Mme Pascale Bories, rapporteure pour avis. La France s’est engagée, comme les autres pays du monde, à atteindre les objectifs de développement durable, ou ODD, fixés par les Nations unies pour 2030. Il paraît essentiel de mieux intégrer la prise en compte de ces objectifs dans l’élaboration et le vote du budget, qui détermine les politiques publiques mises en œuvre et financées dans l’année à venir, comme l’ont fait d’autres pays européens.
C’est pourquoi la commission a prévu que le rapport présenté au Parlement avec le budget indiquera les incidences positives et négatives de ce budget sur l’atteinte des objectifs de développement durable, ce qui jettera un éclairage utile sur les conséquences des choix budgétaires sur lesquels nous serons amenés à nous prononcer.
Le rapport sur les nouveaux indicateurs de richesse, dit rapport Sas, ne recouvre que partiellement les ODD. Il n’est actuellement pas du tout utilisé comme un outil permettant d’éclairer le débat et d’orienter les choix de politiques publiques, puisqu’il est systématiquement publié plusieurs mois après le vote du budget.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er octies.
(L’article 1er octies est adopté.)
Article additionnel après l’article 1er octies
M. le président. L’amendement n° 251, présenté par M. Canevet, est ainsi libellé :
Après l’article 1er octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 4° de l’article L. 111-10 du code de la construction et de l’habitation, les mots : « de cette toiture » sont remplacés par les mots « isolation caractérisée par sa résistance thermique et/ou par son indice de réflectance solaire ».
La parole est à M. Michel Canevet.
M. Michel Canevet. Il s’agit d’introduire à l’article L. 111-10 du code de la construction et de l’habitation la notion de réflectance solaire. La réflectance d’une paroi ou d’une toiture est idéale pour isoler des fortes chaleurs. Il faut pouvoir utiliser des dispositifs variés pour améliorer l’efficience thermique de nos bâtiments.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur. Si la réflectance solaire d’une paroi joue bien évidemment un rôle dans l’efficacité de l’isolation thermique, la définition technique de la mesure de l’isolation d’une toiture dans ses différentes composantes – épaisseur, matériaux – relève non pas de la loi, mais du pouvoir réglementaire. Pour cette raison, avis défavorable de la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Canevet. Dans ces conditions, je retire mon amendement !
M. le président. L’amendement n° 251 est retiré.
Chapitre II
Dispositions en faveur du climat
Article 2
I. – Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Après le chapitre II du titre III du livre Ier, il est inséré un chapitre II bis ainsi rédigé :
« CHAPITRE II BIS
« Haut Conseil pour le climat
« Art. L. 132-4. – I. – Le Haut Conseil pour le climat, organisme indépendant, est placé auprès du Premier ministre.
« Outre son président, le Haut Conseil pour le climat comprend au plus douze membres choisis en raison de leur expertise scientifique, technique et économique dans le domaine des sciences du climat, de la réduction des émissions de gaz à effet de serre ainsi que de l’adaptation et de la résilience face au changement climatique.
« Les membres du Haut Conseil pour le climat sont nommés par décret pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois. Lorsqu’un membre cesse ses fonctions, un nouveau membre est nommé, après avis du président du Haut Conseil pour le climat, pour la durée du mandat restant à établir.
« Les membres du Haut Conseil pour le climat ne peuvent solliciter ni recevoir aucune instruction du Gouvernement ou de toute autre personne publique ou privée dans l’exercice de leurs missions.
« Les membres du Haut Conseil pour le climat adressent à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique une déclaration d’intérêts dans les conditions prévues au III de l’article 4 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.
« II. – Le Haut Conseil pour le climat rend chaque année un rapport qui porte notamment sur :
« 1° Le respect de la trajectoire de baisse des émissions de gaz à effet de serre au regard des budgets carbone définis en application de l’article L. 222-1 A du présent code et de la stratégie bas-carbone mentionnée à l’article L. 222-1 B ;
« 2° La mise en œuvre et l’efficacité des politiques et mesures décidées par l’État et les collectivités territoriales pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, développer les puits de carbone, réduire l’empreinte carbone et développer l’adaptation au changement climatique, y compris les dispositions budgétaires et fiscales ;
« 3° L’impact socio-économique, notamment sur la formation et l’emploi, et environnemental, y compris pour la biodiversité, de ces différentes politiques publiques.
