Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour la réplique.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de ces éléments de réponse. Aujourd’hui, les professeurs de langues régionales ne sont pas vraiment rassurés par le dispositif que le Gouvernement a prévu de mettre en place au niveau de cet enseignement. Ces langues, d’après nous, n’en sortiront ni renforcées ni revalorisées. Comme vous le savez, il y a moins de possibilités et le choix de l’option facultative est nettement défavorisé.
Ce qui a été possible pour les langues anciennes, dont l’enseignement était aussi menacé, doit également être possible pour les langues régionales. Celles-ci, comme je l’ai rappelé dans ma question, constituent de véritables vecteurs culturels : ce sont des langues de patrimoine, d’héritage, de culture et de tradition.
Je reviendrai vers vous car la Fédération des enseignants de langue et culture d’oc de l’éducation nationale a établi un argumentaire ne laissant aucun doute sur l’inquiétude que suscite, parmi eux, votre réforme du baccalauréat et de l’enseignement des langues régionales.
transfert des biens des communes dans le cadre de la création d’une commune nouvelle
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Fournier, en remplacement de Mme Sylvie Vermeillet, auteure de la question n° 713, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mme Catherine Fournier. Ma collègue Sylvie Vermeillet, sénatrice du Jura, souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les modalités de transfert de biens appartenant à des communes vers une commune nouvelle.
En effet, les communes historiques ont l’obligation de publier, auprès du service de publicité foncière territorialement compétent, le transfert de propriété des biens vers la commune nouvelle. Cela leur demande un travail considérable de recensement de toutes les parcelles du territoire communal, ainsi que de recherche des origines de propriété des biens à muter.
Certains notaires considèrent que l’arrêté préfectoral créant la commune nouvelle n’emporte pas transfert de droit automatique de propriété, parcelle par parcelle, sans la publicité nécessaire au service de publicité foncière compétent. Outre la lourdeur administrative, cette procédure a également un coût financier non négligeable pour les collectivités concernées.
Est-il possible de nous indiquer quelles mesures concrètes pourraient être envisagées afin de simplifier les procédures, en permettant un transfert systématique du patrimoine des anciennes communes ? Pourrait-il être envisageable, par exemple, que la simple publication des nouveaux numéros du système informatique pour le répertoire des entreprises – ou Siren – des communes au service des publicités foncières entraîne le transfert des biens des « anciennes » communes concernées, de manière systématique et globale ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice, la création d’une commune nouvelle par fusion de communes existantes peut intervenir par délibérations concordantes des conseils municipaux des communes concernées ou être décidée par arrêté préfectoral, conformément au code général des collectivités territoriales.
Il ne s’agit pas d’un simple changement de dénomination ni de numéro Siren : cette opération entraîne la création d’une personne morale nouvelle.
Du fait de la fusion, les biens immobiliers qui faisaient partie du patrimoine des anciennes communes sont transférés dans le patrimoine de la commune nouvelle. Ces transferts doivent obligatoirement être publiés au fichier immobilier, en application des dispositions de l’article 28 du décret du 4 janvier 1955.
Le document publié au fichier immobilier constatant le transfert doit respecter les exigences de forme régissant la publicité foncière, conformément aux décrets du 4 janvier 1955 précité et du 14 octobre 1955, notamment l’identification complète des parties et la désignation précise des immeubles concernés.
En application de l’article 1042 A du code général des impôts, la publication de ce transfert est exonérée de taxe de publicité foncière et de contribution de sécurité immobilière, de sorte qu’il n’est pas nécessaire d’évaluer les immeubles.
Recenser dans l’arrêté de fusion ou dans un acte authentique administratif ou notarié l’ensemble des biens concernés par ces transferts, dans le respect des exigences de forme précitées, peut se révéler, comme vous l’avez souligné, lourd à réaliser en pratique, dans la mesure où les opérations de fusion de communes peuvent concerner un grand nombre d’immeubles.
Dans ces circonstances, les transferts de biens peuvent être constatés au fil de l’eau, c’est-à-dire immeuble par immeuble, à l’occasion des mutations postérieures à la création de la commune nouvelle.
Chaque transfert d’immeuble sera alors constaté dans un acte publié antérieurement ou concomitamment à l’acte de cession de cet immeuble par la nouvelle commune, ou dans une disposition de l’acte de cession lui-même.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Fournier, pour la réplique.
