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Don de chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social
Adoption définitive des conclusions d’une commission mixte paritaire sur une proposition de loi
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi permettant d’offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l’épidémie de covid-19 (texte de la commission n° 589, rapport n° 588).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le 2 juillet dernier, la commission mixte paritaire est parvenue à un texte commun sur la proposition de loi permettant d’offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l’épidémie de covid-19.
Cet accord, qui est le fruit d’échanges constructifs avec notre collègue député Christophe Blanchet, auteur et rapporteur du texte pour l’Assemblée nationale, devrait nous conduire à adopter définitivement cette proposition de loi, qui vise à organiser les manifestations de générosité des Français en direction des personnels soignants mobilisés au plus fort de la crise sanitaire.
Je tiens cependant à rappeler, s’agissant de la forme, que ce texte a été inscrit à l’ordre du jour de notre assemblée par le précédent gouvernement, qui a décidé d’engager la procédure accélérée pour son examen, alors que le Parlement travaille encore dans des conditions dégradées, et qu’il nous est demandé d’adopter en urgence, dans la même période, des textes aussi importants qu’un troisième projet de loi de finances rectificative.
Au-delà de la forme, cette proposition de loi, qui répond certes à une intention généreuse, ne correspond pas – nous en sommes tous conscients – aux attentes et aux revendications des personnels soignants ; le Ségur de la santé a d’ailleurs parallèlement été négocié à cette fin.
Par ailleurs, il me semble que les moyens par lesquels nos concitoyens peuvent se montrer solidaires, notamment en donnant du temps ou de l’argent, sont suffisamment nombreux dans notre pays, et qu’il n’est pas urgent de légiférer à ce sujet.
Au demeurant, si les personnels soignants méritent très certainement notre reconnaissance, ils ne sont évidemment pas les seuls à avoir pris des risques en travaillant pendant la période de crise sanitaire. À l’inverse, certains de nos concitoyens auraient aimé pouvoir continuer à travailler, mais se sont trouvés privés de cette possibilité.
Enfin, je rappelle que nous avions été saisis d’un texte inabouti, dont tous les paramètres devaient être précisés ultérieurement, par voie réglementaire. On nous demandait donc de voter un principe, certes intéressant, sans avoir la moindre information sur les modalités de mise en œuvre envisagées.
Cependant, soucieuse de ne pas rejeter purement et simplement un texte favorable aux personnels soignants, la commission des affaires sociales, suivie par le Sénat, a réécrit ledit texte afin de le rendre plus opérationnel.
Le dispositif de don de jours de repos imaginé par les députés, qui revenait dans bien des cas à demander aux employeurs, notamment publics, d’être généreux à la place de leurs salariés ou de leurs agents, a ainsi été remplacé par un mécanisme de don concret d’une partie de la rémunération du salarié correspondant à une ou plusieurs journées de travail.
Le texte de la commission mixte paritaire qu’il vous est aujourd’hui proposé de voter est un compromis entre ces deux positions.
Il conserve les apports du Sénat tout en rétablissant la possibilité, chère à l’Assemblée nationale, mais qui nous était apparue complexe, de monétiser des jours de repos. Cette possibilité demeure soumise – et cela me semble essentiel – à l’accord de l’employeur.
Cette précision permettra de ne pas mettre en difficulté les employeurs, notamment publics, qui n’auraient pas les moyens de financer la générosité souhaitée par leurs salariés ou leurs agents.
En outre, le texte de la commission mixte paritaire permet à toute personne physique ou morale d’abonder directement ce fonds par un don financier, ce que prévoyaient aussi bien le texte du Sénat que celui de l’Assemblée nationale.
C’est là, en définitive, la manière la plus simple de contribuer à ce fonds, si bien qu’il s’agit peut-être de la disposition la plus prometteuse de la proposition de loi.
Le texte adopté en commission mixte paritaire reprend par ailleurs l’essentiel des apports du Sénat visant à encadrer le dispositif.
Pourront ainsi bénéficier des chèques-vacances les personnels des établissements et services sanitaires, médico-sociaux et d’aide à domicile ayant travaillé pendant la période du 12 mars au 10 mai 2020, qui correspond à la période de confinement de la population, et dont la rémunération est inférieure à trois fois le SMIC.
Le principe, introduit par le Sénat, de la fixation d’une date limite pour faire un don dans le cadre de ce dispositif est également maintenu.
