Mme le président. La parole est à M. Stéphane Artano, pour la réplique.

M. Stéphane Artano. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.

À mon sens, quand chacun reste à sa place, il n’y a pas de confusion. C’est vrai aussi en matière de relance. Or, quand un préfet interfère sur un dossier dans lequel l’État met zéro financement, il n’est, je le crois, plus à sa place. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Michel Canevet. Très bien !

Mme le président. La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Au-delà de la communication intensive des services déconcentrés de l’État à laquelle nous assistons depuis quelques semaines, comment les préfets à la relance sont-ils des facilitateurs ?

Raccourcir les délais, alléger les contraintes administratives pour permettre les nécessaires investissements stratégiques sur nos territoires : tels sont les enjeux des plans de relance. De nombreux exemples sur nos territoires tendent à montrer que certaines administrations déconcentrées n’ont pas abandonné leur interprétation restrictive de la loi. Au lieu d’accompagner les investisseurs, elles continuent à les accabler de contraintes incompréhensibles et injustifiées au vu de l’impératif de relance.

Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur, j’ai répondu en partie à votre question en répondant à celle de M. Mouiller.

Dans sa circulaire sur la territorialisation, le Premier ministre a donné instruction à l’ensemble des services de l’État de travailler à la réduction des délais d’instruction et de simplifier le plus souvent et le plus fortement possible les procédures.

Nous y veillons s’agissant non seulement des services déconcentrés de l’État, mais également des services ne relevant pas de l’organisation territoriale de l’État. Je pense notamment aux services de la direction générale des finances publiques et, plus largement, du ministère de l’économie et des finances. Nous souhaitons que l’échelon central respecte les choix effectués de manière déconcentrée et qu’il n’y ait pas de double instruction.

Ainsi que je l’évoquais à l’instant, nous avons aussi veillé à l’allégement d’un certain nombre de procédures. Nous demandons aux sous-préfets à la relance et aux « référents relance », qui sont déjà en poste dans les départements, d’être l’interlocuteur unique à la fois des porteurs de projets, des institutions et des administrations mettant en œuvre les plans de relance, comme la Banque des territoires, l’ANCT ou d’autres agences.

Nous savons qu’il existe des difficultés. Le fait que l’éligibilité des dossiers soit conditionnée au respect de certains critères donne lieu à des échanges et, parfois, à des incompréhensions. Toutefois, nous n’avons pas connaissance à ce stade de situations problématiques au point d’entraîner des blocages comme ceux que vous sous-entendez. Bien entendu, si c’est le cas dans tel ou tel département, nous sommes preneurs de l’information.

Mme le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour la réplique.

M. Yves Détraigne. Monsieur le ministre, je précise que j’intervenais pour le compte d’un collègue absent aujourd’hui. N’allez pas croire qu’il y aurait des problèmes dans le département de la Marne ! (Sourires.)

Mme le président. La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. Monsieur le ministre, je tiens à remercier l’ensemble des services locaux de l’État. Je pense en premier lieu au préfet de mon département, le Gers, qui œuvre avec détermination depuis le déclenchement de cette crise profonde, dont nous ne voyons pas le bout.

Les fonctionnaires d’État ont le mérite de travailler avec professionnalisme dans l’incertitude, confrontés aux ordres et contre-ordres de l’autorité centrale. Face à une telle difficulté, une communication permanente avec les élus a été instaurée. Elle est utile, mais on ne gère bien que ce que l’on mesure. Il faut donc documenter la situation et ses évolutions pour les différentes composantes de la société.

Un premier indicateur est évidemment la santé de la population. Cela permet de mesurer les évolutions quasiment au jour le jour et de pointer les déficiences ou les insuffisances que l’on retrouve peu ou prou partout sur le territoire national.

La situation sociale doit aussi être observée, en partenariat avec les conseils départementaux.

L’économie, de l’artisan au micro-entrepreneur jusqu’à la grosse entreprise, mérite des représentations spécifiques, que les services de l’État, les conseils régionaux, Pôle Emploi et les chambres consulaires sont en mesure de produire.

