Mme la présidente. L’amendement n° 1948 rectifié, présenté par M. Benarroche et Mme Benbassa, est ainsi libellé :
Alinéa 26
après les mots
économie,
insérer les mots
aux coûts évités
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Les enjeux de la transition écologique nécessitent des approches transversales et des coopérations innovantes entre acteurs privés et publics sur les territoires.
Ces acteurs, tout particulièrement ceux de l’économie sociale et solidaire et de l’économie circulaire, proposent des consortiums et des solutions intégrées dont les avantages sont insuffisamment perçus ou valorisables actuellement par la commande publique.
Cette économie devrait pouvoir faire l’objet d’une préférence des collectivités, de plus en plus soucieuses de leur responsabilité environnementale, y compris dans leurs commandes publiques.
Actuellement, les coûts évités ne sont pas ou peu pris en compte par les collectivités locales lors de l’examen des mémoires techniques et des propositions financières en réponse aux appels d’offres et appels à projets, alors que les candidats, souvent acteurs de l’économie sociale et solidaire, proposent des solutions et coopérations permettant de réduire les coûts financiers et écologiques dans la mise en œuvre des moyens et prestations objets de la commande.
L’objectif de cet amendement est que la commande publique prenne en compte la notion de coûts évités mis en avant par ces coopérations et l’intègre systématiquement parmi les critères de notation des réponses aux appels d’offres et appels à projets.
Son inscription dans la loi permettra de reconnaître les avantages à long terme d’une commande publique soucieuse de son impact et de son coût sur l’environnement.
Aucune obligation n’incombera pour autant aux collectivités, qui resteront libres dans leur choix, mais auront à leur disposition beaucoup plus de latitude pour privilégier une approche plus transversale tenant compte des enjeux actuels et intégrant des solutions innovantes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Je peine toujours à déterminer concrètement les contours de la notion de coûts évités.
On voit mal comment les conditions d’exécution des marchés publics pourraient prendre en compte des considérations relatives à ces coûts, comme le prévoit cet amendement, d’autant que celui-ci, peut-être par erreur, vise spécifiquement les marchés de défense.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État. Il faut en effet être précis sur la notion de coûts évités.
Comme nous l’avons indiqué en réponse à l’amendement portant sur l’introduction de cette notion pour les marchés dits classiques, à l’alinéa 13, il est nécessaire de prendre en compte les coûts évités lorsque nous faisons le choix d’un produit ou d’une prestation plus durable.
C’est pourquoi, au sein du plan national pour des achats durables (PNAD), disponible en ligne, une action prioritaire est prévue pour définir les outils et les méthodes à mettre à la disposition des acheteurs pour leur permettre d’intégrer le coût global ou l’analyse de cycle de vie (ACV) dans leurs marchés.
Pour autant, il ne me semble pas nécessaire de mentionner spécifiquement des conditions d’exécution relatives aux coûts évités, parce que ce moyen, comme d’autres, relève de dimensions économiques et environnementales déjà mentionnées à l’alinéa 26 de l’article 15.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 595 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Decool, Guerriau et Lagourgue, Mme Mélot et MM. Menonville et A. Marc, est ainsi libellé :
Alinéa 29
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le soumissionnaire doit avoir publié en données ouvertes son bilan de gaz à effet de serre tel que défini à l’article L. 229-25 du code de l’environnement.
La parole est à M. Joël Guerriau.
M. Joël Guerriau. Il s’agit d’obliger les entreprises qui souhaitent répondre à des appels d’offres publics de publier le bilan de gaz à effet de serre en données ouvertes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Tel qu’il est rédigé, cet amendement prévoit une obligation pour les soumissionnaires des marchés de défense et de sécurité de publier leur bilan d’émissions de gaz à effet de serre. Il y a donc, là aussi, à mon sens, un problème d’imputation.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État. Je partage la remarque du rapporteur sur l’imputation de cet amendement. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. Joël Guerriau. Je retire cet amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L’amendement n° 595 rectifié est retiré.
L’amendement n° 2188, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 36
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Pour les contrats de concession qui ne sont pas des contrats de concession de défense ou de sécurité, les conditions d’exécution du contrat prennent en compte des considérations relatives à l’environnement. Elles peuvent également prendre en compte des considérations relatives à l’économie, à l’innovation, au domaine social ou à l’emploi.
