles de spectacles et ainsi à contribuer à la définition de protocoles sanitaires transposables à grande échelle.
De nombreuses collectivités se sont manifestées pour organiser ces expérimentations. Vous avez cité l’exemple de la communauté d’agglomération du sud-est toulousain, Sicoval, dans votre département de la Haute-Garonne. Je le souligne, elles demandent des mois de préparation, un soutien financier conséquent et, surtout, des protocoles scientifiques particulièrement complexes.
À ce jour, une seule a pu avoir lieu à l’occasion du concert d’Étienne de Crécy et du groupe Indochine, le 29 mai dernier à l’Accor Arena de Paris.
Sur l’initiative du syndicat national des producteurs, diffuseurs, festivals et salles de spectacle musical et de variété (Prodiss) et de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), le dispositif sanitaire a permis à 5 000 personnes d’y assister. Les résultats de l’étude rendus publics la semaine dernière par l’AP-HP sont très encourageants, puisque les scientifiques considèrent qu’il n’y a pas eu de surrisque de transmission du covid-19 pendant le concert. Ces résultats doivent pouvoir être également analysés par le ministère de la santé et l’ensemble des autorités sanitaires.
Ces expérimentations étaient, je crois, utiles dans cette période d’attente de la reprise. Vous le savez, les salles de spectacles et de concerts ont pu rouvrir leurs portes le 19 mai dernier et les restrictions de jauges ont été levées depuis le 1er juillet.
Nous avons mis en place des règles sanitaires strictes, pour que cela se passe dans les meilleures conditions possible, notamment avec la mise en place du passe sanitaire, dont la mise en œuvre sera renforcée, à la suite de l’allocution du Président de la République hier soir. En tout état de cause, il s’agit d’une des conditions de la reprise.
Le ministère de la culture reste évidemment en dialogue avec l’ensemble des parties prenantes. L’enjeu est de mieux comprendre et de mieux maitriser tout ce qui peut avoir une influence sur la transmission du virus, notamment les flux d’air dans les lieux culturels.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour la réplique.
Mme Émilienne Poumirol. Dès le 30 avril dernier, nous avons envoyé un courrier à ce sujet à Mme Bachelot.
Il s’agit de construire un démonstrateur permettant d’aboutir à une norme qui pourrait être utilisée ensuite. Son intérêt concerne non pas uniquement les spectacles, mais aussi le monde institutionnel : tous les hémicycles pourraient être étudiés et bénéficier d’une jauge normale.
En outre, ces modèles sont facilement duplicables et peu chers, si on les compare à l’expérimentation que vous avez évoquée dans le cadre du concert d’Indochine. Les tarifs ne sont absolument pas du même ordre !
implantation des commissariats dans les départements ruraux
M. le président. La parole est à M. Olivier Rietmann, auteur de la question n° 1538, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Olivier Rietmann. Madame la ministre, en novembre dernier, après une longue gestation, le Livre blanc de la sécurité intérieure était enfin dévoilé.
Une proposition figurant dans le titre intitulé « Renouveler le pacte de protection et de sécurité » a retenu toute mon attention, et suscite surtout beaucoup d’inquiétude. Il est proposé de définir une nouvelle méthode pour partager sur le territoire national les compétences de la police et de la gendarmerie.
Pour mémoire, selon la règle en vigueur, la responsabilité de la police nationale dans une commune est soumise au cumul de deux critères : une population supérieure à 20 000 habitants et une délinquance ayant les caractéristiques de celle des zones urbaines.
Le Livre blanc préconise une évolution de ce seuil de population. Au-dessous de 30 000 habitants, le principe serait de confier le territoire à la gendarmerie. Entre 30 000 et 40 000 habitants, l’attribution reviendrait à la force la mieux adaptée aux caractéristiques du territoire et au-dessus de 40 000 habitants, le principe serait de confier la compétence à la police nationale.
Mécaniquement, les départements les plus ruraux se verraient donc totalement exclus des zones de la police nationale, y compris pour leur chef-lieu.
La Haute-Saône serait placée dans un tel cas, ce qui ne manque pas de raviver l’inquiétude des personnels du commissariat de Vesoul, qui sont exposés depuis plusieurs années à des incertitudes récurrentes.
Je ne doute pas de l’opportunité de faire évoluer les critères de répartition des forces de sécurité et je partage l’ambition de passer d’un « modèle quantitatif » à un « modèle qualitatif reposant sur une analyse locale, pragmatique et objective », comme on peut le lire dans le Livre blanc.
Pourtant, la première évolution proposée est l’augmentation du seuil ! Je vous remercie d’avance, madame la ministre, de m’expliquer cette contradiction et, surtout, les critères objectifs sur lesquels se fonderait cette réorganisation, qui ne doit avoir qu’un seul but : assurer à tout citoyen un service de sécurité publique le mieux adapté aux réalités du territoire sur lequel il se trouve.
Assurez-nous enfin que la dimension budgétaire n’est pas le critère principal de cette préconisation, ce qui serait de mon point de vue insupportable.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Olivier Rietmann, apporter des réponses concrètes aux problèmes de délinquance et d’insécurité de nos concitoyens exige des moyens. C’est pourquoi le Gouvernement a décidé le recrutement de 10 000 policiers et gendarmes supplémentaires sur le quinquennat et la mobilisation de moyens financiers, notamment du plan de relance, pour moderniser et améliorer les équipements et moyens d’intervention des forces de l’ordre.
Les questions de gouvernance, d’organisation et de doctrines opérationnelles sont essentielles pour une adaptation constante aux évolutions de la délinquance, pour répondre à l’objectif majeur du renforcement de la présence sur la voie publique et pour donner aux policiers et gendarmes les moyens d’assumer leurs missions dans les meilleures conditions d’efficacité possible.
La police nationale a d’ores et déjà accompli ou engagé d’importantes réformes en la matière. Je pense ainsi à la création d’échelons zonaux en sécurité publique et en police judiciaire et à l’expérimentation, dans trois départements, de directions départementales de la police nationale.
Les coopérations et complémentarités entre la police et la gendarmerie, notamment la répartition de leurs forces sur le territoire, constituent également un enjeu important de notre dispositif de sécurité et un sujet auquel sont particulièrement attentifs les élus locaux.
Une organisation optimale des forces de sécurité de l’État est en effet essentielle pour développer les synergies et les mutualisations et pour assurer leur plein ancrage dans les territoires.
Trois vagues de redéploiements territoriaux ont été opérées entre la police et la gendarmerie entre 2002 et 2014 pour adapter leur organisation aux évolutions de l’urbanisation et de la délinquance, accroître l’homogénéité des zones de compétence et permettre aux deux forces de renforcer leur complémentarité et d’optimiser leur potentiel opérationnel.
À l’occasion de son déplacement en Haute-Garonne le 9 octobre 2020, le Premier ministre a indiqué vouloir ouvrir la voie à une réflexion prudente et concertée sur le redécoupage des zones de police et de gendarmerie. Cette ouverture fait écho au Livre blanc de la sécurité intérieure, qui préconise de mieux faire coïncider la répartition des forces avec les caractéristiques spécifiques de chaque territoire.
M. le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a demandé à la direction générale de la police nationale et à la direction générale de la gendarmerie nationale de poursuivre les travaux sur le sujet. Il s’agit notamment d’objectiver les améliorations espérées. En tout état de cause, dans la Haute-Saône comme ailleurs, toute éventuelle évolution se fera d’abord en concertation avec les élus locaux et les parlementaires.
déploiement de voitures radars banalisées
M. le président. La parole est à M. Édouard Courtial, auteur de la question n° 1708, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Édouard Courtial. Madame la ministre, la sécurité routière, comme toute politique publique, requiert, à mon sens, pour être pleinement efficace, de la transparence et de la pédagogie.
Or, bien que nous puissions pleinement partager l’objectif de limiter les risques pour les usagers de la route, les mesures que vous avez prises concernant la généralisation à l’ensemble du territoire national des voitures radars banalisées par des opérateurs privés ne présentent aucune de ces deux exigences.
J’évoquerai tout d’abord le manque de transparence. Où est la transparence, face à l’absence de toute communication sur les résultats obtenus en termes d’amélioration de la sécurité routière ? Où est la transparence, face à l’absence d’un calendrier clair et d’une méthode explicitée ? Où est la transparence, face à l’absence de garanties sur les contrôles de ces opérateurs ?
Je pense aux témoignages inquiétants d’automobilistes sur des dérives constatées par certaines compagnies visant à les piéger pour les inciter à franchir les limitations de vitesse, privilégiant ainsi la rentabilité à la sécurité…
J’évoquerai ensuite le manque de pédagogie. Où est la pédagogie face à l’absence d’une campagne de prévention de grande ampleur parallèlement au déploiement de ce dispositif ? Où est la pédagogie, puisque vous refusez un système d’identification des véhicules radars privés ? Où est la pédagogie, face à une sanction automatique et aveugle conduisant les automobilistes à être focalisés uniquement sur leur vitesse ?
Sans transparence et sans pédagogie, les Français voient cette nouvelle mesure comme un nouvel impôt déguisé, un moyen pour l’État de remplir les caisses sur leur dos, d’autant que, si l’on en croit différentes projections, on passerait de 1,5 million de PV à 12 millions. Ils y voient le symbole d’une politique de sécurité routière ayant définitivement basculé dans le tout répressif. Ils y voient enfin, et surtout, une nouvelle rupture d’égalité entre les urbains et ceux qui habitent dans les territoires ruraux, ces derniers n’ayant d’autres choix, pour se déplacer, que d’utiliser leur voiture chaque jour.
Abaissement de la vitesse sur les routes secondaires à 80 kilomètres par heure, puis rétropédalage, augmentation des radars tourelles, qui ne sont pas toujours signalés dans mon département, et, enfin, voitures radars banalisées par des opérateurs privés. Cela commence à faire beaucoup, y compris pour les plus conciliants ! Prenez garde, madame la ministre, à ne pas souffler sur les braises.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Courtial, le déploiement des voitures radars banalisées suscite, vous l’avez dit, un certain nombre d’interrogations légitimes. Toutefois, certaines informations sont inexactes, et je souhaiterais dans un premier temps y revenir.
Tout d’abord, le nombre de voitures radars n’a pas explosé depuis 2020. Les premières voitures radars banalisées ont progressivement été déployées à compter de 2013. Avant le lancement, en 2018, de la mesure d’externalisation, on en comptabilisait 383, exclusivement conduites par des policiers ou des gendarmes.
Depuis 2018, le déploiement progressif de voitures radars à conduite externalisée, au nombre de 145 à ce jour, a entraîné la suppression de 116 voitures radars, qui seront, à terme, toutes remplacées. Cette mesure permet aux forces de sécurité intérieure d’accomplir d’autres missions de sécurité routière qui ne peuvent être automatisées.
Ensuite, le contrôle des vitesses par voitures radars est un dispositif non pas répressif, mais dissuasif. La projection ayant permis d’établir le chiffre de 12 millions de PV n’est fondée sur aucun constat. Aujourd’hui, la mesure d’externalisation de la conduite des voitures radars permet d’accroître l’utilisation des voitures, sans pour autant engendrer une multiplication des PV.
S’agissant de la pertinence de mettre en place un système d’identification des voitures radars à conduite externalisée, j’observe que cette demande reprend l’idée de la proposition de loi du député Pierre Cordier visant à modifier l’article L. 413-5 du code de la route. Cette idée, séduisante a priori, car renforçant le caractère dissuasif du dispositif, pose un problème de sécurité pour les conducteurs employés par les entreprises de conduite externalisée : des actes malveillants à leur égard sont régulièrement constatés dans les régions concernées, prenant parfois la forme d’actes dangereux, dont certains ont donné lieu à dépôt de plainte ou de main courante.
M. le ministre de l’intérieur a demandé à ses services d’étudier la pertinence d’une publication par les préfectures, sur leur site internet, de la cartographie des axes contrôlés par ces véhicules, comme l’ont déjà fait les préfectures de Loire-Atlantique et de Maine-et-Loire.
Enfin, monsieur le sénateur, vous affirmez que l’État utilise ces dispositifs pour alimenter son budget, sans gain pour la sécurité routière. C’est une inexactitude démentie par les documents budgétaires transmis chaque année au Parlement : on y découvre, d’une part, que l’argent des radars est utilisé à plus de 85 % en faveur de la sécurité routière dans le cadre d’un compte d’affectation spéciale et, d’autre part, que l’insécurité routière coûte 50,2 milliards d’euros par an, ce qui est très largement supérieur à ce que le « contrôle automatique » rapporte au budget de l’État.
Pour finir, je rappellerai avec gravité que la vitesse est toujours responsable dans notre pays d’un tiers des accidents mortels et que le contrôle automatisé permet, dans certains cas, d’y parer, en la limitant.
M. le président. La parole est à M. Édouard Courtial, pour la réplique.
M. Édouard Courtial. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse.
J’insiste sur la distinction entre les urbains et les ruraux, entre ceux qui peuvent prendre les transports en commun et ceux qui sont obligés de prendre leur voiture. Ces derniers, même s’ils reconnaissent que chacun doit être associé à la politique de sécurité routière, ne veulent pas se faire racketter. Ils veulent plus de pédagogie et de transparence.
effectifs et conditions de travail des fonctionnaires de police au commissariat de gap
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, auteur de la question n° 1723, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le 4 juillet dernier, aux environs de deux heures du matin, des coups de feu ont été tirés dans le centre-ville de Gap dans les Hautes-Alpes. Lors de l’intervention, trois personnes ont été blessées, dont un policier, qui a été blessé au genou.
Un tel événement n’est pas anodin : il révèle non seulement les relations difficiles qu’entretiennent certains de nos concitoyens avec les forces de sécurité, mais aussi une réalité du quotidien pour les forces de l’ordre, confrontées à un manque de moyens. En effet, cette fusillade a entraîné l’intervention du seul et unique équipage de nuit du commissariat de Gap. Oui, madame la ministre, la sécurité nocturne de Gap, préfecture des Hautes-Alpes, et de ses 42 000 habitants, repose sur un équipage.
Il ne s’agit malheureusement que de la partie émergée de l’iceberg de la sécurité. En effet, la réduction structurelle des effectifs a pour conséquence une dégradation des conditions de travail des personnels de police et un service rendu à la population d’une qualité moindre.
Alors que le commissariat de Gap comptait 64 personnes en décembre 2018, ils ne sont plus que 51 en 2021. Ce sous-effectif de fonctionnaires de police rend impossible la mission de sécurité que l’on doit aux Gapençaises et Gapençais. D’ailleurs, dans le même temps, la délinquance ne cesse de croître à Gap, et les manifestations sur la voie publique y ont été multipliées par cinq en moins de trois ans.
La conséquence directe de cette situation tendue est une baisse de l’attractivité des postes, la moyenne d’âge des policiers de Gap étant de 48 ans, contre 24 ans, soit deux fois moins, en région parisienne.
Outre les problèmes d’effectifs, les locaux du commissariat de Gap manquent d’entretien et sont vétustes. À titre d’exemple, sachez, madame la ministre, que les vestiaires des agents féminins ont été installés dans des locaux précédemment occupés par les véhicules de service ! Comment peut-on traiter nos forces de l’ordre de cette manière, pour ensuite leur demander de risquer leur vie au quotidien pour protéger nos populations ?
Certes, les Hautes-Alpes ne représentent que 0,20 % de la délinquance nationale. Pour autant, nos concitoyens méritent d’être traités de la même manière que dans les grandes agglomérations. Tel est le sens de l’engagement républicain de tous, notamment de nos forces de police.
Alors que le maire de Gap a écrit à M. le ministre Gérald Darmanin, les 7, 12 et 28 mai dernier sur ces sujets, la réponse faite en substance a été d’inciter au recrutement de policiers municipaux. Que comptez-vous faire, madame la ministre, face au manque de fonctionnaires de police à Gap ? Allez-vous enfin renforcer les effectifs comme il est demandé ? Quels seront précisément les moyens alloués à ce commissariat en termes d’investissements ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Jean-Michel Arnaud, en matière de sécurité, les attentes des Français sont fortes et légitimes. Le Gouvernement met tout en œuvre pour y répondre.
Avec des crédits en hausse de 1,7 milliard d’euros depuis 2017 et avec les 621 millions d’euros du plan France Relance, nous renforçons et modernisons les moyens des forces de sécurité.
L’arsenal législatif se renforce et s’adapte, avec la récente proposition de loi pour une sécurité globale préservant les libertés, mais aussi avec les lois portées par mon collègue garde des sceaux. Le Beauvau de la sécurité décidé par le Président de la République et piloté par le ministre de l’intérieur permettra, dans la concertation, de nouvelles avancées.
Notre objectif principal est d’accroître la présence des forces sur le terrain et de faire reculer la délinquance.
J’en viens maintenant au cœur de votre question, monsieur le sénateur, qui concerne la ville de Gap. La sécurité publique, notre police de la sécurité du quotidien, y dispose d’un effectif opérationnel qui a augmenté de 10 % depuis le début du quinquennat, pour atteindre à ce jour 53 gardiens de la paix. Je tiens à préciser, monsieur le sénateur, que Gap se trouve ainsi en situation favorable par rapport à d’autres circonscriptions de sécurité publique comparables.
Aux policiers qui s’engagent au quotidien pour la sécurité de tous, dans des conditions souvent dangereuses, nous devons des conditions de travail dignes. Je suis notamment sensible à l’exemple que vous avez évoqué, monsieur le sénateur, concernant les locaux destinés aux personnels féminins. Avec le ministre de l’intérieur, nous avons fait une priorité de la situation des locaux. Il s’agit d’un enjeu de première importance, pour les victimes, mais aussi et surtout pour les conditions de travail quotidiennes des policiers.
S’agissant de Gap, le commissariat est installé, je le rappelle, dans la cité administrative Desmichels et le bâtiment, quoique de capacité insuffisante – vous avez raison –, est dans un état global considéré comme satisfaisant. Des travaux y sont régulièrement menés. L’accueil a par exemple été rénové en 2017. Par ailleurs, en 2020 et au cours des cinq premiers mois de 2021, ce sont plus de 50 000 euros qui ont été engagés pour divers travaux du quotidien relatifs à la maintenance, à l’entretien et à la sécurisation. En outre, le réaménagement du chef de poste a été programmé.
J’ajoute que la création du secrétariat général commun départemental au sein de la préfecture devrait conduire, à terme, à des modifications dans l’occupation de la cité administrative. La sécurité publique devrait à cette occasion gagner de l’espace supplémentaire, par exemple pour accueillir le service départemental du renseignement territorial.
Monsieur le sénateur, qu’il s’agisse des conditions de travail des policiers ou des moyens qui leur sont nécessaires pour accomplir efficacement leurs missions, vous pouvez compter sur notre engagement et notre parfaite vigilance. Je vous remercie des points sur lesquels vous avez aujourd’hui attiré notre attention.
multiplication des inondations sur la route nationale 19
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 1755, transmise à M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports.
Mme Catherine Procaccia. Madame la secrétaire d’État, ma question concerne les inondations à répétition de la RN 19, notamment dans le tunnel de Boissy-Saint-Léger.
Les fortes précipitations et les orages intervenus voilà quelques semaines dans le Val-de-Marne ont provoqué des inondations sur la RN 19, entre Boissy-Saint-Léger et Bonneuil-sur-Marne, dans le tunnel. L’axe a été rapidement infranchissable, piégeant plusieurs automobilistes et saturant la circulation sur cette zone.
Hélas, ce n’est pas une première, puisque deux inondations quasiment similaires étaient survenues en 2020, avant que ne soit ouverte, en avril 2021, la déviation de Boissy-Saint-Léger.
La RN 19 est une artère très empruntée par les Franciliens. Or il semble que, aujourd’hui, pluie rime inéluctablement avec inondation. Certes, la forme de cuvette de cette section n’aide naturellement pas l’eau à s’évacuer, mais les défaillances répétées du système de pompage sont aussi en cause.
Sur place, les élus évoquent une erreur de conception et l’absence d’une retenue d’eau capable de faire face aux forts orages.
Si la direction des routes de l’Île-de-France semble résignée face à ces situations, tel n’est pas le cas des élus. Ces inondations paralysantes et éminemment dangereuses ne sont acceptables ni pour les automobilistes ni pour les riverains, qui ne peuvent accepter leur multiplication.
Que comptent faire les services de l’État, dont dépend cette route, pour permettre aux automobilistes de l’emprunter dans des conditions optimales de sécurité ?
Je vous invite, madame la secrétaire d’État, à regarder cette photo (Mme Catherine Procaccia montre à l’ensemble de l’hémicycle une photo, sur tablette, de l’inondation.) Est-il normal qu’une route récente, réaménagée après sept ans de construction, en soit à ce point-là ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Madame la sénatrice Procaccia, vous interpellez le ministère des transports sur ce tronçon de la RN 19 qui comprend le tunnel de Boissy-Saint-Léger. Vous le savez, les agents et les services compétents du ministère sont pleinement engagés dans cette maintenance et cette modernisation du réseau routier national, qui sont absolument nécessaires – nous avons longuement évoqué ce sujet dans le cadre de l’examen du projet de loi d’orientation des mobilités.
Ces agents sont mobilisés jour et nuit et par tous les temps pour satisfaire les besoins des usagers en matière de sécurité et de libre circulation, notamment pour garantir le bon écoulement des eaux sur le réseau routier national et à côté du réseau, mission absolument essentielle.
Concernant en particulier la RN 19 entre Boissy-Saint-Léger et Bonneuil-sur-Marne, elle présente en effet un point bas qui est soumis à une accumulation d’eau en cas d’orage.
Le dispositif d’assainissement est dimensionné pour évacuer des événements pluvieux d’ampleur décennale – c’est logique –, comme c’est la norme pour toute conception routière. On a pu observer que les pluies des étés 2020 et 2021, qui ont conduit à des fermetures de la RN 19 – vous l’avez dit –, avaient été particulièrement exceptionnelles, correspondant à des périodes de retour de trente à quarante ans. C’est ce contexte tout à fait particulier qui explique que le dispositif d’assainissement, dont les capacités sont pourtant importantes, ait été malgré tout saturé.
Dans le cadre de ces épisodes pluvieux exceptionnels, des difficultés sont observées, notamment des dysfonctionnements du système de pompage. Des opérations de maintenance, dotées d’un budget important, sont en cours dès cette année pour améliorer le fonctionnement de la station. Concrètement, il s’agit de mettre définitivement hors d’atteinte des équipements électriques qui se montreraient vulnérables par forte pluie. Afin d’assurer la pérennité des dispositifs mis en place, la direction interdépartementale des routes d’Île-de-France va accroître ses efforts de maintenance et de surveillance de la station de pompage.
L’État est pleinement conscient de ces difficultés et de ces problèmes ; les équipes et agents sont totalement mobilisés et nous vous apporterons sans attendre des réponses adaptées.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour la réplique.
Mme Catherine Procaccia. Merci, madame la secrétaire d’État. La direction des routes d’Île-de-France, la Dirif, nous a dit qu’elle fermait la route, tout simplement, lorsqu’une inondation survenait ; qu’elle s’en contente ne serait pas acceptable, et vous nous dites que ce n’est pas le cas.
On observe des problèmes de conception : il est anormal que les armoires électriques soient sous l’eau s’agissant d’un ouvrage moderne et complètement neuf, comme il est anormal qu’il faille attendre les appels à l’aide des maires pour que la Dirif vienne mettre en route la deuxième pompe de la station de pompage !
Nous comptons sur vous et sur votre engagement pour que ces situations cessent de se reproduire. Cette route est quand même la voie principale menant à la Francilienne !
prise en compte des cellules pénitentiaires dans la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains
M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, auteur de la question n° 1658, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement.
M. Frédéric Marchand. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la question de la prise en compte des cellules pénitentiaires dans la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU).
L’article 55 de cette loi de décembre 2000 prévoit l’obligation pour certaines communes de disposer d’un nombre minimal de logements sociaux proportionnel à leur parc résidentiel. Cette disposition arrivant à échéance en 2025, elle fait aujourd’hui l’objet de débats multiples – ainsi dans cette assemblée, dans le cadre de la première lecture du projet de loi 4D.
Il me semble pertinent, sur la base de l’exemple de la ville de Sequedin, dans la métropole européenne de Lille, d’étudier la possibilité d’une évolution qui consisterait à inclure les cellules d’établissements pénitentiaires dans le décompte des logements sociaux des communes.
L’implantation d’une prison est en effet une décision unilatérale de l’État et n’est pas sans conséquence sur la vie de la commune ; les impacts sont importants, notamment, sur son budget. La prison de Sequedin comprend ainsi 368 cellules pour une superficie de 35 000 mètres carrés, sans compter la zone de sécurité qui l’entoure.
En outre, la création d’un établissement pénitentiaire signifie un accroissement de la population communale, puisque les détenus sont comptabilisés par l’Institut national de la statistique et des études économiques dans la population légale de la commune. Cette comptabilisation peut avoir pour conséquence de faire franchir des seuils démographiques impliquant de nouvelles obligations. Ainsi des communes ont-elles été soudain soumises à l’obligation d’atteindre un taux de 25 % de logements sociaux à la suite de la construction d’un tel établissement sur leur territoire.
Accueillir une prison impose par ailleurs à la commune d’assurer un service public auprès des détenus en matière d’état civil.
L’État intègre déjà dans l’inventaire des logements locatifs sociaux un certain nombre de structures collectives d’hébergement spécialisé telles que les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), les logements pour étudiants saisonniers, les centres d’hébergement et de réinsertion sociale, les centres d’accueil de demandeurs d’asile. Les places occupées dans ces structures sont assimilées, en totalité ou partiellement, à des logements sociaux.
La réalisation de logements sociaux est à nos yeux légitime et nécessaire ; il s’agit d’un enjeu essentiel pour permettre l’accès de tous à un logement de qualité tout en favorisant la mixité sociale.
Il est néanmoins indispensable de prendre en compte les spécificités de chaque territoire, pour ce qui est notamment du foncier disponible et des structures collectives installées sur le territoire des communes.
Aussi, madame la secrétaire d’État, je vous remercie de bien vouloir m’indiquer quelles sont les pistes étudiées pour permettre l’intégration, totale ou partielle, des cellules des établissements pénitentiaires dans l’inventaire des logements locatifs sociaux des communes concernées.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Marchand, vous souhaiteriez que le projet de loi 4D prévoie le décompte des cellules d’établissements pénitentiaires comme logements sociaux au titre de l’article 55 de la loi SRU.
Cette loi SRU fixe un taux minimal de logements sociaux dans les territoires qui concentrent les besoins ; elle vise avant tout à développer une offre pérenne de logements locatifs sociaux, accessible de façon universelle à tous les ménages sous plafond de ressources.
Il est donc en tout état de cause évident que la finalité des établissements pénitentiaires ne saurait être assimilée à celle du logement social. Je rappelle que le parc social loge aujourd’hui un Français sur six et que, deux millions de demandeurs de logements sociaux étant en attente, les besoins restent importants.
Le Gouvernement a donc refusé que le dispositif SRU soit ainsi détourné de sa finalité, considérant comme inappropriée la comptabilisation comme logement social de ce type de structures.
Un amendement visant à prendre en compte les établissements pénitentiaires dans ce décompte de la loi SRU a d’ailleurs été rejeté vendredi dernier, vous le savez, dans cet hémicycle – l’avis de la commission et celui du Gouvernement étaient défavorables.
Le titre III du projet de loi 4D, consacré au logement, pérennise le dispositif SRU en conservant ses fondamentaux, lesquels – l’examen du texte par le Sénat l’a montré – font désormais l’objet d’un consensus transpartisan. Il y apporte par ailleurs des adaptations nécessaires pour tenir compte des difficultés de certaines communes, imputables à des spécificités locales. Il importe de maintenir cet équilibre.
Je souhaite rappeler, en outre, que l’installation d’une prison sur le territoire d’une commune induit le versement par l’État de concours financiers complémentaires. L’augmentation de la population recensée par l’Insee sur le territoire d’une commune entraîne notamment une hausse de la part forfaitaire de sa dotation globale de fonctionnement comprise entre 64 et 129 euros par habitant. Une telle augmentation est également susceptible de conduire à la hausse des autres dotations versées à cette commune.
problématique des « ruisseaux couverts » de l’ex-bassin houiller cévenol
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, auteur de la question n° 1490, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
M. Laurent Burgoa. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, après d’importantes pluies, en 2012, la commune de Robiac-Rochessadoule subissait l’effondrement d’un tunnel sur l’un de ses ruisseaux dits couverts.
Cet effondrement a engendré un cratère de quarante mètres de diamètre, emportant une aire de jeux pour enfants, un terrain de tennis et une partie du terrain de football !
Ces tunnels, qui sont présents dans bien d’autres communes gardoises, avaient été édifiés sur des ruisseaux afin de créer des plateformes suffisamment vastes pour y accueillir des infrastructures inhérentes à l’activité minière.
Malheureusement, lorsque les exploitants ont mis fin à leur activité, ils ont suivi une procédure prévue par une réglementation qui ne prenait pas en compte ces ouvrages. Aujourd’hui, personne ne peut ignorer que ces tunnels sont de véritables menaces pour les habitants vivant à proximité, ni que ces ouvrages étaient bel et bien inhérents à l’activité minière.
À la fermeture des mines, nationalisées depuis 1946, l’État a vendu une grande partie de ses terrains. Ainsi les acquéreurs, qu’ils soient publics ou privés, ont-ils hérité, sans être en mesure d’en être parfaitement conscients, des contraintes afférentes au droit du sol. Ni les particuliers ni les communes ne peuvent assumer seuls la prise en charge des dépenses liées à la sécurisation de ces ouvrages gigantesques.
Depuis l’effondrement évoqué, la quinzaine de communes concernées a constitué un syndicat intercommunal à vocation unique (SIVU) ; celui-ci travaille depuis deux ans dans le sens des demandes de l’État – programme d’actions de prévention des inondations, programme d’études préalables –, et ce – je dois le dire – en bonne intelligence avec la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) et l’Office national des forêts (ONF).
Mais il faut désormais des moyens ! De nouvelles catastrophes sont à craindre et le Gouvernement ne pourra pas se dédouaner. Il est urgent que l’État soutienne l’entretien de ces ruisseaux couverts. Madame la secrétaire d’État, prendrez-vous vos responsabilités ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Burgoa, les ruisseaux couverts du Gard, comme vous le soulignez, sont des ouvrages hérités d’anciennes exploitations minières, créés afin d’optimiser la surface disponible et de répondre à des besoins logistiques inhérents à l’exploitation. Constitués de tunnels et de galeries permettant le passage de l’eau, ces ruisseaux couverts sont aujourd’hui, pour certains d’entre eux, fortement dégradés, ce qui peut occasionner, pour les propriétaires de terrains, d’importantes difficultés financières.
Même si les dégradations sont susceptibles de porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens situés en surface, les ruisseaux couverts ne sont pas des installations minières ; ils n’ont donc pas fait l’objet d’un encadrement réglementaire au titre du code minier.
Ces ouvrages relèvent bien de la responsabilité des personnes qui ont souhaité en récupérer la propriété. Ainsi les droits et responsabilités afférents, notamment les travaux de réhabilitation et d’entretien que vous évoquez, reviennent-ils aux actuels propriétaires, souvent des communes, dont les moyens techniques et financiers sont parfois limités.
Compte tenu des faibles ressources financières de ces propriétaires, des modalités d’accompagnement au titre de la solidarité nationale sont mises à l’étude – une participation des crédits du fonds de prévention des risques naturels majeurs, le fameux fonds Barnier, aux travaux de réhabilitation de ces ouvrages est notamment envisageable. Cette aide plafonnée à 30 % des dépenses hors coûts d’entretien est réservée aux travaux jugés indispensables à la mise en sécurité des personnes dans le cadre d’un programme porté par une collectivité territoriale ou un établissement public de coopération intercommunale développant une approche globale du risque.