Compte tenu de l’urgence dans laquelle le Gouvernement nous demandait de nous prononcer, nous avions fixé cette date au 31 août. La commission mixte paritaire a finalement retenu la date du 31 octobre prochain.
De même, la date butoir pour la distribution des chèques-vacances, introduite par le Sénat, est conservée. Ainsi, les sommes versées à l’Agence nationale pour les chèques-vacances (ANCV) qui n’auraient pas été distribuées sous forme de chèques-vacances au 31 décembre 2020 seront reversées au Trésor public.
Nous avons par ailleurs accepté certaines modifications du texte adopté par le Sénat. Afin de mettre en œuvre ce mécanisme de don le plus vite possible, le texte renvoie la détermination de ses modalités d’application à un décret simple au lieu d’un décret en Conseil d’État. Les modalités de répartition des chèques-vacances entre établissements seront également déterminées par décret, étant précisé qu’elles devront tenir compte des effectifs des établissements et services concernés.
Malgré notre travail de précision, on peut s’interroger sur la portée réelle du dispositif dont nous débattons. Je veux, pour ma part, lui accorder une valeur expérimentale.
C’est pourquoi la commission mixte paritaire a souhaité que le Gouvernement rende des comptes, avant le 31 mars 2021, sur les sommes qui auront été récoltées et sur la manière dont elles auront été réparties. Si ces sommes sont substantielles, tant mieux. Si elles devaient être dérisoires, il me semble que nous devrions collectivement en tirer les conséquences et, à l’avenir, y réfléchir à deux fois avant de légiférer, sous le coup, peut-être, de l’émotion.
Mme Pénicaud, à laquelle je souhaite rendre hommage, avait donné son accord en s’engageant sur ce texte et sur ce calendrier, en séance, le 16 juin dernier
Il me semble utile pour notre pays que nous puissions poursuivre ce travail dans le droit fil de l’état d’esprit de solidarité qui a originellement inspiré les auteurs de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Klinkert, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion, chargée de l’insertion. Madame la présidente, madame la rapporteure Frédérique Puissat, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureuse d’être parmi vous à l’occasion de la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire relative à la proposition de loi permettant d’offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l’épidémie de covid-19. Ce titre est long, certes, mais il résume à mon sens très bien l’esprit et l’intention de ce texte.
Je suis heureuse, d’abord, de voir consacrer une forme de solidarité essentielle, celle dont nous souhaitons témoigner envers nos soignants. Ils ont été en première ligne face au covid, et – nous le savons tous –, bien qu’ils l’aient parfois fait au péril de leur vie ou à l’épreuve de leur santé, jamais ils n’ont compté leurs heures ou économisé leur énergie. En tant qu’élue locale, j’ai eu l’occasion d’aller à la rencontre de ces femmes et de ces hommes particulièrement investis et de leur témoigner ma reconnaissance et celle de la Nation. Ils m’ont fait part de la difficulté à vivre ces moments douloureux qui les marquent à jamais.
J’ai, ce soir, une pensée pour toutes celles et pour tous ceux qui ont été frappés par la maladie, et pour toutes celles et pour tous ceux qui ont perdu un proche. Naturellement, face à l’engagement sans faille du personnel soignant, nos concitoyens ont cherché à les remercier pour leur sacrifice et pour leur engagement. Après les applaudissements, certains ont donc souhaité aller plus loin et pouvoir donner des jours de congé aux personnels soignants.
Cette proposition de loi vient justement consacrer une forme de solidarité nouvelle envers les soignants, salariés et non-salariés, du secteur public comme du secteur privé, y compris étudiants, afin qu’ils puissent eux aussi se reposer, profiter de leur famille, prendre des vacances et s’accorder des loisirs : retrouver, en somme, un peu de légèreté et, surtout, prendre un peu de temps après le tsunami qu’a représenté le virus.
Cette proposition de loi répond ainsi à une double attente, celle de nos concitoyens de créer de nouveaux mécanismes de solidarité, et celle des soignants de pouvoir en bénéficier. En ayant su entendre et traduire par la loi ces attentes fortes, le Parlement a une nouvelle fois illustré son rôle primordial de relais des préoccupations des Français et d’acteur essentiel de notre vie démocratique.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez, je suis une élue locale : cela façonne ma pensée, ma méthode et aussi mon action. Je ne peux que saluer le choix qui a été fait par le Parlement de s’inspirer d’un mécanisme qui existait déjà et qui fonctionne : celui du don de jours de repos, jusqu’alors réservé aux personnes ayant la charge d’un enfant gravement malade ou aux proches aidants. C’est là, je le crois, la clé de la réussite : s’inspirer de ce qui existe déjà et fonctionne pour le reproduire, l’élargir ou l’adapter.
