Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. L’obligation d’offre de paiement en ligne, prévue par l’article 75 de la loi de finances rectificative pour 2017 et le décret que vous citez, répond aux attentes des usagers, dont beaucoup plébiscitent le recours à des moyens de paiement dématérialisés, diversifiés et accessibles à toute heure et à distance.
Le paiement par internet aux collectivités locales est à la fois un enjeu de modernisation et une ouverture vers la dématérialisation.
La crise sanitaire actuelle a démontré la nécessité d’offrir aux usagers des moyens de paiement â distance, pour ceux qui ont un accès à internet. Il est donc important de poursuivre, voire d’accélérer, les actions permettant de satisfaire à cette obligation et, par là même, aux besoins des usagers.
Il s’agit d’un intérêt partagé par les ménages comme par les collectivités, qui voient ainsi leurs recettes rentrer mieux et plus vite. Le Conseil national de l’évaluation des normes, composé de représentants des associations d’élus, ne s’y est pas trompé en donnant un avis favorable au décret.
La direction générale des finances publiques, la DGFiP, est pleinement mobilisée pour accompagner les collectivités dans la mise en place d’une offre de paiement en ligne et pour aider celles qui sont en retard par rapport aux échéances du décret.
Grâce à l’outil PayFiP, le paiement des sommes dues pour l’usage des services publics d’une collectivité est facilité. Le dispositif permet un paiement simple, rapide et accessible, par carte bancaire, mais aussi par prélèvement unique. Il est accessible vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. Les modalités de règlement sont simples à utiliser.
L’administration des finances publiques lutte contre la fracture numérique en offrant à ses usagers plusieurs canaux d’accès à ses services. Elle s’inscrit, bien entendu, dans une logique de compréhension à l’égard des collectivités locales dont le contexte actuel entrave les projets de modernisation.
Il importe cependant que les collectivités restent mobilisées sur l’objectif de généralisation du paiement en ligne qui, comme je l’ai indiqué, répond à un réel besoin des usagers et participe dans le même temps à la promotion de l’administration numérique.
Mme le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour la réplique.
M. Henri Cabanel. Monsieur le secrétaire d’État, je vous entends, et de nombreuses collectivités souhaitent évoluer dans ce sens.
Cependant, certaines communes rurales, de très petite taille, ont peu d’agents administratifs pour mettre en place le paiement en ligne. C’est la raison pour laquelle elles souhaitent repousser la date fatidique du 1er avril 2021.
À cet égard, M. Raymond Vall, notre collègue du groupe du RDSE, avait formulé des propositions dans le rapport de la mission d’information sur la lutte contre l’illectronisme et pour l’inclusion numérique. Je ne doute pas que vous les ayez lues. Peut-être serait-il temps de concrétiser certaines d’entre elles ?
perspectives de relance de l’économie française
Mme le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, auteur de la question n° 1328, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
M. Jean-Marie Mizzon. Monsieur le secrétaire d’État, la France, hier encore quatrième puissance mondiale, se voit désormais rétrogradée à la sixième place ! Contre toute attente, son économie donne toutes les apparences d’un déclin que rien ne semble pouvoir enrayer.
Comment est-ce possible ? Comment en est-on arrivé là ? Qui sont les responsables d’une telle situation ? Est-il juste d’incriminer les politiques pour des choix, il est vrai, parfois bien hasardeux ? Telles sont les questions que tous les Français se posent.
Notre pays dispose de nombreux atouts grâce à son économie diversifiée : construction d’avions, de trains à grande vitesse, de voitures, mais aussi richesse de son agriculture, qualité de son secteur agroalimentaire, ou encore puissance de son armement…
La liste est longue, et le maillage industriel de la France témoigne de cette vitalité économique dans des domaines très variés. Cette diversification nous permet d’affronter les crises qui secouent de façon récurrente l’économie mondiale.
Pourtant, les chiffres de la paupérisation de notre pays sont effrayants ! Le salaire moyen – le SMIC – tend à devenir la norme en France. Comment payer un loyer, se soigner, s’alimenter, se vêtir, autrement dit comment vivre décemment dans ces conditions ? D’ailleurs, sur un plan davantage sémantique, ne devrait-on pas plutôt parler de « survie » ?
