Mme la présidente. La parole est à M. Franck Montaugé, pour la réplique.
M. Franck Montaugé. Monsieur le secrétaire d’État, vous me faites la même réponse que celle que Mme Bourguignon, à l’Assemblée nationale, a offerte à ma collègue députée Gisèle Biémouret, ce qui est bien normal. Reste que cette décision de non-attribution d’un appareil d’IRM à Condom fragilise le territoire de santé dont le centre hospitalier d’Auch est l’établissement support. On habitue les gens à aller à Agen ou ailleurs encore.
Dans une perspective de réponse de service public aux besoins des habitants du Condomois et, plus largement, du nord du département du Gers, on va dans le mauvais sens. Les équipes se sont beaucoup mobilisées sur ce dossier, ainsi que la direction du centre hospitalier de Condom ; aujourd’hui, elles sont très déçues.
Je terminerai mon propos en évoquant la démographie médicale : celle-ci dépend aussi de la qualité des équipements et des actes que l’on peut réaliser au sein des centres hospitaliers. C’est typiquement le cas dans le Condomois.
calendrier du projet de loi relatif au grand âge et à l’autonomie
Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Joly, auteur de la question n° 1159, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Patrice Joly. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous relayer les inquiétudes des représentants des grandes organisations et fédérations de l’aide à domicile concernant le calendrier incertain du projet de loi relatif au grand âge et à l’autonomie.
Comment, pour commencer, ne pas rappeler la forte mobilisation des acteurs accompagnant les personnes âgées, le 30 janvier 2018, pour exprimer leur malaise ? Ce fut leur manière de dénoncer les moyens humains et financiers manquants, ainsi que les effets délétères de la réforme de la tarification de 2015.
Depuis lors, un rapport comportant plus de 175 propositions visant à refonder la prise en charge des personnes âgées en perte d’autonomie a été remis, en mars 2019, à la ministre des solidarités et de la santé. La mission sur l’attractivité des métiers du grand âge et de l’autonomie a pour sa part rendu ses conclusions, dans un rapport portant « plan de mobilisation nationale en faveur de l’attractivité des métiers du grand âge », en octobre 2019. Ces deux rapports ont mis en exergue la nécessité de mener une réflexion réelle sur les métiers du grand âge, leurs qualifications, diplômes, statuts et rémunérations, ainsi que sur les formations préparant à ces métiers.
Comme vous le savez, les directeurs d’Ehpad ont des difficultés à recruter des personnels qualifiés et se retrouvent à devoir embaucher des encadrants non diplômés, qui apprennent leur métier sur le terrain, sans suivre de formation théorique et sans obtenir de qualification professionnelle reconnue. Ces employés – majoritairement des femmes – se retrouvent cantonnés dans des postes à faible rémunération, sans possibilité d’évolution, ce qui rend ces emplois peu attractifs.
Les enjeux sont cruciaux et connus de tous. La problématique du vieillissement de la population devient plus aiguë en raison de l’arrivée des baby-boomers à des âges avancés. La prise en charge de la dépendance des personnes âgées se pose donc avec une plus grande acuité.
Trois ans après un mouvement social d’ampleur dans les établissements et les services d’aide à domicile pour les personnes âgées, les professionnels restent très inquiets et attendent la mise en œuvre de mesures concrètes, d’un calendrier stable et d’une réforme lisible, coordonnée et financée. Une loi était annoncée pour l’automne 2019 ; elle est désormais repoussée, éventuellement à l’été 2021, selon Mme Bourguignon, ministre déléguée chargée de l’autonomie. Le Président Emmanuel Macron ne l’a d’ailleurs pas mentionnée parmi ses priorités lors de ses vœux aux Français le 31 décembre dernier, ce qui était surprenant. Aussi, je souhaite connaître les intentions du Gouvernement en la matière.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur Patrice Joly, vous m’interrogez sur le calendrier gouvernemental en matière de prévention et de soutien à l’autonomie et au grand âge. Ce calendrier, vous le connaissez : il a déjà débuté et il est bien entamé. De nombreuses concertations se sont déjà tenues, sur des questions organisationnelles ; on peut citer le rapport Libault sur le renforcement de l’attractivité des métiers du grand âge, mais aussi le rapport de Myriam El Khomri et de nombreux autres.
