M. Philippe Bonnecarrère. M. Lafon pose une excellente question : si, dans quelques mois, au cœur de l’élection présidentielle, l’un des candidats se voit retirer l’usage de son compte Twitter ou Facebook, dans une époque où les conditions de campagne sont altérées par la pandémie, que ferons-nous ?
Sans vouloir établir de parallèle avec un autre pays, notre collègue s’inquiète d’autant plus que les règles de retrait et les algorithmes sont confidentiels et inconnus de nous. De plus, les sièges sociaux de ces plateformes étant situés à l’extérieur de notre pays, la possibilité de recourir aux procédures de droit commun avec les référés d’heure à heure que connaît bien le président de la commission des lois n’est même pas assurée.
Notre collègue a donc rédigé un amendement visant à prévoir une voie de recours spécifique inscrite dans nos dispositions électorales au cas où un retrait de compte par une plateforme numérique serait susceptible d’impacter le déroulement de l’élection présidentielle ou d’une autre élection dans notre pays.
Notre collègue Laurent Lafon reconnaît que son amendement est certainement perfectible juridiquement, mais j’avoue que je serai attentif, en son nom, à ce que pourrait proposer la commission des lois pour cet amendement largement cosigné, signe de l’intérêt du sujet. L’avis du Gouvernement nous sera également précieux.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. Cette réflexion mérite en effet d’être menée, mais c’est à n’en pas douter un travail de longue haleine qu’il nous faudrait ordonner.
Il faudrait tout d’abord définir un périmètre d’application. Cela ne pourrait pas concerner eBay, MarketPlace ou Amazon, mais seulement les réseaux sociaux où l’on décrit librement ses opinions.
Il faudrait ensuite déterminer le contenu du droit d’accès à ces plateformes, les titulaires de ce droit et ses limites.
Il faudrait enfin déterminer la compensation offerte aux opérateurs privés qui seraient soumis à cette nouvelle charge de service public, faute de quoi le dispositif serait contraire au principe d’égalité devant les charges publiques.
C’est seulement in fine que l’on pourrait définir une procédure juridictionnelle spécifique adaptée pour faire respecter ce nouveau droit.
La commission s’en remet donc à l’avis du Gouvernement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. La lutte contre les fausses informations est un sujet primordial et l’une des priorités de ce quinquennat. C’était un engagement du Président de la République, qui s’est traduit par l’adoption de la loi organique du 22 décembre 2018 relative à la lutte contre la manipulation de l’information.
Ce texte vise, dans le cadre de l’élection présidentielle, à contrer la diffusion massive et rapide de fausses nouvelles via les outils numériques, notamment les opérateurs de plateforme. Il prévoit, pour la période de campagne électorale, une obligation de transparence des plateformes, une obligation de signalement et une action judiciaire en référé pour faire cesser rapidement la circulation de fausses nouvelles. C’est le juge des référés qui qualifiera la fausse nouvelle, selon la définition de la loi de 1881.
Ces dispositions sont encore récentes. Elles visent à doter la lutte contre les fausses nouvelles d’un cadre juridique adapté en donnant tout son rôle au juge dans le cadre de la liberté d’expression. C’est principalement le souci de préserver la campagne électorale présidentielle de potentielles tentatives d’influence qui a motivé l’adoption de cette loi.
L’échéance de 2022 nous permettra d’appliquer ce dispositif pour la première fois. Tant que ce premier jalon n’est pas passé, il nous semble prématuré d’adopter de nouvelles dispositions ayant le même objectif que la loi dont je viens de parler.
En conséquence, l’avis du Gouvernement est défavorable.
M. Philippe Bonnecarrère. Il ne s’agit pas d’un problème de fausses informations !
Mme le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. Pour l’heure, je suis l’avis du Gouvernement, mais ce problème pourrait faire l’objet d’un texte législatif spécifique. En effet, comme vous le rappelez, l’élection présidentielle n’est pas la seule à pouvoir connaître ce genre de désagrément sur les réseaux sociaux : retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Mme le président. Monsieur Bonnecarrère, l’amendement n° 21 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Philippe Bonnecarrère. Considérant que c’était un amendement d’appel, je le retire. Tout le monde aura bien compris la pertinence de la question posée par M. Lafon.
Mme le président. L’amendement n° 21 rectifié ter est retiré.
