M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. S’il peut en effet être compliqué de trouver un médecin entre minuit et six heures du matin pour signer un certificat de décès, je ne suis pas certain qu’il sera plus facile de trouver un maire aux mêmes heures pour réquisitionner un médecin… L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Madame la sénatrice, je me souviens des débats qui ont eu lieu à l’Assemblée nationale, mais seul le préfet peut réquisitionner un professionnel de santé s’il l’estime nécessaire et le maire peut tout à fait faire appel au préfet pour cela, afin d’aider une famille en difficulté. Telle est la réalité. Je le redis, le maire ne peut pas réquisitionner lui-même un médecin ; l’avis du Gouvernement est donc défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise précisément à rendre possible une telle réquisition par le maire ! Aujourd’hui, chacun peut certes solliciter le préfet, mais comment imaginer qu’une famille confrontée à un deuil qui vient de se produire ait comme premier réflexe de joindre le préfet ? Ce n’est pas une démarche qui va de soi.
Par ailleurs, je suis surprise de l’argument du rapporteur qui trouve difficile de solliciter un maire, alors que nous savons bien, notamment en zone rurale, que les élus sont disponibles, d’astreinte en pratique, 24 heures sur 24… Il n’est donc absolument pas compliqué de les trouver !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre. Je sais qu’il s’agit d’un sujet auquel tous les sénateurs sont très sensibles, mais la réquisition d’un professionnel de santé est une procédure tout à fait exceptionnelle et elle doit le rester. Elle est notamment déclenchée en cas de danger pour la vie des gens, ce qui est une situation évidemment différente de celle où l’on doit constater un décès, et je rappelle que, si un professionnel n’a pas répondu, le préfet envoie un gendarme le chercher à son domicile.
En outre, si le médecin ne s’est pas déplacé, c’est peut-être parce qu’il est en train de soigner des personnes qui sont en danger. Il vaut tout de même mieux le laisser soigner les vivants que lui demander d’aller auprès d’un mort. Nous devons donc rester prudents devant des dispositifs aussi coercitifs.
En réalité, cette question ne traduit qu’une seule chose : la difficulté de trouver des médecins. Or, je l’ai dit, le présent projet de loi vise justement à rendre attractif l’exercice en milieu rural et en zone sous-dense. Nous venons, je le répète, de porter à 100 euros la rémunération des médecins qui font un certificat de décès et la possibilité ouverte aux médecins retraités et aux internes de signer de tels certificats devrait encore faciliter les choses.
D’ailleurs, la dynamique est déjà à l’œuvre, puisque 50 000 certificats de décès ont donné lieu à une rémunération spécifique en 2018 et qu’ils devraient s’élever à près de 100 000 cette année. Il me semble donc que les choses sont en train de s’améliorer sur le terrain. L’ajout des médecins retraités et des internes permettra d’aller plus loin.
La réquisition par les maires me paraît être une procédure assez violente pour des médecins qui sont peut-être en train de soigner des vivants. C’est la raison pour laquelle je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 5 ter.
(L’article 5 ter est adopté.)
Article 5 quater
(Supprimé)
Chapitre III
Fluidifier les carrières entre la ville et l’hôpital pour davantage d’attractivité
Article 6
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi visant à adapter les conditions d’exercice et les dispositions relatives aux statuts des personnels mentionnés au titre V du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique, des personnels mentionnés à la section 3 du chapitre II du titre V du livre IX de la quatrième partie du code de l’éducation et des personnels employés dans les établissements mentionnés au I de l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles pour :
1° Faciliter la diversification des activités entre l’activité hospitalière publique, des activités partagées entre structures de santé ou médico-sociales et un exercice libéral, dans leur établissement ou non, pour décloisonner les parcours professionnels et renforcer l’attractivité des carrières hospitalières, en assurant un meilleur encadrement des écarts de rémunération entre les personnels titulaires et ceux recrutés par contrat ;
2° Simplifier et adapter les conditions et les motifs de recrutement par contrat pour mieux répondre aux besoins des établissements, notamment dans les spécialités où ces derniers rencontrent le plus de difficultés à recruter, et pour faciliter l’intervention des professionnels libéraux à l’hôpital.
