M. le président. Veuillez conclure, monsieur le rapporteur spécial.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. En conclusion, le Bacea me paraît difficilement soutenable à l’avenir. Il faudra recourir à des emprunts supplémentaires et s’interroger. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. Je demande aux orateurs de bien respecter leur temps de parole, compte tenu du nombre d’intervenants dans le débat.
La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il y a un an, le Sénat adoptait la loi Énergie-climat (loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat). Face à l’urgence climatique, notre assemblée inscrivait la neutralité carbone au cœur de notre politique énergétique.
Depuis lors, la pandémie de covid-19 est venue contrarier l’application de cette loi. La chute de la demande et du prix des énergies, inégalée depuis 1945, remet durablement en cause le modèle de financement de notre transition énergétique. Dans nos territoires, les entreprises, les ménages et les collectivités territoriales ne disposent plus toujours des ressources nécessaires à cette transition.
Est-ce à dire que la neutralité carbone est devenue hors de portée ? Non, mais le Gouvernement doit agir enfin, et mieux.
Or le budget proposé est en trompe-l’œil.
Certes, un tiers de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et un dixième du plan de relance sont consacrés à la transition énergétique. Par ailleurs, certaines exigences formulées par notre commission commencent à être prises en compte : je pense notamment aux aides à la rénovation énergétique, qui seront enfin ouvertes à tous les ménages, comme nous l’avons défendu ici même.
Cependant, si les crédits de la mission consacrés à l’énergie sont facialement en hausse, cette augmentation s’explique, pour moitié, par des redéploiements. À périmètre constant, ils sont en baisse de 1 milliard d’euros.
Dans le même temps, la fiscalité énergétique augmente de 5 milliards d’euros et les incitations fiscales diminuent de 2 milliards d’euros.
Surtout, plusieurs dispositifs présentent des insuffisances.
Il en va ainsi des énergies renouvelables. Le Gouvernement fragilise leur financement, en supprimant le compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », qui leur consacrait, chaque année, 6 milliards d’euros, et revient sur ses engagements, en révisant les contrats d’achat de quelque 800 installations photovoltaïques.
Il en est de même pour la rénovation énergétique et la mobilité propre.
Pour 2021, l’effort budgétaire prévu en direction des ménages est inférieur de 15 % à celui qui a été atteint ces toutes dernières années. Trop restrictives et trop instables, les primes qui leur ont été attribuées cette année représentent à peine 25 % des objectifs fixés.
Plus grave, le plan de relance comprend des ambiguïtés et des lacunes sur l’énergie nucléaire, qui ne bénéficie que de 200 millions d’euros, alors qu’elle garantit les trois quarts de notre mix électrique, sur l’hydrogène, dont toutes les sources nucléaires comme renouvelables doivent être soutenues, et sur les énergies renouvelables, car aucun crédit n’est prévu pour l’hydroélectricité, les biocarburants ou le biogaz.
Dans ce contexte, je me réjouis que le Sénat ait adopté des amendements fiscaux tendant à reporter des hausses de fiscalité énergétique pour les professionnels, renforcer les travaux de rénovation énergétique, promouvoir les biocarburants et diffuser l’électromobilité.
Mais il faut aller plus loin.
Je défendrai plusieurs amendements budgétaires visant, dans le contexte de crise, à soutenir les ménages, en revalorisant le chèque énergie, ainsi que les professionnels, en maintenant les contrats d’achat précités et en aidant les petits fournisseurs et distributeurs et les collectivités territoriales.
Si les crédits d’énergie ne sont pas pleinement satisfaisants, l’urgence d’agir pour relancer notre économie en accélérant sa décarbonation justifie de les modifier et de les compléter plutôt que de les rejeter. La commission émettra donc un avis favorable sur la mission, sous réserve de l’adoption des amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes prévus par le budget pour 2021. L’effort budgétaire doit être salué dans ce contexte difficile. La commission a cependant émis d’importantes réserves, fondées notamment sur des remarques formulées par la vingtaine d’acteurs que j’ai eu l’occasion d’entendre.