Un tableau de bord, éventuellement normé, nous serait très utile pour constater la situation et ses évolutions, cerner les points sur lesquels l’action doit être portée ou améliorée, en suivre les effets, etc. Le plan d’action France Relance gagnerait aussi à être suivi de la sorte.

En d’autres termes, monsieur le ministre, prévoyez-vous la conception et l’implémentation d’un processus de représentation, de suivi et d’amélioration du plan de relance et, plus globalement, de l’action menée par l’État à l’échelon local, et ce dans tous les domaines ?

Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur, le site internet « france-relance.transformation.gouv.fr » présente à ce stade quinze des items du plan de relance faisant l’objet d’un suivi, ainsi qu’un tableau de bord quantitatif et qualitatif des projets mis en œuvre.

Vous trouverez sur ce site nombre d’informations relatives à votre département. Par exemple, presque 600 Gersois ont fait l’objet d’une aide à la rénovation de leur logement dans le cadre de MaPrimeRénov’, 580 jeunes Gersois ont été recrutés en apprentissage dans le cadre d’un contrat financé par l’État et à peu près le même nombre de Gersois de moins de 26 ans ont pu être accompagnés.

Nous l’avons fait pour le plan de relance. Nous le faisons ministère par ministère sur un certain nombre de politiques publiques, même s’il n’y a pas pour l’instant de site récapitulant l’intégralité des travaux de l’État dans tous les départements. Cela n’existait pas avant la crise du covid et c’est toujours le cas aujourd’hui. Si l’initiative est sans doute très l’utile et l’outil pertinent, dans la période que nous vivons, je ne vous cache pas que nous préférons concentrer les efforts de l’État sur la mise en œuvre du plan de relance et la réponse à la crise. Nous voulons aussi – je saisis l’occasion de votre question pour le rappeler – veiller à ce que les élus soient le plus utilement et le plus efficacement associés, département par département.

Je vous remercie d’avoir salué l’action du préfet Xavier Brunetière. Nous étions ensemble voilà quelques jours, presque quelques heures, dans le département du Gers pour visiter des entreprises et rencontrer des associations accompagnées dans le cadre du plan de relance. J’ai pu noter combien tous les élus étaient satisfaits de travailler avec lui dans la mise en œuvre du plan. Je profite de l’occasion qui m’est offerte pour le remercier et, à travers lui, pour remercier l’ensemble des préfets.

Mme le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour la réplique.

M. Franck Montaugé. À mon sens, les préfets pourraient jouer un rôle moteur en la matière.

La démarche instrumentée que j’appelle de mes vœux pourrait également servir en temps normal pour suivre l’action à l’échelon départemental, en lien avec les collectivités locales ; je crois que c’est nécessaire. Elle pourrait aussi s’appliquer aux contrats de relance et de transition écologique, dont nous allons entendre parler de plus en plus.

Il nous faudra tirer les enseignements de cette crise, dont j’espère que nous sortirons le plus vite possible, pour progresser collectivement. Je pense que les préfets et les élus – nous en faisons partie – doivent être entendus et associés à la démarche.

Mme le président. La parole est à Mme Brigitte Lherbier.

Mme Brigitte Lherbier. Monsieur le ministre, nombre de secteurs d’activités et d’entreprises sont actuellement sous perfusion, comme un malade à qui l’on administre de la morphine. Le risque pour nombre d’acteurs économiques serait un arrêt brutal de cette perfusion, synonyme pour eux de mort subite.

Les tribunaux de commerce, véritables thermomètres de la vitalité économique d’un territoire et des difficultés rencontrées sur le terrain, disposent d’une expertise comptable utile à la pérennité des entreprises en souffrance.

Le président du tribunal de commerce de Lille Métropole, Éric Feldmann, se bat depuis des années pour faire savoir aux entreprises qu’elles ne doivent pas hésiter à le solliciter à la première difficulté. Pour trouver des solutions pérennes, les préfets peuvent et doivent s’appuyer sur ces acteurs de terrain. Ces derniers connaissent les entreprises, qui, quand bien même elles seraient en difficulté à un moment donné, peuvent être porteuses d’avenir.

M. Feldmann et le préfet Michel Lalande ont mis en place une coopération étroite. Cela leur a permis de remonter une série d’informations de terrain depuis le premier confinement, faisant avancer les textes du Gouvernement, notamment ceux qui visent à aider les TPE.

