Mme le président. La parole est à M. Thierry Cozic, sur l’article.

M. Thierry Cozic. Le projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui nous est présenté comme une loi de programmation. Dans votre propos liminaire, monsieur le ministre, vous vous êtes félicité de l’adoption de ce texte, à l’unanimité, à l’Assemblée nationale.

Quelle n’a donc pas été notre surprise lorsque le projet de loi a été déposé sur le bureau du Sénat : en fait de programmation, l’ambition est plus que limitée ! En effet, si l’objectif tant vanté de consacrer 0,7 % du RNB à l’aide publique au développement est inscrit à l’article 1er, on n’en trouve aucune traduction concrète dans le texte.

De plus, vous parlez d’une augmentation « significative », monsieur le ministre, en galvaudant certains chiffres. Selon une dépêche de l’Agence France Presse aujourd’hui, la France n’aurait consacré que 0,37 % de son RNB à l’APD en 2017, année de l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron. J’ignore d’où proviennent ces calculs, mais l’OCDE considère pour sa part que ce taux s’était établi à 0,43 % en 2017…

À la lumière de ces chiffres, force est de constater que la hausse tant vantée est plus un effet d’annonce qu’une augmentation significative.

Telle n’est pas notre conception d’une loi de programmation. Un texte de programmation doit être clair, lisible ; ses objectifs financiers doivent être prévisibles.

C’est d’autant plus regrettable que ce projet de loi, qui nous est annoncé depuis deux ans, est censé traduire en actions concrètes un effort financier considérable en faveur de l’aide publique au développement portée par la France. Nous nous attendions à des perspectives, mais les alinéas consacrés aux objectifs financiers relèvent plus du bilan.

L’article 1er constitue le nœud gordien de ce projet de loi de programmation, après l’article 1er A, qui définit en quelque sorte la philosophie de l’aide publique au développement. À la lecture de cet article, nous avons l’impression que le travail a été fait à moitié et la sensation désagréable que vous vous êtes arrêté au milieu du chemin, monsieur le ministre.

Peut-être l’aile progressiste de la majorité présidentielle n’a-t-elle pas eu, une fois de plus, le poids suffisant pour faire fléchir Bercy, dont chacun connaît l’orthodoxie budgétaire, mais le résultat est là.

On peut bien évidemment discuter des objectifs de l’APD, de ses modalités et des moyens de l’évaluer, et c’est très important. Néanmoins, pour porter toutes les ambitions figurant dans ce projet de loi, que nous nous apprêtons à nourrir encore, il faut un solide nerf de la guerre. Tel n’est malheureusement pas le cas, le texte prévoyant que la France consacrera 0,5 % de son revenu national brut à l’APD. Le nerf nous semble bien mollasson !

L’argent est primordial, car il permet aux acteurs du développement d’avoir de la prévisibilité et de mener à bien avec efficacité tous les projets qu’ils souhaitent entreprendre.

Mme le président. Il faut conclure, mon cher collègue !

M. Thierry Cozic. Donnons-nous, donnez-vous enfin les moyens d’atteindre l’objectif de 0,7 % du RNB.

Mme le président. La parole est à Mme Marie-Arlette Carlotti, sur l’article.

Mme Marie-Arlette Carlotti. Si j’interviens sur cet article, c’est parce que j’aimerais que nous abordions le financement de l’aide au développement dans la plus grande transparence. Nous le devons aux populations les plus pauvres dans le monde. Des clarifications sont nécessaires sur les intentions des uns et des autres.

Monsieur le ministre, votre texte ne prévoit que la « possibilité » de consacrer 0,7 % du revenu national brut à l’aide publique au développement en 2025. Aucun engagement n’est pris pour y arriver. Il y a donc un problème – un loup, comme dirait l’autre !

Pour notre part, nous défendrons l’objectif, fixé par les Nations unies depuis les années 1970, de consacrer 0,7 % du revenu national brut à l’APD dans trois amendements dont nous discuterons dans quelques instants.

Contrairement à vous, nous ferons des propositions concrètes et chiffrées. Nous proposerons ainsi de modifier, à l’alinéa 5, le montant des crédits de paiement de la mission « Aide publique au développement » et de les porter à 8,166 milliards d’euros en 2025.

La différence entre vous et nous est là : si vous ne prenez aucun engagement de programmation, c’est que votre objectif d’atteindre le taux de 0,7 % manque de sincérité et n’est qu’un effet d’affichage.

