M. le président. Je mets aux voix l’article 4 bis, modifié.
(L’article 4 bis est adopté.)
Article 5
I. – L’article 14 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est ainsi modifié :
1° Avant la dernière phrase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Les autorités d’autorégulation mises en place dans le secteur de la publicité adressent chaque année au Parlement un rapport faisant état des dispositifs d’autorégulation existants et présentant le bilan de leur action. » ;
2° Sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Le Conseil supérieur de l’audiovisuel promeut en outre, en matière environnementale, des codes de bonne conduite sectoriels et transversaux, appelés “contrats climats”, ayant notamment pour objet de réduire de manière significative les communications commerciales sur les services de médias audiovisuels et sur les services édités par les opérateurs de plateforme en ligne au sens de l’article L. 111-7 du code de la consommation relatives à des biens et services ayant un impact négatif sur l’environnement, en particulier en termes d’émissions de gaz à effet de serre, d’atteintes à la biodiversité et de consommation de ressources naturelles sur l’ensemble de leur cycle de vie. Ces codes de bonne conduite visent également à prévenir des communications commerciales présentant favorablement l’impact environnemental de ces mêmes biens ou services. Cet impact est mesuré au moyen de l’affichage environnemental prévu à l’article 15 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, lorsque cet affichage environnemental est généralisé.
« Un code de bonne conduite organise d’ici le 1er janvier 2023 au plus tard, sous l’autorité du Conseil supérieur de l’audiovisuel, la suppression pour les sociétés mentionnées aux I, II et III de l’article 44 de la présente loi des communications commerciales relatives à des biens et services ayant un impact négatif sur l’environnement mentionnées au cinquième alinéa du présent article dès lors que des produits ou services ayant un effet moindre sur l’environnement sont disponibles.
« Ces codes de bonne conduite sont rendus publics et comportent des objectifs et des indicateurs permettant un suivi annuel de leur mise en œuvre.
« Les codes de bonne conduite sectoriels couvrent au moins les secteurs d’activité concernés par les biens et les services faisant l’objet d’un affichage environnemental obligatoire au titre de l’article 15 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 précitée, les produits concernés par une étiquette énergie obligatoire au titre de l’article 15 de la directive 2009/125/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant un cadre pour la fixation d’exigences en matière d’écoconception applicables aux produits liés à l’énergie et les véhicules concernés par une étiquette obligatoire au titre de l’article 3 de la directive 1999/94/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 1999 concernant la disponibilité d’informations sur la consommation de carburant et les émissions de CO2 à l’intention des consommateurs lors de la commercialisation des voitures particulières neuves. »
II. – L’article 18 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est ainsi modifié :
1° Après le 11°, il est inséré un 12° ainsi rédigé :
« 12° Un bilan de l’efficacité des codes de bonne conduite ayant pour objet de réduire de manière significative les communications sur les services de médias audiovisuels et sur les services édités par les opérateurs de plateforme en ligne au sens de l’article L. 111-7 du code de la consommation ayant un impact négatif sur l’environnement, réalisé avec le concours de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie mentionnée à l’article L. 131-3 du code de l’environnement et un bilan du code de bonne conduite ayant pour objet de supprimer pour les sociétés mentionnées aux I, II et III de l’article 44 de la présente loi les communications commerciales relatives à des biens et services ayant un impact négatif sur l’environnement dès lors que des produits ou services ayant un effet moindre sur l’environnement sont disponibles. »
2° (Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 148, présenté par Mme Varaillas, MM. Lahellec, Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas.
Mme Marie-Claude Varaillas. Nous souhaitons supprimer l’article 5, qui nous semble au mieux inutile et au pire dilatoire.
L’autorégulation et les codes de bonne conduite n’ont jamais fonctionné, surtout lorsqu’il s’agit principalement de questions financières, dans le secteur de la publicité comme ailleurs.
Nous proposons donc de supprimer un dispositif inopérant, qui renforce les missions du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) sans augmenter pour autant ses moyens.
C’est par des dispositifs réellement contraignants que nous avancerons sur ces questions, plutôt que par de simples gesticulations. Ainsi, dans une étude parue en septembre 2020, l’UFC-Que Choisir révèle qu’après douze ans d’autorégulation les messages publicitaires à destination des enfants font toujours la part belle aux aliments de Nutriscore D et E.