Nous nous tenons à votre disposition pour évoquer plus avant ces dossiers.
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour la réplique.
M. Laurent Burgoa. Merci, madame la secrétaire d’État, pour votre réponse. Je vous lance une invitation : venez visiter ces lieux. Les communes concernées sont de petites communes dotées de peu de moyens financiers ; elles attendent que l’État intervienne.
Prenons date et venez le plus rapidement possible dans le Gard !
soutien à l’énergie hydrogène
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, en remplacement de M. Louis-Jean de Nicolaÿ, auteur de la question n° 1524, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
M. Rémy Pointereau. Madame la secrétaire d’État, mon collègue Louis-Jean de Nicolaÿ souhaite vous interroger sur la façon dont le Gouvernement compte intervenir au soutien des acteurs ayant fait le choix de développer un hydrogène vert, notamment dans les territoires.
La filière hydrogène, véritable promesse d’énergie décarbonée, a été lancée dès 2018 et développée depuis cette date via un plan hydrogène doté, dans le cadre du plan de relance, d’une enveloppe de 2 milliards d’euros pour la période 2020-2022, auxquels s’ajouteront 7 milliards d’euros en vertu de la trajectoire dessinée jusqu’en 2030.
Dans ce secteur, la France a clairement choisi de développer la filière électrolyse, un objectif ambitieux de 40 gigawatts en 2030 étant défini.
Les territoires, acteurs incontournables d’un maillage efficient, ont pareillement pris le sujet à bras-le-corps ; la région des Pays de la Loire débloque ainsi 100 millions d’euros d’ici à l’année 2030 pour cette filière d’excellence.
Dans le même temps, lesdits territoires ont su miser sur d’autres techniques, complémentaires à l’électrolyse de l’eau, consistant à produire massivement de l’hydrogène vert en utilisant de la biomasse agricole.
Or, pour convaincre, ces procédés nécessitent un accompagnement et une garantie.
Plus performant qu’un électrolyseur et plus rentable qu’une éolienne, le procédé de gazéification à très haute température est duplicable et adaptable partout dans les territoires ruraux.
Par ailleurs, cette pratique, qui n’entre pas en concurrence avec les cultures vivrières, nettoie les sols, purifie les nappes phréatiques, capte massivement du CO2 par photosynthèse et augmente de 10 à 15 % le rendement des cultures suivantes.
Cette technique est un véritable challenge qui nécessite avant tout alliances et synergies entre autorités publiques nationales et locales, entreprises, organisations de la société civile et autres parties prenantes.
Aussi, à l’heure où les différents plans sectoriels de relance gouvernementaux se multiplient, quelle est la place réservée à cette technique importante dans le déploiement stratégique du plan hydrogène vert en France ? Et quelles sont les mesures de soutien qui seront consacrées à la valorisation de cet hydrogène renouvelable et décarboné, répondant pleinement à la « stratégie de l’hydrogène pour une Europe climatiquement neutre » élaborée par la Commission européenne ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Pointereau, vous nous interrogez sur le soutien de l’État à la filière hydrogène vert. Cette mise en œuvre de la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné se fait – vous le savez – à un rythme accéléré, depuis son lancement en septembre dernier, afin d’accompagner les projets sur l’ensemble de la chaîne de valeur.
L’appel à projets « Écosystèmes territoriaux hydrogène », doté de 275 millions d’euros pour la période 2020-2023, rencontre un très vif succès auprès des industriels. Le montant cumulé des aides qui seront versées aux vingt-deux projets déjà sélectionnés dépasse les 156 millions d’euros, pour des investissements dont le montant s’élève à 490°millions d’euros. Quant à l’appel à projets « Briques technologiques et démonstrateurs hydrogène », il a été modifié pour permettre le financement en subventions jusqu’à 75 %.
L’appel à manifestation d’intérêt lancé en 2020 afin d’identifier les initiatives qui pourraient participer à un projet important d’intérêt européen commun sur l’hydrogène a conduit à présélectionner plusieurs projets portant sur le développement de giga-usines de production d’électrolyseurs et de composants clés, sur la mobilité lourde ou sur la décarbonation de l’industrie.
Tout cela représente un montant de 1,5 milliard d’euros d’aides pour la France.
Le projet que vous évoquez plus particulièrement, porté par Quairos Énergies, vise à l’installation d’une usine de gazéification de chanvre sur le territoire de Trangé dans le cadre de l’appel à projets « Briques technologiques et démonstrateurs hydrogène ». Après analyse et au regard du classement des différents candidats, il n’a pas été sélectionné.
Ce projet prévoit notamment de produire du gaz de synthèse destiné à être injecté dans le réseau de gaz naturel. Or, dans un souci constant d’efficacité énergétique, la priorité du Gouvernement a été, et sera, tant que l’hydrogène décarboné sera coûteux à produire, de soutenir son usage direct plutôt que sa transformation en gaz de synthèse.
Par ailleurs, la faisabilité de l’injection sans risque d’un tel gaz de synthèse contenant un taux résiduel d’hydrogène dans un réseau de gaz naturel n’est pas encore démontrée.
Je sais que les gestionnaires de réseaux de gaz naturel réalisent des études à ce sujet. Je tiens d’ailleurs à compléter mon propos : le porteur de projet ayant indiqué que des études de faisabilité et de design étaient en cours concernant la méthanation et la purification notamment, il gagnera à déposer un nouveau dossier de candidature lorsque la maturité technique du projet sera mieux caractérisée. L’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, dite Agence de la transition écologique) avait d’ailleurs déjà partagé ses interrogations avec le porteur à la suite d’une réunion de préprojet, l’invitant à renforcer son dossier en conséquence avant dépôt.
multiplication des projets d’implantation de parcs éoliens dans les territoires ruraux
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, auteur de la question n° 1569, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
M. Stéphane Sautarel. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les inquiétudes soulevées par la multiplication des projets d’implantation de parcs éoliens dans les territoires ruraux, en particulier dans le Cantal.
S’inscrire dans une logique de croissance des énergies renouvelables, j’y suis favorable, bien évidemment. En revanche, le faire de manière durable, harmonieuse et réfléchie serait un gage de confiance adressé aux élus de nos territoires, à nos concitoyens et à l’ensemble des acteurs économiques et agricoles.
Il est toujours paradoxal de voir débarquer à la hussarde des entreprises démarchant nos territoires, exigeant des rémunérations mirobolantes et faisant fi de l’acceptabilité sociale, environnementale et touristique de tels projets, tout cela, pour l’essentiel, sur le dos du contribuable français. Alors que les contraintes d’urbanisme ne cessent de limiter les prérogatives des communes, il semble qu’en l’espèce tout soit possible, en dehors de toute règle !
À écouter le Président de la République attester lui-même que « le consensus autour de l’éolien est en train de nettement s’affaiblir dans notre pays ». Mais sachant que l’on ne donne qu’un avis consultatif aux maires, même si le Sénat propose d’y remédier, et qu’on ignore les citoyens, comment s’étonner de la perte de confiance dans la cohérence de l’action publique territoriale ?
L’exemple du projet d’implantation d’éoliennes sur la commune de Cézens dans le Cantal témoigne, parmi tant d’autres, de ces ambiguïtés et de ces incohérences.
Cette commune, située au pied du Plomb du Cantal, à quelques pas de la vallée de Brezons, la plus belle vallée glaciaire d’Europe selon Haroun Tazieff, se voit imposer l’implantation d’un mât de mesure sans que les expressions municipales et locales aient été entendues.
Ces mesures vont s’étendre sur une durée comprise entre un et quatre ans. Comment la commune et son intercommunalité peuvent-elles, dans ces conditions, faire avancer sereinement leurs projets ? Comment les habitants peuvent-ils vendre leurs maisons avec cette épée de Damoclès au-dessus de leur tête ? Comment accueillir de nouvelles populations demandeuses de nos espaces et de nos paysages ?
Comment comptez-vous, madame la secrétaire d’État, redonner confiance aux territoires, à leurs élus et à leurs habitants et faire en sorte qu’une réelle pertinence et une réelle cohérence prévalent dans l’action publique en matière d’éolien ?
Par ailleurs, quand le Parlement va-t-il être enfin saisi du plan de programmation de l’énergie ? C’est nécessaire si l’on veut espérer mettre un terme à ces injonctions paradoxales et contradictoires.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Sautarel, vous nous interrogez sur la question de l’installation d’éoliennes en zone rurale et faites état des inquiétudes soulevées chez les élus locaux.
Vous le savez, nos objectifs climatiques exigent une électrification massive de notre économie pour réduire notre dépendance aux énergies fossiles. De fait, malgré nos efforts en matière d’efficacité énergétique, la consommation d’électricité va augmenter dans les années à venir ; il sera donc nécessaire de mettre en service de nouvelles installations de production d’électricité décarbonée.
Il est donc en effet crucial d’augmenter nos capacités de production d’énergie renouvelable électrique, mais dans la concertation et en favorisant l’acceptabilité des projets – je vous rejoins. L’éolien terrestre est une des énergies renouvelables les plus compétitives ; il contribue significativement à notre sécurité d’approvisionnement, enjeu clé. En 2019, le parc éolien français a permis d’éviter l’émission de 15 millions de tonnes de CO2, soit l’équivalent de la circulation annuelle de près de 8 millions de véhicules.
Ces éoliennes sont soumises à une réglementation stricte : elles doivent obtenir une autorisation environnementale préfectorale préalablement à leur implantation, afin de démontrer que les dangers et les inconvénients du projet pour les populations, la biodiversité et les paysages peuvent être prévenus. En particulier, tout développeur éolien fournit une analyse de l’impact paysager du projet – vous m’interpellez sur ce point également –, qui est incluse dans la demande d’autorisation.
Enfin, les projets éoliens doivent respecter les dispositions des documents d’urbanisme, en particulier celles du plan local d’urbanisme, le PLU, quand il existe. Pour mieux associer les riverains et les collectivités, il est surtout important de mieux planifier le développement de l’éolien en prenant en compte les spécificités locales. Le Gouvernement a récemment, par une instruction en date du 26 mai 2021, demandé à chaque préfet de région d’élaborer sous un an une cartographie des zones favorables au développement de l’éolien, afin de sécuriser l’atteinte des objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).
Il faut donc redéfinir ces zones dans la concertation la plus large. Quant à savoir à quelle date le Parlement sera saisi des questions de devenir de notre mix énergétique, la loi Énergie et climat de 2019 a introduit, à la demande du Sénat, le principe d’une loi quinquennale de programmation en matière d’énergie et de climat. La première loi quinquennale doit être promulguée avant le 1er juillet 2023, conformément à l’article L. 100-1 A du code de l’énergie. Elle fixera le cadre de la prochaine révision de la PPE, qui déclinera les objectifs ainsi précisés.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour la réplique.
M. Stéphane Sautarel. Pour ce qui est du mix énergétique et de la PPE, nous pouvons nous rejoindre sur les objectifs. En revanche, concernant le sort réservé à nos paysages lorsque l’éolien s’implante dans des territoires ruraux, en particulier dans des parcs naturels, la concertation doit encore être grandement améliorée. L’objectif de la PPE, c’est-à-dire le développement des énergies renouvelables, ne peut être recherché à l’exclusion de toute autre considération, d’autant que, compte tenu des durées engagées, ces dossiers font peser beaucoup d’inconnues sur nos territoires.
rapports entre l’office français de la biodiversité et les élus locaux
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, auteur de la question n° 1585, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
M. Rémy Pointereau. Ma question concerne l’Office français de la biodiversité.
Nous tenions, au Sénat, lorsque l’OFB a été créé, à ce qu’il puisse travailler de concert avec les élus locaux. Les différents comptes rendus de réunions des commissions sénatoriales concernées en témoignent : nous voulions que l’Office exerce ses prérogatives en adoptant une sensibilité écologique équilibrée, mais surtout en bonne intelligence avec l’ensemble des acteurs de terrain, maires, agriculteurs, entreprises.
Malheureusement, dans les faits, les actions de l’OFB prennent souvent la forme de la répression, sans phase de médiation préalable. J’en veux pour preuve de nombreux exemples qui m’ont été rapportés. Ainsi une agricultrice a-t-elle reçu, pour avoir cessé d’irriguer une heure trop tard, une convocation en justice assortie d’une procédure d’enquête très musclée et d’un interrogatoire qui n’avait rien à voir avec les faits, tout cela sur simple dénonciation, sans preuve formelle et sans que l’intéressée soit avertie au moment des faits.
Autre exemple : le maire d’une commune rurale comprenant un étang communal créé voilà plus de trente-cinq ans, qui était géré, à l’époque, par la direction départementale de l’équipement (DDE) et financé par l’État, se voit convoquer en justice pour défaut de déclaration de prélèvements d’eau dans la nappe via le puits éolien qui y est installé.
Par conséquent, madame la secrétaire d’État, n’est-il pas opportun d’envisager, dans de tels cas, une étape de médiation préalable à la phase répressive ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Pointereau, concernant ces relations entre les agents de l’Office français de la biodiversité et les élus locaux, je sais, en tant que ministre de tutelle – vous l’imaginez bien – le dévouement et l’implication de ces agents. Le travail de médiation qu’ils effectuent est nécessaire, au quotidien, dans des situations parfois extrêmement tendues sur le terrain. Nous ne devons pas laisser s’installer des incompréhensions ou des tensions qui seraient préjudiciables à l’obtention d’accords et d’équilibres soutenus par les élus locaux.
L’OFB contribue à la surveillance, à la préservation, à la gestion et à la restauration de la biodiversité ainsi qu’à la gestion équilibrée et durable de l’eau ; il exerce ses missions de connaissance, de recherche, de mobilisation de la société, de conseil, de financement, d’animation d’actions mais aussi – vous l’avez dit – de police en interagissant fortement avec les acteurs sur les territoires.
La mission de police de l’Office prend différentes formes ; elle consiste notamment en une contribution, à la demande des services déconcentrés de l’État, à l’instruction et à l’élaboration des prescriptions visant à ce que l’eau et la biodiversité soient prises en compte en amont de la réalisation des projets.
L’OFB intervient également dans le contrôle administratif, sous l’autorité des préfets, dans le cadre de plans de contrôle établis par les missions inter-services de l’eau et de la nature (Misen). Dans ce cadre, il peut effectuer un constat de situation, les éventuelles suites à donner en cas de non-conformité constatée relevant des services de l’État.
Pour ce qui est des procédures judiciaires, les inspecteurs de l’environnement de l’OFB, comme leurs homologues des services déconcentrés de l’État, agissent sous l’autorité des parquets. Ils instruisent sur saisine, en toute objectivité, comme le font d’autres officiers de police judiciaire. Les agents sont formés au respect des règles évidentes de déontologie et du principe d’une instruction à charge et à décharge.
En matière de police de l’eau et de la nature, les Misen sont un cadre d’échange entre l’opérateur et les services déconcentrés permettant de hiérarchiser les actions de contrôle en fonction des enjeux propres à chaque département et d’assurer la bonne coordination entre services. La bonne connaissance des milieux et des acteurs permet aux agents de l’OFB, qui sont souvent des personnalités locales, de tisser ce dialogue, cette concertation, ce partage, sur les enjeux de préservation de la biodiversité ; ainsi peut-on faire cesser les infractions et remettre en état les milieux.
Cela se traduit par des réglementations – je pense à la séquence « éviter, réduire, compenser » – et, parfois, par des suites administratives prises par le préfet ou par des suites judiciaires mises en œuvre par le parquet, mais toujours dans une visée d’amélioration des situations.
Les missions de police des agents de l’OFB sont indispensables à la préservation de l’environnement et à la lutte contre les pollutions. À cet égard, les agents sont pleinement engagés – je le sais – mais aussi à l’écoute de leurs territoires.
Je vous remercie de nous alerter sur certaines situations qui pourraient cristalliser des tensions, monsieur le sénateur ; nous devons absolument accompagner cette médiation et permettre à chacun de s’approprier les enjeux environnementaux tout en veillant au respect du droit, donc à l’efficacité des mesures de police.
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour la réplique.
M. Rémy Pointereau. Merci, madame la secrétaire d’État, pour votre réponse partielle. L’OFB et ses agents doivent agir avec discernement, et non jouer les gros bras comme c’est souvent le cas. Les élus ne sont pas au-dessus des lois, c’est vrai, mais ils ne sont pas non plus au-dessous !
Or ils ont trop fréquemment l’impression – d’autres citoyens, agriculteurs ou entrepreneurs condamnés pour des faits mineurs, sont d’ailleurs dans le même cas – d’être traités comme de vulgaires délinquants. Les faits incriminés, qui, encore une fois, sont mineurs, mériteraient que soit engagée une médiation plutôt qu’une répression et une procédure souvent lourde.
De grâce, madame la secrétaire d’État, faites passer le message aux agents de l’Office français de la biodiversité : qu’ils fassent preuve de discernement, vraiment ! Qu’ils cessent d’arriver sur le terrain l’arme au poing…
M. le président. Il faut conclure.
M. Rémy Pointereau. … pour condamner des élus qui font construire des fossés, par exemple, sans en avoir forcément l’autorisation.
responsabilités engagées à la suite d’une pollution environnementale
M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, auteure de la question n° 1690, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Mme Martine Filleul. Dans la nuit du 9 au 10 avril 2020, la digue d’un bassin de la sucrerie Tereos à Thun-Saint-Martin, dans le Nord, s’est rompue, engendrant la fuite de 90 000 mètres cubes d’eaux polluées dans l’Escaut.
Cet événement est une des pires catastrophes écologiques survenues dans la région depuis des décennies.
Selon l’Office français de la biodiversité, l’OFB, 12 millions de poissons sont morts – autrement dit, 70 % de la population piscicole a disparu – et 40 % de la flore a été détruite, sans compter le développement d’une espèce parasite.
Il ressort des conclusions du rapport analysant l’accident, d’une part, que l’entreprise Tereos n’aurait pas respecté la réglementation, l’entretien des bassins et digues n’étant pas satisfaisant, et, d’autre part, que la prise de conscience par les services de l’État de la gravité de la pollution aurait été trop tardive. En effet, les services compétents pour la qualité de l’eau n’ont pas été associés dès le début à la gestion de l’accident.
Aucune coordination des services de l’État n’a ensuite été mise en place pour organiser le suivi de la pollution. De plus, des acteurs qui auraient pu contribuer à la surveillance du milieu aquatique et à la gestion de ces conséquences n’ont été ni informés ni associés. Enfin, les autorités compétentes en Belgique n’ont pas été prévenues à temps.
Ces manquements successifs de l’entreprise et des services de l’État posent question.
Quels sont les moyens réels donnés à l’État pour contrôler le respect par les entreprises des mesures environnementales ? Comment mieux coordonner la réponse des services étatiques face à ce type de crise ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Madame la sénatrice Filleul, vous m’interrogez sur la terrible pollution environnementale survenue le 10 avril 2020 sur le site de l’entreprise Tereos de Thun-Saint-Martin.
Nous avons été très sensibles à cet accident dramatique pour les milieux aquatiques. À la demande du ministère, une mission a été diligentée pour analyser cet incident et ses conséquences afin d’en dégager les retours d’expérience nécessaires. Les recommandations du rapport remis à cette occasion ont déjà été totalement prises en compte et, pour la plupart d’entre elles, complètement mises en œuvre.
Le préfet consolidera en un seul arrêté l’ensemble des obligations réglementaires du site, après examen par l’inspection des installations classées des études mises à jour par Tereos.
Un protocole définissant plus précisément le rôle des différents services de l’État en cas de pollution touchant les milieux aquatiques et impliquant pleinement l’Office français de la biodiversité (OFB) est en cours de finalisation.
Un comité de pilotage relatif à la restauration écologique de l’Escaut a été mis en place – il s’est déjà réuni trois fois – et associe toutes les parties prenantes, dont les riverains.
Par ailleurs, l’inspection des installations classées a inspecté chaque site agro-industriel des Hauts-de-France comportant d’importants bassins de lagunage dès 2020. La remise en eau des bassins, elle, n’a été autorisée qu’après la réalisation d’études et de travaux.
Concernant la question de la responsabilité pénale, une procédure judiciaire est en cours, qui devra déterminer les causes de l’accident, ainsi que les manquements imputables à l’exploitant. En parallèle, le préfet va engager la procédure en responsabilité environnementale de Tereos.
Dans ce cadre, Tereos a admis sa responsabilité sur le linéaire français. Cette procédure permettra de prescrire à l’exploitant les mesures de réparations environnementales adaptées après qualification des dommages causés par la pollution.
Après arrêté préfectoral et sur proposition d’un groupe d’experts intégrant les parties prenantes, sera présentée prochainement au conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst) du Nord une prescription de restauration des zones d’habitat propices à la reproduction piscicole sur plusieurs secteurs de l’Escaut.
Enfin, le ministère a mis en place un dispositif de vigilance renforcée pour les sites faisant l’objet d’incidents réguliers ou de non-conformité. Tereos en fera bien évidemment partie.
M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour la réplique.
Mme Martine Filleul. Vous m’informez des conclusions d’un rapport que je connaissais d’ores et déjà. Cette réponse me laisse donc partiellement insatisfaite. Je continue à m’interroger : qui paiera la note ?
La Cour des comptes européenne, dans un rapport spécial consacré au principe pollueur-payeur, souligne que ce sont souvent, en bout de chaîne, les citoyens de l’Union européenne qui paient la facture de ces dégâts environnementaux.
Quid également des moyens accordés par l’État pour contrôler les entreprises tant en amont, avant les accidents, qu’en aval, pour mesurer l’efficacité des mesures qu’elles mettent en place ?
M. le président. Veuillez conclure !
Mme Martine Filleul. L’entreprise Tereos met en œuvre des réparations, notamment par un rempoissonnement, dont on ne connaît pas l’effectivité…
conséquences de l’arasement des vannages des moulins
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Janssens, auteur de la question n° 1724, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
M. Jean-Marie Janssens. Depuis plusieurs années, les organismes publics, notamment ceux chargés de la gestion environnementale et de la gestion de l’eau, exercent une pression forte sur les propriétaires de moulins à eau et les communes possédant des moulins sur leur territoire.
Au nom de la continuité écologique, il leur est en particulier demandé de procéder à des travaux importants, dont l’arasement du vannage des moulins à eau, c’est-à-dire l’abaissement de la crête de l’ouvrage. Ces ouvrages sont, en effet, jugés responsables d’altérer le fonctionnement écologique et la biodiversité des rivières et cours d’eau.
Outre le fait que la prise en charge de ces travaux est hors de portée financière pour la plupart des propriétaires, il n’est pas établi que ces vannages soient à l’origine de la dégradation de la faune et de la flore constatée depuis quelques décennies dans nos rivières.
Au contraire, beaucoup d’acteurs locaux considèrent que la destruction des vannages des moulins entraîne des conséquences néfastes et irréversibles sur l’hydraulique des rivières. Elle s’accompagnera, selon eux, d’une réelle dégradation de la faune et de la flore.
Parmi ces conséquences, on relève l’accélération du courant, la modification des berges, l’aggravation des crues, ainsi que des étiages très importants en cas de manque de pluie.
Les vannages permettent, en effet, de stocker l’eau dans des zones humides ou inondables afin de prévenir les inondations en aval.
Il semble donc indispensable de repenser cette politique d’arasement et d’opérer des concertations locales les plus larges possible avant d’imposer des travaux coûteux dont l’intérêt semble discutable. Quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet sensible dans beaucoup de départements ruraux ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Janssens, vous m’interrogez sur les opérations réalisées sur les vannages des moulins, notamment sur les enlèvements de vannage dans le cadre de la restauration de la continuité écologique des cours d’eau.
C’est un débat que nous avons eu très largement ici même, ainsi qu’à l’Assemblée nationale, dans le cadre de l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dit « Climat et résilience ».
Vous le savez, et j’en suis d’ailleurs absolument désolée, de nombreuses incompréhensions ont amené les parlementaires à adopter une disposition qui exclut l’effacement des seuils comme solution de restauration des continuités écologiques, à la suite de quelques dossiers territoriaux litigieux qu’il aurait fallu réexaminer de plus près.
En tout état de cause, le réchauffement des eaux, la concentration des sédiments et des pollutions, le remplacement d’espèces d’eau courante par des espèces plus banales, adaptées aux eaux stagnantes, la disparition d’habitats diversifiés liée à la variation des niveaux d’eau d’une rivière courante et dynamique, tout cela a des impacts au niveau écologique. Chaque seuil génère des difficultés. Il est donc nécessaire de travailler à ces rétablissements de continuité écologique, comme le cadre européen nous l’impose.
Les blocages plus ou moins importants des sédiments dans les retenues engendrent des déficits en aval, avec des dégâts plus importants lors des crues. En effet, l’énergie de l’eau n’est plus dissipée par le transport des sédiments et des cailloux.
Retirer des vannages obsolètes lorsque le propriétaire ne souhaite plus investir dans leur préparation, leur gestion et leur entretien au quotidien était une option avantageuse à la fois pour l’écologie et pour le propriétaire. C’est d’ailleurs un point sur lequel la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, dans le cadre de l’examen du projet de loi Climat et résilience, était tombée d’accord.
L’effacement des seuils est donc une option qui n’existe plus dans le cadre dudit projet de loi puisqu’elle a été supprimée ici même au Sénat, et que texte a été adopté en commission mixte paritaire cette nuit sans cette disposition.
Il faudra donc trouver des solutions d’entretien et de gestion performantes du point de vue environnemental pour assurer cet objectif de restauration des continuités, même si ces dernières sont plus coûteuses.
Je demeure évidemment à l’écoute des différents porteurs de projet. J’ai d’ailleurs proposé que nous nous retrouvions à l’automne, après l’examen des consultations sur les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (Sdage), pour une concertation avec les acteurs des territoires et les élus, au premier rang desquels les parlementaires impliqués sur ces questions, afin d’évoquer dans le cadre d’une médiation nationale les situations les plus complexes.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Janssens, pour la réplique.
M. Jean-Marie Janssens. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État. J’espère que nous obtiendrons davantage de résultats, car il s’agit d’un problème très important.
mode de gestion de la forêt usagère de la teste de buch
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, auteure de la question n° 1651, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Mme Monique de Marco. Madame la secrétaire d’État, j’ai été alertée du problème engendré par une demande de plan de gestion qui menace gravement le mode de gestion appliqué depuis des siècles dans la forêt usagère de 3 800 hectares de La Teste de Buch, située au pied de la dune du Pilat en Gironde, et qui est classée Natura 2000 et zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (Znieff).
Cette forêt est régie depuis le XVe siècle par un mode de gestion particulier défini par un ensemble de conventions dit « des baillettes et transactions ». Il s’agit d’un statut unique en Europe, qui élève les arbres au rang de bien commun mis à la disposition de la population locale.
Leur prééminence sur le droit forestier a été rappelée en 1983 par la Cour de cassation. Cette décision avait réaffirmé qu’est « interdite toute coupe de bois qui ne serait pas autorisée par les syndics généraux de la forêt usagère, et ce exclusivement dans le cadre de l’exercice des droits d’usage ».
Or il est parvenu à la ministre de la transition écologique une demande d’agrément pour un plan simple de gestion. Si le ministère l’approuve, ce plan sera non conforme à cette gestion ancestrale. Une telle approbation ouvrirait la porte à une exploitation généralisée et mutilante de la forêt, et mettrait fin à ce mode de gestion vertueux et respectueux de l’environnement, en place depuis plus de cinq cents ans.
Depuis des siècles, l’absence d’exploitation sylvicole industrielle préserve l’intégrité génétique des pins et permet la conservation des habitats de la faune, faisant de cette forêt usagère un écosystème riche.
Connaissant l’intérêt que porte Mme la ministre à la protection de l’environnement et au respect de la biodiversité, je souhaite donc lui demander de ne pas accorder l’agrément de ce plan de gestion et de réaffirmer la prééminence des baillettes et transactions sur le droit forestier.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Madame la sénatrice de Marco, vous m’interrogez sur la protection de la forêt usagère de La Teste de Buch, située sur le site classé de la dune du Pilat, laquelle bénéficie effectivement d’un mode de gestion très atypique remontant au régime contractuel dit « des baillettes et transactions », datant du XVe siècle.
Ce site classé constitue un espace naturel littoral très sensible et fragile, qui se caractérise par la diversité de la végétation. Ce mode de gestion sylvicole très original, fondé sur ces droits d’usages ancestraux, constitue un élément du patrimoine culturel local. Il explique aussi, d’ailleurs, la richesse écologique de cette forêt, qui mérite d’être préservée.
Au titre du site classé, l’instruction de la demande d’approbation de ce plan de gestion auquel vous faites référence a fait l’objet d’avis favorable par les services de l’État et de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites.
C’est dans ce cadre que l’accord du ministère pour l’autorisation de ce plan de gestion au titre du site classé a été sollicité, sans préjudice, je le rappelle, de l’application en forêt usagère du système de droit privé qui prévoit que les représentants des usagers donnent aussi leur accord.
J’ai bien conscience de l’émotion suscitée localement par la perspective de l’autorisation de ce plan de gestion au titre du site classé. Il est primordial que la situation s’apaise et que chacun puisse exercer ses droits et usages sur cette zone.
Nous avons donc choisi de surseoir à toute décision sur ce plan de gestion et de diligenter une mission d’inspection, qui formulera des propositions pour concilier la protection de ce patrimoine forestier naturel et culturel original avec les enjeux de résilience des peuplements forestiers, dans un contexte de changement climatique et de maîtrise des risques incendie.
Nous nous intéresserons également aux modalités de gouvernance et de dialogue à adopter dans ce contexte très spécifique de la forêt usagère. Nous serons donc tout à fait mobilisés et pleinement attachés au respect de ces enjeux.
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour la réplique.
Mme Monique de Marco. Je remercie Mme la ministre d’avoir accepté de surseoir à ce plan de gestion et d’avoir diligenté une concertation au niveau local.
M. le président. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Pierre Laurent.)
PRÉSIDENCE DE M. Pierre Laurent
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Conventions internationales
Adoption en procédure d’examen simplifié de deux projets de loi dans les textes de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen de deux projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l’approbation de conventions internationales.
Pour ces deux projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.
Je vais donc les mettre successivement aux voix.
projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le gouvernement de la république française et le gouvernement de la république du kosovo relatif à l’emploi des membres des familles des agents des missions officielles de chaque état dans l’autre
Article unique
Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kosovo relatif à l’emploi des membres des familles des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre (ensemble une annexe), signé à Paris le 7 juillet 2020, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur ce projet de loi après engagement de la procédure accélérée (projet n° 676, texte de la commission n° 752, rapport n° 751).
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.
(Le projet de loi est adopté.)
projet de loi autorisant la ratification du protocole d’amendement à la convention pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel
Article unique
Est autorisée la ratification du Protocole d’amendement à la Convention pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel (ensemble une annexe), signé à Strasbourg le 10 octobre 2018, dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur ce projet de loi (projet n° 561, texte de la commission n° 750, rapport n° 749).
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.
(Le projet de loi est adopté.)
4
Différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, modifié par lettre rectificative, relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (projet n° 588 rectifié, texte de la commission n° 724, rapport n° 723, avis nos 719, 720 et 721).
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du titre III, à l’article 25 bis.
