Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, auteure de la question n° 1040, adressée à M. le secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports.
Mme Nicole Bonnefoy. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur l’importance du trafic poids lourds, plus particulièrement celui en transit sur la RN10 entre Poitiers et Bordeaux.
Certains de ces poids lourds ne respectent ni les distances de sécurité, ni l’interdiction de doubler, ni la limitation de vitesse, au point que les routiers eux-mêmes disent prendre un risque pour leur vie et celle des automobilistes.
À l’insécurité routière s’ajoutent la pollution sonore ainsi que la pollution de l’air et des sols, si bien que les agriculteurs, soucieux de produire de la qualité, sont contraints de cultiver à plus de 300 mètres de la RN10 et à plus de 500 mètres pour les cultures bio, compte tenu des métaux lourds retrouvés dans les sols.
Au regard des conséquences de ce trafic sans cesse grandissant en termes de sécurité routière, sanitaire, environnementale, sociale et économique, sans oublier le coût d’entretien de la chaussée et la mobilisation des forces de l’ordre, plus de 7 000 personnes ont signé une pétition citoyenne demandant que les poids lourds en transit empruntent l’autoroute A10 adaptée à ce trafic et non plus la RN10. Par ailleurs, 126 communes ont délibéré dans le même sens.
Vous le savez, monsieur le secrétaire d’État, l’autoroute A10 est parallèle à la RN10. Les poids lourds en transit quittent cette autoroute et traversent notamment mon département de la Charente en empruntant la RN10, ce afin d’économiser une cinquantaine d’euros de péage.
Une telle situation n’est ni tenable ni acceptable. Le 19 novembre dernier, Mme la ministre Élisabeth Borne, que j’interpellais sur ce sujet, me répondait qu’« il fallait se préoccuper des poids lourds en transit pour faire en sorte qu’ils n’aient pas la tentation d’emprunter des itinéraires gratuits ».
Ma question est simple : que comptez-vous faire, monsieur le secrétaire d’État, pour régler ce problème ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports. Madame la sénatrice, la restriction complète sur la route nationale 10 entre Poitiers et Bordeaux du trafic de poids lourds serait contraire au principe de libre circulation des marchandises sur le réseau structurant national. Vous le savez, la jurisprudence du Conseil d’État est constante sur ce point, afin de garantir un principe fort de la réglementation européenne.
Pour autant, les services de l’État chargés du contrôle sont mobilisés sur le terrain pour assurer le respect des réglementations applicables au transport routier, afin de prévenir les risques de surcharge. Il s’agit de contrôler notamment le temps de conduite et de repos des chauffeurs, ainsi que le respect de leurs conditions de travail.
Le Gouvernement entend donc prendre des mesures d’amélioration des infrastructures. Une telle politique est mise en œuvre sans porter préjudice aux concertations qui pourraient intervenir à l’avenir.
De nombreuses opérations de sécurisation de cet axe ont d’ores et déjà été engagées : la mise en service de la 2x2 voies entre Reignac et Chevanceaux ; l’étude du remplacement de six carrefours dans la Vienne par des échangeurs dénivelés avec mise à 2x2 voies dans le secteur de Croutelle ; l’étude de la suppression des derniers carrefours en Charente, notamment sur la commune de Mansle ; le diagnostic de sécurité sur la rocade d’Angoulême, en vue d’améliorer, dès 2020, les modalités d’information des usagers de la route, en particulier sur les congestions récurrentes et les risques d’accidents ; enfin, le diagnostic de sécurité sur la section entre Virsac et Angoulême.
Au regard de ces nombreux projets d’amélioration de l’infrastructure routière, le Gouvernement va demander à la préfète de la région Nouvelle-Aquitaine de s’assurer que chaque calendrier d’opération soit respecté au mieux.
Par ailleurs, le Gouvernement mandatera la préfète de la Charente, afin que des dispositifs de contrôle fixes et mobiles soient déployés de façon privilégiée sur cet axe, de manière à renforcer la répression contre les poids lourds qui ne respecteraient pas les différentes réglementations.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour la réplique.
