Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Monsieur le sénateur Cardon, les rapports sur l’ouverture du RSA aux 18-25 ans ne manquent pas. J’en ai moi-même commandé un, en tant que ministre, ou tout au moins j’ai demandé des éléments extrêmement factuels sur le sujet.
Vous avez raison de souligner l’urgence sociale chez les jeunes, qu’ils soient étudiants ou pas. Le Gouvernement a déjà apporté une réponse conséquente à cette situation, par le biais de mesures catégorielles spécifiquement destinées aux étudiants. Ils peuvent désormais bénéficier de deux repas au Crous, le centre régional des œuvres universitaires et scolaires, au prix d’un euro, comme l’avait annoncé le Président de la République. Un « chèque psy » a été créé pour qu’ils aient accès au soutien psychologique dont ils ont cruellement besoin en ce moment.
Quant au plan « 1 jeune, 1 solution » qui a été proposé par Élisabeth Borne, j’ai eu l’occasion d’en débattre avec bon nombre d’acteurs qui se mobilisent pour le RSA jeune. Pour peu qu’il soit correctement appliqué et qu’il trouve son public, ce plan est beaucoup plus ambitieux que le RSA jeune, qui reste une allocation sociale sans accompagnement pratique pour un retour à l’emploi.
Le plan offre au contraire un panel de solutions, qu’il s’agisse ; de « l’école de la deuxième chance » à laquelle je crois beaucoup ; de l’apprentissage que nous soutenons grâce à une aide de 4 000 euros par an versée aux entreprises pour faciliter les embauches ; de la formation professionnelle ; ou de la garantie jeunes dont nous augmentons les volumes et dont nous reverrons la durée, s’il le faut, car c’est un bon dispositif complémentaire.
Le plan « 1 jeune, 1 solution » vise à ce qu’aucun jeune ne se retrouve sans proposition concrète. Toutes ces offres sont accompagnées d’une rémunération qui est supérieure à la rémunération théorique d’un RSA jeune. Le Gouvernement a mobilisé la somme globale de 6,7 milliards d’euros pour ce plan, ce qui est un montant inédit.
Je dispose d’éléments factuels et chiffrés sur le coût du RSA jeune et ses bénéfices en termes de pouvoir d’achat. Encore une fois, les chiffres sont sans proportion égale avec ceux du plan « 1 jeune, 1 solution ». Nous devons le promouvoir dans nos territoires respectifs, auprès des entreprises, des préfets, des commissaires régionaux à la lutte contre la pauvreté. Il s’agit, je le redis, d’un plan très ambitieux, qui mérite qu’on fasse la démarche d’aller auprès des jeunes pour le leur faire connaître.
Quoi qu’il en soit, votre demande de rapport n’a pas grand-chose à voir avec l’état d’urgence sanitaire qui nous mobilise. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 12.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 1er
I. – (Non modifié) À la fin de l’article 7 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, la date : « 1er avril 2021 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2021 ».
II (nouveau). – Le livre Ier de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le I de l’article L. 3131-15 est ainsi modifié :
a) Le 6° est ainsi rédigé :
« 6° Limiter ou interdire les rassemblements sur la voie publique ou dans un lieu ouvert au public ainsi que les réunions de toute nature, à l’exclusion de toute réglementation des conditions de présence ou d’accès aux locaux à usage d’habitation ; »
b) Le 8° est abrogé ;
2° Au cinquième alinéa du II de l’article L. 3131-17, après le mot : « déroule, », sont insérés les mots : « pendant plus de douze heures par jour, » ;
3° L’article L. 3131-19 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le comité peut être consulté par les commissions parlementaires sur toute question concernant les sujets mentionnés à la quatrième phrase du premier alinéa du présent article.
« Un décret détermine les règles en matière de déontologie, de conflits d’intérêts, de confidentialité, d’indépendance et d’impartialité applicables aux membres du comité. »
Mme la présidente. L’amendement n° 8, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement a pour objet de tirer les conséquences logiques de notre opposition claire à la prolongation de l’état d’urgence sanitaire, état d’exception institué par la loi du 23 mars 2020.
