M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour la réplique.
Mme Catherine Procaccia. Merci, madame la secrétaire d’État. La direction des routes d’Île-de-France, la Dirif, nous a dit qu’elle fermait la route, tout simplement, lorsqu’une inondation survenait ; qu’elle s’en contente ne serait pas acceptable, et vous nous dites que ce n’est pas le cas.
On observe des problèmes de conception : il est anormal que les armoires électriques soient sous l’eau s’agissant d’un ouvrage moderne et complètement neuf, comme il est anormal qu’il faille attendre les appels à l’aide des maires pour que la Dirif vienne mettre en route la deuxième pompe de la station de pompage !
Nous comptons sur vous et sur votre engagement pour que ces situations cessent de se reproduire. Cette route est quand même la voie principale menant à la Francilienne !
prise en compte des cellules pénitentiaires dans la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains
M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, auteur de la question n° 1658, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement.
M. Frédéric Marchand. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la question de la prise en compte des cellules pénitentiaires dans la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU).
L’article 55 de cette loi de décembre 2000 prévoit l’obligation pour certaines communes de disposer d’un nombre minimal de logements sociaux proportionnel à leur parc résidentiel. Cette disposition arrivant à échéance en 2025, elle fait aujourd’hui l’objet de débats multiples – ainsi dans cette assemblée, dans le cadre de la première lecture du projet de loi 4D.
Il me semble pertinent, sur la base de l’exemple de la ville de Sequedin, dans la métropole européenne de Lille, d’étudier la possibilité d’une évolution qui consisterait à inclure les cellules d’établissements pénitentiaires dans le décompte des logements sociaux des communes.
L’implantation d’une prison est en effet une décision unilatérale de l’État et n’est pas sans conséquence sur la vie de la commune ; les impacts sont importants, notamment, sur son budget. La prison de Sequedin comprend ainsi 368 cellules pour une superficie de 35 000 mètres carrés, sans compter la zone de sécurité qui l’entoure.
En outre, la création d’un établissement pénitentiaire signifie un accroissement de la population communale, puisque les détenus sont comptabilisés par l’Institut national de la statistique et des études économiques dans la population légale de la commune. Cette comptabilisation peut avoir pour conséquence de faire franchir des seuils démographiques impliquant de nouvelles obligations. Ainsi des communes ont-elles été soudain soumises à l’obligation d’atteindre un taux de 25 % de logements sociaux à la suite de la construction d’un tel établissement sur leur territoire.
Accueillir une prison impose par ailleurs à la commune d’assurer un service public auprès des détenus en matière d’état civil.
L’État intègre déjà dans l’inventaire des logements locatifs sociaux un certain nombre de structures collectives d’hébergement spécialisé telles que les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), les logements pour étudiants saisonniers, les centres d’hébergement et de réinsertion sociale, les centres d’accueil de demandeurs d’asile. Les places occupées dans ces structures sont assimilées, en totalité ou partiellement, à des logements sociaux.
La réalisation de logements sociaux est à nos yeux légitime et nécessaire ; il s’agit d’un enjeu essentiel pour permettre l’accès de tous à un logement de qualité tout en favorisant la mixité sociale.
Il est néanmoins indispensable de prendre en compte les spécificités de chaque territoire, pour ce qui est notamment du foncier disponible et des structures collectives installées sur le territoire des communes.
Aussi, madame la secrétaire d’État, je vous remercie de bien vouloir m’indiquer quelles sont les pistes étudiées pour permettre l’intégration, totale ou partielle, des cellules des établissements pénitentiaires dans l’inventaire des logements locatifs sociaux des communes concernées.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Marchand, vous souhaiteriez que le projet de loi 4D prévoie le décompte des cellules d’établissements pénitentiaires comme logements sociaux au titre de l’article 55 de la loi SRU.
Cette loi SRU fixe un taux minimal de logements sociaux dans les territoires qui concentrent les besoins ; elle vise avant tout à développer une offre pérenne de logements locatifs sociaux, accessible de façon universelle à tous les ménages sous plafond de ressources.
Il est donc en tout état de cause évident que la finalité des établissements pénitentiaires ne saurait être assimilée à celle du logement social. Je rappelle que le parc social loge aujourd’hui un Français sur six et que, deux millions de demandeurs de logements sociaux étant en attente, les besoins restent importants.