TITRE III (suite)
L’URBANISME ET LE LOGEMENT
Article 25 bis (nouveau)
Après le onzième alinéa du VI de l’article L. 5219-1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Au terme des six ans, elle peut être prorogée pour une durée d’un an, par avenant, si la métropole du Grand Paris dispose d’un plan métropolitain de l’habitat et de l’hébergement exécutoire ou, dans le cas contraire, si elle a pris une délibération engageant l’élaboration du plan précité. Cette prorogation est renouvelable une fois dans les mêmes conditions. »
M. le président. L’amendement n° 261 rectifié bis, présenté par MM. P. Laurent et Gay, Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Au début
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. - Le VI de l’article L. 5219-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots « 1° et 2° » sont remplacés par les mots « 1° à 3° » ;
2° Le 1° est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est supprimé ;
b) Au a, la mention : « a) » est remplacée par la mention : « 1° » ;
c) Au b, la mention : « b) » est remplacée par la mention : « 2° » ;
3° Au premier alinéa du 2°, la mention : « 2° » est remplacée par la mention : « 3° » ;
4° Au neuvième alinéa, la référence : « 2° » est remplacée par la référence : « 3° » et les mots : « b du 1° » sont remplacés par la référence : « 2° » ;
5° Au dixième alinéa, les mots : « 1° et 2° » sont remplacés par les mots : « 1° à 3° ».
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Cet amendement vise à dissocier, dans les délégations possibles de l’État à la métropole du Grand Paris (MGP), les compétences relatives aux aides au logement et celles relatives à l’hébergement.
La métropole du Grand Paris exercera la compétence d’attribution d’aides financières au logement social à compter de l’adoption de son plan métropolitain de l’habitat et de l’hébergement. Cette prise de compétence doit marquer une nouvelle étape pour le développement du logement social dans l’agglomération parisienne et sa répartition géographique plus équilibrée.
L’association de ces financements à la délégation des aides de l’État au logement pourrait constituer un effet levier important pour ce développement et faciliter les procédures d’attribution par le biais d’une instruction unifiée. Cependant, cette délégation à la métropole est actuellement indissociable de celle des compétences liées à l’hébergement.
Historiquement et jusqu’à aujourd’hui encore, seules les aides à la pierre ont été déléguées aux collectivités franciliennes. La Ville de Paris est actuellement la seule collectivité du périmètre métropolitain titulaire de la délégation des aides au logement et elle l’exerce indépendamment des compétences liées à l’hébergement, qui demeurent de la responsabilité directe de l’État.
La délégation de la compétence hébergement n’a jamais été mise en œuvre en Île-de-France et nécessite, au vu des caractéristiques et de l’importance qu’elle revêt dans l’agglomération parisienne, une négociation spécifique et dissociée de la question du logement.
L’impossibilité de dissocier ces compétences pourrait donc conduire à une impasse pour engager leur décentralisation. Nous constatons, en outre, que l’État n’a nullement l’obligation de déléguer ses compétences à la métropole, pas plus que la métropole n’a celle de les demander ; cette disposition constitue une rigidité pour les deux parties.
Il est donc proposé de dissocier ce bloc de compétences.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. La question que vous soulevez de la possible délégation de compétences à la métropole du Grand Paris est pertinente. Il me semble néanmoins prématuré, à ce stade, de dissocier les compétences relatives aux aides au logement et celles liées à l’hébergement.
C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Le Gouvernement a souhaité expressément maintenir l’insécabilité de ces compétences dans le cadre du présent projet de loi, compte tenu des enjeux immenses d’articulation entre le logement et l’hébergement sur un territoire, en particulier dans la métropole du Grand Paris.
C’est la garantie d’une gestion cohérente de la politique de l’habitat, au sens large, avec pour objectif partagé de garantir un accès au logement pour tous.
Logement et hébergement seront d’ailleurs traités comme un tout cohérent au travers du futur plan métropolitain de l’habitat et de l’hébergement de la MGP. Il est logique qu’il en soit de même pour la délégation de compétences.
J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. J’entends les remarques de Mme la rapporteure et de Mme la ministre, mais il serait temps que nous ayons un débat sur ce qui relève, d’une part, du logement et, d’autre part, de l’hébergement, et que nous creusions cette question.
Il s’agit, me semble-t-il, de deux sujets réellement différents, notamment pour celles et ceux qui sont demandeurs de logements ou bénéficiaires d’un hébergement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 261 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 25 bis.
(L’article 25 bis est adopté.)
Article 26
Le chapitre III du titre préliminaire du livre III du code de la construction et de l’habitation est complété par un article L. 303-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 303-3. – Une opération de revitalisation de territoire peut être conclue sur le périmètre d’une ou de plusieurs communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, sans intégrer la ville principale de cet établissement, au sens de l’article L. 303-2, par dérogation accordée par le représentant de l’État dans le département, et sous réserve de répondre aux deux conditions suivantes :
« 1° Présenter une situation de discontinuité territoriale ou d’éloignement par rapport à la ville principale de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ;
« 2° Identifier en son sein une ou des villes présentant des caractéristiques de centralité appréciées notamment au regard de la diversité des fonctions urbaines exercées en matière d’équipements et de services vis-à-vis des communes alentours.
« La convention d’opération de revitalisation de territoire est signée par l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, la commune concernée et l’État. La convention peut être signée par toute autre commune de cet établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou organismes publics ou privés susceptibles d’apporter un soutien ou de prendre part à la réalisation de l’opération de revitalisation. » – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 26
M. le président. L’amendement n° 71 rectifié bis, présenté par Mmes Dindar et Malet, MM. Longeot, Artano, Dennemont, P. Martin et Le Nay, Mme Sollogoub, MM. Henno, Canévet, Poadja et Levi et Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa du I de de l’article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le représentant des organismes mentionnés à l’article L. 411-2 qui sont propriétaires ou gestionnaires de logements situés sur le territoire couvert par l’opération de revitalisation de territoire, désigné par les associations placées sous le régime de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association qui les regroupent, est consulté au cours de l’élaboration du projet de convention. »
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. L’objet du présent amendement est de compléter l’article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation afin que les organismes d’HLM soient associés de droit à l’élaboration des conventions qui définissent le projet urbain, économique et social dans les opérations de revitalisation de territoire (ORT). Rappelons que ces opérations visent, notamment, à adapter et à moderniser le parc de logements afin de favoriser la mixité sociale.
Les organismes d’HLM mènent très fréquemment des opérations immobilières ou d’aménagement qui concourent à la revitalisation des centres-villes. À titre d’illustration, ils sont particulièrement présents et contribuent fortement au déploiement sur le terrain du programme national Action cœur de ville, avec près de 90 % des 9 600 logements financés par Action Logement.
Le succès des ORT passe par la mobilisation de l’ensemble des acteurs locaux susceptibles de concourir à leur réalisation. Il est par conséquent indispensable que le représentant de ces organismes, lorsqu’il n’est pas signataire de la convention d’ORT, soit a minima consulté sur son projet au cours de sa phase d’élaboration.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Cet amendement a déjà été examiné en commission et j’avais alors émis un avis défavorable. Il ne me semble en effet pas pertinent de prévoir dans le code de la construction et de l’habitation un traitement spécifique pour les organismes d’HLM, qui seraient d’ailleurs les seuls acteurs privés nommément désignés par la loi.
Il me paraît normal que le préfet puisse garder la main sur les personnes invitées à signer une convention d’ORT ou consultées en amont, car il s’agit avant tout d’un dispositif qui peut entraîner des financements de l’État ou des dérogations au droit commun.
En outre, si le fait de moderniser le parc de logements figure dans toutes les conventions d’ORT, il se peut que, dans certains cas, cela ne concerne pratiquement pas le logement social, voire pas du tout. Dès lors, prévoir la consultation obligatoire des organismes d’HLM n’aurait que peu de sens.
Enfin, lorsqu’une ORT concerne des logements sociaux, il est très rare que les organismes d’HLM ne soient pas consultés puisqu’ils sont des acteurs, parmi d’autres, de la réussite de l’opération.
Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, je maintiendrai mon avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je suis sur la même ligne que Mme la rapporteure.
Je rappelle que l’article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation permet déjà aux organismes d’HLM d’être signataires d’une convention d’ORT et associés à son élaboration.
Comme l’a rappelé Mme Estrosi Sassone, l’ORT a vocation à traduire un projet local qui est élaboré en fonction des spécificités et des besoins de chacun. Or il se peut que, dans un tel projet, il n’y ait pas d’HLM. Il n’est donc pas opportun d’ajouter dans la loi une telle exigence, dans un souci de simplification et pour éviter d’ouvrir une liste trop longue.
On nous dit qu’il existe trop de contraintes et de normes, et qu’il convient d’alléger les procédures. N’en rajoutons pas ici, d’autant que les bailleurs sociaux se trouvent bien entendu associés aux ORT lorsqu’il s’agit de logement social !
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Monsieur Henno, l’amendement n° 71 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Olivier Henno. Tout à fait, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 246 rectifié, présenté par Mmes Brulin, Lienemann et Varaillas, M. Gay, Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet un rapport au Parlement, six mois après la publication de la présente loi, sur la mise en œuvre des moyens, des outils et des méthodes à disposition de l’Agence nationale de cohésion des territoires dans le cadre des opérations de revitalisation du territoire (ORT) pour favoriser l’accès au logement pour les étudiants en médecine.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise à demander un rapport au Gouvernement sur les moyens et les outils dont pourrait disposer l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) pour travailler sur la question du logement des étudiants en médecine dans le cadre des ORT.
On le sait, un certain nombre de territoires rencontrent un problème de désertification médicale. Parmi les nombreuses pistes à étudier, les étudiants en médecine pourraient effectuer leur stage ailleurs que dans les seuls CHU (centres hospitaliers universitaires), par exemple dans des villes moyennes ou des zones rurales, au sein d’hôpitaux de proximité ou de cabinets de ville.
Tous les acteurs locaux qui ont à connaître de ce sujet – intercommunalités, communes, départements, régions – sont confrontés à la même question : comment loger ces étudiants le temps de leur stage dans les hôpitaux de proximité ou les cabinets médicaux ?
Je vois d’un très bon œil la levée du numerus clausus pour les études de médecine, mais cela ne suffit pas. Il faut par ailleurs augmenter la capacité de nos universités à accueillir des étudiants en médecine.
Certes, ce n’est pas directement le problème qui nous occupe aujourd’hui, mais il importe que les étudiants puissent faire des stages dans nos territoires : c’est ainsi qu’on leur donnera le goût de s’installer à l’avenir dans des zones qui subissent actuellement la désertification médicale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Conformément à la jurisprudence habituelle du Sénat, nous ne souhaitons pas multiplier les demandes de rapport.
Je comprends l’objectif visé au travers de cet amendement. Néanmoins, pourquoi cibler spécifiquement les étudiants en médecine ? D’autres catégories de population peuvent avoir des besoins similaires, y compris à l’intérieur d’une ORT.
Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Aux termes de l’article L. 1231-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), qui définit les missions de l’ANCT, cette agence remet chaque année un rapport d’activité au Parlement et au Gouvernement. Évidemment, ce rapport traite de l’ensemble de l’activité de l’ANCT, y compris les ORT.
Dès lors, cet amendement me paraît déjà satisfait ; l’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. Je suis saisi de six amendements identiques.
L’amendement n° 185 rectifié ter est présenté par MM. Pellevat, Calvet, Brisson, Karoutchi, B. Fournier, Cambon et D. Laurent, Mmes Raimond-Pavero et Deroche, MM. Burgoa, Bouchet et Sido, Mmes Deromedi, Berthet, Garriaud-Maylam, Dumas et Dumont et MM. Le Gleut, Gremillet, Charon, Sautarel, Genet, Klinger et Longeot.
L’amendement n° 569 rectifié quater est présenté par Mme Noël, MM. Laménie et Chatillon, Mme Goy-Chavent et MM. H. Leroy, Bonhomme, Mandelli et Savin.
L’amendement n° 811 rectifié est présenté par MM. Roux, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et M. Requier.
L’amendement n° 1025 rectifié est présenté par MM. L. Hervé, Canévet, P. Martin et Hingray, Mmes Jacquemet, Herzog et de La Provôté et M. Kern.
L’amendement n° 1481 rectifié bis est présenté par Mmes Préville et G. Jourda, MM. Pla et Stanzione, Mme Monier et M. Tissot.
L’amendement n° 1513 est présenté par MM. Gontard, Benarroche et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.
Ces six amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet un rapport au Parlement, six mois après la publication de la présente loi, sur la mise en œuvre des moyens, des outils et des méthodes à disposition de l’Agence nationale de cohésion des territoires dans le cadre des opérations de revitalisation du territoire (ORT) pour la réhabilitation de l’immobilier de loisir dans les communes classées montagne au sens de l’article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.
La parole est à M. Bernard Fournier, pour présenter l’amendement n° 185 rectifié ter.
M. Bernard Fournier. Depuis la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ÉLAN), les ORT permettent de mettre en œuvre un projet urbain, économique et social de revitalisation du territoire concerné, afin notamment de réhabiliter l’immobilier de loisir.
Un bilan de la mise en œuvre des moyens, des outils et des méthodes mis à la disposition des agences de l’État telles que l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), ou encore l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), via l’ANCT, pour la réhabilitation de l’immobilier de loisir permettra d’évaluer leur impact sur le patrimoine concerné dans les territoires de montagne.
M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, pour présenter l’amendement n° 569 rectifié quater.
Mme Sylviane Noël. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Éric Gold, pour présenter l’amendement n° 811 rectifié.
M. Éric Gold. Depuis la loi ÉLAN, les ORT permettent de mettre en œuvre un projet urbain, économique et social de revitalisation du territoire concerné, afin notamment de réhabiliter l’immobilier de loisir.
Aussi, nous jugeons nécessaire de dresser un bilan de la mise en œuvre des moyens, des outils et des méthodes mis à la disposition de l’ANCT dans le cadre des ORT, pour la réhabilitation de l’immobilier de loisir dans les communes classées en zone de montagne. Cela permettra ensuite d’engager un travail en vue d’une meilleure prise en compte des enjeux liés à ces territoires singuliers.
M. le président. La parole est à M. Pascal Martin, pour présenter l’amendement n° 1025 rectifié.
M. Pascal Martin. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 1481 rectifié bis.
Mme Angèle Préville. Cet amendement, identique aux précédents, a pour objet la réhabilitation de l’immobilier de loisir, levier important de l’attractivité de nos territoires de montagne. Le rapport dont nous demandons la remise au Parlement permettrait de dresser une liste exhaustive des moyens, outils et méthodes mis à la disposition de l’ANCT dans le cadre des ORT.
J’y insiste, il s’agit d’un levier important de développement du tourisme dans nos territoires de montagne.
M. le président. L’amendement n° 1513 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Il me semble que, six mois après l’entrée en vigueur du présent texte, nous ne disposerons pas du recul suffisant pour qu’un rapport permette réellement de tirer des conclusions utiles quant à la mise en œuvre des ORT en matière d’immobilier de loisir. En effet, ces opérations n’auront que deux ans d’existence, dont la moitié dans une période extrêmement inédite de confinement et de crise sanitaire.
C’est pourquoi notre commission a émis un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. En réponse aux auteurs de ces amendements relatifs à la montagne, je reprendrai l’argument que j’ai exposé au sujet de l’amendement n° 246 rectifié, lequel était satisfait du fait de l’existence du rapport annuel de l’ANCT.
Plus précisément encore, je rappellerai que cette agence est organisée par programmes. Dès lors, on peut voir très précisément dans son rapport d’activité les moyens consacrés à chacun de ces programmes, du plan national Action cœur de ville aux maisons France Service, en passant par les actions en faveur de la montagne. Ces amendements me paraissent donc largement satisfaits.
Bien évidemment, je sais que des problèmes particuliers se posent dans les zones de montagne. C’est d’ailleurs pourquoi le Premier ministre a annoncé le plan Avenir montagnes. Je vous présenterai en outre, après l’article 30, un amendement très important sur ce que l’on désigne d’une expression pas très jolie : les « lits froids ».
L’avis du Gouvernement sur ces amendements identiques est donc défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 185 rectifié ter, 569 rectifié quater, 811 rectifié, 1025 rectifié et 1481 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Demande de réserve
Mme Catherine Di Folco, vice-président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le président, je demande la réserve, après l’article 30 quater, des articles 27 à 27 quater et de l’article 29, ainsi que des amendements portant articles additionnels associés.
M. le président. Aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, la réserve est de droit lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande formulée par la commission ?
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. Il est favorable.
M. le président. La réserve est donc ordonnée.
Article 27 (réservé)
Articles additionnels après l’article 27 (réservés)
Article 27 bis (nouveau) (réservé)
Article additionnel après l’article 27 bis (réservé)
Articles 27 ter et 27 quater (nouveaux) (réservés)
Article 28
I. – Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Au 9° de l’article L. 421-4, les mots : « lorsque les activités définies dans les statuts de l’organisme créé font partie » sont remplacés par les mots : « dans les limites » ;
2° Au quarante-deuxième alinéa de l’article L. 422-2, les mots : « lorsque les activités définies dans les statuts de l’organisme créé font partie » sont remplacés par les mots : « dans les limites » ;
3° Au 14° de l’article L. 422-3, les mots : « lorsque les activités définies dans les statuts de l’organisme créé font partie » sont remplacés par les mots : « dans les limites » ;
4° Après la troisième phrase du premier alinéa de l’article L. 443-7, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Lorsqu’ils sont agréés au titre de l’article L. 329-1 du code de l’urbanisme, ils peuvent proposer à ces mêmes bénéficiaires la possibilité d’acquérir ces mêmes logements au moyen d’un bail réel solidaire défini aux articles L. 255-1 et suivants, à l’exception des articles L. 255-3 et L. 255-4, auquel cas le IV du L. 443-11 et l’article L. 443-12-1 ne s’appliquent pas à ces contrats. » ;
5° (nouveau) Le premier alinéa de l’article L. 255-2 est complété par les mots : « dans les limites fixées par le service d’intérêt général défini à l’article L. 411-2 du présent code, » ;
6° (nouveau) Le dernier alinéa de l’article 255-3 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« La cession des droits réels immobiliers par l’opérateur à chaque preneur crée un lien direct et individuel entre l’organisme de foncier solidaire et chacun des preneurs et désolidarise les preneurs entre eux et chaque preneur de l’opérateur.
« Ainsi à l’issue de cette cession, le preneur sera réputé être titulaire d’un bail réel solidaire portant sur son logement avec une date de prise d’effet au jour de la cession qui lui est propre. »
II. – L’article L. 329-1 du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « d’acquérir et de gérer des terrains, bâtis ou non, » sont remplacés par les mots : « de gérer des terrains ou des biens immobiliers, le cas échéant en procédant préalablement à leur acquisition, » ;
2° Au même premier alinéa, après le mot : « réaliser », sont insérés les mots : «, de réhabiliter ou de rénover » et le même alinéa est complété par les mots : « ainsi que des locaux à usage commercial ou professionnels, accessoires aux immeubles à usage d’habitation » ;
3° Au troisième alinéa, après le mot : « réhabiliter », sont insérés les mots : «, rénover ou gérer » ;
4° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’organisme de foncier solidaire bénéficie, en conformité avec la décision 2012/21/UE de la Commission, du 20 décembre 2011, relative à l’application de l’article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général, d’exonérations fiscales et d’aides spécifiques de l’État au titre du service d’intérêt général pour ses activités visées à l’alinéa précédent et réalisées dans le cadre d’un bail réel solidaire dans les conditions prévues au chapitre V du titre V du livre II du code de la construction et de l’habitation. »
M. le président. L’amendement n° 762 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le dernier alinéa du IV de l’article L. 302-5 est complété par les mots : « , y compris les logements cédés par un organisme d’habitation à loyer modéré agréé organisme de foncier solidaire en application de l’article L. 443-7 » ;
La parole est à M. Stéphane Artano.
M. Stéphane Artano. D’un côté, l’article L. 443-7 du code de la construction et de l’habitation permet aux bailleurs sociaux de vendre des logements de leur patrimoine en bail réel solidaire (BRS) ; de l’autre, l’article L. 302-5 de ce même code impose à chaque commune de disposer d’un taux minimum de logements sociaux au sein de son parc de résidences principales.
Aussi, cet amendement vise à ce que ces logements cédés en application de l’article L. 443-7 soient assimilés à des logements sociaux au sens de l’article L. 302-5, afin qu’ils entrent dans le décompte du taux de logements sociaux au sein du parc de résidences principales des communes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Nous avons introduit à l’alinéa 5 de l’article 28 du présent projet de loi l’impossibilité de différencier, dans le traitement et le décompte des logements sociaux effectués au titre de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), entre de nouveaux logements en BRS et des logements HLM vendus sous cette forme particulière de bail réel à long terme.
Je demande donc le retrait de l’amendement, qui est satisfait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. Même avis.
M. Stéphane Artano. Je retire mon amendement !
M. le président. L’amendement n° 762 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 1454 rectifié bis, présenté par Mmes Préville et G. Jourda, MM. Pla, Stanzione et Devinaz, Mme Lubin et M. Tissot, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Compléter cet alinéa par les mots :
et de favoriser l’offre de logement pour les travailleurs dont l’emploi présente un caractère saisonnier au sens de l’article 3 de l’article L. 1242-2 du code du travail
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Les travailleurs saisonniers sont confrontés à des difficultés récurrentes pour accéder à un logement. L’offre est insuffisante et les conditions d’accès aux parcs locatifs sont bien souvent trop contraignantes.
L’article 47 de la loi du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne autorise déjà les organismes d’habitations à loyer modéré et les sociétés d’économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux à prendre à bail des logements vacants pour les donner en sous-location à des travailleurs saisonniers.
Cependant, afin de lever toutes les difficultés subsistantes, il faut actionner tous les leviers pour diversifier l’offre de logement à destination des travailleurs saisonniers. À ce titre, les organismes de foncier solidaire (OFS) peuvent jouer un rôle dans le développement de l’offre de logements pour les travailleurs saisonniers.
C’est pourquoi il est proposé, par cet amendement, d’étendre à cette fin l’habilitation donnée au Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Cet amendement est aujourd’hui sans objet, car il vise à étendre une habilitation à légiférer par ordonnance que la commission a supprimée.
Je demande donc son retrait, faute de quoi l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. L’examen de cet amendement me donne l’occasion de préciser la finalité de l’habilitation à légiférer par ordonnance que le Gouvernement avait fait figurer à cet article.
Nous serons tous d’accord, me semble-t-il, pour reconnaître que les organismes de foncier solidaire et le mécanisme du bail réel solidaire représentent un progrès. Nous avons déjà 64 OFS agréés et 30 projets en cours. Nous espérons que près de 20 000 logements seront offerts en BRS en 2024.
Néanmoins, nous avions souhaité, dans le cadre de cette habilitation à légiférer par ordonnance, pouvoir ouvrir à titre subsidiaire – j’insiste sur cette précision importante – la possibilité d’utiliser les mécanismes des OFS et des BRS pour développer l’offre de logements intermédiaires et, dans un certain nombre de cas, de locaux d’activités.
Votre commission a débattu de ce sujet, en complément des travaux qui avaient eu lieu précédemment, à l’occasion de l’examen de la proposition de loi de M. Jean-Luc Lagleize visant à réduire le coût du foncier et à augmenter l’offre de logements accessibles aux Français. Finalement, votre commission n’a pas souhaité retenir cette habilitation, mais le Gouvernement reviendra sur ce point au cours de la navette parlementaire.
Je le répète, l’élargissement que nous souhaitons ne s’appliquerait qu’à titre subsidiaire, pour permettre dans certains cas la production de quelques logements intermédiaires et locaux d’activités supplémentaires, ce qui me paraît un complément nécessaire à la programmation prévue.
Quant au présent amendement, je conviens avec Mme la rapporteure pour avis qu’il est sans objet, au vu de la suppression de l’habilitation à légiférer par ordonnance.
Par ailleurs, je ne crois pas que les BRS soient tout à fait le bon outil pour les travailleurs saisonniers. En effet, par définition, ceux-ci ne sont pas fixés durablement dans la commune concernée, mais se déplacent d’une commune à l’autre en fonction des saisons, alors que le BRS a pour objet l’accession sociale à la propriété.
Pour ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis sera défavorable.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Je tiens à répondre à Mme la ministre sur la suppression par la commission de l’habilitation à légiférer par ordonnance.
Nous nous sommes, nous aussi, appuyés sur les travaux que nous avions accomplis, avec Valérie Létard, pour notre rapport sur la proposition de loi de M. Lagleize. Nous avons considéré, madame la ministre, que votre demande d’habilitation était beaucoup trop floue et générale pour que nous puissions vous l’accorder. Les OFS sont encore extrêmement récents. Vous avez affirmé qu’ils allaient progresser ; tout le monde en sera heureux, mais pour l’heure nous préférons en rester à l’outil tel qu’il a été initialement prévu.
M. le président. Madame Préville, l’amendement n° 1454 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Angèle Préville. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 1454 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 1224, présenté par Mme Estrosi Sassone, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
défini aux articles L. 255-1 et suivants
par les mots
tel que défini aux articles L. 255-1 à L. 255-6 du présent code
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote sur l’article.
Mme Viviane Artigalas. Les OFS, dont le rôle a été brièvement évoqué à l’instant, sont des organismes très récents : il faut les laisser prendre leur rythme de croisière pour qu’ils progressent tout en continuant de se concentrer sur leur mission, l’accession sociale à la propriété.
Il faut d’abord qu’ils remplissent cette mission : prenons donc garde à ne pas trop étendre leurs compétences !
M. le président. Je mets aux voix l’article 28, modifié.
(L’article 28 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 28
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 622 rectifié est présenté par Mmes Dindar et Malet, MM. Longeot, Artano, Dennemont, P. Martin et Le Nay, Mme Sollogoub, MM. Henno, Canévet, Poadja et Levi et Mme Garriaud-Maylam.
L’amendement n° 766 rectifié bis est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Fialaire, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 329-1 du code de l’urbanisme, il est inséré un article L. 329-… ainsi rédigé :
« Art. L. 329-…. – Les organismes de foncier solidaire peuvent également avoir pour objet de réaliser des opérations de rénovation de bâtiments et de financement de ces opérations conformément aux objectifs de l’article L. 301-1 du code de la construction et de l’habitation et dans les conditions prévues à l’article L. 381-1 du même code. »
II. – Le dernier alinéa du 3 bis de l’article L. 511-6 du code monétaire et financier est complété par les mots : « ou qui ont un foncier solidaire prévu à l’article L. 329-1 du code de l’urbanisme ».
III. – L’article L. 381-1 du code de la construction et de l’habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’il est réalisé par un organisme de foncier solidaire défini à l’article L. 329-1 du code de l’urbanisme, le tiers-financement est caractérisé par l’intégration d’une offre technique, portant notamment sur la réalisation des travaux de rénovation de bâtiment dont la finalité principale est la poursuite des objectifs fixés par l’article L. 301-1 du présent code, à un service comprenant le financement partiel ou total de ladite offre, en contrepartie de paiements échelonnés, réguliers et limités dans le temps. »
IV. – Après l’article 26-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il est inséré un article 26-4-… ainsi rédigé :
« Art. 26-4-…. – L’assemblée générale peut, à la majorité absolue des copropriétaires concernés, voter le contrat de tiers-financement proposé par un organisme de foncier solidaire comprenant une offre de service de financement et d’offre technique de rénovation de bâtiments conformément à l’article L. 381-1 du code de la construction et de l’habitation.
« Le contrat de tiers-financement conclu conformément aux objectifs de l’article L. 301-1 du même code a pour contrepartie des paiements échelonnés, réguliers et limités dans le temps.
« Par dérogation à l’article 16-1 de la présente loi, la contrepartie peut également consister sur décision distincte de l’assemblée générale prise à la majorité de l’article 26, pour tout ou partie du prix, en une cession de partie commune ou de droits accessoires à celle-ci. Cette dernière modalité de paiement peut être décidée, à la majorité de l’article 26, postérieurement à la conclusion du contrat, en accord entre le tiers-financeur et le syndicat des copropriétaires.
« La contrepartie au contrat de tiers-financement doit dans tous les cas être répartie entre les copropriétaires dans les lots desquels figurent les parties communes rénovées et proportionnellement à la quotité de ces parties afférentes à chaque lot.
« Si le contrat de tiers-financement comporte des travaux relatifs à des éléments d’équipements alors le prix dû en contrepartie de la prestation relative à ceux-ci doit être réparti entre les copropriétaires des lots qui en ont une utilité objective selon la quote-part de charge définie par le règlement de copropriété en conformité avec l’article 10.
« En cas de travaux sur partie privative, le coût n’est affecté qu’aux copropriétaires qui en bénéficient. »
La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 622 rectifié.
M. Olivier Henno. Cet amendement vise à créer un contrat global de rénovation destiné à accompagner les copropriétés par une offre technique et financière, gérée au niveau de la copropriété et non pas des seuls copropriétaires. Cette démarche innovante s’appuierait sur l’expertise des OFS, organismes à but non lucratif.
Pour faciliter la mise en place de ce contrat, cet amendement tend à élargir l’objet des OFS à la rénovation des copropriétés, à leur permettre d’être tiers financeurs, et à adapter les conditions de majorité à réunir lorsque l’assemblée générale des copropriétaires devra se prononcer sur ce contrat global de rénovation.
M. le président. La parole est à Mme Guylène Pantel, pour présenter l’amendement n° 766 rectifié bis.
Mme Guylène Pantel. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Je renouvelle l’avis défavorable qui avait été émis par notre commission sur des amendements à l’objet identique déposés lors de l’examen du projet de loi Climat et résilience.
L’idée de tiers-financement est certes séduisante, mais il me semble qu’elle n’est pas mûre à ce stade. C’est d’ailleurs l’argument que nous avions opposé dans le cadre du projet de loi Climat et résilience. En outre, il n’est pas évident qu’il faille compter cela parmi les missions des OFS.
C’est pourquoi, à défaut du retrait de ces amendements, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Henno, l’amendement n° 622 rectifié est-il maintenu ?
M. Olivier Henno. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 622 rectifié est retiré.
Madame Pantel, l’amendement n° 766 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Guylène Pantel. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 766 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 1085 rectifié ter, présenté par M. Féraud, Mmes de La Gontrie, Blatrix Contat et Bonnefoy, MM. Bouad, Bourgi, Cardon et Cozic, Mme Harribey, MM. Kerrouche et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly, Lurel et Pla, Mme Préville et MM. Redon-Sarrazy, Stanzione et Temal, est ainsi libellé :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 2° et au 4° de l’article L. 2411-1 du code de la commande publique, après le mot : « État », sont insérés les mots : « ou pour les logements construits ou réhabilités dans le cadre du bail de longue durée prévu au troisième alinéa de l’article L. 329-1 du code de l’urbanisme ».
La parole est à M. Rémi Féraud.
M. Rémi Féraud. Cet amendement vise à consolider la réalisation d’équipements publics au sein des opérations menées dans le cadre du mécanisme de bail réel solidaire, en levant une ambiguïté juridique présente dans les dispositions en vigueur.
En effet, si les bailleurs sociaux détiennent la qualité de maître d’ouvrage lors de la réalisation de logements à usage locatif aidés par l’État, le droit actuel ne précise pas si cela inclut les logements réalisés pour le compte d’un organisme de foncier solidaire dans le cadre d’un BRS. Cette situation provoque des incertitudes juridiques quant aux opérations imbriquant un équipement public au sein d’un ensemble immobilier comportant des logements faisant l’objet d’un BRS et réalisés par un bailleur social.
L’adoption de cet amendement permettrait de confier la qualité de maître d’ouvrage aux bailleurs sociaux qui construisent des logements ou réhabilitent des constructions existantes dans le cadre d’un BRS.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Il est défavorable, et ce pour deux raisons.
D’une part, nous voulons assurer de la cohérence au sein d’une opération qui cumulerait des équipements publics et des logements en BRS. Aujourd’hui, les organismes d’HLM peuvent déjà décider d’appliquer volontairement les règles de l’article L. 2411-1 du code de la commande publique à la partie BRS d’une telle opération.
D’autre part, l’adoption de cet amendement aurait pour conséquence des contraintes supplémentaires particulièrement lourdes pour les organismes d’HLM. Il tend en effet à élargir les situations dans lesquelles ces organismes revêtent la qualité de maître d’ouvrage aux opérations où ils produisent, en tant qu’OFS, des logements en BRS.