« Dans ce rapport, le Haut Conseil met en perspective les engagements et les actions de la France par rapport à ceux des autres pays. Il émet des recommandations et propositions pour améliorer l’action de la France, les contributions des différents secteurs d’activité économiques au respect des budgets carbone ainsi que la réduction des émissions de gaz à effet de serre liées aux transports aéronautique et maritime internationaux.
« Ce rapport est remis au Premier ministre et transmis au Parlement et au Conseil économique, social et environnemental.
« Le Gouvernement présente au Parlement et au Conseil économique, social et environnemental, dans les six mois suivant la remise de ce rapport, les mesures déjà mises en œuvre et celles prévues en réponse aux recommandations et propositions de ce rapport. Il présente une explication pour chacun des objectifs non atteints ainsi que les moyens mis en œuvre pour les atteindre.
« Le Haut Conseil rend un avis sur la stratégie nationale bas-carbone et les budgets carbone ainsi que sur le rapport mentionné au II de l’article L. 222-1 D. Il évalue la cohérence de la stratégie bas-carbone vis-à-vis des politiques nationales et des engagements européens et internationaux de la France, en particulier de l’Accord de Paris et de l’atteinte de la neutralité carbone en 2050, tout en prenant en compte les impacts socio-économiques de la transition pour les ménages et les entreprises, les enjeux de souveraineté et les impacts environnementaux.
« III. – Les modalités d’organisation et de fonctionnement du Haut Conseil sont précisées par décret.
« Art. L. 132-5. – Le Haut Conseil pour le climat peut être saisi par le Gouvernement, le Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat ou le président du Conseil économique, social et environnemental ou se saisir, de sa propre initiative, pour rendre un avis, au regard de sa compétence, sur un projet de loi, une proposition de loi ou une question relative à son domaine d’expertise. » ;
2° L’article L. 222-1 D est ainsi modifié :
a) À la première phrase du I, les mots : « six mois » sont remplacés par les mots : « un an » et les mots : « comité d’experts mentionné à l’article L. 145-1 du code de l’énergie » sont remplacés par les mots : « Haut Conseil pour le climat mentionné à l’article L. 132-4 » ;
a bis) Le même I est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le Gouvernement répond à l’avis transmis par le Haut Conseil pour le climat devant le Parlement. » ;
a ter) (nouveau) À la première phrase du II, les mots : « quatre mois » sont remplacés par les mots : « six mois » ;
b) À la fin du III, les mots : « comité d’experts mentionné à l’article L. 145-1 du code de l’énergie » sont remplacés par les mots : « Haut Conseil pour le climat mentionné à l’article L. 132-4 ».
II. – Le titre IV du livre Ier du code de l’énergie est ainsi modifié :
1° L’article L. 141-4 est ainsi modifié :
a) Au II, les mots : « le comité d’expert mentionné à l’article L. 145-1 du présent code » sont remplacés par les mots : « le Haut Conseil pour le climat mentionné à l’article L. 132-4 du code de l’environnement » ;
b) À la fin du premier alinéa du III, les mots : « et au comité d’experts mentionné à l’article L. 145-1 du présent code » sont supprimés ;
2° Le chapitre V est abrogé.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.
M. Fabien Gay. Cet article inscrit dans la loi le Haut Conseil pour le climat, créé par le Président de la République le 27 novembre dernier en remplacement du comité d’experts pour la transition énergétique. Nous sommes donc consultés plus de sept mois après la décision… Faut-il rappeler que le Parlement n’est pas une simple chambre d’enregistrement de la volonté présidentielle ?
