M. le président. Je mets aux voix l’article 76 quindecies.

(L’article 76 quindecies est adopté.)

Article 76 quindecies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2020
Culture

Article additionnel après l’article 76 quindecies

M. le président. L’amendement n° II-1090, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 76 quindecies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article 40 de la loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000 d’orientation pour l’outre-mer, après le mot « Saint-Martin », sont insérés les mots : «, de Wallis-et-Futuna, de Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française ».

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annick Girardin, ministre. Le Febecs a pour objet d’aider les jeunes des territoires d’outre-mer à se déplacer davantage au sein de leur bassin maritime ou vers l’Hexagone.

À l’Assemblée nationale, un débat, notamment avec la députée Nicole Sanquer, s’est engagé au sujet de ce fonds. Celle-ci souhaitait que la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie puissent bénéficier de droit du Febecs, dans la mesure où ces deux territoires n’y ont pas accès aujourd’hui.

Je précise que cela fait deux ans que j’alloue une enveloppe de 50 000 euros à chacun de ces territoires. Cette expérimentation a montré qu’il fallait aller beaucoup plus loin. C’est pourquoi nous avons décidé d’étendre le bénéfice de ce fonds à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française pour en faire un dispositif de droit commun. Nous l’avons également étendu à Wallis-et-Futuna, qui n’en était pas non plus bénéficiaire jusqu’alors. De ce fait, le Febecs verra de nouveau ses crédits augmenter.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Georges Patient, rapporteur spécial. Le présent amendement tend à élargir le Febecs aux trois collectivités de Wallis-et-Futuna, de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française. Cette mesure est considérée comme bienvenue par la commission des finances, qui y est favorable.

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. J’ai voté l’ensemble des amendements présentés par mes collègues des outre-mer : j’estime en effet qu’il s’agit d’une forme de solidarité que nous leur devons ! (Mmes Catherine Conconne, Victoire Jasmin et M. Gérard Poadja applaudissent.) J’ai souvent très mauvaise conscience quand je vois l’indifférence absolue de la métropole vis-à-vis des problèmes spécifiques des territoires ultramarins.

Madame la ministre, vous nous avez dit à plusieurs reprises au cours de la discussion que vous compreniez les demandes, mais qu’il vous était impossible de modifier les crédits au sein de la mission. Or j’ai lu attentivement le dispositif de votre amendement et je me suis aperçu que les moyens supplémentaires que vous engagiez sont gagés au sein de la mission « Outre-mer ». J’ai compris que l’on ne pouvait pas toucher à ce budget. J’aimerais dès lors que vous m’indiquiez à qui vous allez enlever ces crédits.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.

Mme Catherine Conconne. Avant que nous n’achevions l’examen des crédits de la mission, puisque nous arrivons bientôt au terme de ce débat, je veux préciser à Mme la ministre que nous sommes très souvent présents dans cet hémicycle.

C’est le cas depuis le début de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du présent projet de loi de finances. Nous intervenons sur tous les chapitres du budget, sur toutes les missions, alors même que nos amendements subissent souvent le même sort : il n’est pas possible d’adopter celui-ci, celui-là est rejeté, etc.

M. Roger Karoutchi. C’est la règle malheureusement !

Mme Catherine Conconne. Nous passons des nuits dans cet hémicycle, au point que les élus d’outre-mer sont parfois plus nombreux que ceux de l’Hexagone sur les travées de mon groupe.

Nous faisons cet effort, un effort qui est transversal, car aucune mission ou aucune section du budget ne nous fait peur. (M. Jérôme Bascher sagace.) Pas plus tard qu’hier, le sénateur Michel Magras a parlé de l’Odéadom. Nous sommes intervenus avec vigueur sur le budget de l’agriculture, mais, à chaque fois, nous avons droit aux mêmes réponses et aux mêmes postures.

C’est pourquoi j’en appelle à la révolution ! (Sourires.) J’en appelle à la révolution des postures, à la révolution de la pensée, à la révolution du regard ! Il faut une nouvelle manière de voir. Il ne faut plus nous considérer comme l’angle mort de la République. Il faut aussi une autre manière de faire. Il faut nous voir à travers un nouveau prisme du regard. C’est ce que j’appelle la révolution !