Cet élargissement aurait notamment pour effet d’empêcher les organismes d’HLM d’avoir recours à un contrat de promotion immobilière pour ces opérations, ce qui pourrait s’avérer contre-productif et empêcher certaines opérations d’aller jusqu’à leur terme ; la diversification souhaitée par ces organismes pourrait s’avérer impossible.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Le Gouvernement ne fait pas la même lecture que la commission de cette proposition de clarification. Il me paraît pertinent de préciser que les organismes d’HLM détiennent la qualité de maître d’ouvrage quand ils réalisent des programmes mixtes comprenant des équipements publics et des logements en BRS. De notre point de vue, ce serait une clarification utile.
L’avis est donc favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1085 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 1083 rectifié quater, présenté par M. Féraud, Mmes de La Gontrie, Blatrix Contat et Bonnefoy, MM. Bouad et Bourgi, Mme Briquet, M. Cozic, Mme Harribey, M. Jacquin, Mme Jasmin, M. P. Joly, Mme Préville et MM. Kerrouche, Lurel, Pla, Raynal, Redon-Sarrazy, Stanzione et Temal, est ainsi libellé :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au a du 7° du II de l’article 150 U du code général des impôts, après les mots : « dudit code », sont insérés les mots : « ou à un organisme de foncier solidaire ».
II. – Le présent article entre en vigueur à partir du 1er janvier 2022.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Rémi Féraud.
M. Rémi Féraud. Cet amendement vise à permettre l’exonération de plus-value pour les particuliers qui vendent leur bien immobilier en vue de réaliser du logement social.
Cette exonération, initialement limitée à l’engagement de l’acquéreur à réaliser des logements locatifs sociaux, a été étendue par la loi de finances pour 2021 au BRS.
Toutefois, dans le cas d’un portage foncier intermédiaire assuré par une collectivité territoriale ou un établissement public foncier, cette exonération ne s’applique que si c’est un organisme d’HLM qui réalise l’opération projetée. De ce fait, les projets en BRS manquent d’intérêt aux yeux des propriétaires privés.
Cet amendement vise donc à offrir à un propriétaire la possibilité de bénéficier de cette exonération dans les mêmes conditions que pour le logement locatif social lorsqu’il vend son bien à un OFS, quel que soit le portage foncier utilisé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Votre proposition, mon cher collègue, va tout à fait dans le bon sens. En effet, comme vous l’avez rappelé, si le portage foncier n’est pas assuré par un organisme d’HLM, l’exonération de plus-value ne peut actuellement pas être étendue aux particuliers qui cèdent leur bien à un OFS.
La disposition que vous proposez assure bien la transparence des différents types de portabilité lorsqu’une personne vend son bien à un OFS pour un programme en BRS. Cela s’inscrit pleinement dans le renforcement, que nous souhaitons, du caractère social de ces organismes.
Notre commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. L’article 14 de la loi de finances pour 2021 a déjà aménagé le régime d’exonération des plus-values immobilières en faveur du logement social. Cette réforme a rendu l’exonération plus efficiente, en adéquation avec son objectif de construction de logement locatif social ; elle a étendu son bénéfice aux logements construits dans le cadre d’un BRS.
Je comprends l’objectif de votre amendement, monsieur le sénateur, mais une réflexion est en cours sur la portée de la mesure adoptée l’année dernière, pour la rendre pleinement efficiente.
Par ailleurs, la disposition que vous proposez est d’ordre fiscal ; nous considérons qu’elle relève donc de la loi de finances.
Dès lors, l’avis du Gouvernement sur cet amendement est défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 28.
Article 28 bis (nouveau)
À la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 211-2 du code de l’urbanisme, après les mots : « à l’article L. 411-2 du même code », sont insérés les mots : « , à un organisme de foncier solidaire mentionné à l’article L. 329-1 du même code ».
M. le président. L’amendement n° 250 rectifié bis, présenté par M. P. Laurent, Mme Lienemann, M. Gay, Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le troisième alinéa de l’article L. 211-2 du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il peut également le déléguer à un organisme de foncier solidaire mentionné à l’article L. 329-1 du présent code. » ;
2° La dernière phrase est supprimée.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Cet amendement, dont le dispositif peut paraître assez technique, se révèle cependant d’une grande importance.
Les organismes de foncier solidaire et le bail réel solidaire rendent possibles une forme d’accession à la propriété sécurisée et durablement maîtrisée qui repose sur la dissociation du foncier et du bâti, ainsi que sur le caractère reconductible du bail à chaque vente. Cela promeut le développement d’une nouvelle forme de propriété non spéculative.
Opérationnels depuis 2017, les OFS connaissent un intérêt grandissant, avec 52 organismes agréés en France à ce jour. D’ici à 2024, plus de 9 200 logements en bail réel solidaire auront été livrés en France.
Or l’article L. 211-2 du code de l’urbanisme, relatif à la délégation du droit de préemption, ne prévoit pas une telle délégation pour ces nouveaux acteurs. Nous entendons remédier à ce manque par le présent amendement.
Par ailleurs, notre amendement vise à permettre de déléguer le droit de préemption urbain à un organisme de logement social pour d’autres motifs que ceux qui sont prévus, trop limitativement, à l’article L. 211-2 du code de l’urbanisme. Cette délégation serait possible, en particulier, pour l’un des objets mentionnés au premier alinéa de l’article L. 210-1 du même code.
C’est à cette fin que nous proposons de supprimer la dernière phrase de l’article L. 211-2 dudit code.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Votre amendement, ma chère collègue, me semble déjà pour moitié satisfait, dans la mesure où le texte de la commission prévoit bien que les OFS pourront bénéficier d’une délégation du droit de préemption urbain.
En revanche, vous voulez également étendre l’usage de ce droit de préemption par les bailleurs sociaux au-delà du logement. Cela me semble dangereux, car le droit de préemption urbain reste une prérogative de puissance publique qui ne peut être déléguée que pour des motifs très précis et dans des conditions très encadrées.
Je vous invite donc à retirer votre amendement ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 250 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 28 bis.
(L’article 28 bis est adopté.)
Article additionnel après l’article 28 bis
M. le président. L’amendement n° 748 rectifié, présenté par MM. Parigi, Benarroche, Salmon et Dantec, Mme Benbassa, M. Dossus, Mmes Poncet Monge et Taillé-Polian, M. Labbé, Mme de Marco et M. Fernique, est ainsi libellé :
Après l’article 28 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le II de l’article L. 4424-9 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Le plan d’aménagement et de développement durable de Corse peut également, compte tenu de la pression foncière due au développement démographique ou à la construction de résidences secondaires, délimiter des zones communales d’équilibre territorial et social au sein desquelles sont susceptibles d’être prises, dans le respect de la libre administration des communes et du principe de non-tutelle d’une collectivité sur une autre, des prescriptions de nature à favoriser l’accession sociale à la propriété, la construction de logements sociaux et les activités commerciales, industrielles, artisanales, libérales ou agricoles.
« Les activités d’hébergement touristique, autres que les hôtels, les terrains de camping, les chambres d’hôtes et les résidences de tourisme, ainsi que les activités relevant du I de l’article L. 752-3 du code de commerce sont exclues du champ des activités commerciales, industrielles, artisanales, libérales ou agricoles mentionnées au premier alinéa du présent paragraphe. »
La parole est à M. Paul Toussaint Parigi.
M. Paul Toussaint Parigi. Je pense que nous partageons tous ici un même constat : la spéculation immobilière est très forte en Corse, comme dans d’autres territoires représentés dans notre assemblée qui subissent une forte pression touristique et, partant, un déséquilibre social très important.
L’amendement que je défends ici est issu d’une proposition de loi que vous connaissez, adoptée à l’unanimité par la commission des lois de l’Assemblée nationale. Ce texte visait à lutter contre la spéculation immobilière et à assurer le développement économique et le logement des habitants de la Corse.
Pour accélérer les choses, face à l’urgence d’agir, je propose d’inscrire son dispositif au sein du présent projet de loi. Il s’agit simplement d’essayer de freiner la construction effrénée des résidences secondaires par le biais du plan d’aménagement et de développement durable de la Corse (Padduc). On pourrait ainsi définir dans ce plan des zones communales d’équilibre territorial.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Il me semble, mon cher collègue, que votre amendement pose d’importantes difficultés juridiques au regard du respect du droit de propriété et de la liberté du commerce. Vous allez même jusqu’à prévoir d’interdire les meublés de tourisme, ou encore la grande distribution. C’est vraiment aller très loin !
Dès lors, à moins que vous ne le retiriez, l’avis de la commission ne peut être que défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je connais bien la rédaction de la proposition de loi adoptée par la commission des lois de l’Assemblée nationale. Le problème, monsieur le sénateur, au-delà des éléments évoqués par Mme la rapporteure pour avis, c’est que vous entendez créer quelque chose d’inconstitutionnel, à savoir la tutelle d’une collectivité sur une autre.
En effet, les plans locaux d’urbanisme (PLU) comme les schémas de cohérence territoriale (SCoT) dépendent des municipalités ou de leurs intercommunalités. Dès lors, confier au Padduc l’établissement de zonages n’est évidemment pas possible. Si ce plan peut comporter des dispositions propres à des espaces géographiques limités, c’est bien à la condition que ces prévisions n’entrent pas dans un degré de détail qui conduirait à méconnaître les documents d’urbanisme.
Pour cette raison, l’avis du Gouvernement sur cet amendement est défavorable, même si je ne méconnais pas le problème de fond que vous avez rappelé.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 748 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 29 (réservé)
Article 30
Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Les articles L. 211-2 et L. 214-1-1 sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le périmètre d’une grande opération d’urbanisme au sens de l’article L. 312-3 du présent code, le droit de préemption prévu par le présent chapitre est exercé par la collectivité territoriale ou l’établissement public cocontractant mentionné au même article L. 312-3. La collectivité territoriale ou l’établissement public peut déléguer l’exercice de ce droit à un établissement public y ayant vocation, ou au concessionnaire d’une opération d’aménagement. » ;
2° La section 1 du chapitre II du titre Ier du livre III est complétée par un article L. 312-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 312-2-1. – Par dérogation à l’article L. 442-1, la réalisation d’une opération d’aménagement définie à l’article L. 300-1, dont la réalisation est prévue par un contrat de projet partenarial d’aménagement, peut donner lieu à la délivrance d’un permis d’aménager portant sur des unités foncières non contiguës lorsque l’opération d’aménagement garantit l’unité architecturale et paysagère des sites concernés et s’inscrit dans le respect des orientations d’aménagement et de programmation mentionnées à l’article L. 151-7. La totalité des voies et espaces communs inclus dans le permis d’aménager peut faire l’objet d’une convention de transfert au profit de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale compétent. » ;
3° Après le 1° de l’article L. 312-5, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis Les droits de préemption définis aux L. 211-1 à L. 211-7 et L. 214-1 à L. 214-3 sont exercés par la collectivité territoriale ou l’établissement public cocontractant mentionné à l’article L. 312-3. La collectivité territoriale ou l’établissement public peut déléguer l’exercice de ces droits à un établissement public y ayant vocation, ou au concessionnaire d’une opération d’aménagement. » ;
4° L’article L. 312-7 est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Le transfert à l’autorité mentionnée au 1° bis dde l’article L. 312-5 de l’exercice des droits de préemption définis aux L. 211-1 à L. 211-7 et L. 214-1 à L. 214-3 dans les conditions prévues au même 1° bis. » ;
5° L’article L. 321-2 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« À titre dérogatoire, afin de contribuer à la réalisation d’une grande opération d’urbanisme, lorsqu’elle n’est pas déjà membre d’un établissement public foncier local, la collectivité territoriale ou l’établissement public cocontractant mentionné à l’article L. 312-3 peut, à sa demande, être incluse dans le périmètre de l’établissement public foncier d’État intervenant sur le territoire de la région à laquelle elle appartient. Cette inclusion intervient par décret en Conseil d’État pris après transmission de la délibération de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’établissement public cocontractant exprimant la demande mentionnée à la phrase précédente, après avis conforme des communes membres dudit établissement public cocontractant si celui-ci n’est pas compétent en matière de document d’urbanisme, et après avis favorable du conseil d’administration de l’établissement public foncier d’État. Ces avis sont réputés favorables si ils ne sont pas intervenus dans un délai de trois mois. Cette inclusion n’entraîne pas de modification de la composition du conseil d’administration de l’établissement.
« L’inclusion au sein du périmètre d’un établissement public foncier d’État décidée en application du deuxième alinéa prend fin au terme de la durée de la grande opération d’urbanisme fixée en application de l’article L. 312-4, sauf délibération contraire de l’organe délibérant de la collectivité ou de l’établissement public cocontractant, après avis conforme des communes mentionnées au deuxième alinéa. Ces avis sont réputés favorables si ils ne sont pas intervenus dans un délai de trois mois. Si la collectivité ou l’établissement public délibère et que les communes rendent un avis favorable en application de la première phrase du présent alinéa, la représentation de la collectivité ou de l’établissement public cocontractant au sein du conseil d’administration de l’établissement public foncier est organisée conformément à l’article L. 321-9 dans un délai d’un an.
« L’inclusion d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public cocontractant dans le périmètre d’un établissement public foncier d’État en application du deuxième alinéa est sans préjudice de la possibilité pour cette collectivité ou cet établissement public de rejoindre un établissement public foncier local après le terme de la durée de la grande opération d’urbanisme dès lors que la collectivité ou l’établissement public n’est pas intégré au sein du périmètre de l’établissement public foncier d’État en application du troisième alinéa. »
M. le président. La parole est à Mme Guylène Pantel, sur l’article.
Mme Guylène Pantel. Je regrette que les amendements concernant le code de l’urbanisme que nous avions déposés n’aient pas été déclarés recevables.
C’est regrettable, car ce projet de loi, s’il portait véritablement une ambition de simplification, aurait abordé ce sujet. N’importe quel élu local vous dira que s’il y a un domaine où il rencontre des difficultés au quotidien, où il aimerait pouvoir mener ses projets plus simplement, c’est bien l’urbanisme.
Je veux vous en donner un exemple en me faisant le porte-parole de la communauté de communes du Haut Allier, en Lozère, de ses élus et de son président, Francis Chabalier. Voilà près de six ans qu’ils se trouvent face à un mur : une double application des lois Littoral et Montagne vient réduire à néant tout projet de développement de leur territoire. Voilà près de six ans qu’ils alertent les différents services de l’État sans qu’on leur réponde. Par conséquent, ils menacent d’abroger leur plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi).
Récemment, on leur a laissé entendre qu’ils pourraient trouver une issue législative à leur problème au travers du projet de loi Climat et résilience, mais les amendements déposés ont été déclarés irrecevables. Il s’est ensuivi des échanges avec Mme Wargon : dans un courrier du 15 juin, elle proposait très clairement qu’un amendement soit déposé sur le présent texte. Mais là encore, il a été jugé irrecevable !
Aussi, madame la ministre, je vous demande ce qu’il faut faire pour que ces élus soient entendus.
M. le président. L’amendement n° 1538 rectifié, présenté par MM. Wattebled, Decool, Guerriau, A. Marc et Menonville, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Capus, Chasseing et Verzelen, Mme Paoli-Gagin, M. Levi, Mmes Jacques et Dumas, M. Anglars, Mmes Garriaud-Maylam et Canayer et M. Bonhomme, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après l’article L. 152-6, il est inséré un article L. 152-… ainsi rédigé :
« Art. L. 152-…. – Les opérations d’aménagement peuvent déroger au règlement qui impose la réalisation d’un pourcentage de logements sociaux aux opérations d’aménagement dès lors qu’il est joint au dossier de demande d’autorisation d’urbanisme au moins deux refus d’organismes d’habitations à loyer modéré de s’associer au projet et d’y réaliser les logements nécessaires à la délivrance de l’autorisation d’urbanisme. » ;
La parole est à M. Franck Menonville.
M. Franck Menonville. Le présent amendement, déposé par notre collègue Dany Wattebled, vise à permettre aux opérations d’aménagement de déroger à la servitude de mixité sociale lorsqu’il est justifié de l’impossibilité pour les organismes d’HLM d’y donner suite.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. La commission ne souhaite pas entrer dans une logique visant à dispenser certains projets des obligations relatives au logement social.
Certes, il existe des situations particulières dans lesquelles il est difficile pour un organisme d’HLM de participer à un projet. Les raisons peuvent être d’ordre financier ou liées à l’implantation géographique territoriale. Néanmoins, il nous semble que ce problème devrait recevoir d’autres solutions, par exemple une meilleure coordination avec l’action des offices d’HLM, des pouvoirs publics et des aménageurs.
On pourrait lever purement et simplement des obligations en cas de difficultés, mais cela mettrait en péril l’effort que nous voulons tous continuer à accomplir dans les territoires, à savoir davantage de production de logement social pour répondre au mieux aux attentes et aux besoins de nos concitoyens.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Madame la sénatrice Pantel, nous sommes au courant de la difficulté posée par le cumul des lois Montagne et Littoral. Les amendements ayant été déclarés irrecevables à ce stade de la discussion, nous verrons si nous pouvons les articuler différemment au cours de la navette afin d’en assurer la recevabilité. Le Gouvernement a la volonté de travailler avec vous pour trouver une solution.
Pour ce qui concerne l’amendement n° 1538 rectifié, je rejoins les arguments de Mme le rapporteur. Si l’on mettait un terme aux servitudes de mixité sociale dans les grandes opérations d’aménagement, on parviendrait difficilement à répondre aux enjeux de mixité sociale.
L’avis est donc défavorable.
M. Franck Menonville. Je retire l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 1538 rectifié est retiré.
L’amendement n° 1210, présenté par Mme Estrosi Sassone, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3, première phrase
1° Remplacer les mots :
par le
par les mots :
au
2° Remplacer les mots :
au même
par les mots :
à l’
II. – Alinéa 5, première phrase
Supprimer les mots :
dont la réalisation est
III. – Alinéa 7
Après le mot :
aux
insérer le mot :
articles
IV. – Alinéa 9
1° Remplacer le mot :
dde
par le mot :
de
2° Après le mot :
aux
insérer le mot :
articles
3° Remplacer les mots :
au même 1° bis
par les mots :
au 1° bis de l’article L. 312-5
V. – Alinéa 11
1° Première phrase
a) Remplacer les mots :
lorsqu’elle
par les mots :
lorsqu’il ou elle
b) Remplacer le mot :
incluse
par le mot :
inclus
c) Remplacer les mots :
à laquelle elle
par les mots :
à laquelle il ou elle
2° Deuxième phrase
Remplacer les mots :
phrase précédente
par les mots :
première phrase du présent alinéa
VI. – Alinéas 12, première phrase, et 13
Après les mots :
deuxième alinéa
insérer les mots :
du présent article
VII. – Alinéa 13
Remplacer les mots :
après le terme de la durée
par les mots :
à compter du terme
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Cet amendement, que je présente en mon nom propre, est rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 1536 rectifié, présenté par MM. Wattebled, Malhuret, Decool, Guerriau, A. Marc et Menonville, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Capus, Chasseing et Verzelen, Mmes Paoli-Gagin, de La Provôté, Jacques et Dumas, M. Anglars, Mmes Garriaud-Maylam et Canayer et M. Bonhomme, est ainsi libellé :
Alinéa 5, première phrase
Supprimer les mots :
Par dérogation à l’article L. 442-1
La parole est à M. Alain Marc.
M. Alain Marc. Il s’agit d’un amendement rédactionnel consécutif à la suppression, à l’article L. 442-1 du code de l’urbanisme, de la condition de contiguïté des unités foncières visées par un permis d’aménager.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Dans quelques instants sera présenté l’amendement n° 1535 rectifié bis déposé par votre groupe, mon cher collègue, sur lequel j’émettrai un avis défavorable.
Par souci de cohérence, j’émets donc également un avis défavorable sur le présent amendement de coordination juridique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Il s’agit de supprimer totalement la condition de continuité dans le permis d’aménager ; il ne s’agit donc pas d’un amendement rédactionnel.
L’article 30 du projet de loi prévoit déjà d’étendre le champ d’application du permis d’aménager « multisites » à des opérations d’aménagement prévues dans des projets partenariaux d’aménagements (PPA).
En l’occurrence, il s’agit d’aller bien au-delà, par une généralisation du dispositif, avant qu’on ait pu faire le bilan des expérimentations. Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Monsieur Marc, l’amendement n° 1536 rectifié est-il maintenu ?
M. Alain Marc. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 1536 rectifié est retiré.
L’amendement n° 1213, présenté par Mme Estrosi Sassone, est ainsi libellé :
Alinéa 5, première phrase
Supprimer les mots :
et s’inscrit dans le respect des orientations d’aménagement et de programmation mentionnées à l’article L. 151-7
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Cet amendement, que je présente en mon nom propre, vise à faciliter le recours au permis d’aménager « multisites » au sein des grandes opérations d’urbanisme (GOU).
Ce dispositif, déjà ouvert dans le cadre d’une ORT, n’est pas encore utilisé à la hauteur de son potentiel. Ce faible recours s’explique en partie par la rédaction ambiguë de la loi, laquelle semble impliquer une révision préalable du plan local d’urbanisme. Un tel formalisme ne se justifie pas, dès lors que les opérations pouvant bénéficier de cette dérogation sont déjà limitées à celles spécifiquement visées par la convention de PPA.
Le présent amendement vise à préciser que l’adoption des orientations d’aménagement et de programmation (OAP) spécifiques dans le dispositif n’est pas subordonnée à une modification préalable du PLU. Il s’agit d’apporter une simplification supplémentaire au bénéfice des opérations d’aménagement, que nous voulons dynamiser et développer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 30, modifié.
(L’article 30 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 30
M. le président. L’amendement n° 1214, présenté par Mme Estrosi Sassone, est ainsi libellé :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du IV de l’article 157 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, les mots : « et s’inscrit dans le respect des orientations d’aménagement et de programmation mentionnées à l’article L. 151-7 du même code » sont supprimés.
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Cet amendement, que je présente en mon nom propre, est dans la droite ligne de l’amendement relatif aux GOU que je viens de défendre : il tend à apporter une simplification supplémentaire au bénéfice des ORT.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 30.
L’amendement n° 1535 rectifié bis, présenté par MM. Wattebled, Malhuret, Decool, Guerriau, A. Marc et Menonville, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Capus, Chasseing et Verzelen, Mmes Paoli-Gagin, de La Provôté, Jacques et Dumas, M. Anglars, Mmes Garriaud-Maylam et Canayer et M. Bonhomme, est ainsi libellé :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l’article L. 442-1 du code de l’urbanisme, les mots : « unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës » sont remplacés par les mots : « ou plusieurs unités foncières ».
La parole est à M. Alain Marc.
M. Alain Marc. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. La commission estime que cette généralisation serait prématurée, car nous n’avons pas le retour d’expérience nécessaire pour y procéder.
Cet amendement apparaît trop large : il ouvre la possibilité du « multisites » à tous les permis d’aménager, en supprimant complètement la condition de contiguïté des unités foncières. Or l’expérimentation que nous avions votée dans la loi ÉLAN n’est pas encore arrivée à son terme et le dispositif n’a pas été évalué. Il n’est donc pas nécessaire, à ce stade, de le généraliser.
L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Marc. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 1535 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 1664 rectifié ter, présenté par MM. Buis et Marchand et Mmes Evrard, Havet et Schillinger, est ainsi libellé :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa de l’article L. 121-15-1 est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Avec l’accord de l’autorité compétente mentionnée à l’article L. 103-3 du code de l’urbanisme, le maître d’ouvrage peut faire le choix de soumettre à concertation au titre de la présente section :
« – l’ensemble du projet, lorsque celui-ci est soumis en partie à concertation obligatoire au titre des 2° , 3° ou 4° de l’article L. 103-2 du même code et qu’il peut également être soumis en partie à concertation au titre de la présente section ;
« – l’ensemble du projet et les mises en compatibilité qu’il rend nécessaire en application des articles L. 143-44 et L. 153-54 dudit code, lorsque le projet peut être soumis, en tout ou partie, à concertation au titre de la présente section.
« Cette concertation tient lieu de concertation obligatoire au titre de l’article L. 103-2 du même code. » ;
2° Au VI de l’article L. 122-4, les mots : « aux articles L. 104-1 et L. 104-2 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 104-1, L. 104-2 et L. 104-2-1 ».
La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Cet amendement a pour objet d’apporter un complément de simplification, dans la droite ligne de la loi du 8 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP).
En effet, l’article 39 de cette loi est venu compléter l’article L. 121-15-1 du code de l’environnement, en intégrant dans son dernier alinéa un droit d’option permettant au maître d’ouvrage, en accord avec l’autorité compétente, de choisir de mettre en œuvre une seule concertation préalable – celle au titre du code de l’environnement – lorsque son projet est soumis, à la fois, à la concertation obligatoire au titre du code de l’urbanisme et aux dispositions relatives à la concertation du code de l’environnement.
L’amendement vise à compléter ce dispositif en intégrant dans ce droit d’option les mises en compatibilité des documents d’urbanisme nécessaires à la réalisation d’un projet. L’objectif est de simplifier la mise en œuvre de la concertation préalable pour le porteur de projet, en accord avec l’autorité compétente en matière d’urbanisme.
À titre d’exemple, une opération d’infrastructure routière se trouvant en zone naturelle et urbanisée relève de deux procédures issues de deux codes : celui de l’environnement pour la partie route hors zone urbanisée, et celui de l’urbanisme pour la section située en zone urbanisée. En outre, le projet peut requérir la mise en compatibilité de documents d’urbanisme, qui, si elle est soumise à évaluation environnementale, nécessite également une concertation au titre du code de l’urbanisme.
Dans un souci de lisibilité, le présent amendement vise donc à permettre au maître d’ouvrage de mettre en place pour l’ensemble de son projet et les mises en compatibilité nécessaires, avec l’accord de l’autorité compétente, la concertation préalable prévue par le code de l’environnement.
Cet amendement vise par ailleurs à tenir compte dans le code de l’environnement de l’ajout, dans le cadre de la loi ASAP, d’un article L. 104-2-1 du code de l’urbanisme, relatif à l’évaluation environnementale des unités touristiques nouvelles structurantes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Cet amendement a certes pour objet une simplification, mais il va beaucoup plus loin en incluant dans ce droit d’option les mises en compatibilité des documents d’urbanisme au bénéfice d’un projet donné.
Nous ne souhaitons pas revenir, huit mois après, sur des mesures adoptées dans le cadre de la loi ASAP. Il faut d’abord, me semble-t-il, mesurer l’efficacité de ces dispositions avant de les modifier, même sous couvert d’une simplification.
Par ailleurs, monsieur le sénateur, vous proposez un changement d’échelle en ne parlant plus d’un projet individuel, mais bien d’un document d’urbanisme dont les conséquences sont, de fait, beaucoup plus importantes. Nous pensons qu’il est utile de préserver, dans un document structurant tel que le PLU, les garanties en matière de concertation prévues par le code de l’urbanisme.
Cela permet de garantir l’adhésion du public et des acteurs du projet, mais aussi la transparence quant aux modifications apportées au document d’urbanisme.
La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Cet amendement vise à aller au bout de la simplification prévue dans la loi ASAP en permettant de choisir, une bonne fois pour toutes, entre la concertation au titre du code de l’environnement et celle au titre du code de l’urbanisme.
Dans la mesure où nous cherchons à simplifier nos procédures, à maîtriser nos délais et à accélérer la réalisation des opérations, ce complément est le bienvenu.
L’avis est donc favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1664 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 277, présenté par Mmes Cukierman, Assassi, Brulin, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 136 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové est abrogé.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Depuis le 1er juillet dernier, les communes ont dû, sauf mise en œuvre de la minorité de blocage, transférer aux intercommunalités leur compétence en matière de documents d’urbanisme.
Autrement dit, cela fait un peu plus d’une semaine que les communes ont perdu la maîtrise de leur sol. Vous le savez, nous avons toujours été défavorables à cette mesure introduite par loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR).
Une telle démarche pose un certain nombre de questions, y compris sur le plan démocratique. D’une part, les communes représentent l’échelon territorial de proximité au plus près des citoyens. D’autre part, les PLU ne sont pas qu’un simple document technique d’urbanisme, mais avant tout la traduction du projet politique d’une majorité municipale élue.
Aussi, imposer aux élus municipaux un PLU à la définition duquel ils n’auront pas participé et qu’ils n’auront pas adopté constitue, à nos yeux, une atteinte lourde aux libertés communales.
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié, présenté par MM. D. Laurent et J.M. Boyer, Mmes Ventalon, Demas, Imbert, Dumont, Puissat, Berthet, Chauvin et Goy-Chavent, MM. Burgoa, Perrin et Rietmann, Mme Belrhiti, MM. Reichardt, Laménie, Bouchet, Bacci, Bonnus, Chatillon et Vogel, Mmes Richer, Garriaud-Maylam et Chain-Larché, M. Cuypers, Mme Deromedi, MM. Chaize, de Legge et Lefèvre, Mmes Lassarade et Bellurot, MM. Charon, Pellevat et Joyandet, Mme Gosselin, MM. Sautarel et Brisson, Mme L. Darcos, M. E. Blanc, Mme Drexler, MM. Piednoir, Anglars et Bonne, Mme Deroche, MM. Houpert et Pointereau, Mme M. Mercier et MM. Somon, Duplomb, Klinger, Babary, Belin, Saury, Bouloux, Bonhomme, B. Fournier, Gremillet, Favreau, C. Vial, Rapin et Longuet, est ainsi libellé :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le deuxième alinéa du II de l’article 136 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové est supprimé.
II. – Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° L’article L. 153-2 est abrogé ;
2° À l’article L. 153-3, les mots : « Par dérogation aux articles L. 153-1 et L. 153-2 et pendant une période de cinq ans à compter de sa création, » sont supprimés ;
3° L’article L. 153-31 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les orientations définies par le projet d’aménagement et de développement durable d’un plan local d’urbanisme approuvé sont modifiées sur le territoire d’une seule commune, cela ne donne pas lieu à l’élaboration d’un plan local d’urbanisme intercommunal couvrant l’intégralité du territoire. »
La parole est à Mme Anne Ventalon.
Mme Anne Ventalon. Le présent amendement prévoit deux dispositions pour empêcher tout transfert intempestif de la compétence du plan local d’urbanisme.
Il s’agit, d’une part, d’inverser le mécanisme de transfert de la compétence PLUi, en indiquant que ce n’est pas aux communes de délibérer pour empêcher le transfert de compétence, mais que ce transfert est conditionné à une délibération.
Nous voulons faire en sorte, d’autre part, d’éviter que la modification du projet d’aménagement et de développement durable n’entraîne une procédure de PLUi couvrant l’intégralité du territoire de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI).
En effet, si les PLUi peuvent être une chance pour nos territoires et un outil pour rationaliser l’utilisation des sols, il faut non pas que ceux-ci soient imposés mais qu’ils soient le fruit d’un projet commun entre maires d’un même territoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. L’amendement n° 277 vise à abroger en bloc les dispositions de la loi ALUR en matière de transfert de la compétence d’urbanisme aux intercommunalités.
La position constante de notre commission, depuis 2014, a été d’apporter les souplesses là où elles sont nécessaires pour appliquer les mesures de la loi ALUR, mais de ne pas revenir sur les transferts déjà réalisés. L’échelle intercommunale nous semble offrir de véritables atouts en termes de coordination de l’action des élus d’un territoire.
Pour autant, nous entendons bien les demandes de nos collègues élus locaux, en particulier dans les zones rurales, qui ne souhaitent pas se voir imposer « à l’usure » un transfert de compétence auquel les communes n’auraient pas consenti au cours des six dernières années. Il est toujours possible, pour les communes, de déléguer volontairement cette compétence au titre du droit existant.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 1 rectifié vise à supprimer la clause de revoyure qui prévoit qu’à chaque renouvellement des équipes municipales, les communes doivent s’opposer par délibération au transfert de la compétence à l’intercommunalité si elles ne le souhaitent pas. Il tend également à supprimer la disposition selon laquelle un EPCI nouvellement compétent en matière de PLU doit automatiquement élaborer un PLUi si l’un des documents communaux est révisé.
La commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je connais la vigilance du Sénat sur la mise en œuvre de l’urbanisme à l’échelle intercommunale.
Je rappelle à cet effet que sont mentionnés à l’amendement n° 1 rectifié les PLU, et en aucune façon les permis de construire, lesquels relèvent de la prérogative des maires. On a parfois tendance à les confondre…
Cette proposition m’interpelle, car le dernier amendement voté hier soir portait sur l’autorité organisatrice de l’habitat au niveau des EPCI, et visait notamment au renforcement de ses prérogatives. Or, vous le savez, l’habitat recouvre à la fois le logement et l’urbanisme. Aussi, permettez-moi de relever certains messages contradictoires à ce sujet.
Votre amendement, madame la sénatrice Ventalon, vise à remettre en cause le dispositif du transfert de la compétence PLU au niveau intercommunal. Je partage votre souci d’associer étroitement les élus.
C’est précisément pour cette raison que je tiens au dispositif actuel, qui est équilibré et a fait à de nombreuses reprises, depuis 2014, l’objet d’ajustements sans que le principe en soit remis en cause.
Tout d’abord, il définit et met en œuvre un projet de territoire à une échelle cohérente, qui permet de penser les complémentarités et les relations entre les espaces urbains et ruraux. Selon moi, c’est fondamental.
Ensuite, le PLUi constitue un levier pour construire et se développer. Plus de 10 000 communes en France en sont restées au règlement national d’urbanisme (RNU), qui limite fortement les droits à construire puisqu’il n’est possible de construire que dans les parties urbanisées de la commune.
Je rappelle que l’extension de l’urbanisation, dans le cadre du RNU, est limitée à un avis conforme de la commission de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF). Or un PLUi permet d’ouvrir de nouvelles zones à l’urbanisation en s’appuyant sur l’analyse des besoins des territoires.
J’entends les difficultés dont font part un certain nombre d’élus concernant la gouvernance. C’est pourquoi nous avons pris il y a moins de deux ans, à l’occasion de la loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, plusieurs décisions, que je rappelle.
Nous avons imposé, avant l’adoption d’un PLU, une meilleure prise en compte des avis des maires.
Nous avons permis à un maire, au cours de la mise en œuvre du PLUi, de modifier celui-ci lorsque les modifications se limitent à une seule commune.
Nous avons renforcé l’association et les avis des maires au moment de l’évaluation du PLUi. Nous avons également abaissé le seuil, afin de permettre la couverture par le PLUi d’une partie seulement du territoire. Auparavant, les EPCI devaient compter plus de cent communes ; le seuil est désormais établi à cinquante.
L’enjeu, au fond, est celui de la gouvernance, et c’est la raison pour laquelle nous avons prévu dans la loi précitée la conférence des maires. Il faut encourager ce dialogue ; tel est le sens des actions que nous menons avec l’ANCT.
Bien entendu, l’actuel dispositif de transfert ne peut pas se faire contre les élus locaux. Je rappelle qu’il existe une minorité de blocage à un seuil très bas : il suffit de 25 % des communes représentant 20 % de la population pour s’opposer au transfert. Cela me paraît équilibré – nous avons mis en place ce même principe de minorité de blocage pour les compétences eau et assainissement.
Lorsqu’un EPCI est compétent et qu’un PLU est révisé, cela enclenche l’élaboration d’un PLU. J’entends que cela puisse poser des difficultés. Il me semble néanmoins que les élus ont aujourd’hui une grande latitude.
Tout d’abord, je tiens à rappeler qu’il est possible de se limiter à un PLUi partiel dès lors que l’EPCI compte plus de cinquante communes.
Ensuite, les PLU peuvent faire l’objet de procédures de modification qui permettent des évolutions substantielles des droits à construire. D’ailleurs, projet par projet, il est possible de faire évoluer des droits à construire grâce aux déclarations de projet (DP), outils opérationnels simples que les collectivités se sont appropriés.
Il me semble réellement nécessaire de ne pas faire évoluer la loi. L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Sans préjuger du vote de mes collègues, et au vu de l’argumentation très détaillée que vient de présenter Mme la ministre, mon avis de sagesse sera plutôt défavorable. Il n’est pas question, en effet, de passer outre la volonté des élus locaux.
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. Dès l’origine, j’ai été réservé, pour ne pas dire hostile, à cette automaticité prévue par la loi ALUR d’un transfert du PLU vers un PLUi.
Je rends hommage aux atténuations apportées à cette automaticité, que vient de nous rappeler exhaustivement Mme la ministre. Pour autant, j’ai le sentiment qu’en milieu rural des problèmes se posent encore.
Le présent projet de loi doit apporter davantage de fluidité et de souplesse ; je me réjouis donc de l’avis de sagesse émis par Mme la rapporteure pour avis. Mais je regrette vivement que les observations et les éléments d’information présentés par Mme la ministre aient mâtiné cette sagesse d’un avis défavorable.
À titre personnel, et parce que j’ai cosigné l’amendement n° 1 rectifié, je soutiens cette volonté d’aller plus loin. Il faut vraiment qu’un maire – nous sommes nombreux ici à l’avoir été, à défaut de l’être encore – puisse disposer de la plénitude de ses pouvoirs en ce qui concerne le PLU, lequel est déjà considérablement encadré par les documents d’ordre supérieur.
J’appelle donc à voter en faveur de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Il s’agit d’une affaire délicate. En effet, j’ai l’impression que les deux solutions sont bonnes.
La loi est applicable depuis un certain nombre d’années et il y a toujours des difficultés. Néanmoins, je ne suis pas certain que les propositions faites aujourd’hui permettent de les résoudre, dans la mesure où elles sont locales, liées à la territorialité, mais aussi à la gouvernance puisqu’il s’agit d’inciter les maires à prendre position.
Il y a quelques années, j’étais défavorable à ce principe du transfert de PLU vers l’intercommunalité. Par la suite, en discutant avec les uns et les autres sur le terrain, j’ai constaté qu’il existait une vision différente qui commençait à être adaptée.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Bien sûr !
M. René-Paul Savary. Les maires ont progressivement compris qu’ils avaient un rôle à jouer, et qu’ils pouvaient perdre une partie de leurs prérogatives tout en gardant une vision d’ensemble tout à fait nécessaire.
Cette vision d’ensemble est nécessaire, j’y insiste, en termes de logement, d’aménagements publics et d’environnement. Je pense, par exemple, aux grandes intercommunalités qui comptent quelques communes forestières, tandis que les autres communes qui les composent ne sont pas concernées par le patrimoine constitué par les forêts.
La concertation et la réflexion sont donc nécessaires ; on ne peut pas changer les règles sans cesse.
Je suivrai donc l’avis de Mme la ministre. Les règles commençant à être assimilées, il convient d’en attendre l’évaluation pour trouver la meilleure solution et répondre aux préoccupations de chacun.
M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour explication de vote.
M. Mathieu Darnaud. Un personnage historique dont je ne partage pas la philosophie a dit : « La confiance n’exclut pas le contrôle. »
J’ai écouté d’autant plus attentivement votre argumentaire, madame la ministre, que vous avez fait référence à la loi Engagement et proximité que nous avons votée.
Je vous opposerai néanmoins l’objection que j’avais déjà formulée à propos des compétences eau et assainissement. Le texte permet effectivement d’associer un maire pour la modification d’un PLU en PLUi. Or la réalité est tout autre : à la fin des fins, c’est l’intercommunalité qui reste décisionnaire.
Dans la majorité des cas, la voix des élus n’est in fine pas entendue, ce qui est totalement regrettable. Tant que l’on n’aura pas pris cela en compte, on pourra assouplir toutes les dispositions que l’on veut, on n’aura pas associé davantage le maire et l’intercommunalité. Tel est notre problème majeur aujourd’hui.
Nous avions voté avec conviction ces dispositions de la loi Engagement et proximité, considérant qu’elles régleraient à la fois le problème de l’eau et les difficultés de modification du PLU.
Il ne s’agit pas de revoir l’économie. René-Paul Savary l’a dit, il faut une échelle « macro » et une échelle « micro ». Pour cette dernière, la commune doit conserver la capacité de proposer, voire d’imposer, dans la concertation et non ex abrupto, sa modification de tout ou partie d’un PLU.
Votre argumentaire ne m’a pas convaincu, madame la ministre. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.
Mme Valérie Létard. Mon propos ira dans le sens de ceux de Mme la ministre et de Mme la rapporteure pour avis.
Mes chers collègues, vous êtes tous concernés par ces questions que vous connaissez bien. Vous savez donc que c’est un travail de très longue haleine qui nous fait tendre, depuis quelques années, vers les PLUi. Cela se fait dans la douleur et s’avère compliqué, car on touche là au cœur des préoccupations des maires.
Nous voyons bien, néanmoins, que partout où ce dispositif a été mis en place, les élus se sont adaptés et reconnaissent l’intérêt d’une telle mesure. Mme la ministre l’a rappelé, l’autorité organisatrice de l’habitat dispose de toutes les qualités d’une entité de niveau territorial pour traiter et réfléchir de façon cohérente aux enjeux d’aménagement, de logement et d’habitat, qui sont imbriqués ; d’où la nécessité de les traiter à la même échelle.
Les maires doivent être au cœur du dispositif, c’est certain. Dans mon territoire, la conférence des maires existe, s’avère efficace et prend toute sa place. Quant aux PLUi, ils fonctionnent parce que les maires, totalement partie prenante, sont entendus : la construction de ce document se fait avec eux.
La question essentielle est donc, en pratique, celle des relations entre l’intercommunalité et les élus locaux. Un important travail a donc été effectué pour donner de la cohérence à ce dispositif, en garantissant que les maires n’en soient pas exclus. Nous avançons petit à petit vers un système qui prend corps et nous permettra de travailler de façon beaucoup plus efficace et cohérente, à la même échelle.
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Je répondrai à Mathieu Darnaud qu’il existe plusieurs conceptions des choses.
Dans la conception uniquement identitaire de la commune, que l’on soit associé au sein d’un syndicat ou d’une intercommunalité, au final, malgré les liens qui se nouent, c’est au niveau communal que l’on exerce la compétence et que l’on agit. On considère donc, par défaut, que la maille communale est la meilleure quel que soit le sujet.
Or ce n’est pas le cas en France et cela ne l’a jamais été ! Les communes françaises se sont toujours inscrites, du fait de leur taille plus petite, dans des logiques de subsidiarité ; c’est pour elles une nécessité absolue.
Pour ce qui concerne les outils permettant de construire les PLUi, c’est-à-dire la minorité de blocage et la sectorisation visant à mieux tenir compte de la réalité particulière de chaque commune, il existe, comme l’a dit Valérie Létard, une dimension territoriale plus large que la maille communale.
Les dynamiques en termes d’espaces agricoles, de forêts ou de connexions sont territoriales et ne se limitent pas à la perspective de la maille communale. Elles nécessitent un travail collectif qui fait exister le territoire au sein de la conférence des maires.
J’entends que cela ne fonctionne pas dans certains endroits. Mais s’il y a un domaine dans lequel de nombreux efforts ont été faits pour intégrer les maires et les équipes municipales, c’est bien l’urbanisme. Il s’agit d’une compétence centrale et absolument nécessaire de nos communes.
Remettre en cause cette possibilité pour en revenir à la maille de taille inférieure et laisser croire qu’une commune pourra faire, au sein d’un territoire, l’inverse de ce que font toutes les autres, cela me semble complètement contre-productif.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Ce débat est important, et pas uniquement sur la question des PLUi. Mon cher collègue Kerrouche, permettez-moi de réagir à votre intervention : il ne s’agit ni d’exacerber les particularismes locaux ni de les nier. Je pourrais retourner contre vous l’argument que vous venez de développer : à force de nier les réalités communales, on renforce la volonté de les faire exister. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
La loi NOTRe a permis la constitution d’intercommunalités de taille XXL centrées sur un certain nombre de compétences. La réalité, c’est que pour mieux répondre aux besoins de la population, nous devons nous mettre à plusieurs. Pour autant, l’intercommunalité que nous sommes en train de construire en France ne doit pas empêcher les communes d’intervenir. Les capacités communales doivent être exercées quand c’est possible. Les réalités ne doivent pas être niées !
Bien évidemment, les élus qui souhaitent que cette compétence demeure celle des communes – j’en fais partie – évoquent tous, comme par hasard, des intercommunalités où le transfert ne fonctionne pas, quand les autres citent des exemples d’intercommunalités dans lesquelles tout se passe très bien.
Le véritable enjeu, pour nous, ce sont non pas les intercommunalités dans lesquelles le transfert se passe bien – tant mieux pour elles –, mais celles où il est problématique. La question est la suivante : comment mettre en place des politiques municipales au sein d’une intercommunalité, en prenant en compte les contradictions inhérentes à un territoire composé de communes de taille et de géographie différentes.
En tout cas, pour notre part, nous retirons notre amendement au profit de l’amendement n° 1 rectifié.
M. le président. L’amendement n° 277 est retiré.
La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Mizzon. J’abonderai dans le sens d’André Reichardt et de Mathieu Darnaud. Quelle est la seule et dernière compétence stratégique dont disposent encore les communes – et encore pas toutes, puisque celles qui font partie d’une métropole ne l’ont plus ? C’est l’urbanisme.
Or la compétence urbanisme nécessite, pour être bien mise en œuvre, une connaissance très fine du territoire. Nous nous accordons tous sur le fait qu’il faut de la cohérence, mais il existe pour cela des outils partagés, qui ne souffrent plus aucune discussion. Tout le monde est d’accord pour que la cohérence soit assurée au travers des SCoT, mais l’urbanisme exige, lui, d’autres connaissances. C’est la raison pour laquelle je ne suis pas favorable au transfert à un niveau qui, après tout, n’est jamais qu’une construction.
Car l’EPCI n’est qu’une construction ; la collectivité, c’est la commune. N’accordons donc pas à cette construction ce que l’on refuse à la collectivité !
Pour ces raisons, je voterai cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour explication de vote.
M. Philippe Folliot. Ce débat n’aurait pas lieu d’être si tout fonctionnait bien. Si nous avons aujourd’hui cette discussion, c’est parce que les intercommunalités, notamment les plus grandes d’entre elles, sont à l’origine d’un tel éloignement que les communes ne s’y retrouvent pas.
Au fil du temps, on a inversé les choses. Alors que les intercommunalités devraient être au service des communes, ce sont ces dernières qui, in fine, se retrouvent au service – ou presque – des intercommunalités. Les communes, je le répète, ne s’y retrouvent pas !
Certaines intercommunalités comptent des dizaines de communes regroupées dans des agglomérations. Dans mon département, une intercommunalité est constituée de soixante-dix communes, autour de deux villes principales. Dans une telle situation, la voix du maire d’une petite commune de quelques dizaines d’habitants ne pèse pas lourd au sein du conseil d’agglomération.
Dans ce contexte, il est important de rétablir un équilibre afin de permettre aux petites communes de faire entendre leur voix, notamment au titre de l’exercice d’une compétence dont elles ont la prérogative, à savoir l’urbanisme. Si l’on retire cette compétence aux maires, il ne leur restera plus grand-chose.
Je voterai moi aussi cet amendement, car son adoption permettra de rétablir un certain équilibre. Une telle mesure est importante et attendue par nos collectivités.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. René-Paul Savary et Valérie Létard ont dit que les maires s’étaient adaptés aux réalités des PLUi. Pour ma part, je pense qu’ils s’y sont pour beaucoup résignés et qu’ils les subissent plus qu’ils ne les souhaitent.
Or des maires résignés, ce sont des maires qui renoncent. Je pense qu’il faut ici marquer notre hostilité à un dessaisissement qui a dénaturé le fait intercommunal.
Relisons bien l’amendement, mes chers collègues : il vise non pas à remettre en cause les PLUi, mais à empêcher la mise en œuvre de PLUi non acceptés.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Nous y sommes ! Vous ravivez l’opposition entre communes et intercommunalités… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Mais si ! (Mêmes mouvements.) Permettez-moi de m’exprimer après vous avoir sagement écoutés !
Certaines intercommunalités fonctionnent plus ou moins bien, nous en sommes d’accord. D’ailleurs, la taille de l’intercommunalité n’y est pour rien. Peut-être les grandes intercommunalités ne facilitent-elles pas la proximité, mais je connais des petites intercommunalités qui fonctionnent très mal ; il suffit qu’elles soient dirigées par une personne ayant une conception un peu autoritaire de l’action pour que les choses ne se passent pas bien…
Il ne faut pas opposer, par réflexe, les petites communes aux grandes. Et je ne parle même pas des relations entre les intercommunalités et les communes.
On peut voir le verre à moitié plein ou à moitié vide, monsieur Darnaud, je suis d’accord avec vous. Nous sommes tous des républicains, au sens générique du terme (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains), et nous pensons que la loi est faite pour être respectée et appliquée. Si elle ne l’est pas, la ministre que je suis se chargera de la faire appliquer, je le dis très clairement.
Monsieur Brisson – sur ce point, Mathieu Darnaud ne pourra pas me démentir –, vous avez voulu les intercommunalités au Pays basque. Vous en avez été l’un des promoteurs et des défenseurs, sur un fondement identitaire d’ailleurs – n’ayons pas peur des mots ! Dès lors, comment pouvez-vous dire ce que vous avez dit sur l’intercommunalité ?
Lorsque j’étais sénatrice, Mathieu Darnaud et moi sommes allés sur le terrain. Je me souviens que le préfet Durand, qui est aujourd’hui préfet de la région Normandie, était alors chargé de mettre en place l’intercommunalité. Vous avez voulu cette intercommunalité, monsieur Brisson !
M. André Reichardt. C’était autre chose !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Non, ce n’était pas autre chose, mais nous n’allons pas parler de l’Alsace maintenant… (Sourires.)
Mme Sophie Primas. Ah non !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. J’ai pris soin de détailler toutes les possibilités existantes. Je remercie d’ailleurs les sénateurs qui l’ont reconnu. Il est sage, aujourd’hui, de laisser la loi en l’état. La loi Engagement et proximité, qui a introduit les dernières souplesses, n’a pas deux ans. Je vous le redis en toute sincérité, c’est dans l’intérêt de tous !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 30.
L’amendement n° 2 rectifié, présenté par Mme Ventalon, MM. J.M. Boyer, D. Laurent, Bacci et Bonnus, Mmes Demas, Muller-Bronn et Belrhiti, M. Reichardt, Mmes Chauvin, Thomas, Bellurot et Puissat, M. Joyandet, Mme Deromedi, MM. Pellevat, Courtial et Bouchet, Mme Lassarade, MM. Perrin, Rietmann, Hugonet, Brisson et Bascher, Mmes Drexler, Gruny et Imbert, MM. Anglars, Bonne, Sido, Chaize, Chatillon et Duplomb, Mmes M. Mercier, Gosselin et Lopez, M. de Nicolaÿ, Mme Joseph, M. Pointereau, Mme Dumont, MM. Savin, Rojouan, Babary, Bouloux, Klinger, Saury, Sautarel, Genet et Favreau, Mme Raimond-Pavero et M. Laménie, est ainsi libellé :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 153-41 du code de l’urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les 2° et 3° sont applicables après accord du conseil municipal des communes concernées par ces diminutions ou réductions. »
La parole est à Mme Anne Ventalon.
Mme Anne Ventalon. Le présent amendement vise à donner aux maires un droit de veto lorsque l’EPCI tente de diminuer leurs droits à construire.
Une telle diminution devra donc passer par une révision du PLU et non plus par une simple modification.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Si je peux comprendre l’intention générale des auteurs de cet amendement, j’émets des doutes sur le dispositif tel qu’il nous est proposé. Il faut agir avec prudence, car son adoption pourrait geler toute possibilité d’évolution des PLUi.
Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Charles Guené, que j’aperçois sur les travées, sait très bien comment un maire peut bloquer financièrement certaines décisions de l’intercommunalité.
Pour ma part, je suis contre la possibilité pour le maire de bloquer un système. Si l’on veut que l’intercommunalité ne fonctionne pas, il suffit de voter des amendements tels que celui-ci ! (M. Didier Rambaud applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. J’entends votre argument, madame la ministre : une personne ne peut pas à elle seule tout bloquer.
Or il n’y a pas de blocage dans les communautés qui se sont choisies et construites ensemble. (Mme la ministre s’exclame.) Vous nous avez dit que nous ravivions l’opposition entre communes et intercommunalités. Si cette opposition perdure, c’est parce que l’intercommunalité a, hélas, été imposée – heureusement, pour certains ! – de façon parfois…
M. Max Brisson. Brutale !
Mme Cécile Cukierman. … conflictuelle, brutale ; je vous laisse le choix du qualificatif.
Je veux bien entendre que nos tentatives de résolution des problèmes – projet de loi après projet de loi, proposition de loi après proposition de loi, amendement après amendement – puissent être exaspérantes.
Sur le fond, vous avez raison, madame la ministre : donner un droit de veto pose problème. On a tous l’exemple d’un élu qui, pour telle ou telle raison, est devenu un empêcheur de tourner en rond en décidant de tout bloquer. Mais si on en arrive à une telle proposition, c’est parce que les choses ne fonctionnent pas aussi bien qu’on le croit dans un certain nombre d’intercommunalités.
Personne ne ravive quelque opposition que ce soit ! Le débat sur cette question est devant nous. Le renouvellement des équipes municipales n’a rien changé à cet état de fait parce qu’on n’impose pas à des bassins de vie différents de construire un projet commun.
M. Patrick Chaize. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Le débat continue parce qu’on ne cesse d’ouvrir la boîte de Pandore, que ce soit sur l’intérêt communautaire ou sur l’urbanisme.
Mettons les choses en perspective : avant la loi NOTRe, 13 % des intercommunalités comptaient moins de cinq communes et 4 % moins de trois communes. Je ne pense pas que ces intercommunalités étaient fonctionnelles… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je le dis très sereinement, on ne met pas en place des politiques publiques structurantes dans des intercommunalités de 2 000 habitants.
Mme Sophie Primas. Ce n’est pas vrai !
M. Éric Kerrouche. À l’inverse, a-t-on constitué des intercommunalités trop grandes dans le cadre de la loi NOTRe ? Sans doute ! On l’a tous dit. Cela étant, je rappelle que seuls 11 % des 1 251 EPCI en France regroupent plus de cinquante communes, soit une sur dix. Qu’on ne dise donc pas que les problèmes sont dus à la taille…
Je rappelle ainsi que l’EPCI Pays basque, qui, de mémoire, regroupe 158 communes, est le fruit d’une volonté locale. Car, en effet, certains très grands EPCI sont le résultat de volontés locales !
Notre débat aujourd’hui est complètement factice. Je l’ai dit et écrit, de quelque façon qu’on la présente, l’intercommunalité est une entité siamoise, composée d’une commune et d’une communauté de communes intrinsèquement liées. Elle compte deux personnalités, mais un même maître. On ne peut pas les séparer ! Encore une fois, les oppositions sur lesquelles nous raisonnons sont complètement factices et construites, et ne permettent pas d’avancer.
M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour explication de vote.
M. Mathieu Darnaud. Je tiens à dire à notre collègue Éric Kerrouche qu’il ne peut pas nous opposer cet argumentaire alors que lui-même subordonnait, voilà un peu plus de soixante-douze heures, la délégation d’une compétence à l’accord de l’ensemble des communes de l’intercommunalité. On ne peut pas défendre tout et son contraire !
La collectivité, nous le disons tous ici, c’est la commune et non l’intercommunalité. Nous ne cherchons pas à opposer les communes et les intercommunalités. Nous disons simplement que, parfois – tout le monde l’a rappelé, y compris Mme la ministre à l’instant –, l’histoire, ou la géographie, rend la construction intercommunale plus compliquée qu’ailleurs, où elle tombe sous le sens.
Il suffit de comparer l’histoire de l’intercommunalité dans l’ouest de la France à celle qui se construit dans le sud-est : on obtient des résultats différents parce que l’histoire et la géographie y sont différentes.
On peut, grâce à l’intelligence collective, chercher des solutions et parfois même prendre le temps d’en trouver, comme celles que nous appelons de nos vœux sur l’eau et l’assainissement, sur l’urbanisme.
Nous disons non pas que nous refusons les intercommunalités – bien au contraire ! –, mais que nous en voulons qui fonctionnent dans les meilleures conditions possible.
Il faut que l’intercommunalité fasse l’objet d’une acceptation collective. Les solutions intermédiaires, comme celles qui ont été prévues dans la loi Engagement et proximité en matière d’urbanisme ou d’eau et d’assainissement, sont, je vous le dis ex abrupto, des ersatz de solutions. Elles produisent l’effet inverse à celui qui était recherché, c’est-à-dire l’acceptation du fait intercommunal.
De deux choses l’une, monsieur Kerrouche : soit on dit que l’intercommunalité doit se faire « en rang par deux » et à marche forcée, auquel cas on instaure des règles sur lesquelles on ne reviendra plus jamais – je considère que ce n’est pas la meilleure méthode –, soit on accepte une certaine souplesse, parce qu’elle est justifiée.
La question de l’eau en montagne ne se pose pas dans les mêmes termes que dans les zones de plaine. De même, les questions d’urbanisme diffèrent selon les territoires. Je ne vais pas évoquer chaque fois le cas particulier de mon département, car je ne suis pas là pour plaider sa cause, mais le fait est que des communes sont passées d’enveloppes à ouvrir à l’urbanisme de 60 ou 70 hectares à 5, 3 ou 2 hectares. C’est un peu rude pour le maire !
Il faut donc donner un peu de souplesse aux maires, c’est là une aspiration collective et commune à l’ensemble des sénatrices et des sénateurs. Il faut laisser le temps au temps et faire preuve d’intelligence. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Ceux qui défendent le fait communal ne sont pas opposés à l’intercommunalité. Simplement, ils considèrent que les intercommunalités sont au service des communes. C’est bien ainsi qu’elles ont été conçues.
La nouvelle carte de l’intercommunalité a été construite de deux manières, madame la ministre. Certaines intercommunalités résultent de la volonté des communes. C’est le cas de l’intercommunalité Pays basque. Je n’étais pas le seul défenseur de cette grande intercommunalité ; ce sont les communes et les maires de ces territoires qui l’ont voulue.
D’autres intercommunalités, y compris dans mon département, ont été décidées par le préfet, qui est passé outre le refus des communes, lesquelles ont été forcées de les rejoindre. Dans ces intercommunalités, des oppositions, des blocages et des séquelles subsistent.
Le droit à construire, la possibilité de développer sa commune et de lui donner un avenir font partie des sujets qui reviennent dans ces intercommunalités nées de cette carte imposée.
Voilà pourquoi je pense que le sujet n’est pas derrière nous. Considérer que tout va bien, c’est faire l’autruche. Le droit à construire représente, pour les maires, l’avenir même de leur commune.
M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour explication de vote.
M. Philippe Folliot. Mon cher collègue Éric Kerrouche, je ne suis pas du tout d’accord avec votre argumentation et avec votre vision des choses.
Stigmatiser, comme vous l’avez fait, les petites intercommunalités et dire que parce qu’elles sont petites, elles ne sont pas fonctionnelles, c’est un non-sens ! C’est contraire à la réalité. Une structure ne fonctionne pas mieux parce qu’elle est plus grande, plus grosse, plus imposante.
Vous dites que ces petites intercommunalités ne permettent pas de répondre aux besoins des populations. Pour ma part, j’ai été président d’une intercommunalité de huit communes et 3 200 habitants située dans une zone de moyenne montagne où la densité de population, il est vrai, était de 15 habitants au kilomètre carré. Cette intercommunalité a réalisé en moins de dix ans de nombreux équipements structurants : un centre d’accueil pour personnes handicapées vieillissantes, une structure d’accueil et d’hébergement d’entreprises recevant des artisans, un musée – le musée du protestantisme. Elle a réhabilité un château pour en faire un pôle culturel et ouvert un parc aquatique pour le tourisme.
Après l’adoption de la loi NOTRe, nous avons été contraints de nous marier avec une intercommunalité dont une partie du territoire est située en zone périurbaine. Notre petite intercommunalité, pauvre peut-être, mais intégrée, avait élaboré le premier PLUi du département. Cette autre intercommunalité, certes plus importante, dont les territoires sont totalement différents des nôtres, œuvre avec des logiques différentes et fait face à des difficultés liées au caractère périurbain d’une partie de son territoire. Or il est difficile de concilier dans un PLUi les problématiques d’un territoire rural de montagne enclavé et celles d’un territoire en partie périurbain.
Nous sommes victimes des choix qui ont été faits et d’une volonté idéologique de massification. Il n’a pas été tenu compte des réalités des territoires et de la liberté des élus et des collectivités de s’organiser à l’échelle la plus pertinente pour eux.
M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote.
M. Charles Guené. Afin que Mme la ministre ne continue pas à instrumentaliser mes silences, permettez-moi de m’expliquer. (Rires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Cela étant, Mme la ministre n’a pas totalement tort. Si je suis pour la souveraineté des communes, j’estime que dans certains domaines il faut raisonner à l’échelle du territoire. Pour cela, il est vrai que ce sont souvent les hommes et les femmes de ces territoires qui font la différence et qu’il est difficile d’avoir une vue générale pour tout l’Hexagone.
Je ne dis pas que nous menons un combat d’arrière-garde, mais il faut savoir que plus de la moitié des communes discutent en ce moment d’un PLUi, ou l’ont validé, et que près de 90 % des communes ont un SCoT. Il faut avoir ces données à l’esprit.
C’est la raison pour laquelle j’ai voté précédemment dans le sens de la commission et du Gouvernement. Pour autant, il ne s’agit pas d’un blanc-seing pour les intercommunalités. Je voterai donc le présent amendement, à condition qu’il corresponde réellement à son objet, ce dont je ne suis pas certain.
Je pense qu’il ne convient pas de retirer aux communes, à la sauvette, des droits en matière d’urbanisme. Il faut que cela soit officiel et passe par une instruction complète.
Mais, je le redis, je ne suis pas certain que l’objet de l’amendement corresponde bien à son texte.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. En effet ! C’est ce que j’ai dit.
M. Charles Guené. Je suis en tout cas favorable à l’objet de l’amendement, que je voterai.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. Il y a deux manières de voir les choses : soit nous continuons de faire les grincheux, soit nous prenons conscience que personne ici ne remet en cause l’intercommunalité, laquelle a été inventée par les élus il y a longtemps. Avant même l’instauration de l’intercommunalité telle que nous la connaissons, les élus ont en effet créé, de leur propre initiative, des syndicats pour faire ensemble ce qu’ils ne pouvaient faire seuls.
Toutefois, cher Éric Kerrouche, on peut tout de même parler de ce qui ne fonctionne pas en matière d’intercommunalité ! Ce que nous demandons, c’est de la souplesse. Vous connaissez comme moi des mariages forcés ou contraints. Des élus qui ont connu des baisses de dotations considérables à une époque que vous connaissez bien ont couru après une échelle plus grande : plus on était grand, plus on touchait de dotations.
Aujourd’hui, nous disons que l’intercommunalité doit être heureuse et bien vécue. Très sincèrement, personne aujourd’hui ne conteste le fait qu’un PLUi doit être élaboré à une échelle permettant la coordination. Dans ma communauté de communes, qui comprend soixante-sept communes, je ne fais pas de PLUi, non parce que je suis récalcitrante, mais parce que nous avons un SCoT tellement coercitif qu’un PLUi ne se justifie pas.
Je pense que l’avenir et le développement d’une commune reposent sur l’urbanisme. Les communes ont besoin de maîtriser cette compétence, par exemple pour faire admettre à l’intercommunalité que leur école ou un certain nombre de services en dépendent.