Aussi nous faut-il éviter que les défaillances constatées dans la publicité alimentaire se répètent en matière de publicité environnementale. Nous proposerons donc, au travers d’un autre amendement, la création d’une véritable autorité de régulation en la matière.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Cet amendement nous semble excessif ; son adoption conduirait à perdre le bénéfice du travail accompli par notre commission, en lien avec la commission de la culture.
Si nous pouvons constater que l’autorégulation n’est pas un système parfait, au vu des bilans réalisés chaque année par l’Ademe et l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), mais aussi en regardant les publicités proposées à nos concitoyens, il me paraîtrait néanmoins dommage de supprimer toutes les dispositions de cet article et de ne garder que les mesures d’interdiction inscrites à l’article 4.
Pour ces raisons, ma chère collègue, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Varaillas, l’amendement n° 148 est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Varaillas. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 148 est retiré.
L’amendement n° 1228, présenté par M. Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Après le troisième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les messages publicitaires télévisés ou radiodiffusés en faveur de biens et services ayant un impact négatif sur l’environnement, en particulier en termes d’émissions de gaz à effet de serre, d’atteintes à la biodiversité et de consommation de ressources naturelles sur l’ensemble de leur cycle de vie, émis et diffusés à partir du territoire français et reçus sur ce territoire, doivent contenir une information à caractère environnemental. La même obligation d’information s’impose aux actions de promotion de ces biens et services.
« Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État pris après avis de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie et après consultation de l’autorité de régulation professionnelle de la publicité. » ;
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Selon un premier bilan réalisé par le CSA en 2017, l’instauration de bandeaux sanitaires en dessous des publicités pour les produits alimentaires transformés a peu d’effets positifs. Ainsi, 76 % des parents d’enfants de moins de 15 ans interrogés ont déclaré mettre en pratique les messages sanitaires.
Bien évidemment, comme le montrait l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) en 2017, tout n’est pas encore parfait. Pour ne prendre qu’un exemple, la majorité des enfants et des parents estiment que les bandeaux écrits et non lus sont bien souvent trop discrets, et ce d’autant plus lorsque les publicités exigent de leur part une concentration accrue.
Dans un autre domaine, il faut relever le bilan globalement positif des incitations anti-tabac, et ce malgré les pratiques douteuses de certains producteurs qui parasitent les messages inscrits sur les paquets.
Ainsi, comme le relève le chercheur Marc Bonhomme dans l’ouvrage collectif Communication de l’État et gouvernement du social, reprenant une étude de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes), 19 % des fumeurs déclarent qu’il leur est arrivé de renoncer à une cigarette en percevant ces avertissements. Par ailleurs, 79 % des fumeurs interrogés pensent qu’ils jouent un rôle d’incitation à la discussion ; 68 % d’entre eux estiment que leur présence accroît la réflexion des « accrochés à la cigarette ».
C’est bien ce que nous demandons fondamentalement aux politiques sanitaires. Pour citer une nouvelle fois Marc Bonhomme, « il convient de ne pas trop demander à ces avertissements sanitaires, qui ne constituent qu’une mesure parmi d’autres. Ils favorisent une meilleure responsabilisation de chacun d’entre nous dans notre vie privée. »
En gardant tout cela à l’esprit, il pourrait être intéressant d’intégrer une dimension environnementale dans les publicités audiovisuelles pour les produits polluants. Alors que le Gouvernement a fait de la réduction de la place de la voiture, ou encore de l’avion, des axes de bataille, inciter leurs utilisateurs à des modes de déplacement alternatifs pourrait passer par une sensibilisation sur la pollution effective causée par ces moyens de locomotion.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Mon cher collègue, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, car il est pleinement satisfait par la rédaction de l’article 5 issue des travaux de la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Il est défavorable à cet amendement, tout simplement parce que ce dernier est satisfait : l’affichage environnemental sera intégré dans les publicités. Je crois que c’est le message le plus efficace.