Le ministre de l’économie, de par ses fonctions, est le plus au fait de la situation. Les élus, de par leurs mandats, y sont directement confrontés. La pauvreté est leur lot quotidien avec des permanences remplies d’hommes et de femmes qui demandent de l’aide pour trouver un emploi, une place dans un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou Ehpad, ou, parfois, plus prosaïquement, un secours d’urgence pour échapper à une expulsion.
À en croire Bercy, la psychologie est partie prenante de l’économie. Mais comment redonner espoir et confiance dans la vie à des êtres brisés par les épreuves ? Le message répété à l’envi, qui encourage la consommation et non l’épargne, car, dites-vous, « la consommation, ce sont des emplois », est-il seulement audible ? Que peut bien consommer un smicard avec le peu qu’il a, sinon des produits à bas coût ?
Votre rhétorique, il faut le reconnaître, est de grande qualité. Hélas, un discours, si bon soit-il, ne se mange pas : « je vis de bonne soupe, et non de beau langage » disait en son temps Molière. Combien avait-il raison !
Mme le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Jean-Marie Mizzon. Toutefois, pour l’heure, oublions la forme et venons-en au fond : aujourd’hui, concrètement, quelles sont, au-delà du plan de relance, les perspectives de redémarrage de l’économie française ?
Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le sénateur Jean-Marie Mizzon, nous sommes d’accord sur un point : le tissu productif français est de qualité, et la France a tous les atouts pour réussir.
Elle l’a prouvé, car, avant la crise, nous étions déjà en train de réussir. Je rappelle que, en 2019, notre pays était le plus attractif d’Europe pour les investissements étrangers, que la croissance française était plus forte que celle de la zone euro, que le chômage, en baisse, s’était établi à 8,1 % de la population active et que, pour la première fois depuis dix ans, l’industrie recréait des milliers d’emplois.
Elle l’a aussi prouvé, car, dès le mois de mai de cette année, elle a redémarré rapidement, connaissant le plus fort rebond en Europe au troisième trimestre de 2020.
Avant la crise, la pauvreté reculait : en 2019, 210 000 personnes sont sorties de la pauvreté, et les inégalités de revenus se sont réduites. Le revenu médian des Français a augmenté plus vite que la croissance, notamment grâce à la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat et à l’exonération de charges sur les heures supplémentaires. En outre, le revenu des personnes pauvres a davantage augmenté que pour le reste de la population ; c’est le constat de l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’Insee.
Nous devons cette baisse de la pauvreté avant tout à la revalorisation de la prime d’activité et à la baisse du chômage, mais aussi aux politiques qui s’attaquent à la pauvreté et aux conditions de vie, comme la hausse du chèque énergie, la meilleure couverture des frais de soins grâce à la complémentaire de santé solidaire, ou la limitation des frais bancaires pour les personnes précaires.
Aujourd’hui, ces précaires sont les premières victimes de la crise sanitaire et sociale. Le Gouvernement a répondu présent avec une préoccupation constante : ne laisser personne au bord du chemin.
Nous avons donc pris un ensemble de mesures sociales d’urgence, afin de les aider et de prévenir l’entrée dans la pauvreté, dans des proportions jamais connues dans l’histoire de notre pays : au total, plus de 3,5 milliards d’euros d’aides directes ont été versés depuis le début de la crise. Nous prévenons aussi le basculement dans la pauvreté en sauvegardant l’emploi : ce sont 34 milliards d’euros qui sont consacrés à l’activité partielle en 2020.
En outre, pour combler les quelques trous restant dans la raquette, et ainsi répondre aux difficultés rencontrées par les jeunes précaires et les travailleurs intermittents, le Premier ministre a annoncé des réponses fortes, le 26 novembre dernier.
S’agissant enfin des jeunes, le plan « Un jeune, une solution », qui est partie intégrante du plan de relance, a été annoncé en juillet dernier pour soutenir l’insertion, l’apprentissage et l’emploi des jeunes dès cet été et la rentrée. Trois mois après son lancement, nous avons déjà de premiers résultats encourageants.
Pour terminer, je veux évoquer plus spécifiquement mon domaine de compétence. Vous savez que le numérique est l’un des secteurs les plus importants pour le redémarrage de l’économie mondiale.
