M. le président. En conséquence, les amendements nos 677 rectifié, 17 rectifié ter et 531 rectifié quater n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 749 rectifié, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – L’article 43 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 est abrogé.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Cet amendement vise à supprimer la possibilité d’expérimenter le forfait de réorientation, qui avait été introduit dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, et qui – je le précise – n’a toujours pas été mis en œuvre à ce jour.
Ce forfait de réorientation est dénoncé par l’ensemble du personnel soignant. Je rappelle, en effet, qu’il consiste à rémunérer ceux qui travaillent aux urgences pour ne pas prendre en charge des personnes qui s’y présenteraient. Le dispositif choque le personnel hospitalier, et les professionnels de santé de ville le rejettent clairement. En outre, il ne résout évidemment pas le problème de l’engorgement des services d’urgence.
L’examen du PLFSS nous a donné, à plusieurs reprises, l’occasion de rappeler l’importance d’engager un travail de fond sur les missions de l’hôpital public, en concertation avec les soignants. Toutefois, le ministre de la santé n’a pas souhaité intégrer cette réflexion dans le Ségur de la santé.
C’est pourtant une première pierre indispensable, non seulement pour déterminer le budget nécessaire à la réalisation des missions confiées à l’hôpital public, mais aussi pour améliorer la coopération en amont avec la médecine de ville.
En attendant, il faut cesser d’amonceler des mesures financières décidées sans réflexion ni cohérence, de sorte qu’elles finissent par constituer un maquis où il est bien compliqué de se retrouver.
Nous proposons donc de simplifier la loi en supprimant ce forfait qui n’a jamais été appliqué.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Le Sénat s’était opposé quasi unanimement à cette disposition lors de l’examen du PLFSS pour 2019, et la logique ne nous semble toujours pas vertueuse.
L’arrêté du 27 décembre 2019 a fixé le cahier des charges de l’expérimentation et, sur cette base, des appels à projets ont été lancés en région. Mme la ministre pourra peut-être nous indiquer où en sont ces projets.
Nous restons cependant constants dans l’opposition à ce mécanisme. Dans leur rapport de 2017 sur les urgences hospitalières, nos collègues René-Paul Savary et Laurence Cohen avaient formulé des propositions plus intéressantes.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Vous proposez de supprimer l’expérimentation du forfait de réorientation. Bien évidemment, ce dispositif ne peut suffire à résoudre l’engorgement des services d’urgence, qui sont confrontés depuis une vingtaine d’années à un afflux considérable de patients et à une hausse d’activité énorme.
Désengorger ces structures d’urgences hospitalières reste pourtant un objectif fort du Gouvernement. En effet, le forfait de réorientation s’inscrit dans le plan d’action beaucoup plus global et ambitieux que constitue le pacte de refondation des urgences. Le Ségur de la santé a été l’occasion d’en réaffirmer les mesures clés, avec notamment le lancement du service d’accès aux soins (SAS) qui se déploiera dans les tout prochains mois.
Le forfait de réorientation concourt à cet objectif majeur de recentrage des urgences, né d’un constat fort : selon un rapport de la Cour des comptes, 20 % des patients qui se présentent aux urgences n’auraient pas besoin de recourir à ce service, et pourraient être pris en charge directement en ville.
Vous soulignez à juste titre l’importance qu’il y aurait à mener une réflexion opérationnelle sur la coopération entre la médecine de ville et l’hôpital. Or l’expérimentation de forfaits repose, en premier lieu, sur un travail conjoint entre les urgentistes et les praticiens libéraux pour formaliser ces modalités de réorientation.
Enfin, contrairement à ce que vous dites, ce projet a suscité – contrairement à ce que vous avez dit – un fort intérêt au sein des établissements hospitaliers, puisqu’une cinquantaine d’entre eux ont déposé une candidature pour expérimenter le forfait de réorientation. La liste de ces établissements sera publiée dans les tout prochains jours.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 18 rectifié ter, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel, Genet et Bonne, Mme Malet, M. Sol, Mme F. Gerbaud, MM. Rapin, Piednoir, Savary, Pointereau et Houpert, Mmes Di Folco et Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – L’article L. 162-20-1 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Une tarification forfaitaire nationale des prestations, établie en fonction de catégories d’activité de soins et du niveau de charges des établissements et dont les modalités sont déterminées par voie réglementaire sert de base, à compter du 1er janvier 2022, au calcul de la participation à la charge des assurés mentionnée à l’article L. 160-13 du présent code. Cette participation forfaitaire des assurés est facturée à un guichet unique national assuré par l’assurance maladie obligatoire. »
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Les règles actuelles de calcul du reste à charge en matière de prestations d’hospitalisation sont extrêmement complexes. Ce reste à charge repose sur plusieurs modalités dont les tarifs journaliers de prestation, le forfait journalier et la participation forfaitaire pour les actes coûteux. Les règles de calcul varient en fonction de chacune de ces modalités.