Ces rapports ont connu deux premières traductions, en attendant la réforme globale sur laquelle nous travaillons. Le projet de loi Grand Âge et autonomie fait partie de cette réforme ; il sera examiné dès que nous aurons surmonté cette crise sanitaire.
C’est dans cet esprit qu’ont été adoptées la loi relative à la dette sociale et à l’autonomie ainsi que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, qui contenait un certain nombre de dispositions en la matière. Il y a déjà eu des avancées majeures : la première d’entre elles est la création de la cinquième branche de la sécurité sociale, pour la protection du risque de perte d’autonomie. C’est une première étape essentielle pour la concrétisation de notre ambition en la matière, mais notre ambition ne s’arrête pas là.
Le défi démographique bat son plein ; nous avons à cœur de faire vivre de nouvelles solidarités. Pour leur donner corps, il nous faut repenser l’accueil de nos concitoyens en perte d’autonomie, comme ils le demandent eux-mêmes. Il faut répondre à leur attente de mieux vivre, que ce soit chez eux ou dans un établissement en phase avec leurs aspirations. Pour cela, il faut à la fois des lieux adaptés et des personnes pour y travailler. Nous avons œuvré sur ces deux sujets.
Le plan de relance vient financer la rénovation de près de 30 000 places dans les établissements. Le Ségur de la santé vient quant à lui rehausser le salaire des professionnels en Ehpad d’un montant minimum de 160 à 185 euros nets par mois.
Les professionnels du domicile ne sont pas en reste. Le point d’indice a enfin été dégelé, et le Gouvernement a décidé d’accompagner le financement de la revalorisation des salaires des aides à domicile, qui dépendent normalement des seuls départements. Ainsi, 200 millions d’euros sont mobilisés chaque année par l’État, en plus de ce que les conseils départementaux apporteront eux-mêmes.
Les besoins sont majeurs ; la crise les a mis en relief un peu plus encore. Elle mobilise pleinement Olivier Véran et Brigitte Bourguignon, qui travaillent activement à la fois sur la protection de nos aînés face à la crise sanitaire et sur le projet de soutien à l’autonomie que nous développons. Notre priorité est de faire face à la crise, mais nous continuons et continuerons de porter notre ambition par tous les moyens, tant que cette crise ne sera pas pleinement jugulée.
rôle et responsabilité des maires dans la gestion actuelle de la pandémie de covid-19
Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Herzog, auteure de la question n° 1261, transmise à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christine Herzog. La Moselle a été durement touchée par la crise sanitaire du covid-19 : on y compte 1 490 décès depuis mars dernier, soit 22 % des victimes du Grand Est. Les élus ont dû faire face à des situations difficiles, malgré leur manque de moyens.
Les Premiers ministres qui se sont succédé depuis mars 2020 ont assuré au Sénat et à la ville de Metz que l’État menait des actions ciblées de prévention de l’épidémie, d’assistance et de gestion de la vaccination ; ils ont affirmé avoir désormais les moyens de contenir la contamination une fois les clusters identifiés, notamment pour la dernière souche, ou « variant ». Néanmoins, les chiffres ne baissent pas, bien au contraire. Au 17 janvier, on relevait 204 nouveaux cas pour 100 000 habitants en Moselle, alors que la moyenne nationale est de 188.
Le maire, en tant qu’élu et premier magistrat de sa commune, est la personne de confiance vers qui nos concitoyens se tournent en cas de difficultés, car il est le mieux placé pour leur répondre. Pour la vaccination, il n’a pourtant pas été sollicité, hormis dans les grandes métropoles. C’est étonnant, car le maire peut avoir une grande influence sur la décision de se faire vacciner.
Plus d’un million d’Allemands ont été vaccinés, dont plus de 100 000 dans les régions frontalières de la Moselle, contre 422 000 Français et 39 000 dans le Grand Est. Nous sommes très en retard !
Vacciner les personnes âgées est une bonne chose, mais il est indispensable de vacciner celles et ceux qui sont associés à ces personnes pour éviter la contamination et ne pas aggraver la crise économique. Il faut aller plus vite et vacciner davantage d’actifs !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il faut des vaccins !
