Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur Babary, les prestations familiales, à l’exception des allocations familiales, ne peuvent aujourd’hui être partagées entre les deux parents dont l’enfant fait l’objet d’une mesure de résidence alternée, en application de la règle de l’unicité de l’allocataire. L’enfant doit en effet être rattaché administrativement à l’un ou à l’autre de ses parents, désigné comme allocataire unique, indépendamment du temps qu’il passe réellement auprès de l’un ou de l’autre.
Cependant, les parents ont la possibilité de demander conjointement une alternance de l’allocataire après une période minimale d’un an.
Si je partage votre volonté de répartir entre deux parents séparés le bénéfice de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, dès lors qu’ils assument effectivement tous les deux des charges liées au handicap de l’enfant, cette problématique ne concerne pas uniquement l’AEEH et doit faire l’objet d’une étude approfondie dans le cadre d’un projet global de meilleure prise en compte des situations de séparation, pour l’ensemble des prestations familiales.
Le partage de l’AEEH est complexe à concevoir et à mettre en place, compte tenu des règles de cette prestation et de ses compléments ; il pose de nombreuses questions de mise en œuvre. Les compléments de l’AEEH peuvent solvabiliser à la fois une réduction d’activité d’un parent, le recours à une tierce personne ou des frais liés à des soins ou équipements restant à la charge des familles.
Cette multiplicité d’utilisations pose des questions complexes de partage de la prestation : une répartition à parts égales serait non conforme à l’équité, puisque c’est souvent un seul parent, majoritairement la mère, qui réduit son activité. Une répartition sur mesure représenterait évidemment une lourdeur accrue en gestion dans l’examen des droits à verser, que ce soit au stade de l’examen initial du droit, mais aussi en cours de versement, notamment si la répartition de la prise en charge des frais change entre les parents.
Les questions de partage de l’AEEH pour les parents séparés nécessitent ainsi de réaliser des choix peu évidents, notamment entre simplicité pour l’allocataire, gestion et équité.
Ce chantier nécessite donc une analyse approfondie, incluant les autres prestations familiales, afin d’assurer une cohérence d’ensemble des modalités de partage qui seront définies. Un tel partage constituera également un chantier informatique majeur pour les caisses d’allocations familiales et de mutualité sociale agricole.
Des travaux sont engagés afin de dégager une solution lisible et équitable entre toutes les familles, quels que soient leur situation matrimoniale ou le mode de résidence choisi pour l’enfant après la séparation, pour la bonne mise en œuvre d’une telle extension.
En ce qui concerne la PCH, le code de l’action sociale et des familles prévoit, comme vous l’avez souligné, monsieur le sénateur, l’établissement préalable d’un compromis écrit entre les deux parents. Il s’agit d’une question très complexe.
Cet accord peut figurer au jugement de divorce, le cas échéant. Il paraît toutefois souhaitable que les parents séparés s’entendent.
Mme le président. Veuillez conclure, madame la secrétaire d’État.
Mme le président. La parole est à M. Serge Babary, pour la réplique.
M. Serge Babary. Je comprends la nécessité de mettre en place un projet global pour les prestations familiales diverses.
Il faut tout de même garder en tête cette iniquité, durement ressentie par celui des parents qui accueille son enfant handicapé en garde alternée.
nombre de places disponibles au sein des instituts médico-éducatifs
Mme le président. La parole est à Mme Martine Filleul, auteure de la question n° 1504, transmise à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Mme Martine Filleul. Madame la secrétaire d’État, la diminution du nombre de places au sein des instituts médico-éducatifs (IME) constitue une réelle difficulté pour de nombreuses familles dans notre pays.
Les IME sont des établissements essentiels, qui accueillent les enfants en situation de handicap en accueil de jour et de nuit, leur permettant de bénéficier d’un contexte de soins adapté, de scolarité et d’activités permettant un épanouissement personnel.
À Lille, que je prends comme exemple parmi de nombreux cas rapportés, l’institut médico-éducatif La Roseraie accueille 105 enfants en semi-internat et en accompagne 20 en service d’éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad). Alors que le nombre d’enfants en liste d’attente s’allonge d’année en année, une réduction de 70 places est annoncée.
