M. le président. La parole est à M. Dany Wattebled.
M. Dany Wattebled. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je me réjouis que la commission mixte paritaire soit parvenue à une rédaction commune de l’ensemble des dispositions restant en discussion du projet de loi organique portant diverses mesures relatives à l’élection du Président de la République.
Je suis tout particulièrement heureux qu’elle ait retenu l’ensemble des apports du Sénat.
Je pense notamment aux dispositions visant à améliorer les règles de propagande électorale : renforcement de l’accessibilité de la propagande aux personnes en situation de handicap ; obligation pour les instituts de sondage de publier leurs marges d’erreur lors de toute publication ou diffusion d’un sondage relatif à l’élection présidentielle ; fixation d’une date plus précoce pour la publication de la liste des candidats, ce qui permet de sécuriser la période intermédiaire, pendant laquelle les médias doivent donner la parole de manière équitable à l’ensemble des candidats et dans des conditions de programmation comparables.
Je pense également aux mesures qui tendent à adapter les règles de financement de la campagne : faire débuter la période de financement de l’élection présidentielle au 1er juillet 2021 pour une durée d’environ neuf mois ; augmenter l’avance versée à l’ensemble des candidats pour faciliter le financement des campagnes et tenir compte de l’inflation ; conférer un caractère expérimental à la dématérialisation des comptes de campagne de l’élection présidentielle et des reçus-dons ; publier les comptes de campagne de l’élection présidentielle en open data.
Je pense enfin aux dispositions relatives à la sécurisation de l’organisation de l’élection présidentielle : convocation des électeurs par décret simple ; actualisation de la liste des parrains pouvant présenter un candidat ; amélioration du fonctionnement des commissions de contrôle qui veillent à la régularité des listes électorales consulaires des Français de l’étranger.
L’examen de ce texte a pris, de façon inattendue, une dimension politique avec le dépôt devant le Sénat, moins de vingt-quatre heures avant la réunion de la commission, d’un amendement du Gouvernement sur le vote anticipé par machine à voter. Notre assemblée s’y est fermement opposée, et je m’en félicite. Il s’agissait d’une question de respect du Parlement et, par là même, de nos institutions.
Sur la forme, l’amendement du Gouvernement a été déposé devant la seconde chambre saisie, sans consultation préalable des forces politiques ou du Conseil d’État et sans que l’Assemblée nationale ait été appelée à se prononcer.
Sur le fond, cet amendement a fait naître beaucoup d’interrogations. Comment voter par anticipation, alors que la campagne électorale n’est pas terminée ? Avons-nous le même avis une semaine avant le vote que le jour même ? Comment garantir la sécurité des machines à voter ? Où auraient-elles été disposées ? Sous quelle responsabilité auraient-elles été placées ?
Si nous ne refusons pas de réfléchir à des évolutions de notre droit électoral, une telle réflexion doit se faire de manière apaisée, à bonne distance des échéances électorales.
Madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi organique qui nous est soumis a été conçu comme un texte de réglage comprenant divers ajustements techniques. Il s’inscrit dans la continuité des textes de toilettage adoptés avant chaque élection présidentielle depuis 1988 pour mettre en conformité les mesures d’organisation de l’élection présidentielle avec les évolutions du code électoral. Aussi, le groupe Les Indépendants le votera.
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne vais pas m’attarder sur l’avatar qu’a constitué le dépôt par le Gouvernement d’un amendement en séance devant le Sénat : il a assez fait parler de lui – trop, vraisemblablement ! Je vais commencer par saluer les quelques avancées techniques, qui sont essentiellement dues à la sagesse des parlementaires, lesquels ont su s’accorder sur un texte qui avait été travaillé de manière assez équilibrée par notre commission et notre assemblée.
Comme l’a déjà fait remarquer notre rapporteur, le texte reprend les avancées prévues par nos travaux sénatoriaux. Toutefois, je continue de regretter l’abandon de la transmission électronique des parrainages, pourtant prévue depuis plusieurs années et repoussée à l’élection suivante. C’est un réel constat d’échec de ne pas avoir pu, en quatre ans, mettre en place les conditions de sécurité permettant ce processus de dématérialisation.
