M. Olivier Jacquin. Cet amendement a pour objet de concilier les positions. M. le rapporteur refuse une écotaxe nationale, en en reportant la perspective à 2028, peut-être.
Le Sénat a voté à l’unanimité en 2019 une écotaxe alsacienne. Nous vous proposons aujourd’hui non pas de vous ranger à la proposition initiale du Gouvernement, mais de poursuivre dans la cohérence de notre vote de 2019, en adoptant un amendement de repli qui ne vise que les seuls effets de bord concernant l’autoroute A31.
Cette autoroute relie le Luxembourg à Dijon, le long du sillon lorrain, l’autre corridor européen. Un chauffeur de poids lourd qui vient d’Hanovre et qui va vers l’Espagne passait hier par le Rhin allemand ; il transite aujourd’hui par le Rhin alsacien.
M. André Reichardt. Mais non !
Mme Catherine Belrhiti. Mais si !
M. Olivier Jacquin. Demain, après adoption d’une juste écotaxe sur le Rhin alsacien, Waze ou son GPS lui conseillera de passer par l’A31 et, en plus, de faire le plein de gasoil au Luxembourg, où il ne paiera pas de taxes.
Les effets de bord ne vont donc pas concerner toute la France, ils vont se concentrer sur le second corridor parallèle à celui du Rhin. (M. Olivier Jacquin brandit une carte de l’est de la France.)
Ne nous dites pas que cet amendement tendrait à menacer l’équilibre politique : nous sommes dans la cohérence du texte voté à l’unanimité en 2019 pour l’Alsace, texte qui n’avait pas été repris par l’Assemblée nationale, ce que je regrette, car cela aurait permis d’avancer.
L’adoption de cet amendement ne retardera pas les efforts de nos amis alsaciens. Elle permettra juste à la Lorraine de subir un traitement juste par rapport à l’Alsace sur le seul corridor parallèle. Elle n’emportera pas d’autres effets de bord.
Cet amendement a été signé de manière transpartisane par MM. Jean-Marc Todeschini, Jean-Marie Mizzon, par Mme Catherine Belrhiti, ainsi que par Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances, dont je regrette l’absence, Mme Véronique Guillotin, etc.
M. le président. Le sous-amendement n° 2288 rectifié bis, présenté par Mme Drexler, MM. Klinger et Reichardt, Mmes Muller-Bronn et Herzog, MM. Savary, Masson et Kern et Mme Schalck, est ainsi libellé :
Amendement n° 1859 rectifié octies
Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Les présentes dispositions sont applicables sans préjudice des dispositions de la loi n° 2019-816 du 2 août 2019 relative à la Collectivité européenne d’Alsace.
La parole est à Mme Sabine Drexler.
Mme Sabine Drexler. L’amendement n° 1859 rectifié nonies vise à autoriser à titre expérimental la mise en place d’une écotaxe pour le sillon lorrain, sous la responsabilité de la région Grand Est.
Sans en remettre en cause le bien-fondé, ce sous-amendement vise, par cohérence, à harmoniser les compétences entre la région Grand Est et la CEA.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Tabarot, rapporteur. Monsieur Jacquin, je suis ravi d’apprendre que vous êtes maintenant le porte-parole de M. Jean Rottner et de M. David Valence – cela m’avait échappé.
Je sais que vous êtes très proche de notre groupe, au sein duquel vous avez mené un lobbying actif ces dernières semaines pour collecter des signatures pour ces amendements. Nous avons évoqué ce sujet ce matin : vous connaissez notre position.
Nos collègues ont défendu leurs amendements avec beaucoup de conviction, mais les avis de la commission sont les suivants. Les amendements nos 635 rectifié, 1450 rectifié, 1653 rectifié bis, les amendements identiques nos 283 rectifié quater et 1723, ainsi que le sous-amendement 2283 rectifié ter, visent à mettre en place, de différentes manières, une nouvelle version de l’écotaxe.