Par exemple, le fonds de premier secours mis en place par la région et le tribunal de commerce des Hauts-de-France a permis de sauver 3 000 emplois grâce à une aide de 5 millions d’euros.

La mutualisation des efforts des entreprises, des chambres de commerce et d’industrie (CCI), du conseil régional, des tribunaux de commerce sous la houlette du préfet ont été très efficaces.

Monsieur le ministre, de telles synergies entre les acteurs locaux sont vitales pour la santé économique de notre territoire. Seriez-vous favorable à l’extension de ces coopérations ?

Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice Lherbier, oui ! Le Gouvernement y est favorable, à condition de laisser un maximum de liberté aux acteurs locaux.

J’ai eu l’occasion de réunir les acteurs économiques du département du Nord lors d’une visite à la préfecture voilà quelques semaines. J’ai pu constater la mobilisation des chambres consulaires, du tribunal de commerce, des représentants de l’État, des élus locaux pour mettre leurs forces en commun dans des instances de concertation qui existent – je pense notamment à celles qui sont pilotées par le préfet et le directeur départemental des finances publiques – et pour examiner la situation des entreprises en difficulté, en lien permanent avec les représentants consulaires. Ces derniers encourageaient les entreprises à se placer sous la protection du tribunal de commerce et à éviter ainsi des défauts irréversibles.

Nous sommes aujourd’hui dans une situation un peu particulière. En 2020, le nombre de redressements ou de liquidations a été de 35 % à 40 % inférieur par rapport à 2019, un certain nombre d’entreprises ayant pu survivre notamment grâce aux aides liées à la crise du covid.

Cela doit nous inciter à un débranchement progressif des aides – vous l’avez souligné – ainsi qu’à une forme de responsabilité et de mesure, car le niveau de dépenses que nous sommes amenés à engager aujourd’hui n’est pas soutenable dans le temps. Il faudra donc être extrêmement judicieux en choisissant ce que nous laisserons en activité en sortie de crise épidémique et ce que nous pourrons débrancher.

Un certain nombre de dispositions du plan de relance ont vocation à poursuivre l’action et l’effet de dispositifs d’aides. Dans un département comme le vôtre, la baisse des impôts de production représente 411 millions d’euros, au bénéfice de 21 000 entreprises. C’est quelque chose de durable et cela permettra de prolonger les dispositifs d’urgence que nous avons mis en place.

Mme le président. La parole est à Mme Brigitte Lherbier, pour la réplique.

Mme Brigitte Lherbier. Je remercie M. le ministre de faire attention aux tribunaux de commerce et j’invite mes collègues à se rapprocher des présidents de ces juridictions, qui sont toujours de très bon conseil.

Mme le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Monsieur le ministre, le plan de relance de 100 milliards d’euros sur deux ans est inédit. Vous avez recruté des sous-préfets à la relance pour une déclinaison au plus près du terrain. Les appels à projets foisonnent. Ce sont des moules trop souvent façonnés à Paris et les acteurs du territoire – entreprises, administrations ou bailleurs sociaux – se contorsionnent pour s’y couler. Pour ma part, je constate que les sous-préfets sont très mobilisés pour expliquer la subtilité des appels à projets aux acteurs du territoire.

Dans votre volonté de réarmer les territoires, n’aurait-il pas été opportun d’apporter l’ingénierie manquante aux collectivités en difficulté, afin d’accompagner les projets structurants pour leur développement ? Les appels à projets servent toujours ceux qui sont les plus réactifs ou les plus structurés et ceux qui entrent dans le moule préétabli, mais pas toujours les projets les plus adaptés à la spécificité de chaque territoire ou les plus innovants.

Sur le volet cohésion, plus particulièrement sur l’accompagnement des jeunes, les mesures sont parfois en concurrence ou, au contraire, excluent certains profils. Je pourrais ainsi mentionner les nombreux dispositifs d’accompagnement renforcé et personnalisé pour les jeunes, dont la garantie jeunes, le parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie (Pacea), le contrat initiative emploi (CIE), l’insertion par l’activité économique (IAE), le parcours emploi compétences (PEC) jeunes, lui-même en concurrence avec l’accompagnement intensif jeunes (AIJ) de Pôle emploi, sans oublier les contrats aidés ou les services civiques.