Nous pouvons saluer les mécanismes complémentaires et innovants que prévoit ce texte. Afin de permettre au plus grand nombre de déclencher un don de jours de repos, le Parlement a conçu plusieurs dispositifs : don de jours de congé, d’une part – je le disais à l’instant –, mais aussi, d’autre part, mécanisme de don accessible aux particuliers qui ne pourraient pas faire don de leurs jours de repos, et don par les salariés d’une partie de leur rémunération.
Je tiens donc à saluer le travail de coconstruction – le mot est en vogue, mais ici particulièrement adéquat – du Sénat et de l’Assemblée nationale. Le texte issu de la commission mixte paritaire en est la traduction. Les dispositifs des deux chambres ont été conservés, et l’on constate aujourd’hui combien ils sont complémentaires.
Comme je l’ai dit, ce texte répond à une double attente. Pour être tout à fait précise, sans doute devrais-je dire qu’il répond en réalité à une attente supplémentaire : celle de soutenir un secteur lui aussi très durement touché par la crise, le secteur du tourisme. Le don de jours de congé étant adossé aux chèques-vacances, c’est bien un soutien au tourisme qui est proposé. Ainsi, c’est bien en faisant d’une pierre deux coups que cette proposition de loi tend à apporter des réponses à la crise sanitaire et économique que nous traversons.
Naturellement, cette proposition de loi n’a nullement vocation à se substituer aux politiques publiques, ni dans le domaine de la santé et du médico-social ni dans celui du tourisme. Ce sont bien les politiques publiques qui doivent dès aujourd’hui répondre aux difficultés structurelles de ces deux secteurs.
Personne, d’ailleurs – je le crois –, ne dirait l’inverse : l’accord majoritaire des syndicats avec le Gouvernement sur le Ségur de la santé en est le marqueur le plus clair. À l’issue de la crise, c’est un plan massif d’investissement et de revalorisation de l’ensemble des carrières qui est déployé. Nous parlons ici de 8,1 milliards d’euros qui bénéficieront à 1,8 million de professionnels.
De même, pour ce qui concerne le tourisme, le lancement du plan de soutien interministériel au tourisme annoncé le 14 mai dernier par le Premier ministre est une réponse d’une ampleur inédite apportée par le Gouvernement à ce secteur particulièrement frappé par la crise, ce plan étant crédité de 18 milliards d’euros.
La Nation, par l’hommage aux soignants voulu par le Président de la République le 14 juillet, a pu symboliquement leur témoigner sa reconnaissance. Il y avait là une première étape, essentielle à la reconnaissance de ce que nous leur devons collectivement. Les mesures prises par le Gouvernement pour répondre aux difficultés structurelles et à l’urgence représentent une seconde étape.
Je souhaite saluer le travail de Mme la rapporteure, Frédérique Puissat, et de l’ensemble des groupes parlementaires et des sénateurs sur ce texte, qui s’inscrit dans une logique d’écoute des demandes de nos concitoyens et de solidarité nationale envers nos soignants au bénéfice des acteurs du tourisme. Cette proposition de loi, j’en suis certaine, permettra de renforcer encore les liens de solidarité qui – cette crise nous l’a rappelé – sont le socle de notre société. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM, Les Indépendants, RDSE et UC.)
(M. David Assouline remplace Mme Hélène Conway-Mouret au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. David Assouline
vice-président
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier. (M. Julien Bargeton applaudit.)
M. Martin Lévrier. Madame la présidente, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi permettant d’offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l’épidémie de covid-19 s’est réunie au Sénat le jeudi 2 juillet 2020, et je me réjouis que nous soyons parvenus à un accord sur ce texte.
La force du bicamérisme réside souvent dans la complémentarité des deux chambres. Cette commission mixte paritaire en est une preuve supplémentaire.
En effet, au cours des derniers mois, au plus fort de la crise, les Français n’ont eu de cesse que d’inventer de nouvelles générosités pour apporter un soutien moral aux soignants sous pression face à l’épidémie de la covid-19. Applaudissements, livraisons de repas chauds dans les services les plus tendus des hôpitaux… : nous savons tous que ces manifestations sont allées droit au cœur des soignants.