Je mets aux voix l’article 2, modifié.
(L’article 2 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 2
Mme le président. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 12 rectifié, présenté par M. Kerrouche, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 précitée, il est inséré un article 3-… ainsi rédigé :
« Art. 3-…. – I. – Par dérogation à l’article 3, tout électeur peut, sur sa demande, exercer son droit de vote par correspondance sous pli fermé, dans des conditions permettant d’assurer le secret du vote et la sincérité du scrutin.
« II. – Dans chaque département, il est institué une commission de vote par correspondance, chargée du contrôle et de la traçabilité du processus de vote par correspondance.
« La commission est obligatoirement présidée par un magistrat de l’ordre judiciaire. Elle peut s’adjoindre des délégués choisis parmi les électeurs du département. Ses membres ne sont pas rémunérés et aucun frais lié à son fonctionnement ne peut être pris en charge par une personne publique.
« Les candidats, leurs remplaçants ou leurs mandataires peuvent participer, avec voix consultative, aux travaux de la commission concernant leur circonscription.
« La composition ainsi que les conditions de désignation et de fonctionnement des commissions instituées en application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État.
« III. – Dès la publication du décret convoquant le collège électoral, tout électeur souhaitant voter par correspondance sous pli fermé peut demander à recevoir, sans frais, le matériel de vote lui permettant de voter par correspondance au premier tour, et, le cas échéant, au second tour.
« Lorsque plusieurs élections ont lieu le même jour, la demande vaut pour toutes les élections ayant lieu le même jour.
« La demande, formulée auprès de l’autorité compétente pour les procurations, s’établit au moyen d’un formulaire administratif prévu à cet effet qui doit obligatoirement :
« 1° Comporter les nom, prénoms, sexe, date et lieu de naissance, nationalité, adresse au titre de laquelle l’électeur est inscrit sur la liste électorale ;
« 2° Comporter une adresse postale de contact, adresse de messagerie électronique, numéro de téléphone permettant à l’électeur d’être informé de la prise en compte de son vote par correspondance ;
« 3° Être accompagné de la copie d’une pièce justifiant de l’identité de l’électeur et comprenant sa signature dont la liste est fixée par arrêté ;
« 4° Être accompagné d’un justificatif de domicile de moins de trois mois ;
« 5° Être signé par le demandeur ;
« 6° Indiquer si la demande vaut pour le premier tour, et le cas échéant, le deuxième tour ou les deux tours de scrutin.
« Le formulaire, complété en triple exemplaire, est retourné par voie postale ou déposé en personne, ou en un exemplaire déposé par voie électronique, ou rempli à partir d’un portail de dépôt des demandes dématérialisées accessible depuis internet.
« La demande doit être envoyée au plus tard le deuxième vendredi qui précède le scrutin. L’autorité compétente pour les procurations en accuse réception par tout moyen auprès de l’électeur.
« Les demandes et justifications prévues au présent III sont conservées par les autorités mentionnées au troisième alinéa du présent III jusqu’à l’expiration du délai de recours contentieux.
« IV. – L’autorité à laquelle est présenté le formulaire de demande de vote par correspondance, après avoir porté mention de celle-ci sur un registre spécial ouvert par ses soins, indique sur le formulaire le numéro de la demande, le numéro d’identifiant national et le numéro d’ordre dans le bureau de vote de l’électeur. Elle ajoute ses noms et qualité et le revêt de son visa et de son cachet.
« Elle vérifie la capacité de l’électeur et, en cas d’incapacité, en informe le demandeur et le maire de la commune concernée.
« Elle adresse en recommandé avec demande d’avis de réception, ou par porteur contre accusé de réception, un exemplaire papier ou électronique, du formulaire au maire de la commune sur la liste électorale de laquelle l’électeur est inscrit, et un second exemplaire à la commission de vote par correspondance prévue au II du présent article.
« V. – Dès réception de la demande, la commission de vote par correspondance l’enregistre et vérifie à son tour que l’électeur est en capacité de voter et que sa demande comporte les indications et est accompagnée des pièces prévues au III.