Ne manque-t-il pas un peu de cohésion et d’animation locale dans tout cela ? Quel rôle est par exemple réservé aux commissions territoriales emploi-formation, qui sont coprésidées par les régions et les préfets, et auxquelles participent les élus locaux ? Est-il envisagé d’évaluer la pertinence et l’efficacité de ce mode opératoire très encadré via les appels à projets ou via la multiplicité des dispositifs ? Ces derniers peinent à être lisibles pour ceux qui pourraient en bénéficier, voire pour ceux qui les mettent en œuvre.

Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice Le Houerou, les deux sujets que vous abordez sont très différents. Je vous répondrai sur le second, car, très sincèrement, ma collègue ministre du travail serait plus à même que moi d’entrer dans la subtilité d’un certain nombre de dispositifs d’accompagnement vers l’emploi relevant de son ministère.

Les commissions territoriales que vous avez évoquées sont évidemment mobilisables. Elles doivent avoir un rôle d’information, de coordination et de partage des données. Certes, comme nous le savons, leur capacité d’action peut varier d’une région à l’autre, voire d’une commission à l’autre, ce qui n’en fait pas nécessairement un outil totalement pertinent à l’échelon national.

Je partage une partie des considérations qui président à votre question s’agissant de l’ingénierie, notamment de l’ingénierie dans les territoires. Nous avons pris trois décisions pour essayer de répondre à ce besoin.

Premièrement, chaque fois que nous avons pu le faire, nous avons retenu des modalités proches de l’attribution de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) ou de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) plutôt que de l’appel à projets. C’est ce que nous avons fait sur la DSIL relance – nous l’appelons ainsi précisément pour cette raison – ou sur la DSIL rénovation énergétique. Initialement, c’était pensé sous forme d’appels à projets, mais il nous est apparu que l’organisation de l’aide sous forme de DSIL ou de DETR était plus à même de répondre aux attentes des élus, notamment des élus ayant le moins d’ingénierie.

Deuxièmement, le Premier ministre a demandé aux préfets de laisser un mois de plus aux communes de plus petite taille pour répondre aux appels à projets, afin de pallier, d’une certaine manière, les difficultés d’ingénierie.

Troisièmement, et cette décision est mise en œuvre selon les partenariats département par département, l’Agence nationale de la cohésion des territoires dispose de crédits d’aide à l’ingénierie. J’étais à Aurillac voilà quelque temps. Le président du conseil départemental s’est vu notifier plusieurs dizaines de milliers d’euros pour cofinancer des postes d’ingénierie à mettre à disposition des intercommunalités, afin de les aider à répondre aux différents appels à projets du plan de relance.

Il y a là, me semble-t-il, une piste utile pour réarmer ces collectivités, au moins pendant le temps du plan de relance.

Mme le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti.

Mme Catherine Belrhiti. Monsieur le ministre, le Gouvernement a voulu faire piloter à l’échelon local le plan de relance de l’économie par des hauts fonctionnaires dédiés spécialement à cette entreprise.

Une trentaine de sous-préfets ont ainsi été nommés auprès des préfectures de département ou de région. Ils sont censés s’assurer que les fonds du plan de relance sont acheminés vers les bons acteurs sur le terrain pour que les appels à projets soient utilisés à bon escient sans favoriser les grands groupes et les plus puissantes collectivités.

Monsieur le ministre, vous connaissez les critiques dont ces sous-préfets à la relance font l’objet. Je souhaite que vous éclairiez le Sénat sur plusieurs aspects.

Tout d’abord, que répondez-vous à la remarque selon laquelle ces postes sont redondants avec d’autres postes déjà chargés du développement économique ? Le risque d’un court-circuitage du travail actuel des préfets et sous-préfets est réel, sans compter que les collectivités territoriales restent méfiantes envers ce qu’elles considèrent comme un jacobinisme déguisé.