Ces enfants n’auraient comme solution que d’être renvoyés à leur domicile, ce qui les priverait de toute relation avec d’autres jeunes de leur âge, ou d’être accueillis dans des établissements scolaires non adaptés.
Comme tous les enfants de la République, ils ont le droit d’être accompagnés, encadrés par des professionnels spécialisés, afin de pouvoir grandir et s’épanouir dans les meilleures conditions possible.
C’est pourquoi, madame la secrétaire d’État, je souhaite connaître les mesures que le Gouvernement compte mettre en œuvre pour, a minima, maintenir les places aujourd’hui existantes ou, mieux encore, permettre d’en augmenter le nombre – l’enquête « Faire face » de 2018 évalue à 30 000 le nombre de places manquantes.
Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice Martine Filleul, vous attirez mon attention sur la réduction du nombre de places dans l’institut médico-éducatif (IME) La Roseraie, rattaché à l’établissement public départemental de soins d’adaptation et d’éducation.
Cet IME est engagé depuis 2019 avec l’agence régionale de santé (ARS) des Hauts-de-France dans des réflexions ayant pour objectif d’adapter l’offre aux besoins des territoires. Ces travaux prennent appui sur un état des lieux du public accueilli au sein de l’IME et sur une analyse départementale qui a mis en évidence des besoins importants en matière de prise en charge d’enfants souffrant de troubles complexes.
La concertation entre l’établissement, les différents partenaires – éducation nationale, conseil départemental et ARS – a conduit à un projet de transformation guidé par deux grands principes : assurer la continuité des accompagnements des enfants accueillis par l’IME et favoriser la diversification de l’offre d’accompagnement. Ces principes s’inscrivent dans le cadre des orientations nationales portant sur la transformation de l’offre médico-sociale et le développement d’une société toujours plus inclusive que porte le Gouvernement depuis 2017.
Le projet de transformation de l’IME La Roseraie prévoit ainsi une évolution du fonctionnement de l’établissement en dispositif permettant de déployer l’ensemble des modalités d’accueil modulaire – accompagnement en établissement et par les services en milieu de vie ordinaire. Les accompagnements proposés ont pour objectif d’apporter une réponse graduée et adaptée à la situation de chaque enfant incluant : un accompagnement en service – le Sessad –, un accompagnement en semi-internat et un accompagnement en internat pour les enfants les plus vulnérables, nécessitant une continuité des soins – il s’agit des 20 places que vous évoquiez.
La politique du Gouvernement vise donc à avancer simultanément sur les deux aspects essentiels d’une politique résolument inclusive au bénéfice des enfants et des familles : renforcer l’intervention des professionnels du secteur médico-social au sein des écoles – c’est cette coopération que nous développons –, garantir l’accueil diversifié au sein des établissements chaque fois que nécessaire, et ce de façon plus souple en fonction des besoins.
Outre ces évolutions de l’offre, nous devons faire face aux besoins complexes d’enfants et d’adultes en situation de handicap. Nous y travaillons dans le cadre des engagements financiers de création de places pour les enfants à besoins complexes. Telle est notre feuille de route en la matière. Il s’agit d’éviter notamment les départs en Belgique. Nous consacrons plus de 90 millions d’euros à ces questions. Nous proposerons des solutions d’accompagnement en partenariat, bien sûr, avec les départements, chefs de file des politiques de solidarité.
Mme le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour la réplique.
Mme Martine Filleul. Madame la secrétaire d’État, je salue la précision de votre réponse et l’attention que vous portez à cet établissement et à la situation des personnes handicapées dans le Nord.
Toutefois, dans de nombreux établissements, les listes d’attente s’expliquent souvent par le prolongement des séjours de jeunes adultes handicapés au sein des IME, faute de places dans des établissements adaptés à leur âge et à leur progression, comme les établissements et services d’aide par le travail (ÉSAT), les foyers d’accueil médicalisé (FAM) ou les maisons d’accueil spécialisées (MAS). Il faut traiter la problématique dans sa globalité.
double imposition des frontaliers français placés en chômage partiel en allemagne
Mme le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, auteure de la question n° 1479, transmise à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Mme Laurence Muller-Bronn. Monsieur le ministre, ma question concerne la situation fiscale des frontaliers français.