Mes chers collègues, cessons donc cette querelle des Anciens et des Modernes. Un peu de souplesse nous rendrait les uns et les autres localement plus intelligents, car nous aurons moins peur. Détendons-nous sur ce sujet, dans cet hémicycle et dans les territoires ! Les choses fonctionneront ainsi beaucoup mieux…
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. J’ai cosigné cet amendement, précisément – je réponds à Charles Guené – pour que la diminution des droits à construire passe, comme indiqué dans l’exposé des motifs, par une révision du PLU, et non par une simple modification. L’élu de base aura peut-être du mal à faire la différence, mais nous, nous la faisons, et nous savons de quoi il retourne.
Je profite de cette occasion pour répondre à Mme la ministre. J’en suis bien d’accord, il ne faut surtout pas opposer les petites intercommunalités aux grandes, ou les intercommunalités rurales aux urbaines, etc.
Le problème est que, bien souvent, les maires des petites communes avec lesquels nous discutons ne connaissent pas les différentes amodiations ouvertes par la loi, notamment les dispositions issues de la loi Engagement et proximité auxquelles vous faisiez référence.
Pardonnez-moi d’être aussi trivial, mes chers collègues, mais nombre de maires m’ont indiqué qu’au sein de leur communauté de communes, ils n’avaient pas d’autre choix que de la « fermer » ! Non pas que leur commune serait particulièrement mal gérée ; seulement, ils ne se sentent pas à même d’intervenir face à des « sachants », des personnes qui disposent d’une expertise technique.
Nous devons donc faire simple. Les citoyens demandent de plus en plus à leur maire à quoi il sert s’il n’a même plus la maîtrise de son « POS » (plan d’occupation des sols), terme encore fréquemment utilisé… Les maires doivent connaître les possibilités à leur disposition.
Ainsi que je l’ai indiqué précédemment, il faut redonner à la cellule de base qu’est la commune le pouvoir de mettre en œuvre, dans le cadre d’une intercommunalité consentie, les orientations souhaitées par le maire et son conseil municipal.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 30.
L’amendement n° 1087 rectifié ter, présenté par M. Féraud, Mmes de La Gontrie et Blatrix Contat, MM. Bourgi et Cozic, Mme Harribey, MM. Lozach et Jacquin, Mme Jasmin et MM. P. Joly, Lurel, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Stanzione, est ainsi libellé :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – En application de l’article 37-1 de la Constitution, pour une durée de quinze ans à compter de la promulgation de la présente loi, sur le territoire des collectivités mentionnées à l’article L. 5217-1 du code général des collectivités territoriales, de la métropole d’Aix-Marseille-Provence, de la métropole de Lyon et de la métropole du Grand Paris, il est mis en place une expérimentation visant à promouvoir un développement urbain harmonieux et l’atteinte d’objectifs sociaux et environnementaux ambitieux, conformément aux paragraphes II à IV du présent article.
II. – Dans les zones urbaines des territoires mentionnés au I, dans le but de promouvoir la réalisation des objectifs environnementaux, sociaux, fonctionnels et de protection du patrimoine fixés par une orientation d’aménagement et de programmation, le règlement du plan local d’urbanisme peut déterminer les conditions dans lesquelles l’atteinte de ces objectifs est justifiée à l’occasion d’une demande d’autorisation d’urbanisme, y compris par la production de certificats émis par l’autorité compétente à l’occasion de l’autorisation d’une ou de plusieurs autres opérations dont les caractéristiques dépassent un ou plusieurs de ces objectifs.
Le cas échéant, les certificats mentionnés au premier alinéa du présent II sont publiés au fichier immobilier ou inscrit au livre foncier.
III. – Au plus tard un an avant la fin de l’expérimentation, le Gouvernement transmet un rapport au Parlement, aux fins d’évaluation, assorti des observations des collectivités sur le territoire desquelles l’expérimentation a été mise en œuvre.
IV. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation, notamment les modalités d’instruction des autorisations d’urbanisme ainsi que les conditions d’émission et de validation des certificats mentionnés au premier alinéa du II.
La parole est à M. Rémi Féraud.
M. Rémi Féraud. Cet amendement vise à mettre en place une expérimentation dans les trois plus grandes métropoles de France, c’est-à-dire Aix-Marseille-Provence, Lyon et le Grand Paris, de nouvelles règles d’appréciation pour les droits à construire s’agissant des externalités positives des projets.
Aujourd’hui, le respect du règlement du PLU ou du PLUi s’apprécie au niveau soit de la parcelle, soit de parcelles immédiatement contiguës ou à proximité immédiate. Cela inclut des objectifs de performance environnementale, sociale, fonctionnelle et de protection du patrimoine. Une telle limite empêche de plus en plus de projets d’aboutir alors que les objectifs sont ambitieux.
Nous proposons donc une expérimentation pour permettre aux communes ou aux établissements intercommunaux d’autoriser l’appréciation mutualisée, sur une surface plus grande, des externalités positives des projets de construction. Un projet qualitatif qui dépasserait les objectifs fixés en la matière se verrait attribuer une cotation qui pourrait être transférée et bénéficier à un autre projet situé sur une autre parcelle de la commune ou de l’intercommunalité, évidemment à l’appréciation des élus et dans le respect des prescriptions du règlement applicable pour toutes les constructions sur une parcelle donnée.
L’objectif est de permettre à des projets plus vertueux de voir le jour, tout en respectant les spécificités qui concernent chaque parcelle et chaque projet.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. L’expérimentation proposée dans l’amendement me semble très peu cadrée, et son objectif n’est, pour le moins, pas très clair.
De quoi les porteurs de projets devront-ils justifier ? Le texte de l’amendement fait mention d’« objectifs environnementaux, sociaux, fonctionnels et de protection du patrimoine », ce qui est à la fois vaste, peu précis et très généraliste. En outre, les PLU, le règlement et la loi fixent déjà les règles selon lesquelles les permis seront instruits. Je ne vois pas à quel objectif supplémentaire il serait fait référence dans votre amendement.
Enfin, la durée de quinze ans me semble excessive pour une expérimentation, d’autant qu’aucune évaluation intermédiaire n’est prévue durant cette période. De plus, la création d’une étape additionnelle avant la délivrance des permis me paraît très peu opérante. Au demeurant, les permis sont de toute manière instruits pour vérifier le respect de règles en matière d’urbanisme, d’environnement ou encore de patrimoine.
Par conséquent, la commission des affaires économiques émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le droit constant, c’est-à-dire le code de l’urbanisme, donne déjà la possibilité au PLU de fixer des objectifs ambitieux à atteindre dans des secteurs qu’il est libre de délimiter, par exemple des règles relatives aux espaces libres.
Vous proposez d’établir une cotation des projets assortie de certificats attestant de l’atteinte des objectifs à l’occasion des autorisations d’urbanisme. Ces certificats pourraient être produits dans le dossier de permis de construire d’un autre projet moins bien noté pour que celui-ci soit autorisé. Je trouve cela un peu compliqué. Cela crée une nouvelle procédure en phase d’instruction qui ne va pas dans le sens de la simplification et qui, je le crois, présente un fort risque de contentieux.
Je suis donc vraiment défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour explication de vote.
M. Rémi Féraud. Cet amendement est en effet insuffisamment cadré. C’est d’abord un amendement d’appel, pour répondre à des problématiques spécifiques.
Aujourd’hui, dans les zones très denses, des règles peu encourageantes pour les décideurs ou les investisseurs empêchent l’aboutissement d’un certain nombre de projets porteurs de création de logements ou d’équipements, mais aussi d’externalités positives allant parfois au-delà des objectifs. Le surplus d’externalités positives n’étant pas transférable, un certain nombre de projets ne voient pas le jour alors qu’ils auraient pu être encouragés.
Je vais retirer mon amendement, puisqu’il est insuffisamment cadré. Comme le soulignait Mme la ministre, le dispositif proposé pourrait même présenter des risques de dérives. C’est d’ailleurs pour cela que l’expérimentation était limitée. Au demeurant, la mesure pourrait concerner toutes les métropoles, et pas seulement les trois plus grandes.
Cet amendement d’appel existe parce qu’il y a une attente forte des élus, notamment – je le sais – de la métropole du Grand Paris, pour que le Gouvernement prenne l’initiative de dispositions susceptibles de favoriser les projets vertueux allant au-delà des objectifs et porteurs d’externalités positives. Ces projets doivent être encouragés, valorisés et, éventuellement, transférés.
Mais je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 1087 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 1412, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 321-4 du code du tourisme, il est inséré un article L. 321-… ainsi rédigé :
« Art. L. 321-…. – L’exploitant d’une résidence de tourisme, située en zone de montagne au sens de l’article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, peut céder à titre gratuit le droit conféré par l’article L. 145-46-1 du code de commerce à un établissement public y ayant vocation, à une société d’économie mixte, à une société publique locale ou à un opérateur agréé par l’État.
« Peuvent être agréés à cette fin les opérateurs dont la mission principale contribue au développement de l’offre touristique en montagne par la maîtrise foncière de locaux à usage commercial et leur mise en location par l’intermédiaire d’un bail commercial ou d’un mandat de longue durée. La décision d’agrément tient compte de ses compétences en matière de gestion immobilière, commerciale et foncière, de sa soutenabilité financière, en particulier sa capacité à porter du foncier, des baux commerciaux et des mandats de long terme ainsi que de son organisation adoptée pour prévenir les conflits d’intérêts et garantir son indépendance. Un décret en conseil d’État précise la procédure d’agrément et les modalités d’application du présent article.
« Le cessionnaire du droit conféré par l’article L. 145-46-1 du code de commerce s’engage à ce que les biens acquis soient exploités en qualité de résidence de tourisme pour une durée de neuf ans au moins.
« La cession doit être constatée par écrit, à peine de nullité.
« Elle produit effet à l’égard du propriétaire du local lorsqu’elle lui a été signifiée ou lorsqu’il en prend acte.
« À compter de cette prise d’effet, l’information due par le propriétaire au locataire en vertu des premier, troisième et quatrième alinéas de l’article L. 145-46-1 du même code doit être délivrée au cessionnaire dans les mêmes conditions.
« Le droit cédé s’exerce par le cessionnaire selon les modalités prévues à l’article L. 145-46-1 dudit code. »
La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cet amendement, que j’avais annoncé précédemment, vise à soutenir l’activité touristique en zones de montagne, en apportant une réponse à la diminution progressive du nombre de logements mis en location saisonnière.
C’est un véritable fléau dans nos zones de montagne depuis des années. Dans de nombreux cas, cette disparition est due à la vente du logement à un particulier qui ne le mettra plus en location. Bien entendu, la crise de la covid et la crise économique dans les stations de montagne n’ont fait qu’aggraver les choses.
Le phénomène a évidemment un effet négatif sur l’activité économique. Un logement mis en location rapporte en moyenne 17 000 euros à un territoire, contre 3 000 euros lorsque ce n’est pas le cas.
Les conséquences sont également très fortes sur nos paysages de montagne et, bien évidemment, sur la consommation foncière. Faute de logements en location dans le parc existant, de nouvelles constructions sortent de terre pour répondre à la demande.
Dans le cadre du plan Avenir montagnes annoncé par le Premier ministre le 27 mai, nous avons travaillé avec l’ensemble des acteurs concernés, c’est-à-dire l’Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM), l’Association nationale des élus de la montagne (ANEM), le Syndicat national des résidences de tourisme, la Fédération des entreprises publiques locales et Domaines skiables de France. Après concertation avec eux, nous proposons cet amendement, qui vise à céder le droit de propriété des gestionnaires de résidences à des opérateurs fonciers chargés d’acheter des biens vendus pour les remettre en location en passant par le gestionnaire.
Ces foncières récupéreront petit à petit plusieurs biens, facilitant les prises de décision d’entretien ou de rénovation thermique de ces résidences. Cela permettra de lutter contre un autre fléau : la déqualification des résidences. Bien entendu, cela doit être étroitement encadré pour éviter tout risque de dérive.
Seulement deux types d’acteurs pourront intervenir : d’une part, des sociétés d’économie mixte (SEM) ou des entreprises publiques locales (EPL) contrôlées par les collectivités territoriales ; d’autre part, des acteurs privés agréés par l’État. Nous avons souhaité encadrer très étroitement l’agrément pour vérifier l’intérêt général de la structure et prévenir les risques de collusion entre la foncière et les autres acteurs de la montagne, en particulier les gestionnaires. Cela permettra à des commerçants ou des hôteliers de la station de monter de petites structures locales. La procédure d’agrément devra associer des élus locaux, à travers la commission d’agrément qui sera mise en place.
Je vous propose donc d’adopter cet amendement, qui, encore une fois, a véritablement été négocié avec tous les acteurs de la montagne.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Madame la ministre, loin de moi l’idée de contester que la pérennisation des résidences touristiques dans les zones de montagne est un enjeu important pour conserver la vitalité économique et l’attractivité de ces territoires. La multiplication des résidences secondaires – tous ceux qui habitent à proximité de stations de sports d’hiver le savent bien – est souvent vécue difficilement par les territoires concernés.
Cependant, à ce stade, votre amendement soulève un certain nombre de questions.
D’abord, le droit de priorité est aujourd’hui attribué par la loi au locataire pour qu’il puisse accéder à la propriété du local qui est son gagne-pain. Ouvrir une brèche dans ce principe, c’est-à-dire une possibilité de délégation de ce droit, entraînerait, me semble-t-il, un dévoiement du dispositif. On peut craindre que cela n’ouvre la porte à des pressions sur les exploitants historiques de ces hébergements pour les faire renoncer à leurs droits et les céder.
En outre, la finalité même du droit de priorité délégué n’est pas clairement définie. La rédaction prévue ne mentionne pas de finalité d’intérêt général, par exemple pour bénéficier du droit. La durée de l’engagement à maintenir l’activité de la résidence est de neuf ans seulement, ce qui me paraît très faible au regard de la dérogation ainsi consentie.
Un autre élément nous inspire des réserves. La mesure pose question au regard du droit de la concurrence. Comme vous l’avez d’ailleurs indiqué, le dispositif permettrait à des opérateurs privés commerciaux à but lucratif de bénéficier de quasi-prérogatives d’ordre public, d’ordinaire réservées à la commune ou à l’EPCI, pour acquérir en priorité de tels biens. Je crains que cela ne crée d’énormes foncières privées susceptibles d’acquérir peu à peu la propriété de toutes les résidences de tourisme à la ronde, et ce potentiellement au détriment de l’écosystème touristique local.
À ce stade, rien ne nous garantit qu’il n’y ait pas d’opérateurs privés complètement étrangers au territoire sur lequel ils voudront récupérer ces propriétés. Nous pourrions ainsi voir des opérateurs alsaciens – je n’ai rien contre eux – venir tout récupérer en Savoie ou en Haute-Savoie. Ce serait, je le crois, de nature à porter atteinte à l’écosystème touristique local.
Enfin, nous n’avons reçu aucune forme d’assentiment des autorités locales. Vous avez parlé d’une concertation, en indiquant que cela s’effectuerait avec les élus locaux. Mais rien ne le garantit dans l’amendement. Vous l’avez affirmé oralement ; il n’y a rien d’écrit.
Même si le sujet mérite un véritable débat et s’il y aurait peut-être de quoi avancer, nous n’avons pas eu le temps de mener des travaux plus approfondis ou de procéder à des auditions. Convenez-en, cela pourrait faire l’objet d’un texte spécifique.
Par conséquent, la commission des affaires économiques émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.
M. Cédric Vial. Les « lits chauds » sont effectivement un sujet majeur dans toutes les stations de montagne, et pas seulement depuis quelques mois.
Certes, comme vous l’avez souligné, madame la ministre, depuis quelques mois, la situation a été rendue d’autant plus difficile que des exploitants n’ont pas pu verser les loyers aux propriétaires. Dans certains cas, cela les a mis en difficulté, permettant à certains propriétaires de remettre sur le marché et donc de vendre ces lits chauds, qui ont ainsi été transformés en lits froids.
Vous soulevez la question de la foncière. Il y a effectivement une attente forte dans les stations. Ce n’est sans doute pas le seul sujet. À l’instar de Mme le rapporteur pour avis, je pense qu’un encadrement s’impose. Nous n’avons pas d’autre solution aujourd’hui. Au-delà d’un certain niveau de mitage dans un bâtiment en raison de la vente de certains logements directement à des propriétaires – les lits chauds deviennent alors des lits froids –, le seuil d’exploitation de l’ensemble de la résidence de tourisme n’est plus atteint. Cela crée des difficultés importantes.
Nous avons donc besoin de nouveaux outils. Il peut s’agir du rachat par l’exploitant des biens dont le propriétaire veut se débarrasser, ce qui permet de garder des lits chauds dans le système d’exploitation, ou d’une intervention publique. En l’occurrence, cette intervention publique relève rarement de la mairie, mais plutôt d’une société publique locale (SPL), d’une SEM ou, éventuellement, d’une foncière qui pourrait être créée et dans laquelle l’opérateur public pourrait être intégré.
Cela répond à une demande des stations, mais, si on lance le dispositif, il faudra tout de même l’organiser et l’encadrer. Je suis donc très favorable, à titre personnel, à une telle mesure. J’en ai discuté avec nos collègues de l’ANMSM et de l’ANEM, qui la réclament. Cela faisait partie des engagements pris par le Gouvernement dans le cadre du plan Avenir montagnes.
Encore une fois, à l’instar de Mme le rapporteur, je pense qu’il faudra encadrer le dispositif. Mais ce serait dommage de se priver d’un tel outil.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Madame la rapporteure pour avis, la foncière est obligée de remettre en location auprès du gestionnaire. Elle doit avoir pour mission essentielle la mise en location.
Le droit de priorité est purement de droit privé, contrairement au droit de préemption. Ce n’est pas une prérogative de puissance publique.
Par ailleurs, vous avez relevé que les élus n’étaient pas mentionnés dans le texte de l’amendement. Effectivement. Nous avions prévu de les citer dans le décret. Mais si vous préférez qu’ils soient évoqués dans la loi, je n’y vois aucun inconvénient, d’autant qu’ils sont largement associés à la démarche ; j’ai pris soin d’énumérer toutes les associations qui réclament une telle mesure.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ose vous demander d’adopter cet amendement, qui pourra être amélioré dans le cadre de la navette. Je rejoins M. le sénateur Vial : le vote de cet amendement serait un signe adressé à l’ensemble des élus de la montagne.
J’ignore si vous vous rendez, comme moi, au congrès des élus de la montagne. La semaine dernière, je suis allée au congrès des élus des villes touristiques, à Enghien-les-Bains. Tous les élus de la montagne étaient là. Ils attendent vraiment des décisions en faveur de la montagne, notamment sur la question des lits froids. Certes, ce phénomène n’est pas nouveau, M. Vial l’a souligné, mais il a tendance à se multiplier, avec de fortes conséquences économiques.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Les arguments qui ont été avancés me semblent tout à fait intéressants, et nous pouvons les partager.
Madame la ministre, nous sommes visiblement dans une relation de confiance où nous nous disons tout. Vous avez évoqué à deux reprises la navette parlementaire sur ce texte, dont le Sénat a eu le privilège d’être saisi en premier puisqu’il s’agit d’un projet de loi relatif aux collectivités territoriales.
Nous sommes toujours dans l’attente de connaître, me semble-t-il – je peux me tromper –, la date à laquelle le texte sera inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Cette information nous permettrait de caler une méthode de travail sur les différents dispositifs, évidemment en concertation avec vous. Avez-vous une date à nous communiquer ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Monsieur le sénateur, je me souviens de ce que certains affirmaient voilà quelques mois. Le projet de loi, disait-on alors, ne serait jamais inscrit à l’ordre du jour du Sénat. Pourtant, il l’a été…
J’ignore à ce stade à quelle date l’Assemblée nationale examinera ce texte. Ce que je sais en revanche, c’est que, depuis le commencement de nos débats, nous travaillons dans un très bon état d’esprit. Nous ne sommes pas obligés de nous opposer sur tout ! Et travailler dans un bon état d’esprit, cela facilite une inscription rapide à l’ordre du jour de l’autre assemblée.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Madame la ministre, nous aspirons également à une inscription rapide, à la rentrée parlementaire, du projet de loi à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. J’ai aussi pris bonne note de vos engagements.
Certes, je pense qu’à ce stade, le dispositif proposé dans l’amendement doit être mieux encadré et que des évolutions rédactionnelles s’imposent pour sécuriser le dispositif. Mais j’ai entendu l’intervention de notre collègue Cédric Vial. Il y a également des stations de montagne et de sports d’hiver dans mon département ; j’avais dressé les mêmes constats pendant la crise sanitaire, ayant été saisie des mêmes difficultés.
Je vais donc émettre un avis de sagesse sur l’amendement, tout en exhortant le Gouvernement à en modifier la rédaction. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 30.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je remercie vivement Mme la rapporteure pour avis, ainsi que les membres de la Haute Assemblée. Je pense que nous venons de faire un pas important. Je m’engage évidemment à vous associer aux évolutions rédactionnelles à venir.
M. le président. L’amendement n° 193 rectifié, présenté par M. Brisson, Mme Canayer, MM. Joyandet, Burgoa, Reichardt et Pellevat, Mmes Deromedi et Belrhiti, MM. Rietmann, Perrin, D. Laurent, Courtial, Vogel, Panunzi, Cadec et Bascher, Mmes Raimond-Pavero et Garriaud-Maylam, M. Mouiller, Mme Drexler, MM. Piednoir, Lefèvre et Laménie, Mmes Imbert et F. Gerbaud, M. Sido, Mmes Bourrat et Lassarade, MM. Calvet, Duplomb et J.M. Boyer, Mmes M. Mercier, Schalck et Berthet, MM. Meurant et de Legge, Mme Muller-Bronn, M. Pointereau, Mme Dumas, MM. Babary, Bouloux, Saury, Belin, Chevrollier, Sautarel, Charon, Bonhomme, Genet, H. Leroy, Gremillet, C. Vial et Rapin, Mme Di Folco et MM. Houpert et Klinger, est ainsi libellé :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le quatrième alinéa de l’article L. 611-2 du code du patrimoine est ainsi modifié :
1° Après les mots : « mandat électif national ou local », sont insérés les mots : « à raison d’une par département de la région » ;
2° Après les deux occurrences des mots : « des représentants », il est inséré le mot : « départementaux ».
La parole est à M. Max Brisson.
M. Max Brisson. Cet amendement vise à mieux ancrer les commissions régionales du patrimoine et de l’architecture (CRPA) dans les territoires en introduisant une dimension départementale.
Dans les faits, ces commissions ne comptent pas nécessairement de membres titulaires d’un mandat électif ou de représentants d’associations ou de fondations issus du département où se trouve le projet pour lequel un recours a été formulé.
La composition de ces commissions les éloigne des territoires et des élus. L’article L. 611-2 du code du patrimoine dispose que la CRPA « comprend des personnes titulaires d’un mandat électif national ou local, des représentants de l’État, des représentants d’associations ou de fondations ayant pour objet de favoriser la connaissance, la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine et des personnalités qualifiées ».
Une telle situation d’éloignement des territoires, accrue par la refonte de la carte régionale, est source de difficultés dans les relations entre les élus locaux et les unités départementales de l’architecture et du patrimoine (UDAP).
Cet amendement tend donc à prévoir que la commission est composée d’au moins un élu local ou national par département de la région et des représentants départementaux d’associations ou de fondations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Aujourd’hui, la composition des CRPA est définie par décret. Ces structures comprennent vingt-sept personnes, dont neuf représentants de l’État, six élus, six représentants des associations et six personnalités qualifiées. La composition est donc déjà très large.
Vous proposez d’augmenter encore la taille de ces commissions. Par exemple, dans une région comme la Nouvelle-Aquitaine, qui compte douze départements, la composition de la CRPA passerait ainsi, au minimum, à près de cinquante personnes. Je doute véritablement qu’un format aussi élargi permette de travailler efficacement et dans la proximité. Cela aurait plutôt tendance à diluer encore la représentation de certains territoires en affaiblissant considérablement la part des élus.
Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur cet amendement. Nous privilégions plutôt l’aspect opérationnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. J’ai beau lire et relire l’objet et le texte de l’amendement, je ne vois pas où il est écrit que je voudrais augmenter le nombre de membres de ces commissions ! Nous voulons simplement que leur composition tienne compte des départements.
Nous avons eu précédemment un débat sur les intercommunalités XXL et le sentiment d’aspiration des élus. Il est probable que la même impression de dessaisissement existe au sein des départements face aux grandes régions.
Je vais retirer mon amendement ; j’aurai d’autres occasions de revenir sur le sujet. Mais, pour une fois, je n’ai pas été très convaincu par les arguments de Mme la rapporteure pour avis.
M. le président. L’amendement n° 193 rectifié est retiré.
Article 30 bis (nouveau)
Le titre II du livre III du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° À la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 321-1 :
a) Les mots : « créés avant le 26 juin 2013 » sont supprimés ;
b) Les mots : « non membres de ces derniers dont le territoire est concerné » sont remplacés par les mots : « membres desdits établissements publics fonciers locaux et concernés » ;
2° Le premier alinéa de l’article L. 324-2 est ainsi modifié :
a) À la cinquième phrase, après le mot : « fonciers » est inséré le mot : « locaux » ;
b) Il est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le représentant de l’État ne peut fonder son refus sur l’existence d’un établissement public foncier d’État actif à proximité du périmètre de l’établissement public foncier local qu’il est envisagé de créer. »
M. le président. L’amendement n° 1211, présenté par Mme Estrosi Sassone, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
1° Au début
Supprimer le mot :
À
2° Après les mots :
l’article L. 321-1
insérer les mots :
est ainsi modifiée
II. – Alinéa 6
Après le mot :
fonciers
insérer le mot :
, il
III. – Alinéa 7
Remplacer les mots :
Il est complété par
par les mots :
Est ajoutée
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Cet amendement, que je présente en mon nom propre, est rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Les modifications rédactionnelles introduites en commission soulèvent des difficultés juridiques. Mais nous aurons l’occasion d’y revenir plus tard.
J’émets un avis de sagesse favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 30 bis, modifié.
(L’article 30 bis est adopté.)
Article 30 ter (nouveau)
Le chapitre IV du titre II du livre III du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° L’article L. 324-2-1 B est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « doté de la compétence en matière de programme local de l’habitat » sont remplacés par les mots : « à fiscalité propre » ;
b) Au second alinéa, les mots : « compétents en matière de programme local de l’habitat » sont remplacés par les mots « à fiscalité propre » ;
2° L’article L. 324-2-1 C est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « sous réserve qu’il soit compétent en matière de programme local de l’habitat, » sont supprimés ;
b) Au troisième alinéa, les mots : « compétent en matière de programme local de l’habitat, ou si l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre auquel une commune appartient devient compétent en matière de programme local de l’habitat, » sont supprimés. – (Adopté.)
Article 30 quater (nouveau)
I. Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° L’article L. 213-9 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des cinq premiers alinéas de l’article L. 145-46-1 du code de commerce ne sont pas applicables à l’occasion de l’exercice du droit de préemption sur ce bien. » ;
2° Après le premier alinéa de l’article L. 213-11, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des cinq premiers alinéas de l’article L. 145-46-1 du code de commerce ne sont pas applicables à l’occasion de l’aliénation d’un bien sur le fondement de l’alinéa précédent. »
II. Le sixième alinéa de l’article L. 145-46-1 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il n’est pas non plus applicable lorsqu’il est fait application du droit de préemption institué par les chapitres Ier et II du titre Ier du livre II du code de l’urbanisme ou à l’occasion de l’aliénation d’un bien sur le fondement de l’article L. 213-11 du même code. »
M. le président. L’amendement n° 1212, présenté par Mme Estrosi Sassone, est ainsi libellé :
1° Alinéa 1
Rédiger ainsi cet alinéa :
I. – Le chapitre III du titre Ier du livre II du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
2° Alinéa 3
Supprimer les mots :
dispositions des
3° Alinéa 5
a) Supprimer les mots :
dispositions des
b) Remplacer les mots :
sur le fondement de l’alinéa précédent
par les mots :
en application du premier alinéa du présent article
4° Alinéa 6
Remplacer les mots :
par les
par le mot :
aux
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Cet amendement, que je présente en mon nom propre, est rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires économiques.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Avant de passer au vote sur l’article 30 quater, je tenais à féliciter notre rapporteur pour avis Dominique Estrosi Sassone, qui a travaillé de front sur le projet de loi Climat et résilience et sur le présent projet de loi, en particulier sur le volet SRU.
Elle l’a fait, comme à son habitude, avec le talent que nous lui connaissons. Je souhaite l’en remercier vivement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)
M. le président. Mes chers collègues, nous en revenons aux articles 27, 27 bis, 27 ter, 27 quater et 29, ainsi qu’aux amendements portant articles additionnels qui leur sont rattachés, précédemment réservés.
Article 27 (précédemment réservé)
I. – Le code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° Le 1° de l’article L. 1123-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce délai est ramené à dix ans lorsque les biens se situent dans le périmètre d’une grande opération d’urbanisme au sens de l’article L. 312-3 du code de l’urbanisme ou dans le périmètre d’une opération de revitalisation de territoire au sens de l’article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation ; ces dispositions ne font pas obstacle à l’application des règles de droit civil relatives à la prescription » ;
2° L’article L. 2222-20 est ainsi modifié :
a) La première phrase du premier alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Lorsque la propriété d’un immeuble a été transférée ou attribuée, dans les conditions fixées aux articles L. 1123-3 et L. 1123-4, à une commune, à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou, à défaut, à l’État, au Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres ou au conservatoire régional d’espaces naturels agréé au titre de l’article L. 414-11 du code de l’environnement, le propriétaire ou ses ayants droit sont en droit d’en exiger la restitution. Il en est de même lorsqu’en application du 1° de l’article L. 1123-1 du présent code et de l’article 713 du code civil, la propriété d’un bien a été transférée aux personnes publiques mentionnées à la première phrase du présent alinéa moins de trente ans à compter de l’ouverture de la succession. » ;
b) Au troisième alinéa, les mots : « depuis le point de départ du délai de trois ans mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 1123-3, » sont remplacés par les mots : « , apprécié depuis le point de départ du délai de trois ans mentionné aux 2° et 3° de l’article L. 1123-1 pour les immeubles mentionnés aux mêmes 2° et 3°, ».
II. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le second alinéa de l’article L. 2243-1 est supprimé ;
2° La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 2243-3 est ainsi modifiée :
a) Le mot : « organisme » est remplacé par les mots : « établissement public de coopération intercommunale ou de tout autre organisme » ;
b) Sont ajoutés les mots : « , soit de la création de réserves foncières permettant la réalisation de telles opérations » ;
2° bis (nouveau) L’article L. 2243-4 est ainsi modifié :
a) Au troisième alinéa, après le mot : « habitat », sont insérés les mots : « dont est membre la commune » ;
b) Au 3°, les mots : « la collectivité publique ou l’organisme » sont remplacés par les mots : « le bénéficiaire ».
3° Le 2° de l’article L. 6213-7 est ainsi rédigé :
« 2° Deuxième partie : titres Ier, II, à l’exception de l’article L. 2224-12-3-1, chapitre III du titre IV et titre V du livre II ; pour l’application du chapitre III du titre IV, la référence au code de l’urbanisme est remplacée par la référence à la réglementation applicable localement ; »
4° Le 2° de l’article L. 6313-7 est ainsi rédigé :
« 2° Deuxième partie : titres Ier, II, chapitre III du titre IV et titre V du livre II ; pour l’application du chapitre III du titre IV, la référence au code de l’urbanisme est remplacée par la référence à la réglementation applicable localement ; ».
III. – Le 1° de l’article L. 1123-1 du code général de la propriété des personnes publiques, dans sa rédaction résultant du 1° du I du présent article, est applicable, dès l’entrée en vigueur de la présente loi, aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 2007 et non encore partagées.