Par ailleurs, le choix du Gouvernement est celui d’une diversification des profils. Cette initiative est destinée à ne pas réserver le pilotage de la relance au corps préfectoral. Reste que nombre de ces sous-préfets, dont la moyenne d’âge est de 30 ans, ont délibérément été recrutés dans des secteurs trop éloignés des problématiques économiques. Comme ils arrivent dans des dispositifs existants, il est à craindre que beaucoup de temps ne soit perdu dans l’apprentissage des réseaux économiques et dans la connaissance des entreprises sur le terrain. Certains viennent du secteur privé, mais leur carrière s’est faite dans de très grandes entreprises, par exemple dans le domaine de la communication.

On aurait pu s’attendre à ce qu’une telle démarche de diversification des profils conduise plutôt au recrutement de professionnels des secteurs de l’économie productive les plus durement touchés par la crise.

Monsieur le ministre, pourriez-vous dresser le bilan du recrutement de ces sous-préfets à la relance et nous éclairer sur la plus-value que vous estimez avoir apportée à nos territoires en créant cette fonction supplémentaire ?

Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice, votre intervention est assez contradictoire – mais c’est l’objet du débat parlementaire – avec plusieurs de celles qui l’ont précédée. Il nous est plus souvent reproché l’absence de sous-préfet à la relance dans un département que la possible redondance entre ces hauts fonctionnaires et tel ou tel acteur.

Nous avons reçu 400 candidatures. Nous avons souhaité que ces sous-préfets à la relance viennent d’horizons diversifiés. D’une part, cela nous semblait utile pour enrichir les expériences de chacun. D’autre part, c’est conforme à ce que nous mettons en œuvre en matière de gestion de la fonction publique et des ressources humaines de l’État depuis le début de ce quinquennat, avec une volonté de mobilité à la fois interministérielle et inter-versants. J’ai eu l’honneur de défendre la réforme de la fonction publique, permettant justement d’abattre bien des blocages et des obstacles à la mobilité, que ce soit entre les ministères ou entre les trois versants de l’administration.

Ces sous-préfets à la relance sont soit des personnes nommées pour exercer exclusivement cette fonction – cela concerne une trentaine de cas – soit des référents désignés au sein de l’administration préfectorale. Ils jouent un véritable rôle d’information des acteurs – je l’ai indiqué – et de coordination à la fois des services de l’État chargés de la mise en œuvre du plan de relance et d’agences de l’État, comme l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), les agences de l’eau, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) ou encore l’Agence nationale de la cohésion des territoires.

Leur plus-value est extrêmement sensible dans les départements où ils officient, quels que soient leur profil ou leur horizon. En effet, ils permettent de débloquer des dossiers et – je le dis en écho à l’intervention de Mme Le Houerou – d’apporter aux collectivités manquant d’ingénierie un soutien pour constituer des dossiers et répondre aux appels à projets.

Votre question me permet, peut-être un peu a contrario de ce que vous avez indiqué, de saluer leur professionnalisme et leur engagement.

Mme le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour la réplique.

Mme Catherine Belrhiti. Monsieur le ministre, les remarques que j’ai formulées correspondent aux remontées du terrain. Certains élus jugent sincèrement le dispositif redondant. Ils ont l’impression que ces sous-préfets se surajoutent à quelque chose qui existe déjà.

Mme le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc.

M. Jean-Baptiste Blanc. Monsieur le ministre, il n’a échappé à personne que la crise sanitaire avait remis la verticalité à l’ordre du jour.

Dans des situations de crise comme celle que nous vivons actuellement, le pouvoir a toujours actionné son dispositif préfectoral. Nous en avons encore une illustration aujourd’hui avec la nomination dans quasiment chacun de nos territoires d’un sous-préfet à la relance. Ces hauts fonctionnaires ont la lourde tâche d’accompagner la mise en œuvre du plan de relance dans les territoires, territoires – ma collègue Catherine Belrhiti a raison – qu’ils méconnaissent souvent.

Nous le constatons une fois de plus : lorsque l’État ne sait pas comment faire, il nomme un sous-préfet. C’est un patch sur sa faiblesse, une rustine pour cacher le démantèlement des services préfectoraux désertés de leurs experts, qui se sont fait happer au fil des années, notamment par les agences régionales.