Lors de l’examen de l’article 32 en commission, nous avons fait le choix de responsabilité de ne pas adopter un amendement de suppression ou de rejeter la responsabilité de cette mesure sur le projet de loi 4D.
Cependant, il nous a paru indispensable de revoir un dispositif au périmètre flou et aux effets pervers nombreux, par lequel le Gouvernement s’en remettait aux régions pour ne pas endosser la responsabilité de la mise en place une écotaxe.
Ces amendements visent à mettre en œuvre à courte échéance un dispositif autrement plus contraignant et qui n’est pas compatible avec la rédaction de l’article 32 que nous venons d’adopter.
L’avis sera donc défavorable sur ces cinq amendements, ainsi que sur le sous-amendement.
Les amendements identiques nos 284 rectifié quater et 1724 et le sous-amendement n° 2284 rectifié ter, l’amendement n° 1464 rectifié bis et le sous-amendement n° 2287 rectifié bis, ainsi que l’amendement n° 1859 rectifié nonies et le sous-amendement n° 2288 rectifié bis, sont relatifs à la région Grand Est.
Je sais que le Sénat avait eu l’occasion d’étudier cette question, en même temps qu’il examinait celle de l’écotaxe relative à la Collectivité européenne d’Alsace.
Cependant, justifier cette écotaxe par le report modal issu de la contribution mise en place dans la CEA illustre les périls du dispositif envisagé. Quels seront, demain, les effets de bord sur les départements et régions limitrophes ? Si le dispositif prévu empêche le report modal de camions étrangers effectuant du transit, il risque de susciter des effets de bord des transporteurs français, qui se décaleront peut-être sur les régions limitrophes.
La position de cette assemblée doit être claire : nous devons nous opposer à la mise en place, dès demain, d’une nouvelle écotaxe qui ne serait ni discutée ni maîtrisée et qui provoquerait une concurrence fiscale entre les différents territoires.
S’il doit y avoir une écotaxe un jour, celle-ci ne pourra pas être mise en œuvre immédiatement et son entrée en vigueur ne pourra intervenir qu’après concertation avec toutes les parties prenantes, les régions comme les départements.
En ce qui concerne l’amendement 1859 rectifié nonies, chère collègue Catherine Belrhiti, si j’entends les enjeux relatifs au sillon lorrain, il ne me paraît pourtant pas opportun de voter ici une écotaxe portant sur une zone où une unique route est concernée.
Mme Catherine Belrhiti. Il ne s’agit pas de mon amendement !
M. Philippe Tabarot, rapporteur. Mais vous avez travaillé ensemble ces amendements ?
Mme Catherine Belrhiti. Absolument pas !
M. Philippe Tabarot, rapporteur. Je comprends tout à fait que se fasse jour une solidarité entre territoires et qu’un travail soit réalisé en ce sens…
Mme Catherine Belrhiti. Il y a une solidarité, mais nous n’avons pas travaillé ensemble !
M. Philippe Tabarot, rapporteur. Toutefois, je me permets de vous dire très calmement, ma chère collègue, qu’il n’est pas certain que le report de camions venant d’Allemagne soit massif sur le sillon lorrain.
Mme Catherine Belrhiti. Je ne suis pas d’accord !
M. Philippe Tabarot, rapporteur. À ce jour, les camions venant du nord de l’Allemagne traversent l’Alsace – vous le savez, vous le vivez depuis 2005, depuis la mise en place de la Maut, la taxe allemande sur les camions –, afin de profiter des 200 kilomètres d’autoroutes gratuites.
Ces mêmes camions vont-ils vraiment faire 100 kilomètres de plus pour une portion de route gratuite en Lorraine qui débouche sur une autoroute payante ? Je me contente de poser la question, car vous connaissez bien mieux votre territoire que moi.
Mme Catherine Belrhiti. Exactement !