Si vous voulez être complètement transparent sur vos engagements, alors vous devez faire vôtre le tableau retraçant les crédits de paiement de la mission « Aide publique au développement » pour les années 2022-2025, tel que le groupe socialiste propose de le modifier.

Lorsque l’on affiche un taux, il est normal d’indiquer le montant auquel il correspond, sinon on peut imaginer que cela cache quelque chose.

Nous en reparlerons au cours de l’examen des amendements sur l’article, mais je tenais à vous dire, mes chers collègues, que nous ne nous engagerons en aucune manière sur des chimères. Nous soutiendrons toute proposition qui pourrait permettre d’avancer vers un consensus et, surtout, de trouver des moyens nouveaux, afin d’accroître toujours plus notre aide publique au développement.

Mme le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l’article.

M. Jean-Pierre Sueur. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’évoquerai pour ma part la question des biens mal acquis.

En 2019, sur l’initiative du groupe socialiste, le Sénat a adopté à l’unanimité une proposition de loi prévoyant que ces biens, qui représentent plus de la moitié de l’aide mondiale au développement, soit des milliards de dollars, reviennent, lorsqu’ils sont confisqués par la justice, aux populations spoliées, lesquelles vivent souvent dans la misère.

Le texte qui nous est aujourd’hui soumis, grâce à une conjonction de bonnes volontés, ou plutôt de convictions, je l’espère, permettra enfin, une fois qu’il aura été définitivement adopté, que ce soit une réalité en France. Votre ministère et vous-même, monsieur le ministre, vous êtes engagés sur cette question, ainsi que le ministère de la justice et le ministère des finances, il faut le dire. L’Assemblée nationale a également joué un rôle positif.

Le texte prévoit qu’une ligne budgétaire consacrée à l’aide publique au développement sera gérée par votre ministère, ce qui est positif. Il faudra associer à cette gestion les représentants des organisations non gouvernementales et les populations civiles des pays concernés.

Il y a quatorze ans exactement, un premier procès a été intenté par Transparency International, Sherpa et le Comité catholique contre la faim et pour le développement, le CCFD. Depuis lors, ces associations se battent. Je pense que le mérite de cette mesure leur revient en grande partie ; je tenais à le dire ici.

C’est un honneur pour la France de voter cette disposition, car je ne doute pas qu’elle sera adoptée, comme l’a votée la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, à l’unanimité.

Mme le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, sur l’article.

M. Antoine Lefèvre. Mes chers collègues, je vais poursuivre sur le thème des biens mal acquis que vient d’évoquer à l’instant Jean-Pierre Sueur.

En 2017, au nom de la commission des finances, j’ai fait un premier bilan de l’Agrasc, l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, créée en 2010. Dans la foulée, et à l’occasion de la condamnation en cette même année 2017 du fils du président de la Guinée équatoriale et de la confiscation de ses biens en France, à hauteur de 100 millions d’euros, s’est posé le problème de la restitution de ce type d’avoirs, issus de la corruption transnationale.

La proposition de loi de notre collègue Sueur, dont j’ai été le rapporteur, a alors pris tout son sens. Elle avait pour but de garantir l’affectation des avoirs illicites confisqués aux pays et aux populations qui en avaient été privés, mais elle est restée pendante à l’Assemblée nationale.

Cependant, la restitution d’acquis issus de malversations avérées par certains dirigeants condamnés bute toujours sur le choix des différents véhicules juridiques et opérationnels. Elle est impossible par l’Agrasc, qui réaffecte les biens à l’État français. Elle ne l’est pas non plus par un fonds spécial, comme il était prévu dans la proposition de loi de Jean-Pierre Sueur, ni par l’Agence française de développement.

Lors de sa réunion à Biarritz à la fin du mois d’août 2019, le G7 a souligné l’importance de la lutte contre la corruption internationale, mais aussi du recouvrement et de la restitution, tels qu’ils sont définis dans la convention des Nations unies contre la corruption.

Enfin, à la suite du rapport que les députés Jean-Luc Warsmann et Laurent Saint-Martin ont remis à sa demande à Édouard Philippe, alors Premier ministre, à la fin du mois de novembre 2019, dont la proposition 34 invitait à « mettre en œuvre un dispositif législatif, budgétaire et organisationnel ad hoc et pragmatique », le présent texte prévoit – il était temps ! – un dispositif au XI de son article 1er, lequel pourrait toutefois se heurter à des difficultés d’application dues à l’articulation des lois de finances.