Il me paraît tout de même étrange, à l’heure du télétravail et de la déclaration des impôts par internet, que le Gouvernement n’ait pas pu sécuriser moins de 50 000 connexions non simultanées. Pourtant, ce texte prévoit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques mette en œuvre un téléservice permettant l’édition et la délivrance de reçus pour chaque don versé à un candidat et un autre pour recevoir de manière dématérialisée les comptes de campagne. J’espère bien évidemment que cette simplification numérique bénéficie des mêmes critères de sécurité qui justifient le non-recours à la dématérialisation des parrainages…
J’en profite pour souligner l’importance fondamentale d’un sujet peu souvent mis en avant : le vote des détenus.
Je l’ai déjà dit, mais je souhaite le répéter : la prison est certes le lieu d’exécution de la peine, mais elle est aussi le lieu qui doit permettre la réinsertion du délinquant. Comment envisager une réinsertion, alors que ces personnes sont exclues de fait, et non en droit, de la participation à la vie citoyenne que constitue le moment fort de notre vie démocratique, l’élection présidentielle ? Malgré le succès relatif de l’établissement de bureaux de vote lors des élections européennes, il a été choisi de ne pas renouveler l’expérience pour se concentrer sur le vote par correspondance. Il est dès lors très important que l’administration pénitentiaire prenne part activement à l’information des détenus sur leur droit à être inscrits sur une liste électorale, mais aussi sur les démarches à effectuer et sur les modalités du vote par correspondance.
Le texte a aussi gardé les modifications sur le vote par procuration, considéré comme une modalité du vote ne nécessitant plus d’être justifiée et devant s’appliquer à tous, y compris aux Français de l’étranger. Je reste, comme vous le savez, excessivement prudent sur le déploiement de ce vote par procuration : il me semble que c’est celui qui présente le risque le plus fort de non-sincérité.
Je salue le fait que les apports sénatoriaux sur les conditions de publication des sondages aient été conservés. Certes, d’un point de vue personnel, mes réticences sur les dates possibles de ces publications sont bien plus grandes. Il n’en reste pas moins que notre texte permet d’apporter une explication de ces chiffres, de montrer les limites des méthodes statistiques sur les intentions de vote et d’accompagner ces publications a minima des marges d’erreur calculées, voire de réglementation plus drastique sur les périodes tolérées de réalisation et de diffusion.
Ces améliorations techniques sont nécessaires, mais il est de notre devoir d’essayer d’utiliser le plus grand nombre de moyens pour faciliter le vote. Nous devons également garder en tête notre responsabilité de nous poser les bonnes questions, en particulier comment donner envie de voter ; pour cela, il est nécessaire de crédibiliser la capacité des élus de tous niveaux à changer la vie quotidienne de nos concitoyens.
Notre système est à bout de souffle, notre démocratie fragilisée, pas seulement en raison des mesures restrictives prises au nom de la lutte contre la pandémie. Il est donc plus que temps de réfléchir sur notre République et sur les dangers de l’hyperprésidentialisation.
La légitimité issue des citoyens ne devrait pas pouvoir être détachée de la responsabilité envers eux – les deux sont liées. Le Président, en gouvernant seul, hors du cadre régulier prévu par notre démocratie, se permet en quelque sorte d’échapper aux électeurs.
M. le président. Il faut conclure, monsieur Benarroche !
M. Guy Benarroche. Les tentatives maladroites d’établissement de nouveaux contours pour l’élection au cœur de notre système, à l’image de l’exercice singulier, sous bien des aspects, de la présidence de la République actuelle, ne sont pas de notre goût. C’est pourquoi le groupe GEST ne pourra pas voter ce texte : il abstiendra.
M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.
M. Thani Mohamed Soilihi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre assemblée a adopté le projet de loi organique portant diverses mesures relatives à l’élection du Président de la République en février dernier à une très large majorité.
Bien que notre pays traverse encore des difficultés liées au contexte sanitaire qui nous ont poussés à adapter nos différents rendez-vous démocratiques, récemment les élections régionales et départementales, ce projet de loi organique en finit avec le cadre dérogatoire et nous projette vers un retour à la normale.
Le groupe RDPI se félicite que la réunion de la commission mixte paritaire ait pu déboucher sur un accord concernant ce texte de réglage et de coordination pour le prochain scrutin présidentiel de 2022. Il nous revient aujourd’hui d’en valider les conclusions et de souligner la qualité du travail réalisé par les deux chambres, ainsi que les différents apports et innovations qui bénéficieront aux électeurs et aux candidats pour garantir un scrutin toujours plus sincère, transparent et démocratique.
Comme ont pu le rappeler certains collègues, ce texte vise essentiellement à actualiser des dispositions de la loi du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel.