M. Roger Karoutchi. J’ai eu peur ! (Nouveaux sourires.)

M. le président. Mes chers collègues, je vais appeler à la révolution du respect au règlement ! (Mêmes mouvements.) Nous examinons un amendement du Gouvernement. Les sénateurs qui s’expriment sont donc censés le faire sur cet amendement !

M. Pierre Ouzoulias. Moi j’ai posé une question relative à l’amendement !

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Il faut admettre que le calendrier est serré. Je veux simplement me réjouir que l’amendement de ma collègue Victoire Jasmin, qui avait pour objet d’augmenter de 300 000 euros les crédits du Febecs, ait été adopté. Si l’on adopte l’amendement du Gouvernement, ce sont 150 000 euros supplémentaires au total que l’on octroiera à ces trois territoires ultramarins. Il s’agit d’un amendement bienvenu que nous voterons.

Puisque je ne prendrai plus la parole, je veux remercier nos collègues de l’Hexagone qui sont présents cet après-midi et qui nous font le plaisir de partager ce moment avec nous. Personnellement, madame la ministre, je serai là pour l’examen des autres missions et des articles rattachés, que ce soit aujourd’hui, demain, samedi, voire dimanche si le Sénat devait siéger !

M. Roger Karoutchi. Oh non, pas dimanche ! (Sourires.)

M. Victorin Lurel. Je ne l’espère pas non plus ! Quoi qu’il en soit, je fais le job !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-1090.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 76 quindecies.

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Outre-mer ».

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

Culture

Article additionnel après l'article 76 quindecies - Amendement n° II-1090
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2020
État B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Culture ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Vincent Éblé, président de la commission des finances, rapporteur spécial. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2020, le montant des crédits de la mission « Culture » devraient s’élever à 2,96 milliards d’euros en crédits de paiement. Cette somme ne reflète pas la totalité des crédits budgétaires affectés à la culture au sein du projet de loi de finances. Il convient en outre d’intégrer le montant de la dépense fiscale consacrée à la culture au travers de divers crédits d’impôt, que l’on évalue à 331 millions d’euros, hors mécénat.

En accord avec mon collègue rapporteur spécial Julien Bargeton, je concentrerai mon intervention sur le programme 175, qui concerne la protection des patrimoines. Celui-ci devrait être doté de 972 millions d’euros en crédits de paiement pour 2020.

L’examen de ces crédits fait apparaître une diminution de l’ordre de 5 % des subventions accordées aux collectivités territoriales et aux propriétaires privés en vue de la restauration des monuments historiques.

Les crédits de paiement sont ainsi minorés de 7 millions d’euros entre la loi de finances pour 2019 et le présent projet de loi de finances. Si 5 millions d’euros de crédits viennent financer le fonds incitatif et partenarial pour les monuments historiques des collectivités à faibles ressources, 2 millions d’euros vont, en revanche, alimenter le plan de mise en sécurité des cathédrales, qui a été lancé à la suite de l’incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris.

Je rappelle que les cathédrales sont des monuments historiques appartenant à l’État. Aussi, un risque pesant sur l’État se trouve financé par des crédits destinés à d’autres monuments qui ne lui appartiennent pas. Une telle option traduit un réel manque d’ambition.

Cela étant, ce manque d’ambition s’inscrit dans le prolongement de la position adoptée par le Gouvernement concernant la cathédrale Notre-Dame de Paris, puisque ce plan ne donnera pas lieu à un geste budgétaire spécifique. Si la reconstruction de l’édifice est intégralement financée par le don privé, la sécurisation des cathédrales passera, quant à elle, par les collectivités territoriales et les propriétaires privés.

S’agissant de la cathédrale Notre-Dame de Paris, je m’interroge sur l’éventuelle réaffectation des fonds avancés pour les travaux de sécurisation, de déblaiement des gravois et d’enlèvement des échafaudages. Près de 40 millions d’euros auraient déjà été avancés à l’État avant le versement des premiers dons. Le projet annuel de performances pour 2020 n’indique pas la ligne de crédits sur laquelle cette somme a été prélevée ni les modalités de sa réaffectation vers d’autres projets. Je rappelle que 922 millions d’euros de promesses de dons ont été enregistrés, 67 millions d’euros ayant déjà été versés à l’État.