Il existe une convention, signée en 2015 par la France et l’Allemagne, qui stipule que l’impôt sur le revenu doit être uniquement prélevé par le pays de résidence. Or, les frontaliers français placés en chômage partiel par leur employeur allemand en raison de la crise sanitaire subissent depuis lors une double imposition : l’Allemagne, considérant que le chômage partiel est une prestation sociale, applique à ce titre un impôt sur ces salaires.
Un accord, conclu le 13 mai 2020 entre la France et l’Allemagne, confirme pourtant que les sommes versées dans le cadre du chômage partiel par les employeurs allemands aux employés français sont imposables dans leur pays de résidence, donc en France.
Malgré cet accord, l’Allemagne continue d’appliquer l’imposition de ces revenus, laquelle s’ajoute au prélèvement à la source pratiqué par le système français sur les salaires. Les revenus des frontaliers français sont ainsi doublement pénalisés : tout d’abord, par le montant réduit du chômage partiel ; ensuite, par la double imposition qu’ils subissent. Concrètement, un salarié placé en chômage partiel peut perdre jusqu’à 52 % de son salaire brut.
Je souhaite donc savoir, monsieur le ministre, comment le Gouvernement peut faire pression sur l’État allemand pour qu’il respecte les accords conclus. Il y a véritablement inégalité devant l’impôt.
Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises. Madame la sénatrice Muller-Bronn, je vous confirme que, conformément à la convention fiscale franco-allemande de 1959, modifiée en 2015, les revenus de source allemande versés au titre des indemnités de chômage partiel et perçus par un résident de France ne sont imposables qu’en France. L’accord du 13 mai 2020 que vous évoquez, conclu dans le cadre de la crise sanitaire liée à la covid, rappelle ce principe.
Par ailleurs, comme vous l’indiquez, si ces indemnités ne sont pas imposables en Allemagne en vertu de la loi sur l’impôt sur le revenu, elles sont déterminées selon un mode de calcul prenant en compte la déduction d’un impôt allemand fictif.
Une telle déduction a été jugée contraire au principe de libre circulation des travailleurs garanti par le droit de l’Union européenne lorsque, s’agissant d’autres contributions sociales allemandes, la convention fiscale franco-allemande précitée en réservait déjà l’imposition exclusive à la France.
C’est pourquoi, pleinement conscient des difficultés que cette situation engendre pour les travailleurs concernés, le ministre Bruno Le Maire a abordé ce sujet avec son homologue allemand, par courrier, l’été dernier. Depuis, nos services continuent d’échanger.
Toutefois, le règlement de la situation impliquerait également, et au principal, la coopération du ministère allemand chargé des affaires sociales.
Par ailleurs, s’agissant d’une législation prévue par le droit social en Allemagne, plusieurs contentieux individuels ont été engagés par les travailleurs concernés devant les juridictions compétentes de cet État.
Je tiens à vous assurer, madame la sénatrice, de la très grande implication de Bruno Le Maire sur cette question, qui doit désormais trouver une solution juste et satisfaisante, sur le plan juridique comme sur le plan économique, et ce dans les plus brefs délais.
Mme le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, pour la réplique.
Mme Laurence Muller-Bronn. Je vous remercie de votre réponse détaillée, monsieur le ministre.
Cette situation dure depuis bien trop longtemps. Les habitants de nos communes frontalières souffrent depuis déjà un an, surtout ceux qui ont des bas salaires. L’association frontalière des salariés de Moselle a saisi aujourd’hui la Cour européenne des droits de l’homme. Il s’agit d’un déséquilibre, d’une injustice, d’une inégalité, qu’il est urgent de réparer. Nous sommes en Europe et les salariés souffrent de cette baisse importante de leurs revenus.
seuil de dispense des procédures de marchés publics
Mme le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, auteure de la question n° 1486, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Mme Catherine Belrhiti. Monsieur le ministre, conséquence de la crise économique, le Gouvernement a publié, le 22 juillet dernier, un décret visant à faciliter temporairement la conclusion de marchés publics dans deux secteurs économiques prioritaires : les travaux et la fourniture de denrées alimentaires.