D’une part, il apporte des précisions et des innovations pour les électeurs afin de créer les conditions de participation la plus large possible à ce scrutin. Je pense notamment à la publication du décret de convocation des électeurs et au vote par procuration des personnes détenues, qui a été expérimenté dans le cadre des élections européennes de 2019. Conformément à la loi Engagement et proximité, le texte prévoit la déterritorialisation des procurations. Il procède aussi à l’adaptation de dispositions relatives aux listes électorales consulaires et au vote des Français de l’étranger.
D’autre part, le texte actualise la liste des parrains pouvant présenter un candidat à l’élection présidentielle, en tenant compte des dernières réformes territoriales et en y ajoutant les 152 présidents des conseils consulaires des Français de l’étranger.
Le texte que nous votons adapte aussi les règles de financement pour éviter tout chevauchement avec les comptes de campagne des élections régionales et départementales de juin 2021, pour expérimenter la dématérialisation des comptes de campagne de l’élection présidentielle et des reçus-dons et, enfin, pour publier les comptes de campagne de l’élection présidentielle en open data.
À cela s’ajoute une autre avancée majeure concernant la propagande électorale. Les candidats auront de nouvelles obligations en matière d’accessibilité de leur campagne : ils devront tenir compte des différentes formes de handicap et de la diversité des supports de communication, comme suggéré par notre collègue Philippe Mouiller.
Pour finir, permettez-moi de revenir sur le vote par anticipation proposé par le Gouvernement. Certes, la méthode choisie n’a pas été la bonne, mais nous devons retenir son objet premier, qui reste la participation du plus grand nombre à cette élection. Certains de nos collègues ont d’ailleurs été réceptifs à cette proposition, mais l’ont finalement rejetée en raison de cette considération de forme ou pour des raisons politiques. Toujours est-il que nous devrons poursuivre nos réflexions parlementaires dans les prochaines années afin de moderniser les règles relatives aux opérations électorales dans l’objectif de garantir au scrutin toujours plus de participation, de sécurité et de sincérité.
Le groupe RDPI votera les conclusions de la commission mixte paritaire.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce texte procure une double satisfaction.
La première est celle qui accompagne toujours une commission mixte paritaire lorsqu’elle est conclusive. Je ne m’y attarde pas, mais il est évidemment satisfaisant d’observer le Parlement travailler en bonne intelligence. A priori, ce projet ne devait d’ailleurs pas poser de difficulté majeure, puisqu’il procédait au toilettage électoral, tant nécessaire qu’habituel, qui précède l’élection présidentielle. Toutefois, lors de sa discussion en séance, nous avons eu la surprise de découvrir un amendement présenté par le Gouvernement qui donna lieu à de vifs échanges.
Cela me conduit à ma seconde satisfaction : nous nous réjouissons de la sagesse de la commission mixte paritaire, qui n’a pas retenu cette disposition sur le vote par anticipation qui devait conduire les électeurs à voter dans une autre commune plusieurs jours avant le dimanche traditionnel du scrutin.
Sur le fond, nous avons souligné les inconvénients que représentait le dispositif dans l’état où il nous était présenté. Cela dit, nous demeurons ouverts au débat : c’est peut-être une idée à creuser ou du moins une piste de travail et de réflexion pour repenser l’organisation de nos scrutins et lutter contre l’abstention.
Finalement, c’est du point de vue de la méthode que cet amendement nous a paru le plus surprenant. Comme pour toute compétition, qu’elle soit sportive ou politique, on ne modifie pas les règles du jeu la veille de la finale !
Vous le savez, j’ai déjà dit dans cet hémicycle mon goût pour le Top 14, ainsi que pour les valeurs que porte le rugby. Par conséquent, vous pourriez imaginer que je trouve beaucoup de défauts aux footballeurs ; il faut toutefois leur reconnaître au moins une qualité : ils savent parfois faire preuve de prudence et ne changent pas leur règlement avec légèreté. J’en veux pour exemple la méthode par laquelle ils ont institué l’assistance vidéo à l’arbitrage (VAR).
Ce procédé fut d’abord autorisé à titre expérimental lors de matchs amicaux, puis il a été utilisé pour la première fois en compétition officielle en 2017 à l’occasion de la très peu disputée Coupe des confédérations. Qu’aurait-on dit si le premier test avait eu lieu, par exemple, lors de la Coupe du monde de 2018 ? Qu’aurait-on pensé d’une équipe de France championne du monde, mais victorieuse grâce aux aléas d’un test ? Dans des conditions équivalentes, que risquerait-on de dire d’un Président de la République élu au bénéfice d’une expérimentation contestable ?