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Fabien Gay. Alors qu’existent déjà le Commissariat général au développement durable, le Conseil national de la transition écologique et le Conseil de défense écologique et que l’Ademe intègre à présent la lutte contre le réchauffement climatique, nous pouvons nous interroger sur la pertinence de la création d’une nouvelle instance. Dans son avis du 20 février dernier, le Conseil économique, social et environnemental a expliqué que la priorité devrait être donnée à une meilleure coordination des instances existantes.
Certes, la tâche est d’ampleur. Certes, le Haut Conseil pour le climat est composé d’experts plutôt que de ministres, et il s’agit d’un organe dit indépendant dont le premier rapport s’est révélé extrêmement critique. Reste que la multiplication d’instances consultatives, donc de rapports et d’avis non contraignants, n’engage pas les politiques publiques menées par le Gouvernement ni ne constitue une mise en actes des discours tenus sur l’urgence climatique.
La prise en compte des avis du Haut Conseil pour le climat par les collectivités territoriales est proposée à l’article 2 bis, et le Gouvernement devra présenter retours et justifications sur les rapports. Toutefois, cela ne signifie en rien qu’il suivra effectivement et activement les recommandations émises.
Enfin, ces instances isolées, centrées sur le climat et le réchauffement climatique, entretiennent la sectorisation des problématiques environnementales, comme s’il s’agissait de politiques publiques pouvant être menées indépendamment les unes des autres. L’urgence en impose au contraire une prise en compte totale et transversale.
Ainsi, pour atteindre la neutralité carbone, nous avons besoin de conserver nos puits de carbone et de les conserver en bon état. Cette question met en jeu la protection des océans, des forêts, les produits phytosanitaires, la biodiversité, l’enfouissement des déchets, notamment. Le saupoudrage et la sectorisation ne sont plus possibles !
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, sur l’article.
M. Jean-François Husson. Monsieur le président, chers collègues, je m’inscris dans la même tonalité que Fabien Gay.
Le présent article fait figurer dans la loi une instance déjà existante, le Haut Conseil pour le climat, qui a été créé par décret en mai de cette année.
Je ne reviendrai pas plus sur le procédé quelque peu cavalier qui consiste à faire du Parlement une chambre d’enregistrement et à placer la représentation nationale devant le fait accompli. Désormais, le Gouvernement prend des décrets avant de faire ratifier ceux-ci par la loi. C’est le monde à l’envers !
Je souhaite toutefois noter l’importance du Haut Conseil, qui a démontré dans son premier rapport une forme d’esprit critique avéré et, pour l’instant, d’indépendance.
Il est urgent d’agir, mais je veux alerter le Gouvernement sur la multiplication des comités de ce genre, qui sont majoritairement des organes consultatifs : le conseil de défense écologique, le Haut Conseil pour le climat, le Conseil national de l’air, le Conseil national de la transition écologique, le Conseil supérieur de l’énergie. Peut-être faudra-t-il un jour rationaliser ces instances, madame la ministre.
Si je salue l’action de spécialistes reconnus qui rendent un avis indépendant sur des sujets importants tendant à concilier la vision politique et l’expertise scientifique, je m’interroge, madame la ministre : en quoi la multiplication de ces instances facilite-t-elle la prise en compte des sujets traités ? Est-ce une démarche de simplification ? On parle beaucoup d’agilité, de fluidité. Le Haut Conseil pour le climat y participe-t-il ? Enfin, comment cette instance va-t-elle articuler son action dans le processus démocratique, entre les temps du diagnostic, de l’expertise, le travail du Parlement et la décision de l’exécutif ? J’y perds un peu mon latin !
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, sur l’article.
M. Guillaume Gontard. Nous abordons, avec le présent article, la création du Haut Conseil pour le climat qui prend la place du comité d’experts pour la transition écologique.
Je ne reviens pas sur ce qu’a dit Fabien Gay : n’est-il pas un peu étrange de voter la création d’une instance qui est installée depuis le 27 novembre dernier par une décision du Président de la République ?
Au-delà de la forme contestable, sur le fond, nous sommes favorables à l’existence du Haut Conseil pour le climat, qui a d’ores et déjà rendu un avis très intéressant.