Mme Christine Herzog. Je souhaite donc savoir quels moyens sont mis à la disposition des élus locaux et quels seront leur rôle et leurs responsabilités dans les actions des prochaines vaccinations et du passeport vaccinal.
Par ailleurs, dans l’éventualité où l’école serait touchée par un nouveau confinement, je vous demande, monsieur le secrétaire d’État, de nous préciser quand et comment le Gouvernement envisage d’associer les maires au protocole sanitaire à mettre en place pour les enfants.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Madame la sénatrice Christine Herzog, la réussite de la campagne de vaccination se fera main dans la main avec les maires. C’est la conviction qui est la nôtre !
La concertation est quotidienne, à l’échelle locale, avec les préfets et les agences régionales de santé. Dans le département de la Moselle, deux instances de concertation se réunissent à une fréquence hebdomadaire : pour une approche stratégique, le Collec réunit sous le pilotage du préfet tous les parlementaires du département, le président de la région Grand Est, les élus des grandes villes, mais aussi trois représentants des maires ruraux ; quant aux enjeux opérationnels, une instruction ministérielle du 15 décembre a institué une cellule départementale de vaccination, qui réunit l’ensemble des parties prenantes sous la coprésidence du préfet de département et de la directrice générale de l’ARS. Les maires en font partie.
Dès la fin de décembre, par l’intermédiaire de ces cellules, nous leur avons demandé de proposer des lieux adaptés à l’ouverture de centres vaccinaux et de prendre attache avec les personnes vulnérables concernées par la nouvelle étape de vaccination qui s’est ouverte lundi dernier. À l’occasion de votre question, je tiens à les remercier d’avoir contribué, par leur expertise au plus près du terrain, à l’ouverture de plus de 800 centres à ce jour. Nous savons pouvoir leur faire confiance dans la mobilisation des acteurs des territoires pour l’organisation, malgré les contraintes logistiques fortes qui s’imposent à nous tous.
Nous continuons dans ce sens, en associant les maires, avec le ministère de l’éducation nationale, au protocole sanitaire mis en œuvre dans les établissements scolaires pour garantir leur ouverture. Depuis la rentrée de janvier, ce protocole sanitaire est renforcé. Pour éviter le brassage entre les classes, les activités physiques et sportives scolaires en intérieur sont suspendues ; nous décuplons notre capacité de dépistage dans les écoles, avec un objectif de 300 000 tests par semaine.
Le rôle des maires sera aussi premier dans le transport des personnes vers les centres de vaccination. Le ministre des solidarités et de la santé a eu l’occasion d’échanger à ce propos avec le président de l’AMF pour réaffirmer ce principe.
La stratégie vaccinale française repose sur les connaissances scientifiques dont nous disposons et sur les recommandations de la Haute Autorité de santé. Depuis le démarrage de la campagne vaccinale, nous avons été transparents sur les approvisionnements. Nous avons transmis aux élus locaux, via les associations d’élus, les préfets et les directeurs généraux d’ARS, les nombres de vaccins, les lieux et les dates de livraison dans les établissements pivots.
Le 17 janvier, plus de 422 000 personnes avaient pu recevoir une première injection du vaccin. Dans notre pays, environ 1,6 million de doses ont été livrées, auxquelles s’ajouteront 315 000 doses supplémentaires du vaccin Pfizer d’ici au 20 janvier. Nous avons demandé aux préfets et aux ARS d’adapter l’ouverture des centres de vaccination au caractère progressif du calendrier d’approvisionnement. Il est important que le dialogue puisse se tenir localement pour optimiser la vaccination en fonction des doses disponibles en organisant au mieux la coordination des horaires d’ouverture des différents centres et éviter l’éparpillement des ressources médicales et paramédicales.
Les allocations des doses dans les établissements ont été faites pour coller à la réalité des territoires et aux besoins de leurs populations, en utilisant toutes nos ressources en vaccins. Tout est fait pour éviter les stocks dormants.
La campagne de vaccination durera jusqu’à l’été, à mesure que les vaccins seront autorisés et livrés à l’Union européenne. Les volumes globaux dont nous disposons, dont vous savez qu’ils sont négociés au niveau européen, sont limités pendant ces premières semaines ; il faudra donc encore quelques semaines pour que l’ensemble des personnes de plus de 75 ans ou atteintes de pathologies graves puissent être vaccinées. Il s’agit d’une course de fond dans laquelle l’engagement de chacun doit primer.