Les interrogations que nous avons exprimées il y a maintenant dix mois ont vu leur pertinence confirmée, mois après mois. Ni les restrictions des libertés publiques ni la mise sous cloche de la démocratie ne sont une nécessité sur le plan sanitaire. Elles sont l’aboutissement d’un choix juridique et politique qui confie au seul pouvoir exécutif l’essentiel des prérogatives.
Monsieur le ministre, les arguments sur l’efficacité de ces mesures que vous avez répétés à l’infini, depuis des mois, n’ont plus lieu d’être. Les fiascos successifs – faut-il le rappeler ?– des masques, gel et tests, l’inertie en matière de moyens supplémentaires pour l’hôpital public, le retard et les difficultés persistantes concernant le vaccin, suffisent à démontrer que l’efficacité de la gestion solitaire par le pouvoir exécutif a ses limites.
Les atermoiements de ces derniers jours et heures sont indécents. La population, les médias, les parlementaires et les élus locaux sont suspendus à la parole quasi divine du Président de la République : va-t-il décider de confiner ou pas ?
Monsieur le ministre, mes chers collègues, pourquoi n’est-ce pas le Parlement qui prend cette décision si lourde de conséquences ? Si nous pouvions entendre l’urgence du mois de mars, il est possible aujourd’hui de prendre le temps de la démocratie et de laisser les représentants du peuple décider, ou au moins codécider des mesures à adopter pour la sécurité de nos concitoyennes et concitoyens.
Il faut pour cela de la transparence. Pourquoi le chef de l’État est-il le seul à détenir des informations sensibles et les chiffres divulgués au sein du « bunker » qu’est devenu le conseil de défense ? Le Parlement doit, lui aussi, pouvoir disposer des informations confidentielles nécessaires pour prendre les bonnes décisions.
Mes chers collègues, un outil constitutionnel existe pour permettre au Parlement de disposer des mêmes informations que l’exécutif, à savoir la réunion en comité secret prévue par l’article 33 de la Constitution.
Monsieur le ministre, allez-vous le mettre en œuvre afin que les assemblées soient informées et puissent décider ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable, car nous pensons que dans les circonstances actuelles, il est responsable de continuer de demander aux Français de respecter un certain nombre de règles qui leur sont, certes, de plus en plus pesantes, mais dont le relâchement induirait les risques d’accélération des contaminations, dans un contexte sanitaire dont chacun perçoit parfaitement qu’il se dégrade de jour en jour.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Madame la sénatrice Apourceau-Poly, demain et après-demain, je serai aux côtés du Premier ministre pour recevoir les comités de liaison des différents chefs de groupes parlementaires de l’Assemblée nationale et du Sénat.
Nous recevons également les partenaires sociaux, que ce soit les représentants des syndicats ou du patronat. Nous recevons aussi les associations d’élus. Qui pourrait donc dire qu’il n’y a pas de concertation ?
Pardonnez-moi de ne pas être d’accord avec vous, mais il n’y a pas d’atermoiements de la part du Gouvernement. Les processus de décision sont conformes au droit, à la Constitution et aux habitudes de fonctionnement de l’État. Cela n’empêche pas les uns ou les autres de s’exprimer dans les journaux et autres médias, selon une tradition propre à notre pays et qui perdure depuis un an.
Cependant, faut-il croire, au motif que M. Untel affirme qu’il faut confiner ou qu’un autre explique que le cousin du préfet a appelé la voisine de M. Bidule qui lui a dit que le confinement interviendrait à partir du 5 du mois, qu’il y aurait forcément un plan caché, de l’atermoiement, et qu’on livrerait les Français au « supplice chinois » avant de prendre une décision ? Ce n’est pas du tout la réalité !
Madame la sénatrice, quand vous dites que le Président de la République est le seul à disposer d’informations sensibles, précisez-moi celles dont vous voudriez disposer et que je n’aurais pas déjà données en transparence ! Je suis prêt à partager avec vous toutes les informations, notamment celles que j’ai encore livrées ce matin au Président de la République, en conseil de défense et de sécurité nationale.