II. – L’ordonnance est prise dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi. Le projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance prévue au I.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Nous aurons l’occasion de développer notre propos lors de l’examen de notre amendement tendant à la suppression de cet article, mais je veux insister sur les deux raisons principales qui nous conduisent à cette demande.
Tout d’abord, le Gouvernement a de nouveau recours à une ordonnance sur un sujet fondamental. Qui plus est, le champ de l’habilitation est particulièrement flou, ce qui est tout de même problématique pour un parlementaire qui doit voter cette habilitation.
Ensuite, nous craignons, sous couvert d’unifier des statuts dans un cadre unique, un certain éclatement, car ce sujet doit être mis en perspective avec le projet de loi sur la transformation de la fonction publique. Comment interpréter l’alinéa 3, qui entend « simplifier et adapter les conditions et les motifs de recrutement » ?
Certes, madame la ministre, l’article 6 a pour ambition, comme l’indique le titre du chapitre III susvisé, de renforcer l’attractivité des carrières hospitalières, ce qui est pleinement au cœur des problèmes que vivent les personnels et les établissements de santé.
Nous savons que vous êtes actuellement en pleine concertation avec les professionnels concernés pour limiter le recours à l’intérim dans les hôpitaux publics, position que nous soutenons. C’est une nécessité absolue, quand on sait que, déjà en 2013, le coût de l’intérim médical atteignait 500 millions d’euros et que, vraisemblablement, il est quasiment deux fois plus élevé aujourd’hui.
Cette dérive est dramatique et c’est un véritable cercle vicieux. Du fait de leurs difficultés à recruter – près de 30 % des postes de praticiens hospitaliers sont actuellement vacants –, les directeurs et directrices d’établissement n’ont pas d’autre choix que de recourir à l’intérim avec des salaires exorbitants, ce qui grève au final les budgets des hôpitaux et entraîne une compétitivité entre les établissements. C’est ce que nous avons entendu dans tous les territoires lors de notre tour de France des hôpitaux et des Ehpad.
Madame la ministre, la commission des affaires sociales a pris le soin d’ajouter, dans l’article 6, un objectif qui était jusqu’ici absent : assurer « un meilleur encadrement des écarts de rémunération entre les personnels titulaires et ceux recrutés par contrat ». Pouvez-vous nous dire si la question des salaires sera abordée dans la concertation que vous menez actuellement ? Un récent article du journal L’Opinion laissait entendre que ce n’était pas le cas… Or, sans aborder cette question, nous ne résoudrons pas celle de la concurrence avec le privé.
Il est également impératif de s’attaquer aux conditions de travail des personnels, ne serait-ce qu’en leur accordant des effectifs en nombre.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, sur l’article.
M. Bernard Jomier. Avant d’évoquer l’article 6, je veux dire que, quand nous sommes amenés à nous prononcer sur un amendement relatif au décès des nourrissons, sujet qui ne relève pas du conflit politique et qui est d’une particulière gravité pour chacun d’entre nous, il est tout à fait regrettable de voir une colonne d’élus entrer dans l’hémicycle, y rester moins d’une minute, puis en ressortir… Un débat parlementaire ne devrait pas ressembler à cela ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laurence Rossignol. On se demande bien quel était l’enjeu !
M. Jean-Noël Cardoux. Nous n’avons pas besoin de leçons de morale !
M. Bernard Jomier. Pour ce qui concerne l’article 6 qui prévoit d’habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour modifier les statuts et les conditions d’exercice des différentes catégories de personnels médicaux recrutés par les établissements de santé, il entend, d’une part, créer un statut unique de praticien hospitalier pour favoriser l’exercice mixte entre la ville et l’hôpital, d’autre part, simplifier le recrutement de contractuels.
Bien sûr, les conditions d’exercice à l’hôpital sont devenues illisibles du fait d’un foisonnement de statuts, dont les distinctions sont inutilement complexes. Ce constat était déjà dressé par la Cour des comptes dans un rapport de 2006 et nous ne nous opposons pas à une simplification.
De même, la diversification des activités est une demande des professionnels et nous reconnaissons volontiers qu’elle rendra les carrières plus attractives.
Mais nous regrettons que le projet d’ordonnance qui nous est soumis ne décrive que brièvement de grands principes et ne mentionne aucunement des règles d’encadrement pourtant indispensables.
