M. le président. La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre pays traverse une crise économique grave, exceptionnelle, inédite depuis 1945, nécessitant des mesures ambitieuses et un cap politique nouveau. Or, à l’occasion de ce troisième projet de loi de finances rectificative, ni le Gouvernement ni la majorité sénatoriale n’ont fait le choix d’un véritable « budget de combat », protecteur des plus faibles, de nos entreprises, de nos collectivités et de nos territoires.
C’est une erreur stratégique majeure d’attendre la rentrée pour lancer un plan de relance et le traduire dans le projet de loi de finances pour l’année 2021. Nous avons pourtant écouté le Président de la République nous dire le 14 juin dernier que près de 500 milliards d’euros auraient été engagés. Or les travaux du Sénat démontrent que moins de 60 milliards de crédits « réels » ont été débloqués,…
M. Julien Bargeton. C’est faux !
M. Patrice Joly. … soit 2,6 % de notre PIB, et ce contre une moyenne de 7 % dans les pays développés. C’est inconséquent ! C’est un manque de conscience de la réalité des besoins.
Vous trompez les Français sur l’ampleur et la réalité des moyens mis en œuvre pour lutter contre la crise économique, sociale et écologique. Vous sacrifiez certains secteurs d’activité de notre pays, en arguant faussement de la relance. Mais de quelle relance s’agit-il ? Et avec quels moyens ? Quid de la culture, du tourisme, du BTP et de tant d’autres secteurs qui n’ont toujours pas reçu de réponse politique et budgétaire satisfaisante ?
Nous assistons à des stratégies visant à faire reposer une large partie des conséquences de la crise sur les collectivités territoriales, sur les acteurs économiques et sur les Français eux-mêmes, indistinctement. Nous aurions trouvé équitable que ceux qui ont les moyens de contribuer le fassent à la hauteur de leurs capacités en revenus et en patrimoine. C’est une question financière, mais c’est aussi et surtout une question politique de cohésion sociale.
M. Julien Bargeton. Non !
M. Patrice Joly. Tel était le sens des amendements que nous avions déposés tout au long de la procédure parlementaire et qui, malheureusement, pour des raisons idéologiques, n’ont pas été retenus.
Même si nous avons, dans un premier temps, obtenu des avancées et une meilleure compensation, pour les collectivités de métropole et de l’outre-mer, des charges liées à la crise, même si nous avions obtenu de quoi sauver les autorités organisatrices de la mobilité, notamment Île-de-France Mobilités, même si nous avions obtenu une taxation plus appropriée des pure players tels qu’Amazon, afin de restaurer une concurrence loyale dans le commerce, après un confinement très déstabilisant, même si nous avions arraché le versement d’une prime « covid » aux sous-traitants travaillant dans les structures privées de santé, que le Gouvernement avait oubliées, le compte n’y était toujours pas à la fin de la première lecture sur le plan social et économique. En outre, les propositions de la Convention citoyenne pour le climat n’ont pas été prises en compte, preuve s’il en est que, en matière d’écologie, les actes du Gouvernement ne suivent pas les mots du Président de la République.
Enfin, le choix d’un financement global de ce budget par la dette, sans remise en cause d’une fiscalité avantageuse pour les Français les plus aisés, n’est pas acceptable.
Pour ces raisons, nous n’avons pas pu voter ce texte, insuffisamment amendé selon nous.
Mes chers collègues, nous sommes désormais appelés à nous prononcer sur le texte issu de la commission mixte paritaire, qui a largement remis en cause le texte voté par le Sénat, puisque, parmi tous les amendements proposés par notre groupe, un seul, qui tend à conforter le soutien des collectivités locales aux associations impactées par la crise, a été sauvé. Nous ne comprenons pas l’accord qui a été trouvé entre les deux assemblées, dès lors que de nombreux amendements adoptés à une grande majorité, voire à l’unanimité du Sénat dans sa diversité n’ont pas été retenus par la commission.
Le Sénat n’a pas joué son rôle de défenseur des collectivités et des territoires, comme en atteste le sort réservé aux articles 5 et 6 du texte portant sur les soutiens aux collectivités territoriales et aux territoires ultramarins, fortement affectés par la crise sanitaire. Je m’inquiète d’ailleurs du sort qui sera réservé à Île-de-France Mobilités, à la suite du recul de la majorité sénatoriale. D’une manière plus générale, je m’inquiète de l’incapacité du Gouvernement à comprendre le rôle que peuvent jouer les territoires dans l’accompagnement social des populations qui souffrent et souffriront et le potentiel économique et écologique de ces territoires.