« Dans l’affirmative, la commission de vote par correspondance fait adresser sans délai, à l’électeur sous pli recommandé, par la commission de propagande prévue aux articles L. 166, L. 212, L. 224-23, L. 241, L. 354, L. 376, L. 413, L. 491, L. 518, L. 546 et L. 558-26 du code électoral et à l’article 17 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen, le matériel de vote, au plus tard le lundi qui précède le scrutin. Dans l’hypothèse où plusieurs élections ont lieu le même jour, chaque élection concernée fait l’objet d’un envoi distinct.
« Dans la négative, la commission de vote par correspondance indique à l’électeur les raisons pour lesquelles sa demande ne peut être acceptée.
« En l’absence de réception du matériel de vote dans le délai imparti ou en cas de réponse négative, l’électeur peut saisir le ministère de l’Intérieur, le cas échéant par voie électronique.
« Chaque électeur n’est destinataire que d’un unique pli de matériel de vote.
« VI. – Le matériel de vote par correspondance sous pli fermé comprend :
« 1° Une enveloppe d’identification d’une couleur déterminée par voie réglementaire, sur laquelle est imprimé un certificat de vote signé par le président de la commission de vote par correspondance ou par son délégué, revêtu du cachet officiel, et comportant un code-barres, un numéro identique à celui de la demande de l’électeur, ses nom, prénoms, date et lieu de naissance, nom de la commune de la liste électorale sur laquelle il figure, le numéro d’identifiant national et le numéro d’ordre dans le bureau de vote de l’électeur, ainsi qu’une déclaration sous serment à signer ;
« Lorsque plusieurs élections ont lieu le même jour, chaque élection se voit attribuer une nuance de cette couleur différente.
« 2° Une enveloppe d’expédition préaffranchie, portant la mention « Élections – Vote par correspondance – le scrutin concerné », d’une couleur déterminée par voie réglementaire, sur laquelle est imprimée l’adresse du tribunal judiciaire compétent, le nom et le code de la commune de la liste électorale sur laquelle l’électeur est inscrit. Lorsque plusieurs élections ont lieu le même jour, chaque élection se voit attribuer une nuance de cette couleur différente ;
« 3° Une enveloppe électorale d’une couleur déterminée par voie réglementaire et distincte de la couleur de l’enveloppe utilisée pour le vote à l’urne. Lorsque plusieurs élections ont lieu le même jour, chaque élection se voit attribuer une nuance de cette couleur différente ;
« 4° Les bulletins de vote et circulaires des candidats ;
« 5° Une notice d’utilisation.
« VII. – Au fur et à mesure de la réception des demandes de vote par correspondance, le président de la commission de vote par correspondance, ou son délégué, inscrit sur un registre composé de pages numérotées, ouvert à cet effet, les noms et prénoms du demandeur, le numéro de la demande mentionné au IV, le numéro d’identifiant national et le numéro d’ordre dans le bureau de vote de l’électeur, ainsi que le nom et la qualité de l’autorité qui a réceptionné la demande et la date de son établissement. Le registre est tenu à la disposition de tout électeur, y compris le jour du scrutin.
« Mention de la suite donnée à chaque demande par la commission de vote par correspondance est faite en face du nom de l’électeur.
« VIII. – La liste des électeurs admis à voter par correspondance est envoyée par le président de la commission de vote par correspondance au maire, au plus tard avant l’expiration du délai fixé pour l’envoi des documents de propagande électorale.
« IX. – L’enveloppe d’identification scellée, revêtue de la signature de l’électeur et de sa déclaration sous serment et renfermant l’enveloppe électorale contenant le bulletin de vote scellée, adressée au président de la commission de vote par correspondance prévue au II doit parvenir au tribunal judiciaire par voie postale ou par les autorités compétentes pour établir les procurations, ou être déposée en personne, au plus tard le vendredi précédant le jour du scrutin, à 17 heures.
« Tout dépôt par une même personne de plusieurs enveloppes est interdit.
« L’envoi du vote par correspondance sous pli fermé ne prive pas l’électeur de son droit de vote à l’urne. S’il vote à l’urne le jour du scrutin, son vote par correspondance est annulé.
« X.- Chaque greffier en chef du tribunal judiciaire compétent tient un registre du vote par correspondance sous pli fermé, composé de pages numérotées. Il est fait mention au registre des enveloppes d’identification reçues au fur et à mesure de leur arrivée et du numéro du certificat mentionné au VI. Sur chaque enveloppe est aussitôt apposé un numéro d’ordre.