En effet, comment s’assurer que votre réforme ne se fera pas au détriment de l’hôpital, si elle se traduit en un désinvestissement des praticiens hospitaliers de leur travail au sein de l’hôpital public au profit de leur activité privée ? Une autorité locale sera-t-elle chargée de la cohérence de l’ensemble, afin de garantir la continuité et la qualité des soins ? Ce sont bien ces impératifs qui sont en jeu et des dispositifs de contrôle doivent être garantis.
De la même manière, nous craignons que les mesures de simplification du recrutement des contractuels ne concurrencent le statut de praticien hospitalier. Nous nous réjouissons de l’apport adopté en commission, sur l’initiative du rapporteur, concernant l’encadrement des écarts de salaires entre les titulaires et les contractuels, facteur important d’attractivité et de fidélisation des praticiens à l’hôpital.
Vous nous répondrez sans doute que la concertation doit se poursuivre avec les acteurs pour préciser les contours de ces dispositions. Nous ne pouvons que nous y plier, madame la ministre, mais nous souhaiterions avoir des précisions sur les points évoqués avant de nous prononcer.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 52 rectifié quater est présenté par Mmes Guidez et Eustache-Brinio, MM. Henno, Decool et Guerriau, Mme Garriaud-Maylam, M. Morisset, Mmes L. Darcos et Kauffmann, MM. L. Hervé et Meurant, Mme Billon, M. Bonne, Mme Férat, MM. Lafon et Laménie, Mme de la Provôté, MM. Cazabonne et Moga et Mme A.M. Bertrand.
L’amendement n° 299 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 52 rectifié quater.
Mme Jocelyne Guidez. L’article 6 habilite le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures en vue de la création d’un statut unique de praticien hospitalier, qui ira de pair avec la suppression du concours. De façon complémentaire, l’article réforme les conditions de recours à l’emploi médical contractuel dans le cadre d’un nouveau contrat.
Si cet article vise à apporter une solution aux difficultés rencontrées par les hôpitaux sur la question du recrutement, il demeure regrettable, sur la forme, qu’une mesure de cette importance soit renvoyée à une ordonnance. En effet, les conditions de l’emploi médical hospitalier constituent un enjeu central pour le devenir des établissements publics de santé. Un tel sujet aurait donc mérité un débat à l’échelon du Parlement.
Sur le fond, des professionnels du secteur ont fait part de leurs inquiétudes sur le possible risque d’une nomination des praticiens hospitaliers par les directions d’établissement en lieu et place de la procédure nationale pilotée par le Centre national de gestion. Ils craignent ainsi le développement de recrutements locaux à la discrétion des managers hospitaliers, créant une hiérarchie entre directeurs et praticiens.
Par conséquent, la nomination de ces professionnels devrait rester nationale. En effet, bien qu’imparfait, le processus de recrutement actuel est ouvert à tous et reconnaît la compétence médicale et la volonté de l’engagement dans le service public qui sont sanctionnées par un examen devant un collège médical de la spécialité.
C’est pourquoi, pour des raisons de transparence du processus, le présent amendement vise à supprimer l’article 6 de ce projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour présenter l’amendement n° 299.
Mme Michelle Gréaume. Nombre d’établissements publics de santé rencontrent des difficultés importantes pour recruter des praticiens en raison de la mise en concurrence des établissements, alors que nous avons besoin de développer la coopération entre la ville et l’hôpital.
L’article 6 prévoit de fluidifier les carrières entre la ville et l’hôpital pour accroître l’attractivité de l’exercice à l’hôpital ; nous y voyons un signal positif, mais en regardant de plus près, nous nous apercevons que, pour y parvenir, vous prétendez favoriser l’exercice à l’hôpital des professionnels libéraux, madame la ministre.
Alors que nous parlons depuis plusieurs jours du manque de professionnels libéraux dans les zones sous-denses, vous allez leur demander demain d’exercer, en plus, dans les hôpitaux publics. Il y a une incohérence !
Encourager l’exercice partagé entre la ville et l’hôpital, pourquoi pas ? Mais il ne faut pas que cela se fasse au détriment de l’activité hospitalière. Cela risque en fait de contribuer à l’hémorragie qui est déjà à l’œuvre dans le secteur public.