Je rappelle que tout n’est pas noir en France : l’économie numérique française continuera à se développer en 2020, plus qu’en 2019. Le numérique est déjà le secteur qui crée le plus d’emplois en France. Pour la première fois cette année, notre pays dépassera l’Allemagne en ce qui concerne la croissance de son écosystème numérique. C’est la meilleure manière de préparer l’avenir et, dans le cadre du plan de relance, cela mobilise tous nos efforts.
difficultés des entreprises adaptées accentuées par la crise économique liée au covid-19
Mme le président. La parole est à Mme Sabine Van Heghe, auteure de la question n° 1285, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Mme Sabine Van Heghe. Je souhaite attirer votre attention, madame la secrétaire d’État, sur les difficultés récurrentes des entreprises adaptées, en particulier dans mon département du Pas-de-Calais.
Il y a un an, les entreprises adaptées ont déposé une action collective pour protester contre les réformes découlant de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel de 2018, qui ont bouleversé leur fragile équilibre.
Ainsi, les subventions octroyées à ces structures ont considérablement baissé, pour inciter les travailleurs en situation de handicap à rejoindre les entreprises dites « ordinaires ». Or ces personnes, qui ont parfois des difficultés psychiques ou intellectuelles, peinent à trouver un emploi en milieu ordinaire, phénomène considérablement accentué par la crise que nous vivons.
Les professionnels du secteur des entreprises adaptées souhaitent enfin être entendus par le Gouvernement. Ils veulent que les réformes prévues soient revues pour tenir compte du nouveau contexte économique, mais aussi des souhaits des premiers concernés, les travailleurs handicapés, dont certains ne veulent pas être employés en milieu ordinaire et souhaitent rester au sein des entreprises adaptées.
Les membres de l’association Action collective en faveur des entreprises adaptées insistent aussi sur la nécessité de revenir sur la disposition qui prévoit, à l’horizon de 2022, de limiter à 75 % le pourcentage de salariés handicapés dans les entreprises adaptées. Ces dernières jouent un rôle primordial auprès des personnes en situation de handicap, en particulier dans cette période très difficile.
Il faut donc les soutenir et les renforcer, ce qui passe, entre autres, par des aides à l’investissement et des mesures facilitant l’accès à de nouvelles expérimentations, comme le CDD dit « tremplin », par exemple.
Madame la secrétaire d’État, entendez-vous enfin soutenir les actions si précieuses des entreprises adaptées, en particulier dans ce contexte de crise sanitaire, sociale et économique ?
Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice, permettez-moi tout d’abord de préciser que les entreprises adaptées sont le milieu ordinaire. Il est très important de le rappeler : le régime de droit commun, c’est que les salariés des entreprises adaptées travaillent en milieu ordinaire.
La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a renforcé le cadre de l’entreprise adaptée, en prévoyant les moyens nécessaires au changement d’échelle de 800 entreprises adaptées, tout en développant leur dimension inclusive.
Cette évolution est une nécessité si l’on veut renforcer la capacité des entreprises adaptées à proposer des parcours dynamiques d’accès à l’emploi des personnes en situation de handicap, à répondre aux besoins de sourcing des entreprises dites « classiques », pour respecter l’obligation d’emploi de 6 % de travailleurs handicapés, à développer leur chiffre d’affaires, via des partenariats avec les entreprises ordinaires, et à accroître leur dynamique inclusive.
Venons-en au point que vous soulevez. Vous avez évoqué la limitation à 75 % des bénéficiaires des aides aux postes dites « socles », qui seront versées par l’État à partir de 2022. Permettez-moi de rappeler que la moyenne nationale au sein des entreprises adaptées atteint déjà 65 %.
La question de fond est plutôt celle de l’évolution du positionnement des entreprises adaptées. L’emploi en milieu classique doit être recherché : nul n’est inemployable, dès lors qu’un accompagnement adapté du salarié et de l’employeur est prévu pour sécuriser et pérenniser l’emploi. Je tiens, à cet égard, à rappeler qu’une enveloppe de 15 millions d’euros est allouée à l’emploi accompagné dans le cadre du plan de relance.