Pour autant, la critique formulée aujourd’hui sur la multiplication des instances qui traitent de la transition écologique sans lien entre elles demeure fondée. Nous y reviendrons lors de la présentation de nos amendements.
Dans son avis récent, le Haut Conseil pour le climat a présenté plusieurs préconisations dont nous souhaiterions qu’elles soient reprises dans le présent projet de loi.
Le Haut Conseil préconise notamment de rendre les budgets carbone de la stratégie nationale bas-carbone, la SNBC, contraignants vis-à-vis de l’ensemble des textes de loi dont la compatibilité avec ces budgets devra dès lors être démontrée. Nous vous proposerons un amendement en ce sens.
Plus fondamentalement, et c’est l’objet de sa recommandation n° 4, le Haut Conseil estime que la transition bas-carbone doit être juste et perçue comme telle, pour que les actions soient durablement soutenues par l’ensemble de la société. Il relève donc comme essentielle la conjonction d’une politique environnementale ambitieuse et d’une politique de réduction des inégalités, tout comme le Conseil national de la transition énergétique, le CNTE, avant lui, preuve s’il en fallait de la nécessité absolue de conjuguer transition écologique et lutte contre les inégalités sociales.
Voilà qui sonne comme une remise en cause des politiques gouvernementales, qui n’ont fait que renforcer jusqu’à présent les inégalités sociales, ce qui a d’ailleurs conduit au mouvement des gilets jaunes.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, sur l’article.
M. Ronan Dantec. Je n’irai pas dans le sens des précédentes interventions, car j’estime pour ma part que la création du Haut Conseil est une très bonne chose.
Il a été créé sur le modèle du Comité pour le changement climatique britannique. Cette instance qui existe depuis une dizaine d’années a joué un rôle essentiel dans la mutation du système électrique anglais. Les Britanniques ont en effet été capables de sortir totalement de leur production électrique charbon, grâce notamment à une taxe carbone. Ce comité avait donné les indications qui ont permis au législateur et au gouvernement anglais de prendre les décisions nécessaires.
J’ai le sentiment que nous avons mis en place un système à peu près cohérent.
Nous avons d’abord un Haut Conseil composé d’experts indépendants. Mme Le Quéré a montré cette indépendance de manière très claire avec le premier rapport qui prend du recul et donne des indications.
Nous avons ensuite le CNTE, qui doit être un organe du consensus entre les acteurs, mais qui peine aujourd’hui à jouer ce rôle. Peut-être les missions du CNTE et du CESE, le Conseil économique, social et environnemental, sont-elles en partie redondantes et nécessiteraient d’être éclaircies. Il reste que le CNTE doit être le lieu où les acteurs trouvent des compromis pour agir à la hauteur des enjeux sur le climat et l’énergie.
Nous avons enfin un conseil de défense écologique piloté par le Président de la République, qui doit être le lieu de l’impulsion et de la décision.
J’estime que tout cela est d’autant plus cohérent que le Parlement est mieux associé aux décisions. À ce titre, le travail que nous avons fait cet après-midi afin de renforcer le rôle du Parlement, notamment au travers de certains amendements ayant pour objet la question des budgets carbone, revêt toute son importance.
L’on est souvent un peu défaitiste sur le front du climat, moi le premier, parce qu’on ne gagne pas à tous les coups. J’estime toutefois qu’en l’occurrence nous sommes dotés d’un dispositif très cohérent qu’il suffit maintenant de faire fonctionner.
En tout cas, la création du Haut Conseil était absolument nécessaire. Nous avions besoin d’une expertise indépendante du pouvoir politique, et confier la présidence de cette instance à Mme Le Quéré était une excellente chose.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, sur l’article.
Mme Angèle Préville. Je me joins au concert de mes collègues pour déplorer la situation de fait : le Parlement joue le rôle de chambre d’enregistrement, ce qu’il n’est pas !
Tous ces conseils, hauts ou pas, et organismes divers sont la preuve d’une intention louable, mais ce que nous espérons maintenant, ce sont des actions concrètes qui permettent des avancées notables.