Mme Nicole Bonnefoy. Je connais, monsieur le secrétaire d’État, les investissements réalisés pour améliorer la RN10. Je sais aussi, parce que je l’ai déjà entendu, que l’interdiction des poids lourds serait contraire au droit européen en matière de libre circulation des biens et des marchandises. En revanche, des dérogations ou des expérimentations sont possibles, et il faut y travailler ensemble.
La préfète de région, que j’avais interrogée sur ce sujet, était tout à fait favorable à l’étude d’une expérimentation ou d’une dérogation.
Je vous le répète, 7 000 personnes ont signé la pétition en question, dont 140 maires. Il y a donc là un vrai problème, qui va grandissant, y compris concernant la sécurité. Faut-il attendre qu’il y ait des morts pour que la situation évolue ?
Enfin, dans la loi LOM (loi d’orientation des mobilités), vous avez donné la possibilité, sur des routes départementales ou nationales, de créer des voies propres. Très bien, mais nous serions exclus de la politique de transition écologique ! En effet, jamais nous ne pourrons dédier tout ou partie de la RN10, qui est uniquement consacrée aux poids lourds, à une voie propre.
C’est un vrai problème, que je souhaite évoquer avec vous, à l’extérieur de l’hémicycle si vous le voulez, en prenant un rendez-vous. Certains de mes collègues rencontrent les mêmes difficultés, il convient donc de trouver une réponse.
abus de faiblesse liés à la généralisation de la signature électronique à distance
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, auteure de la question n° 977, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances et du ministre de l’action et des comptes publics, chargé du numérique.
Mme Corinne Imbert. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question concerne les abus de faiblesse liés à la généralisation de la signature électronique à distance.
Ce phénomène est principalement constaté dans le secteur des assurances. En effet, un contrat d’assurance peut être souscrit en quelques minutes par téléphone après la simple expression du consentement.
Ce dernier se matérialise généralement par un code reçu par SMS qu’il faut répéter à voix haute au courtier ou encore par une touche de téléphone sur laquelle il faut appuyer. Nous en conviendrons tous, cette spécificité accordée aux assurances est pratique lorsqu’il s’agit d’assurer dans l’urgence sa nouvelle voiture. Mais force est de le constater, elle est bien souvent utilisée à mauvais escient. Ce type de vente est souvent expéditif, afin que le client n’ait pas le temps de prendre la mesure de la situation.
Les personnes isolées, en particulier les personnes âgées et les personnes handicapées, sont bien souvent démunies face à des professionnels de la vente qui n’hésitent pas user de tous les stratagèmes possibles afin de parvenir au plus vite à la signature d’un contrat aux modalités hasardeuses. Bien souvent, ces personnes ne réalisent pas qu’elles viennent de souscrire à un contrat d’assurance, ce qui rend la tâche des familles qui les accompagnent bien plus difficile que dans le cas d’un simple démarchage, en porte-à-porte.
Ainsi, le délai de rétractation de 14 jours n’est souvent pas suffisant pour débusquer la supercherie. Sur la seule année 2018, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a contrôlé 92 entreprises et en a épinglé 27. Dans la plupart des cas, les démarcheurs recourent à des allégations mensongères, afin de recueillir l’accord verbal du consommateur ou obtenir la signature électronique du contrat.
Ma question sera la suivante, madame la secrétaire d’État : au regard des nombreux cas constatés d’arnaques et de ventes forcées, en particulier auprès des personnes âgées ou handicapées, je souhaiterais connaître les intentions du Gouvernement concernant la lutte contre ce phénomène inquiétant.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Madame la sénatrice Corinne Imbert, vous avez raison, cette pression téléphonique est insupportable pour nos concitoyens, en particulier pour les personnes âgées.
C’est pourquoi le Gouvernement a manifesté à plusieurs reprises sa volonté de renforcer la protection des consommateurs contre les pratiques de démarchage téléphonique abusif et intrusif.