Si le reste à charge qui est effectivement payé par le patient, après intervention des organismes complémentaires, demeure globalement faible à l’hôpital public, les montants sont très variables et peuvent être très élevés dans certaines situations. La crise sanitaire en est un exemple flagrant, puisque les hospitalisations de patients « covid+ » ont pu donner lieu à des factures élevées à la charge de patients.
La répartition du reste à charge est en effet très inégale, avec une forte concentration sur les activités de médecine, les hospitalisations longues, les âges extrêmes de la vie et particulièrement sur les patients âgés.
De plus, ces restes à charge peuvent être très difficiles à supporter pour les patients qui n’ont pas de couverture complémentaire. Ce sont donc les patients les plus âgés, les plus malades et les plus démunis qui doivent s’acquitter des restes à charge les plus lourds, ce qui pose une question de justice sociale et de solidarité collective.
Par conséquent, dans la droite ligne de l’étude menée en 2019 par le ministère de la santé, en concertation avec les fédérations hospitalières, cet amendement prévoit de forfaitiser cette participation, afin de mieux répartir le reste à charge et de simplifier les règles de facturation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La réforme du reste à charge hospitalier que nous avons votée l’an passé manque effectivement d’ambition, si l’on considère l’objectif de simplification que vise cet amendement.
Cependant, l’article 28 prévoit une montée en charge de cette réforme, dont les conditions d’entrée en vigueur seront lissées jusqu’en 2026, puisque nous avons voté l’amendement n° 1073 du Gouvernement.
Rien ne s’oppose à ce que nous poursuivions, dans l’intervalle, la réflexion sur la remise à plat plus globale de ce chantier. La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Nous partageons l’objectif de simplification que vise cet amendement.
Cependant, la réforme de la participation à l’hôpital, introduite à l’article 35 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 tend d’ores et déjà à remplacer les tarifs journaliers de prestations par une nomenclature simplifiée et unifiée au niveau national, pour le calcul du ticket modérateur.
Cette nomenclature, dite « des tarifs nationaux journaliers de prestations », vise à une plus grande équité entre les patients. Elle permettra de simplifier, de manière significative, le processus de facturation.
Je rappelle, en effet, que plus de 96 % des assurés ont signé un contrat de complémentaire santé responsable, qui couvre obligatoirement la participation de l’assuré aux frais liés à la prise en charge de l’hôpital. Ce contrat doit permettre aux assurés de bénéficier du tiers payant sur ces frais, à hauteur du ticket modérateur.
Par conséquent, cet amendement comporte un risque financier réel pour l’assurance maladie, en cas de difficultés de recouvrement de cette avance de frais.
Par ailleurs, je précise que pour tenir compte du contexte actuel, le Gouvernement a déposé un amendement visant à reporter d’un an l’entrée en vigueur de certaines réformes du financement des établissements de santé, prévues en 2021, dont la réforme du calcul du ticket modérateur.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Cet amendement est excellent, car son auteur propose une solution destinée à mettre fin à une situation d’injustice et d’inefficacité qui dure depuis trop d’années, et dont nous sommes tous coresponsables.
Alain Milon ne le précise pas dans l’exposé des motifs, mais je ne doute pas qu’il souscrira à ce que je souhaite ajouter : la concertation doit se faire non seulement avec les fédérations hospitalières, mais aussi avec les associations de patients et le secteur des complémentaires de santé. Rien ne justifie que la prise en charge se fasse à 100 % pour une intervention chirurgicale à l’hôpital, mais que le reste à charge atteigne plusieurs centaines, voire milliers, d’euros, dès lors qu’un patient doit être hospitalisé pendant plusieurs jours.
Nous voterons cet amendement très intéressant.