Sur la forme d’abord, je ne peux que déplorer l’éclatement des crédits entre les différents programmes et missions, qui nuit à la lisibilité et au suivi du budget. J’en profite pour souligner que la mission « Écologie, développement et mobilité durables », que nous examinons aujourd’hui, n’aurait pu à elle seule recevoir de notre part un avis favorable si elle ne s’était pas accompagnée de la mission « Plan de relance », sur laquelle j’ai eu l’occasion d’intervenir hier, notamment sur le volet ferroviaire et la défense des lignes de desserte fine du territoire.
En ce qui concerne, justement, les transports ferroviaires, je tiens notamment à saluer l’augmentation des crédits en faveur du fret ferroviaire et, par ailleurs, l’enveloppe prévue pour soutenir le secteur ferroviaire par le plan de relance ainsi que la recapitalisation de la SNCF. Cet effort doit être amplifié et pérennisé, pour donner plus de visibilité aux acteurs. Plus qu’un plan de relance du ferroviaire, nous considérons que les montants prévus constituent un plan de soutien, certes indispensable, mais insuffisant pour tenir nos objectifs en matière de report modal.
En outre, et dans la perspective de l’ouverture à la concurrence du transport national de voyageurs, l’instauration d’un climat de confiance est indispensable. À cet égard, quel dommage que nous nous prononcions sur ce budget sans disposer du nouveau contrat de performance entre SNCF Réseau et l’État, alors même que le cadre social et réglementaire de cette ouverture n’est pas achevé !
Dans ce contexte, le rôle du régulateur est plus déterminant que jamais. C’est pourquoi je vous présenterai deux amendements visant à donner à l’Autorité de régulation des transports (ART) les moyens de remplir pleinement ses missions : il faut un arbitre fort et impartial.
J’en viens maintenant au transport fluvial : sous l’effet de la mission « Plan de relance », ce mode de transport, qui a démontré sa résilience dans le cadre de la crise sanitaire, bénéficie d’une augmentation considérable des moyens consacrés à la régénération du réseau. Je m’en réjouis, mais cette bonne nouvelle est assombrie par l’importante diminution du plafond d’emplois de VNF, qui me semble prématurée, si ce n’est brutale, avec une baisse de 92 et 99 ETP ces deux dernières années.
Quant au secteur portuaire et maritime, malgré la stabilité des crédits prévus, je me félicite du maintien du soutien à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM), ainsi que des crédits prévus pour le plan de relance en faveur du verdissement des ports, même si les montants prévus, notamment en faveur du report modal, gagneraient à être amplifiés.
Je m’inquiète, enfin, du retard pris dans la publication de la stratégie nationale portuaire, que nos ports attendent depuis maintenant trois ans.
En conclusion, comme on me l’a trop souvent dit à l’école : « des efforts, mais peut mieux faire » ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Évelyne Perrot, rapporteure pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre commission a émis un avis favorable sur les crédits relatifs aux transports aériens, sous réserve du vote de trois amendements qu’elle a adoptés.
Pour ce qui concerne les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », nous avons constaté que la chute brutale du trafic conduira à une hausse inévitable de son endettement. En dépit de cette situation, nous saluons la volonté de la DGAC de maintenir son effort d’investissement, associé à une maîtrise accrue des dépenses.
S’agissant des crédits relatifs aux lignes d’aménagement du territoire, qui relèvent non pas du budget annexe, mais du programme 203, « Infrastructures et services de transports », de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », nous constatons que les moyens inscrits dans le PLF sont en très légère augmentation, pour atteindre 20 millions d’euros. Au nom de la solidarité nationale avec les territoires les plus enclavés, nous souhaitons que l’État joue son rôle de garant de la continuité territoriale du pays en augmentant ce soutien, afin de compenser le coût supporté par les collectivités territoriales en raison de la crise sanitaire. La commission a adopté un amendement en ce sens.