Il a ainsi demandé au Conseil national de la consommation (CNC) d’établir un état des lieux des pratiques de démarchage téléphonique et de proposer des mesures pour mieux lutter contre les appels téléphoniques non sollicités et la fraude auxquels ils peuvent donner lieu, qu’il s’agisse de numéros surtaxés ou de contrats non souhaités.
Les travaux du CNC, qui se sont déroulés de septembre 2018 à janvier 2019 dans le cadre d’un groupe de travail dédié, ont fait l’objet d’un rapport qui a été diffusé le 22 février 2019. Ce dernier a nourri les travaux sur ce sujet, en particulier la proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux. Ce texte a fait l’objet d’un premier examen par l’Assemblée nationale le 6 décembre 2018, puis par le Sénat le 21 février 2019. Il sera examiné de nouveau par l’Assemblée nationale à la fin du mois.
Parallèlement, nous avons sollicité le CCFS (Comité consultatif du secteur financier) sur le cas particulier des contrats d’assurance, pour lesquels – c’est un élément qui était remonté dans le cadre de l’analyse effectuée avec la DGCCRF et le CNC – le simple démarchage téléphonique permet d’aboutir à la signature d’un contrat.
Le CCFS et, donc, les professionnels des assurances se sont engagés à ce qu’il ne puisse plus y avoir de signatures de contrats d’assurance par le simple enchaînement de décisions non tracées. Ils se sont donc engagés à respecter un minimum de formalisme, par le biais d’un écrit validant la décision de signature d’un contrat d’assurance.
Sur la base de ces éléments, nous poursuivrons le dialogue avec l’Assemblée nationale, en nous assurant que l’engagement pris par la profession est clairement respecté.
Vous avez raison, madame la sénatrice, il n’est pas légitime qu’un accord sur un sujet aussi complexe qu’un contrat d’assurance soit obtenu sans traçabilité écrite permettant de réagir dans le cadre de la protection des consommateurs.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour la réplique.
Mme Corinne Imbert. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de votre réponse. Je me réjouis que la proposition de loi que vous venez d’évoquer soit examinée de nouveau par l’Assemblée nationale. J’espère que l’engagement pris par les professionnels sera respecté. La traçabilité écrite, qui est indispensable pour la sécurité et le respect des personnes, lesquelles ne doivent pas être abusées à longueur de semaine, doit faire l’objet d’un suivi par vos services.
D’aucuns pourraient dire que les personnes victimes de ces agissements le sont « à l’insu de leur plein gré » ; c’est bien là tout le problème. Il faut vraiment une traçabilité écrite, car le public dont il est question est fragile et les appels téléphoniques incessants deviennent insupportables. Je sais que ma collègue Catherine Deroche s’apprête à vous interpeller sur ce sujet juste après moi.
démarchage téléphonique abusif
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Deroche, auteure de la question n° 1022, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
Mme Catherine Deroche. Madame la secrétaire d’État, ma question s’inscrit dans le prolongement de celle de Corinne Imbert et concerne en effet le démarchage commercial par téléphone.
Depuis plusieurs mois, chacun le constate au quotidien, nous assistons à une explosion du nombre d’appels non sollicités, qui s’apparente à une forme de harcèlement. Le phénomène a pris une ampleur exponentielle concernant les opérateurs téléphoniques mandatés par diverses sociétés exploitant des listings commerciaux pour joindre les occupants – principalement les propriétaires – de maisons individuelles qui pourraient bénéficier de travaux d’isolation à 1 euro.
En juin dernier, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a dû émettre une mise en garde à destination du public français à l’encontre de sociétés peu scrupuleuses cherchant à profiter de ce dispositif très utile.
Ces correspondants opèrent, la plupart du temps, depuis des plateformes basées à l’étranger, avec des numéros qui ne s’affichent pas ou ne peuvent être rappelés. C’est le cas pour les téléphones fixes, mais aussi, désormais, les téléphones portables. Parfois, des numéros commençant par 06 s’affichent, ce qui fait qu’on ne s’attend pas à un démarchage.
Je le sais pour l’avoir mis en place à titre personnel, le dispositif Bloctel ne fonctionne pas.