Ces nominations sont d’autant plus surprenantes au regard de l’inflation galopante du corps préfectoral, ce dont nous pourrions aussi débattre…

Vous auriez également pu dépêcher de Paris des inspecteurs de Bercy ou des membres du contrôle général économique et financier pour coordonner ces plans. Il y en a, paraît-il, 300 qui pourraient nous servir.

Que voulez-vous ? On a encore l’impression de technocratie et d’approche lointaine du sujet.

Monsieur le ministre, oui, à l’heure de la relance, le préfet est porteur, facilitateur de projets. Il a la capacité de dialogue avec les élus locaux, bien plus que des agences de l’État comme les agences régionales de santé (ARS) ou les rectorats, dont nous connaissons la trop grande rigidité et le caractère procédurier.

Le préfet pourrait animer, faciliter, être médiateur, mettre en cohérence les politiques publiques de territoire, c’est-à-dire simplifier ce magasin de farces et attrapes qu’est devenu l’État avec ses appels d’offres et autres aides diverses ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.) Il y a deux conditions à cela. D’une part, il faut que le préfet soit entouré de collaborateurs formés. D’autre part, il faut que cette ambition soit partagée par votre gouvernement, monsieur le ministre. Or le Gouvernement a poursuivi ses fusions, comme c’est le cas depuis vingt ans dans ce pays.

On se rend compte à présent que le département est le bon échelon. Vous avez donc deux outils : la charte pour la contractualisation territoriale et les contrats de relance et de transition écologique. Il ne manque plus que la volonté de s’appuyer sur les préfets de département. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur Blanc, j’ai déjà répondu à votre question en répondant à Mme Belrhiti.

Vous qualifiez l’État de « magasin de farces et attrapes ». J’ai trop de considération pour les agents mobilisés face à la crise pour partager et laisser passer de tels propos.

Vous contestez le rôle et l’utilité des sous-préfets à la relance. Je persiste à dire que ceux-ci sont utiles et que les maires, y compris dans un département comme le vôtre, sont assez heureux de s’appuyer sur leur expertise.

Enfin, vous avez mis en cause, parmi d’autres cadres d’emploi, le contrôle général économique et financier de l’État. Cela signifie que vous avez mis en cause les fonctionnaires chargés de veiller au respect des orientations de l’État au sein des conseils d’administration des entreprises au capital desquelles celui-ci participe, ainsi que l’un des corps d’audit de la fonction publique de l’État et du ministère de l’économie et des finances.

Pour être honnête, je ne suis pas sûr qu’il soit particulièrement responsable d’incriminer le travail de celles et ceux qui défendent au quotidien les intérêts de l’État.

Mme le président. La parole est à M. Laurent Burgoa.

M. Laurent Burgoa. Monsieur le ministre, voilà peu de temps encore, votre gouvernement souhaitait encourager des relations préfet-maire plus étroites.

Pourtant, aujourd’hui, à l’heure où se pose la question de la relance, donc de l’attribution des crédits de soutien à l’investissement, certains maires se trouvent face à un mécanisme qu’ils jugent occulte. Comment ne pas les comprendre ?

Ces décisions d’attribution sont entre les mains des seuls préfets. Hier, le Gouvernement et la majorité parlementaire jugeaient discrétionnaires et d’un autre temps les dotations d’action parlementaire, c’est-à-dire les réserves parlementaires. Aujourd’hui, des sommes considérables sont entre les mains de hauts fonctionnaires, qui n’ont de comptes à rendre à personne. Ce n’est pas un détail !

À défaut de pouvoir participer à une commission ou d’y être représentés, nos élus perdent confiance dans les services de l’État. Les relations privilégiées que les grandes villes entretiennent avec les préfectures et, surtout, leur importante ingénierie confèrent à ces dernières un avantage certain par rapport aux plus petites communes de France.

Monsieur le ministre, les crédits de soutien ne ruissèlent pas jusqu’aux petites communes ! C’est la raison pour laquelle, afin de pouvoir les défendre, mais aussi d’être gage de transparence, donc de confiance envers le processus d’attribution, je vous demande de bien vouloir vous inspirer du mode d’attribution de la DETR, qui est soumis à une commission regroupant préfet, parlementaires et élus locaux.