M. Jean-Yves Leconte. On l’observe depuis quelques semaines, le Gouvernement impose de plus en plus de quarantaines aux voyageurs en provenance d’un certain nombre de zones du monde, ce que l’on peut comprendre compte tenu de la menace des variants.
Toutefois, ces dispositions sont finalement assez peu efficaces, tant que les principes qui les fondent ne sont pas mis en œuvre à l’échelle de l’Union européenne. Ainsi le Gouvernement a-t-il mis en place une quarantaine pour les personnes en provenance du Brésil, de l’Inde, puis d’un certain nombre de pays constituant un hub en termes d’échanges avec l’Inde. Je pense en particulier aux Émirats arabes unis, au Qatar et à la Turquie.
Si ces dispositions sont mises en œuvre sans tenir compte de ce qui se passe dans l’ensemble de l’Union européenne, quelle est leur efficacité ?
Plutôt que de travailler sur ce texte, ne faudrait-il pas réfléchir, à l’échelle de l’Union européenne, à la manière de rendre efficaces et opérationnelles de telles mesures ?
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 40, présenté par Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Leconte, Mme S. Robert, MM. Kanner, Marie et Kerrouche, Mme Artigalas, MM. Durain, Sueur, Bourgi et Redon-Sarrazy, Mmes Conconne et Jasmin, M. Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Si vous en êtes d’accord, monsieur le président, je présenterai en même temps les amendements nos 40 et 41, l’amendement n° 41 constituant un amendement de repli.
Ces amendements portent sur la quarantaine, alors même que l’article 4 traite d’autres sujets. Il s’agit d’un point sensible, qui est d’ailleurs, curieusement, un peu à contretemps.
En effet, nous débattons d’un régime présenté comme une sortie de l’état d’urgence, mais qui comporte une disposition relative à la quarantaine, laquelle permet aux préfets de décréter que le lieu de résidence choisi ne leur convient pas et de contrôler le respect de cette quarantaine.
Outre le fait qu’une telle disposition est en décalage avec une prétendue sortie de l’état d’urgence, elle peut porter atteinte au droit à mener une vie familiale, qui constitue désormais un principe constitutionnel. Selon moi, il convient de ne pas traiter ce point avec légèreté. En conséquence, nous proposons de supprimer les alinéas relatifs à la quarantaine.
Quant à l’amendement n° 41, qui est un amendement de repli, il vise à supprimer les mots « et à permettre le contrôle de leur application ».
M. le président. L’amendement n° 100, présenté par M. Bas, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 8, première et seconde phrases
Après les mots :
l’État
insérer les mots :
dans le département
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Bas, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 41, présenté par Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Leconte, Mme S. Robert, MM. Kanner, Marie et Kerrouche, Mme Artigalas, MM. Durain, Sueur, Bourgi et Redon-Sarrazy, Mmes Conconne et Jasmin, M. Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 8, première phrase
Supprimer les mots :
et à permettre le contrôle de leur application
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 40 et 41 ?
M. Philippe Bas, rapporteur. La commission est défavorable à ces amendements, pour les raisons que j’ai exposées lors de l’examen d’un précédent amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 40, 100 et 41 ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Pour les mêmes raisons que M. le rapporteur, le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 40 et 41.
En revanche, il est favorable à l’amendement rédactionnel n° 100.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures vingt-cinq, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.)
PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
Article 4 bis (nouveau)
L’article L. 3131-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« I. – En cas de menace sanitaire grave appelant des mesures d’urgence, notamment en cas de menace d’épidémie, le ministre chargé de la santé peut, par arrêté motivé, dans l’intérêt de la santé publique et aux seules fins de prévenir et de limiter les conséquences de cette menace sur la santé de la population, prescrire :
« 1° Toute mesure réglementaire ou individuelle relative à l’organisation et au fonctionnement du système de santé ;
« 2° Des mesures de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement, dans les conditions prévues au II des articles L. 3131-15 et L. 3131-17.