Mme Catherine Fournier. Monsieur le ministre, le Jura comptant 60 communes nouvelles, de réelles difficultés sont rencontrées dans ce département.
Dans le cas de fusions de sociétés commerciales, entraînant parfois des transferts d’actifs, la démarche est nettement plus simple. Ne serait-il donc pas possible d’envisager une simplification ? Mme Sylvie Vermeillet reste à votre disposition pour en discuter.
difficultés du service départemental d’incendie et de secours de la seine-maritime
Mme la présidente. La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 727, adressée à M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales.
Mme Agnès Canayer. Ma question concerne le financement du service départemental d’incendie et de secours de la Seine-Maritime, le SDIS 76.
En 2017, dans le département de la Seine-Maritime, les centres de pompiers sont intervenus 66 165 fois pour des missions de secours, 6 227 fois sur des incendies, 3 114 fois sur des opérations diverses et 2 335 fois sur des risques technologiques. De plus en plus sollicités, ils répondent notamment aux effets de la désertification médicale et du vieillissement de la population. Acteurs de notre territoire, leur présence et leur maillage doivent être garantis et confortés.
Pourtant, comme a pu le soulever la Cour des comptes dans son récent rapport, en date du 26 mars dernier, la situation des SDIS et celle du corps des pompiers sont fragiles.
Plusieurs causes à cela : d’une part, la hausse des charges de personnel, qui représentent aujourd’hui 82 % des charges courantes ; d’autre part, l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne du 21 février 2018, considérant que les sapeurs-pompiers entrent dans le champ de la directive de 2003 sur le temps de travail. L’application stricte de cette directive aura des conséquences importantes sur le recrutement des volontaires, de plus en plus difficile depuis de nombreuses années.
Outre les problématiques de recrutement, les SDIS font face à des dépenses en augmentation, comme le prix du carburant ou encore celles qui sont liées à la mise en œuvre du règlement général sur la protection des données, le RGPD.
En parallèle, les financements s’effritent. Ainsi, le dispositif dit « de Cahors » impacte-t-il directement les SDIS, dont les principaux contributeurs sont les collectivités. En Seine-Maritime, cinq collectivités contributrices sont concernées par cette contractualisation : les villes de Rouen et du Havre, la métropole Rouen Normandie, la communauté urbaine Le Havre Seine Métropole et le département. Elles sont dans l’obligation de maîtriser l’évolution de leurs dépenses réelles de fonctionnement, parmi lesquelles figurent les contributions au SDIS.
Ma question est donc simple, monsieur le ministre : comment le Gouvernement compte-t-il accompagner les services départementaux d’incendie et de secours, notamment celui de la Seine-Maritime, qui sont pris en tenaille entre leurs nouvelles contraintes et la baisse de leurs financements ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice Canayer, les contrats de maîtrise de la dépense publique, prévus aux articles 13 et 29 de la loi du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, traduisent les nouvelles modalités d’association des collectivités à la maîtrise de la dépense publique.
Les collectivités entrant dans le champ d’application de l’article 29 de la loi de programmation s’engagent sur un objectif annuel d’évolution de leurs dépenses réelles de fonctionnement.
Chaque année, les résultats de gestion font l’objet d’un examen partagé avec le représentant de l’État pour apprécier si l’objectif a pu être atteint.
Ces comparaisons, pour conserver leur pertinence, doivent être effectuées à périmètre constant. Aussi, le niveau des dépenses réelles de fonctionnement prend en compte « les éléments susceptibles d’affecter leur comparaison sur plusieurs exercices, et notamment […] la survenance d’éléments exceptionnels affectant significativement le résultat ».
Les évolutions réglementaires ne constituent pas des éléments exceptionnels à prendre en compte au titre de l’article 29.
L’article L. 1424-35 du code général des collectivités territoriales précise : « La contribution du département au budget du service départemental d’incendie et de secours est fixée, chaque année, par une délibération du conseil départemental au vu du rapport sur l’évolution des ressources et des charges prévisibles du service au cours de l’année à venir, adopté par le conseil d’administration de celui-ci.
« Les relations entre le département et le service départemental d’incendie et de secours et, notamment, la contribution du département, font l’objet d’une convention pluriannuelle.
« Les modalités de calcul et de répartition des contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents pour la gestion des services d’incendie et de secours au financement du service départemental d’incendie et de secours sont fixées par le conseil d’administration de celui-ci. »
Il résulte de ce qui précède que les contributions au SDIS des collectivités concernées ne pourraient avoir un impact sur la maîtrise des dépenses publiques que si leurs montants varient de façon significative entre deux exercices du fait de la survenance d’un élément exceptionnel.
