M. Patrick Kanner. Les deux amendements dont nous allons maintenant débattre, l’un que je défends, l’autre qui sera défendu par Mme Valérie Létard, concernent le bassin minier.
Pour les non-connaisseurs, le bassin minier, c’est 120 kilomètres de long, 60 kilomètres de large, 1,2 million d’habitants, des taux de pauvreté et de morbidité inconnus ailleurs en France. C’est un territoire en très grande souffrance et, de ce fait, le terreau de l’extrême droite dans notre pays.
Par cet amendement, que j’ai déposé avec d’autres sénateurs de gauche des Hauts-de-France – Mme Martine Filleul, M. Michel Dagbert, M. Jean-Pierre Corbisez, Mme Sabine Van Heghe, Mme Cathy Apourceau-Poly, Mme Michelle Gréaume, M. Éric Bocquet –, notre objectif est de permettre au bassin minier de bénéficier globalement d’un taux de TVA à 5,5 % sur les travaux de réhabilitation et de construction portés par les deux bailleurs sociaux du secteur.
Pourquoi ? Voilà maintenant trois ans, le 7 mars 2017, nous avons signé un contrat d’engagement pour le renouveau du bassin minier. Ce contrat, porté par les ministres de l’époque sous l’autorité de Bernard Cazeneuve, a bénéficié d’un accompagnement total et plein d’énergie du président de la région, des deux présidents de département et de huit présidents d’intercommunalité.
C’est un enjeu énorme pour ce territoire ; c’est un espoir que nous pouvons redonner à ses habitants qui vivent souvent dans des logements totalement inadaptés, de véritables épaves énergétiques. À l’époque florissante du bassin minier, on chauffait gratuitement au charbon. Aujourd’hui, le charbon existe toujours, mais les épaves énergétiques se sont multipliées.
Nous proposons donc de permettre aux deux sociétés de logement social – pour être précis, Maisons et Cités, présidé par le maire de Douai, Frédéric Chéreau, et Sia Habitat – d’engager des travaux dans de bonnes conditions d’équilibre financier grâce à un taux réduit de TVA à 5,5 %.
Le bassin minier est très en attente de cet amendement et j’espère que la Haute Assemblée choisira de l’accompagner, en exprimant un vote positif.
M. le président. L’amendement n° I-883 rectifié, présenté par Mmes Létard et C. Fournier, MM. Henno, Rapin, Daubresse et S. Demilly, Mme Loisier, M. Détraigne, Mme Férat, MM. Canevet et Capo-Canellas, Mmes Perrot et Guidez, M. Longeot, Mmes Vermeillet, Sollogoub, Billon et de La Provôté, MM. Le Nay, Moga, Levi, Louault, Duffourg et Janssens, Mme Dindar, M. Cigolotti, Mmes Saint-Pé et Gatel et M. Chauvet, est ainsi libellé :
Après l’article 9 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 3° du I de l’article 278 sexies A du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …) Les logements sis dans la zone franche du bassin minier créée par le contrat partenarial d’intérêt national du 7 mars 2017 portant engagement pour le renouveau du bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Valérie Létard.
Mme Valérie Létard. Cette fois-ci, je ne dirai pas que l’amendement est défendu, même s’il a un objet identique à celui que mon collègue Patrick Kanner vient de présenter.
Je tiens simplement à souligner que cette démarche réunit tous mes collègues des Hauts-de-France, quelle que soit leur couleur politique et qu’ils soient parlementaires ou élus locaux. Patrick Kanner a parfaitement rappelé la situation tout à fait particulière de ce pan du territoire des Hauts-de-France ; c’est ce qui vaut que nous nous retrouvons tous sur cette question.
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement, s’est très récemment rendue dans le bassin minier, alertée par la situation et parce que nous sommes en train d’engager les choix de l’État en matière de grands investissements, notamment dans le secteur du logement ou sur des contrats particuliers.
Cela a été dit, le bassin minier est un territoire qui, après avoir connu une histoire industrielle florissante, s’est retrouvé dans une situation très complexe, dont il tente de s’extraire. On dénombre aujourd’hui 75 000 logements miniers qui sont, malheureusement, dans une situation particulière : il s’agit d’un habitat individuel très dégradé. Autrement dit, le coût de la rénovation thermique est extrêmement élevé, alors que la population que l’on trouve dans ce patrimoine est la plus fragile de toutes – ce sont des personnes qui sont dans une telle précarité qu’elles n’arrivent pas à accéder au logement social.