La proposition de notre rapporteur pour avis Jean-Claude Requier de confier les modalités de restitution au ministère des affaires étrangères, par le biais de l’aide publique au développement, mais sur des lignes budgétaires dédiées, au cas par cas et localement, sur des projets clairement identifiés et, pourrait-on dire, labellisés, constitue un premier pas.

Il faudra que tout ceci soit clairement identifié et articulé, notamment dans les prochaines lois de finances, car il faut bien avouer que nous marchons – pardon, que nous avançons – lentement sur ce dossier.

Certes, les cas ne sont pas si nombreux, mais ils sont très emblématiques, et il est de notre devoir de veiller à respecter les populations spoliées, ainsi que notre engagement d’une restitution responsable.

Mme le président. La parole est à M. Michel Savin, sur l’article.

M. Michel Savin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cela a été dit au cours de la discussion générale, la politique d’aide au développement de la France porte sur de très nombreux aspects : la lutte contre la pauvreté, pour l’éducation, la culture, la coopération scientifique, la solidarité, la santé et bien d’autres encore.

Je regrette toutefois qu’elle ne prenne pas en compte un domaine important et en plein essor : le sport.

En 2017, à Ouagadougou, le président Macron présentait pourtant le sport comme le « deuxième ciment » pour un avenir commun. Ce discours fort et ambitieux a été largement salué et a bénéficié d’une grande résonnance, mais la France est-elle à la hauteur de ses aspirations ? Je ne le pense pas, et l’absence de la dimension sportive dans ce texte le prouve encore une fois.

La France doit affirmer une diplomatie sportive durable et pleinement engagée pour le développement solidaire et la lutte contre les inégalités, face à la puissance de nouveaux acteurs sur la scène internationale et en réponse aux diplomaties sportives agressives, à l’image de celle de la Chine et des pays du Golfe, qui financent la construction de stades dans les pays en développement ou le sport professionnel au travers du rachat de clubs.

S’il est hors de question de rivaliser avec ces pays, nous pouvons en revanche intervenir, avec un réel savoir-faire et de l’expérience, en nous appuyant sur un collectif qui comprend le Comité national olympique et sportif français, le CNOSF, les fédérations, Paris 2024, l’AFD, l’ambassadrice pour le sport, les ministères et j’en oublie.

Notre pays pourrait être leader sur le continent africain, mais aussi en Inde et dans d’autres pays, pour promouvoir une approche pertinente fondée sur le sport sur des sujets aussi importants que la santé, l’environnement, la formation, la gouvernance, l’organisation de grands événements, etc.

À trois ans des jeux Olympiques de Paris en 2024, il est de notre devoir de décupler les moyens de notre ambition. Inscrire le sport dans la politique de développement de la France est aujourd’hui nécessaire, afin que cette politique soit véritablement reconnue. Tel est l’objet des amendements que je vous présenterai sur cet article.

Les acteurs sont prêts, les moyens sont présents : pour que le sport devienne réellement l’un des ciments de notre avenir commun, nous devons désormais inscrire explicitement le sport dans ce projet de loi et reconnaître ainsi pleinement le rôle qu’il joue.

Mme le président. La parole est à M. Michel Canévet, sur l’article.

M. Michel Canévet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous venons d’aborder assez longuement les orientations de notre politique d’aide au développement lors de l’examen de l’article 1er A.

Nous allons à présent évoquer la trajectoire financière, que le groupe Union Centriste souhaite ambitieuse, bien sûr, mais également rationnelle. Il faut en effet tenir compte des contraintes budgétaires actuelles, du fait notamment des dépenses induites par la pandémie.

Un certain nombre d’orientations sont proposées dans l’article 1er, mais aussi dans le cadre du partenariat global. Ainsi, il est dit qu’il faudrait que, en 2025, quelque 30 % de l’aide par pays programmable soient destinés aux pays les moins avancés, que 50 % au moins de l’aide-État puissent aller vers les pays prioritaires et que les dons représentent 65 % de l’AFD.

Le groupe Union Centriste considère pour sa part que l’essentiel des crédits de l’aide publique au développement de notre pays doit très rapidement aller aux 19 pays prioritaires, quel que soit le porteur du projet. C’est important, car ces pays doivent rattraper leur retard.