Or, vous le savez, les émissions de gaz à effet de serre sont reparties à la hausse l’année dernière. La situation est très préoccupante. Le rapport que le Haut Conseil vient de rendre prouve son indépendance. Espérons qu’il sera entendu, espérons que vous l’entendrez, madame la ministre !
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 60 rectifié, présenté par Mmes Noël, Duranton, Garriaud-Maylam et Troendlé, MM. Lefèvre, Panunzi et Laménie, Mme Deromedi, MM. D. Laurent, Revet et B. Fournier et Mmes A.M. Bertrand et Morhet-Richaud, est ainsi libellé :
Alinéas 4, 5, 6, 7 (deux fois), 8, 9, 10, 19, 21, 22 , 24 et 27
Après les mots :
pour le climat
insérer les mots :
et la qualité de l’air
La parole est à Mme Sylviane Noël.
Mme Sylviane Noël. Cet amendement a pour objet de compléter l’intitulé du Haut Conseil pour le climat par les mots « et la qualité de l’air ».
Aujourd’hui, il n’est, en effet, plus possible de dissocier les défis majeurs liés aux gaz à effet de serre de ceux des polluants de l’air. Les scientifiques se doivent de travailler conjointement sur ces deux sujets dont les enjeux sont intimement liés.
M. le président. L’amendement n° 178, présenté par M. Courteau, Mmes Préville et Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Montaugé, Tissot, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mme Tocqueville, M. Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 4, 5, 6, 7 (deux fois), 8, 9, 10, 19, 21, 22, 24 et 27
Après les mots :
pour le climat
insérer les mots :
et le vivant
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. La lutte contre le changement climatique ne peut être séparée des transformations actuelles et particulièrement violentes de l’écosystème Terre, à commencer par l’effondrement du vivant et la sixième extinction des espèces du fait des activités humaines.
Les interactions et rétroactions entre bouleversement du climat et destruction de la biodiversité sont telles qu’une approche intégrale et systémique des enjeux écologiques est absolument impérative dans l’expertise apportée comme dans les prérogatives du Haut Conseil.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons de compléter l’intitulé du Haut Conseil pour le climat par les mots « et le vivant ».
M. le président. L’amendement n° 231 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 27
Rédiger ainsi cet alinéa :
a) Le II est abrogé ;
La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre. Le présent amendement vise à supprimer la soumission du projet de programmation pluriannuelle de l’énergie à l’avis du Haut Conseil pour le climat.
En effet, les dispositions qui relèvent de la compétence du Haut Conseil sur les volets de la politique énergétique sont déjà intégrées dans la SNBC, sur laquelle cette instance rend obligatoirement un avis.
Les remarques qui devront être intégrées à la SNBC seront donc nécessairement prises en compte dans la programmation pluriannuelle de l’énergie, puisque celle-ci doit être compatible avec la SNBC.
De plus, le Haut Conseil peut également se saisir sur sa propre initiative des questions relatives à son domaine d’expertise. Par conséquent, il peut s’il le souhaite émettre un avis sur la PPE.
M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?
Mme Pascale Bories, rapporteure pour avis. Madame Noël, vous reprenez un amendement qui avait été présenté en commission. Votre amendement vise à transformer le Haut Conseil pour le climat en Haut Conseil pour le climat et la qualité de l’air. Or le Haut Conseil pour le climat a vocation à rendre des avis sur les politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il ne semble pas opportun d’élargir son champ de compétences à la qualité de l’air.
Il en va de même pour le vivant, monsieur Courteau.
La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 60 rectifié et 178.
L’amendement du Gouvernement tend à supprimer l’avis du Haut Conseil sur la PPE. La commission ne partage pas votre point de vue, madame la ministre, car la PPE entre dans un niveau de détail bien plus important que la SNBC, et décline de manière plus opérationnelle que cette dernière l’avenir de notre politique énergétique filière par filière.