Nous considérons que le seul chemin possible passe par la justice fiscale et sociale. Or, avec le budget rectificatif proposé par la CMP, le compte n’y est pas ! Nous ne pourrons pas, dès lors, voter les conclusions qui nous sont proposées. (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, point final d’une session très particulière, ces conclusions de la CMP sur le troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020 appellent quelques commentaires.
Je salue d’abord l’esprit de responsabilité des membres de la commission mixte paritaire, qui, comme lors du deuxième collectif d’avril, ont su trouver un accord sur un texte commun, préservant ainsi certains apports du Sénat, tout en garantissant une adoption consensuelle et diligente, alors que l’urgence de la situation nous intime de prendre des décisions rapides et efficaces.
Je ne reviendrai pas en détail sur les principales modifications, qui ont été présentées par les orateurs qui m’ont précédé, de ce troisième budget rectificatif, qui aggrave de nouveau le déficit public de 40 milliards d’euros par rapport au PLFR 2 voté en avril.
On peut toujours ressentir une certaine frustration à l’issue de ces examens très denses dans des délais très resserrés : je retiens en particulier les nombreuses demandes de retrait, de la part de la commission, concernant les amendements déposés par l’ensemble des groupes. Un grand nombre d’amendements – plus de mille – avaient été déposés en première lecture, mais peu ont été adoptés.
Le RDSE s’est montré particulièrement engagé tout au long de l’examen du texte, avec un nombre d’amendements s’inscrivant dans la moyenne haute du Sénat, présentés par de nombreux membres de notre groupe sur des sujets très diversifiés, à l’image de l’attention que nous portons aux nombreux secteurs touchés par la crise actuelle. Je me félicite en particulier de l’adoption par la Haute Assemblée de l’amendement présenté par mon collègue Éric Gold et l’ensemble du groupe visant à mieux informer le Parlement sur l’ampleur et les caractéristiques de la fraude au chômage partiel. Pour ce dispositif, salué à juste titre, mais dont le coût pour l’État s’élève à plus de 30 milliards d’euros, il est impératif de s’assurer de la bonne utilisation des deniers publics, par les salariés aussi bien que par les employeurs, sans préjuger la bonne foi des uns et des autres.
Si, hélas, peu de ces modifications sont restées dans le texte de la CMP, on peut tout de même se féliciter, notamment, du maintien de la suppression de l’article 4 bis, qui aurait eu des conséquences fâcheuses pour le financement des chambres de commerce et d’industrie.
Je souhaite également relayer l’inquiétude actuelle quant aux pertes de recettes des collectivités territoriales : baisse des DMTO pour les départements, de la TVA et d’autres impôts économiques pour les régions et de différentes recettes fiscales pour les communes et les intercommunalités. Je salue toutefois les mesures fortes prises par le Gouvernement, à hauteur de 4,5 milliards d’euros, pour les soutenir. Il sera difficile à court terme d’évaluer l’impact de ces aides, tant les finances locales sont un domaine complexe et les situations différentes d’une collectivité à une autre. Espérons que ces mesures suffiront !
Enfin, je ferai une remarque sur l’article 18 de ce projet de loi, relatif aux exonérations. Bien qu’il ait donné lieu à de nombreux amendements et réponde à de réelles difficultés rencontrées par les entreprises, cet article aurait eu davantage sa place dans un budget rectificatif de la sécurité sociale.
Si cette discussion est la dernière avant la suspension des travaux pendant l’été, gageons qu’elle ne sera pas, tant s’en faut, la dernière de l’année sur l’évolution de la situation économique et budgétaire. Sans anticiper le débat d’orientation qui suivra, je tiens, au nom d’un groupe engagé en faveur de la construction européenne, à saluer également l’accord historique trouvé à Bruxelles en début de semaine sur un programme de relance économique au niveau de l’Union. Bien évidemment, nous devrons suivre de près les détails de la mise en œuvre et le processus de ratification.
En conclusion, j’indique que le groupe du RDSE votera en faveur de l’adoption de ces conclusions. (Mme Colette Mélot et M. Didier Rambaud applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton.