En outre, c’est une question de cohérence : puisque nous avons défini une liste de pays prioritaires, nous devons concentrer nos moyens sur ces pays, afin qu’ils puissent se développer.

Tel est le souhait du groupe Union Centriste, dont nous espérons qu’il sera partagé au sein de cet hémicycle.

Mme le président. La parole est à M. Philippe Folliot, sur l’article.

M. Philippe Folliot. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la France est belle et grande quand elle est solidaire et généreuse.

À cet égard, le texte qui nous est soumis est un symbole : il montre que la France n’est pas rabougrie, repliée sur elle-même, inattentive aux autres et enfermée dans d’improbables frontières, contrairement à ce que souhaitent certaines personnes, pour ne pas dire une certaine personne. Nous, nous l’aimons telle qu’elle est, notamment telle que ce texte la donne à voir, monsieur le ministre.

Certains font reposer leur politique d’aide au développement sur des routes, qu’il s’agisse de la route du pétrole, de la route du soja ou de la route de la soie. La France souhaite que sa politique d’aide au développement soit la plus dynamique et la plus exemplaire qui soit.

Dans ce cadre, il est important de se rappeler que, en aidant les autres, on s’aide soi-même. Un ventre creux et une tête vide sont toujours une cible privilégiée pour les mouvements terroristes.

À cet égard, aucune politique sécuritaire ne sera possible à l’échelon international sans une réelle stratégie de développement et de partage des richesses. Ce texte est un élément important, car il y contribue à bien des égards.

Nous partageons donc l’ambition qui est la vôtre, monsieur le ministre, ainsi que la volonté que vous avez affichée. Certains ironisent bien sûr sur le fait qu’une partie de cette trajectoire se déroulera après 2022. Il nous appartiendra collectivement de faire en sorte de la poursuivre le moment venu.

Nous insisterons simplement sur deux éléments : le premier, c’est la francophonie – j’en ai déjà dit quelques mots – et le second, qui nous paraît très important, c’est la place de nos outre-mer.

Ce qui différencie à certains égards la France d’autres pays, c’est sa capacité à être au plus près des pays en développement grâce à ses territoires d’outre-mer, qui lui permettent de ne pas avoir une vision trop hexagonale et autocentrée. Nous devons profiter de cette merveilleuse possibilité pour mieux rayonner et aider les pays voisins de ces territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme le président. Mes chers collègues, permettez-moi de vous rappeler à l’ordre, car je constate un certain relâchement dans le respect des mesures sanitaires… Le masque se porte sur le nez ! Je vous remercie d’y veiller, car nous pouvons tous être touchés de près par cette maladie.

La parole est à M. Pierre Laurent, sur l’article.

M. Pierre Laurent. Nous allons défendre plusieurs amendements à l’article 1er visant à prévoir une programmation plus ambitieuse de l’aide publique au développement, mais, avant d’entrer dans le débat sur cette trajectoire budgétaire, je tiens à attirer votre attention, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur un sujet dont nous n’allons malheureusement pas pouvoir discuter, alors qu’il me semble essentiel.

Une politique d’aide au développement n’a de sens que si elle s’accompagne d’un changement d’approche global de l’accès au financement et à la création monétaire des pays bénéficiaires de cette aide. La seule APD ne suffira pas à leur développement.

J’évoquerai brièvement deux questions, à commencer par celle des droits de tirage spéciaux, les DTS. Les banques centrales émettent en ce moment des milliers de milliards de dollars à des taux très faibles, voire négatifs.

Les pays qui bénéficient de cet argent n’utilisent pas leurs quotas de DTS. Des centaines de milliards de DTS dorment ainsi dans les coffres du Fonds monétaire international, le FMI. De nombreuses voix s’élèvent en ce moment et réclament la mise à disposition des pays en développement, qui en ont besoin, de ces droits de tirage non utilisés par les pays les plus développés.

Gordon Brown, ancien Premier ministre britannique, estimait le 16 décembre 2020 que quelque 1 200 milliards de dollars pourraient ainsi être libérés en deux tranches, en 2021 et 2023, et que les montants ainsi dégagés pourraient atteindre les 2 000 milliards dollars, ce qui permettrait de financer le développement de l’Afrique à travers les banques de développement régionales. Le FMI travaille sur une nouvelle allocation de DTS, à hauteur de 650 milliards de dollars.