Afin de promouvoir la relance, le seuil de dispense de procédures de publicité et de mise en concurrence pour la passation des marchés publics de travaux a été relevé de 40 000 à 70 000 euros hors taxes.
Cette mesure est très appréciée des collectivités territoriales, particulièrement des communes et des entreprises qui sont sensibles à la nécessité de pouvoir contracter rapidement des marchés en cette période de ralentissement économique.
L’acheteur a ainsi pour seules obligations de choisir une offre pertinente, de faire une bonne utilisation des deniers publics et de ne pas contracter systématiquement avec un même fournisseur lorsqu’il existe plusieurs offres susceptibles de répondre à son besoin.
Cette hausse du seuil a été bien reçue par les élus locaux et par les entreprises. En effet, les procédures de passation des marchés publics sont structurellement d’une grande complexité et d’une grande instabilité dans notre pays : montant, objet du marché, circonstances de la conclusion, procédure adaptée ou formalisée… Beaucoup d’élus ont du mal à s’y retrouver, d’autant que des normes européennes se superposent aux nationales.
La publicité et la mise en concurrence ont de grandes vertus puisqu’elles permettent une égalité de traitement entre toutes les entreprises, une transparence et une saine concurrence pour que l’acheteur public se fournisse au meilleur prix. Mais elles ne sont pas adaptées à toutes les collectivités, particulièrement aux plus petites ou à celles qui n’ont pas forcément des moyens, des services ou des budgets appropriés.
Le relèvement du seuil apparaît comme une simplification bienvenue pour de nombreuses collectivités soucieuses de faire travailler au plus vite les entreprises de proximité.
Le décret précise que le relèvement du seuil est valable seulement jusqu’au 21 juillet 2021. Afin d’éclairer les collectivités et de donner de la visibilité aux élus, pourriez-vous nous dire, monsieur le ministre, si cette mesure a vocation à perdurer au-delà de cette date ?
Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises. Madame la sénatrice Belrhiti, le décret du 22 juillet 2020 portant relèvement temporaire du seuil de dispense de procédure pour les marchés publics de travaux et de fourniture de denrées alimentaires a deux objectifs : soutenir les entreprises du BTP touchées par les effets économiques de la crise sanitaire en accélérant la conclusion des marchés publics de travaux de faible montant ; lutter contre le gaspillage alimentaire, en facilitant l’écoulement des denrées qui n’ont pu être consommées faute de débouchés.
En permettant aux acheteurs publics de conclure des marchés sans publicité ni mise en concurrence préalables jusqu’à 70 000 euros pour les travaux et jusqu’à 100 000 euros pour les denrées alimentaires, ces mesures ont supprimé un formalisme souvent perçu comme excessivement contraignant par les acheteurs de petites collectivités et comme un frein pour les TPE-PME dans leur accès aux marchés publics ; elles ont permis à nos entreprises et producteurs de faire face aux difficultés liées à la crise sanitaire.
Toutefois, comme l’a rappelé le Conseil d’État lors de l’élaboration du décret du 22 juillet 2020, parce qu’elles constituent des dérogations aux règles destinées à garantir la liberté d’accès à la commande publique, l’égalité de traitement entre les entreprises et la transparence, ces mesures, justifiées par l’urgence de la situation sanitaire, ne peuvent être que temporaires.
Le droit des marchés publics offre aux acheteurs d’autres outils, qui peuvent être mobilisés pour faciliter l’accès de nos TPE-PME à la commande publique et les aider à traverser cette crise, notamment par une définition claire de leurs besoins, par la pratique du « sourçage », par un allotissement pertinent ou par l’utilisation de critères privilégiant la qualité ou le développement durable au détriment du critère unique du prix.