Le Gouvernement a donc refusé que le dispositif SRU soit ainsi détourné de sa finalité, considérant comme inappropriée la comptabilisation comme logement social de ce type de structures.
Un amendement visant à prendre en compte les établissements pénitentiaires dans ce décompte de la loi SRU a d’ailleurs été rejeté vendredi dernier, vous le savez, dans cet hémicycle – l’avis de la commission et celui du Gouvernement étaient défavorables.
Le titre III du projet de loi 4D, consacré au logement, pérennise le dispositif SRU en conservant ses fondamentaux, lesquels – l’examen du texte par le Sénat l’a montré – font désormais l’objet d’un consensus transpartisan. Il y apporte par ailleurs des adaptations nécessaires pour tenir compte des difficultés de certaines communes, imputables à des spécificités locales. Il importe de maintenir cet équilibre.
Je souhaite rappeler, en outre, que l’installation d’une prison sur le territoire d’une commune induit le versement par l’État de concours financiers complémentaires. L’augmentation de la population recensée par l’Insee sur le territoire d’une commune entraîne notamment une hausse de la part forfaitaire de sa dotation globale de fonctionnement comprise entre 64 et 129 euros par habitant. Une telle augmentation est également susceptible de conduire à la hausse des autres dotations versées à cette commune.
problématique des « ruisseaux couverts » de l’ex-bassin houiller cévenol
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, auteur de la question n° 1490, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
M. Laurent Burgoa. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, après d’importantes pluies, en 2012, la commune de Robiac-Rochessadoule subissait l’effondrement d’un tunnel sur l’un de ses ruisseaux dits couverts.
Cet effondrement a engendré un cratère de quarante mètres de diamètre, emportant une aire de jeux pour enfants, un terrain de tennis et une partie du terrain de football !
Ces tunnels, qui sont présents dans bien d’autres communes gardoises, avaient été édifiés sur des ruisseaux afin de créer des plateformes suffisamment vastes pour y accueillir des infrastructures inhérentes à l’activité minière.
Malheureusement, lorsque les exploitants ont mis fin à leur activité, ils ont suivi une procédure prévue par une réglementation qui ne prenait pas en compte ces ouvrages. Aujourd’hui, personne ne peut ignorer que ces tunnels sont de véritables menaces pour les habitants vivant à proximité, ni que ces ouvrages étaient bel et bien inhérents à l’activité minière.
À la fermeture des mines, nationalisées depuis 1946, l’État a vendu une grande partie de ses terrains. Ainsi les acquéreurs, qu’ils soient publics ou privés, ont-ils hérité, sans être en mesure d’en être parfaitement conscients, des contraintes afférentes au droit du sol. Ni les particuliers ni les communes ne peuvent assumer seuls la prise en charge des dépenses liées à la sécurisation de ces ouvrages gigantesques.
Depuis l’effondrement évoqué, la quinzaine de communes concernées a constitué un syndicat intercommunal à vocation unique (SIVU) ; celui-ci travaille depuis deux ans dans le sens des demandes de l’État – programme d’actions de prévention des inondations, programme d’études préalables –, et ce – je dois le dire – en bonne intelligence avec la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) et l’Office national des forêts (ONF).
Mais il faut désormais des moyens ! De nouvelles catastrophes sont à craindre et le Gouvernement ne pourra pas se dédouaner. Il est urgent que l’État soutienne l’entretien de ces ruisseaux couverts. Madame la secrétaire d’État, prendrez-vous vos responsabilités ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Burgoa, les ruisseaux couverts du Gard, comme vous le soulignez, sont des ouvrages hérités d’anciennes exploitations minières, créés afin d’optimiser la surface disponible et de répondre à des besoins logistiques inhérents à l’exploitation. Constitués de tunnels et de galeries permettant le passage de l’eau, ces ruisseaux couverts sont aujourd’hui, pour certains d’entre eux, fortement dégradés, ce qui peut occasionner, pour les propriétaires de terrains, d’importantes difficultés financières.
Même si les dégradations sont susceptibles de porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens situés en surface, les ruisseaux couverts ne sont pas des installations minières ; ils n’ont donc pas fait l’objet d’un encadrement réglementaire au titre du code minier.
Ces ouvrages relèvent bien de la responsabilité des personnes qui ont souhaité en récupérer la propriété. Ainsi les droits et responsabilités afférents, notamment les travaux de réhabilitation et d’entretien que vous évoquez, reviennent-ils aux actuels propriétaires, souvent des communes, dont les moyens techniques et financiers sont parfois limités.
Compte tenu des faibles ressources financières de ces propriétaires, des modalités d’accompagnement au titre de la solidarité nationale sont mises à l’étude – une participation des crédits du fonds de prévention des risques naturels majeurs, le fameux fonds Barnier, aux travaux de réhabilitation de ces ouvrages est notamment envisageable. Cette aide plafonnée à 30 % des dépenses hors coûts d’entretien est réservée aux travaux jugés indispensables à la mise en sécurité des personnes dans le cadre d’un programme porté par une collectivité territoriale ou un établissement public de coopération intercommunale développant une approche globale du risque.
Nous nous tenons à votre disposition pour évoquer plus avant ces dossiers.
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour la réplique.
M. Laurent Burgoa. Merci, madame la secrétaire d’État, pour votre réponse. Je vous lance une invitation : venez visiter ces lieux. Les communes concernées sont de petites communes dotées de peu de moyens financiers ; elles attendent que l’État intervienne.
Prenons date et venez le plus rapidement possible dans le Gard !
soutien à l’énergie hydrogène
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, en remplacement de M. Louis-Jean de Nicolaÿ, auteur de la question n° 1524, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
M. Rémy Pointereau. Madame la secrétaire d’État, mon collègue Louis-Jean de Nicolaÿ souhaite vous interroger sur la façon dont le Gouvernement compte intervenir au soutien des acteurs ayant fait le choix de développer un hydrogène vert, notamment dans les territoires.
La filière hydrogène, véritable promesse d’énergie décarbonée, a été lancée dès 2018 et développée depuis cette date via un plan hydrogène doté, dans le cadre du plan de relance, d’une enveloppe de 2 milliards d’euros pour la période 2020-2022, auxquels s’ajouteront 7 milliards d’euros en vertu de la trajectoire dessinée jusqu’en 2030.
Dans ce secteur, la France a clairement choisi de développer la filière électrolyse, un objectif ambitieux de 40 gigawatts en 2030 étant défini.
Les territoires, acteurs incontournables d’un maillage efficient, ont pareillement pris le sujet à bras-le-corps ; la région des Pays de la Loire débloque ainsi 100 millions d’euros d’ici à l’année 2030 pour cette filière d’excellence.
Dans le même temps, lesdits territoires ont su miser sur d’autres techniques, complémentaires à l’électrolyse de l’eau, consistant à produire massivement de l’hydrogène vert en utilisant de la biomasse agricole.
Or, pour convaincre, ces procédés nécessitent un accompagnement et une garantie.
Plus performant qu’un électrolyseur et plus rentable qu’une éolienne, le procédé de gazéification à très haute température est duplicable et adaptable partout dans les territoires ruraux.
Par ailleurs, cette pratique, qui n’entre pas en concurrence avec les cultures vivrières, nettoie les sols, purifie les nappes phréatiques, capte massivement du CO2 par photosynthèse et augmente de 10 à 15 % le rendement des cultures suivantes.
Cette technique est un véritable challenge qui nécessite avant tout alliances et synergies entre autorités publiques nationales et locales, entreprises, organisations de la société civile et autres parties prenantes.
Aussi, à l’heure où les différents plans sectoriels de relance gouvernementaux se multiplient, quelle est la place réservée à cette technique importante dans le déploiement stratégique du plan hydrogène vert en France ? Et quelles sont les mesures de soutien qui seront consacrées à la valorisation de cet hydrogène renouvelable et décarboné, répondant pleinement à la « stratégie de l’hydrogène pour une Europe climatiquement neutre » élaborée par la Commission européenne ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Pointereau, vous nous interrogez sur le soutien de l’État à la filière hydrogène vert. Cette mise en œuvre de la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné se fait – vous le savez – à un rythme accéléré, depuis son lancement en septembre dernier, afin d’accompagner les projets sur l’ensemble de la chaîne de valeur.