II. – Alinéa 38
Supprimer les mots :
ou sociales
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État. Cet amendement est semblable à l’amendement n° 2187 présenté à l’alinéa 17, qui concernait les marchés publics.
Avec le soutien du Gouvernement, l’Assemblée nationale a étendu aux contrats de concession la mesure issue des propositions de la Convention citoyenne pour le climat et introduisant les clauses environnementales dans l’intégralité des marchés publics et le recours à un critère environnemental pour sélectionner l’offre économiquement la plus avantageuse – nous venons d’en parler.
En ajoutant les caractéristiques sociales comme alternative aux clauses et critères environnementaux, l’amendement adopté en commission remet en cause l’obligation initiale de prendre en compte de façon obligatoire les considérations environnementales dans le cadre de l’attribution, mais aussi de l’exécution, des contrats de concession.
Cet amendement a pour objet de revenir à la version du texte adoptée par l’Assemblée nationale, qui prolonge les propositions de la Convention citoyenne pour le climat.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Notre position sera la même que lorsque nous avons débattu des marchés publics : nous ne souhaitons pas revenir sur l’équilibre du texte issu des travaux de la commission.
Les dispositions sur lesquelles le Gouvernement souhaite revenir par cet amendement ne posent pas de difficulté au regard du droit de l’Union européenne et permettent de concilier considérations environnementales et sociales.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 711 rectifié bis, présenté par MM. Mouiller, Retailleau, Mandelli et Favreau, Mme Deromedi, M. Bouchet, Mme Thomas, MM. Burgoa, Cambon et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, MM. Sautarel, de Nicolaÿ et Karoutchi, Mmes Lassarade et Puissat, MM. Courtial, Genet, Bascher, Savin, Grand, Lefèvre et B. Fournier, Mmes Dumas, Canayer, Richer et M. Mercier, M. Le Gleut, Mmes Gruny et Joseph, MM. Charon, Milon, Sido et D. Laurent, Mmes Muller-Bronn, N. Delattre et Schalck et M. Brisson, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 37
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au premier alinéa du 1° de l’article L. 3114-9, après la première occurrence du mot : « entreprises », sont insérés les mots : « ou à des entreprises qui affectent des personnes défavorisées ou appartenant à des groupes vulnérables à l’exécution du contrat, définis par voie réglementaire et notamment des structures d’insertion par l’activité économique au sens de l’article L. 5132-4 du code du travail ou à des entreprises adaptées au sens de l’article L. 5213-13 du code du travail » ;
La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. Je vais au bout de ma démarche.
Il s’agit d’étendre la disposition existante pour l’accès des PME aux contrats de concession aux entreprises qui affectent à son exécution des personnes défavorisées ou appartenant à des groupes vulnérables.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Je ne reviens pas sur les arguments que nous avons déjà échangés sur ce sujet. La commission sollicite l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État. Cet amendement reprend pour les concessions la disposition que M. Mouiller a défendue pour les marchés publics, à savoir imposer qu’une part minimale des contrats soit exécutée par les entreprises adaptées ou de type ÉSAT.
Par cohérence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. Philippe Mouiller. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 711 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 380 rectifié bis, présenté par MM. Gontard, Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 44
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le 3° du I de l’article L. 541-1 du code de l’environnement est complété par alinéa ainsi rédigé :
« L’État, ses opérateurs et les collectivités territoriales sont parties prenantes de la réalisation du présent objectif. »
La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. Sur l’initiative du Sénat, la loi AGEC a fixé un objectif national de réemploi équivalent à 5 % du poids des déchets ménagers à l’horizon 2030. De ce fait, la France a été le quatrième pays européen à s’appliquer un objectif national de réemploi, après l’Espagne, la Belgique et la Suède ; nous pouvons nous en féliciter.
Cet objectif s’applique à l’État et aux collectivités territoriales et doit être décliné au sein des filières à responsabilité élargies des producteurs, mais seul ce dernier aspect est précisé dans la loi.