« Tout électeur et tout candidat, ou son représentant, peuvent consulter le registre et y consigner leurs observations relatives aux opérations du vote par correspondance.
« Chaque pli de vote par correspondance fait l’objet d’un accusé de réception auprès de l’électeur.
« XI. – Les enveloppes d’identification sont conservées dans un lieu sécurisé, sous la responsabilité du greffier en chef du tribunal judiciaire compétent.
« À l’échéance du délai prévu au IX, les enveloppes d’identification sont remises avec le registre prévu au X à la commission de vote par correspondance.
« La commission vérifie la conformité du nombre de plis remis et le nombre figurant au registre prévu au X, puis l’identité de chaque électeur au moyen de son certificat et de la concordance de ses signatures.
« La commission de vote par correspondance transmet au maire la liste des électeurs ayant pris part au vote par correspondance. Le maire inscrit sur la liste électorale et la liste d’émargement la mention du vote par correspondance sous pli fermé en face du nom de chaque électeur.
« La commission de vote par correspondance informe chaque électeur de la transmission ou non de son pli de vote par correspondance au bureau de vote auquel il est inscrit. Un site internet dédié permet à chaque électeur de vérifier la réception et la validité de son vote par correspondance.
« À l’issue de ces opérations, les enveloppes d’identification, demeurées scellées, et le registre du vote par correspondance sous pli fermé sont restitués au greffier en chef pour être conservés dans les conditions prévues au premier alinéa du présent XI.
« XII. – Ne donnent pas lieu à émargement les enveloppes d’identification :
« 1° Reçues en plus d’un exemplaire au nom d’un même électeur ;
« 2° Parvenues hors du délai prévu au IX ;
« 3° Pour lesquelles la commission de vote par correspondance n’a pas authentifié l’identité de l’électeur ;
« 4° Pour lesquelles le certificat est non valide ;
« 5° Pour lesquelles la déclaration de serment n’est pas signée ;
« 6° Qui ne sont pas scellées.
« Ces enveloppes sont contresignées par les membres de la commission de vote par correspondance et sont annexées au procès-verbal selon les modalités prévues à l’article L. 66 du code électoral.
« Les enveloppes parvenues après 17 heures le vendredi précédant le scrutin ne sont pas ouvertes et sont conservées par le greffier en chef qui en dresse procès-verbal. Les enveloppes sont détruites à l’expiration du délai de recours contentieux.
« XIII. – Le jour du scrutin, les documents et le registre mentionnés aux premier et deuxième alinéas du XI sont acheminés jusqu’au bureau de vote par les autorités compétentes pour établir les procurations.
« À la clôture du scrutin, son président et ses assesseurs indiquent le numéro du certificat sur la liste d’émargement, procèdent à l’ouverture des enveloppes d’identification et insèrent l’enveloppe électorale dans l’urne fermée, après s’être assurés que l’électeur concerné n’a pas déjà voté à l’urne.
« Les émargements de vote par correspondance et de vote à l’urne sont comptabilisés distinctement. Leur nombre est consigné au procès-verbal avant toute ouverture de l’urne. Il est vérifié, avant l’ouverture de l’urne, qu’aucun bulletin n’est en circulation dans le bureau de vote. Ensuite, le dépouillement se déroule de la manière suivante : l’urne est ouverte et le nombre des enveloppes est vérifié. Si le nombre de bulletins de vote par correspondance est plus grand ou moindre que celui des émargements, il en est fait mention au procès-verbal.
« Les enveloppes de vote par correspondance non réglementaires sont contresignées par les membres du bureau et annexées au procès-verbal selon les modalités prévues à l’article L. 66 du code électoral.
« À l’issue du dépouillement, les enveloppes d’identification sont restituées au greffier en chef du tribunal judiciaire compétent et conservées dans les conditions prévues au premier alinéa du XI, jusqu’à l’expiration du délai de recours contentieux.
« XIV. – Ne sont pas recevables :
« 1° Une enveloppe d’identification non scellée ou qui contient plusieurs enveloppes électorales ;
« 2° Un bulletin qui n’a pas été inséré dans une enveloppe électorale officielle ;
« 3° Une enveloppe électorale non scellée.
« XV. – Tout électeur conserve la possibilité de voter personnellement à l’urne. Les dispositions du deuxième alinéa du XIII sont alors applicables.