Enfin, s’agissant du guide relatif à l’organisation de la vaccination dans les Ehpad et les USLD, celui-ci était à destination des directeurs d’établissement. Il est le produit des interrogations légitimes de ces derniers au regard de la fragilité des publics concernés et ne constitue en aucun cas un frein à la vaccination, le recueil du consentement s’effectuant dans le cadre du droit et des règles en vigueur, connues et pratiquées par les médecins en vertu du code de la santé publique et du code de déontologie.
Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Herzog, pour la réplique.
Mme Christine Herzog. Merci beaucoup pour ces précisions, monsieur le secrétaire d’État. Malheureusement, ce ne sont que des effets d’annonce, ce n’est pas la réalité du terrain. Voici ce que l’on vous demande : que le Gouvernement soit beaucoup plus clair dans ses communications ! Rassurez les gens et faites confiance aux élus !
location de voiture pour les jeunes conducteurs
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 1222, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
M. Gilbert Roger. J’ai appelé l’attention de M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance sur la surprime appliquée par les loueurs de voitures aux jeunes conducteurs, c’est-à-dire aux jeunes âgés de moins de 26 ans, du fait du risque d’accident plus élevé pour cette catégorie de conducteurs.
Les prix varient selon les sociétés de location, mais certains loueurs pratiquent des surprimes très élevées, pouvant atteindre jusqu’à deux fois le tarif normal. Par ailleurs, les sociétés de location appliquant une surprime aux jeunes conducteurs n’en communiquent pas toujours le montant sur leurs tarifs.
Aussi, je souhaite savoir si le Gouvernement est prêt à réglementer cette surprime pratiquée par les sociétés de location de véhicules et à en limiter l’application aux conducteurs ayant moins de deux ans de permis afin d’éviter l’application de tarifs prohibitifs.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le sénateur Gilbert Roger, vous appelez l’attention du Gouvernement sur les suppléments que les loueurs de voitures appliquent aux consommateurs âgés de moins de 26 ans.
Je rappelle que, s’il est interdit de refuser ou de subordonner la fourniture d’un bien ou d’un service à une condition fondée sur l’âge, rien n’interdit aux loueurs d’appliquer des suppléments. Ainsi, le Défenseur des droits a souligné, dans une décision du 16 décembre 2014, que la fourniture d’une prestation de location de voiture « à des conditions tarifaires distinctes ne caractérise pas une différence de traitement prohibée, sauf si [cela] manifeste une volonté d’exclure les personnes concernées et s’apparente alors à un refus implicite ». Toutefois, il est indispensable que le consommateur en soit parfaitement informé avant la conclusion du contrat.
Des dispositions réglementaires visent, dans ce cadre, à protéger le consommateur en lui permettant d’avoir une connaissance précise des montants de ces suppléments avant de s’engager contractuellement. Ce cadre réglementaire vise à favoriser la transparence des prix au bénéfice d’une concurrence accrue et d’une modération tarifaire.
Les services de la DGCCRF effectuent régulièrement des contrôles dans ce secteur. Les agents prêtent une attention particulière à l’absence de refus de vente liée à l’âge du consommateur et à la bonne communication des tarifs. Les consommateurs peuvent, si cela est nécessaire, adresser des réclamations sur le site mis en place par le Gouvernement à l’adresse signal.conso.gouv.fr.
En application de l’article L. 410-2 du code de commerce, le Gouvernement peut réglementer les prix « dans les secteurs ou les zones où la concurrence par les prix est limitée en raison soit de situations de monopole ou de difficultés durables d’approvisionnement […] ». Tel n’est pas le cas du secteur de la location de véhicules, qui se caractérise par une forte concurrence entre plusieurs sociétés, dont les agences sont le plus souvent implantées dans les mêmes zones de commercialisation, comme les aéroports, les gares ou les centres-villes, ce qui permet au consommateur d’accéder à différentes offres.
De plus, le secteur se caractérise par l’émergence de nouveaux canaux de réservation, notamment en ligne, rendant les comparaisons tarifaires plus aisées et favorisant de facto la concurrence.