Afin d’accompagner les acheteurs dans le maniement de ces outils et de sécuriser leur utilisation, le Gouvernement poursuit sa démarche de diffusion des bonnes pratiques : l’Observatoire économique de la commande publique a ainsi élaboré un guide pratique intitulé Faciliter l’accès des TPE-PME à la commande publique et le ministère de l’agriculture a publié le guide Favoriser l’approvisionnement local et de qualité en restauration collective.
Par ailleurs, madame la sénatrice, permettez-moi de rappeler que la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite ASAP, a déjà porté à 100 000 euros le seuil de dispense de procédure pour les marchés publics de travaux jusqu’au 31 décembre 2022.
La loi ASAP contient également de nombreuses mesures visant à faciliter l’accès des TPE-PME à la commande publique, notamment dans le cadre de l’exécution des marchés globaux qu’elles ont du mal à remporter.
Enfin, convaincu qu’il est aujourd’hui nécessaire d’agir au niveau européen pour renforcer la résilience de notre économie, le Gouvernement porte auprès de ses partenaires et de la Commission européenne des propositions…
Mme le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.
M. Alain Griset, ministre délégué. … visant à mieux défendre nos entreprises face à la concurrence internationale.
Mme le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour la réplique.
Mme Catherine Belrhiti. Merci de votre réponse, monsieur le ministre.
Il serait vraiment souhaitable, au regard de la persistance de la crise, qu’une telle mesure perdure à l’issue de cette date.
compensation de la suppression de la taxe d’habitation pour les syndicats intercommunaux à vocation multiple
Mme le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, auteur de la question n° 1526, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Monsieur le ministre, ma question porte sur la compensation de la suppression de la taxe d’habitation pour les syndicats intercommunaux à vocation multiple (Sivom) ayant opté pour la fiscalité additionnelle.
Si la loi de finances pour 2020 prévoit le mécanisme de compensation de suppression de la taxe d’habitation pour un certain nombre de collectivités locales, elle ne prévoit pas de compensation spécifique pour les Sivom à fiscalité additionnelle.
Dans les Alpes-Maritimes, le Sivom Val de Banquière est particulièrement impacté par cette mesure. Pour la seule commune de La Trinité, par exemple, 400 000 euros ne seront pas compensés dès 2021 ; à Saint-André-de-la-Roche, 130 000 euros ; à Tourrette-Levens, 70 000 euros… Les neuf autres communes du Sivom sont également fortement touchées.
Lors de l’examen de la loi de finances rectificative pour 2020 et de la loi de finances pour 2021, j’ai proposé un amendement, largement cosigné par mes collègues du groupe Les Républicains, visant à instaurer une compensation par une augmentation de la dotation globale de fonctionnement, en prévoyant que son montant évolue en fonction de la valeur locative moyenne des propriétés bâties situées sur le périmètre du syndicat.
Lors des débats budgétaires, M. le ministre délégué chargé des comptes publics avait souligné qu’il n’existait pas de problème particulier a priori et qu’il y aurait « un effet de report sur d’autres impositions », notamment sur la taxe foncière et sur la hausse des contributions des communes.
Monsieur le ministre, il est impensable pour les maires de devoir, faute de solution trouvée par l’État, augmenter les impôts ou réduire, voire supprimer, les services publics de proximité – je pense à la petite enfance ou aux aides aux seniors – aujourd’hui assurés dans le cadre des compétences déléguées aux Sivom.
Où en sont les négociations entre l’administration et le Sivom Val de Banquière, même si d’autres Sivom sont également concernés par cette question ? Que propose le Gouvernement aux maires pour ne pas faire peser sur le budget des communes concernées ou sur les seuls propriétaires fonciers la charge de la non-compensation de la taxe d’habitation à l’euro près, ce qui est, je le rappelle, un engagement du Président de la République ?
Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises. Madame la sénatrice Estrosi Sassone, comme vous le savez, les syndicats intercommunaux ne disposent d’aucun pouvoir fiscal, ce qui les range dans la catégorie des établissements publics sans fiscalité propre.
Le financement du budget d’un tel syndicat comprend une contribution des communes associées, fixée par les communes dans les statuts du syndicat. Lorsque tel n’est pas le cas, le syndicat est compétent pour établir ou modifier la répartition des charges des communes.