M. Philippe Tabarot, rapporteur. Ce détour en temps et en kilométrage ne sera peut-être pas rentable pour eux.
Pour conclure – il me semble que cela devrait faire l’unanimité –, les négociations en cours à l’échelon européen sur la révision de la directive Eurovignette risquent de rendre caduques d’éventuelles tentatives de mise en place d’écotaxes.
M. André Reichardt. Bien sûr !
M. Philippe Tabarot, rapporteur. Il semble plus pertinent d’attendre la définition d’un cadre harmonisé au niveau européen.
L’avis de la commission est donc également défavorable sur ces quatre amendements et ces trois sous-amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Les amendements nos 635 rectifié, 1450 rectifié et 1653 rectifié bis visent la même problématique que celle qui a animé le débat précédent. Ils tendent à créer à l’échelle nationale, sans différenciation territoriale, une redevance kilométrique.
Vous le savez, le Gouvernement est favorable à une telle évolution, mais à l’échelle territoriale régionale. Il s’agit donc, à terme, de mettre en place ces mesures dans chacune des régions, si celles-ci le souhaitent.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur ces trois amendements.
Les amendements identiques nos 283 rectifié quater et 1723, ainsi que le sous-amendement n° 2283 rectifié ter, sont très proches de la position du Gouvernement, puisqu’ils visent à permettre aux régions d’instaurer une contribution sur les poids lourds. Néanmoins, le texte du Gouvernement prévoyait le recours à une ordonnance, parce que nous avons besoin d’un dispositif technique et juridique précis qui nécessite une rédaction complémentaire.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable, pour des raisons légistiques.
Enfin, s’agissant des questions concernant la région Grand Est et la Communauté européenne d’Alsace, ainsi que du problème du report éventuel sur la Lorraine, il ne me semble pas possible législativement aujourd’hui de donner à une région la possibilité d’avancer selon toutes les modalités d’aménagement que vous proposez avec la Communauté européenne d’Alsace. Nous souhaitons permettre à toutes les régions qui le souhaitent d’avancer à la même date, pour permettre une cohérence territoriale.
Il n’est pas contradictoire de dire que nous souhaitons couvrir le territoire national, mais que nous souhaitons le faire région par région, dans une discussion avec les collectivités territoriales.
C’est pourquoi, non pas en raison d’une quelconque hostilité aux problématiques du Grand Est et de la CEA, mais bien par souci de cohérence nationale, le Gouvernement est défavorable à toute cette série d’amendements.
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.
M. Jacques Fernique. Je voudrais insister sur l’amendement n° 1859 rectifié nonies, dont notre collègue Olivier Jacquin a pris l’initiative et dont la liste des signataires atteste bien le caractère transpartisan du dispositif proposé.
Il s’agit pour nous de construire une cohérence à l’échelle du Grand Est ; c’est un projet d’intérêt général et de bon sens. Ceux qui craignent un effet domino ou des effets de bord ne font qu’illustrer la nécessité d’une harmonisation européenne rapide sur ce sujet ; je suis bien d’accord sur ce point avec notre rapporteur.
J’aimerais pourtant vous dire, madame la ministre, que notre gouvernement doit contribuer à ce que l’accord européen en finisse avec les contributions « façon puzzle », qui couvrent de façon disparate notre espace européen.
Cette proposition procède d’une volonté partagée de compléter la contribution poids lourds de la CEA par une protection du sillon lorrain contre un dommage collatéral évident. Il est temps de désamorcer les logiques de ressentiment ou d’égoïsme qui montent dans ce Grand Est, lequel a si peu rencontré l’adhésion des électeurs dimanche dernier.
Les responsables politiques de la région et ceux qui aspirent à le devenir dimanche ont tous manifesté leur souhait quant à la mise en place d’une contribution poids lourds sur les axes les plus touchés. En leur ménageant cette possibilité, vous leur permettrez d’agir conformément à cette subsidiarité qui est si chère à notre chambre des territoires.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Monsieur le rapporteur, vous présumez qu’il n’y aurait pas beaucoup d’effets de bord entre les deux sillons, le rhénan et le lorrain, deux réalités géographiques européennes.