J’ai fait de la transparence une règle. Pour l’anecdote, l’une des rares fois où il m’est arrivé de rentrer dans mes terres grenobloises, un ami m’a interrogé sur « ce qu’il y avait à savoir ». Je lui ai répondu qu’il n’y avait rien de plus que ce que j’avais dit en conférence de presse.
Celle de demain matin sera encore une fois l’occasion de donner toutes les informations dont nous disposons en termes épidémiologiques et sanitaires, chiffres et courbes à l’appui. Il n’y a pas d’information sensible qui ne soit pas partagée en totalité avec les Français.
Par conséquent, je vous repose la question, si vous considérez qu’il vous manque une information, précisez-moi laquelle et je vous la donnerai.
L’avis du Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1, présenté par Mme Benbassa, M. Benarroche et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Le présent amendement a pour objet de supprimer l’alinéa de l’article 1er qui reporte au 31 décembre 2021 la caducité du régime juridique d’état d’urgence sanitaire.
Ce régime juridique exceptionnel doit être appliqué dans les délais les plus brefs et strictement proportionné au contexte sanitaire. Or la prolongation prévue jusqu’au 31 décembre 2021 nous apparaît excessivement longue et injustifiée.
Le Gouvernement s’était engagé à réviser ce cadre juridique dérogatoire avant le 1er avril 2021, mais il ne tient pas sa parole. Sa gestion centralisée et l’opacité des décisions prises lors du conseil de défense privent le législateur de tout contrôle, et les collectivités territoriales de toute concertation.
La gestion de cette épidémie devrait pourtant tenir compte des évolutions du virus en fonction des territoires, car le risque d’une dégradation sanitaire n’est pas le même en Guyane ou en Bretagne. Or l’exécutif ne prend nullement en considération ces disparités.
Enfin, la date retenue du mois de décembre 2021 entre en contradiction avec les prévisions du calendrier de vaccination. La campagne vaccinale doit en effet prendre fin en juin 2021 : pourquoi donc prolonger le régime de l’état d’urgence jusqu’en décembre ?
Telles sont les nombreuses incohérences qui nous conduisent à présenter cet amendement de suppression de l’article 1er.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 2 rectifié bis est présenté par Mme V. Boyer, MM. Paccaud, Boré et Le Rudulier, Mme Belrhiti, M. Sautarel, Mmes Joseph et de Cidrac, M. Regnard, Mmes Garriaud-Maylam et Dumas, MM. Frassa et Bouchet, Mme Thomas, MM. Klinger, Belin et Saury, Mme Micouleau et MM. Genet, C. Vial et B. Fournier.
L’amendement n° 13 est présenté par Mme de La Gontrie, MM. Sueur, Kanner, Bourgi et Durain, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Antiste, Mmes Artigalas et Conconne, MM. Jacquin et P. Joly, Mmes Le Houerou et Lubin, M. Mérillou, Mme Poumirol, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Temal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 1
Remplacer la date :
31 décembre
par la date :
30 septembre
La parole est à Mme Valérie Boyer pour présenter l’amendement n° 2 rectifié bis.
Mme Valérie Boyer. Cet amendement vise à « territorialiser » l’urgence sanitaire, en prenant en compte les critères locaux. Il n’a pas pour objet de fragiliser les mesures qui doivent nécessairement être uniformes au niveau national afin d’être lisibles et efficaces.
M. le rapporteur a insisté sur la nécessité de faire passer un message. C’est la raison pour laquelle je vais retirer cet amendement.
Néanmoins, il ne faut pas négliger les difficultés que nous rencontrons sur nos territoires. Lors de conférences avec le préfet, au téléphone ou en « visio », il arrive qu’il nous demande notre avis pour ne jamais en tenir compte.
Les acteurs locaux doivent changer leur manière de travailler, car ils ne participent pour l’instant qu’à des réunions d’information où la concertation n’existe pas. Il en découle une difficulté sur la territorialisation de l’état d’urgence.
Même si je comprends les arguments qui ont été donnés, la situation reste difficile à vivre sur le terrain, non seulement pour nous, mais aussi pour tous les collègues qui sont confrontés localement à la crise sanitaire et qui doivent faire face aux carences de l’État central.
Mme la présidente. Ma chère collègue, vous nous avez présenté l’amendement n° 4 rectifié bis. Qu’en est-il de l’amendement n° 2 rectifié bis ?