L’appel à projets « Écosystèmes territoriaux hydrogène », doté de 275 millions d’euros pour la période 2020-2023, rencontre un très vif succès auprès des industriels. Le montant cumulé des aides qui seront versées aux vingt-deux projets déjà sélectionnés dépasse les 156 millions d’euros, pour des investissements dont le montant s’élève à 490°millions d’euros. Quant à l’appel à projets « Briques technologiques et démonstrateurs hydrogène », il a été modifié pour permettre le financement en subventions jusqu’à 75 %.
L’appel à manifestation d’intérêt lancé en 2020 afin d’identifier les initiatives qui pourraient participer à un projet important d’intérêt européen commun sur l’hydrogène a conduit à présélectionner plusieurs projets portant sur le développement de giga-usines de production d’électrolyseurs et de composants clés, sur la mobilité lourde ou sur la décarbonation de l’industrie.
Tout cela représente un montant de 1,5 milliard d’euros d’aides pour la France.
Le projet que vous évoquez plus particulièrement, porté par Quairos Énergies, vise à l’installation d’une usine de gazéification de chanvre sur le territoire de Trangé dans le cadre de l’appel à projets « Briques technologiques et démonstrateurs hydrogène ». Après analyse et au regard du classement des différents candidats, il n’a pas été sélectionné.
Ce projet prévoit notamment de produire du gaz de synthèse destiné à être injecté dans le réseau de gaz naturel. Or, dans un souci constant d’efficacité énergétique, la priorité du Gouvernement a été, et sera, tant que l’hydrogène décarboné sera coûteux à produire, de soutenir son usage direct plutôt que sa transformation en gaz de synthèse.
Par ailleurs, la faisabilité de l’injection sans risque d’un tel gaz de synthèse contenant un taux résiduel d’hydrogène dans un réseau de gaz naturel n’est pas encore démontrée.
Je sais que les gestionnaires de réseaux de gaz naturel réalisent des études à ce sujet. Je tiens d’ailleurs à compléter mon propos : le porteur de projet ayant indiqué que des études de faisabilité et de design étaient en cours concernant la méthanation et la purification notamment, il gagnera à déposer un nouveau dossier de candidature lorsque la maturité technique du projet sera mieux caractérisée. L’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, dite Agence de la transition écologique) avait d’ailleurs déjà partagé ses interrogations avec le porteur à la suite d’une réunion de préprojet, l’invitant à renforcer son dossier en conséquence avant dépôt.
multiplication des projets d’implantation de parcs éoliens dans les territoires ruraux
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, auteur de la question n° 1569, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
M. Stéphane Sautarel. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les inquiétudes soulevées par la multiplication des projets d’implantation de parcs éoliens dans les territoires ruraux, en particulier dans le Cantal.
S’inscrire dans une logique de croissance des énergies renouvelables, j’y suis favorable, bien évidemment. En revanche, le faire de manière durable, harmonieuse et réfléchie serait un gage de confiance adressé aux élus de nos territoires, à nos concitoyens et à l’ensemble des acteurs économiques et agricoles.
Il est toujours paradoxal de voir débarquer à la hussarde des entreprises démarchant nos territoires, exigeant des rémunérations mirobolantes et faisant fi de l’acceptabilité sociale, environnementale et touristique de tels projets, tout cela, pour l’essentiel, sur le dos du contribuable français. Alors que les contraintes d’urbanisme ne cessent de limiter les prérogatives des communes, il semble qu’en l’espèce tout soit possible, en dehors de toute règle !
À écouter le Président de la République attester lui-même que « le consensus autour de l’éolien est en train de nettement s’affaiblir dans notre pays ». Mais sachant que l’on ne donne qu’un avis consultatif aux maires, même si le Sénat propose d’y remédier, et qu’on ignore les citoyens, comment s’étonner de la perte de confiance dans la cohérence de l’action publique territoriale ?
L’exemple du projet d’implantation d’éoliennes sur la commune de Cézens dans le Cantal témoigne, parmi tant d’autres, de ces ambiguïtés et de ces incohérences.
Cette commune, située au pied du Plomb du Cantal, à quelques pas de la vallée de Brezons, la plus belle vallée glaciaire d’Europe selon Haroun Tazieff, se voit imposer l’implantation d’un mât de mesure sans que les expressions municipales et locales aient été entendues.
Ces mesures vont s’étendre sur une durée comprise entre un et quatre ans. Comment la commune et son intercommunalité peuvent-elles, dans ces conditions, faire avancer sereinement leurs projets ? Comment les habitants peuvent-ils vendre leurs maisons avec cette épée de Damoclès au-dessus de leur tête ? Comment accueillir de nouvelles populations demandeuses de nos espaces et de nos paysages ?