M. le président. Je mets aux voix l’article 28, modifié.
(L’article 28 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 28
M. le président. L’amendement n° 579, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 162-20-1 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – La prestation d’hébergement en chambre particulière est intégrée dans les tarifs nationaux journaliers de prestation. »
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cet amendement prévoit d’intégrer la prestation d’hébergement en chambre particulière dans les tarifs nationaux journaliers de prestations, afin qu’elle ne soit plus facturée comme prestation hôtelière.
En effet, pendant cette période de covid, il est arrivé très fréquemment que l’on isole des patients dans des chambres particulières, ou bien que l’on transforme des chambres doubles en chambres particulières, pour éviter un risque de contamination. Dans ces conditions, il serait assez anormal que les patients aient à payer une prestation de chambre individuelle au titre de la prestation hôtelière.
En outre, on constate une tendance à privilégier les chambres particulières, dans le cadre de constructions ou de réhabilitations de bâtiments, et il faut l’encourager.
L’évolution tarifaire doit se faire, car les chambres particulières tendent de plus en plus à être considérées comme une prestation normale de qualité de soins.
Cet amendement prévoit une période limitée d’un an pour l’application du dispositif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il est vrai que les règles sanitaires actuelles conduisent à privilégier la chambre individuelle pour les hospitalisations.
Cependant l’amendement, tel qu’il est rédigé, ne me paraît pas répondre de manière satisfaisante au besoin de prise en charge de cette prestation, car il entraînerait une perte de recettes pour les établissements de santé. Il généralise, en outre, une situation qui est aujourd’hui justifiée par le contexte sanitaire de la covid-19.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 678 rectifié ter, présenté par Mme V. Boyer, MM. Boré, Le Rudulier et Frassa, Mme Micouleau, M. Daubresse, Mmes Dumas, Deromedi et Joseph, MM. J.M. Boyer, Anglars, Bonne, B. Fournier et Bouchet, Mmes Garriaud-Maylam et Raimond-Pavero, M. Houpert, Mmes Drexler et Thomas, MM. Cuypers, Rapin, Sautarel, Gremillet, Segouin et Genet, Mme de Cidrac et MM. Charon et Bouloux, est ainsi libellé :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-22-13-… ainsi rédigé :
« Art. L. 162-22-13-…. – Chaque année, les agences régionales de santé présentent un bilan au ministère de la santé sur la répartition financière des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation et des fonds d’intervention régionaux. Ce bilan est présenté par le ministère devant le Parlement. Il est accessible sur le site internet des agences régionales de santé. »
La parole est à Mme Valérie Boyer.
Mme Valérie Boyer. Cet amendement tend à imposer un principe de transparence, car il prévoit que les ARS devront justifier l’utilisation des deniers publics devant la représentation nationale.
Il ne s’agit pas d’une demande de rapport. Je souhaiterais que les ARS présentent, chaque année, au ministre de la santé, un bilan qui pourra porter sur la répartition financière, les missions d’intérêt général, l’aide à la contractualisation et les fonds d’intervention régionaux.
Ce bilan sera ensuite présenté par le ministre devant le Parlement. Il sera également publié sur le site internet des ARS.
Le Parlement pourra ainsi exercer une forme de contrôle pour vérifier la bonne exécution de ce qu’il aura voté. La crise que nous traversons a montré l’importance que nos concitoyens accordent à la bonne utilisation de l’argent public et leur souhait de pouvoir disposer d’informations transparentes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement est satisfait, car il existe déjà un rapport annuel sur l’utilisation du FIR, qui est transmis au Parlement.
De plus, un rapport sur le financement des établissements de santé, établi en application de l’article L. 162-23-14 du code de la sécurité sociale, présente en annexe la ventilation des missions d’intérêt général et d’aides à la contractualisation (Migac).
Bien qu’il n’ait pas été transmis pendant plusieurs années, la version de ce rapport pour l’année 2020 a été adressée au Parlement, en octobre dernier. Ces rapports sont publics.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Même si nous travaillons dans un contexte d’urgence, et si ce texte n’est pas forcément le bon véhicule pour le faire, nous sommes nombreux sur ces travées à considérer qu’il faudrait revoir la gouvernance des ARS au regard de la crise que nous traversons. En effet, les collectivités locales et les élus ont souvent dû intervenir pour corriger les déboires de ces agences.
À cet égard, je présenterai un amendement qui tend à remettre les élus au cœur du dispositif des ARS, car les maires et les collectivités restent les premiers acteurs de la santé. Les maires sont les présidents des conseils d’administration des hôpitaux, qui sont très souvent les premiers employeurs des communes.