« Le ministre peut également prendre de telles mesures après la fin de l’état d’urgence sanitaire prévu au chapitre Ier bis du présent titre, afin d’assurer la disparition durable de la situation de crise sanitaire. » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « II. – » ;
b) La seconde phrase est supprimée ;
3° Le troisième alinéa est supprimé ;
4° Il est ajouté un III ainsi rédigé :
« III. – Les mesures prescrites en application du présent article sont strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu’elles ne sont plus nécessaires. Les mesures individuelles font l’objet d’une information sans délai du procureur de la République territorialement compétent. »
Mme la présidente. L’amendement n° 54, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. M. le rapporteur ayant été très bref sur les amendements du Gouvernement, je vais m’évertuer de l’être tout autant.
Cet amendement répond à la même logique que l’un des amendements que j’avais défendus avant la suspension de séance : nous pensons qu’il est préférable de discuter des évolutions introduites par la commission dans le cadre d’un travail plus global sur les différents instruments de gestion de futures urgences sanitaires.
Nous souhaitons donc le maintien de l’article L. 3131-1 du code de la santé publique dans sa forme actuelle.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Je ne voudrais pas laisser se prolonger la frustration que j’ai cru déceler chez M. le secrétaire d’État devant le laconisme de mes réponses ; je vais donc développer celle-ci. (Sourires.)
Vous voulez supprimer l’article 4 bis ; il a pourtant été écrit pour vous et vos semblables, les ministres ! En effet, si on laisse l’article L. 3131-1 du code de la santé publique en l’état, vous ne pourrez jamais rien en faire. Or nous espérons tous que vous n’aurez pas à revenir devant le Parlement pour un nouvel état d’urgence sanitaire. Le 31 décembre 2021, le régime temporaire de l’état d’urgence sanitaire tombera et si nous nous trouvons après cette date confrontés à de nouvelles épidémies, vous aurez conservé un article L. 3131-1 du code de la santé publique totalement inopérant, mal rédigé, et qui donnerait, si l’on en faisait une interprétation extensive, des pouvoirs exorbitants au ministre de la santé, que même le Premier ministre ne pourrait pas exercer sans une habilitation législative – la preuve : le Gouvernement nous a demandé, par la loi du 23 mars 2020, d’établir un régime de l’état d’urgence pour fonder l’exercice de pouvoirs exceptionnels en cas de pandémie.
Monsieur le secrétaire d’État, pensez que vous pourriez un jour avoir besoin d’un article L. 3131-1 du code de la santé publique qui soit réellement opérationnel ! C’est ce que nous vous proposons, et je regrette que vous ayez imaginé un seul instant que le Sénat pourrait renoncer à cet avantage qu’il vous offre.
C’est la raison pour laquelle, sur cet amendement, je n’émettrai même pas un avis défavorable : j’en demande tout simplement le retrait.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.
M. Alain Richard. J’abonderai dans le sens de l’approche défendue par Philippe Bas,…
M. Philippe Bas, rapporteur. Elle n’a rien de politique !
M. Alain Richard. … tout en revendiquant la même relation de sympathie avec le Gouvernement – peut-être même M. le rapporteur arriverait-il, en la matière, à me surpasser… (Sourires.)
Monsieur le secrétaire d’État, c’est votre première législature complète. Vous êtes en train de découvrir cet effet de pente et d’accélération que nous observons à chaque fin de législature : le temps législatif se resserre et il devient de plus en plus complexe, pour ne pas dire acrobatique, de faire aboutir un nouveau texte.
Il n’est pas très logique de dire, comme vous le faites, que l’article L. 3131-1 du code de la santé publique est défectueux, mais que vous allez prendre le temps, plus tard, de le réécrire. Vous ne disposerez pas de ce temps d’ici à la fin de la législature !
Si on laisse passer le coche et si l’on n’adopte pas la proposition de la commission des lois, qui est certes sans doute encore améliorable, on se prive de faire de l’article de gestion des crises sanitaires potentielles un outil législatif utile et équilibré. C’est la dernière station avant l’autoroute…
M. Philippe Bas, rapporteur. Ou le dernier point d’eau avant le désert !
Mme la présidente. Monsieur le secrétaire d’État, l’amendement n° 54 est-il maintenu ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 4 bis.
(L’article 4 bis est adopté.)