L’établissement public administratif chargé de la restauration et de la conservation de la cathédrale vient, quant à lui, d’entrer en fonction. L’intégralité de son budget serait couverte par les dons.

Or je vous rappelle, monsieur le ministre, que vous vous étiez engagé ici même au Sénat sur une participation de l’État. Vous aviez en effet indiqué que l’État devrait prendre sa part au financement de la restauration de Notre-Dame de Paris et qu’il y aurait, quoi qu’il en soit, des subventions budgétaires du ministère de la culture à l’établissement public. Quelques mois plus tard, il ne reste rien de cette volonté dans le présent projet de loi de finances.

Une telle évolution rend indispensable la recherche de financements alternatifs, qu’il s’agisse du loto du patrimoine ou de dispositifs fiscaux spécifiques.

La faiblesse des crédits budgétaires alloués à la restauration des centres-villes rend essentielle une rénovation du dispositif fiscal Malraux, qui présente l’avantage d’atteindre à la fois des objectifs de soutien au logement, de valorisation du patrimoine et de revitalisation des centres urbains. Ce dispositif représente environ 130 millions d’euros de travaux chaque année. Cette somme est à comparer aux 338 millions d’euros prévus dans le projet de loi de finances pour l’entretien et la restauration des monuments historiques.

Nous appuyons les conclusions de l’inspection générale des affaires culturelles et de l’inspection générale des finances qui vont dans ce sens. Nous invitons à proroger le mécanisme et à simplifier les conditions d’utilisation du dispositif Malraux. Sa révision est soutenue par le ministère de la culture. Elle pourrait constituer une première étape qui faciliterait sa conciliation avec le plan Action cœur de ville.

Je suis par ailleurs inquiet du mauvais signal envoyé au travers de la réforme du mécénat d’entreprise, prévue dans le présent projet de loi de finances. Cette réforme a suscité une inquiétude légitime dans le milieu associatif, mais aussi au sein des organismes culturels, dont une partie de l’activité dépend du mécénat.

Soyons clairs, le mécénat n’est pas une véritable niche fiscale. Le don vient parfois compléter, voire se substitue à l’action de l’État dans un contexte de réduction des marges de manœuvre budgétaires de celui-ci.

Le cas est particulièrement patent pour les opérateurs publics. L’État conditionne la reconduction ou une diminution minimale des subventions à des résultats sur divers critères d’ordre artistique, qualitatif, social ou sociétal, à propos de chantiers pour lesquels le soutien du mécénat est primordial. Les travaux d’ampleur menés pour le Grand Palais, la Cité du théâtre ou l’aménagement de l’Opéra Bastille s’appuient d’ailleurs sur le mécénat à la demande de l’État. Il existe donc une forme de schizophrénie de la part du Gouvernement dans le fait d’inciter les opérateurs publics à recourir au mécénat tout en limitant le plein et parfait développement de celui-ci.

Le seuil de 2 millions d’euros au-delà duquel le taux de réduction passerait de 60 à 40 % peut paraître tout à la fois contournable et fragilisant. Dans tous les cas, le signal négatif envoyé par une telle réforme est bien tangible. Celle-ci laisse en effet entendre que toute opération dont le coût est supérieur à 2 millions d’euros est assimilable à une forme d’optimisation fiscale. Elle pourrait donc brider les intentions des mécènes, qui prendraient un risque en termes d’image.

Nous savons que le Gouvernement a lancé une réflexion générale sur la philanthropie, qu’il a confiée à deux députées. Il aurait sans doute fallu attendre les conclusions de nos collègues sur les contreparties ou le régime juridique des fondations avant de procéder à un tel coup de rabot fiscal.