Même s’il est satisfait, l’amendement de Mme Boyer est l’occasion de réaffirmer le besoin de transparence de nos concitoyens et la nécessité d’une gouvernance partagée au sein des ARS.
J’espère que la Haute Assemblée veillera à se saisir du débat sur l’avenir des ARS et la recomposition de leur gouvernance, même si ce n’est pas dans le cadre du PLFSS. Les élus le méritent qui se sont impliqués avec toute leur énergie pour faire face à l’épidémie. Quant aux départements, ils ont retrouvé leur raison d’être dans la gestion de la crise.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. En dépit des améliorations rédactionnelles qu’on pourrait lui apporter, cet amendement reste bien fondé, car il pose un vrai problème. Comme l’a dit Nathalie Goulet, cette crise a été l’occasion de constater publiquement les dysfonctionnements de la gouvernance des ARS, tant en termes de régulation que de gestion.
En Guadeloupe, le directeur de l’ARS a sans doute cru qu’il dirigeait une caserne, où nous n’étions rien de plus que des petits soldats de plomb qu’il pouvait déplacer à son gré.
Mme la rapporteure considère que cet amendement est satisfait. Pourtant, en Guadeloupe, l’ARS ne nous a jamais fourni autre chose que de la publicité sur papier glacé, destinée à servir sa politique de communication. Jamais les élus n’ont pu obtenir d’informations les éclairant sur la situation, les investissements ou les répartitions opérées par l’agence.
J’en veux pour preuve le déplacement d’un projet régional de santé (PRS), lié à la décision unilatérale de l’ARS d’annuler l’installation d’un cyclotron et d’une Tep Scan.
Les élus n’ont rien vu venir, car on s’est contenté de leur envoyer des documents parfaitement ésotériques que personne n’a compris. Il fallait aller sur internet pour comprendre qu’on avait supprimé le cyclotron ! Nous avons dénoncé, avec d’autres collègues, et notamment Mme Jasmin, cette méthode un peu sournoise.
Par conséquent, il faut revoir la répartition des compétences entre les ARS et les collectivités, et faire évoluer le style de gouvernance vers plus de transparence. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je ne voterai pas cet amendement. Je vous rappelle que le principe d’existence des ARS et leur façon de fonctionner ont été définis dans la loi qui a également rendu possible la T2A. Quel était l’objectif ? Il s’agissait de distancier les choix hospitaliers de ceux de la société et des élus locaux.
J’ai connu des périodes où les élus avaient un pouvoir beaucoup plus important qu’aujourd’hui, ce qui leur donnait au moins l’impression de participer au processus de décision. Ils savaient pourquoi et comment chaque décision était prise, et cela même s’ils n’étaient pas d’accord.
Ce lien avec les élus s’est effacé devant une gestion technocratique pure, reposant sur l’idée que pour faire des économies, il faut tenir les acteurs locaux à distance et fuir tout ce beau monde qui voudrait vivre comme à Clochemerle, avec « chacun son truc chez soi », etc.
Nous traversons une crise majeure de pilotage de notre système de santé, tant à l’hôpital que dans les ARS. Il existe bien, ici ou là, quelques directeurs d’agence actifs et efficaces. Toutefois, par principe, les choix stratégiques se font à l’écart des élus et de la société, ce qui technocratise le pilotage de notre système.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour explication de vote.
Mme Valérie Boyer. Compte tenu des circonstances et de l’évolution du texte sur la création des ARS, il serait bon que la représentation nationale soit associée au moins une fois dans l’année, à l’échelle régionale ou nationale, aux choix qui se font au sein des ARS.
C’est vrai, nous disposons aujourd’hui d’informations, mais nous les obtenons de façon éparpillée et, vous le savez, avec difficulté ; il est donc extrêmement compliqué pour nous d’avoir une vision globale de ce qui se passe sur le territoire.
Par conséquent, puisque nous demandons de la proximité et que les collectivités territoriales ont été au premier rang – bien avant les ARS –, lors de la crise sanitaire, pour fournir des masques et des tests, voire pour mettre en œuvre des parcours de soins, il me semble nécessaire qu’à la faveur de cette crise très difficile l’on change de paradigme et que les ARS se tournent vers la représentation nationale. Ce serait la moindre des choses, ne serait-ce que pour nous permettre de voir comment les décisions adoptées sont appliquées, à l’échelon tant national que local.