La France doit intervenir au conseil d’administration du FMI en juin prochain en faveur de la réaffectation des DTS non utilisés par les pays de l’OCDE. Une telle décision permettrait d’accompagner efficacement notre politique d’aide au développement.

Ma seconde remarque concerne l’accès à la création monétaire de ces pays. Nous venons de procéder à une réforme du franc CFA, laquelle n’a rien changé en vérité. Or nous savons que les pays de cette zone ont besoin de pouvoir accéder à une banque de création monétaire – une banque centrale –, qui détienne un pouvoir souverain.

Mme le président. Il faut conclure, mon cher collègue !

M. Pierre Laurent. Tel n’est pas le cas aujourd’hui. Il faut réfléchir à cette question.

Mme le président. Je suis saisie de treize amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 324, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1, seconde phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

La programmation financière est complétée avant la fin de l’année 2022, après consultation et vote du Parlement, pour les années 2023, 2024 et 2025.

II. – Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

et s’efforcera d’atteindre 0,7 % de ce revenu national brut en 2025

III. – Alinéa 5, tableau

Rédiger ainsi ce tableau :

(En millions deuros courants)

 

2020

2021

2022

Crédits de paiement de la mission « Aide publique au développement »

3 251

3 925

4 800

IV. – Alinéa 6

Rétablir le 2 dans la rédaction suivante :

2. 50 millions d’euros de crédits de paiement de la mission « Plan de relance » sont alloués à la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales en 2021.

V. – Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

3. Les ressources du fonds de solidarité pour le développement, alimentées par le produit des financements innovants, sont augmentées de 100 millions d’euros en 2022 par rapport à leur niveau de 2020 et 2021 et sont ainsi fixées à 838 millions d’euros en 2022, afin de financer les biens publics mondiaux. À défaut d’une telle augmentation, les crédits de paiement de la mission « Aide publique au développement » prévus au 1 du présent IV sont fixés à 4 900 millions d’euros en 2022.

VI. – Alinéa 8

Rétablir le 4 dans la rédaction suivante :

4. En conséquence des 1 à 3 du présent IV, la somme des crédits de paiement de la mission « Aide publique au développement », des crédits de paiement de la mission « Plan de relance » alloués à la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales et des crédits du fonds de solidarité pour le développement s’établit à 3 989 millions d’euros en 2020, à 4 713 millions d’euros en 2021 et à 5 638 millions d’euros en 2022.

La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Je tiens tout d’abord à rappeler quelques faits.

Monsieur Cozic, le taux de 0,37 % date de 2014. Vous me suspectez de ne pas dire la vérité, alors que je ne me suis jamais trompé sur ce point. Les stratégies d’évolution de la part de l’aide publique au développement dans le RNB partent du niveau de 2014, qui est le plus bas. Depuis lors, nous avons progressé, année après année.

J’en prends le Sénat à témoin : depuis 2017, chaque année, la part de l’aide publique au développement augmente dans la loi de finances initiale. Nous avons dépassé le seuil des 10 milliards d’euros en 2017, puis la part de l’APD s’est établie à 0,43 % du RNB en 2018, à 0,44 % en 2019 et à 0,53 % en 2020, sans que ces hausses soient dues à la baisse de notre revenu national brut, le Gouvernement n’ayant pas fait le choix de diminuer le numérateur.

Nous atteindrons notre objectif en 2022. Selon les toutes dernières prévisions de Bercy, nous pourrions d’ailleurs dépasser les 0,55 % cette année-là. Nous sommes donc au rendez-vous.

Permettez-moi également de rappeler que la part véritablement pilotable de notre APD, soit les crédits de la mission budgétaire « Aide publique au développement » et du Fonds de solidarité pour le développement, le FSD, est en forte hausse sur la période 2017-2022 : elle représentera 40 % du total de l’APD en 2022, contre 33 % en 2017.

Voilà pour les faits. En ce qui concerne la programmation, nous allons chacun jouer notre rôle.

Il est vrai que ce texte peut donner l’impression d’être une loi de programmation à l’envers, mais nous avons atteint l’objectif que nous nous étions fixé de consacrer 0,55 % du RNB à l’APD en 2022. Nous allons même dépasser ce taux. Pour cela, il nous aura fallu respecter nos engagements lors de chaque échéance budgétaire, ce que nous avons fait.