Personnels des secteurs sanitaire et médico-social, personnels des hôpitaux, des établissements pour personnes âgées ou des services à domicile et personnels non salariés, qu’ils soient soignants ou non, ont tous multiplié les heures de travail sans prendre de repos, faute de personnel disponible pour les relever, ou, simplement, par esprit de dévouement professionnel.
C’est la raison pour laquelle nous nous réjouissons également du fait que le Gouvernement ait engagé la procédure accélérée sur cette proposition de loi, puisqu’il s’agissait de ne pas déconnecter le mécanisme ainsi proposé de la situation de crise.
Bien évidemment, j’y insiste, notre travail de législateur n’est pas de faire des lois d’émotion. Pour autant, lorsqu’une pandémie d’une ampleur sans précédent nous frappe, nous ne pouvons rester insensibles aux besoins affichés par nos concitoyens. Il n’est pas surprenant, dès lors, que des propositions de loi similaires aient émané de la plupart des travées du Parlement. Je citerai, par exemple, la proposition de loi déposée par notre collègue Édouard Courtial, ou celles qui ont été respectivement déposées par les députés Maxime Minot et Christophe Bouillon.
C’est donc dans un double objectif que l’Assemblée nationale a adopté la proposition de loi de Christophe Blanchet : faire un geste original envers le personnel soignant en offrant un ou plusieurs jours de repos sous forme de chèques-vacances et permettre aux Français qui le souhaitent de faire un geste de solidarité – c’est peut-être là l’essentiel.
La proposition de loi comportait initialement un système de don de jours de repos qui n’a pas satisfait la majorité sénatoriale, sous prétexte qu’il paraissait complexe à mettre en œuvre. Dans le texte qui résulte des travaux du Sénat, il n’était donc plus question de don de jours de repos, mais de don d’une partie de la rémunération du salarié correspondant à un ou plusieurs jours de travail : en d’autres termes, une retenue sur salaire. Et la majorité sénatoriale n’a pas accédé au souhait de notre groupe de réintroduire le système de don de jours de repos pour laisser au salarié une liberté de choix.
La possibilité pour toute personne de faire un don financier à l’Agence nationale pour les chèques-vacances a en revanche été conservée. Il est en outre précisé qu’un accord d’entreprise pourra prévoir un abondement de la part de l’employeur.
Je ne reviendrai pas sur toutes les précisions qui ont été apportées au cours de la navette parlementaire ou par la commission mixte paritaire, mais je tiens à rappeler que nous avons délimité dans le temps la période durant laquelle les personnels devront avoir travaillé pour bénéficier des chèques-vacances – il s’agit de la période du confinement, entre le 12 mars et le 10 mai. En outre, nous avons fixé une date butoir avant laquelle les chèques-vacances devront avoir été distribués, en l’occurrence le 31 octobre 2020, et réintroduit le don de jours de repos, offrant ainsi deux possibilités plutôt qu’une au salarié et à l’employeur – nous nous réjouissons que cette alternative ait finalement été intégrée : elle contribue à l’ouverture du dialogue social dans l’entreprise.
Bien entendu, cette proposition de loi n’est en aucun cas destinée à se substituer aux politiques publiques qui visent à apporter une réponse pérenne aux difficultés structurelles des secteurs de la santé et du médico-social. Est-il nécessaire de rappeler les chantiers engagés avant la crise sanitaire via le plan Ma santé 2022 ?
Est-il nécessaire de rappeler, une semaine après la signature des accords sur les salaires avec les syndicats, les propositions dévoilées hier matin par le Gouvernement, à l’occasion de la clôture du Ségur de la santé, pour améliorer le fonctionnement et l’organisation du système de soins ?
Près de 2 millions de personnels sont concernés par les revalorisations salariales, dont plus de 1,5 million de professionnels non médicaux dans les hôpitaux publics, les Ehpad et les structures privées à but non lucratif.
Concrètement, la revalorisation « socle » prévoit une hausse de 183 euros nets mensuels pour les professionnels de l’hôpital et des Ehpad publics, hors médecins. L’accord prévoit également une refonte des grilles salariales de la fonction publique qui portera la revalorisation à plus de 200 euros nets mensuels. Une évolution plus dynamique des carrières est ainsi prévue.
Le Premier ministre s’est également engagé sur le recrutement de 15 000 postes, ce qui n’est pas anodin.