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Roger, pour la réplique.
M. Gilbert Roger. Si vous allez dans un aéroport ou une gare, vous vous apercevrez, même si, comme moi, vous n’avez plus moins de 26 ans, que les surprimes pratiquées par les loueurs pour les jeunes conducteurs sont équivalentes et très élevées.
Un jeune qui passe le permis à 18 ans aujourd’hui peut avoir commencé à apprendre à conduire à partir de sa quinzième ou de sa seizième année. À 20 ans, il a donc les fameux deux ans de permis qui lui confèrent des droits supplémentaires et lui permettent d’assurer sa voiture individuelle auprès d’une compagnie traditionnelle à un coût moindre. Or il est surtaxé jusqu’à sa vingt-sixième année lorsqu’il loue une voiture !
Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est vrai !
M. Gilbert Roger. Franchement, réfléchissez-y quand vous retournerez à votre bureau tout à l’heure et vous vous rendrez compte qu’il y a un truc qui ne va pas ! Essayons de régler ce problème pour la jeunesse, qui est par ailleurs durement touchée.
mise en application de la réforme du « nouveau réseau de proximité » à compter du 1er janvier 2021
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, auteure de la question n° 1373, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Le prédécesseur de l’actuel ministre délégué chargé des comptes publics a lancé une réforme prévoyant la fin des transactions en numéraire dans les trésoreries, mais également la fermeture de trésoreries, ce qui entraînera un bouleversement total de la présence des finances publiques dans les territoires.
Nombre de maires et d’élus de mon département, le Pas-de-Calais, ont fait part de leurs craintes, mais aussi de leur colère aux services du ministère et au ministre chargé des comptes publics lui-même, ainsi qu’à son prédécesseur, concernant la mal nommée réforme du nouveau réseau de proximité, grâce à laquelle le Gouvernement prétend améliorer la présence des services publics dans les territoires. En effet, les maires et les élus voient en cette réforme un nouveau transfert de compétences par l’État aux collectivités territoriales, sans compensation. Les accueils de proximité et les maisons France Services sont bien souvent à la charge des collectivités, qui doivent assumer seules des compétences qui relevaient autrefois de l’État, et ce sans compensation.
Les services publics de proximité sont essentiels. Ils ont montré toute leur efficacité en cette période de crise sanitaire. Leur connaissance du terrain et leur implantation en proximité en font indéniablement des maillons essentiels pour la sauvegarde de nos territoires.
Dernièrement, le directeur du Pas-de-Calais a annoncé dans la presse que les particuliers pourraient à nouveau payer leurs amendes et factures de divers services dans les permanences municipales ou les points d’accueil de proximité. Alors que le paiement chez les buralistes engendre un surcoût pour l’État, pourquoi avoir mis en place cette réforme pour finalement revenir à un paiement possible auprès des agents des finances publiques ?
Une réforme à moyens décroissants n’est pas compatible avec la réaffirmation de la République dans tous les territoires. Les circonstances sanitaires ne permettent pas de tenir des réunions de travail et de concertation entre élus, services de l’État et services des directions départementales et générales des finances publiques. Je demande donc au Gouvernement de bien vouloir suspendre la mise en application du nouveau réseau de proximité afin que le dialogue puisse s’engager sereinement à la suite des alertes des élus, des usagers et des agents, chez qui la suppression de plusieurs milliers d’emplois est envisagée.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Permettez-moi tout d’abord, madame la sénatrice Apourceau-Poly, de rappeler, au nom d’Olivier Dussopt, les objectifs du nouveau réseau de proximité de la DGFiP et les caractéristiques de la méthode mise en œuvre pour le définir.
Le maillage de la DGFiP, l’un des plus denses de l’État, reflète la diversité de ses missions, mais également une organisation qui ne correspond plus aux besoins actuels. Le nouveau réseau de proximité vise précisément à rapprocher les services publics de nos concitoyens et à tenir compte des besoins spécifiques de nos publics, en offrant aux élus et à nos concitoyens un service modernisé, plus proche et répondant à leurs demandes. Concrètement, il consiste à augmenter le nombre d’accueils de proximité de plus de 40 % et à développer le conseil aux élus locaux : près de 1 300 cadres seront dédiés à terme à cette mission de conseil financier, fiscal, budgétaire et comptable. En parallèle, les activités de gestion seront mutualisées au sein de services de gestion comptable pour gagner en efficacité et en rapidité.