M. le président. L’amendement n° 1411, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
1° Remplacer les mots :
ou dans le périmètre
par le signe :
,
2° Après les mots :
de l’habitation
insérer les mots :
, dans une zone de revitalisation rurale au sens de l’article 1465 A du code général des impôts ou dans un quartier prioritaire de la politique de la ville au sens de l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine
La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cet amendement vise à étendre la possibilité d’acquérir des biens sans maître au bout de dix ans, et non de trente ans, aux zones de revitalisation rurale (ZRR) et aux quartiers prioritaires de la politique de la ville. J’avais pris l’engagement de déposer un tel amendement après la sollicitation des rapporteurs et de plusieurs d’entre vous.
Cette mesure est plébiscitée par de nombreux élus, mais il nous faut rester particulièrement prudents. Une telle exception doit en effet être justifiée par la poursuite d’une politique d’intérêt général pour rester conforme au droit de propriété. Ainsi, il n’est pas souhaitable de généraliser le délai de dix ans à tout le territoire national ou de multiplier les zones concernées, afin de ne pas fragiliser juridiquement le dispositif.
Choisir les ZRR est justifié : en effet, ces zones qui couvrent 14 900 communes ont un très grand besoin de revitalisation. La requalification du bâti existant est un levier majeur pour assurer le développement économique, en limitant l’artificialisation des sols. Tout ce qui peut y contribuer est d’intérêt général. L’enjeu est le même dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Je précise que les analyses se poursuivent pour éviter toute inconstitutionnalité. Il n’est pas exclu que nous devions préciser davantage le périmètre d’extension. En attendant, je vous propose de voter cet amendement en l’état, tout en vous indiquant très clairement que nous sommes sur une ligne de crête, dont nous ne devons pas dévier, sous peine de subir une censure constitutionnelle en fin de parcours.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Je rends grâce à Mme la ministre pour cette proposition, car de nombreuses communes sont concernées par cette question des biens abandonnés, aussi appelés « biens sans maître ».
Avec cet amendement, le Gouvernement propose d’élargir le champ des zones dans lesquelles un délai de dix ans sera suffisant pour qualifier un bien de « bien sans maître ».
Nous aurions souhaité que cette disposition soit généralisée, mais ce n’est pas possible en l’état du droit de propriété.
J’ajoute qu’un amendement qui allait dans ce sens a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution, parce qu’une commune qui aurait récupéré un tel bien au bout de dix ans et procédé à des transformations pour un motif d’intérêt général aurait pu être dans l’obligation d’indemniser pour le dommage subi un héritier qui se serait fait connaître après ce délai, mais dans la période de trente ans habituellement reconnue.
Voilà pourquoi je remercie vraiment Mme la ministre, tout en regrettant, je le répète, que nous ne puissions pas aller plus loin. L’avis est donc extrêmement favorable !
M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour explication de vote.
M. Philippe Folliot. Je suis très favorable à cet amendement ; j’en avais moi-même déposé un qui allait dans le même sens.
La rédaction actuelle du texte, qui ne vise que les périmètres des grandes opérations d’urbanisme et des opérations de revitalisation de territoire, est trop restrictive. De ce fait, nombre de communes pourtant concernées, en particulier dans les zones rurales, auraient été écartées de cette mesure. Grâce à cet amendement, elles pourront faire jouer le délai de dix ans.
Il arrive fréquemment dans les ZRR que des biens soient abandonnés depuis longtemps, parfois des décennies. Cela ne signifie pas forcément qu’on n’en connaît pas les propriétaires, mais ce sont souvent des biens en indivision, dont personne ne veut prendre la responsabilité, assumer les charges d’entretien, ou payer les impôts locaux y afférents.
La nouvelle rédaction proposée permettra aux maires des zones rurales d’agir plus facilement, mais je voudrais ajouter que vous avez eu raison, madame la ministre, d’inclure les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
En tout cas, cette mesure est attendue par les élus locaux : le délai de trente ans est trop long ; le ramener à dix ans est un gage d’efficacité qui permet de répondre aux aspirations de nombreux maires.
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.
M. Bernard Delcros. Je voudrais à mon tour saluer le dépôt de cet amendement.
Très souvent, on oppose l’urbain et le rural, alors que ces territoires ont parfois des problématiques communes. C’est le cas de la question des biens sans maître et cet amendement répond aux attentes à la fois des zones rurales et des zones urbaines.
Je connais bien les zones de revitalisation rurale et je sais que, dans ces vastes étendues, beaucoup de villages ont des biens en situation d’abandon. Dans ces cas, attendre trente ans pour agir n’est pas acceptable, alors que les stratégies de développement et de revitalisation ont des échéances de dix ou quinze ans. Ramener ce délai à dix ans répond parfaitement aux besoins de ces territoires ruraux et je suis très heureux que cette mesure s’applique de manière symétrique dans les zones urbaines.
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. Je trouve qu’il s’agit d’une très bonne proposition. Elle permettra de résoudre un certain nombre de problèmes outre-mer, où les questions d’habitat indigne sont très prégnantes.
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Je mets aux voix l’article 27, modifié.
(L’article 27 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 27 (précédemment réservés)
M. le président. L’amendement n° 777 rectifié bis, présenté par MM. Maurey, L. Hervé, Longeot et Capo-Canellas, Mmes Vermeillet, Billon et Morin-Desailly, MM. Cigolotti, Delahaye, Delcros, Hingray et P. Martin, Mme Vérien, MM. Levi, Bonnecarrère et Détraigne, Mme Férat, MM. Laugier et Henno, Mme Sollogoub, MM. Mandelli, Daubresse, Pellevat, Houpert et Kern, Mme Drexler, M. Bouchet, Mme Garriaud-Maylam, MM. de Nicolaÿ, Vogel, Pointereau et Meurant, Mme Dumont, MM. Courtial et Chasseing, Mme Dumas, MM. Wattebled, Lefèvre, Sautarel, Rietmann, Perrin, B. Fournier, Genet, Bonhomme, Le Nay, Duffourg, Tabarot, Laménie et Paccaud et Mme Schalck, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2213-25 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après les mots : « non bâti », sont insérés les mots : « ou une partie de terrain non bâtie » ;
2° Au deuxième alinéa, après les mots : « du terrain », sont insérés les mots : « ou de la partie du terrain ».
La parole est à M. Bernard Delcros.
M. Bernard Delcros. L’article L. 2213-25 du code général des collectivités territoriales permet au maire d’imposer à un propriétaire privé, pour des motifs environnementaux, de remettre en état un terrain non bâti situé à l’intérieur d’une zone d’habitation et, si rien n’est fait, d’engager les travaux à la charge de ce dernier. Tel qu’il est rédigé, cet article limite ce pouvoir aux terrains non bâtis.
Toutefois, les désagréments et les risques liés au mauvais entretien d’un terrain sont les mêmes qu’il s’agisse d’une parcelle bâtie ou non bâtie. Il conviendrait donc que cette disposition puisse également s’appliquer aux terrains sur lesquels se trouve un immeuble.
La jurisprudence a déjà admis cette possibilité, mais elle mérite d’être explicitée dans la loi afin de sécuriser juridiquement le maire. Tel est l’objet du présent amendement, proposé par Hervé Maurey.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Cet amendement apporte une solution qui va beaucoup intéresser les communes : elles pourront obliger les propriétaires à entretenir des terrains qui ne le sont pas, même quand une partie du terrain est bâtie.
L’avis est donc très favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 27.
L’amendement n° 697 rectifié bis, présenté par MM. Delcros, Bonnecarrère et Henno, Mme Sollogoub, MM. Canévet, Kern et Le Nay, Mme Vermeillet, MM. Longeot et Détraigne, Mmes Guidez et Vérien, MM. Levi, P. Martin et L. Hervé, Mmes Morin-Desailly, Billon et Saint-Pé, M. Moga et Mme de La Provôté, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre II du livre Ier de la première partie du code général de la propriété des personnes publiques est complété par une section ainsi rédigée :
« Section…
« Modalités de cession
« Art. L. 1123-…. – Lorsqu’un bien sans maître, acquis par une collectivité territoriale, est une parcelle forestière située en zone de montagne et s’il est ultérieurement cédé, il est prioritairement proposé aux propriétaires des parcelles forestières contiguës à celle cédée, quelle que soit la surface de la parcelle considérée.
« Le premier alinéa ne s’applique pas lorsque l’acquéreur porte un projet où l’intérêt en matière de développement des services ou de l’économie locale est démontré. »
La parole est à M. Bernard Delcros.
M. Bernard Delcros. Cet amendement vise à créer un outil supplémentaire pour lutter contre le morcellement de la forêt privée.
Aujourd’hui, la forêt privée est extrêmement morcelée, notamment en zone de montagne, ce qui rend difficile une gestion cohérente et durable des massifs forestiers. Cet amendement prévoit que, lorsqu’une commune est devenue propriétaire d’une parcelle forestière à la suite d’une procédure de bien sans maître, elle peut céder cette parcelle en priorité aux propriétaires des parcelles forestières riveraines.
J’ai associé cet amendement à la question de l’acquisition des biens sans maître parce que j’avais déposé un autre amendement visant à faciliter l’acquisition par les collectivités de tels biens. Malheureusement, cet amendement a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. L’idée de cet amendement est tout à fait intéressante, mais le mode opératoire proposé pose un certain nombre de questions.
Ainsi, il y aurait un droit de priorité pour les propriétaires voisins de parcelles forestières situées en zone de montagne, dès lors que ce bien a été acquis selon la procédure relative aux biens sans maître. Cela crée une inégalité dans le droit de propriété en fonction de la procédure d’acquisition d’un bien : un voisin serait prioritaire, mais seulement si la parcelle a été acquise en tant que bien sans maître.
Seconde difficulté, il est prévu que cette possibilité d’acquisition soit encore facilitée en cas de projet d’intérêt collectif. Nous avons déjà évoqué cette notion : il peut s’agir, par exemple, d’un département qui a besoin d’une parcelle pour réaliser une route – nous sommes bien en l’occurrence sur un projet d’intérêt général porté par une collectivité.
Dans cet amendement, l’intérêt collectif relèverait de l’appréciation portée par une commune sur le projet d’un propriétaire privé, ce qui est plus contestable.
Pour résumer, je dirai que l’idée est pertinente, mais que le dispositif ne fonctionne pas en pratique. Je crois qu’il est important de continuer de travailler sur ce sujet afin de lutter contre le morcellement forestier, qui est un véritable problème.
C’est pourquoi, sauf si Mme la ministre nous donne des arguments différents, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. René-Paul Savary. C’est un droit de préférence !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Oui, vous avez raison, il s’agit d’un droit de préférence.
Il bénéficie aux propriétaires de terrains boisés, quel que soit le statut du vendeur, mais seules les ventes de terrains de moins de quatre hectares sont concernées.
Cette disposition ne peut évidemment pas résoudre tous les problèmes, mais elle m’amène, en plus des raisons avancées par Mme la rapporteure, à donner un avis défavorable sur cet amendement : il est partiellement satisfait par le droit en vigueur et il pose d’importantes questions juridiques.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Le morcellement de la propriété forestière est une question importante, qui dépasse, il est vrai, le cadre du présent projet de loi.
Je peux vous dire, madame la ministre, que l’application du droit de préférence est assez difficile dans la vraie vie.
D’une part, il est limité aux terrains de moins de quatre hectares. D’autre part, il s’agit souvent, notamment en zone de montagne, de petits propriétaires qui ont hérité d’une parcelle, éventuellement de plusieurs, et qui la vendent. Et lorsque le nombre de propriétaires voisins est égal ou supérieur à dix, ce qui est fréquent, la publicité foncière se fait par voie d’affichage, si bien qu’aucun voisin n’est en fait au courant que la parcelle limitrophe à la leur est en vente. Voilà comment les choses se passent ! Il faut donc réfléchir à cette procédure parce qu’elle pose encore un certain nombre de problèmes.
Autre difficulté, il s’agit souvent, notamment en zone de montagne, de biens mixtes – il y a aussi un morceau de prairie ou de pré – et, dans ce cas, le droit de préférence ne s’applique pas.
Vous le voyez, le droit de préférence peut assez facilement être contourné. C’est pourquoi je trouve que cet amendement est particulièrement important. Il permet de lutter contre le morcellement de la propriété forestière et va dans le sens d’une meilleure gestion des forêts, ce qui contribue par excellence au développement durable. Voilà pourquoi je le soutiens.
Pour autant, il ne me semble pas pertinent de limiter son champ aux zones de montagne. D’autres territoires forestiers sont également concernés par la question des biens sans maître.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Absolument !
M. René-Paul Savary. Mme Loisier, qui est présidente du groupe d’études du Sénat « Forêt et filière bois », pourrait vous en parler. J’irais donc volontiers jusqu’à sous-amender la proposition de Bernard Delcros.
En tout cas, il me semble important d’adopter cet amendement pour que les discussions puissent se poursuivre durant la navette parlementaire, ce qui permettrait d’améliorer la mise en œuvre sur le terrain du droit de préférence en cas de vente de propriétés forestières.
M. le président. Monsieur Delcros, l’amendement n° 697 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Bernard Delcros. Je suis sensible aux arguments qui ont été avancés par les uns et par les autres et je le retire, monsieur le président.
Cependant, j’insiste sur le fait que nous devons absolument travailler sur ce sujet. Ainsi, limiter le droit de préférence aux terrains de moins de quatre hectares ne répond pas aux problèmes qui se posent. L’effet de seuil est beaucoup trop important, tout en étant peu pertinent.
Tous les outils qui permettent de lutter contre le morcellement de la forêt privée doivent être mis en œuvre. C’est une question d’intérêt général, si nous voulons gérer nos forêts de manière cohérente et durable. Et pour cela, nous devons disposer de parcelles suffisamment grandes, à l’échelle des massifs quand c’est possible.
Même si je retire cet amendement aujourd’hui, je continuerai de travailler sur ce sujet et je vous présenterai une autre proposition à l’occasion de l’examen d’un prochain texte.
M. le président. L’amendement n° 697 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 1622 rectifié bis, présenté par MM. Mohamed Soilihi, Richard, Haye, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 323-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « ainsi que les locataires ou preneurs commerçants, artisans, industriels ou agricoles » sont supprimés ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les locataires ou preneurs commerçants, artisans, industriels ou agricoles d’un bien dont la propriété a été transférée à une entité expropriante en vertu d’une ordonnance d’expropriation ou d’une cession amiable postérieure à une déclaration d’utilité publique ou, lorsqu’il en a été donné acte par le juge, antérieure à cette déclaration, peuvent obtenir le paiement d’un acompte dans les mêmes conditions. »
La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.
M. Thani Mohamed Soilihi. L’article L. 323-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 6 novembre 2014 relative à la partie législative du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, prévoit le principe du versement d’une avance sur indemnité d’expropriation ou d’éviction, due au propriétaire ou au locataire affecté par l’opération, dès lors que les parties n’ont pu s’accorder sur le montant de l’indemnisation et que la juridiction de l’expropriation est saisie pour le fixer.
L’objectif de cette mesure est de faciliter la réinstallation des personnes dans de nouveaux locaux, afin de limiter l’aggravation de leurs préjudices.
Ce texte, en ce qu’il conditionne l’octroi d’un acompte à l’existence d’une ordonnance d’expropriation, exclut de fait du bénéfice de cet acompte les locataires de biens qui ont fait l’objet d’une cession amiable postérieurement à une déclaration d’utilité publique. Cette inégalité a motivé la censure de l’article par le Conseil constitutionnel et son abrogation à compter du 1er mars 2022.
En conséquence, afin de respecter les principes constitutionnels et de s’assurer que chaque locataire est en mesure de retrouver au plus vite et dans les meilleures conditions un nouveau logement ou un nouveau local commercial, le présent amendement propose une nouvelle rédaction de l’article L. 323-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique. Celle-ci permettrait d’étendre à tous les locataires la possibilité d’obtenir un acompte, peu importe que le transfert de propriété du bien qu’ils louent ait eu lieu en vertu d’une cession amiable ou d’une ordonnance d’expropriation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Cet amendement vient corriger une disposition qui a fait l’objet d’une censure par le Conseil constitutionnel. Il tend à restaurer l’égalité entre les locataires de biens, que ces derniers aient fait l’objet d’une expropriation ou non.
L’avis est donc favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 27.
L’amendement n° 1086 rectifié ter, présenté par M. Féraud, Mmes de La Gontrie et Blatrix Contat, MM. Bourgi et Cozic, Mme Harribey, M. Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly, Lozach, Lurel et Pla, Mme Préville et MM. Redon-Sarrazy et Stanzione, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 17-1 de la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, il est inséré un article 17-… ainsi rédigé :
« Art. L. 17-…. – Lorsqu’elles sont nécessaires à la préparation, à l’organisation et au déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, et nonobstant l’article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales, le maire peut prendre les décisions relatives à la délivrance et à la modification des titres d’occupation des dépendances du domaine public prévus à l’article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques.
« Le maire informe sans délai et par tout moyen les conseillers municipaux des décisions prises sur le fondement de l’alinéa précédent dès leur entrée en vigueur. Il en rend compte également à la prochaine réunion du conseil municipal. »
La parole est à M. Rémi Féraud.
M. Rémi Féraud. Cet amendement vise à adapter les règles d’occupation du domaine public dans le cadre de la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
En effet, les communes auront à délivrer et à adapter, très probablement dans des délais contraints, des titres d’occupation du domaine public, notamment dans le cadre des enceintes sportives dédiées aux jeux.
Il est donc proposé que, dans ce cadre, les maires aient la compétence pour délivrer de plein droit ces titres d’occupation du domaine public, sans devoir passer préalablement par une délibération du conseil municipal. Le contrôle de légalité sera naturellement exercé par le préfet et l’amendement prévoit en outre l’information « au fil de l’eau » des membres des assemblées délibérantes et la possibilité pour elles de modifier ces attributions par une délibération, sous réserve bien sûr des droits acquis par les bénéficiaires.
Dans le prolongement de la loi de 2018, cet amendement tend à mettre en place une disposition qui est nécessaire dans le cadre de la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Cet amendement vise à ce que soit déléguée aux maires la compétence d’attribuer des autorisations d’occupation du domaine public en lien avec les jeux Olympiques.
J’entends votre préoccupation, mon cher collègue. Toutefois, des engagements ont été pris dans le contrat de ville hôte signé avec le Comité international olympique (CIO) pour l’obtention des jeux et une traduction en a été faite dans la loi de 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Je m’interroge sur la compatibilité de votre demande avec cette loi. C’est pourquoi je sollicite l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je ne suis pas favorable à cet amendement parce qu’il tend, en fait, à dessaisir le conseil municipal de ses attributions.
En effet, le conseil municipal peut tout à fait adopter une délibération générale pour permettre aux maires de délivrer les titres d’occupation du domaine public qui sont nécessaires aux jeux Olympiques.
Je comprends l’esprit de votre proposition, mais il me semble préférable de passer par une délibération du conseil municipal.
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Défavorable, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1086 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 150 rectifié, présenté par M. Mizzon, Mme Vermeillet, MM. Henno, Masson, Kern, Canévet, Calvet et Bouchet, Mme Sollogoub, M. Longeot, Mme Belrhiti et MM. Chauvet, P. Martin et L. Hervé, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation à l’article L. 103 du livre des procédures fiscales, les informations nécessaires à l’acquisition des biens visés par cet article sont communicables aux collectivités territoriales.
La parole est à M. Jean-Marie Mizzon.
M. Jean-Marie Mizzon. Cet amendement concerne la procédure d’acquisition des biens sans maître.
Lorsqu’un maire veut mettre en œuvre cette procédure, qui est prévue par l’article L. 1123-1 du code général de la propriété des personnes publiques, il doit démontrer que l’impôt foncier correspondant n’est pas payé depuis au moins trois ans.
Pour cela, le maire doit se tourner vers la direction générale des finances publiques, qui se retranche quasi systématiquement derrière le secret professionnel.
Par conséquent, le maire n’a pas de réponse et la procédure ne peut se poursuivre. C’est d’ailleurs ce qu’a répondu le ministre en charge des comptes publics, M. Dussopt, à une question que je lui ai adressée : « La procédure d’incorporation des biens présumés sans maître pour les immeubles assujettis à la taxe foncière sur les propriétés bâties ne fait l’objet d’aucune dérogation au secret professionnel. »
Dans ce contexte, cet amendement entend simplifier – un des maîtres-mots du texte que nous examinons depuis plusieurs jours maintenant – la procédure des biens sans maître, en permettant la levée du secret professionnel lorsque – et uniquement dans ce cas – le maire d’une commune interroge les services fiscaux pour savoir si l’impôt a été payé ou non durant les trois dernières années.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Notre collègue Jean-Marie Mizzon pose une question intéressante, mais il me semble que l’administration est déjà censée, en vertu de l’article L. 135 B du code des procédures fiscales, communiquer au maire les rôles généraux des impôts directs locaux, ainsi que le montant de l’impôt non recouvré par redevable.
Nul besoin, par conséquent, d’une simplification, me semble-t-il ; ou alors il faut réveiller celle qui est déjà prévue dans les textes… Peut-être faudrait-il tout simplement rappeler à M. Dussopt que son administration doit communiquer aux maires ces informations.
C’est pourquoi je demande le retrait de cet amendement qui me semble satisfait par le droit existant.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. J’ajoute aux arguments de Mme la rapporteure que, tel qu’il est rédigé, cet amendement ouvre un champ de dérogation très large à la règle du secret professionnel et qu’il n’encadre pas suffisamment la liste des données qui pourraient être communiquées, ce qui présente un réel risque d’inconstitutionnalité.
Comme vient de le dire Françoise Gatel, il serait peut-être intéressant de saisir le ministre en charge des comptes publics pour avancer sur cette question.
M. le président. Monsieur Mizzon, l’amendement n° 150 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Marie Mizzon. Je ne partage pas du tout l’avis de Mme la rapporteure. En effet, il faut montrer soit que l’impôt n’a pas été payé pendant trois ans, soit qu’il n’a pas été payé par un tiers. Or les services fiscaux communiquent uniquement des données anonymes ; on ne peut donc pas les utiliser dans le cas d’espèce.
C’est pourquoi je souhaitais, pour simplifier la vie des élus, singulièrement celle des maires, et uniquement dans le cadre de cette procédure spécifique, qu’une exception au secret professionnel soit ménagée.
La simplification doit finir par triompher ! Aujourd’hui, la seule solution du maire est de saisir la direction générale des finances publiques, mais elle lui répond qu’elle ne peut pas lui fournir d’informations en raison du secret professionnel. Il faut qu’on sorte de ce blocage !
C’est pourquoi je maintiens cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 150 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 27 bis (nouveau) (précédemment réservé)
I. – Après l’article L. 161-6 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 161-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 161-6-1. – Le conseil municipal peut, par délibération, décider le recensement des chemins ruraux situés sur le territoire de la commune. Cette délibération interrompt le délai de prescription pour l’acquisition des parcelles comportant ces chemins.
« L’interruption produit ses effets jusqu’à la délibération arrêtant le tableau récapitulatif des chemins ruraux, prise après enquête publique réalisée conformément au code de l’expropriation pour cause d’utilité publique et selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État. Cette délibération ne peut intervenir plus de deux ans après la délibération prévue au premier alinéa.
« L’interruption est non avenue à l’égard des chemins que la commune aura choisis de ne pas faire figurer au tableau récapitulatif. »
II. – Le délai de prescription pour l’acquisition d’une parcelle comportant un chemin rural est suspendu pendant deux ans à compter de la publication de la présente loi. – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 27 bis (précédemment réservé)
M. le président. L’amendement n° 694 rectifié bis, présenté par MM. Folliot, Bonnecarrère, Henno, Canévet et Kern, Mmes Vermeillet et Doineau et MM. Hingray, de Belenet, Levi, P. Martin, L. Hervé, Moga et Duffourg, est ainsi libellé :
Après l’article 27 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La délibération concernant la vente du chemin rural est dispensée d’enquête publique préalable sauf lorsque l’opération envisagée a pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurées par le chemin. »
La parole est à M. Philippe Folliot.
M. Philippe Folliot. Dans nombre de communes rurales, il existe des chemins ruraux, qui étaient utilisés dans la vie d’avant pour aller d’une ferme à une autre, d’un hameau à un autre, d’une ferme au village, etc. À l’époque, il fallait marcher !
Nombre de communes se trouvent encore aujourd’hui avec des dizaines de kilomètres de chemins ruraux, dont certains n’existent plus – c’est souvent le cas. Certains de ces chemins ont connu une heureuse reconversion en devenant des sentiers de randonnée ; c’est une très bonne chose, dont on ne peut que se féliciter. Mais d’autres ont totalement disparu, parfois enfouis sous la végétation.
C’est pourquoi il serait intéressant, dans un souci de simplification, de faciliter la cession par les communes de ces chemins qui ne sont plus utilisés et qui ne répondent plus à leur vocation originelle.
Une telle cession est aujourd’hui possible, mais la procédure est lourde : il faut par exemple une enquête d’utilité publique qui entraîne des complexités administratives, notamment pour les plus petites communes qui n’ont pas de services administratifs très importants, mais aussi des coûts indirects, parce qu’il faut rémunérer le commissaire enquêteur.
Cet amendement de simplification est donc attendu par les élus. Il tend à prévoir que la délibération concernant la vente d’un chemin rural est dispensée d’enquête publique préalable, sauf lorsque l’opération envisagée a pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurées par ce chemin. Le dispositif est donc suffisamment encadré.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. La question, fort compliquée et parfois même très délicate, des chemins ruraux se pose de façon récurrente. Nous avons tous eu vent d’histoires de famille portant sur un chemin de village que tout le monde a oublié, mais qui est l’objet d’un conflit transmis de génération en génération.
La commission a adopté quelques amendements relatifs aux chemins ruraux, déposés par notre collègue Philippe Bonnecarrère, et visant à reprendre la proposition de loi que le Sénat avait votée en 2015 mais qui n’a pas prospéré jusqu’à son terme.
Vous proposez, cher Philippe Folliot, que l’on se dispense d’une enquête pour la vente d’un chemin rural. Je comprends votre préoccupation. Dans nombre de communes, il y a des chemins ruraux qui semblent n’avoir jamais été empruntés depuis dix ou quinze ans par un piéton, un cheval ou un tracteur. Vous voudriez donc simplifier la procédure de cession.
Toutefois, je le répète, dans les communes rurales, à cause de cette mémoire familiale que l’on s’est transmise, il arrive que surgisse un héritier s’intéressant à l’un de ces chemins.
Je rappelle que la cession de chemins ruraux ne se fait pas à la suite d’une enquête publique compliquée. Il appartient seulement au maire de mettre en demeure publiquement les propriétaires riverains d’acquérir le chemin. Après cette publicité, qui dure un mois, s’il n’y a pas de réponse, le maire procède à une enquête qui dure quinze jours. Cela veut dire que la procédure peut être réglée en un mois et demi, avant que le conseil municipal ne délibère sur le sujet.
Sincèrement, je comprends bien la question. Mais je mets en face de votre souhait légitime de simplification le risque que l’on ferait courir à un maire si jamais il arrivait des Amériques, ou de je ne sais où, un héritier désireux de réveiller soudainement la clause de propriété…
Dans un souci de sagesse, je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Si les chemins ruraux appartiennent au domaine privé de la commune, ils ne peuvent être vendus comme de simples biens privés. Je ne vais pas répéter ce qu’a très bien dit Françoise Gatel, mais pour qu’ils puissent être aliénés, il faut prévoir une enquête. Il s’agit non pas d’une enquête publique au sens du code de l’environnement, mais d’une procédure très simplifiée.
Pour résumer, l’aliénation n’est possible que si le chemin n’est plus affecté à l’usage du public : c’est ce que doit montrer cette enquête.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour explication de vote.
M. Philippe Folliot. J’ai bien entendu, madame la rapporteure, votre injonction motivée par le recours possible d’un lointain cousin d’Amérique… (Sourires.)
Je souscris à votre démonstration et vais retirer l’amendement, d’autant que les textes ont été complétés, comme vous l’avez dit, par des amendements déposés en commission par mon collègue et ami Philippe Bonnecarrère. Je pense que ces modifications vont dans le bon sens.
M. le président. L’amendement n° 694 rectifié bis est retiré.
Article 27 ter (nouveau) (précédemment réservé)
I. – Après l’article L. 161-10-1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 161-10-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 161-10-2. – Lorsqu’un échange de parcelles a pour objet de modifier le tracé ou l’emprise d’un chemin rural, la parcelle sur laquelle est sis le chemin rural peut être échangée dans les conditions prévues aux articles L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques et à L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales. L’acte d’échange comporte des clauses permettant de garantir la continuité du chemin rural.
« L’échange respecte, pour le chemin créé, la largeur et la qualité environnementale du chemin remplacé. La portion de terrain cédée à la commune est incorporée de plein droit dans son réseau des chemins ruraux.
« L’échange des terrains ayant abouti à rétablir la continuité d’un chemin rural ne donne lieu à aucune perception au profit du Trésor. »
II. – L’article L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’échange d’une parcelle sur laquelle se situe un chemin rural n’est autorisé que dans les conditions prévues à l’article L. 161-10-2 du code rural et de la pêche maritime. »
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. – (Adopté.)
Article 27 quater (nouveau) (précédemment réservé)
Dans les conditions prévues à l’article L. 361-1 du code de l’environnement, le département révise le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée pour tenir compte du recensement des chemins ruraux mené par les communes. – (Adopté.)
Article 29 (précédemment réservé)
Après l’article L. 302-2 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 302-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 302-2-1. – Le département peut mettre à la disposition des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui ne bénéficient pas des moyens suffisants pour l’élaboration du programme local de l’habitat une assistance technique dans des conditions déterminées par convention. »
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 17 rectifié est présenté par Mmes Thomas et Chain-Larché, M. Cuypers, Mmes Garriaud-Maylam, Belrhiti, Chauvin, Deromedi et Drexler, M. Burgoa, Mmes Dumont et Puissat et MM. Brisson, Laménie, Cambon, Bascher, J.M. Boyer, H. Leroy, Saury et Husson.
L’amendement n° 35 rectifié bis est présenté par Mme Mélot et MM. Malhuret, Guerriau, Chasseing, Lagourgue, Menonville, Wattebled, Médevielle et Verzelen.
L’amendement n° 413 est présenté par MM. Marie, Kerrouche, J. Bigot et Houllegatte, Mmes Artigalas, S. Robert et M. Filleul, MM. Devinaz et Jacquin, Mmes Préville et Lubin, MM. Jomier, Gillé, Kanner et Bourgi, Mme de La Gontrie, M. Durain, Mme Harribey, MM. Leconte, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 654 rectifié est présenté par MM. Corbisez, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 1140 est présenté par MM. Dantec, Benarroche et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut mettre à la disposition des communautés de communes membres de l’établissement public mentionné à l’article L. 5731-1 du code général des collectivités territoriales auquel il appartient une assistance technique pour l’élaboration du programme local de l’habitat, dans des conditions déterminées par convention. »
La parole est à M. Pierre Cuypers, pour présenter l’amendement n° 17 rectifié.
M. Pierre Cuypers. L’article 29 permet au département d’apporter un appui en ingénierie et en compétences techniques aux communautés de communes qui ne disposeraient pas des moyens suffisants pour élaborer le programme local de l’habitat (PLH).
Nous pensons que cette logique d’alliance des territoires gagnerait à se déployer également entre intercommunalités, dès lors qu’elles appartiennent à un même pôle métropolitain. C’est un amendement de bon sens.
M. le président. L’amendement n° 35 rectifié bis n’est pas soutenu.
La parole est à M. Didier Marie, pour présenter l’amendement n° 413.
M. Didier Marie. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 654 rectifié.
M. Bernard Fialaire. Défendu.
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter l’amendement n° 1140.