L’accord signé avec les médecins hospitaliers porte sur une enveloppe globale de 450 millions d’euros. Cette enveloppe servira essentiellement à doubler l’indemnité de « service public exclusif » versée aux praticiens qui s’engagent à ne travailler que dans les hôpitaux publics. Cette indemnité est aujourd’hui de 490 euros bruts par mois. Elle passera à 1 010 euros pour tous les praticiens éligibles, en deux temps.
Quant aux internes, ils vont bénéficier d’une enveloppe de 124 millions d’euros ainsi que de mesures visant à assurer un meilleur respect de leur temps de travail. Cette enveloppe, qui permettra d’améliorer les indemnités versées aux jeunes praticiens, répond à une revendication de longue date des futurs médecins.
Mes chers collègues, les trente-trois grandes orientations du Ségur de la santé, présentées hier, trouveront bientôt une traduction réglementaire et législative, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale de cet automne notamment.
Si de nombreux défis doivent encore être relevés, le cap ambitieux qui a été choisi doit être accompagné ! Notre groupe sera à la hauteur du moment.
Vous l’aurez compris : cette proposition de loi ne saurait en rien se substituer à la réforme profonde du système de santé engagée par le Gouvernement. Elle n’est qu’un « plus », qui permet de lier les Français à ceux qui les ont soutenus durant ces derniers mois. (M. Julien Bargeton applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, alors que le Gouvernement vient de dévoiler le second volet des mesures du Ségur de la santé, nous considérons que les annonces ne sont pas à la hauteur des attentes.
Le Gouvernement a annoncé 2 milliards d’euros sur cinq ans pour la transformation, la rénovation et l’équipement des établissements médico-sociaux, c’est une première étape nécessaire, mais insuffisante pour rattraper le retard accumulé.
Le Premier ministre a promis une augmentation de salaire des personnels des hôpitaux et des Ehpad publics de l’ordre de 183 euros nets mensuels.
Nous sommes bien loin du rattrapage et de la reconnaissance attendus, et en deçà des 300 euros réclamés par tous les syndicats pour que la France ne soit plus la mauvaise élève de l’OCDE.
Cette augmentation ne sera d’ailleurs pas immédiate puisqu’elle devra encore être votée lors du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021. En attendant, le ministre de la santé a annoncé la création de 15 000 postes alors que les syndicats des hospitaliers chiffrent les besoins à 100 000 postes. C’est un premier pas, mais nous sommes encore loin de la reconnaissance des personnels des secteurs sanitaire et médico-social pour leur engagement au quotidien, particulièrement durant la crise du covid-19.
Mais nous sommes également encore loin du choc d’attractivité dont a besoin l’hôpital. Comme je l’avais indiqué en première lecture, les personnels manquent non pas de congés, mais d’effectifs pour pouvoir poser des jours !
Les personnels ne demandent pas la charité, ils souhaitent simplement pouvoir se reposer en utilisant leurs propres jours de congé. Pour y parvenir, il faut avoir des collègues et pas des postes vacants.
La commission mixte paritaire a trouvé un accord sur la proposition de loi en retenant la rédaction de la droite sénatoriale, pourtant très différente de celle de la droite de l’Assemblée nationale.
Désormais, nous ne parlons pas d’un texte qui permet les dons de jours de repos, mais d’un texte qui permet les dons de journées de travail. La différence n’est pas neutre, surtout quand on examine dans moins d’une heure un texte sur la dette sociale et la création d’une branche relative à la perte d’autonomie.
Le don de journées de travail existe déjà puisque tous les travailleurs, à l’occasion de la journée de solidarité, ont le choix entre donner à leur employeur une journée de travail ou donner une partie de leur salaire au profit du financement des retraités. Disons-le tout de suite, notre groupe s’était opposé à la création de la journée de solidarité. Nous nous opposerons à d’éventuelles tentatives d’ajouter des mardis ou des mercredis de Pentecôte ! (Sourires.)
En tout état de cause, le fait pour un salarié de pouvoir donner une partie de son salaire ou des jours de repos est une fausse solidarité. C’est une aide entre travailleurs et cela s’appelle le syndicalisme. Si cela peut sembler bien curieux pour la droite sénatoriale, nous sommes, pour notre part, habitués à soutenir les caisses de grève des salariés en lutte pour leurs droits.