La DGFiP s’attache à mettre en place un accueil de proximité, aussi bien dans les maisons France Services que dans les mairies, notamment dans les communes les plus reculées et éloignées des centres urbains. Les usagers bénéficient d’un accueil dédié par des agents aux compétences élargies, qui prennent en charge toute demande. En complément, la possibilité de payer chez les buralistes agréés, implantés dans les villages, se déploie progressivement et offre aux usagers une facilité horaire plus large que celle des services de la DGFiP.
Pour définir l’organisation cible de ses services, la DGFiP a engagé, il y a un peu plus d’un an, une démarche inédite, concertée, partenariale, auprès des élus et de ses agents. À ce jour, à l’échelon national, des conventions ont été signées dans trente-sept départements, avec les présidents de conseil départemental et, assez souvent, avec les maires de l’Association départementale des maires et le préfet. Parallèlement, plus de 400 conventions ont pu être signées avec les présidents d’EPCI. Au total, soixante-dix-huit départements ont signé une charte, soit départementale, soit avec un EPCI.
Le projet du nouveau réseau de proximité se construit dans le dialogue et au bénéfice des territoires ruraux, qui ont tout à gagner de la nouvelle organisation de la DGFiP, laquelle s’adapte aux besoins de ses usagers et de ses partenaires.
Dans le cas particulier du Pas-de-Calais, la DDFiP est présente aujourd’hui dans quarante-deux communes. À l’issue de cette réforme, elle sera implantée dans cinquante-deux communes, soit une présence renforcée dans dix communes supplémentaires.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour la réplique.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le secrétaire d’État, vous êtes en train de m’expliquer que vous êtes moderne, que vous êtes dans la proximité, mais vous supprimez des trésoreries. Il faut que vous m’expliquiez comment, avec de telles suppressions, vous allez encore pouvoir être dans la proximité !
réorganisation « nouveau réseau de proximité »
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Rietmann, auteur de la question n° 1396, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
M. Olivier Rietmann. Ma question est très proche de celle de ma collègue Apourceau-Poly, mais, comme le disait le philosophe, répétez, répétez, il en restera toujours quelque chose !
Depuis 2019, les finances publiques ont engagé à l’échelon national une vaste opération de réorganisation appelée NRP, pour nouveau réseau de proximité. Je connais et je partage en partie vos objectifs, monsieur le secrétaire d’État. Aucune administration ne peut rester figée, et nous devons exploiter les potentiels offerts par les nouvelles technologies. Pour autant, permettez-moi de vous faire part du constat des maires et des conseillers départementaux de la Haute-Saône et de relayer leur question.
Leur constat est d’ordre sociétal. Pour des millions de Français, déjà confrontés à la fracture numérique et dont les capacités en informatique sont inexistantes ou limitées, cette dématérialisation à marche forcée est un accélérateur du délitement des relations humaines.
Leur question est d’ordre très pratique. Elle porte sur la qualité du service rendu par notre administration.
Ce nouveau réseau fait la part belle aux maisons de services au public (MSAP) et aux établissements France Services. Or nul ne peut affirmer qu’un accueil par les employés de ces structures sera à la hauteur du service rendu par un agent de la DDFiP. À titre d’exemple, auprès de quelle instance de proximité un contribuable, souvent modeste, pourra-t-il argumenter afin de bénéficier d’un plan d’étalement d’une dette ?
Sur un autre plan, qui intéresse tout particulièrement les collectivités locales, la fermeture de trésoreries de proximité fragilisera les régies municipales dès lors que tous les paiements perçus ne peuvent être dématérialisés. Je pense aux forains sur les marchés et au nombre insuffisant de bureaux de poste pouvant recevoir des versements.
Comment entendez-vous assurer la qualité du service rendu aux administrés et quelles bornes allez-vous mettre à la démarche de dématérialisation continue, qui nous entraîne progressivement vers une déshumanisation et qui, de mon point de vue, est insupportable ?