M. le président. L’amendement n° I-1192 rectifié est retiré.
L’amendement n° I-143 rectifié bis, présenté par MM. Husson et Houpert, Mmes Chain-Larché, Thomas et Bruguière, MM. Bazin, Lefèvre et Grosdidier, Mme Morhet-Richaud, MM. Pellevat et Brisson, Mme Deromedi, MM. Regnard, Morisset, Piednoir, Longuet, Milon, de Nicolaÿ, Savin, D. Laurent, Calvet, Mayet, Laménie, Karoutchi, Paccaud et de Legge, Mmes Bories et A.M. Bertrand, M. Cuypers, Mme Canayer, MM. Babary, Bonne et Rapin, Mme Bonfanti-Dossat, M. Chaize et Mme Berthet, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article 267 bis du code général des impôts, il est inséré un article 267 … ainsi rédigé :
« Art. 267 …. – Les impôts, taxes, droits et prélèvements de toute nature sont exclus de la base d’imposition de la taxe sur la valeur ajoutée pour la fourniture d’essence et d’électricité utilisées comme source d’énergie automobile. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-François Husson.
M. Jean-François Husson. En présentant cet amendement, je veux interpeller le Gouvernement sur le fatras de taxes illisibles, parfois contradictoires, qui pèsent sur la fiscalité énergétique.
J’ai pris l’exemple de la TICPE, mais les exemples peuvent être multipliés à l’envi. Nous arrivons aujourd’hui dans un système quelque peu délirant, qui ajoute de la TVA sur des taxes sans lisibilité, utilisant des taux variables selon les énergies, en fonction de leur acheminement et du type d’énergie.
Il est grand temps, monsieur le secrétaire d’État, de prendre le taureau par les cornes et de travailler sereinement et objectivement.
Nous avons eu l’occasion de le dire depuis le début de cet après-midi : nous devons travailler, premièrement, à la réduction de la facture énergétique, deuxièmement, à la réduction des gaz à effet de serre, et, troisièmement, puisqu’il s’agit d’énergie, à la réduction de la pollution. Vous aurez compris qu’il faut cesser de punir les Français dans l’usage multiple qu’ils peuvent faire des capacités et des ressources énergétiques. Il convient plutôt de réfléchir et d’accompagner nos concitoyens.
Je ne suis pas un opposant systématique au principe de taxes ou d’impôts. Il doit seulement s’accompagner chaque fois de dispositifs d’accompagnement.
Par cet amendement, je veux secouer le cocotier, si j’ose dire. Nous n’en sommes qu’au début d’un travail que nous devons conduire ensemble, sous l’autorité du Gouvernement, mais pas seulement. Il revient, à l’État et aux collectivités, mais également à l’ensemble des partenaires économiques et financiers, de travailler sur ce sujet.
Monsieur le secrétaire d’État, je suis à l’écoute des premières propositions que vous ne manquerez pas de faire à la suite de cette interpellation. Au reste, celle-ci ne doit pas vous surprendre, puisque les consommateurs, par leurs actions, et nos concitoyens expriment leur ras-le-bol de cette surtaxation, qui touche le secteur de l’énergie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’un amendement d’appel, dont le coût serait de 4,6 milliards d’euros. Il est donc très sympathique ! (Sourires.)
Toutefois, Jean-François Husson a raison de poser la question de la multiplicité des taxes sur l’énergie. Lorsque le Gouvernement avait proposé une trajectoire pluriannuelle d’augmentation de la TICPE, quelqu’un avait eu l’idée géniale d’inventer « l’impôt invisible » : on votait une fois pour toutes, puis la taxe augmentait chaque année… Le problème est que, si elle était invisible, elle n’était pas indolore, et les Français s’en sont rendu compte ! Le Sénat avait donc proposé de geler le tarif. Cela a finalement été l’option retenue par le Gouvernement, dans la douleur, l’année dernière.
Il faut bien mesurer que chaque augmentation de la TICPE a aussi un impact sur la TVA. Si la TICPE est assise sur les volumes, une augmentation des cours est doublement dommageable pour le consommateur, en raison de l’impact de la TVA.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La TVA pèse également sur une multitude de taxes locales sur l’énergie.
En tout cas, le coût de cet amendement, que Jean-François Husson a certainement conçu comme un amendement d’appel, me conduit à lui en demander le retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. La question posée par M. Husson est intéressante, mais ce serait aller au-delà du mandat qui est le mien ce soir, au moment où je m’exprime devant vous, que de proposer des pistes de simplification et de parler sur le fond.