Un deuxième amendement tend à ce que l’État tire les conséquences de la baisse des recettes affectées au financement de la sûreté et de la sécurité dans les aéroports, par l’octroi d’une avance sur la taxe d’aéroport.
Nous avons adopté un troisième amendement visant à ce que l’État compense la baisse de recettes de la taxe sur les nuisances sonores aériennes. En effet, l’absence de compensation porterait un préjudice sévère à l’insonorisation des logements des collectivités et des personnes riveraines des aéroports, politique essentielle à l’acceptation du transport aérien.
Celui-ci traverse aujourd’hui une crise inédite. Si la reprise du trafic dépend de facteurs qui lui sont largement exogènes, nous avons constaté que les pouvoirs publics et le secteur disposaient de plusieurs leviers d’action pour redresser la situation. Je pense à la généralisation des tests antigéniques et à leur reconnaissance par nos principaux partenaires étrangers, ainsi qu’à la garantie du remboursement des vols par la mise en place d’un fonds dédié au niveau européen.
Nous savons cependant que cela pourrait ne pas suffire : il faut s’attendre à une nouvelle année noire. Le risque d’effondrement du pavillon est avéré, avec tout ce que cela impliquerait pour l’activité et les emplois de l’industrie aéronautique, en amont, et de l’industrie touristique, en aval.
Je note que le Gouvernement a, pour l’instant, su y répondre, par des mesures sectorielles d’ampleur, qui pourraient être amenées à se prolonger en 2021. Ces efforts financiers conjoncturels ne doivent cependant pas constituer une échappatoire qui exonérerait les pouvoirs publics et le secteur d’une réflexion à mener sur son empreinte environnementale et d’actions fermes à entreprendre pour la contrôler et la réduire. Ces points seront l’objet des débats à venir sur le projet de loi Climat, dont nous serons saisis en 2021. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et INDEP.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, s’il y a bien une chose dont nous pouvons nous féliciter, c’est le fait que la crise sanitaire permet de faire voler en éclat le « dogme de la dette publique » s’agissant d’investissements en matière de transition et de débloquer, aujourd’hui, des financements dont on disait, hier, qu’ils étaient impossibles à trouver.
Le projet de budget pour les transports routiers va dans le bon sens et permet d’accélérer les investissements dans l’entretien et le développement des infrastructures routières ainsi que dans le renouvellement du parc automobile. Mais il reste, à mon sens, beaucoup trop timoré au regard des besoins d’investissement colossaux qu’appelle la transition écologique.
Compte tenu des conditions de financement sur les marchés, ne pas investir davantage dans les mobilités vertes et partagées est une aberration économique et écologique. Soyons clairs : je parle bien d’investissements qui augmentent notre patrimoine net, et non de crédits revolving budgétaires ou de dépenses de fonctionnement.
Ce projet de budget ne semble, en réalité, pas adossé à une véritable stratégie de décarbonation du secteur des transports. J’en veux pour preuve la faiblesse des moyens consacrés aux transports publics du quotidien et aux mobilités actives.
Je ferai quatre remarques.
Premièrement, je regrette, monsieur le ministre, que les transports publics ne soient pas davantage soutenus, alors même qu’ils sont confrontés à une crise sans précédent, qui pourrait remettre en cause, à terme, leur modèle économique. Si la crise devait se traduire par un recul de l’offre et des investissements dans les transports en commun, ce serait un recul terrible, à l’heure où nous devons, au contraire, les développer massivement.
C’est pourquoi, deuxièmement, je n’arrive pas à comprendre le refus du Gouvernement d’assurer à l’ensemble des autorités organisatrices de la mobilité une compensation équitable de leurs pertes de recettes liées au versement mobilité, quels que soient leur statut et leur position géographique.
