M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour la réplique.
M. Henri Cabanel. Il s’agit d’un problème de communication, monsieur le ministre, parce qu’apparemment, les médecins ne vous ont pas compris ; ils ont compris ce que j’ai indiqué.
Je reviens sur la méthode : il faut arrêter d’infantiliser les Français. Sans explication des enjeux, ils ne peuvent pas comprendre les mesures. Comment comprendre qu’ils peuvent aller en Espagne ou en Italie et y manger au restaurant alors qu’en France, ces derniers sont fermés depuis six mois ? Comment comprendre qu’ils peuvent prendre le métro, le RER, le TGV et l’avion, mais qu’ils ne peuvent aller ni au cinéma ni au théâtre ? (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, INDEP, UC et Les Républicains.)
situation des ouïghours
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Esther Benbassa. Monsieur le ministre, dès 2014, la Chine accuse les Ouïghours, minorité musulmane du Xinjiang, de radicalisme politique et religieux et construit des camps dit « de rééducation » pour les y enfermer de manière préventive.
Entre 1 et 3 millions d’Ouïghours sont déportés arbitrairement dans ces camps de concentration et de travail. Les enfants sont éloignés de leurs parents, les couples séparés. Les détenus doivent renoncer à leur langue et à leur religion.
On y pratique stérilisations et avortements forcés. Les tortures et les viols sont le lot quotidien. L’objectif des autorités chinoises est d’éradiquer l’identité ouïghoure.
Le 17 décembre dernier, le Parlement européen a adopté une résolution visant à sanctionner les responsables chinois à l’origine de ce nettoyage ethnique. Vous-même, monsieur le ministre, en février 2021, avez dénoncé « un système de répression institutionnalisé » devant le Conseil des droits de l’homme des Nations unies.
Selon une étude australienne, des dizaines de milliers d’Ouïghours ont été transférés dans des usines appartenant à 83 grandes marques internationales, où ils sont en situation d’esclavage.
Hier, au Conseil de Paris, le groupe écologiste déposait un vœu relatif à l’oppression des Ouïghours. Aujourd’hui, c’est le groupe écologiste du Sénat qui vous demande d’user avec d’autres membres de l’Union européenne de votre pouvoir de pression économico-diplomatique, si puissante que puisse sembler la Chine.
Que comptez-vous faire ? Oserons-nous dire demain que nous ne savions pas ou que nous ne pouvions rien ? (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Madame la sénatrice, vous avez évoqué avec justesse les pratiques injustifiables qui se déroulent au Xinjiang. Les faits que vous mentionnez sont attestés, qu’il s’agisse des stérilisations forcées, des abus sexuels dans les camps, des disparitions, des détentions massives, du travail forcé, de la destruction du patrimoine culturel, à commencer par les lieux de culte, ou encore de la mise sous surveillance de la population.
C’est la raison pour laquelle, comme vous avez bien voulu le rappeler, j’ai dit, au nom de la France, devant le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, qu’il s’agissait d’un système de surveillance et de répression institutionnalisée à grande échelle. Je l’ai dit en ces termes devant les Nations unies, il y a quelques jours, et je le redis aujourd’hui devant le Sénat.
Je voudrais réitérer mon appel insistant pour qu’une mission impartiale, indépendante et transparente d’experts internationaux puisse se rendre dans le Xinjiang le plus vite possible, sous la responsabilité de la haute-commissaire aux droits de l’homme, Mme Bachelet.
Je tiens aussi à rappeler la responsabilité des entreprises françaises, qui doivent exercer la plus grande vigilance possible, y compris en tant que sociétés mères, sur les risques liés à la chaîne de valeur et sur la nécessité de prévenir des atteintes graves aux droits fondamentaux des Ouïghours. C’est indispensable.
Lors de la négociation de l’accord sur les investissements entre l’Union européenne et la Chine, la France a mis sur la table l’obligation de souscrire à la convention de l’Organisation internationale du travail. Nous entendons la faire respecter.