À titre dérogatoire, le syndicat peut décider de remplacer cette contribution budgétaire des communes par la taxe d’habitation, les taxes foncières et la cotisation foncière des entreprises. Il s’agit des « contributions fiscalisées ».
Dans ce cas, le syndicat arrête un montant global, réparti dans chacune des communes membres. Cette répartition est proportionnelle aux recettes que chacune de ces taxes procurerait à la commune si l’on appliquait les taux de l’année précédente aux bases de l’année d’imposition. Les taux d’imposition additionnels permettent d’alimenter le budget du syndicat.
Le Sivom Val de Banquière est un syndicat intercommunal regroupant douze communes. Non seulement entre-t-il dans le champ de la législation précitée mais, de fait, a-t-il recours à la fiscalisation des contributions.
Le recours aux contributions fiscalisées pour son financement résulte donc d’un choix particulier et local d’organisation.
Dans la mesure où le Sivom Val de Banquière est assuré de percevoir un montant déterminé de contribution des communes, il n’y a pas matière à compensation dans le cadre de la réforme de la fiscalité locale. En effet, le syndicat ne perd pas de recettes. La suppression de la taxe d’habitation conduit en revanche à une nouvelle répartition des produits syndicaux entre les contribuables, dont les communes, elles-mêmes compensées du fait de cette suppression, doivent désormais tenir compte dans leurs choix de gestion.
Mme le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour la réplique.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Je suis désolée, monsieur le ministre, d’entendre encore cette réponse, qui est une réponse de technocrates. Cela fait plusieurs semaines que nous alertons sur cette disposition particulière concernant les Sivom. Les maires n’ont pas été élus sur la base d’une augmentation des impôts qu’ils n’ont pas décidée et qui serait imposée d’autorité par l’État !
Véritablement, il est temps de trouver une solution, y compris pour un cas particulier comme celui-ci.
cyberattaques visant les collectivités de l’oise
Mme le président. La parole est à M. Édouard Courtial, auteur de la question n° 1458, adressée à M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
M. Édouard Courtial. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord d’avoir une pensée pour mon collègue de l’Oise Olivier Dassault, disparu tragiquement dimanche dernier, alors qu’un hommage lui est rendu en ce moment même à Beauvais.
Trumilly, Boubiers, Goincourt, Vandélicourt, Saint-Crépin-Ibouvillers : autant de communes de l’Oise victimes de cyberattaques, avec parfois de lourdes conséquences. Au total, en 2020, selon l’Association pour le développement et l’innovation numérique des collectivités, elles sont plus d’une quinzaine de mon département à avoir été confrontées à ce phénomène inquiétant, qui prend de l’ampleur et révèle des failles importantes de sécurité.
Si le contexte sanitaire actuel a accéléré la transition numérique des collectivités et le développement du travail à distance, il a néanmoins eu pour conséquence de rendre plus vulnérables les réseaux des services publics.
Pour répondre à cette menace, le Gouvernement va investir un milliard d’euros supplémentaires d’ici à 2025 pour faire monter le niveau général de protection, dans le cadre du plan de relance et du programme d’investissements d’avenir.
En outre, des actions de sensibilisation à la menace en ligne ont été menées dans certaines mairies, afin de remédier à la méconnaissance des problèmes liés à la cybersécurité. L’AMF (Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité), avec la participation et le soutien de l’Anssi (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information), a d’ailleurs publié un guide afin de susciter une prise de conscience des élus et de leurs services quant aux risques numériques.
Mais pour les communes de taille modeste, la mise à disposition des outils de sécurisation se heurte à des contraintes financières importantes. La prise de conscience au plus haut sommet de l’État est salutaire. Toutefois, la répartition des moyens de soutien reste floue et la crainte de voir certaines collectivités locales délaissées, comme c’est trop souvent le cas, ne peut, pour l’heure, être complètement écartée.
Aussi, monsieur le ministre, quels moyens le Gouvernement entend-il mobiliser afin d’aider, notamment, les plus petites communes à se prémunir contre les cyberattaques ? Envisage-t-il de leur accorder un accompagnement spécifique dans ce but ?