Troisièmement, je considère qu’il faudrait également investir beaucoup plus que ce qui est proposé dans les mobilités actives, notamment le vélo, alors que la pratique cyclable connaît un bel engouement. C’est la raison pour laquelle je défendrai un amendement de la commission visant à porter le montant du « fonds vélo » à 200 millions d’euros l’année prochaine.
Quatrièmement, je souhaite évoquer la question des concessions autoroutières. La commission d’enquête du Sénat sur les autoroutes, dont notre président de séance de ce matin, M. Delahaye, était le brillant rapporteur, a publié, le 16 septembre dernier, un rapport qui invite l’État à préparer dès aujourd’hui la fin des concessions et à réfléchir aux modes de gestion futurs des autoroutes à l’issue des contrats.
Monsieur le ministre, êtes-vous prêt à lancer rapidement ces travaux ? J’aimerais obtenir une réponse à cette question.
À l’heure où des discussions ont lieu entre l’État et les sociétés d’autoroutes sur la mise en œuvre d’un éventuel nouveau plan de relance autoroutier, une remise à plat de l’équilibre des contrats de concession est essentielle pour permettre que des travaux de modernisation et de verdissement des autoroutes soient effectués sans que les usagers aient à en supporter le coût.
En conclusion, moyennant l’adoption d’amendements, la commission est favorable à l’adoption des crédits.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.)
M. Pascal Martin, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’actualité ne cesse de le rappeler : la politique de prévention des risques est confrontée à des défis majeurs et notre société devient plus sensible à l’égard des risques. Je pense à trois événements en particulier : en France, l’incendie de Lubrizol, à Rouen, et la tempête Alex, dans les Alpes-Maritimes ; à l’étranger, les explosions qui ont eu lieu en août dernier à Beyrouth.
Les sujets sont nombreux. Je concentrerai mon propos sur deux observations et deux questions.
Tout d’abord, le budget 2021 dédié à la prévention des risques est en hausse. C’est heureux, même si cette augmentation résulte pour l’essentiel de la budgétisation du fonds Barnier déplafonné, dont les moyens sont renforcés à 415 millions d’euros pour 2021.
Je rappelle que les prélèvements opérés au profit du budget général de l’État, en 2016 et 2017, ont privé ce fonds de 125 millions d’euros et que le plafonnement de ses ressources au profit du budget de l’État, de 2018 à 2020, lui a fait perdre 200 millions d’euros de plus, soit, au total, 325 millions d’euros qui ont été détournés de la prévention des risques naturels entre 2016 et 2020. C’est particulièrement dommageable, car, comme vous le savez, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, 1 euro investi dans la prévention des risques permet d’économiser 7 euros en travaux.
Le Sénat a invité à plusieurs reprises le Gouvernement à réformer en profondeur le régime des catastrophes naturelles. Je pense à la mission d’information présidée par Michel Vaspart et dont Nicole Bonnefoy était rapporteure et à la proposition de loi de Nicole Bonnefoy traduisant les préconisations du rapport de cette mission, texte qui, je le rappelle, a été adopté à l’unanimité du Sénat. Allez-vous enfin engager cette réforme, madame la secrétaire d’État ?
Ensuite, je suis surpris de constater que le budget 2021 ne fasse pas de la prévention des risques industriels une priorité.
Le 30 juin 2020, votre prédécesseur, Élisabeth Borne, annonçait la création de 50 postes d’inspecteurs des installations classées dès 2021. Or, dans le PLF, n’est prévue qu’une augmentation de 30 postes, par repyramidage interne, tandis que vous nous annoncez 20 postes de plus en 2022. Je constate donc avec regret que le Gouvernement ne tient pas les engagements, même modestes, qu’il prend. Je précise que j’ai déposé un amendement sur ce sujet.