C’est à l’occasion d’un travail partagé que l’on parviendra à évaluer la pertinence et l’efficacité de la fiscalité énergétique, et à trouver la meilleure manière d’en simplifier le paysage. C’est évidemment une démarche à laquelle le Gouvernement souscrit.
Néanmoins, le dispositif que vous proposez, monsieur le sénateur, aurait un tel coût que personne – en tout cas, c’est mon avis – ne pourrait y être favorable.
Je considère moi aussi qu’il s’agit d’un amendement d’appel. C’est pourquoi j’en demande le retrait, faute de quoi j’y serais défavorable.
M. le président. Monsieur Husson, l’amendement n° I-143 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-François Husson. Monsieur le secrétaire d’État, je trouve que vous auriez pu consacrer plus de vingt secondes à un sujet qui préoccupe plus de 60 millions de nos concitoyens.
Vous devriez être plus attentif à cette question, d’autant que, je le répète, le climat social me semble quelque peu incandescent. C’est au Gouvernement qu’il appartient d’annoncer des mesures ; il ne suffit pas d’être compréhensif dans cette enceinte, ne serait-ce que parce qu’elle n’a pas toujours l’écho qu’elle mériterait.
Je ne sais pas comment nous continuerons d’interpeller le Gouvernement sur le sujet, mais il faudrait vraiment que celui-ci arrête de recourir à la stratégie du kangourou, c’est-à-dire de reculer à chaque fois devant les sujets difficiles. On l’a vu sur la question de la DGF et à propos d’un certain nombre d’impôts.
Personnellement, je considère que le sujet de la fiscalité écologique, ce que vous appelez le green budgeting, est important. J’aurais tendance à dire que, pour l’instant, votre « livret vert » ressemble un peu aux poireaux : il est vert à l’extérieur et d’un blanc immaculé à l’intérieur (Sourires.), car il ne comprend aucune proposition.
Je vous invite, monsieur le secrétaire d’État, à relayer cette préoccupation auprès du Premier ministre et du Président de la République. En tous les cas, il faut que le Gouvernement, avec l’ensemble des élus et de ses partenaires, se saisisse vraiment de ce sujet.
Cela étant, je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° I-143 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° I-1060 rectifié, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article 267 bis du code général des impôts, il est inséré un article 267 … ainsi rédigé :
« Art. 267 …. – Les impôts, taxes, droits et prélèvements de toute nature sont exclus de la base d’imposition de la taxe sur la valeur ajoutée pour la fourniture d’eau, de gaz par le réseau de distribution de gaz naturel, et d’électricité. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Comme un certain nombre d’entre vous, je suis ici depuis jeudi après-midi. Je trouve que la remarque que vient de faire notre collègue Jean-François Husson sur la fiscalité écologique méritait que le Gouvernement y consacre davantage de temps et surtout d’arguments.
Une double taxation s’applique sur les dépenses en matière d’énergie. Cet amendement vise donc à diminuer les prélèvements fiscaux applicables à ces dépenses, qui sont déjà largement contraintes. Comme le rapporteur général l’a rappelé tout à l’heure, à juste titre, les consommateurs paieront 4,6 milliards d’euros de TVA sur de nombreuses taxes et contributions, rien que pour l’énergie !
En 2018, le coût de cette double taxation a atteint 3,2 milliards d’euros pour le carburant, 1 milliard d’euros pour l’électricité, 200 millions d’euros pour le gaz, et tout autant pour le fioul domestique. Cette double taxation, qui est inéquitable à nos yeux, s’apparente à une double peine fiscale. Le constat est réalisé, notamment, par l’association UFC-Que choisir.
C’est un vrai sujet de préoccupation pour bon nombre de Français : l’exécutif national ne prend pas suffisamment en compte leur quotidien.
Se déplacer peut être un choix, mais, pour beaucoup de nos concitoyennes et de nos concitoyens, il s’agit d’une nécessité. Se chauffer n’est pas une option, c’est une obligation ! Les dépenses destinées à se déplacer et à se chauffer sont concernées par cette double taxation.
Depuis presque un an, une partie des Français proteste contre une fiscalité devenue trop élevée, qui entrave leur pouvoir d’achat.
Il faut être concret quand on élabore les lois ou que l’on prend des décisions. Nous avons examiné de près la question : pour un plein d’essence, cela représente 6 euros supplémentaires de TVA et 56 euros supplémentaires en moyenne sur les factures d’électricité. D’ailleurs, le montant moyen de ces factures a progressé d’un tiers au cours des huit dernières années pour dépasser les 1 350 euros par an ; celles-ci vont encore s’alourdir en raison de l’augmentation de 7 % des tarifs de l’électricité annoncée pour cette année, et de la hausse annoncée pour 2020.