M. Julien Bargeton. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, à mon tour de saluer le travail du rapporteur et de la commission des finances. Je me réjouis de l’accord trouvé en commission mixte paritaire.
Le rapporteur a déjà évoqué différents points de cet accord, je ne vais pas y revenir en détail.
Pour les entreprises, le seuil de 250 salariés retenu à l’article 18 me paraît de bon aloi.
Les avances remboursables pour les départements pourront être remboursées sur trois ans. Cette période a été étendue grâce au Sénat.
Notre groupe était très attaché à l’augmentation de 1 milliard d’euros de la DSIL, qui s’établira désormais à 1,6 milliard d’euros, afin de financer des équipements dans la ruralité qui relèvent normalement de la DETR. Nous avions fait adopter un amendement en ce sens, qui a été retenu en commission mixte paritaire, ce dont nous nous réjouissons.
Certes, le débat n’est pas clos pour ce qui concerne Île-de-France Mobilités. Je note tout de même que le Sénat, en changeant le mode de calcul, c’est-à-dire en prenant l’année 2019 pour référence et non plus la moyenne des trois dernières années, a ajouté 200 millions d’euros aux 450 millions d’euros introduits par Laurent Saint-Martin à l’Assemblée nationale.
M. Roger Karoutchi. Non, 400 millions d’euros !
M. Julien Bargeton. Quoi qu’il en soit, il faudra revenir sur ce sujet à l’automne, dans le cadre du plan de relance.
Que prévoit ce PLFR ? Tout d’abord, il crée un mécanisme inédit de garantie des ressources des collectivités locales à hauteur de 4,5 milliards d’euros. Cela n’avait jamais été fait auparavant, il faut le souligner. Ensuite, il renforce certaines mesures : l’activité partielle, mécanisme le plus protecteur d’Europe, représente au total 31 milliards d’euros. Autre élément important : le fonds de solidarité pour nos plus petites entreprises a été porté à 8 milliards d’euros.
La solidarité est au cœur de ce projet de loi de finances rectificative. Je citerai les 200 millions d’euros pour l’hébergement d’urgence, l’aide de 200 euros pour les jeunes de moins de 25 ans qui bénéficient de l’APL (aide personnalisée au logement), soit 400 000 d’entre eux, et l’indemnisation pour les professionnels libéraux qui auraient été contaminés par le covid et qui n’ont pas les assurances pour les couvrir. Les bourses ont également été prolongées.
Pour autant, la théorie économique nous l’enseigne, ce n’est pas le moment d’augmenter les impôts, quels qu’ils soient. Sinon, on déprime l’activité. Face à une dépression économique, la solidarité doit passer par la dépense budgétaire. C’est pourquoi de nombreuses dépenses ont été engagées : près de 30 milliards d’euros supplémentaires rien qu’avec ce PLFR.
Dotée de 435 millions d’euros, la culture devra être au cœur du plan de relance qui sera présenté fin août. Je pense à la presse et au livre ou à l’année blanche pour les intermittents du spectacle. Nous devons donc insister sur le domaine culturel.
Par rapport à ce qui a été dit par la majorité sénatoriale sur la relance, j’introduirai une nuance. Il me semblait logique d’attendre le plan européen pour que le plan de relance français s’articule avec les décisions européennes. Avec 390 milliards d’euros de dépenses budgétaires européennes, dont 40 milliards pour la France, ce n’est pas l’épaisseur du trait !
Je suis extrêmement fier de cet accord. C’est un moment historique ! On mutualise de la dette au niveau européen pour financer des subventions, c’est-à-dire de la dépense, en inventant des ressources : sur les plastiques, une écotaxe à l’entrée, la taxation des Gafam. Les choses ne sont pas évidentes, et le chemin sera encore long, mais mutualiser de la dette et payer des subventions à des États grâce à la fiscalité européenne, c’est un pas dans la construction européenne qui mérite vraiment d’être souligné. Au départ, de nombreux États membres n’étaient pas sur cette position.