Certes, une proposition de loi est en cours d’examen par le Parlement. Pour autant, pourriez-vous, madame la secrétaire d’État, nous apporter des précisions sur ce sujet ? En effet, certains de nos concitoyens, à cran, développent une forme d’agressivité dans le cadre de ce type d’appels, qui peuvent se répéter jusqu’à quatre fois en une heure.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Madame la sénatrice Catherine Deroche, votre question s’inscrit effectivement dans le prolongement de celle qu’a posée Mme Imbert.
Nous nous sommes engagés à réduire le nombre d’appels téléphoniques non souhaités, dont il s’avère qu’ils ne respectent pas le droit. Notre difficulté est donc non pas de renforcer la législation, déjà assez dure, concernant l’autorisation des appels, mais de poursuivre les personnes ne la respectant pas.
C’est la raison pour laquelle nous avons travaillé sur un texte qui permettra notamment de renforcer un certain nombre de sanctions. Il autorisera également l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse) à se saisir d’un contrôle s’agissant des numéros n’apparaissant pas directement, afin d’agir avec les opérateurs téléphoniques concernant les intervenants peu scrupuleux. Tel est le cas dans le cadre du plan de lutte contre la fraude à la rénovation thermique. En effet, la DGCCRF a recensé une augmentation de 20 % du nombre de plaintes pour fraude en la matière.
Nous voulons mener ce combat. Nous traiterons ce sujet le 30 janvier prochain à l’Assemblée nationale, dans le cadre de l’examen en deuxième lecture de la proposition de loi que j’ai évoquée.
En 2019, 1 000 établissements ont été contrôlés et 70 démarcheurs ne respectant pas le dispositif Bloctel ont été sanctionnés par des amendes, dont le montant total a atteint 2,3 millions d’euros. Ces amendes seront renforcées, ce qui devrait contribuer à rendre très désagréable, pour les auteurs de ces appels, le fait de démarcher téléphoniquement nos concitoyens.
De la même manière, nous avons généralisé, à ma demande, le name and shame, afin de rendre les Français plus attentifs. Nous diffusons un certain nombre de conseils dans le cadre d’une campagne de sensibilisation aux bons réflexes face aux actes de démarchage téléphonique ou physique, pour ce qui concerne les thématiques complexes de la rénovation thermique.
Nous avons également saisi le CNC (Conseil national de la consommation) sur le démarchage téléphonique dans le cadre de la rénovation thermique, et nous devrions avoir un retour dans quinze jours.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour la réplique.
Mme Catherine Deroche. Nous allons donc attendre l’inscription à l’ordre du jour de ce texte, madame la secrétaire d’État.
Je le souligne, les opérateurs se présentent souvent au nom du conseil régional, du conseil départemental ou du ministère, leur discours étant toujours très ambigu. La mise en place d’un indicatif pour cibler le démarchage publicitaire pourrait apporter un certain nombre de solutions, puisque nous pourrions ainsi éviter de répondre en permanence à des gens avec lesquels nous ne souhaitons pas entrer en communication.
états-unis et taxe sur les vins français
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Laurent, auteur de la question n° 959, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Daniel Laurent. Madame la secrétaire d’État, en octobre dernier, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) permettait aux États-Unis de prendre des sanctions contre des biens européens, dans le cadre du conflit sur les subventions accordées à Airbus.
Début décembre, les États-Unis ont formulé de nouvelles menaces, à savoir des sanctions visant à imposer de nouveaux droits de douane additionnels jusqu’à 100 %. Était en cause le projet de taxe sur les géants du numérique. Les vins pétillants, dont le champagne, épargnés par les premières sanctions, seraient également concernés, ce qui représente 700 millions d’euros supplémentaires.
Le chiffre d’affaires réalisé sur le marché américain s’est élevé à un milliard d’euros en 2018. Sur les six premiers mois de 2019, les exportations étaient en hausse de 10 % en valeur et de 2 % en volume. Or, depuis bientôt trois mois, la profession enregistre une chute drastique des importations américaines, de l’ordre de 30 % en valeur, sur les vins en bouteilles, par comparaison avec le mois de novembre 2018.