M. Thomas Dossus. Pour de nombreuses collectivités locales, l’ingénierie publique pose problème : leurs moyens financiers et humains sont souvent insuffisants pour exercer les compétences qui leur reviennent, et elles sont confrontées à un environnement réglementaire et technique de plus en plus complexe. Leurs besoins en ingénierie ne sont parfois pas pourvus. Par ailleurs, la couverture technique est inégale selon les territoires.
Selon nous, les intercommunalités sont le niveau pertinent de la structuration de l’offre d’ingénierie publique locale. L’article 29 permet au département d’apporter un appui en ingénierie et en compétences aux communautés de communes qui ne disposeraient pas des moyens suffisants pour élaborer le programme local de l’habitat. Dans une logique d’alliance des territoires et d’ingénierie territoriale, cette disposition a du sens et gagnerait à se déployer également entre intercommunalités, dès lors qu’elles appartiennent au même pôle métropolitain.
C’est pourquoi nous proposons que toute intercommunalité membre d’un pôle métropolitain – il en existe aujourd’hui vingt-neuf sur le territoire national, d’une grande diversité et pas toujours constitués autour d’une métropole – puisse aider une autre intercommunalité appartenant au même établissement public en lui apportant une assistance technique adaptée pour l’élaboration du programme local de l’habitat.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Il s’agit d’amendements très œcuméniques, si je puis dire, puisqu’ils sont portés par des collègues issus de groupes politiques différents. Effectivement, c’est une bonne idée qu’un EPCI membre d’un pôle métropolitain puisse faire profiter de son ingénierie.
L’avis est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Ce dispositif est encadré dans les mêmes conditions que celles prévues pour l’assistance du département, à l’exception du critère de l’insuffisance des moyens, qu’il conviendrait d’ajouter pour garantir l’équilibre du dispositif.
Pour cette raison, j’émets un avis de sagesse.
M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.
M. Cédric Vial. Je m’interroge parce qu’à la lecture, non pas de l’exposé des motifs, qui fait référence au pôle métropolitain, mais du texte même de l’amendement, qui permet à une intercommunalité de fournir une assistance technique ou en ingénierie à une autre intercommunalité, je ne retrouve pas la référence au pôle métropolitain.
Je voudrais savoir si ma lecture est la bonne et si vous nous confirmez que le texte permet aussi, en dehors d’un pôle métropolitain, par exemple dans un syndicat mixte, à une intercommunalité d’intervenir pour apporter une aide en ingénierie ou une assistance technique à une autre intercommunalité. Peut-on m’éclairer sur ce point ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je dois examiner plus précisément la question, car je ne voudrais pas donner de fausses informations.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Je vais voter ces amendements identiques, mon groupe ayant déposé l’un d’eux.
J’aimerais attirer l’attention de mes collègues sur le fait suivant. Beaucoup d’intercommunalités ne disposent pas de l’ingénierie pour élaborer leur propre programme local de l’habitat. La délégation sénatoriale aux outre-mer a fait un rapport mettant ce problème en évidence : dans les outre-mer, très peu d’EPCI disposent d’un PLH. Or il faut en avoir un pour pouvoir garantir les emprunts en matière de logement. Nous sommes face à cette aporie.
Je lance donc un appel pour que soit réglé ce problème d’absence de PLH dans les EPCI.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 17 rectifié, 413, 654 rectifié et 1140.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 29, modifié.
(L’article 29 est adopté.)
Demande de priorité
Mme Jacqueline Gourault, ministre. En accord avec la commission des lois, le Gouvernement demande l’examen en priorité du titre VIII du projet de loi, jeudi 15 juillet, à la reprise du soir.
M. le président. Conformément à l’article 44, alinéa 6, du règlement, le Gouvernement demande l’examen en priorité du titre VIII du projet de loi, c’est-à-dire des articles 75 à 83 bis, afin qu’il soit examiné jeudi 15 juillet, à la reprise du soir.
Quel est l’avis de la commission sur cette demande de priorité ?
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. La commission émet un avis favorable sur cette demande de priorité.
M. le président. La priorité est ordonnée.
Nous en revenons au cours normal de la discussion des articles.
TITRE IV
LA SANTÉ, LA COHÉSION SOCIALE, L’ÉDUCATION ET LA CULTURE
Chapitre Ier
La participation à la sécurité sanitaire territoriale
Article 31
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° A (nouveau) Le dernier alinéa de l’article L. 1432-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ses missions sont déterminées par décret, après consultation des associations représentatives d’élus locaux. » ;
1° Au deuxième alinéa de l’article L. 1432-1 et à la première phrase du troisième alinéa de L. 1432-2, les mots : « de surveillance » sont remplacés par les mots : « d’administration » ;
1° bis (nouveau) Au sixième alinéa de l’article L. 1432-2, après le mot : « arrête », insérer les mots : « , après délibération du conseil d’administration, » ;
2° L’intitulé de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre III du livre IV de la première partie est ainsi rédigé : « Conseil d’administration » ;
3° L’article L. 1432-3 est ainsi modifié :
a) Aux premier, septième, huitième, neuvième et avant-dernier alinéa du I, aux premier et avant-dernier alinéas du II et au premier alinéa du III, les mots : « de surveillance » sont remplacés par les mots : « d’administration » ;
a) bis (nouveau) Le quatrième alinéa du I est complété par les mots : « et de leurs groupements » ;
a) ter (nouveau) Le sixième alinéa du même I est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, les représentants visés au 1° ne peuvent disposer de plus de voix que ceux mentionnés au 3°. » ;
b) Le huitième alinéa dudit I est complété par les mots : « et par le président du conseil régional ou son représentant » ;
b) bis (nouveau) Le dixième alinéa du même I est ainsi rédigé :
« Il approuve le projet régional de santé selon des modalités déterminées par voie réglementaire et émet un avis sur le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens de l’agence, ainsi qu’au moins une fois par an, sur les résultats de l’action de l’agence. Il peut se saisir de tout sujet entrant dans le champ de compétences de l’agence. » ;
c) Après le dixième alinéa du même I, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il fixe, sur proposition du directeur général de l’agence, les grandes orientations de la politique menée par l’agence en ce qui concerne la conclusion et l’exécution de conventions avec les collectivités territoriales et leurs groupements pour la mise en œuvre du projet régional de santé. Le directeur général lui transmet chaque année un rapport sur ces conventions. » ;
d) L’avant-dernier alinéa dudit I est complété par les mots : « ainsi qu’un rapport relatif aux actions financées par le budget annexe de l’agence » ;
4° À la première phrase du dernier alinéa de l’article L. 1442-2 et à l’article L. 1442-6, les mots : « de surveillance » sont remplacés par les mots : « d’administration ».
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, sur l’article.
M. Dominique Théophile. Le titre IV, dont nous allons entamer l’examen, porte des avancées nécessaires pour assurer un parcours de soins au plus proche des besoins des citoyens.
Au sein du groupe RDPI, nous avons réalisé plusieurs auditions qui nous ont amenés à proposer plusieurs pistes d’amélioration. Malheureusement, plusieurs de ces amendements ont été jugés irrecevables. Je pense notamment à celui qui prévoyait l’obligation de réaliser des projets territoriaux de santé, ainsi qu’à celui qui visait à imposer la prise en compte des conseils locaux de santé mentale (CLSM) dans l’élaboration des projets territoriaux de santé.
Or, dans le cadre de la santé mentale, le besoin d’une meilleure coordination et d’une meilleure collaboration a été mentionné par de nombreux acteurs auditionnés. Il nous semblait que les projets territoriaux de santé étaient des vecteurs pertinents pour assumer cette coopération entre les professionnels de santé d’un territoire, l’agence régionale de santé (ARS) et les élus locaux.
Alors que 15 % des Français souffrent d’un état dépressif et 19 % d’un état anxieux, la santé mentale doit être une priorité. Nous nous félicitons, à cet égard, que les Assises de la santé mentale et de la psychiatrie puissent se tenir en septembre.
Je souhaitais également profiter de l’examen de ce texte de décentralisation pour mettre en lumière un exemple de collaboration efficace dans mon territoire, la Guadeloupe, où le conseil local de santé mentale permet un dialogue entre tous les acteurs clés du domaine.
Ces organisations sont essentielles et il est de notre rôle de parlementaires de nous assurer qu’elles puissent voir le jour sur tous nos territoires pour améliorer la prise en charge de chacun.
M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, sur l’article.
M. Philippe Folliot. Au travers du titre IV de ce projet de loi, qui porte notamment sur la santé, nous abordons une préoccupation majeure pour nombre de nos concitoyens. Sans la santé et sans l’accès aux soins, il n’y a pas de perspectives pour notre ruralité.
Les communes peuvent mener tous les projets de développement possible, en l’absence de médecins et de professionnels de santé sur un territoire, il est impossible d’asseoir une dynamique d’attractivité et de développement.
Se pose alors la question de la démographie médicale, que je souhaitais aborder en présentant un certain nombre d’amendements. Je regrette qu’ils aient été déclarés irrecevables, et ce pour des raisons que je n’ai pas encore tout à fait comprises. Je pense que ce texte aurait été une bonne occasion de parler de ces questions et des difficultés que nous pouvons rencontrer.
Surtout, nous aurions pu nous interroger sur l’échec de toutes les stratégies menées pendant une vingtaine d’années par les gouvernements successifs, qu’ils soient de droite, de gauche, du centre ou d’ailleurs… Ces politiques reposaient toutes sur des mesures incitatives qui n’ont pas montré leur efficacité.
Je regrette plus particulièrement que l’on ne puisse pas aborder la question sous l’angle que je souhaitais : il s’agirait tout simplement de calquer le mode d’installation des médecins sur celui des pharmaciens.
Des pharmacies, il y en a partout sur le territoire national : en secteur rural, en secteur rural très profond, dans les grandes villes, dans les grandes métropoles, dans les quartiers sensibles, dans les villes moyennes, du fait d’un système de quotas permettant de s’installer seulement là où il y a des besoins. Un débat sur cette transposition des règles d’installation aurait représenté une réelle avancée pour nos territoires, quels qu’ils soient.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, sur l’article.
M. Stéphane Sautarel. Je me permets d’intervenir à ce stade de la discussion en rebondissant sur les propos de mon collègue Philippe Folliot. Je partage avec lui, ainsi qu’avec de nombreux collègues, le constat que l’offre de santé et l’offre éducative sont les deux principaux facteurs d’attractivité des territoires.
À cet égard, tout en regrettant que l’on n’ait pas pu examiner les amendements qu’il a évoqués dans le cadre de ce texte, je veux vous faire part d’une initiative parlementaire, à savoir une proposition de loi visant à résoudre ce problème et que nous examinerons, je l’espère, dans un avenir proche.
M. le président. L’amendement n° 701, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Tant que le directeur général de l’ARS pourra décider librement d’imposer les fermetures d’hôpitaux, les propositions de modification de la majorité sénatoriale et du Gouvernement resteront à la marge. Les questions essentielles sont les missions confiées au conseil d’administration, le nombre de représentants des personnels, des usagers et des professionnels de santé, ainsi que leurs prérogatives. En attendant, la démocratie sanitaire demeurera une coquille vide.
Pour l’ensemble de ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Le rapporteur Alain Milon ayant dû partir, je vais être « multicartes » et faire office à la fois de présidente et de rapporteure.
Nous sommes défavorables à la suppression de cet article puisque les évolutions que nous proposons en termes de gouvernance des ARS répondent à un objectif de renforcement de l’ancrage territorial. En supprimant cet article, on reviendrait au statu quo, ce que nous refusons, notamment à la lumière des enseignements de la crise sanitaire.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. L’article voulu par le Gouvernement porte des modifications profondes du fonctionnement des ARS. En effet, il renforce la place de la démocratie sanitaire, en consolidant le rôle de la conférence régionale de la santé et de l’autonomie (CRSA).
Il renforce également le poids des élus dans les territoires en leur accordant un tiers environ des voix au conseil d’administration, ce qui correspond à la part « assurance maladie » et à la part « État ».
Ces modifications sont profondes, enfin, parce que sont mis en débat des sujets plus nombreux et plus importants qu’auparavant.
Il est vrai que le fonctionnement du conseil de surveillance des ARS posait problème. Dans certaines régions, on déplorait une faible participation des collectivités aux instances ; il n’y avait d’ailleurs pas grand-chose à décider, tant le poids de l’État était prépondérant. Nous ouvrons donc ce fonctionnement.
Une autre transformation profonde portée par cet article, que je vous demande de ne pas supprimer, c’est le renforcement considérable du volet départemental des ARS.
Il y a eu un retour d’expérience de la crise sanitaire. Une commission internationale indépendante, présidée par le professeur Didier Pittet, a formulé des conclusions globalement très positives sur l’action menée par les ARS, en appelant notamment à consolider le volet départemental.
Cette évolution avait commencé par l’attribution de fonctionnalités différentes aux délégués départementaux, et le Gouvernement s’était engagé à renforcer en équivalent temps plein les échelons départementaux des agences.
Je tiens à exprimer ma sympathie, mon respect et mon admiration profonde pour les agents des ARS, qu’ils soient agents de bureau ou directeurs généraux, aux niveaux régional ou départemental. Ils ont vu arriver plusieurs déferlantes de vagues covid depuis un an et demi ; certains d’entre eux étaient préparés à gérer une crise sanitaire, d’autres non.
Une crise n’est vécue comme telle que lorsqu’elle apparaît ; sinon, cela veut dire qu’on a réussi à la prévenir et à l’éviter.
La crise a mis en tension tous les systèmes classiques de fonctionnement de nos ARS. Et pourtant, ces agences ont tenu bon et fait face aux vagues. Elles ont été capables d’accompagner les hôpitaux et les cliniques dans la déprogrammation des soins, de renforcer le lien entre le public et le privé, entre le sanitaire et le médico-social, de travailler, en même temps qu’elles géraient la crise, au renforcement de la gouvernance des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), d’y envoyer du matériel de protection et de créer des filières d’hospitalisation ad hoc pour les personnes âgées qui souffraient du covid.
Les ARS ont aussi été capables d’accompagner les établissements dans la reprogrammation des soins, avec des priorisations, tout en continuant de gérer les affaires courantes : mener des politiques de prévention, de dépistage, des politiques curatives ; travailler en lien avec la santé environnementale.
Les agents des ARS ne se sont jamais reposés depuis un an et demi. À aucun moment ils n’ont pu baisser la garde. Même quand les vagues diminuaient et que les hôpitaux se vidaient, leur mission restait prépondérante, tout aussi chargée au quotidien puisqu’il fallait que notre système de santé recommence à fonctionner normalement.
Aujourd’hui, et depuis quelques mois, ces mêmes agences et ces mêmes agents s’occupent de la campagne de vaccination. Ils ont créé les centres, en lien avec les collectivités. Partout où je me rends – je suis sûr que vous y êtes sensibles lorsque vous vous rendez dans ces centres de vaccination –, je rencontre des maires, mais aussi des préfets, qui me disent qu’ils travaillent bien avec leur ARS.
Cette campagne vaccinale, dont nous avons encore grandement besoin, repose énormément sur les épaules des agences, qui sont chargées, en outre, d’aller vers les personnes trop éloignées de la vaccination pour être protégées à ce stade.
Toutes ces missions, elles les remplissent au quotidien.
Au Parlement, plusieurs commissions se sont penchées sur la crise, que ce soit à l’Assemblée nationale ou au Sénat, et un grand préfet – il est un peu considéré comme le « préfet des préfets » – a été conduit à se prononcer sur la question suivante : « Regrettez-vous que les préfets n’aient pas eu la charge de piloter la gestion de cette crise sanitaire dans notre pays ? » Sa réponse fut : « Oh, que non ! » – j’aurais pu faire la même, après une hésitation… Il a ainsi expliqué combien il était satisfaisant de travailler aux côtés d’ARS équipées, avec lesquelles les liens ont été renforcés au quotidien.
Nous continuerons donc d’armer nos agences, mais elles ont besoin de notre soutien, de votre soutien, de votre reconnaissance : ce n’est pas à l’heure où l’on gère une quatrième vague apparente et où l’on finalise une campagne de vaccination sans précédent dans notre pays que l’on doit bouleverser les règles et les fondamentaux des ARS. C’est la demande que je vous adresse, au nom des milliers d’agents qui se démènent sur les territoires au quotidien.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Monsieur le ministre, vous dressez un tableau idyllique de la gestion de cette crise. Je suis désolé, mais il y a tout même eu 100 000 morts en France ! Il ne faudrait pas oublier les difficultés : la mise en route n’a pas été d’une redoutable efficacité. C’est normal, puisque nous étions dans une période de crise que nous n’avions jamais connue ! Dans ces conditions, il est difficile de demander aux personnels d’être prêts.
Cependant, on peut faire le constat global qui a été largement partagé, y compris par le professeur Pittet que vous avez cité : la crise a été plus administrée que gérée.
Mme Marie Mercier. Tout à fait !
M. René-Paul Savary. En conséquence, nous avons été nombreux à rencontrer des difficultés sur le terrain, et vous le savez bien. Vous êtes dans votre rôle, nous sommes dans le nôtre. Ce n’est pas une critique ! Nous voulons simplement que certaines choses ne se reproduisent plus.
Ce que l’on souhaite, monsieur le ministre, c’est non pas supprimer les ARS – cet amendement de notre collègue Cathy Apourceau-Poly est plutôt d’appel ; en tout cas, c’est ainsi que je l’entends –, mais vous faire prendre conscience de l’action territoriale des élus locaux, qui doit être complémentaire de celle du préfet et s’y adosser pour surmonter les difficultés en période de crise.
Aussi, il me paraît tout à fait intéressant de transformer le conseil de surveillance en conseil d’administration, et de s’assurer que des élus participent directement à la direction, par exemple sous la forme d’une coprésidence.
Il faut trouver un système qui associe plus étroitement les collectivités, notamment la région. En effet, même si celle-ci est très grande, son périmètre correspond à celui des ARS. Profitons-en !
Ensuite, il peut y avoir des déclinaisons départementales, parce que les régions travaillent pour la plupart intelligemment avec les départements. Que ce soit au niveau des collectivités territoriales ou de l’ARS, avec ses services décentralisés, les actions peuvent se décliner aux échelons inférieurs.
C’est notamment pour cette raison que nous préconisons, au travers de l’amendement que nous présenterons ensuite, d’instaurer un pouvoir départemental unique pour la gestion de crise. Le but est de tirer expérience des difficultés que nous avons rencontrées sur le terrain pour qu’en cas de récidive – on ne peut, hélas, l’exclure ! –, nous n’y soyons pas confrontés de nouveau.
J’y insiste, il s’agit non pas d’être critique envers l’action des ARS, mais de trouver une solution pour améliorer le dispositif au bénéfice de tous. (Mme Marie Mercier applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous ne remettons pas en cause le rôle des salariés des ARS, monsieur le ministre. Vous louez leur action, c’est bien. Évidemment, personne ne met en doute que ces personnels travaillent !
Cela dit, nous demandons la suppression de l’article parce que celui-ci ne revient absolument pas sur le fonctionnement et sur les missions des ARS, lesquels, comme l’a dit M. Savary, ont été remis en cause. Je l’ai moi-même constaté dans mon département. À aucun moment, les élus n’ont eu droit au chapitre lors de la prise des décisions.
Les élus locaux n’ont, pas plus que les parlementaires, leur mot à dire sur le fonctionnement des ARS et les décisions sanitaires prises sur leur territoire. Aujourd’hui, malheureusement, vous n’allez pas assez loin : vous ne remettez en cause ni le fonctionnement ni l’organisation des ARS. C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 9 est présenté par Mmes Lassarade, Deseyne, Bonfanti-Dossat, Garriaud-Maylam et Belrhiti, MM. Burgoa, Sido, Bazin, Bascher et Courtial, Mme Chauvin, M. D. Laurent, Mme Deromedi, MM. Bonne, Savary et Meurant, Mmes Dumont et Joseph et MM. Genet, Klinger, Charon, B. Fournier et Tabarot.
L’amendement n° 60 rectifié bis est présenté par MM. Chasseing, Guerriau, Decool, A. Marc, Menonville, Wattebled et Médevielle, Mme Mélot, MM. Lagourgue et Capus, Mme Paoli-Gagin, MM. Verzelen et Henno, Mme Sollogoub, M. Joyandet, Mme Vermeillet, MM. Laménie, Pointereau et Longeot, Mmes Jacques et Dumas et MM. Hingray, Nougein, Moga et H. Leroy.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le dernier alinéa de l’article L. 1432-1 est complété par les mots : «, placées sous l’autorité du représentant de l’État dans le département » ;
La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° 9.
M. René-Paul Savary. Nous proposons d’aller un peu plus loin dans l’organisation des ARS avec un renforcement du rôle du délégué départemental, placé sous la responsabilité du préfet.
On sait que c’est déjà possible, mais ce n’est pas ce qui passé au début de la crise, d’après les remontées des territoires dont la commission d’enquête a eu connaissance. Des confrontations ont eu lieu qui pourraient être évitées à l’avenir.
M. le président. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour présenter l’amendement n° 60 rectifié bis.
Mme Micheline Jacques. Défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Il faut savoir que le délégué départemental de l’ARS est le correspondant du directeur général de l’ARS dans le département ; de ce fait, il relève de son autorité.
Quand on a fait le bilan de la crise sanitaire, on a proposé non pas la suppression des ARS, comme une certaine commission d’enquête, mais qu’en cas de crise il y ait un redéploiement d’effectifs dans les délégations départementales. C’est d’autant plus nécessaire dans les grandes régions, où l’on a parfois constaté un éloignement entre la direction de l’ARS et les délégations départementales.
En cas de crise sanitaire, de toute façon, c’est le préfet qui est habilité à prendre la main sur les services de l’ARS, et le délégué doit être en relation étroite avec les élus et l’ensemble des acteurs de santé du département. Dans plusieurs départements, cela se passe d’ailleurs plutôt bien, même en dehors des crises sanitaires.
Il ne nous a cependant pas semblé très efficace, sur le plan opérationnel et pour la cohérence générale de la politique de santé régionale, de créer une rupture de lien hiérarchique entre l’ARS et les antennes départementales.
J’ajoute que la commission a déjà proposé de clarifier les missions de ces délégations, après consultation des élus.
Pour conclure, je veux que vous gardiez à l’esprit ce que nous avons voulu mettre en place. La politique de santé est assurée par l’ARS, son directeur général et le délégué départemental. À côté, sur proposition du rapporteur Alain Milon, nous avons souhaité prévoir une coprésidence du préfet de région et du président de région.
Néanmoins, j’y insiste, il faut garder le lien hiérarchique entre le directeur général de l’ARS et ses antennes départementales. Il y a même parfois, et c’est le cas dans ma région, des référents pour les élus des territoires, désignés par le délégué départemental.
Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. L’avis sera défavorable, pour des raisons largement identiques à celles de la commission, même si nous avons des divergences sur le pilotage du conseil d’administration.
Je me suis rendu compte en tant que parlementaire qu’on pouvait avoir tendance à comparer, en termes de proximité avec les élus, un directeur général d’ARS avec un préfet de département.
Je vais vous faire une confidence : lorsque j’étais député, je ne savais pas toujours le nom de mon préfet de région, mais je connaissais très bien mon préfet de département !
En réalité, on a tendance à demander le même niveau de relation avec notre directeur général d’ARS qu’avec notre préfet de département. Pourquoi ? Parce que l’échelon départemental des ARS n’a pas été suffisamment développé. Il faut se rappeler qu’historiquement, après le vote de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), les premiers délégués départementaux étaient d’anciens directeurs d’ARH (agence régionale de l’hospitalisation), de Ddass (direction départementale des affaires sanitaires et sociales), ou des ingénieurs spécialisés dans l’eau ou l’air.
Ma prédécesseur Agnès Buzyn avait mis en place des emplois fonctionnels pour les délégués départementaux, afin de permettre le recrutement de managers polyvalents. Quand je dis que nous renforçons l’échelon départemental, c’est parce que les délégués départementaux sont parfois très seuls pour, à la fois, conduire leur mission et être en lien avec les élus et les délégués à la lutte contre la pauvreté, si l’on prend l’exemple du champ du social.
J’y insiste, nous allons donc renforcer le volet départemental. Je vous le dis, ce n’est vraiment pas le moment de priver le délégué départemental de son lien hiérarchique privilégié avec son directeur régional. C’est comme si vous me disiez qu’on allait placer le préfet de département sous la responsabilité d’une personne qui ne serait pas le préfet de région. Bon courage pour faire appliquer les politiques publiques dans les territoires…
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je rejoins tout à fait le propos de la présidente Catherine Deroche. J’approuve aussi ce que vous venez de dire, monsieur le ministre. En termes de gouvernance, il n’est pas possible, me semble-t-il, de donner à un délégué départemental un autre patron que le directeur général régional.
En revanche, pour avoir vu le système fonctionner, je peux dire qu’il existe des marges de progrès, ce qui suppose de faire des choix, en termes de profils de ces managers départementaux que sont les délégués auxquels vous avez fait allusion.
Nous n’avons pas suffisamment pris conscience, en particulier au moment de la création des ARS, de l’importance du rôle du délégué départemental auprès non seulement du préfet et des élus départementaux, mais aussi des parlementaires du département. On a pu le constater, le dispositif a très bien fonctionné quand la relation s’est établie entre toutes ces autorités.
Nous souhaitons intégrer cet élément, peut-être en mettant en place une coprésidence du conseil d’administration, avec des pouvoirs d’ailleurs différents – un conseil d’administration ayant un pouvoir budgétaire bien supérieur à celui d’un conseil de surveillance.
Je vous demande, monsieur le ministre, d’être à l’écoute de la commission. Nous avons cherché des solutions qui soient compatibles avec le pouvoir régalien de l’État dans ce domaine mais qui, dans le même temps, respectent les territoires et le pouvoir des élus.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je souscris à l’explication de Catherine Deroche. Nous avons cherché à « donner vie » aux délégations départementales des ARS, en ayant conscience que nous n’étions en train ni d’écrire une loi santé ni de réorganiser la santé dans notre pays au travers de quatre articles de ce texte ; il s’agit simplement de tirer les leçons de la pandémie.
Quand l’épidémie a débuté, un certain nombre de postes de délégués départementaux étaient vacants – il n’y avait tout simplement pas de titulaires. Cela ne risquait pas de bien fonctionner… La situation était très contrastée selon les régions, et dans certaines d’entre elles les délégués départementaux commençaient à entrer vraiment dans la fonction. Cette situation est assez normale : on connaît l’histoire des ARS héritières des ARH, dont la culture traditionnelle n’était pas de partir du terrain et de travailler avec les élus locaux. Il faut que tout cela s’organise.
Certaines ARS ont aussi procédé à une aspiration – c’est le cas dans ma région – au niveau régional des capacités des délégués départementaux, ce qui correspond à une forme de recentralisation.
Nous avons cherché à poser les bases d’une gouvernance mieux partagée. D’où la question de la gouvernance du conseil d’administration des ARS, qui doit assurer une meilleure représentation des différentes parties. Cela signifie qu’il ne faut pas prévoir au niveau réglementaire que certains représentants ont quatre voix quand d’autres n’en ont qu’une s’agissant des délibérations. Il faut mettre en place un dispositif plus égal.
Un texte réglementaire doit fixer le cadre et le contenu des délégations départementales des ARS. Nous n’avons pas la prétention de le faire dans cet hémicycle. Nous devons avancer dans le débat, car nous examinerons plus tard un amendement du Gouvernement supprimant un ensemble de dispositions de la commission.
J’étais content d’entendre le ministre de la santé défendre les mêmes principes que moi, mais il y a un malentendu entre nous sur la traduction concrète de ces principes puisque le Gouvernement a déposé cet amendement.
Nous devons réussir à esquisser ensemble une gouvernance des ARS et de leurs délégations départementales qui soit plus proche des besoins de santé.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. J’ai été sensible aux arguments de Mme la présidente Deroche puisque je les partage, tout comme d’ailleurs une partie de vos arguments, monsieur le ministre. Il est évident que les délégués territoriaux affectés à chaque département doivent être sous l’autorité hiérarchique du directeur général de l’ARS.
Mais on parle aussi d’autorité fonctionnelle. Elle existe bien, et les choses se sont faites naturellement ! On a mis en place des cellules de crise. Dans mon département, par exemple, nous avons bien vu qu’au début le délégué territorial ne connaissait pas forcément bien le territoire, même s’il fait un travail tout à fait intéressant. Il n’avait pas la même connaissance des élus départementaux, et de leur façon de travailler, que le préfet. Au travers de la cellule de crise, nous avons très rapidement pu dire ce que nous avions à dire, et nous avons appris à nous connaître. Il faut tirer des leçons de l’expérience et renforcer l’échelon départemental.
C’est le message que nous avons voulu faire passer au travers de cet article, et je constate que vous êtes d’accord avec nous. En période de crise, l’échelon départemental est tout à fait essentiel. Il faut bien se rendre compte qu’à un moment donné, il ne doit y avoir qu’un seul pilote dans l’avion. Quand il y a une crise, on ne peut pas avoir trente-six chefs ! Ce n’est pas une crise sanitaire ou une crise relevant d’un ministère. Non ! C’est une crise, et elle est pilotée par le préfet.
C’est la raison pour laquelle il était possible d’imaginer qu’en restant sous l’autorité hiérarchique de son directeur régional, le délégué territorial pourrait être placé sous l’autorité fonctionnelle du préfet en période de crise. C’est ce qui se fera naturellement si une nouvelle crise survenait, ce que nous ne souhaitons évidemment pas.
Monsieur le ministre, vous citiez le professeur Pittet : il avait bien montré l’intérêt d’un renforcement de l’échelon départemental. De même, il nous avait signalé qu’en France nous avions des données extraordinaires que nous n’étions pas « foutus » de partager !
Nous avons des données en silos : SI-DEP, le système d’information national de dépistage, n’est pas interopérable avec SI-Vaccination qui n’est pas non plus interopérable avec TousAntiCovid… On se prive d’un croisement de données qui pourrait sauver des gens ! Là aussi, il faut tirer des expériences de la crise pour évoluer et trouver le juste milieu entre la liberté numérique et la liberté physique, qui peut être entravée à certains moments. C’est un autre sujet, qui avait été également relevé par le professeur Pittet.
Je retire bien volontiers l’amendement. Ce qui était important, c’était de rappeler l’importance de l’échelon départemental.
M. le président. L’amendement n° 9 est retiré.
Madame Jacques, l’amendement n° 60 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Micheline Jacques. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 60 rectifié bis est retiré.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, je vois qu’il reste quelques minutes avant dix-huit heures, heure à laquelle la séance doit être levée. J’estime qu’il serait préférable que nous arrêtions la discussion là, car les amendements suivants, dont un du Gouvernement, portant sur l’article 31 sont très importants.
Si les ministres sont d’accord, il vaudrait mieux ne pas commencer cette discussion à la va-vite, en fin de journée, alors que nous devons débattre de ces amendements de fond relatifs à la gouvernance des ARS.
M. le président. Madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, nous devons effectivement arrêter nos travaux à dix-huit heures. Je vous propose donc d’en rester là.
Nous avons examiné 48 amendements au cours de la journée ; il en reste 482.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Je vous souhaite une bonne fête nationale, dans le respect des règles sanitaires !
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Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 15 juillet 2021 :
À dix heures trente :
Suite du projet de loi, modifié par lettre rectificative, relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (procédure accélérée ; texte de la commission n° 724, 2020-2021).
À quatorze heures trente et le soir :
Débat sur l’orientation des finances publiques et projet de loi de règlement, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, du budget et d’approbation des comptes de l’année 2020 (texte n° 699, 2020-2021) ;
Suite du projet de loi, modifié par lettre rectificative, relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (procédure accélérée ; texte de la commission n° 724, 2020-2021).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-sept heures cinquante-cinq.)
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER