M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement. Monsieur le sénateur Jean-Pierre Decool, nous avons tellement été privés de lien social que, dès que nous en avons l’occasion, nous nous attachons à rebâtir ce lien !
Je vous fais part de la réponse du ministre de l’agriculture et de l’alimentation, qui ne pouvait malheureusement pas être là ce matin pour vous répondre, sur ce sujet qui lui tient à cœur. Si vous le permettez, comme pour Mme Saint-Pé, je vous en ferai lecture car il s’agit d’une question technique.
Les services du ministère de l’agriculture et de l’alimentation ont bien pris en compte les difficultés engendrées par la mise en place de ce nouveau règlement, qui concerne les importations de pigeons voyageurs. Vous l’avez dit, des travaux sont actuellement engagés par la Commission européenne : ils devraient conduire à la parution d’un acte délégué modificatif du règlement, spécifiquement dédié aux nouvelles modalités d’importation en provenance des pays tiers.
La date de parution de cet acte délégué ne nous a pas encore été transmise. Je sais que c’est l’information que vous espériez obtenir, mais les services de la Commission européenne nous ont fait part de leur souhait d’une parution « rapide », au sens diplomatique du terme, laquelle reste toutefois soumise au processus de validation des actes modificatifs prévu par la législation européenne.
Dans l’attente de cette publication, les importations sont actuellement possibles sous couvert du respect des dispositions nationales fixées par l’arrêté ministériel du 19 juillet 2002. Ce texte impose notamment que tous les animaux vivants en provenance des pays tiers soient soumis aux fameux contrôles vétérinaires d’introduction dans un poste de contrôle frontalier.
À ce jour, et cela répond à votre seconde question, seuls les postes de contrôle frontalier de Caen-Ouistreham, de Cherbourg et de Saint-Malo sont désignés et disposent des infrastructures adaptées pour le contrôle de ces animaux sur la façade Manche. Vous l’avez dit, ce n’est pas tenable en l’état.
Les demandes d’extension du champ de désignation d’autres postes de contrôle frontaliers relèvent non pas de la compétence du ministère de l’agriculture et de l’alimentation, mais de celle des gestionnaires des points d’entrée – ports et tunnels – au regard de leur appréciation de l’opportunité d’investir dans des infrastructures nécessaires, considérant les flux attendus.
Aussi, si ces derniers l’estiment opportun, ils peuvent présenter un dossier de désignation, qui sera bien évidemment étudié par les services du ministère de l’agriculture et de l’alimentation avec attention, en particulier par le service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières, puis transmis à la Commission européenne afin de recueillir son accord.
Monsieur le sénateur, je tiens à vous assurer que le ministre de l’agriculture et de l’alimentation est attaché comme vous au lien social que cette activité permet de créer dans nos territoires, mais il est aussi le garant du respect des règles sanitaires applicables à l’entrée de l’Union européenne.
Soyez convaincu que les services suivent de très près ce dossier et reprendront au plus vite la désignation de nouveaux postes. Nous vous tiendrons évidemment au courant des évolutions.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour la réplique.
M. Jean-Pierre Decool. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie pour cette réponse du ministre de l’agriculture dont je ne peux, vous l’imaginez bien, me satisfaire.
Je vous invite à relayer mon attente pour être plus rapide que les rapides. La saison colombophile internationale est déjà bien entamée ; dans un mois et demi, elle sera achevée. J’ai le sentiment que, lorsque les réponses vont arriver, les compétitions seront terminées.
Au-delà du lien social, nous avons aussi avec les Britanniques des relations économiques. Je vous adresse cette supplique : il faut tout faire pour que nous obtenions une réponse extrêmement rapide.
stage dans une petite entreprise pour les étudiants des grandes écoles
M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 1450, transmise à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
M. Yannick Vaugrenard. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la possibilité de rendre obligatoire un stage en PME pour les étudiants des grandes écoles, comme l’École nationale d’administration (ÉNA), l’École polytechnique ou encore l’École nationale supérieure des Mines de Paris.
En effet, bien que la situation sanitaire actuelle occupe une grande partie des actions menées par le Gouvernement, il est essentiel de ne pas mettre de côté des initiatives qui pourraient aider les entreprises, notamment les plus petites, les PME et les très petites entreprises (TPE).
En 2015, 63 % des salariés étaient employés dans une PME, mais ces entreprises embauchent beaucoup moins de jeunes diplômés que les grandes sociétés. Or cela leur porte préjudice, car de nombreuses études montrent l’importance de ces profils pour le développement mais aussi pour le dynamisme des entreprises.
D’autres pays européens, comme le Royaume-Uni, se sont saisis du problème et ont mis en place des programmes spécifiques associant grandes universités et PME et facilitant les stages. En Allemagne, le niveau moyen d’encadrement des entreprises est bien meilleur que celui des PME et entreprises de taille intermédiaire (ETI) françaises, notamment parce que les jeunes diplômés s’y orientent naturellement à la sortie de leurs études.
Il paraît donc opportun de faire découvrir aux futurs grands décideurs ce qui fait notre richesse économique. Trop souvent, les étudiants des grandes écoles intègrent directement de grands établissements, privés ou publics, ce qui ne les confronte pas à la diversité économique de notre pays et de nos territoires. Nos dirigeants sont par ailleurs très demandeurs de ce type d’initiative et la Banque publique d’investissement, Bpifrance, y a déjà travaillé. C’est une volonté forte exprimée par les réseaux de petites et moyennes entreprises.
Il me semble donc primordial d’instaurer, de manière systématique, au moins un stage dans une petite entreprise dans le cursus des étudiants de nos grandes écoles françaises.
Je vous saurais gré de bien vouloir m’indiquer, madame la ministre, ce que le Gouvernement compte faire sur ce sujet.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Monsieur le sénateur Vaugrenard, les grandes écoles, notamment celles du service public, ont toujours attaché une importance particulière aux expériences en milieu professionnel de leurs étudiants.
Ainsi, à l’ÉNA, les élèves suivent un stage de sept mois en préfecture ou en collectivité territoriale, au cours duquel ils effectuent une « mission entreprise » de deux mois, au sein d’une PME ou d’une PMI du territoire. Il s’agit d’une nouveauté, datant de 2019, mise en place sous l’impulsion du directeur de l’école, car, auparavant, les stages en entreprise avaient lieu majoritairement dans de grandes entreprises françaises. Les retours d’expérience de ce nouveau stage sont particulièrement positifs, de la part tant des élèves que des entreprises.
En outre, dans le cadre de l’Institut national du service public, qui sera créé au 1er janvier 2022, ces stages en entreprise seront pérennisés et l’ouverture des élèves sur le secteur privé sera renforcée par la création d’un tronc commun à toutes les écoles de service public.
Toujours dans la même dynamique, l’Institut national des études territoriales prévoit un stage d’ouverture de quatre semaines pouvant s’effectuer dans le secteur privé. Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) met à la disposition des employeurs de la documentation sur les modalités de transmission des offres de stage.
Cela correspond aussi à la volonté de Polytechnique, école dans laquelle les élèves ingénieurs participent, dès la première année, comme dans toutes les écoles d’ingénieurs, à un stage de terrain dans les territoires. Ils effectuent également un stage en entreprise durant leurs deuxième et quatrième années de formation. Ainsi, les élèves ingénieurs de l’École supérieure des Mines ParisTech passent au minimum douze mois en entreprise sur les trois années de formation.
Le Gouvernement est par ailleurs attaché au renforcement des liens entre l’ensemble des étudiants et le tissu des PME de nos territoires. Les volontariats territoriaux en entreprise permettent, par exemple, à des étudiants du supérieur d’avoir des expériences en PME industrielle, avec des soutiens financiers. L’apprentissage est également un levier puissant d’accueil d’étudiants dans des PME. L’innovation des PME est également encouragée via le renforcement des partenariats public-privé.
Le Gouvernement est donc mobilisé pour établir un lien fort et durable des étudiants avec les petites et moyennes entreprises. J’encourage l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur, universités et écoles, à signer des partenariats, en lien avec les collectivités et les PME-PMI qui les entourent.
M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour la réplique.
M. Yannick Vaugrenard. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.
Vous avez indiqué, au début de votre intervention, que les élèves de l’ÉNA faisaient des stages en sous-préfecture – c’est le cas la plupart du temps – et un stage de quelques semaines en entreprise. Il me semblerait préférable d’inverser ce ratio, afin que les étudiants passent beaucoup plus de temps dans nos petites et moyennes entreprises et dans nos entreprises de taille intermédiaire. Cela leur permettra probablement d’être beaucoup plus conscients, lorsqu’ils occuperont des postes importants dans la haute administration et qu’ils rédigeront des décrets d’application ou des projets de loi ou de directives, des réalités du terrain et de l’« applicabilité » des mesures que nous décidons, à l’échelon national.
Il est donc important de renforcer ce qui a déjà été commencé. Il existe une fracture culturelle, territoriale et sociale ; une telle mesure éviterait ou, tout au moins, diminuerait ce type de fracture, que chacun regrette.
suppression d’une licence professionnelle consacrée au bois
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, auteur de la question n° 1676, adressée à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
M. Bruno Sido. Madame la ministre, j’appelle votre attention sur la licence professionnelle consacrée au bois et à l’ameublement du lycée Charles-de-Gaulle de Chaumont, en Haute-Marne.
Cette licence professionnelle consacrée au bois et à l’ameublement, avec option « création et design du cadre de vie » ne devait plus être dispensée dans le lycée, à partir de la rentrée 2021. Cette décision a provoqué une grande incompréhension dans le département, alors que cette formation est dispensée depuis huit ans et que, l’année dernière, pas moins de 70 candidatures ont été reçues pour seulement 15 places.
Fort heureusement, cette décision ministérielle a été annulée après la mobilisation de nombreux acteurs contre cette fermeture, et je m’en réjouis.
Ce que je regrette, en revanche, c’est le manque de concertation entre le Gouvernement, l’université et ses enseignants, ainsi que les élus locaux et les chambres consulaires. Si cette décision avait été justifiée, elle aurait été acceptée, probablement. Dans ce cas précis, elle ne l’était pas, bien au contraire.
La filière bois a un réel avenir sur notre territoire, puisque notre département possède désormais le premier parc national des forêts de plaines et de nombreux atouts dans ce domaine. Des efforts ont été réalisés pour dynamiser notre territoire et offrir des formations post-bac aux jeunes du territoire, en adéquation avec notre environnement et nos projets économiques et touristiques. Par conséquent, il était incompréhensible de mettre fin, sans concertation, à une formation qui offre aux jeunes diplômés des débouchés immédiats en Haute-Marne. Proposer des formations post-bac permet à nombre de jeunes d’étudier dans le département puis d’y rester pour y travailler.
Madame la ministre, il faut promouvoir les formations pourvoyeuses d’emplois.
Par conséquent, que compte faire le Gouvernement pour que les formations en lien avec la filière bois perdurent dans le département de la Haute-Marne et que les jeunes puissent ensuite y travailler et y vivre ? D’une manière générale, les enseignants, les élus locaux et le monde professionnel seront-ils dorénavant consultés sur les filières post-bac, afin que les jeunes s’engagent dans des filières d’avenir avec des emplois à la clé ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur Sido, les licences professionnelles sont proposées par les universités et l’université de Reims Champagne-Ardenne a été accréditée, en 2018, pour délivrer le diplôme de licence professionnelle Bois et ameublement, dont l’enseignement est dispensé au lycée Charles-de-Gaulle de Chaumont.
Comme vous le soulignez, il s’agissait d’une formation innovante, répondant à une réelle demande territoriale ; c’est bien pour cela que mon ministère soutenait cette formation.
Néanmoins, la formation proposée n’était pas conforme à la réglementation applicable aux licences professionnelles, avec notamment un nombre trop faible d’enseignants-chercheurs ou d’enseignants universitaires au sein de l’équipe pédagogique. L’accréditation avait par conséquent été donnée pour trois ans et assortie d’une demande de réexamen à mi-parcours ; ces trois années devaient permettre à l’université de se mettre en conformité avec la réglementation, en garantissant le caractère universitaire de la formation.
L’université de Reims Champagne-Ardenne a transmis, en octobre 2020, un dossier de demande de prolongation de l’accréditation pour cette licence. Cette demande a été instruite par le collège des conseillers scientifiques et pédagogiques de la direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (DGESIP), qui a sollicité des compléments d’information auprès de l’université, notamment des données chiffrées portant sur l’insertion professionnelle et sur la composition de l’équipe pédagogique.
L’université a répondu à cette demande, mais la réponse apportée a été jugée insatisfaisante sur les deux aspects cruciaux de la formation professionnalisante : d’une part, l’implication de l’université demeurait trop faible, seuls 8 % des enseignements étant dispensés par des enseignants-chercheurs ou enseignants de l’université ; d’autre part, la relation avec le tissu économique était réduite à l’évocation d’une seule et unique entreprise locale, ce qui est assez peu, vous en conviendrez, en matière de perspectives d’insertion professionnelle pour les étudiants…
La DGESIP a donc émis un avis défavorable sur le renouvellement de cette accréditation. Néanmoins, j’ai été sensible aux réactions que cela a suscitées et qui m’ont touchée ; j’ai donc décidé de surseoir, pour un an, à la fermeture de cette licence.
L’accréditation de l’université a ainsi été prolongée jusqu’à 2022, avec une liste très claire d’exigences, dont la réalisation sera vérifiée dans six mois, portant tant sur l’implication de l’université que sur les perspectives d’insertion professionnelle des étudiants.
Chaque année, environ 2 000 licences professionnelles sont accréditées par le ministre, ce qui représente plus de 52 000 étudiants. Il s’agit d’un diplôme phare de l’université, parce qu’il permet une réelle insertion professionnelle. C’est dans cet esprit et en concertation avec les acteurs locaux que mes services continueront d’instruire ce dossier.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour la réplique.
M. Bruno Sido. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre ; je comprends désormais mieux le problème.
Je conçois parfaitement que l’on ferme des formations qui ne trouvent pas de débouché, mais, en l’occurrence, il y a des débouchés et les demandes en faveur de cette formation sont nombreuses. Il appartient donc à l’université de Reims Champagne-Ardenne de régler les problèmes internes, mais nous tenons au maintien de cette formation en Haute-Marne.
manque de places dans les structures pour enfants handicapés
M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, auteure de la question n° 1572, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Mme Corinne Imbert. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les difficultés liées au manque de place en institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (ITEP) et en institut médico-éducatif (IME), structures accueillant des enfants et des adolescents en situation de handicap.
À l’inverse, depuis plusieurs années, on observe une augmentation importante du nombre de places en service d’éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad). Cette évolution s’explique par une volonté d’accompagner les enfants dans les différents lieux dans lesquels ils évoluent quotidiennement et de développer l’école inclusive, démarche qui est à saluer.
Toutefois, l’augmentation du nombre de places en Sessad se fait au détriment du nombre de places en ITEP et en IME. Or nombre d’enfants en situation de handicap ne peuvent être accompagnés dans ce format externalisé et doivent être suivis dans des établissements spécifiques et équipés pour les accueillir. C’est pourquoi de nombreux enfants et adolescents se retrouvent actuellement sur liste d’attente, pour une éventuelle admission dans un ITEP ou dans un IME.
Aussi, madame la secrétaire d’État, je souhaite savoir si le Gouvernement entend procéder à une augmentation des moyens ou à un rééquilibrage du nombre de places entre, d’un côté, les ITEP et les IME, et, de l’autre, les Sessad, afin de répondre aux besoins spécifiques des enfants en situation de handicap.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice, je salue l’attention que vous portez à la transformation de l’offre médico-sociale pour les enfants.
Cette transformation conduit à réviser les équilibres de répartition de places entre solutions d’hébergement en structure spécialisée et services d’accompagnement à domicile et en milieu ordinaire, c’est-à-dire à l’école.
Cela dit, nous préservons aussi les offres destinées aux enfants qui ont les besoins les plus complexes. Je tiens à vous le signaler, depuis quatre ans, 1 368 places ont été créées dans les ITEP, IME et instituts médico-professionnels (IMPro) ; cela représente une augmentation de plus de 2 % et nous permet d’atteindre près de 70 000 places pour répondre à ces besoins.
Cette dynamique de transformation est nécessaire pour répondre aux nouveaux besoins des enfants et pour aller dans le sens de l’école inclusive, que vous mentionnez, qui se fonde sur la coopération entre l’école ordinaire et le médico-social. C’est ainsi que Jean-Michel Blanquer et moi promouvons cette trajectoire, consistant à ouvrir largement les portes des établissements spécialisés et de l’éducation nationale afin que cette coopération soit une réalité pour les enfants et pour leurs familles, qui plaident pour une telle évolution.
Aujourd’hui, nous créons des unités d’enseignement spécialisé – les classes adaptées pour les autistes et les classes externalisées – afin de mettre en œuvre cette coopération si indispensable. Nous créons aussi des formations conjointes entre les enseignants et le secteur médico-social pour mieux répondre aux besoins, même les plus complexes, des enfants.
C’est ainsi que nous créons – je tiens à souligner cette grande avancée – des classes externalisées pour les enfants polyhandicapés, dont le rapport à l’apprentissage est complexe mais qui ont le droit d’apprendre au milieu des autres.
C’est comme cela que nous transformons le regard sur la différence et sur la grande différence, et c’est ainsi que nous ferons croître le degré d’acceptation de la différence en France, afin de permettre au handicap de « circuler » plus facilement. Cela permettra également aux familles de changer de regard sur leurs enfants, même ceux dont les besoins sont les plus complexes.
Donc, oui, nous devons répondre.
Par ailleurs, nous sommes aussi confrontés à une grande urgence : la résolution de la situation des jeunes relevant de l’amendement Creton – communément appelés les « amendements Creton », ils sont près de 6 000 en France –, qui bloque des entrées en IME ou en ITEP. Pour beaucoup, cela se fait en coopération avec les départements, car nombre de notifications concernent des foyers de vie. Nous répondrons différemment, avec l’habitat inclusif ; nous développons plus de 10 000 places, qui sortiront beaucoup plus vite pour ces jeunes adultes, dont la prise en charge est, elle aussi, inadaptée.
Cette transformation est massive et mise en œuvre en pleine coopération avec l’éducation nationale, les organisations gestionnaires, les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et les départements, car c’est ainsi que nous pourrons répondre à tous les besoins des enfants.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour la réplique.
Mme Corinne Imbert. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de votre réponse.
Oui à l’inclusion, bien sûr ! Vous vous en doutez, je partage votre sentiment sur ce point ; je sais à quel point vous êtes impliquée dans vos fonctions. Je ne suis évidemment pas du tout opposée à la transformation de l’offre destinée aux enfants en situation de handicap.
Pourquoi ai-je posé cette question ? Parce que je me suis appuyée sur l’exemple du département dont je suis élue et que vous connaissez bien, madame la secrétaire d’État, la Charente-Maritime, et je sais la qualité des relations que vous entreteniez avec le président Dominique Bussereau. Or, récemment, on comptait 74 jeunes inscrits sur liste d’attente pour intégrer un institut médico-éducatif et environ 13 jeunes en attente d’une place en ITEP.
Face à ce manque de place, les enfants étaient redirigés vers les unités localisées pour l’inclusion scolaire, les fameuses ULIS, en lien avec l’éducation nationale. Parfois, parce que les choses sont compliquées et qu’il faut du temps pour les mettre en route, on ne pouvait pas forcément prendre en charge comme il se devait ces enfants, qui relevaient d’un autre type d’établissement mais qui se retrouvaient, par défaut, en ULIS, où ils ne bénéficiaient pas de l’accompagnement souhaité.
Voilà ce sur quoi je souhaitais attirer votre attention, madame la secrétaire d’État. C’est un travail de longue haleine, je le sais, mais attention à ne pas réduire trop le nombre de places en IME !
Par ailleurs, vous évoquiez les « amendements Creton ». Le département a redéployé des moyens pour créer des places en foyer occupationnel, de façon à libérer des places en IME. La première année, cela a fonctionné, les résultats étaient bons, mais, avec la baisse des places en IME, nous avions l’impression que nos efforts étaient anéantis.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Corinne Imbert. Je souhaitais donc appeler l’attention du Gouvernement sur ce sujet.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, en remplacement de Mme Catherine Belrhiti, auteure de la question n° 1599, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Mme Corinne Imbert. Madame la secrétaire d’État, je pose effectivement cette question au nom de ma collègue Catherine Belrhiti, retenue dans le département dont elle est élue et qui vous prie de bien vouloir excuser son absence.
Nous allons changer totalement de sujet.