Le plan de relance qui sera présenté fin août est déjà présent dans ce PLFR : 500 millions d’euros sont d’ores et déjà prévus pour l’industrie, la transition numérique et la transition écologique ; la DSIL a été abondée à hauteur de 1,6 milliard d’euros – c’est certes de l’investissement, mais c’est aussi de la relance. Il s’agit d’éléments extrêmement importants, qui nous permettront de construire l’avenir, notamment pour ce qui concerne l’emploi des jeunes, qui constitue un sujet clé. La génération qui arrive sur le marché du travail ne doit pas être une génération sacrifiée. Un bon plan de relance, c’est un plan de relance qui ne laisse aucun jeune en plan. Ainsi, 6,5 milliards d’euros ont été annoncés ce matin, sans compter les 800 millions d’euros prévus dans le cadre de ce PLFR pour l’apprentissage.
Tels sont les éléments clés et les jalons de la relance : transition écologique, transition numérique, emploi des jeunes, culture et solidarité. Même s’il y a encore du pain sur la planche, je me réjouis que nous ayons pu dépasser un certain nombre de clivages et obtenir, pour la troisième fois, un accord sur un projet de loi de finances rectificative. Notre groupe votera ce texte. (Mme Colette Mélot, M. Didier Rambaud et M. Jean-Claude Requier applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les débats de ce collectif budgétaire ont permis de confronter nos projets politiques.
La pandémie de covid-19 a rebattu les cartes avec l’irruption du fameux « quoi qu’il en coûte ». Mais c’est un euphémisme que de dire que les résultats de la commission mixte paritaire sont pour le moins décevants. Un constat s’impose néanmoins : au-delà de nos divergences politiques, la crise sanitaire a laissé la place à une crise économique et, désormais, à une crise sociale. Comment trouver les leviers pour relancer notre pays avec une économie quasiment à l’arrêt et un État qui a organisé lui-même son impuissance au gré des privatisations et des libéralisations ?
Dans le cadre de ce troisième projet de loi de finances rectificative, majorité sénatoriale et majorité présidentielle ont avancé main dans la main…
M. Roger Karoutchi. Non !
M. Pascal Savoldelli. … pour rejeter toutes les mesures de justice sociale et, surtout, fiscale que nous avions proposées.
En accord avec cette politique libérale, il est encore et toujours refusé de toucher à la fiscalité des plus aisés ou de demander des contreparties aux entreprises soutenues par l’État.
Vous avez rejeté la taxe sur les Gafam et les 150 millions d’euros visant à abonder la recherche scientifique, pourtant indispensable dans le contexte actuel. Vous avez même rejeté une mesure de lutte contre les inégalités entre les femmes et les hommes, pourtant grande cause nationale de ce quinquennat, en refusant de sanctionner les entreprises ne respectant pas l’égalité salariale par l’interdiction d’exonération de cotisations sociales.
La droite refuse de mettre à contribution les 1 % les plus riches qui accumulent des richesses indécentes, tandis que la majorité de nos concitoyens se serre de plus en plus la ceinture. Vous pouvez sourire, mais le débat sur la gratuité des masques n’est pas le fruit du hasard, mes chers collègues.
Un groupe de 83 millionnaires a rédigé une lettre, dont je vous cite un extrait : « Les chefs de gouvernement doivent prendre la responsabilité de lever les fonds dont nous avons besoin et les dépenser équitablement pour financer adéquatement nos systèmes de santé, les écoles et la sécurité via une augmentation permanente des taxes sur les plus fortunés de la planète, des gens comme nous. »
M. Éric Bocquet. Très bien !
M. Pascal Savoldelli. Je regrette que l’accord trouvé lors du sommet européen extraordinaire sur la relance de l’Union européenne, que notre Président a tant vanté, n’ait absolument pas repris cette proposition faite par les millionnaires eux-mêmes. Au contraire, on nous explique qu’il faut augmenter la CRDS et la CSG, pour les retraités, les salariés et les assurés sociaux, ou encore raboter les salaires ! Et pourquoi pas travailler plus pour gagner moins ?
Lors de la commission mixte paritaire, la droite sénatoriale et le Gouvernement sont tombés d’accord…
M. Roger Karoutchi. Non !
M. Pascal Savoldelli. … – Roger Karoutchi en est un illustre témoin –, s’ils ne l’étaient pas déjà avant.
Quand le Sénat adopte des contreparties écologiques et salariales sur les aides aux entreprises, le Gouvernement met son veto. L’argent magique est de retour, mais seulement pour les entreprises, qui conservent leur droit inaliénable à licencier et à polluer.