Au motif de simplification, vous remplacez les cinq statuts actuels par un statut unique de praticien contractuel. Au passage, vous supprimez le concours, alors même qu’il est le garant de l’égalité de traitement et de l’absence de favoritisme ; nous ne comprenons pas les raisons de ce choix.
Vous voulez réformer le statut de la fonction publique ; c’est normal, les choses doivent évoluer avec le temps, mais à condition de veiller à améliorer les conditions de travail, de revaloriser les rémunérations et de titulariser les contractuels qui sont déjà trop nombreux.
Devant le flou qui entoure cette réforme, nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission préférerait bien entendu que la réforme du statut des praticiens hospitaliers se fasse par voie législative plutôt que par ordonnance et je regrette que le cadre d’habilitation prévu à l’article 6 soit particulièrement vague – j’en ai fait largement état dans mon rapport.
Pour autant, dans la mesure où des concertations avec les acteurs concernés ont été engagées, il me paraît un peu tard pour revenir sur cette dynamique.
En outre, si nous appliquions la même logique à l’ensemble du projet de loi, nous devrions supprimer de très nombreux articles… Or nous sommes convenus, en commission et en dépit de nos fortes réserves sur le nombre de renvois aux ordonnances, de nous montrer aussi constructifs que possible dans l’élaboration de la loi.
Nous serons cependant attentifs au contenu de l’ordonnance qui nous sera présentée pour ratification et nous présenterons des amendements si besoin. J’espère par ailleurs qu’un tel dessaisissement du Parlement ne se représentera plus à l’avenir.
Vous l’aurez compris, l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Je crois que nous sommes tous d’accord sur l’objectif, car chacun est témoin de la difficulté d’attirer les professionnels dans les hôpitaux publics, notamment dans certaines spécialités. Ainsi, nous assistons à une compétition entre les établissements et à une augmentation permanente du recours aux intérimaires, et ce malgré plusieurs décrets qui visaient à réduire la rémunération de ces personnels.
Il est très difficile aujourd’hui de réguler la situation. C’est pourquoi nous souhaitons favoriser des statuts plus souples qui permettent de rendre plus attractifs certains postes de praticiens hospitaliers, notamment dans les spécialités en tension. Je pense par exemple aux anesthésistes : avec des salaires beaucoup plus élevés dans le secteur privé, ils y sont, d’une certaine manière, aspirés, ce qui pose d’importantes difficultés de fonctionnement dans les hôpitaux publics, notamment pour les blocs opératoires. L’absence d’anesthésistes empêche les chirurgiens d’opérer, ce qui diminue l’attractivité de l’hôpital, ainsi que son activité. Chacun mesure les effets pervers de ce manque d’attractivité.
Dans ce contexte, l’article 6 a pour objet de renforcer l’attractivité des carrières médicales hospitalières, en favorisant la diversification des activités de ces professionnels, en permettant la reconnaissance des responsabilités exercées par les praticiens au sein de l’hôpital – je pense notamment à l’exercice de missions administratives – ou au sein des commissions médicales d’établissement, et en augmentant la fluidité des carrières entre la ville et l’hôpital – une meilleure articulation entre exercices libéral et hospitalier est particulièrement importante dans les hôpitaux de proximité.
La concertation en cours permettra de moderniser le statut de praticien hospitalier titulaire, ainsi que les conditions de recours à l’emploi contractuel dans le cadre d’un contrat unique.
Les hôpitaux ont absolument besoin de ces évolutions pour adapter leur politique de l’emploi médical et mieux répondre aux attentes et aspirations des praticiens.
Pour autant, les directeurs d’établissement auront toujours la possibilité de ne pas autoriser un contrat, par exemple s’il accordait trop de temps à l’exercice libéral. C’est une réponse à l’argument selon lequel l’exercice libéral pourrait prendre le pas sur l’exercice hospitalier.
Par ailleurs, nombre de mesures que nous devrons prendre ne relèvent pas de la loi et ne figureront donc pas dans l’ordonnance, mais nous avons besoin d’un support législatif et, si nous ne disposons pas d’un véhicule législatif au moment où la concertation aura abouti, nous risquons de bloquer le processus.