Mes chers collègues, soit on gouverne avec le peuple, soit on gouverne sans ! C’est vrai pour l’énergie, pour le gaz et pour cette double taxation. Sur ce point, vous avez un choix politique important à faire, monsieur le secrétaire d’État.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je me suis déjà exprimé : l’énergie est considérée par ce gouvernement, comme par tous ses prédécesseurs, comme un moyen de dégager un rendement élevé. C’est tout à fait clair, notamment s’agissant de la TVA. La TICPE, quant à elle, est également pour une large part une taxe de rendement.
S’il est vrai que cette taxation pèse, hélas, sur le budget des ménages, cet amendement aurait un coût, que l’on a déjà rappelé, de 4,6 milliards d’euros.
C’est la raison pour laquelle la commission y est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour les raisons budgétaires que vient d’évoquer M. le rapporteur.
Sur ces questions liées à l’énergie, je suis évidemment ouvert au débat, et nous pouvons prendre le temps nécessaire pour en discuter. Simplement, vous comprendrez que nous devons tenir compte de contraintes réglementaires de nature européenne, ce qui impose, en tout cas au secrétaire d’État que je suis, un minimum de prudence. Par inattention, je ne voudrais pas tenir des propos qui seraient contraires aux engagements européens de la France et au droit européen.
J’ai également conscience que je ne puis m’exprimer devant vous et engager la parole du Gouvernement sur des sujets de cette importance budgétaire qu’à la suite d’un certain nombre de réunions d’arbitrage, si vous me permettez ce terme.
Enfin, je pense que nous devons prendre le temps de réfléchir à la question de l’adaptation de la fiscalité à l’écologie et à la transition écologique. Un certain nombre de travaux ont été menés ; je pense notamment à ceux de la députée Bénédicte Peyrol. Ils permettent de poser un cadre de réflexion et de réfléchir à la meilleure façon de verdir le budget et la fiscalité – pour éviter d’employer un anglicisme couramment utilisé –, et de garantir la transition écologique.
Le sujet est suffisamment intéressant pour que nous y consacrions du temps, ce soir ou à un autre moment. J’espère que les sénateurs qui se sont exprimés comprennent la prudence dont nous devons faire preuve lorsque nous évoquons de tels montants et de tels enjeux, d’autant que la réflexion est encore en cours.
J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-603 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Raynal, Kanner, Éblé, Botrel et Carcenac, Mme Espagnac, MM. Féraud, P. Joly, Lalande et Lurel, Mme Taillé-Polian, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. M. Bourquin, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Daudigny, Devinaz, Fichet et Gillé, Mmes Grelet-Certenais, Harribey et Jasmin, M. Jomier, Mme G. Jourda, MM. Kerrouche et Leconte, Mme Lepage, M. Marie, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, MM. Sueur et Temal, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le chapitre VIII bis du titre II du livre premier de la première partie du code général des impôts, il est inséré un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Taxe sur les dépenses de publicité en faveur des véhicules polluants
« Art. 302 bis …. – Est instituée à compter du 1er janvier 2020 une taxe sur les dépenses de publicité en faveur de l’achat de véhicules dont le taux d’émission de dioxyde de carbone par kilomètre dépasse 95 grammes.
« II. – Cette taxe est due par toute personne assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée. Elle est assise sur les dépenses engagées au cours de l’année civile précédente.
« III. – Le taux de la taxe est fixé à 10 % du montant hors taxe sur la valeur ajoutée de ces dépenses.
« IV. – La taxe est déclarée et liquidée sur l’annexe à la déclaration des opérations du mois de mars de l’année au titre de laquelle la taxe est due, déposée en application de l’article 287. Elle est acquittée au plus tard lors du dépôt de cette déclaration.
« V. – La taxe est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe. »
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Mes chers collègues, nous vous proposons des recettes supplémentaires, grâce à la création d’une très belle taxe sur les dépenses de publicité en faveur de l’achat de véhicules polluants dont le taux d’émission de dioxyde de carbone dépasse les 95 grammes par kilomètre.
Ce serait une taxe de rendement, mais aussi une taxe comportementale, car elle inviterait chacun d’entre nous à changer son comportement.
M. le président. L’amendement n° I-1076 rectifié, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli, Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le chapitre VII quinquies du titre II de la première partie du livre premier du code général des impôts est ainsi rétabli :
« Chapitre VII quinquies
« Taxe sur la publicité relative à certains véhicules
« Art. 302 bis KE. – I. – Est instaurée une taxe sur les dépenses de publicité destinées à la promotion des véhicules individuels émettant plus de 110 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre.