« XVI.- En cas de décès ou de privation des droits civiques de l’électeur ayant exercé son droit de vote par correspondance, son vote est annulé de plein droit.
« XVII. – Un membre de la commission de vote par correspondance assiste à sa demande aux travaux de la commission de recensement prévue aux articles L. 175, L. 224-28, L. 359, L. 396, L. 416, L. 558-30 et L. 558-47 du code électoral et à l’article 21 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen.
« XVIII. – Les sanctions prévues à l’article L. 111 du code électoral s’appliquent aux I à XVII.
« XIX. – Les dépenses résultant de l’organisation des opérations de vote par correspondance sous pli fermé prévues au présent article sont à la charge de l’État.
« XX. – Des décrets d’application pris en Conseil d’État déterminent les conditions d’application du présent article. »
La parole est à M. Éric Kerrouche.
M. Éric Kerrouche. Le vote par correspondance proposé dans mes trois amendements a une spécificité : in fine, il sera possible de corriger son vote. Si l’électeur change d’avis, il pourra éventuellement revenir le dimanche, le dépouillement de l’ensemble des bulletins ayant lieu à la fin du scrutin.
J’ai moi aussi participé à la mission d’information de la commission des lois sur le vote à distance. Il y a eu des interrogations sur les délais pour les élections départementales et régionales. Je regrette juste que la majorité sénatoriale n’ait pas voulu jouer le jeu : on ne peut pas dire qu’il n’est pas temps de mettre en place le vote par correspondance, avant tout pour des raisons techniques, et dire que cela n’est pas possible en 2022 pour l’élection présidentielle, sauf à considérer que la participation est suffisamment importante lors de ce scrutin. On peut éventuellement entendre cet argument, mais pourquoi ne pas accepter d’expérimenter le vote par correspondance lors de l’élection présidentielle de 2022 ? Repousser à 2027 serait incompréhensible. Le dispositif proposé n’était peut-être pas parfait, mais nous aurions pu construire quelque chose collectivement.
Lors des dernières élections qui se sont tenues en Catalogne, le vote par correspondance, qui a tendance à se généraliser dans l’ensemble des démocraties, a été mis en place. Nous aurions eu intérêt à construire ensemble cette possibilité.
Mme le président. L’amendement n° 14, présenté par M. Kerrouche, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Pour l’élection du Président de la République prévue en 2022, une expérimentation visant à offrir une modalité de vote complémentaire aux électeurs est mise en œuvre dans les communes volontaires.
II. – Par dérogation à l’article L. 54 du code électoral, tout électeur peut, sur sa demande, exercer son droit de vote par correspondance sous pli fermé, dans des conditions permettant d’assurer le secret du vote et la sincérité du scrutin et définies par décret pris en Conseil d’État.
III. – Le maire adresse sa candidature au représentant de l’État dans le département, par une délibération motivée de son conseil municipal. Un arrêté du ministre de l’intérieur dresse la liste des communes volontaires retenues pour mener l’expérimentation, au plus tard le 1er juillet 2021.
IV. – L’expérimentation est mise en place avec le concours financier de l’État.
V. – Le Gouvernement présente au Parlement avant le 1er septembre 2022 un rapport faisant le bilan de l’expérimentation et visant à analyser l’opportunité et les modalités du vote par correspondance.
La parole est à M. Éric Kerrouche.
M. Éric Kerrouche. L’amendement est défendu.
Mme le président. L’amendement n° 13 rectifié, présenté par M. Kerrouche, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 précitée, il est inséré un article 3-… ainsi rédigé :
« Art. 3-…. – I. – Par dérogation à l’article 3, tout électeur peut, sur sa demande, exercer son droit de vote par correspondance sous pli fermé, dans des conditions permettant d’assurer le secret du vote et la sincérité du scrutin.
« II. – Dans chaque département, il est institué une commission de vote par correspondance, chargée du contrôle et de la traçabilité du processus de vote par correspondance.
« La commission est obligatoirement présidée par un magistrat de l’ordre judiciaire. Elle peut s’adjoindre des délégués choisis parmi les électeurs du département. Ses membres ne sont pas rémunérés et aucun frais lié à son fonctionnement ne peut être pris en charge par une personne publique.