L’État soutient les entreprises adaptées dans cette période. Le projet de loi de finances pour 2021 prévoit 2 500 aides aux postes dites « CDD tremplins » supplémentaires – vous l’avez mentionné – et 1 000 aides aux postes dites « socles » supplémentaires, en plus du plan exceptionnel de 300 millions d’euros pour soutenir les entreprises adaptées dans la crise et leurs besoins d’investissement.
Un appel d’offres de 868 millions d’euros a déjà été lancé, et beaucoup d’entreprises adaptées y ont répondu. Le comité scientifique d’évaluation de la réforme prévue par la loi de 2009 sera lancé d’ici la fin de l’année : il permettra d’évaluer l’impact de cette évolution, à laquelle adhère pleinement l’Union nationale des entreprises adaptées, l’UNEA, qui compte 580 adhérents, soit près de 80 % des entreprises adaptées en France.
Vous le voyez, madame la sénatrice, l’État est aux côtés des entreprises adaptées, lesquelles ont été extrêmement dynamiques pendant ce confinement, ne serait-ce qu’au travers du consortium Résilience, auquel elles ont très largement participé. Nous sommes à leurs côtés, et nous le resterons.
Mme le président. La parole est à Mme Sabine Van Heghe, pour la réplique.
Mme Sabine Van Heghe. Madame la secrétaire d’État, jouer sur les mots en assimilant « milieu ordinaire » et « milieu classique » relève de la sémantique… (Mme la secrétaire d’État proteste.) Là n’est pas vraiment le problème.
Ce n’est pas la première fois que je vous interpelle sur ce sujet : persévérer à ne pas être assez à l’écoute du terrain reviendrait, à cet égard, à tenir à l’écart toute une partie de la population salariée, particulièrement les publics déjà les plus fragilisés et en difficulté.
renouvellement des membres de la commission du droit local d’alsace-moselle
Mme le président. La parole est à M. André Reichardt, auteur de la question n° 1343, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. André Reichardt. Madame la présidente, comme vous l’indiquez, ma question s’adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, et concerne l’absence de renouvellement des membres de la commission du droit local d’Alsace-Moselle.
Cette commission a succédé en 2014 à l’ancienne commission d’harmonisation du droit local, qui avait elle-même été instituée en 1985, mais qui n’avait déjà fait que succéder à plusieurs commissions, la première ayant été créée – tenez-vous bien, mes chers collègues ! – en 1915, c’est-à-dire pendant le premier conflit mondial, alors que l’Alsace était encore allemande ! À ce moment-là, le gouvernement français réfléchissait déjà au droit local en Alsace-Moselle.
Chaque fois, l’objectif était de répondre à la très forte attente des Alsaciens de voir leurs spécificités locales prises en compte.
Chargée d’étudier et de proposer toute mesure « relative au droit particulier applicable dans les trois départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin », cette commission mérite incontestablement de continuer à œuvrer, car, comme vous le savez peut-être, selon les sondages, 80 % à 90 % des Alsaciens se disent attachés à leur droit local.
Or, faute de nomination, le mandat de ses membres ayant pris fin il y a près d’un an et demi maintenant, la commission du droit local d’Alsace-Moselle n’est plus autorisée statutairement à se réunir.
Aussi, j’aimerais savoir quand – je dis bien « quand » – le Gouvernement entend procéder au renouvellement des membres de cette commission. En effet, on entend dire ici et là que le Gouvernement envisagerait de ne pas procéder à ce renouvellement…
À quatre semaines de la mise en place de la collectivité européenne d’Alsace, les Alsaciens ne comprendraient pas que cette instance n’existe pas. Ce serait naturellement un coup très dur porté à l’Alsace naissante. Je vous remercie des précisions que vous voudrez bien apporter sur le sujet, madame la secrétaire d’État.
Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur André Reichardt, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue ministre de la justice, que vous interrogez sur la commission du droit local d’Alsace-Moselle.
Le garde des sceaux a fait examiner, à la suite de votre demande, les modalités du renouvellement des membres de cette commission, qui, comme vous le savez, a été créée par le décret du 23 janvier 2014 et n’a plus d’existence juridique depuis le mois de janvier 2019.