Cette transmission organisée d’informations ne me semble pas exister et cette demande ne me paraît pas indécente, surtout au regard des circonstances actuelles.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je vous prie de m’excuser, mais je vais prendre le contre-pied de tout ce qui vient d’être dit.
Au cours des auditions de la commission d’enquête pour l’évaluation des politiques publiques face aux grandes pandémies à la lumière de la crise sanitaire de la covid-19 et de sa gestion, que j’ai l’honneur de présider, je n’ai pas eu le sentiment que les ARS avaient été au-dessous de tout. Elles ont été convenablement gérées ; elles ont travaillé comme il le fallait avec les préfets et les élus de proximité ont été, me semble-t-il, bien informés des actions mises en place, même si, dans nombre de départements, les préfets ont pris le dessus par rapport à l’ARS ; après tout, les ARS agissent dans la région et les préfets dans les départements.
Par ailleurs, je suis président de la fédération hospitalière de ma région et nous sommes évidemment informés du budget de l’ARS et de la façon dont il est exécuté à l’échelle de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Je n’ai donc pas à me plaindre de cela.
Que les élus de la Nation demandent à être informés de l’utilisation de ces budgets, pourquoi pas ? Mais dans ce cas ce serait plutôt au ministère, qui contrôle l’action et les dépenses des ARS, de nous faire chaque année – par exemple dans le cadre de l’examen du PLFSS ou de la loi de règlement – une présentation de l’action des différentes ARS.
Même si la demande Valérie Boyer me paraît légitime, j’ai l’impression que l’on sous-entend qu’il y aurait, par moments, une utilisation sournoise ou bizarre des finances de l’État.
Mme Valérie Boyer. Non !
M. Alain Milon. Or cela ne me semble pas être le cas. Je veux qu’il soit dit que l’argent est utilisé en fonction des directives données à l’échelon national et des discussions entre les directeurs d’hôpital, les élus locaux et les unions régionales des professionnels de santé (URPS). Tout cela se fait dans la transparence la plus totale.
Mme Valérie Boyer. C’est transparent, mais ce n’est pas organisé !
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Ce sujet prend de l’importance avec la pandémie de covid-19, mais il y avait déjà des signes d’alerte auparavant.
Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est vrai !
M. Pascal Savoldelli. Aussi, je veux vous suggérer une méthode, madame la ministre.
Dès lors que l’on identifie ici, sur différentes travées, qui reflètent des analyses différentes – notre collègue Milon vient de le dire –, un problème relatif au fonctionnement, au rôle et à la transparence du financement des ARS, dès lors donc que ce sujet interpelle tous les élus de la Nation, quelle que soit leur sensibilité, eh bien, madame la ministre, inscrivez un débat à l’ordre du jour du Sénat ! On recueillera ainsi l’avis de l’ensemble des parlementaires et cela vous aidera à être force de proposition pour réformer les ARS.
La démocratie sanitaire requiert un peu de temps, elle doit s’appuyer sur des savoirs et des compétences et elle suppose d’analyser, de façon contradictoire, les processus de décision. Ensuite, nous délibérerons. Je ne dis pas que nous serons unanimes, mais au moins nous aurons une information cohérente et l’ensemble des parlementaires qui siègent dans cet hémicycle seront respectés.
M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.
Mme Pascale Gruny. Je voterai l’amendement de Valérie Boyer.
D’abord, ce qu’elle demande me paraît tout à fait justifié. Ensuite, je ne suis pas du tout d’accord avec notre excellent collègue Alain Milon. Dans ma région, nous n’obtenons jamais de réponse de l’ARS ; même le préfet, qui a pourtant beaucoup d’autorité, n’arrive pas à obtenir d’informations !
Lors du premier confinement, l’ARS des Hauts-de-France avait bloqué – on ne sait toujours pas pourquoi – une cargaison d’alcool d’une sucrerie qui devait être livrée, autour de Lille, à des pharmacies ou des usines fabriquant du gel hydroalcoolique. Le directeur de l’ARS ne me répond même plus à ce jour, alors que je reste assez calme dans mes demandes !
Je souhaite donc que, à tout le moins, ces agences soient placées sous la hiérarchie du préfet ; ou alors elles ne sont pas utiles…
Peut-être les choses se passent-elles mieux dans le Sud, mais il y a de véritables difficultés chez nous. Il me semble donc normal de savoir, au minimum, ce qu’elles font. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.