Pourtant, cela a été étudié dans le cadre de l’alternative à l’A31 bis il y a deux ou trois ans. Nous connaissons tout des flux européens qui traversent ces zones, et le risque de report a été estimé à près de 4 000 véhicules par jour sur l’A31, qui est l’une des autoroutes les plus encombrées de France. Au nord de Metz, on est à plus de 100 000 véhicules par jour, avec près de 11 000 poids lourds, alors que 15 000 poids lourds circulent sur l’A35 en Alsace. C’est la raison pour laquelle j’ai parlé d’une juste écotaxe là-bas.
Madame la ministre, vous indiquez souhaiter la création d’un dispositif national. Je vous ai entendue, et nous vous avons fait des propositions sur un tel dispositif, sur l’initiative des régions. Comprenant toutefois la logique qui était à l’œuvre alors que nous étions à quelques jours des élections, j’ai décidé d’aller chercher la cohérence du texte alsacien, qui nous avait été présenté par le Gouvernement pour traiter l’effet de bord et que vous aviez voté en 2019, mes chers collègues. Nous en sommes là !
Monsieur le rapporteur me dit que je fais de la politique ; je l’assume ! Franchement, il y a beaucoup de politique, ces temps-ci, avec cette ordonnance sur l’Alsace qui a été présentée quelques jours avant les élections régionales, alors que la ministre Klinkert, qui la défend, est aujourd’hui en campagne, sans étiquette.
M. Rottner, me dites-vous, défend l’idée d’une écotaxe sur le Grand Est ; c’est Mme Catherine Belrhiti qui l’a portée, et nous n’avons pas travaillé ces amendements ensemble. Jean-Marc Todeschini et moi-même avons proposé de chercher une solution de repli dans la logique de l’ordonnance alsacienne et nous avons été rejoints par une foultitude de cosignataires, comme l’a aimablement et intelligemment relevé mon collègue Jacques Fernique.
Je regrette que nous ne retrouvions pas un peu de la cohérence qui nous animait en 2019 pour traiter ce problème du sillon lorrain – plus de 100 000 véhicules par jour, dont de très nombreux camions. Cela ne retardera pas le projet alsacien, mais nous aurons fait preuve d’une solidarité nationale importante.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Tabarot, rapporteur. Monsieur Jacquin, monsieur Fernique, je sais que vous êtes de mon avis, nous en avons suffisamment discuté. Vous êtes contre les écotaxes régionales ; pourtant, vous venez d’en défendre une. Je ne comprends pas la cohérence de votre position, même s’il s’agit de votre territoire. (M. Olivier Jacquin s’exclame.)
Nous en avons suffisamment parlé ; vous nous avez dit que le Gouvernement ne pouvait pas mettre en place des écotaxes régionales et donner cette responsabilité aux régions et qu’il fallait une cohérence en matière d’interopérabilité, au regard du risque de concurrence fiscale entre les différents systèmes.
M. Olivier Jacquin. Nous l’avons voté en 2019 !
M. Philippe Tabarot, rapporteur. Je n’étais pas là, en 2019 ! Je ne l’ai pas voté.
M. Olivier Jacquin. Vous étiez représenté ici !
M. Philippe Tabarot, rapporteur. En revanche, nous avons échangé très récemment sur ces sujets et, aujourd’hui, vous proposez l’inverse de ce que vous défendiez alors.