Comment comptez-vous, madame la secrétaire d’État, redonner confiance aux territoires, à leurs élus et à leurs habitants et faire en sorte qu’une réelle pertinence et une réelle cohérence prévalent dans l’action publique en matière d’éolien ?
Par ailleurs, quand le Parlement va-t-il être enfin saisi du plan de programmation de l’énergie ? C’est nécessaire si l’on veut espérer mettre un terme à ces injonctions paradoxales et contradictoires.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Sautarel, vous nous interrogez sur la question de l’installation d’éoliennes en zone rurale et faites état des inquiétudes soulevées chez les élus locaux.
Vous le savez, nos objectifs climatiques exigent une électrification massive de notre économie pour réduire notre dépendance aux énergies fossiles. De fait, malgré nos efforts en matière d’efficacité énergétique, la consommation d’électricité va augmenter dans les années à venir ; il sera donc nécessaire de mettre en service de nouvelles installations de production d’électricité décarbonée.
Il est donc en effet crucial d’augmenter nos capacités de production d’énergie renouvelable électrique, mais dans la concertation et en favorisant l’acceptabilité des projets – je vous rejoins. L’éolien terrestre est une des énergies renouvelables les plus compétitives ; il contribue significativement à notre sécurité d’approvisionnement, enjeu clé. En 2019, le parc éolien français a permis d’éviter l’émission de 15 millions de tonnes de CO2, soit l’équivalent de la circulation annuelle de près de 8 millions de véhicules.
Ces éoliennes sont soumises à une réglementation stricte : elles doivent obtenir une autorisation environnementale préfectorale préalablement à leur implantation, afin de démontrer que les dangers et les inconvénients du projet pour les populations, la biodiversité et les paysages peuvent être prévenus. En particulier, tout développeur éolien fournit une analyse de l’impact paysager du projet – vous m’interpellez sur ce point également –, qui est incluse dans la demande d’autorisation.
Enfin, les projets éoliens doivent respecter les dispositions des documents d’urbanisme, en particulier celles du plan local d’urbanisme, le PLU, quand il existe. Pour mieux associer les riverains et les collectivités, il est surtout important de mieux planifier le développement de l’éolien en prenant en compte les spécificités locales. Le Gouvernement a récemment, par une instruction en date du 26 mai 2021, demandé à chaque préfet de région d’élaborer sous un an une cartographie des zones favorables au développement de l’éolien, afin de sécuriser l’atteinte des objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).
Il faut donc redéfinir ces zones dans la concertation la plus large. Quant à savoir à quelle date le Parlement sera saisi des questions de devenir de notre mix énergétique, la loi Énergie et climat de 2019 a introduit, à la demande du Sénat, le principe d’une loi quinquennale de programmation en matière d’énergie et de climat. La première loi quinquennale doit être promulguée avant le 1er juillet 2023, conformément à l’article L. 100-1 A du code de l’énergie. Elle fixera le cadre de la prochaine révision de la PPE, qui déclinera les objectifs ainsi précisés.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour la réplique.
M. Stéphane Sautarel. Pour ce qui est du mix énergétique et de la PPE, nous pouvons nous rejoindre sur les objectifs. En revanche, concernant le sort réservé à nos paysages lorsque l’éolien s’implante dans des territoires ruraux, en particulier dans des parcs naturels, la concertation doit encore être grandement améliorée. L’objectif de la PPE, c’est-à-dire le développement des énergies renouvelables, ne peut être recherché à l’exclusion de toute autre considération, d’autant que, compte tenu des durées engagées, ces dossiers font peser beaucoup d’inconnues sur nos territoires.
rapports entre l’office français de la biodiversité et les élus locaux
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, auteur de la question n° 1585, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
M. Rémy Pointereau. Ma question concerne l’Office français de la biodiversité.
Nous tenions, au Sénat, lorsque l’OFB a été créé, à ce qu’il puisse travailler de concert avec les élus locaux. Les différents comptes rendus de réunions des commissions sénatoriales concernées en témoignent : nous voulions que l’Office exerce ses prérogatives en adoptant une sensibilité écologique équilibrée, mais surtout en bonne intelligence avec l’ensemble des acteurs de terrain, maires, agriculteurs, entreprises.