Monsieur le ministre, vous voulez relancer le fret ferroviaire et développer le train de nuit ? Nous disons « chiche » ! Mais pourquoi refuser de baisser la TVA sur les transports publics ? Pourquoi avoir amoindri le soutien à Île-de-France Mobilités ? Le compte n’y est pas ! Nous voulons maintenant des actes, du sonnant et du trébuchant pour aller vers la sobriété énergétique.
Pour les collectivités territoriales, les concessions de la majorité présidentielle sont insuffisantes. La clause de sauvegarde pour le bloc communal, mesure phare du plan de soutien aux collectivités, demeure incomplète. La clause de « retour à bonne fortune » concédée aux départements est un moindre mal.
Alors qu’il fallait engager 7,5 milliards d’euros pour compenser les pertes et redistribuer à tous les niveaux des collectivités territoriales, on nous propose seulement 4,5 milliards d’euros, soit 3 milliards de moins pour l’investissement et les services publics, qui pourtant bénéficient tant aux citoyens qu’aux entreprises. Il faut d’autres réponses, inédites et ambitieuses, permettant de renouer avec la proximité et la présence publique, pour assurer un partage des richesses et une redistribution basée sur la solidarité et l’unité d’une République des biens communs.
Le groupe CRCE votera contre. Quoi qu’il en soit, même si nous sommes loin des « Jours heureux », je vous souhaite sincèrement à tous des congés payés heureux ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. Julien Bargeton. La fin est bien !
M. Jérôme Bascher. C’est vrai !
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est une séquence hors du commun qui s’achève aujourd’hui.
Avec l’accord obtenu par la commission mixte paritaire sur le troisième projet de loi de finances rectificative, le Parlement a de nouveau fait preuve de responsabilité. Face à la crise, face à une situation que nul ne pouvait envisager il y a seulement six mois de cela, nous avons fait le choix collectif d’activer la solidarité nationale pour sauver notre économie, et ce par-delà les clivages partisans.
Les décisions votées au cours des trois PLFR pour 2020 sont lourdes de conséquences. Nous aurons l’occasion d’y revenir en détail tout à l’heure, lors du débat sur l’orientation des finances publiques. Je me contenterai pour l’instant de revenir sur les principales mesures introduites par le PLFR 3.
Les collectivités locales se sont enfin trouvées au cœur de nos travaux. Elles n’avaient jusqu’à présent fait l’objet que de mesures éparses et ponctuelles, alors même qu’elles prenaient les devants pour inventer des solutions aux problèmes de leurs administrés. Les réponses que nous leur apportons avec ce texte sont placées sous le signe de l’efficacité et du pragmatisme. Ces mesures permettront ainsi aux collectivités de mieux encaisser la crise économique et même de concourir activement à l’effort de relance. Je pense notamment à la clause de « retour à meilleure fortune » pour les pertes de recettes des départements. Cette disposition, introduite par le Sénat et conservée dans le texte issu de la CMP, était très attendue par les élus locaux. Il en est de même pour la possibilité laissée à certaines collectivités de procéder à des dégrèvements de CFE ou à des exonérations temporaires de taxes de séjour en 2020. Il s’agit d’un levier utile mis à leur disposition, dont elles sauront faire usage.
Je regrette à cet égard que la commission mixte paritaire n’ait pas retenu le report de la date limite pour voter de tels dégrèvements. Notre groupe avait déposé plusieurs amendements dans ce sens. C’était finalement la date du 15 septembre qui avait emporté l’adhésion de notre assemblée. Avec le retour à la date du 31 juillet, décidé en commission mixte paritaire, nous ne laissons aux collectivités guère plus qu’une petite semaine pour voter des mesures importantes à destination des entreprises et de leurs territoires. Je crois qu’un délai supplémentaire aurait été le bienvenu. Nous risquons, ce faisant, d’envoyer un message négatif aux élus locaux : ce sont les collectivités qui doivent s’adapter aux contraintes de Bercy, et non l’inverse !
Notre groupe avait également fait adopter un amendement permettant le remboursement des achats de masques réalisés par les collectivités à partir du 1er mars. Cette disposition n’a malheureusement pas été retenue dans la version finale du texte. Là encore, nous aurions pu envoyer un message positif aux élus locaux en reconnaissant leur implication dans la crise.