Or les dispositions de l’article 29 de la loi de programmation permettent de faire face soit à des événements exceptionnels, soit à des besoins d’investissement précis, en prévoyant le retraitement des dépenses concernées.
Ainsi, en cas de catastrophe naturelle de grande ampleur qui nécessiterait d’apporter des financements complémentaires et urgents au SDIS, ces dépenses exceptionnelles pourraient faire l’objet d’un retraitement.
De même, une collectivité peut verser au SDIS une subvention d’équipement dès lors que celle-ci est accordée pour lui permettre d’acquérir ou de créer une immobilisation. Sous réserve que l’immobilisation ainsi financée soit identifiée dès la demande de financement, suivie à l’actif du SDIS et que l’entité versante soit capable de suivre l’existence du lien entre le financement octroyé et l’immobilisation acquise ou créée par le SDIS, cette contribution est bien inscrite en section d’investissement.
Elle n’aura alors aucun impact sur la norme de dépenses contractualisée, concernant les seules dépenses de fonctionnement.
Le dispositif contractuel a ainsi été conçu de manière suffisamment souple pour permettre aux groupements à fiscalité de poursuivre leurs prises de compétences sans effets négatifs sur les conditions d’action des SDIS.
Le Gouvernement a fait le choix de stabiliser ce dispositif, afin de ne pas compromettre la stabilité des relations contractuelles et d’être à même de l’évaluer dans sa conception initiale, résultant des échanges avec les associations d’élus dans le cadre de la Conférence nationale des territoires.
Mme la présidente. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour la réplique.
Mme Agnès Canayer. Je vous remercie de cette réponse, monsieur le ministre. On ne peut qu’adhérer à la nécessaire maîtrise de la dépense publique. Néanmoins, je relaie ici l’inquiétude réelle du SDIS 76. Ce dernier se trouve dans une situation particulière : deux de ses principaux contributeurs, finançant ses ressources à hauteur de 73 %, sont soumis à ces contraintes, engendrées par un fonctionnement normal, et non par des motifs exceptionnels.
interdiction d’exercer une fonction élective pendant un arrêt maladie
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Gold, auteur de la question n° 806, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
M. Éric Gold. Quel ne fut pas mon étonnement, monsieur le ministre, en recevant, de la part d’une conseillère municipale de mon département, une lettre détaillant la situation ubuesque dans laquelle elle se trouve aujourd’hui, pour avoir poursuivi ses activités d’élue pendant un arrêt maladie.
La caisse primaire d’assurance maladie – CPAM – lui réclame le remboursement de l’ensemble des indemnités journalières qui lui ont été versées dans le cadre de son arrêt maladie. Ces indemnités sont bien sûr liées à son emploi salarié, et non à son activité d’élue, puisque, en tant que simple conseillère municipale, elle n’a perçu aucune indemnité.
La CPAM lui reproche notamment sa participation à trois réunions du conseil municipal pendant son congé maladie. Or le médecin avait bien précisé sur l’arrêt de travail que, compte tenu de sa pathologie, les sorties libres lui étaient autorisées.
D’après les indications de la CPAM, cette précision est inutile et le médecin doit, dans le cas d’un élu, spécifier expressément sur l’arrêt de travail initial que toutes les activités liées au mandat sont autorisées, ce que la plupart des élus et des médecins ignorent.
Cette conseillère municipale, comme beaucoup d’autres, a eu le courage de poursuivre son mandat malgré la maladie. Le devoir de l’État n’est-il pas d’encourager toutes les formes d’engagement, notamment dans un contexte où la crise des vocations se fait de plus en plus ressentir – de manière plus prégnante à l’échelle municipale, sur des fonctions pour lesquelles, dans la majorité des cas, aucune indemnité n’est prévue et où chaque élu s’engage sur son temps personnel pour la collectivité ?
Trois questions se posent ici selon moi.
Comment améliorer le dispositif, pour éviter des situations totalement injustes, où des élus se voient réclamer plusieurs milliers d’euros pour avoir simplement tenu leurs engagements envers leur commune ?
Si le Gouvernement ne souhaite pas modifier le dispositif existant, comment améliorer l’information des élus et des médecins sur ces situations très spécifiques ?