« Les candidats, leurs remplaçants ou leurs mandataires peuvent participer, avec voix consultative, aux travaux de la commission concernant leur circonscription.
« La composition ainsi que les conditions de désignation et de fonctionnement des commissions instituées en application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État.
« III. – Dès la publication du décret convoquant le collège électoral, tout électeur souhaitant voter par correspondance sous pli fermé peut demander à recevoir, sans frais, le matériel de vote lui permettant de voter par correspondance au premier tour, et, le cas échéant, au second tour.
« Lorsque plusieurs élections ont lieu le même jour, la demande vaut pour toutes les élections ayant lieu le même jour.
« La demande, formulée auprès de l’autorité compétente pour les procurations, s’établit au moyen d’un formulaire administratif prévu à cet effet qui doit obligatoirement :
« 1° Comporter les nom, prénoms, sexe, date et lieu de naissance, nationalité et adresse au titre de laquelle l’électeur est inscrit sur la liste électorale ;
« 2° Comporter une adresse postale de contact, adresse de messagerie électronique, numéro de téléphone permettant à l’électeur d’être informé de la prise en compte de son vote par correspondance ;
« 3° Être accompagné de la copie d’une pièce justifiant de l’identité de l’électeur et comprenant sa signature dont la liste est fixée par arrêté ;
« 4° Être accompagné d’un justificatif de domicile de moins de trois mois ;
« 5° Être signé par le demandeur ;
« 6° Indiquer si la demande vaut pour le premier tour, et le cas échéant, le deuxième tour ou les deux tours de scrutin.
« Le formulaire, complété en triple exemplaire, est retourné par voie postale ou déposé en personne, ou en un exemplaire déposé par voie électronique, ou rempli à partir d’un portail de dépôt des demandes dématérialisées accessible depuis internet.
« La demande doit être envoyée au plus tard le deuxième vendredi qui précède le scrutin. L’autorité compétente pour les procurations en accuse réception par tout moyen auprès de l’électeur.
« Les demandes et justifications prévues au présent III sont conservées par les autorités mentionnées au troisième alinéa jusqu’à l’expiration du délai de recours contentieux.
« IV. – L’autorité à laquelle est présenté le formulaire de demande de vote par correspondance, après avoir porté mention de celle-ci sur un registre spécial ouvert par ses soins, indique sur le formulaire le numéro de la demande, le numéro d’identifiant national et le numéro d’ordre dans le bureau de vote de l’électeur. Elle ajoute ses noms et qualité et le revêt de son visa et de son cachet.
« Elle vérifie la capacité de l’électeur et, en cas d’incapacité, en informe le demandeur et le maire de la commune concernée.
« Elle adresse en recommandé avec demande d’avis de réception, ou par porteur contre accusé de réception, un exemplaire papier ou électronique, du formulaire au maire de la commune sur la liste électorale de laquelle l’électeur est inscrit, et un second exemplaire à la commission de vote par correspondance prévue au II du présent article.
« V. – Dès réception de la demande, la commission de vote par correspondance l’enregistre et vérifie à son tour que l’électeur est en capacité de voter et que sa demande comporte les indications et est accompagnée des pièces prévues au III.
« Dans l’affirmative, la commission de vote par correspondance fait adresser sans délai, à l’électeur sous pli recommandé, par la commission de propagande prévue aux articles L. 166, L. 212, L. 224-23, L. 241, L. 354, L. 376, L. 413, L. 491, L. 518, L. 546 et L. 558-26 du code électoral et à l’article 17 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen, le matériel de vote, au plus tard le lundi qui précède le scrutin. Dans l’hypothèse où plusieurs élections ont lieu le même jour, chaque élection concernée fait l’objet d’un envoi distinct.
« Dans la négative, la commission de vote par correspondance indique à l’électeur les raisons pour lesquelles sa demande ne peut être acceptée.
« En l’absence de réception du matériel de vote dans le délai imparti ou en cas de réponse négative, l’électeur peut saisir le ministère de l’Intérieur, le cas échéant par voie électronique.
« Chaque électeur n’est destinataire que d’un unique pli de matériel de vote.