Article 5
I. – La loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions est ainsi modifiée :
1° Le troisième alinéa de l’article 11 est ainsi modifié :
a) La première phrase est complétée par les mots : « que dans les conditions prévues au chapitre Ier du titre VI du livre IV de la première partie du code de la santé publique » ;
b) Les deuxième et dernière phrases sont supprimées ;
2° Le IV de l’article 12 est abrogé.
II (nouveau). – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le I de l’article L. 1461-1 est complété par un 12° ainsi rédigé :
« 12° Les données recueillies lors de l’épidémie de covid-19 concernant la santé relatives aux personnes infectées et aux personnes ayant été en contact avec elles et traitées dans les conditions prévues à l’article 11 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions. » ;
2° L’article L. 1461-3 est ainsi modifié :
a) Après le I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Par dérogation au I du présent article, un accès aux données mentionnées au 12° du I de l’article L. 1461-1 du présent code ne peut être autorisé que pour permettre des traitements :
« 1° Soit contribuant à la recherche, aux études, à l’évaluation et à l’innovation dans le domaine de la santé et répondant à un motif d’intérêt public ;
« 2° Soit nécessaires à l’accomplissement des missions des services de l’État, des établissements publics ou des organismes chargés d’une mission de service public compétents, dans les conditions définies au III du présent article.
« Un accès aux données relevant du 12° du I de l’article L. 1461-1 relatives aux contacts des personnes infectées ne peut être autorisé qu’aux services de l’État, aux établissements publics ou aux organismes chargés d’une mission de service public figurant sur la liste mentionnée au III du présent article.
« Les dispositions des deux derniers alinéas du I du présent article sont applicables à de tels traitements. » ;
b) Au premier alinéa du II, après la référence : « 1° du I », est insérée la référence : « ou du I bis » ;
3° Au 5° de l’article L. 1461-7, après la référence : « 1° du I », est insérée la référence : « ou du I bis ».
III (nouveau). – Les responsables des traitements créés en application de l’article 11 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions informent sans délai, individuellement et par tout moyen les personnes intéressées que les données qui les concernent sont rassemblées et mises à disposition par le système national des données de santé, en application du II du présent article, ainsi que des conséquences juridiques qui en résultent, s’agissant notamment de la durée de conservation de ces données, des personnes qui y ont accès et des finalités en vue desquelles elles peuvent être traitées. Ils les informent également du droit d’opposition dont elles disposent en application de l’article 74 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Deroche, sur l’article.
Mme Catherine Deroche. Nous avions veillé, lors de l’examen des précédents projets de loi d’urgence, à ce que les données collectées et traitées dans les systèmes d’information développés durant la pandémie – Sidep pour le dépistage et Contact Covid pour le tracing – soient limitées au strict nécessaire.
La protection des données est un enjeu fondamental, particulièrement lorsqu’il s’agit de données à caractère personnel ou de données de santé. L’encadrement que nous avions introduit allait jusqu’à prévoir la suppression de ces données dans des délais courts, toujours de quelques mois après l’issue de la crise sanitaire.
L’article 5 prévoit le transfert des données des fichiers Sidep et Contact Covid dans le système national des données de santé (SNDS), la durée de conservation de ces données pouvant aller jusqu’à vingt ans.
Je tiens à rassurer sur ce transfert et à souligner sa pertinence. Le SNDS est un système sûr et le dispositif que j’ai proposé, que la commission des lois a retenu – je remercie M. le rapporteur d’avoir accepté les amendements que j’ai présentés au nom de la commission des affaires sociales –, permet d’encadrer très strictement l’accès aux données transférées, en particulier les données du fichier Contact Covid. Nous avons notamment prévu un avis du Comité consultatif national d’éthique et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, ainsi que, pour le fichier Contact Covid, un accès réservé aux seuls opérateurs de recherche.
J’insiste ici sur la pertinence de ces transferts. Les données recueillies durant la pandémie représentent un fort potentiel pour la recherche médicale, notamment en matière de modélisation de la diffusion épidémique, et donc aussi pour l’évaluation de nos politiques de santé publique. Il ne faut pas avoir peur de l’exploitation des données de santé : je crois en l’utilité des données recueillies durant la pandémie de covid-19 pour mieux nous préparer à de futures épidémies.