Enfin, madame la sénatrice, nous travaillons avec nos collègues européens à définir une position commune : après avoir documenté les faits, nous les expertisons, de manière à prendre en conséquence les initiatives adéquates. Vous avez en partie évoqué celles qui ont été mises en œuvre à la suite du vote du Parlement européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
entretien du réseau cuivre
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Emmanuel Capus. J’entends parfois certains s’inquiéter du déploiement de la 5G dans les grandes villes. Pour être honnête, monsieur le ministre Olivier Dussopt, j’entends plus souvent des maires et des citoyens réclamer une meilleure couverture internet de nos territoires.
Partout dans nos campagnes, sur le bord des routes, nous voyons des poteaux abîmés et des lignes téléphoniques à même le sol. Les élus locaux sont démunis face à cette dégradation du réseau.
Le plan France Très haut débit porte certes l’ambition d’un déploiement rapide de la fibre, qui doit progressivement remplacer le réseau cuivre.
Cependant, d’ici là, il faut composer avec l’existant. Pour nombre de nos concitoyens, le principal moyen de connexion à internet reste encore le réseau cuivre.
Monsieur le ministre, ma question concerne donc la maintenance de ce réseau. De nombreux élus locaux nous font part de situations déplorables, voire dangereuses, qui attestent le manque d’entretien du réseau en zone rurale. J’imagine que l’Ardèche n’y échappe pas.
En Maine-et-Loire, dans Les Hauts d’Anjou, il a fallu la mobilisation des élus locaux pour que l’opérateur entretienne correctement le réseau.
Monsieur le ministre, avez-vous dressé un état des lieux de la situation ? Quel suivi comptez-vous mettre en œuvre pour garantir la maintenance du réseau cuivre jusqu’à sa disparition complète ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Loïc Hervé. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur Capus, les élus, mais également nos concitoyens, sont en effet nombreux à s’inquiéter de la maintenance du réseau cuivre pour la téléphonie. Il s’agit de Françaises et de Français qui vivent dans des zones mal couvertes, ou qui, par manque d’habitude, ne pratiquent ni la téléphonie mobile ni l’accès à internet.
Ce que nous appelons le réseau cuivre doit s’éteindre en 2030 pour être remplacé par un réseau fibre. D’ici là, il est essentiel d’assurer son entretien. Nous avons tous et toutes pu constater, notamment dans les départements ruraux, des difficultés qui sont liées à l’entretien du réseau par l’opérateur historique, ou bien à des délais de réparation parfois extrêmement longs, en particulier après des épisodes climatiques ou des incidents qui mettent à mal le réseau : vous avez rappelé que les poteaux pouvaient être en très mauvais état.
Nous devons nous saisir du sujet. La transition vers le réseau fibre et le haut débit est une nécessité, mais l’entretien et le bon fonctionnement du réseau cuivre est une condition essentielle à sa réussite.
Nous travaillons actuellement avec les opérateurs et avec l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) pour établir une cartographie et un plan d’action. Nous nous appuyons aussi sur les travaux récents qui ont été confiés à la députée de la Drôme, Mme Célia de Lavergne. Les conclusions de la mission qu’elle a menée à l’Assemblée nationale ont été rendues le 10 février dernier. D’ici à la fin du mois de mars, M. Cédric O, secrétaire d’État chargé du numérique, devrait annoncer un plan d’action avec les principaux opérateurs.
Celui-ci permettra de préciser, à partir d’une cartographie des zones les plus endommagées, la manière dont les réparations doivent être faites et dont le réseau doit être entretenu. Il posera les bases du futur service public universel intégrant le haut débit. Il fixera un calendrier et une carte de déploiement des travaux pour assurer l’entretien et l’accès à un réseau cuivre de qualité.
Cela ne doit pas nous empêcher de continuer à travailler, tout particulièrement dans le cadre du plan de relance, sur le déploiement du très haut débit. Nous avons prévu des crédits supplémentaires à la fois pour les réseaux de fibre optique, mais aussi pour le déploiement de nouveaux pylônes, de façon à permettre un accès en tous lieux et dans de bonnes conditions à une solution de téléphonie. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour la réplique.