Comme pour tout, les premières fois sont rarement une réussite, et cette digression sportive me conduit à dire combien les lumières de l’expérience sont nécessaires. Il y a des sujets pour lesquels l’improvisation n’est pas de mise : l’élection à la plus haute fonction de notre République doit être planifiée et se dérouler sans accroc. Il y va de la confiance qu’accordent nos concitoyens aux institutions de la Nation.
Ainsi, l’idée même de proposer et d’instituer ce vote anticipé par voie d’amendement, et pour la première fois à l’occasion de l’élection présidentielle, était de nature à nous interroger, voire à nous inquiéter. Nous avons donc observé avec satisfaction que le dispositif avait été écarté.
Nous nous satisfaisons également que l’amendement visant à réduire l’importance des élus locaux dans le parrainage des candidats n’ait pas été retenu. Sur ces questions, il faudra peut-être évoluer dans les prochaines années, mais il ne paraissait pas opportun que cela ait lieu dès 2022.
Dans ces conditions, le groupe du RDSE votera les conclusions de la commission mixte paritaire. (Mme Jacky Deromedi applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce projet de loi, qui aurait dû n’être qu’une routine législative précédant l’élection présidentielle, a pris une ampleur dépassant largement l’écho de ses faibles ambitions. Sans crier gare, sans débat ni étude d’impact, le Gouvernement a déposé un amendement visant à proposer le vote par anticipation la semaine avant l’élection présidentielle dans certaines communes dotées de machines à voter.
Nous avons toutes et tous été pris de court par ce manque de sérieux du Gouvernement. Sur la forme, d’abord, puisqu’un tel dispositif impliquerait des moyens importants de sécurisation technique et juridique. Les risques de fraudes liés à l’usage du vote sur les machines ne peuvent être minimisés. Sur le fond, ensuite, puisqu’une telle proposition est susceptible de constituer une atteinte à la sincérité du scrutin. En effet, son adoption aurait entraîné une rupture d’égalité entre les électeurs dans leur information, laquelle peut influencer leur décision jusqu’au dernier moment. Nous nous félicitons donc que l’examen en CMP n’ait pas conduit à la réintroduction de cet amendement. Cet épisode nous aura cependant révélé une défaillance inquiétante dans les méthodes de travail de l’exécutif.
À rebours de la logique du Gouvernement, nous estimons que la portée de la campagne électorale ne doit pas être minimisée. Nous souhaitons que l’ensemble des candidats puissent la mener dans de bonnes conditions et que les électeurs soient correctement informés. Cela nous paraît d’autant plus nécessaire en période de pandémie. C’est pourquoi nous avions déposé des amendements sur les sondages, par exemple, afin d’aller plus loin que la publication des marges d’erreur et de limiter la manipulation de l’opinion par un outil qui n’a rien de neutre.
Sur la campagne audiovisuelle, pour assurer le pluralisme et la visibilité de l’ensemble des candidats, nous souhaitons que la norme soit l’égalité, plutôt que l’équité, laquelle favorise ceux qui disposent déjà d’une forte exposition. Nous ne pouvons laisser la bonne information des citoyens entre les mains des grands groupes privés détenant les médias. Le rôle du législateur doit être de réguler l’organisation des échéances démocratiques afin de garantir des débats d’idées pluralistes et représentatifs de l’ensemble de la société.
Enfin, concernant la tenue de la campagne et de l’élection, face à la situation sanitaire dans laquelle nous sommes depuis maintenant un an, l’absence de dispositions pour anticiper les risques de perturbation nous paraît à contre-courant et dommageable. Nous sommes pourtant parfaitement capables de prendre de telles dispositions.
Le vote représente pour nous un pilier fondamental de la démocratie. Contre sa déterritorialisation et sa complexification par des artifices techniques, nous défendons la forme citoyenne du scrutin. Afin que chacune et chacun de nos concitoyens puisse participer pleinement à l’exercice du droit de vote, nous avions également déposé un amendement défendant la tenue de bureaux de vote dans les établissements pénitentiaires.
Le texte de la CMP intègre des améliorations votées par le Sénat : sur l’accessibilité de la propagande pour les personnes handicapées, la publication des comptes de manière plus transparente ou encore l’avancement de la date de publication de la liste des candidats, que nous avions porté par amendement. Nous regrettons cependant que nos autres propositions n’aient pas été retenues.