Les premières concertations visant à redessiner le cadre d’emploi médical hospitalier ont été l’occasion pour certaines organisations représentant les praticiens hospitaliers d’exprimer leurs attentes et leurs craintes. Je comprends tout à fait ces réactions et vous pouvez être certains que j’en tiendrai compte dans les arbitrages.
En ce qui concerne la fameuse suppression du concours national de praticien hospitalier, je veux vous rassurer : la procédure de nomination restera nationale, des assurances ont été données en ce sens aux acteurs de la concertation. Alors, pourquoi supprimer ce concours ? En réalité, c’est un faux concours, puisqu’il est sur titres et curriculum vitae et que plus de 90 % des candidats sont admis. D’ailleurs, une grande majorité de ces candidats travaille déjà à l’hôpital et obtient un poste qui était fléché pour eux. En tout cas, nous préservons la possibilité de mettre un terme à la fonction dans la première année qui suit le recrutement ; ainsi, si le praticien hospitalier ne donne pas satisfaction durant cette période, il pourra être mis fin à son contrat.
Madame Cohen, vous m’avez sollicitée sur la question des salaires. La discussion engagée porte en priorité sur la modernisation des conditions d’exercice à l’hôpital d’une manière générale – c’est vraiment, je le répète, la priorité absolue de la concertation en cours. Il ne s’agit pas de négociations salariales, même si évidemment des aspects de rémunération vont être abordés, notamment dans le cadre des missions que nous voulons voir reconnues. La porte n’est donc pas fermée à certaines revalorisations, mais les discussions sur les salaires n’ont pas lieu dans ce cadre.
Enfin, le recours à une ordonnance est nécessaire, parce que la concertation n’est pas terminée. Nous avons besoin d’un temps supplémentaire de discussion avant d’inscrire les différentes mesures dans la loi. Pour autant, je me suis engagée devant la commission des affaires sociales à venir devant elle, avant l’examen du projet de loi d’habilitation, présenter l’ordonnance et ses mesures d’impact, afin que les sénateurs puissent en débattre avec le Gouvernement.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à ces amendements.
M. le président. Madame Guidez, l’amendement n° 52 rectifié quater est-il maintenu ?
Mme Jocelyne Guidez. Par cohérence, je le retire, monsieur le président, mais il faut absolument apporter les réponses nécessaires aux professionnels qui s’interrogent sur les discussions en cours.
M. le président. L’amendement n° 52 rectifié quater est retiré.
Madame Cohen, l’amendement n° 299 est-il maintenu ?
Mme Laurence Cohen. Je n’ai absolument pas été convaincue par les propos du rapporteur. Souvent dans cet hémicycle, on nous dit que nous posons le bon diagnostic, mais il y a ensuite une divergence sur les solutions à apporter. En tout cas, je crois que, lorsque l’on n’est pas d’accord avec le principe des ordonnances ou avec une disposition proposée, il faut aller jusqu’au bout et voter contre !
En revanche, je remercie Mme la ministre, parce qu’elle a manifestement entendu nos préoccupations et qu’elle a apporté des précisions qui nous éclairent. Toutefois, ces précisions ne sont pas suffisantes à nos yeux ; c’est pourquoi nous maintenons notre amendement.
M. le président. L’amendement n° 89 rectifié, présenté par M. Savary, Mme A.M. Bertrand, MM. Bonne, Bouloux et J.M. Boyer, Mmes Bruguière et Chain-Larché, M. Chaize, Mme Chauvin, MM. Cuypers, Danesi, Daubresse et de Legge, Mme Delmont-Koropoulis, M. del Picchia, Mmes Deroche, Deromedi, Di Folco, Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, M. B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest et Gremillet, Mme Gruny, M. Guené, Mme Imbert, MM. Karoutchi, Kennel et Laménie, Mmes Lamure et Lassarade, MM. D. Laurent, Lefèvre et Longuet, Mme Malet, M. Mandelli, Mmes M. Mercier et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Perrin, Piednoir, Pierre, Pointereau et Poniatowski, Mmes Procaccia et Puissat, MM. Raison, Rapin, Revet, Saury et Sido, Mme Thomas et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Après le mot :
publique,
insérer les mots :
des personnels des établissements mentionnés au 3° de l’article L. 6112-3 du même code,
La parole est à Mme Corinne Imbert.