M. Emmanuel Capus. Monsieur le ministre, comme vous l’avez compris, dans cette période sanitaire spéciale, les territoires les plus à l’écart et les femmes et les hommes les plus fragiles se retrouvent doublement isolés, alors que les services publics sont de plus en plus numérisés. Il est donc extrêmement important de veiller, durant les dix prochaines années, à maintenir un entretien effectif du réseau cuivre, avant sa disparition totale. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
situation dans les universités
M. le président. La parole est à M. Pascal Allizard, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Pascal Allizard. Madame la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, depuis plusieurs semaines, la France est rattrapée par des polémiques à propos d’événements, à mon sens inquiétants, survenus dans l’enseignement : essor de la cancel culture, orientation politique des recherches, recul de la laïcité, mise en cause des professeurs, à Paris, à Grenoble et ailleurs.
Le débat se focalise sur l’influence que peut avoir la convergence de l’islamisme radical et de l’extrême gauche, que certains qualifient d’« islamo-gauchisme », sur la vie quotidienne et les études dans les établissements d’enseignement supérieur.
La simple utilisation de ce terme « islamo-gauchisme » pour décrire, même imparfaitement, un phénomène réel vous expose déjà, madame la ministre, à des procès en sorcellerie.
Vous avez pris le parti – et c’est courageux – de vous saisir du problème, et vous avez commandé un bilan de la recherche, demande aussitôt qualifiée par des chercheurs et syndicats de « menace de répression intellectuelle ».
Je note qu’une partie de l’exécutif a pris ses distances avec votre initiative, évoquant « l’attachement absolu du président de la République à l’indépendance des enseignants-chercheurs ».
Ma question est simple : peut-on faire du « en même temps » sur ces sujets graves ? Quelle est la véritable doctrine du Gouvernement en la matière ? D’ailleurs, y en a-t-il une ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Monsieur le sénateur, les événements, les faits et les polémiques que vous mentionnez ne peuvent qu’appeler une réponse commune de l’ensemble du Gouvernement et du Président de la République. Notre priorité restera toujours la même sur ces sujets : il s’agit de protéger les personnels et de garantir la liberté académique ainsi que la pluralité des sujets de recherche, pour tous, dans le respect des lois.
Chacun doit pouvoir exercer librement sa mission de recherche et d’enseignement, et doit pouvoir choisir librement ses sujets d’étude. Toute tentative de pression ou d’intimidation, ainsi que toute menace ou injure, qu’elle vienne de l’intérieur ou de l’extérieur des établissements, doit être condamnée.
C’est pourquoi nous ne pouvons admettre les propos affichés sur les murs de l’Institut d’études politiques (IEP) de Grenoble ou sur les réseaux sociaux.
Vous m’avez entendue défendre sans cesse la liberté de la recherche, que ce soit lors du débat en deuxième lecture du projet de loi de bioéthique ou lors des débats sur le projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030. Je n’ai jamais dit autre chose que ce que je viens de vous répéter.
La mission d’inspection que j’ai sollicitée à l’IEP de Grenoble permettra, j’en suis sûre, d’identifier toutes les responsabilités et de rétablir la sérénité. Je procéderai de la même manière, chaque fois que cela sera nécessaire.
L’université est, et doit rester, le lieu de débats qui peuvent être parfois vifs, parfois contradictoires, mais « toujours respectueux » – vous reconnaîtrez la formule.
Débattre, ce n’est pas s’opposer stérilement. Débattre, c’est la vocation de l’université. La violence verbale n’y a pas sa place, et encore moins la violence physique. Vous m’avez toujours entendue le dire.
Quelle proportion de colloques annulés, quelle quantité d’universitaires empêchés, quelle réelle pluralité sur les sujets de recherche ? C’est en affrontant ces questions que nous préserverons la liberté académique de tous, ce qui est essentiel pour moi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Pascal Allizard, pour la réplique.