Mme Valérie Boyer. Il est défendu.
Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Durain, pour présenter l’amendement n° 13.
M. Jérôme Durain. Nous n’avons jamais reçu autant de mails et n’avons jamais été aussi interpellés par les citoyens, qui souhaitent que l’on en termine avec cet état d’urgence.
Notre rôle est d’accompagner ce mouvement dans le cadre d’un débat respectueux et étayé avec le Gouvernement. Vous n’obtiendrez pas toujours notre vote, monsieur le ministre, mais nous serons toujours là pour vous faire part de ce que nous ressentons de l’état de la population, notamment de son épuisement psychologique.
Nous avons compris que le pilotage de cet état d’urgence était un pilotage fin : les différentes étapes de vaccination que vous nous avez présentées supposent une supervision millimétrée. Le pilotage démocratique de l’état d’urgence doit, lui aussi, être très fin.
La qualité des échanges que nous pouvons avoir avec vous, au Parlement, permettra d’accroître l’acceptation sociale de l’état d’urgence. Comme l’a souligné Philippe Bas jeudi dernier, lors de votre audition, l’état d’urgence impose des restrictions très importantes aux libertés publiques. Pilotons tout cela ensemble, dans la plus grande régularité, avec des échanges très réguliers.
Cet amendement vise donc à avancer la date de caducité du régime de l’état d’urgence du 31 décembre au 30 septembre 2021.
À cette date, nous pourrons apprécier la nécessité et la proportionnalité des mesures que vous souhaitez prendre et faire le point à la fois sur la situation de la crise sanitaire, sur l’état de la campagne vaccinale et sur les mesures sanitaires à adopter.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Mes chers collègues, vous vous souvenez certainement que c’est le Sénat, en mars 2020, qui a obtenu que l’état d’urgence sanitaire soit un régime temporaire. Le Gouvernement avait initialement proposé d’instaurer ce régime par analogie avec celui de la loi de 1955 sur l’état d’urgence – loi toujours en vigueur depuis soixante ans…
Nous avions alors dit que nous ne souhaitions pas ajouter dans notre droit un nouveau régime d’exception au nom duquel un gouvernement pourrait, à l’avenir, restreindre les libertés publiques. S’il nous paraissait utile de permettre au Gouvernement de disposer de pouvoirs exceptionnels pendant cette période de crise sanitaire, il fallait que ce dispositif soit temporaire et limité à la durée de la crise.
Nous avions estimé qu’une période d’un an conviendrait. Le Gouvernement nous avait en effet expliqué que, même si nous parvenions à juguler l’épidémie à l’été, il n’était pas impossible que cette dernière reparte à l’automne, comme c’est le cas de beaucoup de virus.
Or nous nous rendons compte aujourd’hui que ce qui nous paraissait prudent voilà près d’un an ne l’était peut-être pas suffisamment, puisque nous devons maintenir le régime de l’état d’urgence sanitaire au-delà de la date d’échéance du 1er avril prochain.
Ce régime confère certes au Gouvernement des pouvoirs d’exception, mais seulement s’ils sont activés, et pour une durée limitée. Autrement dit, ce n’est pas parce que le régime existe que les pouvoirs d’exception seront utilisés par le Gouvernement ; cela signifie simplement que le dispositif existe et que le Gouvernement peut y recourir.
Certains de nos collègues se demandent s’il ne serait pas préférable de porter le terme de ce régime de décembre à septembre 2021.
Il me semble que le choix de décembre est raisonnable. Par ailleurs, n’oublions pas que le Parlement doit se prononcer si le régime est activé pendant plus de deux mois et demi. En cas de confinement, mesure particulièrement grave et restrictive des libertés, le Parlement doit se prononcer dans les trente jours.
Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à ces trois amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je soutiens bien évidemment la position de notre rapporteur et je ne voterai pas ces amendements. En effet, il ne s’agit plus d’un état d’urgence, mais d’une pandémie chronique !