M. le président. Monsieur Lahellec, l’amendement n° 1228 est-il maintenu ?
M. Gérard Lahellec. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 1228 est retiré.
L’amendement n° 2242, présenté par Mme de Cidrac, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
Remplacer les mots :
médias audiovisuels et sur les services édités
par les mots :
communication audiovisuelle et sur les services proposés
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de précision.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 2243, présenté par Mme de Cidrac, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4, dernière phrase
Remplacer les mots :
15 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire
par les mots :
L. 541-9-9-1 du code de l’environnement
II. – Alinéa 6
Supprimer cet alinéa
III. – Alinéa 7
Remplacer les mots :
15 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 précitée, les produits concernés par une étiquette énergie obligatoire au titre de l’article 15 de la directive 2009/125/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant un cadre pour la fixation d’exigences en matière d’écoconception applicables aux produits liés à l’énergie et les véhicules concernés par une étiquette obligatoire au titre de l’article 3 de la directive 1999/94/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 1999 concernant la disponibilité d’informations sur la consommation de carburant et les émissions de CO2 à l’intention des consommateurs lors de la commercialisation des voitures particulières neuves.
par les mots :
L. 541-9-9-1 du code de l’environnement, les produits concernés par une étiquette énergie obligatoire, au titre de l’article 16 du règlement (UE) 2017/1369 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2017 établissant un cadre pour l’étiquetage énergétique et les véhicules concernés par une étiquette obligatoire au titre de l’article L. 318-1 du code de la route.
IV. – Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ces codes de bonne conduite sectoriels et transversaux sont rendus publics et comportent des objectifs et des indicateurs permettant un suivi annuel de leur mise en œuvre. »
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Cet amendement vise à actualiser les références mentionnées au présent article.
M. le président. L’amendement n° 1710, présenté par M. Lurel, Mmes Conconne et Jasmin, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après le mot :
conduite
insérer les mots :
tiennent compte de la diversité des collectivités territoriales françaises,
La parole est à M. Hervé Gillé.
M. Hervé Gillé. Je défends cet amendement déposé par M. Lurel et Mmes Conconne et Jasmin sur l’article 5, qui met en œuvre des codes de bonne conduite traduisant les engagements pris au sein d’un contrat climat conclu entre les médias et les annonceurs, d’une part, et le CSA, d’autre part, afin de réduire la publicité pour les produits polluants.
Cette mesure laisse à penser que plus aucune publicité pour les vols long-courriers à destination des collectivités d’outre-mer ne pourra être visible. Alors que les industries touristiques outre-mer, motrices de l’activité locale, sont lourdement et durablement affectées par la crise sanitaire, une telle décision obérerait tout espoir de reprise.
Cela fait craindre également que les publicités pour les bananes de Martinique ou de Guadeloupe ne puissent plus être diffusées, l’impact carbone du produit tombant sous le coup du code de bonne conduite défini par le CSA.
L’objet de cet amendement est donc de faire en sorte que les codes de bonne conduite prennent en compte la diversité des territoires d’outre-mer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Mon cher collègue, tel est bien le cas : votre amendement est donc satisfait. Je vous demande donc de bien vouloir le retirer, faute de quoi l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 2243 de Mme la rapporteure.
Quant à l’amendement n° 1710 je vous en demande le retrait, monsieur le sénateur.
En effet, je peux vous confirmer que les codes de bonne conduite prévus à l’article 5 sont des outils de droit souple ; il serait inopportun de figer dans le texte des dérogations alors qu’aucune interdiction de principe n’est prévue. Il ne semble donc pas nécessaire de préciser dans la loi la prise en compte des spécificités ultramarines.
Je tiens en outre à vous rassurer : il n’est absolument pas dans l’intention du Gouvernement d’interdire ou de limiter les publicités pour les vols vers les outre-mer, ou encore pour les bananes des Antilles.
M. le président. Monsieur Gillé, l’amendement n° 1710 est-il maintenu ?
M. Hervé Gillé. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 1710 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 2243.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 2208, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Cet amendement vise à supprimer la disposition prévoyant un code de bonne conduite spécifique pour les entreprises de l’audiovisuel public, visant à organiser la suppression des publicités pour les produits ayant un impact négatif sur l’environnement dès 2023.
Je suis défavorable à cette disposition, car elle créerait une forte inégalité entre les entreprises de l’audiovisuel public et celles du secteur privé.
Surtout, l’objectif de ce code spécifique me semble déjà en partie satisfait, puisque le code de bonne conduite prévu à l’article 5 permettra de réduire de manière significative les publicités relatives à des biens et services ayant un impact négatif sur l’environnement dans l’ensemble des médias audiovisuels, publics comme privés. La mise en œuvre de ces engagements aura mécaniquement pour conséquence d’augmenter la part de publicités pour des produits ayant un impact moindre sur l’environnement.