C’est la raison pour laquelle je vous propose, ainsi qu’à nos autres collègues, si vous voulez rester cohérents avec ce que nous nous sommes dit pendant tous ces mois, de retirer vos amendements et sous-amendements, auxquels j’ai déjà donné des avis défavorables.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1653 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 2283 rectifié ter.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 283 rectifié quater et 1723.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 2284 rectifié ter.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 284 rectifié quater et 1724.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 2287 rectifié bis.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1464 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 2288 rectifié bis.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1859 rectifié nonies.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 138 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Pour l’adoption | 78 |
Contre | 249 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 172, présenté par M. Lahellec, Mme Varaillas, M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 302 bis ZB du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la deuxième phrase du deuxième alinéa, les mots : « les années civiles ultérieures » sont remplacés par les mots : « l’année civile ultérieure » ;
2° Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2022, le tarif est fixé à 21,96 € par 1 000 kilomètres parcourus pour les véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 7,5 tonnes et à 7,32 € par 1 000 kilomètres parcourus pour les autres véhicules. Pour les années civiles ultérieures, il est égal à ce montant, majoré de 70 % de l’évolution de l’indice des prix à la consommation hors tabac et arrondi au centième d’euro par 1 000 kilomètres, la fraction égale à 0,005 comptant pour 0,01. »
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Cet amendement a été rédigé bien en amont du débat que nous avons eu sur l’article 32. Au demeurant, il s’agit d’une disposition à laquelle nous sommes habitués, car nous la rencontrons lors de l’examen de chaque loi de finances.
Il s’agit de taxer les camions, à partir de 7,5 tonnes, qui empruntent les autoroutes. Ce serait d’ailleurs une excellente manière de ne pas attendre 2028 !
M. le président. L’amendement n° 482 rectifié, présenté par MM. Fernique, Dantec, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le deuxième alinéa de l’article 302 bis ZB du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises et dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 7,5 tonnes, le tarif de la taxe est fixé par décret pris en Conseil d’État, selon une logique progressive par tranche de 1 000 kilomètres parcourus. Cette taxe s’applique à partir du cent cinquantième kilomètre parcouru. »
II. – Le présent article entre en vigueur à compter du 1er janvier 2022.
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Cet amendement vise à intégrer dans la trajectoire d’évolution de la fiscalité des carburants pour les transports routiers de marchandises, une augmentation de la taxe d’aménagement du territoire, la TAT, due par les concessionnaires d’autoroutes pour les poids lourds.
Le montant des recettes générées par cette augmentation permettrait de financer davantage, d’une part, l’amélioration des infrastructures de transport, en abondant l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’Afitf, et, d’autre part, le développement du ferroviaire, en compensant une partie du déficit des trains d’équilibre du territoire.
Pour ne pas pénaliser les circuits courts et les transporteurs locaux et cibler prioritairement les longs trajets, pour lesquels le fret routier ou fluvial est plus pertinent, la taxe ne s’appliquerait qu’à partir du cent cinquantième kilomètre.
Il s’agit en somme d’un dispositif juste et efficace, en cohérence avec nos objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Tabarot, rapporteur. Ce projet de loi comporte plusieurs mesures visant à renforcer la fiscalité sur l’usage de la route, dont celles qui concernent la TICPE, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques.
Si, sur ces dispositions, nous avons abouti à une position d’équilibre, il ne me semble pas opportun d’augmenter la fiscalité davantage. Il me paraît préférable d’accompagner les transporteurs dans le renouvellement de leur flotte. Tel est notamment le sens des amendements adoptés sur le suramortissement ou sur le prêt à taux zéro.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Ces deux amendements visent à relever le niveau de la taxe d’aménagement du territoire pour les poids lourds.
Ce sont toutefois des propositions juridiquement fragiles et potentiellement très coûteuses pour l’État. En effet, la modification de cette taxe due par les sociétés concessionnaires d’autoroutes est susceptible d’entraîner un risque indemnitaire de plusieurs centaines de millions d’euros a minima pour l’État.
Le seul effet de l’adoption de ces amendements serait de bouleverser cette taxe, qui permet aujourd’hui de financer de façon sécurisée l’Afitf.