M. Pascal Allizard. L’enseignement – je le crois, et je pense que nous en sommes tous convaincus – est, et doit rester, le creuset de la République et de la Nation. On ne peut pas accepter sans réagir qu’il devienne l’incubateur du séparatisme, non plus que de voir des enseignants placés sous protection policière.
La laïcité, c’est la liberté de croire ou de ne pas croire. C’est aussi cantonner la religion, quelle qu’elle soit, à la sphère privée, sans jamais la placer au-dessus des lois de la République.
Selon une étude de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra), un nombre élevé de lycéens juge que les textes relatifs à la laïcité sont discriminatoires envers les musulmans. On mesure bien les effets concrets et délétères sur des citoyens en devenir de tous ces discours. C’est très inquiétant pour l’avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP.)
organisation des centres de vaccination dans les communes
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Christine Lavarde. La semaine dernière, mon collègue Jean-François Husson interrogeait le Gouvernement sur les délais de remboursement partiel des masques achetés par les collectivités. Force est de constater que, dans mon département, 25 % des communes sont toujours en attente.
Je souhaite nous donner l’occasion, cet après-midi, d’anticiper sur le remboursement des charges liées aux centres de vaccination.
Dans mon département, l’agence régionale de santé (ARS) a envoyé un questionnaire aux collectivités et leur a indiqué qu’elles étaient désormais opérationnelles pour mettre en place un conventionnement reposant sur un cofinancement. Ce dernier pourrait atteindre un montant de 50 000 euros pour six mois, selon une circulaire de la direction générale de la santé (DGS).
Monsieur le ministre, quelles seront les modalités du remboursement de l’État aux collectivités ? Le montant de 50 000 euros me semble en effet complètement déconnecté de la réalité des coûts supportés par la collectivité. En outre, dans quel délai les sommes seront-elles versées ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, votre question me donne l’occasion de remercier l’ensemble des élus qui sont mobilisés, comme nous avons pu le constater, le week-end dernier, avec le Premier ministre, ainsi qu’avec le ministre de l’intérieur, dans son département.
Les centres de vaccination se sont montés, dans notre pays, à une vitesse remarquable et avec inefficacité redoutable, au bon sens du terme. Chaque fois que je me rends dans l’un d’entre eux, je rencontre des sénateurs et sénatrices de tous bords, et le constat est unanime : « Cela fonctionne bien ! » (Marques de dénégation sur les travées du groupe Les Républicains.)
Cela fonctionne bien grâce à la mobilisation de tous, qu’il s’agisse des agences régionales de santé, des préfets, des élus, des agents des collectivités territoriales, des médecins, des pharmaciens, des infirmiers, des sages-femmes, des retraités ou des étudiants. Il faut le dire.
Vous connaissez tous la formule consacrée du « quoi qu’il en coûte ». Elle s’applique aussi au fonctionnement des centres. Nous adapterons le soutien financier aux municipalités, de manière à les accompagner dans la durée, et encore plus dans la phase d’accélération de la vaccination.
Pour être factuel, madame la sénatrice, l’assurance maladie prend déjà directement en charge la plupart des dépenses, notamment le paiement direct des professionnels et des établissements qui sont déjà référencés, comme les médecins en activité ou les hôpitaux. Les professionnels de santé à la retraite sont aussi pris en charge dans ce cadre, en lien avec la structure à laquelle ils sont rattachés.
Pour les dépenses qui ne peuvent pas être directement prises en charge par l’assurance maladie, par exemple celles qui sont liées au fonctionnement général des centres, nous avons débloqué dès le 18 février dernier une enveloppe de 60 millions d’euros à destination des agences régionales de santé, par le biais du fonds d’intervention régional (FIR). Celles-ci pourront ainsi financer les dépenses les plus urgentes des 1 300 centres ouverts sur le territoire national.
Nous travaillons à l’élargissement et à l’assouplissement du financement que nous apportons aux structures qui ne sont pas encore labellisées.