Cela étant, la commission des finances a proposé d’adopter les crédits de la mission « Culture ». Je voterai, pour ma part, en fonction du sort qui sera réservé à certains amendements que je soutiendrai. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR. – Mme Sylvie Vermeillet et M. Pierre Ouzoulias applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Julien Bargeton, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Vincent Éblé l’a dit, le montant des crédits de la mission « Culture » s’élèvera à près de 3 milliards d’euros en autorisations d’engagement en 2020 et à 2,96 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une augmentation de près de 1 % par rapport à 2019. Soulignons d’ores et déjà qu’il s’agit d’un budget en hausse dans un contexte de maîtrise de la dépense publique. Il faut s’en féliciter.

Cette augmentation des crédits représente une majoration de la dotation budgétaire d’environ 60 millions d’euros.

Les crédits de la mission ne résument pas l’effort de l’État en direction de la culture. Il faut notamment y ajouter les crédits dédiés au livre et aux bibliothèques, ainsi que le compte de concours financiers à l’audiovisuel public et l’ensemble des taxes affectées et des dépenses fiscales ayant trait au champ culturel. L’effort de l’État s’élèverait plutôt à 14,2 milliards d’euros, soit un peu moins de 4,5 % du budget de l’État.

La mission « Culture » a des spécificités. Je rappelle que la gestion de la majeure partie de ses crédits est soit déconcentrée, soit directement assurée par des opérateurs. Les sommes directement versées aux opérateurs atteignent ainsi 44,3 % du total, quand le taux de déconcentration des crédits de paiement de la mission devrait s’élever à 38,5 % en 2020. Il ne reste donc que 17 % de crédits gérés au niveau central.

La mission est composée de trois programmes.

Le premier, le programme 131, « Création », est doté de 817 millions d’euros. Il traduit, en 2020, un soutien renouvelé aux œuvres et aux artistes.

J’insiste sur les crédits consacrés au soutien à l’emploi culturel.

La priorité accordée à ceux-ci se traduit par une hausse de 8 millions d’euros des crédits destinés au Fonpeps, le Fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle. Un débat a eu lieu à l’Assemblée nationale sur ce point, aboutissant à l’adoption d’un amendement minorant la dotation de ce fonds. Nous aurons de nouveau une discussion sur le sujet, puisque nous examinerons un amendement visant à rétablir ces crédits à leur niveau initial.

Le reste du programme ne laisse que peu de marges de manœuvre au niveau central. C’est une bonne chose du point de vue du Sénat que l’essentiel des crédits soient fléchés vers les territoires via les opérateurs ou les structures déconcentrées. Le projet de loi de finances table d’ailleurs sur une poursuite de cet effort de déconcentration, que nous ne pouvons que saluer. Il faut cependant noter que la marge de manœuvre au niveau central se réduit. Il faudra être vigilant à ce sujet dans les années à venir.

Autre point de vigilance que je veux soulever : les travaux, en particulier ceux qui concernent l’Opéra Bastille, le Centre national de la danse et la Cité du théâtre. La fin de la plupart de ces chantiers devrait intervenir en 2022 ou 2023. Là encore, la commission des finances suivra l’évolution des coûts face au risque d’inflation.

Au regard des montants en jeu – le coût du projet Bastille est évalué à 59 millions d’euros, celui de la Cité du théâtre à 86 millions d’euros –, il faudra la plus grande transparence en matière de choix de la maîtrise d’œuvre, de la maîtrise d’ouvrage et de la répartition des coûts entre acteurs publics.

La Cité du théâtre se situe dans le XVIIe arrondissement, mais n’est pas un projet parisien. Elle doit permettre de déployer les troupes en région, sur les territoires. L’idée est de multiplier les tournées pour que les grands théâtres nationaux puissent bénéficier des spectacles. Il s’agit d’un objectif que nous partageons tous.

J’en viens au deuxième programme, le programme 224, qui englobe des crédits transversaux, liés à ce que l’on appelle la démocratisation – l’accès à la culture, l’enseignement supérieur culture, la politique linguistique, la politique internationale –, et des crédits affectés aux fonctions de soutien.

Il s’agit donc d’un programme assez large, représentant 1,27 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 1,17 milliard d’euros en crédits de paiement.

Il appelle à ce stade deux réflexions, qui ont évidemment nourri nos débats.

Ma première remarque concerne le pass culture.