La véritable solidarité, c’est lorsque des personnes aux intérêts divergents s’unissent. En ce qui concerne les personnels médicaux ou paramédicaux, une véritable solidarité pourrait s’imaginer si les directeurs d’établissements, les actionnaires des groupes privés ou les Ehpad privés acceptaient de reverser leurs primes ou bénéfices aux personnels.
Cela n’étant pas le cas, nous ne referons pas les débats sur une proposition de loi dont le seul intérêt est de faire retourner l’argent au 31 décembre 2020 dans les caisses des finances publiques où il pourra véritablement servir l’intérêt général.
Par conséquent, notre groupe votera contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – M. Bernard Jomier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « on ne peut pas, sous prétexte qu’il est impossible de tout faire en un jour, ne rien faire du tout » écrivait l’abbé Pierre, dont la sagesse n’avait d’égale que l’humilité. La proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui pour approbation est une belle illustration de cette phrase.
Ce texte modeste, mais utile, vise à proposer à chaque salarié volontaire d’offrir des jours de congé sous la forme de chèques-vacances aux soignants et aux personnels médico-sociaux qui ont démontré leur engagement au service de la santé des Français durant la période de confinement.
Si ces dispositions ne vont pas révolutionner la vie des soignants, peut-être permettront-elles d’améliorer à la marge leur pouvoir d’achat. Il s’agit d’un geste de solidarité individuelle, qui ne saurait en aucun cas se substituer à la solidarité nationale ni aux mesures gouvernementales.
Ces dispositions proviennent d’une initiative citoyenne qu’il convient de rappeler. Le 20 mars dernier, le groupe Pasteur Mutualité a lancé la campagne « Je donne mes RTT » sur les réseaux sociaux, s’inspirant du dispositif existant pour les proches aidants.
La proposition de loi vise à traduire dans notre législation une pratique inaugurée par un certain nombre d’accords d’entreprises depuis le début de l’épidémie.
Ces initiatives sont de deux ordres : d’une part, une solidarité interne, permettant aux salariés de s’entraider au sein d’une même entreprise pour réduire les conséquences de l’activité partielle ; d’autre part, une solidarité externe qui s’exprime par le don de jours de repos monétisés puis reversés à des associations de soutien aux soignants.
Or le cadre législatif actuel dû, notamment, à l’initiative de deux députés du Nord, Paul Christophe et Guy Bricout, se limite au don de jours de congé monétisés aux parents d’un enfant gravement malade et à un proche aidant.
Dès lors, il s’agit d’accompagner le volontarisme d’un certain nombre d’entreprises en adaptant notre législation, de façon provisoire, à la situation d’exception que nous avons traversée ces derniers mois. Si la loi n’a pas vocation à être le réceptacle de mesures provisoires, il me semble qu’elle ne doit pas faire obstacle aux initiatives citoyennes. Dans un contexte de fortes tensions économiques, il serait inconvenant de décourager les élans de solidarité individuelle.
C’est pourquoi notre groupe se félicite du succès de la commission mixte paritaire, réunie en urgence le 4 juillet dernier. Nous saluons le travail réalisé pour préserver les avancées apportées par le Sénat tout en maintenant dans la loi le dispositif de dons de jours de congé proposé initialement par l’auteur de ce texte, le député Christophe Blanchet.
Dans une démarche constructive, la commission des affaires sociales du Sénat a proposé, en première lecture, de réécrire l’article 1er pour remplacer le don de jours de congé par le versement d’une partie de la rémunération du salarié correspondant à une ou à plusieurs journées de travail. Le dispositif final a préservé l’esprit initial de la proposition de loi en conjuguant les deux possibilités de don, sous forme de jours de congé et sous forme d’un montant correspondant à la rémunération perçue au titre d’une ou de plusieurs journées de travail.
Le Sénat a également proposé de borner le dispositif dans le temps, posant l’échéance du 31 août de façon à circonscrire les dons au plus près de la période de confinement. La commission mixte paritaire a préservé ce bornage temporel tout en étendant l’échéance de versement des dons au 31 octobre 2020, ce qui me semble être un bon compromis pour laisser le temps aux salariés de s’approprier le dispositif.
Enfin, il a été convenu de renvoyer les modalités de la répartition des dons à un décret simple afin d’accélérer l’application de la loi. Les principales avancées du Sénat sont maintenues tout en préservant l’esprit du texte initial. Nous voterons donc les conclusions de la commission mixte paritaire.