Je comprends que votre ministère prenne sa part dans la maîtrise des dépenses publiques, mais je m’interroge sur la compatibilité de cette trajectoire avec les objectifs ambitieux affichés après l’incendie de Lubrizol.
Ma question est donc simple, madame la secrétaire d’État : quand comptez-vous déployer une réelle ambition pour la prévention des risques industriels dans notre pays ?
Sous ces réserves, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits dédiés à la prévention des risques, qui font l’objet du programme 181, « Prévention des risques », et a adopté trois amendements pour renforcer les moyens dédiés à cette politique en 2021. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Guillaume Chevrollier, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits, globalement en augmentation, des programmes 113 et 159 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », dédiés notamment aux politiques de l’eau et de la biodiversité, de l’expertise en matière de développement durable, de l’information géographique et de la météorologie. Cet avis favorable a néanmoins été assorti de fortes réserves, que je souhaite évoquer.
La première de ces réserves porte sur le décalage entre les déclarations et les moyens effectifs, qui n’est d’ailleurs pas propre à cette mission.
J’en prendrai deux exemples.
Premièrement, si les crédits du programme 113 augmentent de 35 millions d’euros en autorisations d’engagement, cette hausse de près de 18 % s’explique en réalité, pour près d’un tiers, par une subvention à l’Office français de la biodiversité qui ne fait que compenser le manque à gagner induit par la réforme de la chasse.
Deuxièmement, le « bonus » des crédits supplémentaires accordés par le plan de relance à la biodiversité n’est que de 50 millions d’euros environ sur des projets de protection.
Ma deuxième réserve concerne les aires protégées, pour lesquelles le Gouvernement doit publier d’ici à la fin de l’année sa nouvelle stratégie 2020-2030. L’objectif de cette nouvelle stratégie a été fixé par le Président de la République : 30 % de notre territoire doit passer sous protection, dont un tiers sous protection forte à l’horizon 2022. C’est très ambitieux. D’aucuns pourraient même se dire que c’est irréaliste quand on sait que les dix années n’ont pas suffi à faire passer la part du territoire placée sous protection forte de 1,2 % à 2 %. Comment imaginer la faire passer à 10 % en deux ans sans déployer d’importants moyens humains et un système de financement pérenne pour nos nouvelles aires protégées ?
D’ailleurs, l’avis du Comité national de la biodiversité a renvoyé le Gouvernement à sa copie sur ce point : sans effectifs et sans financement, nous nous retrouverons avec des aires protégées de papier.
De ce point de vue, la baisse des effectifs prévus pour les parcs nationaux – les effectifs des parcs historiques doivent être redéployés vers le nouveau parc des forêts – est symptomatique. Les mêmes causes produiront les mêmes effets ! Je vous proposerai des amendements sur ce sujet.
Ma dernière remarque porte, cette année encore, mais de manière encore plus insistante que d’habitude, sur les agences de l’eau : celles-ci seront, demain, les acteurs essentiels de la relance sur le terrain, notamment grâce à 250 millions d’euros de crédits budgétaires exceptionnels. Il paraît incohérent qu’elles soient de nouveau ponctionnées de 39 emplois cette année, alors qu’elles devront justement pouvoir déployer le plan de relance sur le terrain pour ne pas devenir de simples guichets pour les collectivités.
Pourquoi ce choix, madame la secrétaire d’État, alors que les schémas d’emplois des autres opérateurs ont été moins lourdement impactés ou que des facilités, comme le recours à des contrats de projet, ont pu leur être accordées ? Si l’on veut une efficacité et une effectivité de la relance, il faut une traduction budgétaire et des moyens humains pour la mettre en œuvre sur le terrain, notamment en liaison avec les élus locaux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. François Calvet, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je me suis penché, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, sur les crédits relatifs à la transition énergétique et au climat du PLF 2021.
La commission relève l’important soutien prévu au développement des énergies renouvelables (EnR), même si l’augmentation s’explique en partie mécaniquement, par une baisse des prix du marché.