Au-delà des collectivités territoriales, ce troisième projet de loi de finances rectificative amplifie les mesures d’urgence pour soutenir notre économie. Elles étaient également très attendues par nos entrepreneurs. Je pense au chômage partiel, aux allégements de charges ou encore au fonds de solidarité pour les entreprises.
Le Sénat a également été à l’initiative d’une mobilisation de crédits supplémentaires pour faire face à l’urgence de la situation. Il y va ainsi des moyens alloués à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France. En tant que sénatrice d’Île-de-France, j’y suis particulièrement attentive. Je pense également aux investissements industriels, mais aussi et surtout à l’augmentation des crédits consacrés à l’apprentissage. C’est une décision stratégique que de miser sur notre jeunesse et son employabilité future.
Avant de conclure, je tiens à dire un mot d’un secteur qui souffre encore énormément de la crise. Indéniablement, la culture demeure le parent pauvre de la relance qui s’amorce à peine. Je crains que les dispositions finalement retenues ne soient encore très en deçà des attentes. Nous devrons nous en souvenir à l’automne.
En effet, ce dernier plan de sauvetage précède le plan de relance tant attendu. Au-delà de la question des véhicules législatifs adaptés, nous ne devons plus tarder pour engager vigoureusement la relance. La conclusion de l’accord européen doit nous conforter dans notre détermination. Nous avons obtenu, grâce à la solidarité de nos partenaires européens, les garanties nous permettant de ne pas revoir nos ambitions à la baisse.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, le groupe Les Indépendants approuve ce troisième projet de loi de finances rectificative. (M. Julien Bargeton applaudit.)
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Christine Lavarde. Troisième PLFR, en trois jours et trois nuits – j’espère, monsieur le ministre, que vous remarquez l’efficacité et la célérité du Sénat comparativement à celles de l’Assemblée nationale –, et troisième conclusion positive d’une commission mixte paritaire ! Cela vous montre une nouvelle fois que nous savons être constructifs et pragmatiques quand il s’agit de répondre à l’urgence économique et d’agir dans l’intérêt général.
Nous avons abouti à un texte qui ne reprend malheureusement qu’une quinzaine des deux cents mesures que nous avions votées au Sénat ce week-end. Je pense, par exemple, à l’extension de la remise de cotisations sociales à l’ensemble des entreprises de moins de 250 salariés, bien que nous déplorions que le taux de remise ne soit que de 50 % et non pas de 70 %, comme nous l’avions plaidé, pour les plus petites entreprises, celles de moins de 50 salariés. Je pense à la hausse des crédits pour le très haut débit. Je pense également à l’aide au recrutement en contrat d’apprentissage d’étudiants, qui a été étendue aux étudiants à bac+5.
Des mesures en faveur des collectivités territoriales ont également été retenues, notamment la conservation de la clause de « retour à bonne fortune », ainsi que la possibilité de financer, avec l’enveloppe de 1 milliard d’euros au titre de la DSIL, des projets en principe couverts par la DETR, afin qu’aucun projet, même les plus petits, ne reste au bord du chemin. Enfin, je ne peux manquer de citer l’élargissement de la compensation des pertes de recettes fiscales aux établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris.
Cela étant dit, il s’agit d’un accord a minima. Nous regrettons que la plupart de nos propositions n’aient pas été retenues. Quand le seront-elles ? À la lecture du Figaro d’aujourd’hui – j’invite d’ailleurs Pascal Savoldelli à s’abonner à ce journal,…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Grâce au crédit d’impôt « premier abonnement » ! (Rires.)
Mme Christine Lavarde. … car il aurait appris que des dispositifs de soutien seront votés pour soutenir la SNCF et le fret –, on apprend que, dans le cadre du plan Jeunes, la prime à l’embauche concernera les salaires jusqu’à 2 SMIC, au lieu de 1,6 SMIC. Le Gouvernement se rapproche ainsi de nos propositions, puisque j’ai défendu ce week-end dans l’hémicycle un amendement du groupe Les Républicains visant à étendre la mesure à 2,5 SMIC. Peut-être y arriverons-nous d’ici à la fin août !
La relance, c’est quand ?
M. Roger Karoutchi. Dans Le Figaro, la semaine prochaine ! (Rires.)