Cela se révèle dommageable. En effet, aucune communication du Gouvernement ou des services de l’État ou des collectivités territoriales n’a rappelé ou promu cet objectif. Le ministère de la transition écologique omet même de le citer dans ces fiches traitant du réemploi. La preuve en est dans le corpus de fiches des contrats de relance et de transition écologique (CRTE) : alors que l’une d’elles parle de la création de ressourceries, en exposant le corpus réglementaire et législatif en matière de prévention des déchets, seule une mention aux objectifs de la loi AGEC de réduction des déchets des ménages – 15 % pour 2030 – est présente.
Cet amendement vise donc à clarifier utilement l’intention du Sénat exprimée en 2019. À l’heure de l’épuisement de nos ressources primaires et stratégiques, le développement du réemploi est un enjeu majeur pour nos sociétés. Il est indispensable que l’ensemble des pouvoirs publics, qu’ils soient centraux ou déconcentrés, y participent activement aux côtés des entreprises et des associations locales.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. La précision apportée par cet amendement semble inutile. En effet, les objectifs d’économie circulaire inscrits à l’article L. 541–1 du code de l’environnement s’imposent par définition aux acteurs publics qui concourent à leur atteinte.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 380 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 655 rectifié est présenté par MM. Chasseing, Guerriau, Menonville, Decool et Lagourgue, Mme Mélot, MM. A. Marc, Capus et Wattebled, Mme Garriaud-Maylam, MM. Henno, Guérini et Grand, Mmes Dumas, Perrot et Bonfanti-Dossat et MM. Laménie, Hingray et Chauvet.
L’amendement n° 1253 rectifié bis est présenté par MM. Babary, Karoutchi, D. Laurent et de Nicolaÿ, Mmes Deromedi et Chauvin, MM. Bonnecarrère et Brisson, Mme Berthet, MM. Chaize, Bouchet et Sido, Mme Raimond-Pavero, M. B. Fournier, Mme Billon, M. Charon, Mme Lassarade, MM. Gremillet, Somon, Klinger, Bouloux et Houpert, Mmes Gosselin et Jacques, M. H. Leroy, Mme Renaud-Garabedian et MM. Pointereau et Genet.
L’amendement n° 2102 est présenté par M. Rambaud, Mmes Havet et Schillinger, MM. Lévrier, Marchand et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 45
Remplacer le mot :
deux
par le mot :
cinq
La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 655 rectifié.
M. Daniel Chasseing. Dans les échanges avec les parties prenantes qui ont précédé l’élaboration de ce projet de loi, le délai de mise en œuvre de cinq ans pour tous les marchés a recueilli un consensus. Cet amendement tend à le maintenir.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Babary, pour présenter l’amendement n° 1253 rectifié bis.
M. Serge Babary. La réduction du délai maximal d’entrée en vigueur de l’article 15 à deux ans en ce qui concerne les contrats de concession présente un risque important d’éviction des PME, ce qui n’est évidemment pas l’objectif que nous recherchons.
Cet amendement a donc pour objet de maintenir le délai maximal de cinq ans prévu par le texte adopté par l’Assemblée nationale. Ce délai est déjà inférieur à celui qui était proposé par la Convention citoyenne pour le climat, qui envisageait une entrée en vigueur en 2030, afin de donner aux autorités concédantes et aux entreprises le temps minimum nécessaire pour adapter leurs méthodes d’achat et leurs offres.
Réduire ce délai maximal à deux ans paraît difficilement atteignable et emporterait des inconvénients allant à l’encontre de l’objectif.
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 2102.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement a pour objet de revenir à la rédaction du texte adoptée par l’Assemblée nationale. Cette partie de l’article 15 doit pouvoir entrer en vigueur dans les meilleurs délais, mais cette application doit se faire avec méthode, rigueur et dialogue.
Ainsi, pour les contrats de concession comme pour les marchés publics, il est nécessaire d’engager une consultation de l’ensemble des acteurs pour identifier leurs contraintes et leurs besoins. Seule cette consultation permettra de déterminer le temps nécessaire aux entreprises et aux acheteurs pour s’adapter à de nouvelles normes qui peuvent nécessiter une réorganisation importante de leurs méthodes de travail, notamment pour les PME ou les associations titulaires de délégation de services publics locaux, en particulier dans les secteurs du tourisme, des installations sportives, de l’accueil périscolaire, des services culturels ou du transport de voyageurs.