Les crédits qui lui sont dédiés progressent de 5 millions d’euros pour atteindre 39 millions d’euros en 2020, auxquels s’ajouteront les 10 millions d’euros non consommés en 2019. Cela traduit une montée en charge de cet outil d’émancipation culturelle, pour l’heure expérimental, qui s’adresse à 150 000 jeunes dans 14 départements.

Une campagne de communication renforcée sera lancée dans les territoires concernés, en lien avec les directions régionales des affaires culturelles (DRAC)

. Il faudra ensuite évaluer le dispositif, au plan à la fois quantitatif et qualitatif, tant du point de vue des jeunes que de celui des offreurs, avant d’envisager la généralisation du dispositif à l’horizon de 2022.

Le Sénat, à travers sa commission de la culture, a tenu à souligner que l’essor du pass culture ne devait pas faire oublier le reste des actions propres à l’irrigation culturelle du territoire, notamment tout ce qui concerne le programme Objectif 100 % éducation artistique et culturelle, programme auquel la Haute Assemblée est très attachée et qui, bien sûr, devra lui aussi être évalué.

Ma seconde remarque porte sur les programmes de modernisation du système informatique du ministère de la culture et, surtout, sur la réduction du nombre des sites parisiens de ce dernier.

Ces évolutions participent d’un effort de rationalisation de la dépense publique, qu’il convient de saluer. Cela permet de compenser les coûts liés à la nécessaire revalorisation de la grille indemnitaire des agents du ministère de la culture – un très beau ministère, mais dont les équipes ne bénéficient pas toujours des mêmes primes que celles des autres ministères. Il faut donc renforcer son attractivité et éviter les vacances de poste, ce qui passe par la poursuite de cette revalorisation de grille indemnitaire.

C’est ainsi, mes chers collègues, qu’un programme d’économies, d’un côté, peut permettre d’assumer le renforcement de certaines dépenses, de l’autre, et ce afin que le ministère de la culture reste, en cette année anniversaire, un ministère vibrant et vivant au service des territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. Alain Schmitz, au nom de la commission de la culture. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Alain Schmitz, en remplacement de M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, « le patrimoine doit être une grande cause nationale » : ce n’est pas seulement le vœu de la commission de la culture, et du Sénat dans son ensemble ; ce sont les mots du Président de la République, Emmanuel Macron, lors du lancement du loto du patrimoine le 31 mai 2018.

Saluons donc les efforts déployés depuis deux ans pour sanctuariser le niveau des crédits et développer de nouveaux instruments financiers en faveur du patrimoine monumental.

Je pense en particulier au loto du patrimoine, qui en est maintenant à sa deuxième édition, et au fonds incitatif et partenarial pour la restauration des monuments historiques des petites communes à faibles ressources, qui permet d’impliquer progressivement les régions dans l’exercice des compétences en matière patrimoniale.

Les ressources que procurent ces deux instruments restent, malgré tout, relativement modestes. Attention, dans ces conditions, à ne pas reprendre d’un côté ce qui est donné de l’autre !

Je ne vous le cache pas, monsieur le ministre, les signaux d’alarme ne manquent pas à cet égard, et j’en citerai deux.

D’abord, la réduction de 7 millions d’euros des crédits octroyés par l’État pour la restauration des monuments appartenant aux collectivités territoriales ou aux personnes privées, malgré leurs évidents besoins d’accompagnement.

Ensuite, et surtout, la réforme du dispositif du mécénat. Compte tenu des fortes contraintes budgétaires pesant sur l’État et les collectivités territoriales, prendre le risque de ralentir l’élan privé en faveur du patrimoine est incompréhensible. La suppression de la réserve parlementaire en 2017 a déjà eu des effets dramatiques. Imaginez que cette réforme vienne purement et simplement casser la dynamique positive lancée par la mission Bern !

J’ajoute qu’elle est assez contradictoire avec l’obligation imposée aux opérateurs d’accroître leurs ressources propres et avec la décision de relever exceptionnellement le taux de défiscalisation pour financer la restauration de Notre-Dame de Paris.

Notre-Dame, justement ! Vous ne serez pas surpris, monsieur le ministre, que nous déplorions que l’État ne dépense pas un euro pour sa restauration, alors que nous avions clairement indiqué, au printemps dernier, lors du débat dans cet hémicycle, qu’il n’était pas acceptable que les coûts de fonctionnement de l’établissement public soient couverts par le produit des dons.