Ce projet de loi aurait pu permettre des avancées, mais il demeure un texte d’actualisation à la marge du cadre de l’élection présidentielle. Il passe surtout pour nous à côté de l’essentiel : la remise en question d’un régime hyperprésidentiel, avec un Parlement mis à distance. C’est pourquoi, vous le savez tous, nous nous inscrivons dans une démarche de révision de nos institutions pour aller vers une VIe République véritablement démocratique et préservée des manœuvres au service des ego et intérêts privés.
Notre groupe ne s’opposera pas à ce texte, mais il s’abstiendra : nous considérons qu’il est une validation du régime actuel.
M. le président. La parole est à M. Arnaud de Belenet. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Arnaud de Belenet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis de nouveau pour examiner le projet de loi organique relatif à l’élection présidentielle, cette fois-ci à l’issue de son adoption en commission mixte paritaire.
Je ne reviens pas sur la présentation technique du texte, dont le contenu est connu de tous dans cette assemblée.
Lors de son examen au Sénat, le texte a été enrichi par plusieurs dispositions que j’estime, avec Philippe Bonnecarrère, dont je prends le relais sur ce texte, et le groupe Union Centriste tout à fait opportunes. Un point avait particulièrement retenu notre attention, c’est le dépôt d’un amendement gouvernemental visant à mettre en place pour l’élection présidentielle un vote anticipé au moyen de machines électroniques dans une liste limitée de communes dans chaque département.
Le groupe centriste regrette que le débat ouvert par cet amendement sur un sujet aussi important n’ait pas pu être pleinement satisfaisant sur le fond. En effet, nous ne souhaitons pas écarter l’idée que ce sujet fasse à l’avenir l’objet d’une étude approfondie. Je pense qu’une réflexion, de manière sereine et transparente, autour des modalités opératoires des scrutins sera nécessaire dans les années à venir pour répondre non seulement aux évolutions que notre société connaîtra, mais aussi aux risques de crises sanitaires, qui peuvent se répéter. Si nous avons pu modifier les dates des élections locales en raison de la pandémie, il ne pourra pas en être de même pour une élection présidentielle.
Au nom du groupe Union Centriste, je tiens à saluer le travail réalisé en commission mixte paritaire. Nous nous félicitons que le texte, enrichi de nombreuses dispositions après son passage au Sénat, ait suscité l’adhésion sans réserve de la CMP.
Notre groupe est notamment satisfait du maintien des dispositions prévues à l’article 2 sur la durée de la période de financement de la campagne électorale, auxquelles il est très attaché. Le Sénat, en raccourcissant cette période à neuf mois au lieu de douze, souhaitait faire disparaître les incertitudes qu’aurait engendrées le chevauchement de deux périodes de financement de campagne électorale : d’un côté, les élections départementales et régionales et, de l’autre, l’élection présidentielle. Maintenant, les choses sont claires.
Cette approche nous semblait nécessaire afin de prémunir les élus contre les difficultés de ventilation des dépenses entre ces différents scrutins. Ramener au 1er juillet 2021 le début de la période de financement pour l’élection présidentielle nous paraît être le moyen le plus simple et le plus efficace pour éviter tout débat et tout contentieux ultérieur.
Par ailleurs, nous nous réjouissons du renforcement de l’accessibilité de la campagne électorale pour nos concitoyens en situation de handicap. Nous estimons qu’il s’agit d’une avancée pas seulement symbolique, mais véritablement majeure pour l’intégration et l’inclusion de tous dans la vie démocratique de notre pays. Nous partageons les mesures de bon sens s’inscrivant dans cette dynamique.
À travers ce projet de loi organique, le Gouvernement poursuit la coutume qui prévoit, depuis 1988, que chaque élection présidentielle soit précédée d’une adaptation législative afin de conformer les règles de l’élection présidentielle aux évolutions de notre droit électoral. Ainsi, ce texte devrait avoir un impact limité, et c’est normal, dans la mesure où son ambition reste cantonnée à des mesures techniques qui ne bouleversent ni l’organisation de l’élection présidentielle ni les règles de la campagne électorale.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe Union Centriste soutient le texte adopté par la CMP. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Thani Mohamed Soilihi applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Jacky Deromedi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Jacky Deromedi. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, nous terminons nos travaux aujourd’hui par la discussion des conclusions de la commission mixte paritaire du 2 mars dernier sur le projet de loi portant diverses mesures relatives à l’élection du Président de la République. Ce texte est essentiellement technique dans sa forme, comme l’ont reconnu les rapporteurs de l’Assemblée nationale et du Sénat, mais il n’en est pas moins essentiel à la bonne tenue de la prochaine élection présidentielle, en 2022.