C’est pourquoi ce délai de cinq ans nous paraît nécessaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Je rappelle à M. Babary que seule la question des marchés publics a été abordée par la Convention citoyenne pour le climat, pas celle des concessions qui fait l’objet de cet alinéa de l’article 15. Ce sujet a été ajouté lors des débats à l’Assemblée nationale.
La commission a souhaité faire passer de cinq à deux ans le délai maximal à compter duquel les dispositions de l’article 15 relatives aux contrats de concession entreraient en vigueur. Elle a en effet considéré que les soumissionnaires à des contrats de concession sont généralement – je prends soin de le dire avec toutes les précautions d’usage – des entreprises d’une taille plus importante que celles qui répondent à des marchés publics.
Un délai d’entrée en vigueur ramené à deux ans en matière de contrats de concession permettrait de renforcer l’ambition du texte sans poser, nous semble-t-il, de difficultés d’application particulières. Il ne paraît pas souhaitable de revenir sur cet équilibre : cinq ans pour les marchés publics, deux ans pour les contrats de concession.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État. Pour les contrats de concession comme pour les marchés publics, il est nécessaire d’engager une consultation de l’ensemble des acteurs pour identifier les contraintes et les besoins. Elle seule permettra de déterminer avec précision le temps nécessaire aux entreprises comme aux acheteurs pour s’adapter à des contraintes nouvelles qui peuvent nécessiter une réorganisation de leurs méthodes de travail, notamment pour les PME ou les associations titulaires de délégation de services publics locaux, en particulier dans les secteurs du tourisme, des installations sportives, de l’accueil périscolaire, des services culturels ou encore du transport de voyageurs.
Un délai d’entrée en vigueur de ces mesures inférieur à cinq ans pour les contrats de concession présenterait un risque important que les obligations soient mises en œuvre de manière incomplète ou bancale et que les entreprises se détournent de la commande publique.
C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis favorable sur ces trois amendements.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 655 rectifié, 1253 rectifié bis et 2102.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 15, modifié.
(L’article 15 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 15
Mme la présidente. L’amendement n° 80 rectifié, présenté par M. S. Demilly, Mme Morin-Desailly, MM. Chauvet, Levi, Canévet, Genet et J.M. Arnaud, Mmes Sollogoub et Chain-Larché, M. Cuypers et Mmes Dumont et Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2122-1 du code de la commande publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’acheteur peut également passer un marché sans publicité ni mise en concurrence préalables lorsqu’il poursuit un objectif écologiquement responsable et que la valeur estimée du besoin n’excède pas le seuil d’application de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE. »
La parole est à M. Stéphane Demilly.
M. Stéphane Demilly. Madame la secrétaire d’État, vous avez déclaré tout à l’heure apprécier la pugnacité. Je reviens donc à la charge sur la question du soutien aux entreprises de proximité qui représentent un enjeu pour le développement économique de nos territoires, mais aussi et surtout un enjeu environnemental.
C’est une lapalissade de dire que le recours aux circuits courts permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Or le droit de la commande publique ne permet pas suffisamment aux élus locaux, spécifiquement aux maires, de soutenir les entreprises de proximité.
Cet amendement vise donc, de façon audacieuse – j’en conviens –, à dispenser de mise en concurrence l’acheteur qui se fixe un objectif écologiquement responsable dans le respect des seuils réglementaires de droit européen sur la passation des marchés publics.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. C’est audacieux, en effet ! (Sourires.)
L’article L. 2122–1 du code de la commande publique définit les conditions dans lesquelles il est possible de déroger à l’obligation de passer un marché sans publicité ni mise en concurrence préalables. La méconnaissance de ce principe fondamental de la commande publique doit être strictement proportionnée.
Il me semble que la poursuite d’un « objectif écologiquement responsable » ne constitue pas un motif suffisant, notamment au regard du caractère particulièrement vague de cette expression.
Pour autant, la commission sollicite l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, je maintiens que j’aime beaucoup la pugnacité, même quand elle va à l’encontre de mes positions ! (Sourires.)