La mesure proposée est par ailleurs impossible à mettre en œuvre. Les groupes visés n’auraient pas la capacité de procéder, pour chaque campagne publicitaire, à une analyse concurrentielle sur le caractère substituable des offres de produits et de services moins polluants.
Enfin, la suppression de certaines publicités pourrait entraîner des pertes substantielles de recettes pour les sociétés audiovisuelles publiques ; elle risquerait donc de porter atteinte à l’équilibre de leur modèle économique. Or, aux termes de la jurisprudence constitutionnelle et administrative, l’indépendance des médias implique que le législateur garantisse les ressources des sociétés nationales de programme. Aucune compensation financière n’ayant été apportée par le projet de loi, une telle disposition n’apparaît pas conforme à la Constitution.
M. le président. L’amendement n° 1410, présenté par MM. Assouline, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le Conseil supérieur de l’audiovisuel organise une consultation et rend un rapport, d’ici le 1er janvier 2023, qui examine les différentes modalités envisageables permettant une compensation intégrale, pour les sociétés mentionnées aux I, II et III de l’article 44, de l’éventuelle perte de recettes pour ces sociétés découlant de la suppression des communications commerciales relatives à des biens et services ayant un impact négatif sur l’environnement dès lors que des produits ou services ayant un effet moindre sur l’environnement sont disponibles.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Je présenterai cet amendement dans le même état d’esprit que précédemment, en essayant d’aborder la complexité du sujet, mais aussi d’interpeller mes collègues qui, en commission, ont amendé cet article.
Ce sujet est effectivement complexe. Certes, on peut avancer avec un code de bonne conduite pour supprimer l’ensemble des publicités qui concourent au dérèglement climatique dans le secteur ; il faut alors déterminer ce qui rendrait possible cette suppression et si plusieurs étapes sont nécessaires. Mais la facilité qui consiste à réserver cette approche à l’audiovisuel public m’interroge : quelles sont les réelles intentions de ses auteurs ?
On ne peut pas croire que réserver l’impact de cette mesure à l’audiovisuel public permettrait d’atteindre l’objectif fixé. Excusez-moi, mes chers collègues, mais France Télévisions représente seulement 12 % du chiffre d’affaires de la télévision en France, avec 350 millions d’euros, alors que le futur regroupement M6–TF1 en représentera 75 %. Que nous dites-vous ? Voulez-vous simplement atteindre l’audiovisuel public, ou bien réduire le réchauffement climatique et toucher un secteur entier ? Pourquoi ne touchez-vous pas au privé ?
Cela me rappelle la manière dont la droite s’était d’un coup découverte opposée au commerce, lors de la réforme de l’audiovisuel lancée par Nicolas Sarkozy. Elle avait supprimé la publicité après 20 heures sur les chaînes de l’audiovisuel public, en promettant de le compenser. Rien n’a été compensé ! La publicité a migré vers le privé. Eh bien, ce sera pareil cette fois-ci : si vous ne touchez que le secteur public, de toute façon, la publicité ira ailleurs. En ce moment, elle va plutôt sur le Net, mais si elle veut rester dans l’audiovisuel, elle ira vers le privé.
Alors, il faut soit adopter une approche globale, soit entrer plus précisément dans les détails. L’amendement que je défends ici vise en tout cas à proclamer la nécessité absolue de compenser une mesure qui toucherait ainsi à l’audiovisuel public. Mme la ministre a raison de critiquer cette mesure, mais elle pourrait répondre et annoncer que l’État compensera, puisque cela dépend de l’exécutif. Pour l’instant, le Gouvernement n’arrête pas de réduire le budget de l’audiovisuel public, tout en lui laissant les mêmes missions.
M. le président. L’amendement n° 1409, présenté par MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5
1° Remplacer l’année :
2023
par l’année :
2024
2° Supprimer les mots :
pour les sociétés mentionnées aux I, II et III de l’article 44 de la présente loi
La parole est à M. Joël Bigot.
M. Joël Bigot. L’atteinte des objectifs que la France s’est fixés, notamment au travers de la stratégie nationale bas-carbone, implique de fixer des trajectoires pour l’ensemble des acteurs économiques.
S’agissant du secteur de la publicité, les acteurs doivent se soumettre à des règles et des délais qui respectent ces objectifs et véhiculer des messages qui soient en cohérence avec eux.