Si Mme Wargon était là – évidemment, la première partie du PLF n’est pas son moment –, elle serait d’accord avec nous pour dire que, s’il y a bien un endroit où la République doit agir, c’est dans le bassin minier. La réduction de taux de TVA que nous proposons permettrait d’accompagner des interventions parmi les plus lourdes, sur l’habitat le plus dégradé et auprès des populations qui en ont le plus besoin. Oui, elle serait d’accord avec nous, j’en suis certaine !
Après, il y a bien sûr les arbitrages de Bercy et l’Europe qui s’en mêle… Mais, croyez-moi, mes chers collègues, si l’on n’intervient pas dans ce cas précis, alors on ne fait plus notre devoir républicain !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Comme je l’ai indiqué ce matin, je souscris naturellement aux intentions de Patrick Kanner et Valérie Létard, mais les problématiques qu’ils exposent valent aussi pour d’autres territoires en reconversion, qu’ils soient miniers, sidérurgiques ou industriels.
Je vois donc une difficulté dans vos amendements, mes chers collègues, qui m’amène à vous proposer de les retirer : il me paraît difficile de proposer un taux de TVA qui s’appliquerait uniquement sur un territoire donné – cette mesure pourrait d’ailleurs être contraire au droit européen.
Je le redis, si tout le monde, je pense, partage votre préoccupation, des difficultés juridiques se posent en termes de droit européen et de périmètre législatif.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Il n’y a aucun doute, je crois, sur l’engagement du Gouvernement en faveur du renouveau du bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais – Mme Valérie Létard vient d’ailleurs de mentionner la visite d’Emmanuelle Wargon.
Pourquoi ? Comme on l’a souligné, ce territoire a des spécificités – dégradation de l’habitat, taux de chômage ou nombre d’emplois détruits, niveau de formation et de qualification, etc. – et, à ce titre, nous sommes extrêmement mobilisés pour l’accompagner, que ce soit ma collègue Emmanuelle Wargon sur le registre du logement ou moi-même sur celui de l’industrie.
Je veux tout de même préciser que l’État a engagé 2 milliards d’euros sur dix ans pour l’ensemble du contrat, avec 3 300 réhabilitations de logements – cela représente une multiplication par deux du nombre de logements ayant vocation à être réhabilités chaque année –, avec un investissement de la Caisse des dépôts et consignations au travers de CDC Habitat sous la forme d’apports en fonds propres et de prêts et avec un soutien budgétaire spécifiquement destiné à traiter les difficultés de ce territoire.
Vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, cet effort ne se limite pas au logement. Un travail est également mené sur l’insertion par l’emploi, sur l’accompagnement des allocataires du revenu de solidarité active (RSA) avec des dispositifs spécifiques ou encore sur la création d’entreprises génératrices d’emplois sur le territoire.
Voilà le cadre dans lequel nous intervenons.
J’entends que l’on pourrait abaisser le taux de TVA ponctuellement pour accompagner telle ou telle politique publique. C’est le jeu du projet de loi de finances : chaque fois que l’on veut porter une cause, on propose un abaissement du taux de TVA… Mais cela ne fonctionne pas à tous les coups !
Ce sujet, qui mérite un traitement approprié, est pris très au sérieux par le Gouvernement et je ne suis pas certaine que cette mesure de réduction de la TVA change réellement la capacité des acteurs à faire évoluer le territoire.
Enfin, et surtout, M. le rapporteur général me semble avoir posé une bonne question. Nous sommes tous égaux devant la fiscalité : autant il est possible de prévoir des dispositifs budgétaires pour accompagner des transformations ou des transitions de territoires, autant on ne peut pas rompre l’égalité des Français devant l’impôt.
M. Éric Bocquet. Certains sont quand même moins égaux que d’autres…
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.
M. Éric Bocquet. Nous sommes pleinement partie prenante de l’amendement de Patrick Kanner qui rejoint la proposition de Valérie Létard.
On connaît le poids particulier de l’habitat minier dans notre région. Ce n’est pas seulement une question de passé industriel ; c’est une question de dignité et d’avenir.
Nous parlons de logements anciens, donc très énergivores. Les deux bailleurs engagés dépensent beaucoup d’argent depuis de nombreuses années. Ils sont soutenus par l’ensemble des collectivités, toutes sensibilités confondues. En dix ans, 23 000 logements ont été réhabilités et 7 300 autres doivent l’être d’ici à 2021, pour un coût moyen par réhabilitation de 80 000 euros environ.
L’adoption de cet amendement permettrait de diminuer ce coût de 1 500 à 1 700 euros par logement. Cela a vraiment du sens ; c’est pourquoi nous le soutenons pleinement.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.