Comme vient de le dire M. le rapporteur, une dispense totale de procédure pour les marchés visant un « objectif écologiquement responsable » porte atteinte aux principes de la commande publique – liberté d’accès, égalité de traitement et transparence – qui s’imposent, sous réserve de quelques dérogations extrêmement limitées, dès le premier euro.
Pour cette raison, même si je salue cette pugnacité, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 81 rectifié, présenté par M. S. Demilly, Mme Morin-Desailly, MM. Chauvet, Levi, Canévet et Genet, Mmes Sollogoub et Saint-Pé, M. J.M. Arnaud et Mmes Dumont et Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2123-1 du code de la commande publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’un marché soumis à la procédure adaptée n’excède pas un seuil fixé par voie réglementaire ou poursuit un objectif écologiquement responsable, l’acheteur peut adapter librement les modalités de publicité en fonction des caractéristiques du marché, notamment de son montant et de la nature des travaux, des fournitures ou des services en cause. »
La parole est à M. Stéphane Demilly.
M. Stéphane Demilly. Avec cet amendement de repli, je passe de la pugnacité à l’entêtement… (Sourires.)
Il s’agit d’accorder aux les acheteurs publics la possibilité de favoriser des partenariats avec des entreprises locales dans l’objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre dues au transport et à la livraison de marchandises. L’acheteur est dispensé de tout formalisme.
Il convient d’appliquer à tous les marchés à objectif écologiquement responsable, dès lors qu’ils ne dépassent pas les seuils européens, la souplesse qui n’est actuellement permise que pour les marchés de moins de 90 000 euros.
Concrètement, cela signifierait par exemple qu’une collectivité territoriale pourrait, pour un marché de fournitures, se dispenser de formalisme jusqu’à 214 000 euros, dès lors qu’elle viserait un objectif écologiquement responsable.
Il s’agit là encore de soutenir nos entreprises de proximité et de favoriser une consommation locale et respectueuse de l’environnement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Une procédure adaptée est une procédure par laquelle l’acheteur définit librement les modalités de passation du marché dans le respect des principes de la commande publique. Il est possible de passer un marché selon une procédure adaptée, notamment lorsque la valeur estimée hors taxes du besoin est inférieure à des seuils fixés par le droit européen – vous l’avez rappelé.
L’objet de cet amendement me semble poser deux difficultés principales.
D’une part, la possibilité de passer un marché selon une procédure adaptée serait ouverte dès lors que le marché vise « un objectif écologiquement responsable ». Or cette formulation est assez vague.
D’autre part et c’est un autre écueil, il est précisé que l’acheteur pourrait alors adapter librement les modalités de publicité du marché. Or cette formulation pourrait être attentatoire aux principes fondamentaux de la commande publique.
En conséquence, la commission sollicite l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État. Le code de la commande publique prévoit une publicité obligatoire des avis de marché au Bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) ou dans un journal d’annonces légales pour les marchés des collectivités publiques dont la valeur estimée est supérieure à 90 000 euros.
Cette publicité obligatoire contribue directement à la transparence des procédures, mais aussi à un meilleur accès des entreprises à la commande publique, en centralisant les avis de publicité. Il s’agit non d’un formalisme inutile, mais bien au contraire d’une mesure qui garantit à l’acheteur un degré suffisant de publicité et d’information au regard des caractéristiques du marché, ce qui facilite l’accès des entreprises à la commande publique.
C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 596 rectifié bis, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Decool, Guerriau et Lagourgue, Mme Mélot et MM. Menonville, Capus et A. Marc, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 2172-4 du code de la commande publique, il est inséré un article L. 2172-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2172-…. – Lorsqu’ils achètent une solution numérique innovante, les acheteurs tiennent compte des incidences environnementales de cette solution, dans les conditions prévues par voie réglementaire.
« Est considérée comme solution numérique innovante au sens du présent article, toute solution de nature logicielle, vendue seule ou intégrée au sein d’un produit et remplissant l’un des critères suivants :
« - la solution présente un caractère innovant par rapport aux technologies existantes dans le même secteur d’activité ;
« - la solution est présentée comme ayant un impact carbone positif en permettant, notamment, de réduire ou optimiser la consommation d’énergie. »
La parole est à M. Joël Guerriau.