Enfin, dans le cas d’un maire, si l’on considère qu’il ne doit pas poursuivre ses activités d’élu pendant toute la durée de son congé maladie, doit-on, dès lors, considérer que son pouvoir de police est inopérant, ce dernier n’étant pas transférable ?
J’insiste sur cette ultime question, qui, selon moi, décrit parfaitement l’absurdité de situations dans lesquelles peuvent se retrouver des élus en arrêt maladie : d’un côté, on leur demande d’assurer des fonctions primordiales à l’échelle de leur commune ; de l’autre, on leur demande de respecter l’absence de toute activité, au titre de leur arrêt maladie.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Mesdames, messieurs les sénateurs, comme la plupart d’entre vous, je connais les difficultés rencontrées par les élus locaux, notamment des plus petites communes, qui se trouvent en arrêt maladie.
Lorsque les élus locaux exerçant une activité professionnelle sont placés en congé maladie, ils perçoivent des indemnités journalières.
Le bénéfice de ces indemnités journalières est toutefois subordonné au respect des dispositions de l’article L. 323-6 du code de la sécurité sociale : le salarié placé en congé de maladie doit observer les prescriptions du praticien, se soumettre aux contrôles organisés par le service du contrôle médical, respecter les heures de sorties autorisées par le praticien et s’abstenir de toute activité non autorisée.
Ainsi, un salarié, par ailleurs élu local, placé en congé de maladie ne peut régulièrement exercer son mandat électif que si son médecin l’y autorise expressément sur l’arrêt de travail. Dans le cas contraire, il peut se voir réclamer le remboursement des indemnités journalières, avec, parfois, une sanction financière, la Cour de cassation assimilant effectivement les indemnités de fonction à une activité donnant lieu à rémunération.
Cette difficulté, que des élus de bonne foi ont pu rencontrer et dont vous avez donné un exemple, monsieur le sénateur Éric Gold, a été soulignée au cours des travaux de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation sur les conditions d’exercice des mandats locaux. Elle est effectivement le fruit d’un défaut d’information des élus sur la nécessité de préciser à leur médecin qu’il doit expressément les autoriser à exercer leur mandat électif pendant leur arrêt de travail.
C’est pourquoi nous avons demandé à nos services de travailler à la résolution de ce problème. Ils ont ainsi récemment élaboré, conjointement avec la Direction de la sécurité sociale, une fiche explicative relative aux congés maladie des élus, qui a été transmise à l’ensemble des associations d’élus aux fins d’information de leurs adhérents.
Cette fiche sera par ailleurs intégrée par l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité à son guide de l’élu local, mis en ligne et régulièrement actualisé.
Dans son intervention du 25 avril dernier, le Président de la République a indiqué souhaiter que soit engagé un véritable travail sur le statut de l’élu. Le Gouvernement entend faire aboutir ce chantier avant la fin de l’été, s’inspirant d’ailleurs des travaux de la délégation aux collectivités territoriales du Sénat, pour que le prochain scrutin municipal se déroule dans un cadre juridique stabilisé, clarifié et prenant mieux en compte les difficultés des élus, notamment des petites communes.
Enfin, vous nous interrogez sur le devenir de l’exercice des pouvoirs de police d’un maire empêché d’exercer ses fonctions. Le droit commun y pourvoit.
D’une part, à titre préventif, le maire peut déléguer ses pouvoirs à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l’absence ou en cas d’empêchement des adjoints, à des membres du conseil municipal, conformément à l’article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales.
D’autre part, si le maire se retrouve absent ou empêché sans avoir prévu de délégation particulière, il est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint dans l’ordre des nominations et, à défaut d’adjoint, par un conseiller municipal désigné par le conseil ou, à défaut, pris dans l’ordre du tableau. Ce régime général de suppléance, prévu à l’article L. 2122-17 du même code, est destiné à assurer la continuité de l’action municipale et concerne également les pouvoirs de police du maire.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Gold, pour la réplique.
M. Éric Gold. Je vous remercie de ces précisions, monsieur le ministre. Pour avoir interrogé un certain nombre d’élus et de médecins, je peux vous assurer que le message n’est pas passé pour l’instant. Les dispositifs que vous venez de décrire sont totalement méconnus.
taxe sur les droits de passage des opérateurs de télécommunications pour le domaine public routier
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, auteure de la question n° 734, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le ministre, dans un livre blanc paru en octobre 2018, la Banque des territoires s’est penchée sur les droits de passage télécom pour les collectivités territoriales.