« VI. – Le matériel de vote par correspondance sous pli fermé comprend :
« 1° Une enveloppe d’identification d’une couleur déterminée par voie réglementaire, sur laquelle est imprimé un certificat de vote signé par le président de la commission de vote par correspondance ou par son délégué, revêtu du cachet officiel, et comportant un code-barres, un numéro identique à celui de la demande de l’électeur, ses nom, prénoms, date et lieu de naissance, nom de la commune de la liste électorale sur laquelle il figure, le numéro d’identifiant national et le numéro d’ordre dans le bureau de vote de l’électeur, ainsi qu’une déclaration sous serment à signer ;
« Lorsque plusieurs élections ont lieu le même jour, chaque élection se voit attribuer une nuance de cette couleur différente.
« 2° Une enveloppe d’expédition préaffranchie, portant la mention “Élections – Vote par correspondance – le scrutin concerné”, d’une couleur déterminée par voie réglementaire, sur laquelle est imprimée l’adresse du tribunal judiciaire compétent, le nom et le code de la commune de la liste électorale sur laquelle l’électeur est inscrit. Lorsque plusieurs élections ont lieu le même jour, chaque élection se voit attribuer une nuance de cette couleur différente ;
« 3° Une enveloppe électorale d’une couleur déterminée par voie réglementaire et distincte de la couleur de l’enveloppe utilisée pour le vote à l’urne. Lorsque plusieurs élections ont lieu le même jour, chaque élection se voit attribuer une nuance de cette couleur différente ;
« 4° Les bulletins de vote et circulaires des candidats ;
« 5° Une notice d’utilisation.
« VII. – Au fur et à mesure de la réception des demandes de vote par correspondance, le président de la commission de vote par correspondance, ou son délégué, inscrit sur un registre composé de pages numérotées, ouvert à cet effet, les noms et prénoms du demandeur, le numéro de la demande mentionné au IV, le numéro d’identifiant national et le numéro d’ordre dans le bureau de vote de l’électeur, ainsi que le nom et la qualité de l’autorité qui a réceptionné la demande et la date de son établissement. Le registre est tenu à la disposition de tout électeur, y compris le jour du scrutin.
« Mention de la suite donnée à chaque demande par la commission de vote par correspondance est faite en face du nom de l’électeur.
« VIII. – La liste des électeurs admis à voter par correspondance est envoyée par le président de la commission de vote par correspondance au maire, au plus tard avant l’expiration du délai fixé pour l’envoi des documents de propagande électorale.
« IX. – L’enveloppe d’identification scellée, revêtue de la signature de l’électeur et de sa déclaration sous serment et renfermant l’enveloppe électorale contenant le bulletin de vote scellée, adressée au président de la commission de vote par correspondance prévue au II doit parvenir au tribunal judiciaire par voie postale ou par les autorités compétentes pour établir les procurations, ou être déposée en personne, au plus tard le vendredi précédant le jour du scrutin, à 17 heures.
« Tout dépôt par une même personne de plusieurs enveloppes est interdit.
« L’envoi du vote par correspondance sous pli fermé ne prive pas l’électeur de son droit de vote à l’urne. S’il vote à l’urne le jour du scrutin, son vote par correspondance est annulé.
« X.- Chaque greffier en chef du tribunal judiciaire compétent tient un registre du vote par correspondance sous pli fermé, composé de pages numérotées. Il est fait mention au registre des enveloppes d’identification reçues au fur et à mesure de leur arrivée et du numéro du certificat mentionné au VI. Sur chaque enveloppe est aussitôt apposé un numéro d’ordre.
« Tout électeur et tout candidat, ou son représentant, peuvent consulter le registre et y consigner leurs observations relatives aux opérations du vote par correspondance.
« Chaque pli de vote par correspondance fait l’objet d’un accusé de réception auprès de l’électeur.
« XI. – Les enveloppes d’identification sont conservées dans un lieu sécurisé, sous la responsabilité du greffier en chef du tribunal judiciaire compétent.
« À l’échéance du délai prévu au IX, les enveloppes d’identification sont remises avec le registre prévu au X à la commission de vote par correspondance.
« La commission vérifie la conformité du nombre de plis remis et le nombre figurant au registre prévu au X, puis l’identité de chaque électeur au moyen de son certificat et de la concordance de ses signatures.
« La commission de vote par correspondance transmet au maire la liste des électeurs ayant pris part au vote par correspondance. Le maire inscrit sur la liste électorale et la liste d’émargement la mention du vote par correspondance sous pli fermé en face du nom de chaque électeur.