Nous espérions au moins que l’élan de générosité aurait libéré des crédits en faveur des autres monuments, notamment de nos autres cathédrales.

M. Pierre Ouzoulias. Très bien !

M. Alain Schmitz. Nous constatons à regret que tel n’est pas le cas. Vous avez même envisagé d’annuler plus de 20 millions d’euros dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2019. C’est la preuve que des efforts doivent être poursuivis, afin d’améliorer la consommation des crédits : il est clair qu’elle ne trouve pas son origine dans un manque de besoins !

Néanmoins, compte tenu de la légère hausse enregistrée par ceux-ci, la commission de la culture a donné un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 175, « Patrimoines », et sera particulièrement attentive aux conséquences des évolutions envisagées sur la protection de notre patrimoine. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et SOCR.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)

Mme Sylvie Robert, rapporteure pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est difficile de porter un jugement tranché sur le budget pour 2020 pour deux des programmes de la mission « Culture » : les programmes 131 et 224.

Dans les grandes masses, les crédits d’intervention destinés à la création sont préservés, tout comme les crédits dédiés à l’accès à la culture et à l’enseignement supérieur placé sous la tutelle du ministère de la culture. Mais c’est non sans sacrifices ! Crédits d’investissement, fonds de roulement des établissements, tout y passe… au risque de voir bientôt disparaître toute marge de manœuvre !

Je ne vous cache pas, monsieur le ministre, que cette stratégie nous inquiète, car elle nous paraît difficilement soutenable. C’est la deuxième année consécutive que vous la mettez en œuvre et nous voyons mal comment vous parviendrez à la reconduire une troisième fois.

Sans compter qu’elle renforce la crainte d’un désengagement progressif de l’État vers les collectivités territoriales ou les acteurs privés. Nous aurons l’occasion d’en discuter dans quelques mois lors de l’examen du projet de loi « 3D », mais reconnaissez que les appels aux collectivités se multiplient pour qu’elles mettent en œuvre et, surtout, financent les grandes priorités nationales : le pass culture, les Micro-folies et l’éducation artistique et culturelle (EAC).

C’est sans doute la seconde difficulté de ce budget : comment juger, à ce stade, de la pertinence de certains outils captant une part croissante des crédits, au détriment des politiques jugées plus structurelles ?

Je pense, en particulier, au pass culture, qui pourrait être doté de 49 millions d’euros l’an prochain, alors que les crédits destinés à l’EAC, en tant que telle, sont en baisse et ne représentent même pas le double de ces crédits : 96 millions d’euros. Les premiers résultats de l’expérimentation, parus voilà deux semaines, sont mitigés et ne démontrent pas encore que le pass culture permettra de réduire les inégalités sociales et territoriales faisant obstacle à l’accès des jeunes à la culture, ou même de diversifier leurs pratiques culturelles.

Nous ne voudrions pas que le pass culture résume progressivement la politique de l’État en matière d’éducation artistique et culturelle, car il n’aura de sens, d’après nous, que s’il s’inscrit dans la continuité d’un parcours d’EAC déjà complet et abouti.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Tout à fait !

Mme Sylvie Robert, rapporteure pour avis. D’autres chantiers doivent encore être poursuivis : les droits culturels, la réforme du classement des conservatoires, celle du statut des enseignants des écoles d’art territoriales. À ce sujet, monsieur le ministre, nous devrons veiller, à l’occasion du prochain projet de loi de programmation, à ce que ces écoles aient les moyens de développer la recherche.

N’oublions pas non plus qu’à la base de toute politique culturelle il y a d’abord des artistes et des œuvres. Attention donc à ne point assécher les crédits destinés à la création et à la structuration de ce secteur, car l’ensemble des politiques culturelles en pâtirait.

Les conditions de travail des artistes doivent être propices à l’acte de création. C’est pourquoi la commission de la culture a déposé un amendement visant à rétablir les crédits du Fonpeps, supprimés à l’Assemblée nationale.

Sous ces réserves, elle a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Culture ». (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et UC.)