Monsieur le ministre et, si vous me le permettez, cher confrère, vous avez lancé un défi à Mme Assassi et vous êtes engagé à lui fournir les données dont elle ne disposerait pas. Je pense que vous tiendrez le même discours à mon égard… Je souhaite justement vous interroger très précisément sur trois données que je n’ai pas.
Premièrement, quelle est votre position sur l’ivermectine ?
Deuxièmement, quelle est votre position sur la vaccination passive au travers du traitement par anticorps monoclonaux ? L’Allemagne vient d’acheter des doses. Le gouvernement français travaille-t-il sur cette éventualité ?
Troisièmement, que pensez-vous d’un renforcement de l’isolement, qui est un confinement individuel, alors que le confinement collectif devient de plus en plus insupportable pour tous ?
Je vous remercie, monsieur le ministre, de me répondre précisément sur ces trois points. Il s’agit de traitements qui viendraient en sus de la campagne de vaccination et qui, peut-être, permettraient d’éviter une mesure aussi lourde qu’un confinement généralisé.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre. Monsieur Savary, je répondrai bien volontiers à deux de vos trois questions, la troisième portant sur une opinion, non sur des données factuelles.
Je n’ai pas vocation à faire part de mon opinion personnelle, même si j’entends parfaitement les impatiences et les questionnements. Le porte-parole du Gouvernement a déclaré, à l’issue du conseil des ministres, que beaucoup d’options étaient sur la table, y compris celle d’un « confinement très serré ».
En ce qui concerne les anticorps monoclonaux, plusieurs traitements sont potentiellement intéressants. Hier soir, une demande d’autorisation temporaire d’utilisation, ou ATU, de cohorte a été déposée auprès des autorités sanitaires françaises ; cette demande pourrait nous permettre d’exploiter l’un de ces traitements, ne serait-ce que dans le cadre d’une étude clinique. Mais les données sont encore trop fragiles pour une diffusion auprès de la population.
En ce qui concerne l’ivermectine, comme la colchicine ou d’autres traitements en « ine », il faut être extrêmement prudent. On se souvient d’ailleurs d’un traitement en « ine » dont on a beaucoup parlé dans notre pays… Il a fallu un peu de temps pour que les promoteurs les plus fameux de ce traitement reconnaissent eux-mêmes que les choses n’étaient pas aussi claires que cela.
Je vois passer sur internet des ordonnances recommandant, par exemple, d’associer colchicine et azythromycine, alors que le Vidal indique une contre-indication, car les interactions de ces deux médicaments peuvent avoir des conséquences sanitaires désastreuses.
Pour autant, il faut toujours avoir l’esprit alerte, et nous l’avons en France : lorsqu’un traitement peut faire preuve d’efficacité in vitro, nous nous donnons bien évidemment la peine de pousser cette piste, pour voir s’il est efficace ou non.
Pour l’instant, aucun résultat validé n’a été publié qui permette de penser qu’une quelconque molécule soit efficace, hélas. Nous verrons quelle sera la réponse des autorités sanitaires. C’est à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, quand elle sera saisie de la question, qu’il reviendra de dire en toute indépendance si elle souhaite mettre en œuvre des protocoles cliniques fondés sur l’ivermectine.
En ce qui concerne la colchicine, une revue canadienne a publié une étude que nous n’avons pas encore évaluée. Il faut donc rester prudent. Cela fait d’ailleurs un an que les Canadiens parlent de ce traitement… Chaque pays semble avoir son traitement miracle, mais celui-ci n’existe pas encore. Et cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas chercher ni se battre pour être prêt le jour où il sera trouvé.
En revanche, je crois aux vaccins : c’est factuel, c’est publié, c’est validé, et nous n’avons pas attendu pour les mettre à la disposition de la population.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2 rectifié bis et 13.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 28, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 10
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le ministre.
Mme Catherine Procaccia. Vous êtes lucide ! (Sourires.)
M. Olivier Véran, ministre. … mais je présenterai tout de même cet amendement, qui vise à supprimer les dispositions modifiant le régime juridique de l’état d’urgence sanitaire, introduites sur l’initiative de la commission des lois du Sénat.
Ce n’est pas que les travaux de votre commission ne soient pas intéressants ou légitimes sur le fond, mais ils relèvent très clairement du texte que nous avions présenté en conseil des ministres, avant de le retirer – avec l’approbation des parlementaires, me semble-t-il –, pour en reprendre l’examen à froid, hors du contexte de crise sanitaire.