« La commission de vote par correspondance informe chaque électeur de la transmission ou non de son pli de vote par correspondance au bureau de vote auquel il est inscrit. Un site internet dédié permet à chaque électeur de vérifier la réception et la validité de son vote par correspondance.
« À l’issue de ces opérations, les enveloppes d’identification, demeurées scellées, et le registre du vote par correspondance sous pli fermé sont restitués au greffier en chef pour être conservés dans les conditions prévues au premier alinéa du présent XI.
« XII. – Ne donnent pas lieu à émargement les enveloppes d’identification :
« 1° Reçues en plus d’un exemplaire au nom d’un même électeur ;
« 2° Parvenues hors du délai prévu au IX ;
« 3° Pour lesquelles la commission de vote par correspondance n’a pas authentifié l’identité de l’électeur ;
« 4° Pour lesquelles le certificat est non valide ;
« 5° Pour lesquelles la déclaration de serment n’est pas signée ;
« 6° Qui ne sont pas scellées.
« Ces enveloppes sont contresignées par les membres de la commission de vote par correspondance et sont annexées au procès-verbal selon les modalités prévues à l’article L. 66 du code électoral.
« Les enveloppes parvenues après 17 heures le vendredi précédant le scrutin ne sont pas ouvertes et sont conservées par le greffier en chef qui en dresse procès-verbal. Les enveloppes sont détruites à l’expiration du délai de recours contentieux.
« XIII. – Le jour du scrutin, les documents et le registre mentionnés aux premier et deuxième alinéas du XI sont acheminés jusqu’au bureau de vote par les autorités compétentes pour établir les procurations.
« À la clôture du scrutin, son président et ses assesseurs indiquent le numéro du certificat sur la liste d’émargement, procèdent à l’ouverture des enveloppes d’identification et insèrent l’enveloppe électorale dans l’urne fermée, après s’être assurés que l’électeur concerné n’a pas déjà voté à l’urne.
« Les émargements de vote par correspondance et de vote à l’urne sont comptabilisés distinctement. Leur nombre est consigné au procès-verbal avant toute ouverture de l’urne. Il est vérifié, avant l’ouverture de l’urne, qu’aucun bulletin n’est en circulation dans le bureau de vote. Ensuite, le dépouillement se déroule de la manière suivante : l’urne est ouverte et le nombre des enveloppes est vérifié. Si le nombre de bulletins de vote par correspondance est plus grand ou moindre que celui des émargements, il en est fait mention au procès-verbal.
« Les enveloppes de vote par correspondance non réglementaires sont contresignées par les membres du bureau et annexées au procès-verbal selon les modalités prévues à l’article L. 66 du code électoral.
« À l’issue du dépouillement, les enveloppes d’identification sont restituées au greffier en chef du tribunal judiciaire compétent et conservées dans les conditions prévues au premier alinéa du XI, jusqu’à l’expiration du délai de recours contentieux.
« XIV. – Ne sont pas recevables :
« 1° Une enveloppe d’identification non scellée ou qui contient plusieurs enveloppes électorales ;
« 2° Un bulletin qui n’a pas été inséré dans une enveloppe électorale officielle ;
« 3° Une enveloppe électorale non scellée.
« XV. – Tout électeur conserve la possibilité de voter personnellement à l’urne. Les dispositions du deuxième alinéa du XIII sont alors applicables.
« XVI.- En cas de décès ou de privation des droits civiques de l’électeur ayant exercé son droit de vote par correspondance, son vote est annulé de plein droit.
« XVII. – Un membre de la commission de vote par correspondance assiste à sa demande aux travaux de la commission de recensement prévue aux articles L. 175, L. 224-28, L. 359, L. 396, L. 416, L. 558-30 et L. 558-47 du code électoral et à l’article 21 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen.
« XVIII. – Les sanctions prévues à l’article L. 111 du code électoral s’appliquent aux I à XVII.
« XIX. – Les dépenses résultant de l’organisation des opérations de vote par correspondance sous pli fermé prévues au présent article sont à la charge de l’État.
« XX. – Des décrets d’application pris en Conseil d’État déterminent les conditions d’application du présent article.
« XXI. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2027. »
La parole est à M. Éric Kerrouche.