Il résulte en effet des dispositions de l’article R. 133-2 du code des relations entre le public et l’administration que les commissions administratives consultatives créées par décret le sont pour une durée maximale de cinq ans. L’absence d’existence légale de la commission fait donc obstacle à la nomination de nouveaux membres.
Conformément à la circulaire du 12 septembre 2018 du Premier ministre Édouard Philippe relative à la réduction du nombre des commissions consultatives, une reprise d’activité de la commission, qui serait en réalité analysée comme la création d’une nouvelle commission, devrait normalement être précédée de la suppression de deux autres commissions consultatives.
Le Gouvernement étant cependant particulièrement sensible aux spécificités et à la richesse du droit local d’Alsace-Moselle, qui bénéficie par ailleurs de l’expertise de l’Institut du droit local alsacien-mosellan, le ministre de la justice est tout disposé à travailler à la meilleure façon de les prendre en compte, en étroite concertation avec les élus et les représentants des trois départements concernés, et ce dans un cadre qui reste à définir.
Mme le président. La parole est à M. André Reichardt, pour la réplique.
M. André Reichardt. Madame la secrétaire d’État, si vous voulez la révolution en Alsace, continuez comme ça !
Quoi qu’il en soit, je vous fais part de notre pleine disponibilité pour mettre en place le plus rapidement possible un organisme qui succéderait à cette commission,…
Mme le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. André Reichardt. … afin de répondre à l’attente et de satisfaire des Alsaciens, qui étaient particulièrement satisfaits de disposer d’une telle structure.
difficultés d’accès à l’interruption volontaire de grossesse dans la région des hauts-de-france
Mme le président. La parole est à Mme Martine Filleul, auteure de la question n° 1363, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances.
Mme Martine Filleul. Madame la ministre, procéder à une interruption volontaire de grossesse, ou IVG, est un droit accordé à toutes les femmes de notre pays depuis plusieurs décennies. Même si, en 2019, la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère des solidarités et de la santé, la Drees, fait état de 23 000 IVG, soit un chiffre en légère hausse, ce droit n’est toujours ni effectif ni garanti pour toutes.
Non seulement des professionnels de santé refusent toujours de pratiquer des IVG, en invoquant la clause de conscience, mais le manque de médecins et de sages-femmes dans certains territoires, qui sont de véritables déserts médicaux, et les fermetures de services éloignent de toute solution les femmes souhaitant y avoir recours.
Ce problème est avéré et aggravé dans mon département, le Nord, par une situation économique et sociale fortement dégradée, qui place les femmes au premier rang des personnes les plus en difficulté.
Plus que d’autres, ces femmes ont besoin d’un accompagnement, particulièrement dans ces moments difficiles où elles ont un choix à faire. Pourtant, les déserts médicaux subsistent, et l’accompagnement sur les questions liées à la vie sexuelle et contraceptive est encore limité ou peu accessible.
Or toutes les femmes, quels que soient leurs ressources ou leur lieu d’habitation, doivent pouvoir recourir à une IVG et bénéficier d’un accompagnement si elles le veulent. Il s’agit là d’une question de justice et d’égalité.
C’est pourquoi je souhaite connaître les mesures et initiatives que le Gouvernement compte mettre en œuvre pour favoriser un égal accès à l’information et aux moyens de contraception, qui ne sont toujours ni accessibles ni gratuits, et pour garantir un réel égal accès à ce droit fondamental que constitue, pour une femme, le recours à une IVG.
Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice, oui, le contexte européen et international, marqué par le recul que certains pays tentent d’imposer en matière d’IVG, suscite des inquiétudes.
Par conséquent, la France reste vigilante. À cet égard, le ministère chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes collabore de façon étroite avec le ministère des solidarités et de la santé, qui pilote cette politique publique.
Le Gouvernement a mis en place de nombreuses dispositions pendant la crise sanitaire, pour maintenir l’accès des femmes à l’IVG et favoriser les IVG en ville, comme la promotion de la téléconsultation et l’allongement de deux semaines du délai des IVG médicamenteuses en ville, ce qui a bénéficié aux territoires en tension, comme les Hauts-de-France.