« II. – Sont redevables de la taxe les personnes dont le chiffre d’affaires du dernier exercice est supérieur ou égal à vingt millions d’euros hors taxes.
« III. – La taxe est assise sur les frais d’achats d’espaces publicitaires, quelle que soit la nature du support retenu et quelle que soit sa forme, matérielle ou immatérielle, ainsi que les frais d’évènements publics et de manifestations de même nature.
« IV. – Le taux de la taxe est fixé à 3 % du montant hors taxe sur la valeur ajoutée des dépenses mentionnées au III.
« V. – La taxe est déclarée et liquidée sur l’annexe à la déclaration des opérations du mois de mars de l’année au titre de laquelle la taxe est due, déposée en application de l’article 287. Elle est acquittée au plus tard lors de cette déclaration.
« VI. – La taxe est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe. »
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. En ce qui concerne cet amendement, le Gouvernement devrait au moins s’en remettre à la sagesse du Sénat, si ce n’est y être favorable. En effet, le dispositif que nous proposons, monsieur le secrétaire d’État, vise à taxer la publicité relative aux ventes de voitures soumises au malus prévu à l’article 18.
Il ne s’agit pas simplement d’interdire ce type de publicité. Il s’agit de cesser de tenir un double discours. D’un côté, on tient un discours officiel qui dénonce ces véhicules du fait de leur caractère polluant. De l’autre, on laisse toute liberté aux constructeurs pour délivrer des messages totalement déconnectés des enjeux écologiques.
Compte tenu du coût de ces véhicules et des sommes astronomiques que l’on dépense pour se les procurer – je parle de voitures qui appartiennent déjà au très haut de gamme –, convenons que, pour beaucoup d’entre eux, il s’agit de produits de luxe, achetés par pur plaisir.
Comme sur le projet de loi sur les mobilités, comme pour l’alcool et le tabac, il faut tenir compte de l’impact sur la consommation de la publicité, qui est tout de même agressive et totalement contraire à la transition écologique.
J’ajoute que l’État, via sa participation au capital de la Française des jeux, a donné de l’argent pour promouvoir la vente de cette entreprise. Aussi, taxons ceux qui font la promotion de véhicules atteignant des montants astronomiques et particulièrement polluants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. En premier lieu, ces publicités doivent obligatoirement faire figurer le niveau d’émission de dioxyde de carbone des véhicules. Le consommateur est donc parfaitement informé.
En second lieu, je m’interroge sur le caractère opérationnel d’un amendement qui tend à créer une taxe sur les publicités. Aujourd’hui, les types de publicité sont extrêmement variés, entre la presse écrite, la télévision et surtout internet. Je ne suis donc pas certain, étant donné que les régies de publicité sur internet se situent souvent à l’étranger, que le dispositif soit vraiment opérant.
Selon moi, le malus prévu par le texte sera beaucoup plus efficace, parce que, dans la pratique, le signal prix est plus efficace que l’interdiction de la publicité. Ce que vous proposez n’aura d’autre effet que de mettre à mal la presse écrite, qui est déjà en très grande souffrance.
J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Monsieur le rapporteur général, j’ai bien écouté votre argumentaire.
Tout d’abord, notre proposition est sélective, puisqu’elle ne cible que certaines publicités, celles qui concernent les véhicules les plus polluants. Comment les définit-on ? On sait désormais les distinguer grâce à la nouvelle réglementation européenne, qui définit des seuils moyens d’émission de dioxyde de carbone.
Ensuite, les régies publicitaires concernées par cette taxe à 10 % sont connues et faciles à localiser.
Enfin, le caractère opérationnel du dispositif ne me semble pas non plus poser problème.
Il faut savoir que le montant des dépenses de publicité pour les automobiles en France est évalué à plus de 3,3 milliards d’euros. On peut effectivement s’attendre à ce qu’une telle taxe dégage un certain rendement. Il s’agit d’envoyer des signaux positifs aux utilisateurs et aux constructeurs, pour qu’ils tiennent compte de la transition climatique.
J’ai cru comprendre, monsieur le rapporteur général, que vous préfériez des dispositifs de type malus : nous vous ferons aussi des propositions de cette nature.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. On les examinera !
M. le président. L’amendement n° I-1121 rectifié, présenté par M. Antiste, Mmes Conconne, Jasmin, Ghali et Artigalas, MM. Montaugé, Duran, Daudigny et Lurel, Mmes Lepage, Conway-Mouret et Monier et M. Devinaz, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 1609 vicies du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 1609 vicies. – I. – Est instituée une taxe spéciale sur les huiles de palme, de palmiste et de coprah effectivement destinées, en l’état ou après incorporation dans tous produits, à l’alimentation humaine.