Mme Corinne Imbert. Cet amendement vise à étendre les assouplissements prévus par l’article 6 pour faciliter l’emploi de médecins dans les établissements de santé publics aux établissements du secteur privé à but non lucratif. Ainsi, les professionnels médicaux exerçant en établissement privé à but non lucratif auront la possibilité d’exercer leur art de façon comparable aux praticiens hospitaliers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement tend à élargir le champ de l’habilitation donnée au Gouvernement pour légiférer par ordonnance, ce qui est contraire à l’article 38 de la Constitution, parce que le Parlement ne peut pas lui-même se dessaisir de sa compétence. La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, son avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Savary, l’amendement n° 89 rectifié est-il maintenu ?
M. René-Paul Savary. Non, nous le retirons, monsieur le président, mais je crois que Mme la ministre devrait réfléchir à cette proposition.
Sous réserve des observations émises par le rapporteur, la création d’un statut unique pour les praticiens hospitaliers peut permettre de régler un certain nombre de problèmes. De ce point de vue, l’amendement adopté en commission visant à ce que l’ordonnance prenne en compte les écarts de rémunération entre les personnels titulaires et ceux qui sont recrutés par contrat va dans le bon sens.
Pourquoi ai-je déposé cet amendement ? Parce que nombre de praticiens hospitaliers travaillent aussi, en tant que contractuels, dans des établissements privés à but non lucratif – ces deux types d’établissements appartiennent finalement à la même école. Je pensais aussi aux centres de soins, dont les actions peuvent être complémentaires de celles des maisons de santé pluridisciplinaires qui sont gérées en libéral. Enfin, élargir le statut unique de praticien hospitalier à ce type d’établissement de santé est un moyen de lutter contre la désertification médicale.
M. le président. L’amendement n° 89 rectifié est retiré.
L’amendement n° 760, présenté par MM. Jomier et Daudigny, Mmes Grelet-Certenais et Jasmin, M. Kanner, Mmes Rossignol, Meunier, Van Heghe, Féret et Lubin, M. Tourenne, Mmes M. Filleul et Harribey, MM. Lurel, J. Bigot et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel et M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Duran et Fichet, Mme Ghali, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme G. Jourda, MM. Kerrouche et Lalande, Mmes Lepage et Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont, Préville et S. Robert, M. Sueur, Mme Taillé-Polian, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Après le mot :
hospitalières,
insérer les mots :
en créant un statut unique de praticien hospitalier et
II. – Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
L’article 25 septies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires s’applique aux personnels soumis au statut unique mentionné au 1° du présent I.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Madame la ministre, nous souscrivons à votre objectif de lutte contre les dérives de l’intérim et de renforcement de l’attractivité de la carrière hospitalière, mais parallèlement nous sommes également très attachés à développer un cadre statutaire qui garantisse l’exercice de la mission de service public des praticiens hospitaliers.
C’est pourquoi nous proposons que l’exercice mixte, que le Gouvernement souhaite consacrer au travers de la création d’un statut unique de praticien hospitalier, se fasse dans le respect de l’interdiction de cumuler une activité à temps plein et une autre activité, afin de ne pas voir apparaître d’autres dérives.
Nous partageons le projet de développer l’activité mixte entre la ville et l’hôpital, mais si aujourd’hui beaucoup de praticiens hospitaliers sont amenés à faire des gardes dans le secteur privé en plus de leur temps plein à l’hôpital, c’est pour des raisons financières. De meilleures rémunérations et conditions de travail sont nécessaires pour améliorer l’attractivité des carrières hospitalières. D’ailleurs, la commission des affaires sociales a souhaité que l’ordonnance traite de la question de l’encadrement des écarts de rémunération entre les personnels titulaires et contractuels.
Par cet amendement, il s’agit de s’assurer de la compatibilité entre activités principale et secondaire. Par exemple, qui contrôlera le fait qu’un médecin qui a travaillé toute la journée dans un cabinet privé ne passe pas la nuit à l’hôpital, risquant ainsi de mettre potentiellement en danger la sécurité des patients ?
Les futures dispositions devront donc comporter des garde-fous. L’un d’entre eux consiste à affirmer l’incompatibilité d’un cumul entre une activité à temps plein et d’autres activités. Pour nous, ce garde-fou est essentiel.