Mme Valérie Létard. Madame la ministre, il ne s’agit pas d’un territoire, mais d’un patrimoine : c’est l’héritage des houillères qui appartiennent à l’histoire de notre pays.
Longtemps, ces logements ont été exclus des politiques publiques, justement parce qu’ils étaient la propriété des houillères. C’est seulement il y a quelques années qu’ils sont revenus dans le droit commun. En dehors de toute considération d’ordre territorial, il s’agit donc d’un patrimoine spécifique qui, du fait de ses particularités, est passé à travers les mailles du filet ; de ce fait, nous subissons aujourd’hui un retard phénoménal.
Je persiste et signe : je comprends vos arguments, madame la ministre, mais ce que nous sollicitons, ce n’est en aucun cas un traitement différencié. Nous demandons simplement un rattrapage pour que ces structures bénéficient des mêmes règles et avantages que les autres, après tant d’années perdues. C’est de notre héritage industriel qu’il s’agit !
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. On applique déjà le taux de 5,5 % dans des situations exceptionnelles – je pense notamment aux quartiers prioritaires de la politique de la ville. On estime donc bien qu’un traitement inégalitaire peut être indispensable pour rétablir les conditions d’une équité territoriale.
Ce que nous demandons, avec les collègues de mon groupe, avec Mme Létard et – je l’espère – avec une majorité de celles et ceux qui siègent aujourd’hui dans la Haute Assemblée, c’est la reconnaissance d’une situation et d’un patrimoine exceptionnels.
Le bassin minier a chauffé la France. Il a permis la deuxième révolution industrielle. Aujourd’hui, il souffre. Ce que nous demandons au travers de cette mesure fiscale, c’est la solidarité nationale, tout simplement. S’il y a des problèmes juridiques, nous les traiterons en temps voulu. Aujourd’hui, faisons de la politique !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 9 quater, et l’amendement n° I–883 rectifié n’a plus d’objet.
L’amendement n° I–1157 rectifié, présenté par MM. Éblé, P. Joly, Lurel et Bourgi, Mmes Monier, Van Heghe et Bonnefoy, MM. Devinaz, Temal et Antiste et Mme Conway-Mouret, est ainsi libellé :
Après l’article 9 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au premier alinéa du III de l’article 293 B du code général des impôts, le montant : « 44 500 € » est remplacé par le montant : « 50 000 € ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Vincent Éblé.
M. Vincent Éblé. Cet amendement vise à porter de 44 500 euros à 50 000 euros la franchise de TVA dont bénéficient les cabinets d’avocats. Cette disposition est destinée aux avocats à faible chiffre d’affaires et, pour la mettre en œuvre, la France n’aura pas à obtenir un accord unanime de ses partenaires européens. Elle est de nature à favoriser le libre accès au droit et à la justice, au bénéfice des justiciables les plus modestes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. J’entends l’argumentation de M. Éblé et je souhaite recueillir l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.
Tout d’abord, comme vous le savez, ce seuil est actualisé tous les trois ans. Or la dernière révision en date remonte à l’année dernière ; en toute logique, ce seuil a donc vocation à être relevé pour 2023. J’ajoute que, lors des négociations de l’an dernier, personne n’a estimé qu’il était trop bas.
Ensuite, il est toujours intéressant d’examiner ce qui se passe au niveau européen. Vous avez raison, votre proposition ne pose pas de problème au regard du droit communautaire. En revanche, le seuil retenu par la France est déjà l’un des plus élevés d’Europe, ce qui laisse à penser que le sort réservé aux avocats est relativement favorable. D’ailleurs, le seuil de la franchise en base, spécifique à la profession d’avocat, est bien plus avantageux que le seuil de droit commun applicable aux prestations de services en général.
Enfin, les avocats peuvent, en parallèle, bénéficier d’une franchise spécifique de 18 300 euros pour les activités autres que celles définies par la réglementation applicable à leur profession.
Pour toutes ces raisons, il ne nous semble pas urgent de modifier cet équilibre qui répond, de manière raisonnable, à la situation actuelle.