Au-delà de ces mesures, le Gouvernement a annoncé à la fin de 2019 un ensemble de dispositifs qui sont en cours de déploiement : l’inscription de l’IVG comme action prioritaire de la formation continue des médecins et des sages-femmes, la mise en place d’un annuaire exhaustif et actualisé de l’offre d’IVG dans chaque région, la mise en œuvre de plans d’actions ciblés par les agences régionales de santé, les ARS, et ce de façon systématique lorsque des territoires en tension sont identifiés.
Les taux de recours à l’IVG connaissent de fortes variations selon les territoires. Ils sont plus élevés dans les territoires d’outre-mer, en Île-de-France et dans le Sud-Est. Il n’est toutefois pas possible d’établir un lien direct entre le faible recours à ces interventions et les difficultés rencontrées au niveau de l’offre médicale, compte tenu de la diversité des facteurs entrant en ligne de compte dans la décision finale de recourir à une IVG.
Concernant la situation particulière des Hauts-de-France, le délai d’accès à l’IVG montre que cette région se situe parmi les huit qui déclarent des délais moyens supérieurs à huit jours.
L’ARS a été alertée d’une difficulté ponctuelle d’accès à l’IVG dans les établissements de santé de deux territoires. Cette difficulté serait liée à des congés maternité ou des arrêts de travail des personnels. L’ARS constate un nombre limité de praticiens participant à des IVG dans ces territoires, situation due notamment au départ à la retraite de médecins ayant contribué à la structuration de cette activité.
Face à ce constat, l’ARS travaille avec les établissements identifiés comme étant sous tension, afin de mieux impliquer les sages-femmes dans la pratique des IVG.
Mme le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour la réplique.
Mme Martine Filleul. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État, même si je ne peux me satisfaire de la comparaison avec les autres pays européens. En effet, la France se doit de rester exemplaire – j’allais dire moteur » – dans ce domaine.
Par ailleurs, j’attends de vous et de vos collègues, en particulier de Mme Elisabeth Moreno, que vous vérifiez que ce maillage territorial, sur lequel je vous interrogeais, soit vraiment susceptible d’apporter des réponses à toutes les femmes et dans tous les territoires, car je me permets d’insister : ce n’est pas le cas dans les Hauts-de-France.
Dans certaines zones de mon département, il y a encore beaucoup de travail à faire pour que le droit à l’IVG soit effectif pour toutes. Je compte donc sur vous, madame la secrétaire d’État, ainsi que sur vos collègues.
prise en charge du sepsis en france
Mme le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, auteure de la question n° 1267, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Mme Catherine Deroche. Madame la ministre, j’appelle votre attention sur l’enjeu lié au diagnostic et à la prise en charge précoce du sepsis, autrement dit d’une septicémie, complication la plus grave des infections.
Le sepsis touche chaque année environ 30 millions de personnes et entraîne 6 millions de décès dans le monde, selon les chiffres de l’Organisation mondiale de la santé.
On compte en France au moins 180 000 personnes, de tout âge, victimes d’un sepsis chaque année. La mortalité est de 27 % et peut atteindre 50 % dans sa forme la plus sévère, que l’on appelle le choc septique. Il s’agit de la première cause de mortalité en service de réanimation et de l’une des premières causes de mortalité intrahospitalière.
Face à ces chiffres, les autorités, les spécialistes et les sociétés concernés se sont mobilisés. Reconnu comme l’un des meilleurs experts mondiaux du sujet et missionné par le Gouvernement, le professeur Djillali Annane a rendu ses préconisations dans un rapport intitulé Sepsis : tous unis contre un fléau méconnu, présenté en septembre 2019. La gravité est souvent liée à un diagnostic tardif et à une hétérogénéité dans la prise en charge des patients.
La précocité du diagnostic et un protocole de soins adapté sont donc au cœur des travaux. La délocalisation du diagnostic au plus près du patient, au sein des services d’urgence notamment, ainsi que l’élaboration d’un protocole national de prise en charge, adaptée du référentiel international de la Surviving Sepsis Campaign, apparaissent dès lors comme des pistes à considérer.
En tout état de cause, une véritable prise de conscience doit s’opérer, et des actions fortes doivent être mises en place. Je souhaiterais donc connaître, madame la ministre, les suites que le Gouvernement entend donner au rapport demandé au professeur Annane.