Mme la présidente. L’amendement n° 73, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Depuis le début de la crise sanitaire, notre groupe s’est systématiquement opposé aux garanties instituées en matière de conservation et d’anonymat des données de santé, qu’il juge insuffisantes.
Dans les précédents textes de prorogation de l’état d’urgence sanitaire, le Gouvernement avait prévu une durée de conservation de trois mois des données personnelles liées à la pandémie de covid-19, position que le ministre de la santé avait soutenue le 20 janvier dernier devant les députés. Or le texte qui nous est aujourd’hui soumis prévoit de porter ce délai de trois à six mois.
Quant aux données de santé, elles ne sont toujours pas anonymisées, mais seulement pseudonymisées. Si la recherche sur le virus est indispensable, elle ne doit pas remettre en cause l’anonymat de ces données. Or, en croisant les données des différents systèmes d’information, il est possible de retrouver l’identité des personnes auxquelles elles appartiennent.
Je rappelle que les hôpitaux français ont été particulièrement touchés par les cyberattaques et que l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information travaille actuellement à des obligations de sécurité plus rigoureuses afin de protéger les données de santé de nos concitoyens.
Les garanties ajoutées par la commission des lois du Sénat, qui limitent l’accès à ces données et leur traitement aux services de l’État et des établissements publics, sont positives mais insuffisantes pour nous rassurer totalement.
Tout cela présente un réel danger pour les libertés individuelles et pour la nécessaire confidentialité des données de santé. C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de l’article 5.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Je commencerai par remercier Mme Deroche pour le travail effectué par la commission des affaires sociales, dont elle est la présidente, sur cet article, qui est effectivement très sensible.
Les garanties que l’adoption de l’amendement de Mme Deroche a permis d’apporter en matière de limitation des organismes susceptibles d’exploiter les informations issues de Contact Covid et du Sidep devraient, me semble-t-il, être une source d’apaisement pour les auteurs de l’amendement de suppression qui nous est présenté.
Nous y avons ajouté un amendement qui nous a été inspiré par les règles appliquées par la Commission nationale de l’informatique et des libertés, dont l’objet est de prévoir un droit d’opposition des personnes concernées par ces données, même pseudonymisées. Il s’agit de garantir le secret de la vie personnelle, d’autant que le système Contact Covid contient non seulement l’identité des intéressés, mais aussi celle des personnes qu’ils fréquentent, c’est-à-dire les personnes rencontrées alors qu’ils sont devenus positifs au covid-19. Il faut donc prendre des précautions.
Ces précautions, nous les avons prises ; il me semble donc que nous pouvons adopter cet article et rejeter cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Avis défavorable également.
Madame la sénatrice, votre amendement vise à empêcher le rassemblement des données recueillies dans le cadre des systèmes d’information destinés à la lutte contre l’épidémie de covid-19 au sein du système national des données de santé.
Le SNDS rassemble et met à disposition les données issues des systèmes d’information mis en œuvre dans le secteur de la santé afin de contribuer notamment – vous avez évoqué ce point – à la recherche, aux études, à l’évaluation et à l’innovation dans le domaine de la santé. Ces données issues des systèmes d’information covid (SI covid) ont donc vocation, par définition, à faire partie du SNDS.
Au vu de l’importance des données recueillies dans les SI covid et de l’intérêt essentiel que revêt la conservation de ces données à des fins de recherche et de meilleure compréhension de l’épidémie et de ses impacts sur le système de santé, il nous apparaît nécessaire de prévoir expressément que les données ainsi collectées seront rassemblées au sein du SNDS et seront soumises aux dispositions du code de la santé publique qui encadrent celui-ci.
Sans cette disposition, ces données devraient être supprimées et seraient donc irrémédiablement perdues au 31 décembre 2021. Les dispositions qui encadrent le SNDS et qui s’appliqueraient aux données issues des SI covid rassemblées en son sein sont conformes au règlement général sur la protection des données, elles ont été validées par la CNIL et elles garantissent un haut niveau de protection. De même, la CNIL a validé le principe du rassemblement des données issues des SI covid dans le SNDS lors de l’examen du projet de loi instituant un régime pérenne de gestion des urgences sanitaires – nous l’avions, à l’époque, sollicitée à ce sujet.
Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement de suppression ; j’aurai l’occasion de revenir, dès l’examen du prochain amendement, sur un certain nombre de garanties qui ont été ajoutées en commission par Mme la présidente de la commission des affaires sociales notamment.
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 55, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 2 à 4
Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :
1° L’article 11 est complété par un X ainsi rédigé :
« X. – Les données recueillies dans les traitements de données mis en œuvre en application du présent article et qui relèvent du champ du système national des données de santé défini au I de l’article L. 1461-1 du code de la santé publique sont rassemblées au sein de ce système et soumises au chapitre Ier du titre VI du livre IV de la première partie du même code. » ;
II. – Alinéas 6 à 18
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le présent amendement, dans la logique de ce que le Gouvernement a précédemment défendu, vise à supprimer certaines modifications apportées en commission à l’article 5 du projet de loi, cet article prévoyant le rassemblement des données pseudonymisées recueillies dans le cadre des systèmes d’information relatifs à la gestion de l’épidémie de covid-19 au sein du SNDS.
Il nous semble en effet qu’il n’est pas nécessaire de modifier le régime du SNDS tel qu’il est fixé dans le code de la santé publique pour intégrer ces données dans le système, dans le respect de l’ensemble des garanties qui y sont applicables, ces systèmes d’information ayant en outre par construction une nature temporaire, qui n’appelle pas de dispositions codifiées dédiées.
Il n’y a notamment pas lieu de restreindre l’accès aux données de contact des personnes – nom, prénom, coordonnées telles qu’adresses postale et électronique –, dès lors que ces données n’ont pas vocation à figurer dans le SNDS, celui-ci reposant sur la réutilisation de données pseudonymisées.
En outre, il ne nous semble pas opportun de prévoir que les données recueillies dans les SI covid ne peuvent être conservées au-delà de trois mois que dans les conditions prévues par les dispositions du code de la santé publique relatives au SNDS, car la possibilité de prolonger la durée de conservation des données est prévue de manière plus large, dans le décret du 12 mai 2020, pour les données traitées à fins de surveillance épidémiologique ou de recherche sur le virus hors SNDS.
Par ailleurs, conformément aux articles 12 à 14 du RGPD relatifs au droit à l’information, les mentions d’information relatives aux SI covid, qui sont diffusées collectivement ou individuellement aux personnes concernées, devront être mises à jour sans qu’il soit besoin de le préciser dans le présent projet de loi. De même, il est prévu que la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM), en tant que responsable du traitement du SNDS et dans le cadre de l’élargissement de ce système, informe collectivement et individuellement l’ensemble des personnes dont les données sont concernées.
Il me faut préciser enfin que la mise en œuvre a posteriori d’une information individuelle, pour les personnes dont les données sont d’ores et déjà enregistrées dans les SI covid, se heurte à une difficulté technique majeure : en application de l’article 11 de la loi du 11 mai 2020, les données nominatives collectées dans les SI covid et qui permettraient de contacter individuellement les personnes concernées sont effacées dans les trois mois à compter de leur collecte.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons revenir à la rédaction initiale de l’article 5.
Mme la présidente. L’amendement n° 11, présenté par Mme Benbassa, M. Benarroche et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ces données ne peuvent être conservées au-delà de trois années.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Le présent article autorise l’intégration des données recueillies dans les systèmes d’information Sidep et Contact Covid au système national des données de santé. Le droit commun s’appliquera ainsi à ces données, ce qui permettra leur conservation pour une durée pouvant aller jusqu’à vingt ans, conformément à l’article L. 1461-1 du code de la santé publique, contre trois mois pour les systèmes Sidep et Contact Covid. Un tel allongement de la durée de conservation des données de santé n’est pas concevable.
Le Comité européen de la protection des données relève d’ailleurs des risques pour les droits fondamentaux des citoyens quant à l’utilisation qui sera faite des données recueillies dans le cadre du pass sanitaire. Nous déplorons que le texte ne prévoie actuellement aucune garantie concernant la conservation de ces données personnelles de santé. Celles-ci sont beaucoup trop sensibles pour que l’on se prive de se pencher sur la question de l’encadrement de leur utilisation et de leur conservation.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires demande ainsi, par le présent amendement, que soit limitée à trois ans la durée de conservation des données concernées.