Surtout, et compte tenu du retard déjà pris pour tenir nos objectifs ambitieux, la volonté du Gouvernement de remettre en cause d’anciens contrats photovoltaïques inquiète la commission. Cette volte-face est une remise en cause de la parole de l’État, qui pourrait hypothéquer l’avenir du développement des EnR.
Notre commission salue en revanche l’accroissement considérable des moyens publics alloués au développement de la filière de l’hydrogène bas-carbone. Il s’agit incontestablement d’un des axes les plus ambitieux du plan de relance, alliant défense de la souveraineté économique et énergétique de notre pays et engagement déterminé à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050.
Nombreux sont, madame la secrétaire d’État, les défis à relever pour assurer la réussite économique et environnementale de cette stratégie. Pour résorber le différentiel de compétitivité entre hydrogène bas-carbone et hydrogène gris, vous ne pourrez notamment pas faire l’économie d’une tarification appropriée du CO2.
En ce qui concerne la lutte contre la pollution de l’air, il y a urgence à prendre de nouvelles mesures dans les agglomérations concernées par des dépassements. L’État fait face à de multiples contentieux européens et nationaux pour non-respect des normes de qualité de l’air et pourrait être prochainement condamné à payer des amendes élevées.
La mise en place de zones à faibles émissions dans sept nouvelles agglomérations l’année prochaine, en application de la loi d’orientation des mobilités, constitue un premier pas important. Au-delà, il faudra que les préfets engagent la révision des plans de protection de l’atmosphère pour définir de nouvelles actions, en lien avec les collectivités territoriales. Cette fois, l’État ne pourra se contenter de rassembler des mesures hétéroclites et non évaluées dans des feuilles de route à l’efficacité incertaine.
En matière de rénovation énergétique des logements, notre commission salue les efforts faits au travers du renforcement du dispositif MaPrimeRénov’ et son élargissement à tous les propriétaires, quel que soit leur niveau de ressources.
Comme vient de le rappeler le Haut Conseil pour le climat, il faudra que ces financements supplémentaires soient maintenus et amplifiés dans le temps, au-delà des deux ans couverts par le plan de relance.
Les montants prévus pour le développement de l’hydrogène et pour la rénovation énergétique, malgré les réserves que je viens d’évoquer, ont conduit la commission à émettre un avis favorable sur les crédits relatifs à la transition énergétique et au climat.
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Pierre Médevielle.
M. Pierre Médevielle. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le PLF pour 2021, qualifié de « vert », présente des lignes de crédits hors-normes. Au sein de cette mission, ce sont 18,2 milliards d’euros de dépenses au bénéfice de l’environnement qui nous permettront, je l’espère, de soutenir la protection de l’environnement et la transition écologique.
La mission « Écologie, développement et mobilité durables » concerne notamment des secteurs durement éprouvés par la crise de la covid-19. Parmi eux, le secteur aérien a été l’un des plus gravement frappés : un retour du trafic à la normale n’est prévu qu’en 2023-2024. Sans négliger les impératifs de transition vers des avions plus vertueux, je pense que l’urgence reste le soutien économique et social à ce fleuron de notre industrie.
Au-delà du trafic international, n’oublions pas de mettre en place des mécanismes de soutien pour les lignes intérieures et les compagnies de nos outre-mer, qui sont essentielles. La cohésion de nos territoires passe par ces petites lignes. Les crédits évoluent doucement, et nous devons impérativement maintenir un cap ambitieux dans ce secteur.
L’industrie aéronautique sera, nous le savons, durement ébranlée dans les mois et années à venir avec un nombre important d’annulations de commandes et près de 15 000 suppressions d’emplois.
Élu de Haute-Garonne, siège de notre fleuron français et européen Airbus, je ne peux que vous faire part de toute l’inquiétude que nous ressentons sur notre territoire.