Ces 60 millions d’euros ne correspondent pas à un solde de tout compte, madame la sénatrice, mais ils sont une amorce importante. Ils seront réabondés autant que nécessaire. Le financement des centres n’est pas, ne sera pas et ne devra pas être, à aucun moment, un facteur bloquant dans la campagne de vaccination, à laquelle tout le monde œuvre avec beaucoup de courage sur tout le territoire national. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour la réplique.
Mme Christine Lavarde. Je reste très attentive au fait qu’une large partie des coûts, si j’ai bien compris, sera compensée par des crédits délégués par l’État.
Il faudra sans doute faire mieux que pour les masques ! Pour l’instant, dans mon département, un quart des communes n’ont toujours pas été remboursées, et l’on me dit que c’est parce que l’État n’a pas assez de crédits. Or certaines dépenses ont été exposées au mois de juillet !
Les centres de vaccination représentent des coûts très élevés, bien au-delà des 50 000 euros prévus dans la note de la DGS, quand bien même l’on mobiliserait le fonds d’intervention régional.
Par exemple, la ville de Boulogne-Billancourt y a consacré 985 000 euros sur six mois, celle d’Asnières 457 000 euros, celle de Clichy 714 000 euros. À défaut de pouvoir parcourir toute la France, j’ai interrogé un certain nombre de maires : en Meurthe-et-Moselle, celui de la ville de Saint-Max ne savait même pas que sa commune avait droit à un soutien de l’ARS. Il suffit de voir la liste des locaux et des personnels mis à disposition pour comprendre que les coûts dépasseront le montant de 50 000 euros sur six mois.
Les collectivités ne peuvent pas présenter un budget de fonctionnement déficitaire. Peut-être faudrait-il s’inspirer de ce qui avait été fait lors de l’épidémie de grippe H1N1, en prévoyant un remboursement différencié pour les différents postes ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
situation des travailleurs des plateformes numériques
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Olivier Jacquin. Madame la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion, vous avez indiqué récemment être une femme de gauche avec la justice sociale chevillée au corps. Je souhaite donc vous interroger sur les conditions de travail des travailleurs des plateformes numériques, particulièrement dans le domaine des transports.
En 2018 et 2019, le Conseil constitutionnel a censuré par deux fois vos chartes facultatives, sur l’initiative du groupe parlementaire socialiste.
Le 4 mars 2020, la Cour de cassation a requalifié un chauffeur Uber en salarié, qualifiant sa situation d’« indépendance fictive » !
Le 30 novembre 2020, le rapport Frouin, que vous avez commandé, a enterré l’idée d’un tiers statut.
Pendant ce temps, les conditions de travail de ces travailleurs se sont considérablement dégradées, et nous constatons une explosion des pratiques illégales de certaines plateformes.
L’intersyndicale nationale des voitures de transport avec chauffeur (INV), vous a régulièrement alertée sur cette situation. Leur avocat, maître Giusti, vous a écrit au mois d’octobre dernier pour que vous saisissiez l’inspection du travail et que vous contrôliez Uber. Face à votre silence, la semaine dernière, 168 chauffeurs de VTC ont saisi le tribunal administratif afin que la justice vous contraigne à solliciter l’inspection du travail. Mais où est donc passé l’État de droit ?
Madame la ministre, allez-vous enfin saisir l’inspection du travail pour protéger ces travailleurs plutôt que les plateformes ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des retraites et de la santé au travail.
M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État auprès de la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion, chargé des retraites et de la santé au travail. Monsieur le sénateur Jacquin, je connais votre intérêt pour le sujet des plateformes numériques, et la qualité du travail que vous menez plus globalement sur les relations qu’elles entretiennent avec les travailleurs qui contribuent à leur activité.
La situation est complexe : vous avez cité un certain nombre de décisions de justice, mais aussi – reconnaissez-le – quelques rapports qui ont contribué à faire avancer le débat.
Vous avez raison, il faut réguler, car si la grande majorité de ces travailleurs ont fait le choix de l’indépendance, il est indéniable que leur relation avec les plateformes est trop déséquilibrée.