Ce scrutin occupe, depuis les premières années de la Ve République, une place centrale dans notre ordonnancement institutionnel et politique. Les Français ne s’y trompent d’ailleurs pas, comme le montre le taux élevé de participation à chaque présidentielle.
Le droit électoral applicable à cette élection est d’une telle importance qu’il est directement dérivé des articles 6 et 7 de la Constitution et prolongé dans une loi organique. Celle-ci nécessite cependant des mises à jour régulières pour demeurer en phase avec le droit électoral ordinaire. C’est ce qui a conduit à la quasi-systématisation du vote de lois organiques révisant le texte de 1962.
Le présent projet de loi s’inscrit précisément dans cette démarche. Il a, par ailleurs, été heureusement travaillé dans un esprit d’échanges constructifs par nos deux assemblées.
Concrètement, le texte dont nous discutons aujourd’hui comporte des dispositions fixant le délai imparti à la convocation des électeurs, complétant ainsi le texte jusqu’alors muet de la loi de 1962. Cela sécurise la préparation du scrutin. Cependant, l’essentiel porte sur l’adaptation des règles pratiques applicables aux candidats et au scrutin. Il en est ainsi de la transmission des fameux parrainages, du vote des détenus, de la propagande électorale et, bien sûr, de la mise à jour des nombreux renvois du texte organique, demeuré statique, vers le code électoral, qui a évolué depuis la dernière présidentielle.
À ce volet purement « hexagonal » s’ajoute un article consacré aux règles applicables aux Français de l’étranger, en particulier à leur vote par procuration et aux commissions de contrôle chargées de veiller à la régularité des listes électorales consulaires.
Après sa transmission à notre assemblée, ce texte a encore pu être amélioré, en particulier grâce aux travaux de notre rapporteur. Le Sénat a, par exemple, adapté les règles de financement de la future campagne électorale, afin de permettre à celle-ci de se dérouler dans les meilleures conditions démocratiques et de transparence possible. C’est ainsi que les comptes de campagne des candidats à l’élection présidentielle seront disponibles en open data, comme c’est la règle pour les autres élections.
Au-delà de ces mesures relevant plutôt de la technique pure, notre assemblée a aussi pris, sur l’initiative de notre collègue Philippe Mouiller, des mesures fortes en vue de garantir l’accessibilité de la propagande aux personnes à mobilité réduite.
Le Sénat a enfin complété la mise à jour de plusieurs autres dispositifs concernant les parrainages ou encore les Français de l’étranger. À cet égard, je suis particulièrement satisfaite, en tant que sénatrice représentant les Français établis hors de France, de voir les 152 présidents des conseils consulaires rejoindre la liste des parrains. Dès l’automne 2018, j’avais demandé, avec mes collègues, que les conseils consulaires soient présidés par des élus pour respecter pleinement les principes démocratiques. Nous l’avons voté. Il était normal que les présidents de ces conseils puissent parrainer les candidatures à la présidence de la République.
Avant de conclure, je ne peux négliger de mentionner le sujet qui a agité les débats dans cet hémicycle voilà trois semaines. Je fais référence à l’introduction tardive et maladroite par le Gouvernement d’une mesure portant sur le vote anticipé au moyen des machines à voter, introduction qui avait suscité notre vif étonnement.
Je ne reviendrai pas ici sur les multiples fragilités constitutionnelles, juridiques et pratiques dont souffrait cette disposition, ni sur les interrogations soulevées par les méthodes de l’exécutif. Espérons au moins que cet intérêt soudain du Gouvernement pour les machines à voter l’incitera maintenant à prendre connaissance du rapport qui nous avait été confié sur ce sujet, avec mon collègue Yves Détraigne, en 2018.
C’est à la quasi-unanimité que le Sénat a rejeté l’amendement du Gouvernement, et je me félicite de ne pas le voir figurer dans le texte dont nous discutons aujourd’hui. Dans ces conditions, le projet de loi organique, tel qu’il est issu des travaux de la CMP, nous semble satisfaisant. Le groupe Les Républicains le votera. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)