Le secteur maritime sera lui aussi soumis à rude épreuve. Redonnons à nos grands ports maritimes leur lustre d’antan. Nous avons, dans ce secteur, d’énormes progrès à réaliser. Il faudra très prochainement proscrire tous ces tankers et cargos fonctionnant encore au brut, avec des performances écologiques désastreuses. Nous ne pouvons qu’apprécier la stabilité de ce budget, même s’il aurait mérité mieux.
Le secteur ferroviaire n’a pas été épargné. Nous avons trop longtemps négligé la voie du fret ferroviaire, qui offre pourtant de multiples opportunités et qui soulagerait l’engorgement par les poids lourds de notre réseau routier. Les crédits de relance importants devraient nous inciter à encourager ce mode de transport.
N’oublions pas le rôle primordial que jouent les petites lignes en termes de lien interterritoires et intercités. Le plan de relance les prend en compte. Je salue la volonté de la commission d’accentuer ce soutien. Les crédits alloués constituent un premier pas positif dans cette démarche.
Pour en terminer avec le volet transports, j’évoquerai la mise en place, dans le cadre la LOM, des autorités organisatrices de la mobilité, qui doivent gommer les aberrations résultant de la non-coordination des acteurs de transports d’une même région. Le facteur le plus incitatif du succès des transports en commun repose sur la cohérence des réseaux, de même que sur un financement adapté.
Nous devons réussir vite. C’est pourquoi j’appelle à une mise en œuvre rapide des moyens financiers, particulièrement du plan de relance. Vitesse sera synonyme d’efficacité.
Tous les programmes de la mission revêtent une grande importance. Je me limiterai à quelques observations.
La préservation de notre environnement est une question de survie de notre planète. Ainsi, je salue la hausse visible du programme 113, « Paysages, eau et biodiversité », qui vient néanmoins pallier des pertes. Je partage l’inquiétude de la commission au sujet de la réduction des emplois. Je souhaite pour l’avenir une hausse des moyens en adéquation avec nos objectifs.
Attaché au programme dédié à la météorologie, pour avoir eu la chance de mener des travaux dans ce domaine, je veux rappeler la nécessité d’aller vite pour le renouvellement du supercalculateur. Bien sûr, les retards sont également dus à la pandémie, mais il ne faut pas qu’ils s’accentuent davantage. L’obsolescence dans ce domaine serait fort dommageable.
La semaine dernière, j’ai eu l’occasion de m’exprimer sur le sujet de l’hydrogène bas-carbone sur lequel nous fondons de réels espoirs pour les objectifs français et européens de neutralité carbone à l’horizon de 2050.
Les efforts consentis en matière de financements publics, notamment dans le plan de relance, à hauteur de 2 milliards d’euros, et jusqu’en 2030, pour atteindre plus de 7 milliards d’euros, vont dans le bon sens. Toutefois, je pense que nous devons être plus ambitieux et permettre au secteur privé d’apporter ses investissements. Pour cela, il nous faudra de l’audace, de l’ambition et des garanties de l’État : je plaide pour les trois.
Enfin, j’aimerais évoquer l’article 54 sexies relatif au photovoltaïque.
Je comprends les arguments développés par le Gouvernement concernant la renégociation des contrats d’achat conclus avant 2011 pour les centrales d’une puissance supérieure à 250 kilowatts. Cependant, je pense qu’une décision collégiale vaudrait mieux qu’une initiative unilatérale. Une concertation plus approfondie, un débat ou encore une étude d’impact auraient été des préalables indispensables à l’introduction d’une telle mesure. La signature de l’État français doit garder sa crédibilité. Il y va du bon développement des énergies renouvelables sur notre territoire.
Même si des efforts louables sont constatés, certaines lacunes persistent dans cette mission. Nous resterons attentifs et vigilants. Le groupe Les Indépendants votera les crédits de cette mission. (Applaudissements sur des travées des groupes INDEP et UC.)