« II. – Le taux de la taxe est fixé à 120 € par tonne en 2021, 160 € en 2022, 200 € en 2023, 240 € en 2024 et 280 € à partir de 2025. Ce tarif est relevé au 1er janvier de chaque année à compter du 1er janvier 2026. À cet effet, les taux de la taxe additionnelle sont révisés chaque année au mois de décembre, par arrêté du ministre chargé du budget publié au Journal officiel, en fonction de l’évolution prévisionnelle en moyenne annuelle pour l’année suivante des prix à la consommation de tous les ménages hors les prix du tabac. Les évolutions prévisionnelles prises en compte sont celles qui figurent au rapport économique, social et financier annexé au dernier projet de loi de finances de l’année.
« III. – A. – La contribution est due à raison des huiles mentionnées au I du présent article ou des produits alimentaires les incorporant par leurs fabricants établis en France, leurs importateurs et les personnes qui en réalisent en France des acquisitions intracommunautaires, sur toutes les quantités livrées ou incorporées à titre onéreux ou gratuit.
« B. – Sont également redevables de la contribution les personnes qui, dans le cadre de leur activité commerciale, incorporent, pour les produits destinés à l’alimentation de leurs clients, les huiles mentionnées au même I.
« IV. – Pour les produits alimentaires, la taxation est effectuée selon la quantité d’huiles mentionnées audit I entrant dans leur composition.
« V. – Les huiles mentionnées au même I ou les produits alimentaires les incorporant exportés de France continentale et de Corse, qui font l’objet d’une livraison exonérée en vertu du I de l’article 262 ter ou d’une livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de l’Union européenne en application de l’article 258 A, ne sont pas soumis à la contribution.
« VI. – La contribution est établie et recouvrée selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d’affaires.
« Sont toutefois fixées par décret les mesures particulières et prescriptions d’ordre comptable notamment, nécessaires pour que la contribution ne frappe que les huiles effectivement destinées à l’alimentation humaine, pour qu’elle ne soit perçue qu’une seule fois, et pour qu’elle ne soit pas supportée en cas d’exportation, de livraison exonérée en vertu du I de l’article 262 ter ou de livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de l’Union européenne en application de l’article 258 A. »
II. – La perte de recettes éventuelle résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Maurice Antiste.
M. Maurice Antiste. Cet amendement vise à supprimer la taxe spéciale sur les huiles et à la remplacer par une taxe sur l’huile de palme alimentaire, dont le montant augmenterait progressivement de 120 euros la tonne en 2021, à 160 euros en 2022, à 200 euros en 2023, à 240 euros en 2024 et à 280 euros à partir de 2025.
L’huile de palme est l’oléagineux le plus rentable, avec un rendement plus de huit fois supérieur à celui des autres cultures, comme l’huile de soja, de coco ou de colza. Pourtant, la production de l’huile de palme constitue un danger écologique et environnemental de très grande ampleur. L’extension des plantations de palmiers à huile est une cause majeure de déforestation et de dégradation des écosystèmes dans les pays du Sud.
Les Malaisiens et les Indonésiens ont dû engager de vastes opérations de déforestation pour se lancer dans des monocultures extensives. L’Indonésie a ainsi déjà perdu 72 % de ses forêts.
À l’échelle planétaire, cette déforestation n’est pas sans conséquence non plus, puisque les forêts absorbent de grandes quantités de gaz carbonique. Dans le monde, la déforestation est responsable de 15 % à 20 % de l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre. D’après Greenpeace, c’est à la destruction des forêts que l’Indonésie doit sa troisième place mondiale d’émetteur de gaz à effet de serre.
De plus, selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), les acides gras saturés sont consommés de manière excessive par la population française, contribuent au développement de l’obésité et favorisent les maladies cardio-vasculaires.
En raison de leur richesse en acides gras saturés, les huiles de palme sont utilisées pour la fabrication de la margarine ou comme corps gras de friture. On y recourt de manière excessive dans la restauration collective et l’industrie agroalimentaire. Elles sont notamment incorporées dans les produits de biscuiterie et l’alimentation salée ou sucrée à destination des enfants.
L’amendement qui tend à taxer l’huile de palme alimentaire va donc dans le sens de la préservation de la santé humaine, de la protection de l’environnement et des habitants, notamment ceux des territoires insulaires, premières victimes du changement climatique.