Il me semble donc impératif d’avoir un avis du Haut Conseil sur cette programmation. C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 231 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 60 rectifié et 178 ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Ces deux amendements visent à élargir considérablement le champ de compétences du Haut Conseil, qui, je le rappelle, est composé d’experts en matière de changement climatique.
Il est d’ores et déjà prévu que le Haut Conseil dans ses rapports annuels analyse plus largement l’incidence environnementale des politiques publiques en faveur du climat. C’est dans ce cadre qu’il pourra mettre en évidence les synergies et, le cas échéant, alerter sur des incohérences entre politiques publiques. Un élargissement du champ à une problématique spécifique, mais plus large, risquerait de nuire à l’objectif principal de cette instance.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. L’amendement n° 315 rectifié bis, présenté par Mmes Préville et Lepage, MM. Tissot, Lurel, Antiste et Daudigny, Mme Grelet-Certenais, M. Temal, Mme Jasmin, M. Manable, Mme Monier et MM. Kerrouche et Jacquin, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après les mots :
sciences du climat
insérer les mots :
et des écosystèmes
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Le Haut Conseil pour le climat a pour mission de se pencher sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, sur le développement des puits de carbone et sur la réduction de l’empreinte carbone. À ce titre, il rend des rapports.
Il comprend au plus douze membres choisis en raison de leur expertise scientifique, technique, économique dans le domaine des sciences du climat. Le présent amendement vise à renforcer leur champ d’expertise en y ajoutant le domaine des écosystèmes.
En effet, le changement climatique a un effet non négligeable sur les écosystèmes. Il les bouleverse durablement, et, en retour, les écosystèmes influent sur le changement climatique. Nous sommes en train de découvrir – c’est d’ailleurs saisissant, ne l’a-t-on pas toujours su ? – que les arbres permettent, en ville, de réduire les puits de chaleur de manière non négligeable.
Nous sommes à l’aube de découvertes fantastiques sur les écosystèmes. L’écho nous en parvient au travers de livres dont le grand retentissement populaire est légitime tant ces découvertes sont réjouissantes dans un contexte plutôt sinistre. Je recommande par exemple la lecture de La Vie secrète des arbres.
Les écosystèmes et la nature en général sont des alliés à ne pas négliger dans notre lutte contre le changement climatique. Les écosystèmes les plus vulnérables ont d’ailleurs été répertoriés : ce sont les zones arctiques montagneuses, la forêt amazonienne et les écosystèmes naturels d’outre-mer qui sont classés parmi les plus menacés.
Les évolutions se mesurent. La vitesse moyenne de déplacement des espèces vivantes vers les pôles à cause du réchauffement climatique est ainsi de douze kilomètres par décennie. Le réchauffement climatique cause 2,5 % des extinctions d’espèces.
À l’inverse, la présence des forêts maintient l’humidité et limite la température. C’est pourquoi nous pensons que le Haut Conseil doit compter en son sein des experts des écosystèmes pour augmenter son champ d’expertise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?
Mme Pascale Bories, rapporteure pour avis. Madame Préville, la mission du Haut Conseil étant de donner un éclairage sur les politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre, il me semble effectivement pertinent que certains de ses membres soient experts des sciences des écosystèmes, qui produisent un effet induit sur le réchauffement climatique.
La commission émet donc un avis favorable sur l’amendement n° 315 rectifié bis.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. J’estime pour ma part que cet amendement est déjà satisfait.
Les compétences des membres du Haut Conseil en matière de climat, qu’elles portent sur les enjeux ou sur les leviers, sont nécessairement multidisciplinaires et multisectorielles. Il est par exemple important que cette instance compte parmi ses membres des experts en matière d’agriculture, de sols, de forêts compte tenu du rôle majeur joué par ces derniers sur les émissions et les absorptions de gaz à effet de serre.
Ces enjeux sont toutefois inclus dans les domaines d’expertise du Haut Conseil, à savoir les sciences du climat, de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, de l’adaptation et de la résilience face au changement climatique.
Je demande donc le retrait de l’amendement n° 315 rectifié bis ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.