Malheureusement, dans les faits, les actions de l’OFB prennent souvent la forme de la répression, sans phase de médiation préalable. J’en veux pour preuve de nombreux exemples qui m’ont été rapportés. Ainsi une agricultrice a-t-elle reçu, pour avoir cessé d’irriguer une heure trop tard, une convocation en justice assortie d’une procédure d’enquête très musclée et d’un interrogatoire qui n’avait rien à voir avec les faits, tout cela sur simple dénonciation, sans preuve formelle et sans que l’intéressée soit avertie au moment des faits.
Autre exemple : le maire d’une commune rurale comprenant un étang communal créé voilà plus de trente-cinq ans, qui était géré, à l’époque, par la direction départementale de l’équipement (DDE) et financé par l’État, se voit convoquer en justice pour défaut de déclaration de prélèvements d’eau dans la nappe via le puits éolien qui y est installé.
Par conséquent, madame la secrétaire d’État, n’est-il pas opportun d’envisager, dans de tels cas, une étape de médiation préalable à la phase répressive ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Pointereau, concernant ces relations entre les agents de l’Office français de la biodiversité et les élus locaux, je sais, en tant que ministre de tutelle – vous l’imaginez bien – le dévouement et l’implication de ces agents. Le travail de médiation qu’ils effectuent est nécessaire, au quotidien, dans des situations parfois extrêmement tendues sur le terrain. Nous ne devons pas laisser s’installer des incompréhensions ou des tensions qui seraient préjudiciables à l’obtention d’accords et d’équilibres soutenus par les élus locaux.
L’OFB contribue à la surveillance, à la préservation, à la gestion et à la restauration de la biodiversité ainsi qu’à la gestion équilibrée et durable de l’eau ; il exerce ses missions de connaissance, de recherche, de mobilisation de la société, de conseil, de financement, d’animation d’actions mais aussi – vous l’avez dit – de police en interagissant fortement avec les acteurs sur les territoires.
La mission de police de l’Office prend différentes formes ; elle consiste notamment en une contribution, à la demande des services déconcentrés de l’État, à l’instruction et à l’élaboration des prescriptions visant à ce que l’eau et la biodiversité soient prises en compte en amont de la réalisation des projets.
L’OFB intervient également dans le contrôle administratif, sous l’autorité des préfets, dans le cadre de plans de contrôle établis par les missions inter-services de l’eau et de la nature (Misen). Dans ce cadre, il peut effectuer un constat de situation, les éventuelles suites à donner en cas de non-conformité constatée relevant des services de l’État.
Pour ce qui est des procédures judiciaires, les inspecteurs de l’environnement de l’OFB, comme leurs homologues des services déconcentrés de l’État, agissent sous l’autorité des parquets. Ils instruisent sur saisine, en toute objectivité, comme le font d’autres officiers de police judiciaire. Les agents sont formés au respect des règles évidentes de déontologie et du principe d’une instruction à charge et à décharge.
En matière de police de l’eau et de la nature, les Misen sont un cadre d’échange entre l’opérateur et les services déconcentrés permettant de hiérarchiser les actions de contrôle en fonction des enjeux propres à chaque département et d’assurer la bonne coordination entre services. La bonne connaissance des milieux et des acteurs permet aux agents de l’OFB, qui sont souvent des personnalités locales, de tisser ce dialogue, cette concertation, ce partage, sur les enjeux de préservation de la biodiversité ; ainsi peut-on faire cesser les infractions et remettre en état les milieux.
Cela se traduit par des réglementations – je pense à la séquence « éviter, réduire, compenser » – et, parfois, par des suites administratives prises par le préfet ou par des suites judiciaires mises en œuvre par le parquet, mais toujours dans une visée d’amélioration des situations.
Les missions de police des agents de l’OFB sont indispensables à la préservation de l’environnement et à la lutte contre les pollutions. À cet égard, les agents sont pleinement engagés – je le sais – mais aussi à l’écoute de leurs territoires.
Je vous remercie de nous alerter sur certaines situations qui pourraient cristalliser des tensions, monsieur le sénateur ; nous devons absolument accompagner cette médiation et permettre à chacun de s’approprier les enjeux environnementaux tout en veillant au respect du droit, donc à l’efficacité des mesures de police.