J’entends votre volonté d’adjoindre ces éléments, mais ce texte n’est pas, aujourd’hui, le bon vecteur. Et cela ne veut pas dire que nous ne reprendrons pas ces dispositions.
Mme la présidente. L’amendement n° 14, présenté par M. Leconte, Mme de La Gontrie, MM. Sueur, Kanner, Bourgi et Durain, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Marie et Antiste, Mmes Artigalas et Conconne, MM. Jacquin et P. Joly, Mmes Le Houerou et Lubin, M. Mérillou, Mme Poumirol, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Temal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le deuxième alinéa de l’article L. 3131-13 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils sont destinataires, mensuellement, d’un rapport du Gouvernement rendant compte des décisions prises par les juridictions administratives dans le cadre des contentieux soulevés par l’application des mesures fondées sur le présent chapitre. » ;
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement vise à préciser et à renforcer le contrôle parlementaire prévu à l’article L. 3131-13 du code de la santé publique.
Nous demandons que le Gouvernement publie un rapport incluant une description des contentieux auprès du Conseil d’État liés à l’état d’urgence sanitaire.
Le document que nous recevons aujourd’hui comporte une cinquantaine de pages : deux requêtes sont présentées sur chaque page avec le nom des requérants et le sujet du litige, mais nous ignorons la réponse du Conseil d’État. Il est possible d’aller chercher le détail des contentieux, mais cela s’avère fastidieux. Or il peut être utile de connaître la position du Conseil d’État avant d’examiner un texte.
Monsieur le ministre, je profite de mon intervention pour revenir sur une question qui avait conduit à un échange un peu vif entre nous, en septembre dernier, sur les tests PCR, lesquels sont justement l’objet de contentieux auprès du Conseil d’État.
La semaine dernière, vous avez changé de nouveau les règles pour les voyages intraeuropéens, sauf pour les frontaliers – on se demande comment il est possible de protéger nos concitoyens en procédant ainsi !
Ce week-end, j’ai reçu beaucoup d’appels téléphoniques de personnes obligées, pour rejoindre la France, de faire un test PCR qui coûtait parfois de 120 à 150 euros, soit trois fois plus cher que leur billet d’avion ! Elles se sont retrouvées bloquées, car la décision avait été prise vendredi dernier.
Cet exemple montre qu’il serait utile que nous connaissions les dernières décisions du Conseil d’État, lequel a rappelé, cet été, que tout citoyen français avait le droit de rentrer sur notre territoire. Il s’agit de permettre au contrôle parlementaire de s’exercer dans les meilleures conditions.
Mme la présidente. L’amendement n° 27 rectifié, présenté par MM. Savin et Piednoir, Mmes Deroche et L. Darcos, MM. Hugonet, Savary et Levi, Mmes Belrhiti, Garriaud-Maylam et Micouleau, M. D. Laurent, Mme Joseph, MM. Longeot, Laménie, Bazin, Belin et S. Demilly, Mme Schalck, MM. Sol, Regnard, Courtial et Burgoa, Mme Puissat, MM. P. Martin, Folliot et Menonville, Mme Férat, MM. Bouchet, Laugier, Mouiller et Chauvet, Mmes Deseyne et Paoli-Gagin, MM. Vogel et Wattebled, Mmes Procaccia, Malet et Borchio Fontimp, M. Husson, Mme Guidez, MM. Gremillet, Houpert et E. Blanc, Mmes Boulay-Espéronnier et Lassarade, M. Genet, Mme Dumont, M. Henno et Mme Noël, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après le I du même article L. 3131-15, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Les mesures prévues aux 2° et 5° du I du présent article ne peuvent conduire, ni à interdire aux personnes munies à cet effet d’une prescription médicale ou présentant un handicap reconnu par la maison départementale des personnes handicapées ainsi que l’encadrement nécessaire de pratiquer une activité physique dans un établissement sportif même couvert, ni à limiter leur accès à de tels établissements. » ;
La parole est à M. Stéphane Piednoir.