Un autre point me paraît très important. Lors du débat à l’Assemblée nationale, une échéance a été fixée, et l’année 2025 a été retenue pour atteindre le taux de 0,7 %.

J’ai une sensibilité un peu différente à cet égard et, sur l’objectif de 0,7 % du RNB, je préfère la rédaction de l’Assemblée nationale à celle du Sénat. (Sourires sur les travées du groupe SER.) Je la trouve en effet plus incitative et volontariste, mais c’est une question d’appréciation.

Cela étant, l’objectif est désormais inscrit dans la loi, ce qui n’était jamais arrivé auparavant. Les députés ont retenu la formulation « s’efforcera », car, en la matière, la programmation est parfois difficile.

D’une part, en cette période de crise sanitaire et économique, les prévisions sur le dénominateur qu’est le revenu national brut sont particulièrement hasardeuses. Certes, je peux comprendre que vous souhaitiez vous faire plaisir et vous projeter dans l’avenir. Reste qu’il vous faudra alors tenir vos prévisions, car on pourra les rappeler, quelles que soient les circonstances futures. En ce qui me concerne, je ne m’y risquerais pas.

D’autre part, une partie du numérateur, notamment les crédits qui correspondent à l’APD non pilotable, comme les frais d’écolage ou d’accueil des réfugiés, n’est pas maîtrisable à l’avance, à plus forte raison, là encore, dans le contexte actuel.

En revanche, nous nous sommes engagés à revenir devant le Parlement pour compléter la programmation financière avant la fin de l’année 2022. C’est l’ensemble de ce dispositif que l’Assemblée nationale, après avoir débattu et formulé des propositions, a accepté.

C’est pourquoi le Gouvernement souhaite, par cet amendement, revenir à la version antérieure du texte.

Premièrement, sur la clause de rendez-vous, nous souhaitons que la programmation financière soit complétée avant la fin de l’année 2022, et non en 2023.

Deuxièmement, nous préférons retenir la formulation de l’Assemblée nationale, qui nous semble plus ambitieuse.

Troisièmement, nous ne pouvons pas nous engager sur le tableau des crédits de paiement jusqu’en 2022. Je pense en particulier aux crédits de la mission « Aide publique au développement », à ceux du plan de relance qui sont consacrés à l’APD ou encore à ceux du fonds de solidarité pour le développement (FSD).

Ainsi que M. le président de la commission le sait, je ne peux pas aller plus loin.

Néanmoins, nous pouvons collectivement constater l’ensemble des progrès qui ont été accomplis. Ce projet de loi de programmation arrive tard, mais il arrive. Comme vous le savez, les retards ne sont pas seulement dus au calendrier parlementaire ; ils sont aussi le fait de nécessités sanitaires.

Je ne reviendrai pas sur chacune des propositions de financement et de programmation. J’appelle simplement l’attention des auteurs des différents amendements sur le fait qu’il existera une mémoire de ce débat.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Néanmoins, je conçois très bien que vous vous soyez lancés dans un tel exercice.

Mme le président. L’amendement n° 107, présenté par Mme Gréaume, M. P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1, seconde phrase

Remplacer les mots :

d’examiner la possibilité d’atteindre en 2025 l’objectif de 0,7 % du revenu national brut

par les mots :

de planifier les crédits budgétaires et les ressources fiscales permettant d’atteindre en 2025 un investissement de 18 milliards d’euros

II. – Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

III. – La France consacrera en 2025 18 milliards d’euros à l’aide publique au développement.

III. – Alinéa 9

Remplacer les mots :

0,55 % du revenu national brut à celle-ci en 2022

par les mots :

18 milliards d’euros à celle-ci en 2025

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Cet amendement s’inscrit dans le débat plus large sur la pertinence à fixer des objectifs en termes de taux.

Aujourd’hui, la France consacre environ 14 milliards d’euros à l’aide publique au développement. Pour atteindre ces objectifs, il faudrait trouver 4 milliards d’euros supplémentaires. Il nous semble essentiel, dans le contexte sanitaire actuel, d’inscrire clairement cette nécessité dans la loi.

Traduire les résultats de la France en matière d’aide publique au développement en volumes et non en taux permet de sécuriser cette politique publique. Il faut s’attendre à des fluctuations de notre revenu national brut et à une augmentation des besoins de la part des États dans les années à venir.

Il y a donc urgence à sécuriser tout le processus de solidarité internationale.