Les exportateurs ont réduit leurs marges, mais ils redoutent de perdre des parts de marchés qui seront difficiles à reconquérir, d’autant que ces mesures entraîneront des distorsions de concurrence.
Le 16 décembre dernier, lors du Conseil Agriculture et pêche à Bruxelles, le ministre de l’agriculture a demandé à la Commission de renforcer les soutiens à la filière vitivinicole. Si les mesures proposées vont dans le bon sens, elles demeurent insuffisantes pour faire face aux conséquences directes pour la filière.
En conséquence, qu’en est-il de la mise en œuvre d’un fonds de compensation des mesures d’aides à la promotion ou de la résolution du conflit avec les États-Unis ? Le 6 janvier dernier, M. Bruno Le Maire a une nouvelle fois appelé les États-Unis à la raison. Toutefois, pour l’heure, on ne constate aucun effet.
Madame la secrétaire d’État, il y a urgence à agir, afin de ne pas fragiliser l’ensemble de la filière, victime d’un conflit qui ne la concerne pas. (M. Antoine Lefèvre applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Monsieur le sénateur Daniel Laurent, dans le conflit opposant les États-Unis et l’Union européenne au sujet des subventions accordées à Airbus, l’OMC a tranché et autorisé les États-Unis à appliquer des sanctions à l’encontre de biens européens importés sur leur territoire.
Dans la mesure où il est vraisemblable que l’OMC sanctionne aussi, dans quelques semaines, les produits américains importés en Europe, pour des subventions accordées à Boeing, l’Union européenne a d’abord tenté de négocier avec les États-Unis, pour éviter une escalade de sanctions qui mette à mal l’économie de nos territoires respectifs.
Ces négociations continuent d’être menées de manière intense, pour limiter au maximum dans le temps l’application de ces taxes sanctions. Néanmoins, depuis le 18 octobre dernier, les États-Unis ont effectivement appliqué, ce que nous regrettons vivement, leur droit de sanctions.
Pour la France, les produits les plus touchés sont les vins tranquilles en deçà de 14 degrés conditionnés dans des contenants de moins de 2 litres, auxquels est imposée une taxe additionnelle de 25 %.
Toutes les régions viticoles françaises sont visées, à hauteur de 306 millions d’euros annuels. Les exportations françaises aux États-Unis des vins taxés ont représenté 25 % de l’ensemble des exportations européennes de vins vers les États-Unis.
Pour aider au plus vite la filière, injustement frappée et en difficulté, le Gouvernement a immédiatement mis en œuvre des mesures de soutien : doublement du budget de la promotion business to consumer des vins français développés aux États-Unis et dans plusieurs autres pays stratégiques, notamment en Asie, dans le cadre de la concession de service public Sopexa ; renforcement des actions de promotion business to business conduites par Business France, notamment sur les indications géographiques et les appellations d’origine contrôlée ; opérations collectives de promotion à l’export sur 38 marchés à potentiel en 2020 ; mise en œuvre de mesures de bienveillance concernant des délais de paiement ou des remises et de l’assurance prospection portée par Bpifrance.
Au-delà des mesures nationales, c’est bien sûr au niveau européen que doit se porter le soutien le plus fort. Ainsi, à notre demande, l’Union européenne a déjà accordé diverses mesures de souplesse et de simplification des fonds de promotion. Mais la France, notamment par la voix de Didier Guillaume, continue de solliciter, lors de chaque Conseil européen de l’agriculture, la mise en place d’un mécanisme européen de compensation de pertes constatées, et demande la levée des barrières non tarifaires pour faciliter l’export vers d’autres pays tiers, notamment le Canada, le Japon et la Corée du Sud.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Laurent, pour la réplique.
M. Daniel Laurent. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de votre réponse, ainsi que des mesures de soutien à la filière. Certes, nous sommes favorables à la négociation. Pour autant, vous n’êtes pas sans savoir que, si on perd des marchés, on ne les retrouve pas toujours. Vous n’êtes pas non plus sans savoir combien pèsent, positivement, dans la balance du commerce extérieur, les vins et spiritueux.