Ainsi, par cet amendement, nous proposons qu’un code de bonne conduite organise, d’ici au 1er janvier 2024, la suppression des communications commerciales relatives à des biens et services ayant un impact négatif sur l’environnement, suppression applicable à tous les acteurs et non pas seulement aux seules sociétés du service public audiovisuel.
M. le président. L’amendement n° 1225, présenté par M. Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer les mots :
pour les sociétés mentionnées aux I, II et III de l’article 44 de la présente loi
La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas.
Mme Marie-Claude Varaillas. Les travaux de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ont permis de faire un nouveau pas en matière de régulation de la publicité.
En 2018, ce marché représentait en France plus de 16 milliards d’euros, dont un tiers se concentrait sur les secteurs de l’automobile, du transport aérien et des énergies fossiles. Or, si une étude de 2013 établissait que 80 % des Français trouvaient la publicité trop intrusive, celle-ci conserve pourtant ses effets d’incitation à l’achat.
Au vu de cette situation, l’opposition faite par Aurore Bergé, à l’Assemblée nationale, entre nécessité de lutte contre le dérèglement climatique, d’une part, et relance économique, dont la publicité serait un enjeu central, d’autre part, doit être réinterrogée. Une telle position est d’autant plus étonnante qu’à ce compte on pourrait tout aussi bien réinterroger les fondements de la loi Évin en ce qui concerne l’alcool et le tabac ! Il serait inenvisageable de voir à nouveau des publicités vantant le tabac ; de même, il est temps de faire passer un nouveau cap à la régulation de la publicité.
Malheureusement, nous restons encore au milieu du gué après les travaux de la commission. En effet, interdire la publicité pour les produits polluants sur le service public audiovisuel seulement pose problème à deux titres.
Premièrement, cela contribue une nouvelle fois à creuser le fossé entre secteur privé et service public, et à démunir ce dernier de moyens nécessaires à sa survie et à la qualité de ses programmes. C’est d’autant plus dommageable que les missions du service public audiovisuel mettent l’accent sur la culture et l’éducation et que cela doit englober une sensibilisation accrue des téléspectateurs aux questions climatiques.
Deuxièmement, plus grave encore, une telle mesure serait largement insuffisante. Le secteur public ne représente en effet qu’une part minime du marché publicitaire en France. Pour ne prendre qu’un exemple, la fusion voulue entre TF1 et M6 permettrait à ce nouveau groupe de réunir près de 75 % du marché publicitaire audiovisuel français. Se pose par ailleurs la question des nouveaux secteurs de la publicité, notamment sur internet, qui ne cessent de progresser.
Ainsi, la rédaction actuelle de l’article 5 ne permet qu’un progrès très modéré en matière de lutte contre la pollution, tout en précarisant encore un peu plus un service public audiovisuel en difficulté budgétaire, qui doit être au centre de la stratégie de sensibilisation des citoyens.
M. le président. L’amendement n° 2244, présenté par Mme de Cidrac, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Alinéas 5 et 10
Remplacer les références :
I, II et III
par les références :
I et III
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. C’est un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les autres amendements en discussion commune ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Tous ces amendements tendent à revenir sur une disposition introduite par notre commission, en étroite collaboration avec Michel Laugier, rapporteur pour avis de la commission de la culture.
Cette disposition entend faire de l’audiovisuel public, comme c’est souvent le cas en la matière, un pionnier pour la transition écologique, comme il l’a été en matière de suppression de la publicité le soir. (M. David Assouline ironise.) Elle prévoit qu’un code de bonne conduite conclu avec le CSA organise d’ici au 1er janvier 2023 au plus tard la suppression des communications commerciales sur des biens et services ayant un impact négatif sur l’environnement, dès lors que des produits ou services ayant un effet moindre sur l’environnement sont disponibles.
C’est donc une proposition qui rehausse substantiellement l’ambition environnementale du volet relatif à la publicité de ce projet de loi, sans pour autant affecter de façon importante les recettes de nos services publics audiovisuels, qui pourront toujours diffuser de la publicité pour des produits et services ayant un effet moindre sur l’environnement.
Vous comprendrez donc, mes chers collègues, que je ne peux émettre un avis favorable aux amendements tendant à revenir sur cette mesure construite par notre commission et celle de la culture.
Notre commission a donc émis un avis défavorable sur les amendements nos 2208, 1410, 1409 et 1225.