Il était essentiel que ces acteurs puissent trouver les voies de sortie que vous appelez de vos vœux, dans le cadre d’un dialogue social structuré.
C’est la raison pour laquelle la ministre du travail, que vous avez citée à de nombreuses reprises, a nommé trois personnes qualifiées pour mener des concertations avec ces acteurs. Comme vous connaissez parfaitement l’actualité, vous devez savoir que cette mission rendra ses conclusions vendredi prochain. Ces travaux serviront de base à la rédaction d’une ordonnance qui sera publiée à la fin du mois d’avril.
Par ailleurs, la ministre du travail réunira les partenaires sociaux, vendredi prochain, pour aborder ce sujet dans le cadre du groupe de travail paritaire de l’agenda social sur les formes particulières d’emploi.
Enfin, vous avez mentionné le rôle de l’inspection du travail. Elle est effectivement compétente, mais pour contrôler l’application du droit du travail dans le cadre d’un contrat établissant un lien de subordination entre l’employeur et l’employé. Cela étant, elle peut aussi intervenir dans le cas où il y aurait un travail salarié dissimulé. Elle transmettra alors au procureur de la République un certain nombre de procédures à la suite de ces contrôles, comme elle l’a fait à plusieurs reprises depuis 2015. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour la réplique.
M. Olivier Jacquin. Monsieur le secrétaire d’État, je prends acte de votre réponse. Cependant, au nom du droit, il vous faut arrêter avec cette fable de l’indépendance ! Nous venons de déposer une proposition de loi. Saisissez-vous-en ! Elle vous permettra de requalifier en masse par actions de groupe, et de rendre enfin l’algorithme transparent.
Ces travailleurs ne sont pas de second rang et les plateformes ne peuvent pas rester des zones de non-droit social. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
stratégie vaccinale (ii)
M. le président. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, après l’année terrible que nous avons vécue, l’arrivée de vaccins contre le virus laisse entrevoir un espoir, celui d’un retour à la vie normale que les Français, malgré leur discipline, leur solidarité et leur remarquable patience, n’en peuvent plus d’attendre.
Tous nos soignants se sont mobilisés pour protéger la population, et parmi elle les personnes les plus fragiles. Pour ma part, j’ai œuvré dans un centre de vaccination pour personnes handicapées, le week-end dernier ; et je me suis réjouie de constater, comme partout ailleurs sur le territoire, une nette augmentation des capacités de vaccination.
Je crains néanmoins, à la lumière de ce qui a suivi, que les événements de ce week-end ne soient qu’une accélération en trompe-l’œil.
L’implication générale de tous les acteurs tranche avec l’image que renvoient la DGS et son directeur, qui n’a cessé d’enchaîner les imprécisions et les décisions contestables et contestées.
Parmi les dernières en date, il y a celle de l’impossibilité faite aux médecins généralistes de commander des doses de vaccin, la semaine du 8 mars, car il faut les livrer aux officines pharmaceutiques.
Après avoir été sollicités pour assurer une partie des vaccinations des patients à risque, voilà maintenant les pharmaciens contraints de déprogrammer les rendez-vous prévus. L’un de nos collègues, médecin de profession, peut témoigner de l’annulation de 200 rendez-vous !
Il s’agit, au mieux, d’un couac qui ne sera pas le premier dans la gestion de cette épidémie. À chaque jour sa nouvelle stratégie : c’est insupportable !
Monsieur le ministre, nous n’avons tous qu’un seul souhait : celui que la campagne de vaccination s’accélère. Nous disposons d’une force de frappe considérable qui ne demande qu’à être sollicitée, au premier rang de laquelle les médecins, mais aussi les pharmaciens et les pompiers, dont la mobilisation pourrait permettre de multiplier par dix les capacités de vaccination.
Aussi, je vous le demande, monsieur le ministre : pourquoi avoir laissé la DGS infliger un tel camouflet aux médecins généralistes, si ce n’est pour masquer une nouvelle pénurie ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)