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Défavorable !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1157 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 10
I. – Le titre II de la première partie du livre Ier du code général des impôts, dans sa rédaction résultant du I de l’article 147 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, est ainsi modifié :
1° Le IV de l’article 258 est complété par un d ainsi rédigé :
« d) Les dispositions du présent IV ne sont pas applicables aux livraisons de biens d’occasion, d’œuvres d’art, d’objets de collection ou d’antiquité effectuées par un assujetti revendeur qui applique les dispositions de l’article 297 A ainsi qu’aux livraisons de moyens de transport d’occasion effectuées par un assujetti revendeur qui applique les dispositions de l’article 297 G. » ;
2° Le II de l’article 258 A est ainsi rédigé :
« II. – Les dispositions du I du présent article ne sont pas applicables aux livraisons de biens d’occasion, d’œuvres d’art, d’objets de collection ou d’antiquité effectuées par un assujetti revendeur qui applique les dispositions de l’article 297 A ainsi qu’aux livraisons de moyens de transport d’occasion effectuées par un assujetti revendeur qui applique les dispositions de l’article 297 G ou qui a appliqué dans l’État membre de l’Union européenne de départ de l’expédition ou du transport de ces biens les dispositions de la législation de cet État prises pour l’application des régimes particuliers prévus aux sections 2 et 3 du chapitre 4 du titre XII de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 précitée. » ;
3° L’article 259 D est ainsi modifié :
a) La première phrase du premier alinéa du 2 du I est ainsi modifiée :
– après la seconde occurrence du mot : « un », il est inséré le mot : « seul » ;
– les mots : « cet autre » sont remplacés par les mots : « ce seul » ;
b) Le premier alinéa du 1 du II est ainsi modifié :
– après le mot : « établi », il est inséré le mot : « uniquement » ;
– après les mots : « qui a », il est inséré le mot : « uniquement » ;
3° bis (nouveau) Après la première occurrence du mot : « du », la fin du c du 4 de l’article 298 sexdecies F est ainsi rédigée : « présent régime particulier ; »
4° Le II de l’article 298 sexdecies I est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° Par dérogation aux articles 278-0 bis à 281 nonies, l’importation des biens est soumise au taux prévu à l’article 278. »
II. – Aux A et B du IV de l’article 147 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, le mot : « janvier » est remplacé par le mot : « juillet ».
III. – Le I s’applique aux opérations pour lesquelles le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée intervient à compter du 1er juillet 2021. – (Adopté.)
Article 11
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 4° du III de l’article 257 est abrogé ;
2° Le III de l’article 289 est abrogé.
M. le président. L’amendement n° I-14 rectifié, présenté par Mmes Loisier et N. Goulet, M. Canevet, Mmes Billon, Gatel et Vermeillet, MM. Delahaye et Bonnecarrère, Mme Férat, M. Kern, Mme Doineau, MM. P. Martin et Chauvet, Mmes Guidez et de La Provôté, MM. Longeot, Le Nay, Delcros et Duffourg, Mme Létard et MM. Lafon et Capo-Canellas, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le présent article entre en vigueur à compter du 1er janvier 2022.
La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier.
Mme Anne-Catherine Loisier. Un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) supprime la récupération de la TVA sur les gains de courses pour les propriétaires de chevaux. Cette disposition est reprise dans le projet de loi de finances pour 2021, sans que les pouvoirs publics et les membres de la filière aient anticipé ses conséquences.
Or l’application d’une telle mesure au 1er janvier 2021, dans le contexte économique que nous connaissons, serait catastrophique pour tous les professionnels de la filière qui luttent pour leur survie. J’ajoute que, à la différence des autres activités animalières, ce secteur n’a bénéficié à ce jour d’aucun soutien au titre des PLFR successifs.
Concrètement, cette disposition conduirait à un appauvrissement supplémentaire des acteurs économiques, alors que nous sommes en pleine crise.
Sans ignorer l’importance de l’arrêt de la CJUE, nous proposons donc de reporter d’un an sa mise en œuvre afin de permettre à la filière d’anticiper et de s’adapter à cette nouvelle donne qui met en cause l’investissement dans les chevaux et, avec lui, le modèle économique de toute la filière des courses hippiques.
Il faut laisser à cette filière le temps de s’organiser, en étudiant la manière dont les autres pays européens ont mis en œuvre ce dispositif, quand ils l’ont seulement appliqué. Ainsi, l’on sera sûr de ne pas créer de nouvelles distorsions de concurrence entre pays européens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Il faut s’en tenir à la jurisprudence de la CJUE, d’autant que la mise en conformité à laquelle procède l’article 11 n’est pas une surprise. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Madame la sénatrice, ce sujet a fait l’objet d’une concertation dès le premier trimestre 2020, avant le premier confinement. Ainsi, nous avons anticipé les conséquences potentielles de cette suppression avec les différentes fédérations.