Il est donc urgent de trouver une solution, faute de quoi la situation deviendra dramatique pour cette filière économique française.
financement des services d’aide et d’accompagnement à domicile en lot-et-garonne
Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, auteur de la question n° 961, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question porte sur le financement des structures d’aide et d’accompagnement à domicile.
Je pensais que la fameuse loi Grand âge serait le grand soir des financements. Or je m’aperçois que nous sommes toujours dans les petits matins précaires des renoncements.
Les structures d’aides à domicile sont en effet désemparées : elles refusent de s’habituer à des effets d’annonces non suivies de résultats dans des délais raisonnables. La situation est pourtant désastreuse et alarmante : alors que 600 millions d’euros sont nécessaires pour rattraper le retard et améliorer un contexte tendu, seuls 50 millions d’euros ont été octroyés en 2019, 50 autres millions étant promis pour 2020, soit deux fois moins que ce qui avait été prévu en 2018.
En Lot-et-Garonne, les tarifs horaires appliqués pour les structures d’aide et d’accompagnement à domicile sont toujours fragiles et évidemment non pérennes : 20,73 euros pour un prix de revient de 21 euros. Dans le même temps, les 520 000 euros fléchés en 2019 posent question : le département ne se prononce pas pour 2020, les conditions d’attribution à remplir par le biais des appels à candidatures étant toujours inconnues. Imaginez le désarroi de toutes ces structures et de leur personnel !
À quand une réforme ambitieuse de la tarification des services d’aide à domicile ? À quand une remise à plat des modèles d’intervention ? À quand un financement à la hauteur des enjeux, alors qu’il faut treize ans à un intervenant à domicile pour être rémunéré légèrement au-dessus du SMIC ?
Madame la secrétaire d’État, quand pourrons-nous espérer passer des promesses, des commissions et des rapports aux actes réels, responsables et immédiats ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, vous appelez l’attention du Gouvernement sur le financement des services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD).
Le financement des SAAD relève de la compétence des conseils départementaux. Le décret n° 2019-457 du 15 mai 2019, pris pour l’application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, vise à préfigurer un nouveau modèle de financement des SAAD, afin d’assurer l’accessibilité financière et géographique des services pour les bénéficiaires, de permettre une plus grande équité de traitement, de rendre l’offre plus lisible, d’assurer une meilleure transparence tarifaire, et de mieux maîtriser les restes à charge pour les usagers.
Le modèle rénové que nous envisageons repose sur un tarif de référence nationale applicable à tous les SAAD, et un complément de financement appelé « modulation positive ».
Dans le cadre de la préfiguration de ce nouveau modèle de financement, la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie) a fixé la répartition de l’enveloppe de 50 millions d’euros entre les départements concernés, dont 520 000 euros pour le Lot-et-Garonne, et les modalités de leur versement.
Il appartient aux départements de répartir ces crédits entre les SAAD retenus dans le cadre d’un appel à candidatures et dont le cahier des charges a été précisé dans le décret. Les critères de sélection des candidatures portent notamment sur le profil des personnes prises en charge, l’amplitude horaire d’intervention et les caractéristiques du territoire d’intervention, afin de renforcer l’attractivité des métiers du secteur.
La détermination du montant de la dotation complémentaire allouée aux SAAD à l’issue de l’appel à candidatures relève de la négociation entre le département et les SAAD lors de la signature du CPOM (contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens) ou d’un avenant à ce contrat.
Les départements bénéficiaires de ces crédits devaient transmettre à la CNSA les données relatives à l’utilisation des crédits au plus tard le 15 octobre 2019.
Concernant les ARS (agences régionales de santé), leurs seuls financements qui pourraient intervenir en faveur des SAAD seraient les financements alloués dans le cadre de l’accompagnement à la constitution d’un service polyvalent d’aide et de soins à domicile, regroupant les services d’aide et d’accompagnement à domicile et les services de soins infirmiers à domicile.
Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour la réplique.