Le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) régule l’accès des exploitants au foncier agricole en fonction des enjeux nationaux et locaux. Ce schéma, encadré par les articles L. 331-1, R. 331-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, soumet certaines opérations de mise en valeur des terres – installation, agrandissement ou réunion d’exploitations – à autorisation préalable.
Il est particulièrement utilisé pour permettre aux petites structures d’être privilégiées par rapport aux grandes exploitations, dans l’obtention de l’autorisation d’acquérir et d’exploiter les terres agricoles libérées. Il permet de lutter contre la concentration excessive des terres et de consolider les petites exploitations.
Il paraît néanmoins que, même si le schéma permet aux agriculteurs français d’être mis en concurrence dans des conditions justes et équitables, ce n’est pas le cas lorsqu’il s’agit d’agriculteurs étrangers frontaliers, qui sont nombreux, notamment dans la région Grand Est. Alors que le contrôle des structures est pleinement appliqué pour un agriculteur français et que l’ensemble des terres agricoles qu’il cultive sont prises en compte, seules les terres exploitées par un agriculteur étranger en France sont comptabilisées et soumises au contrôle administratif du préfet.
Les agriculteurs étrangers sont donc favorisés si la majeure partie de leur exploitation est située à l’étranger. Il en résulte une distorsion flagrante de concurrence puisque les agriculteurs français ont plus de difficultés à obtenir l’autorisation d’exploiter de nouvelles terres agricoles.
Cette situation ne peut se résoudre uniquement à l’échelon national. Même si le code rural exige de prendre en considération l’ensemble des superficies mises en valeur par le candidat, sous quelque forme que ce soit et toutes productions confondues, le Gouvernement français doit agir à l’échelon européen pour faire respecter l’équité et la libre concurrence entre tous les agriculteurs.
Je souhaite donc savoir, madame la secrétaire d’État, si le Gouvernement compte agir afin de faire en sorte que l’ensemble des terres des agriculteurs puissent être contrôlées, qu’elles soient situées en France ou dans des pays limitrophes.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Je réponds également au nom de l’un de mes collègues, M. le ministre de l’agriculture.
Comme vous le mentionnez, madame la sénatrice, l’application, aux agriculteurs étrangers, de la réglementation du contrôle des structures peut poser certaines difficultés. Si tout agriculteur, quelle que soit sa nationalité, doit respecter les dispositions du contrôle des structures sur notre territoire, la loi française est soumise au principe de territorialité. Les terres exploitées à l’étranger ne sont ainsi pas soumises au contrôle administratif du préfet.
Mme Belrhiti défend l’idée d’une action à l’échelon européen pour résoudre ces difficultés. L’Union européenne a marqué son intérêt, au cours des dernières années, pour les questions relatives à la régulation du foncier agricole : d’une part, avec la publication du Rapport sur l’état des lieux de la concentration agricole dans l’Union européenne : comment faciliter l’accès des agriculteurs aux terres ?, ayant donné lieu à une résolution adoptée par le Parlement européen en avril 2017 ; d’autre part, en septembre 2017, au travers de la communication interprétative de la Commission sur l’acquisition de terres agricoles et le droit de l’Union européenne. La réflexion mérite d’être poursuivie.
Pour autant, l’article 345 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dispose : « Les traités ne préjugent en rien le régime de la propriété dans les États membres. » Les règles régissant l’utilisation des terres agricoles relèvent ainsi de la compétence des États membres. La possibilité de tendre vers un cadre de réglementation harmonisé à l’échelon européen me semble donc très hypothétique au regard de la complexité du sujet et de contextes différents, y compris entre pays frontaliers.
Si les circonstances locales le justifient, des solutions peuvent être toutefois trouvées dans la coopération transfrontalière. Je peux ainsi citer les travaux menés dans le cadre de la conférence transjurassienne : à cette occasion, les autorités françaises et suisses ont mis en place une commission technique de conciliation foncière, qui permet de coordonner la régulation du foncier entre les deux pays. Cette commission a permis de mettre en place un protocole de suivi des exploitants suisses en France relevant d’une collaboration entre l’administration française, dans les départements du Doubs et du Territoire de Belfort, et le service des douanes suisses. Cela ne résout pas tous les problèmes juridiques, mais cela permet de fluidifier les échanges dans le traitement des dossiers.