Il est important que chacun le sache sur ces travées : la mesure a été anticipée et discutée avec les professionnels ; elle répond au droit européen. J’émets donc, à mon tour, un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour explication de vote.
Mme Nathalie Delattre. Les élus du RDSE soutiendront cet amendement. Dans de nombreux départements, la filière équine a beaucoup de poids – en tant qu’élue de la Gironde, je suis bien placée pour le savoir ! Certes, cette suppression a fait l’objet d’une concertation, mais – je l’indique à mon tour – les circonstances actuelles sont tout à fait particulières. J’ajoute que cette filière a besoin, avant tout, d’une aide digne de ce nom.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour explication de vote.
Mme Anne-Catherine Loisier. Les propriétaires sont le carburant de la filière cheval. Ce sont eux qui investissent et qui, ce faisant, permettent à tous les autres acteurs économiques de travailler – je pense notamment aux entraîneurs. Ces différents professionnels n’ont que rarement les capacités financières d’acheter eux-mêmes leurs chevaux.
Effectivement, les propriétaires concernés sont peu nombreux, mais, comme dans d’autres secteurs, toute la filière repose sur ces quelques acteurs. Une fois encore, la France veut être exemplaire, mais la plupart des pays européens n’ont toujours pas mis en œuvre cette disposition. Pourquoi désavantager nos acteurs économiques, alors que – nous en sommes tous conscients – nous traversons une période de crise ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 11.
(L’article 11 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 11
M. le président. L’amendement n° I-421 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Menonville, Malhuret, Capus et Chasseing, Mme Mélot et MM. Wattebled, Lagourgue et Guerriau, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article 281 nonies du code général des impôts, il est inséré un article 281… ainsi rédigé :
« Art. 281 …. – La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 0 % sur les prestations pour lesquelles les avocats et les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation sont indemnisés totalement ou partiellement par l’État dans le cadre de l’aide juridictionnelle. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Mes chers collègues, nous proposons d’appliquer un taux nul de TVA aux prestations, pour lesquelles les avocats et les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation sont indemnisés totalement ou partiellement par l’État dans le cadre de l’aide juridictionnelle.
Il s’agit, en somme, d’un amendement de cohérence. En effet, lorsque le justiciable est une personne physique, il n’est pas assujetti à la TVA ; il va donc, en tant que consommateur final de la prestation, tirer avantage de cette réduction de taux. Enfin, n’oublions pas que le service public de la justice est un service d’intérêt général.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Une telle exonération irait à l’encontre du droit européen. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Un taux de TVA à 0 % réservé à ces situations spécifiques serait très difficilement compréhensible. En outre, nous le savons tous, cette disposition serait contraire au droit européen. En conséquence, j’émets moi aussi un avis défavorable.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-1134 rectifié, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Parigi, Labbé et Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Poncet Monge et M. Salmon, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Le chapitre VIII bis du titre II de la première partie du code général des impôts est complété par un article ainsi rédigé :
« Art. … – I. – Il est institué une taxe sur les dépenses de promotion des produits alimentaires qui par leur caractère, leur présentation ou leur objet, apparaissent comme prioritairement destinés aux enfants et adolescents.
« II. – Sont redevables de cette taxe les personnes dont le chiffre d’affaires du dernier exercice est supérieur ou égal à cinquante millions d’euros hors taxe sur la valeur ajoutée qui :
« – produisent, importent ou distribuent en France des produits alimentaires ;
« – ou représentent les personnes mentionnées à l’alinéa précédent.
« III. – La taxe est assise sur les frais de publication et d’achats d’espaces publicitaires afin de promouvoir des produits alimentaires qui par leur caractère, leur présentation ou leur objet, apparaissent comme prioritairement destinés aux enfants et adolescents, quelle que soit la nature du support retenu et quelle que soit sa forme, matérielle ou immatérielle, ainsi que les frais d’évènements publics et de manifestations de même nature.
« IV. – Le taux de la taxe, plafonné à 30 % du montant hors taxe sur la valeur ajoutée des dépenses mentionnées au III, est modulée en fonction de la déclaration nutritionnelle en application de l’article L. 3232-8 du code de la santé publique.
« V. – La taxe est déclarée et liquidée sur l’annexe à la déclaration des opérations du mois de mars de l’année au titre de laquelle la taxe est due, déposée en application de l’article 287. Elle est acquittée au plus tard lors de cette déclaration.
« VI. – La taxe est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.
« VII. - Un décret en Conseil d’État définit les modalités d’application du présent article, notamment la modulation du taux mentionnée au IV. »
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2022.
La parole est à M. Daniel Salmon.