C’est la raison pour laquelle l’avis du Gouvernement est défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 482 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 32 bis (nouveau)
L’article L. 312-1 du code de la route est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au premier alinéa, la norme maximale en termes de poids total autorisé pour un ensemble comportant cinq essieux utilisé dans le cadre de la réalisation d’un transport combiné rail-route ou d’un transport combiné fleuve-route entre le premier point de chargement de la marchandise et son transfert sur le train ou le bateau (pré-acheminement) et entre le point de déchargement de la marchandise du train ou du bateau et son point de livraison (post-acheminement) est fixée à 46 tonnes.
« Les conditions d’application du présent article sont fixées par voie réglementaire. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 32 bis
M. le président. L’amendement n° 1694 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Dagbert, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 32 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Une expérimentation est menée pour une durée de deux ans et prioritairement sur autoroutes, sur la mise en place de la solution éco-combi pour le transport routier de marchandises, c’est-à-dire la possibilité pour un véhicule lourd de tracter une combinaison d’équipement de deux semi-remorques.
II. – Cette expérimentation, sous le contrôle du ministère chargé des transports et du ministère de l’intérieur, fait l’objet d’un rapport du Gouvernement prenant en compte : les gains environnementaux et notamment d’émissions de dioxyde de carbone, la faisabilité technique, les impacts sur les infrastructures, les enjeux de sécurité routière et l’articulation avec les modes ferroviaire ou fluvial.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
M. Christian Redon-Sarrazy. L’objectif du projet de loi est de tenir une trajectoire ambitieuse de réduction des émissions de gaz à effet de serre, les GES, et des impacts de l’activité humaine sur le climat.
Le transport routier de marchandises, qui représente 89 % des flux de marchandises dans notre pays et 6 % des émissions totales de gaz à effet de serre, doit s’engager sur la voie de la transition énergétique et réduire ses impacts, avec pour horizon la neutralité carbone en 2050.
Dans la phase de transition des flottes de véhicules, avec l’arrivée progressive de motorisations à énergies alternatives, il nous faut trouver des solutions opérationnelles qui fournissent des résultats immédiats pour le bon suivi de cette trajectoire. La solution éco-combi apparaît comme pertinente dans le cadre de cette stratégie.
Il s’agit d’une combinaison de deux remorques standardisées dont l’attelage permet une gestion simplifiée pour l’ensemble de la chaîne logistique – chargeurs, logisticiens, multimodal.
Concrètement, un camion tracte deux semi-remorques au lieu d’une, soit deux fois plus de marchandises, c’est-à-dire 66 palettes au lieu de 33, pour un seul véhicule au lieu de deux. Avec cette solution, les trajets sont prédéterminés et impératifs, comme c’est déjà le cas pour les convois exceptionnels.
Les enseignements tirés des déploiements et des expérimentations dans les autres pays européens – Allemagne, Pays-Bas, Espagne, pays du Nord – permettent d’estimer une diminution du CO2 allant de 25 % à 30 %. Les économies d’énergie réalisées doivent toutefois être rapportées à la tonne transportée. En effet, la consommation du véhicule augmente légèrement, de 8 % à 10 %, en fonction des usages et du poids tracté.
Cet amendement vise donc à mener une expérimentation de deux ans en France, principalement sur les axes autoroutiers, de manière structurée et avec trois impératifs : un transport de site à site, sur de grands axes identifiés ; une garantie de non-concurrence avec les modes fluvial et ferroviaire, et, si possible, une organisation en combinaison avec eux ; une formation spécifique des conducteurs.
Par ailleurs, au-delà des gains réalisés en matière de réduction des gaz à effets de serre et de compétitivité, il est nécessaire de prendre en compte dans cette expérimentation l’aspect sécuritaire.
Ainsi, cet amendement vise également à assurer l’encadrement de cette expérimentation par le ministère des transports et le ministère de l’intérieur, particulièrement par la délégation à la sécurité routière.
Je précise que cet amendement est issu d’un travail conjoint avec l’Union des entreprises de transport et logistique de France.