La Banque confirme les problématiques que je constate aujourd’hui dans mon département, notamment à Franqueville-Saint Pierre et à Saint-Martin-de-Boscherville, deux communes de la métropole Rouen Normandie. Je veux parler d’une insécurité juridique liée à l’hétérogénéité du traitement des droits de passage sur le territoire national.
La loi du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications, transposant le premier paquet Télécoms, a conditionné la délivrance d’une permission de voirie contre l’acquittement de redevances pour l’occupation du domaine public routier.
En 2004, la loi pour la confiance dans l’économie numérique a reconnu la compétence des collectivités territoriales en la matière, tout en instituant une compétence concurrente et partagée entre tous les échelons de collectivités territoriales, mais sans en définir les contours.
Le 9 octobre 2017, la métropole Rouen Normandie a adopté, par décision du conseil métropolitain, la création d’une taxe sur les droits de passage des opérateurs de télécommunications pour le domaine public routier.
Conformément au décret n° 2005-1676 du 27 décembre 2005, la métropole a aligné la tarification des droits de passage sur les montants plafonds fixés. Elle exerce donc un pouvoir fiscal, alors qu’elle ne dispose pas de la compétence de l’enfouissement des réseaux de télécommunications.
En effet, sous couvert d’exercer la compétence voirie, la métropole s’est attribué l’exclusivité de la collecte de ce prélèvement obligatoire. Or les travaux d’enfouissement des lignes de télécommunication ont été entièrement financés par les communes, qui devraient logiquement percevoir les recettes de la taxe sur les droits de passage des opérateurs.
Le 18 janvier dernier, lors d’une réunion du grand débat national à Souillac, le Président de la République a rappelé l’objectif de déploiement du très haut débit sur 100 % du territoire national à l’horizon 2020, défini par le plan France très haut débit en 2013.
De telles expériences n’incitent pas les communes à investir, et à s’investir, dans l’installation d’un réseau de télécommunications souvent coûteuse et techniquement complexe.
Une fois encore, le millefeuille intercommunal engendre des effets contre-productifs, faute de concertation. Au regard des compétences qui leur ont été attribuées en matière d’enfouissement des réseaux de télécommunication, la métropole ne devrait-elle pas, monsieur le ministre, reverser aux communes les recettes de cette taxe ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice Morin-Desailly, la métropole Rouen Normandie est compétente en matière de voirie. À ce titre, conformément aux dispositions des articles R. 20-51 et R. 20-52 du code des postes et des télécommunications électroniques, c’est bien le gestionnaire du réseau occupé, c’est-à-dire en l’espèce le réseau de voirie, qui perçoit le montant de cette redevance.
Par conséquent, la métropole Rouen Normandie est bien compétente pour instituer et percevoir la redevance, quand bien même l’enfouissement des réseaux qui sont assujettis à la redevance a été réalisé par les communes et non par la métropole.
Toutefois, en cas d’accord réciproque entre la métropole et ses communes membres, il est loisible à l’intercommunalité de reverser tout ou partie du produit de la redevance à ses communes membres par l’intermédiaire d’une révision libre du montant de l’attribution de compensation, dans les conditions prévues au 1 bis du V de l’article 1609 nonies C du code général des impôts.
avenir des zonages
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, auteure de la question n° 751, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mme Anne-Catherine Loisier. Monsieur le ministre, ma question porte sur l’avenir des différents régimes zonés après 2020.
Il existe à ce jour huit régimes zonés en France et sept d’entre eux expirent en 2020. Ces régimes, nous le savons, permettent des mesures d’exonération fiscale en faveur des entreprises, d’exonération des charges sociales patronales ou encore des mesures connexes prises en compte dans les dotations aux collectivités ou pour l’octroi d’aides de la part d’agences de l’eau.
Si l’efficacité de certains de ces dispositifs doit être interrogée et évaluée, il est toutefois indispensable de ne pas laisser les territoires concernés sans perspective. De fait, que ce soient les zones de revitalisation rurale, les quartiers prioritaires de la politique de la ville ou encore les zones de développement prioritaire, ces régimes de zonage restent un outil dynamique et un soutien important que les acteurs des collectivités locales doivent pouvoir d’ores et déjà anticiper.
Je souhaiterais donc savoir, monsieur le ministre, comment le Gouvernement envisage le renouvellement de ces zonages. Est-il prévu de maintenir la révision au 1er janvier 2021, de la reporter après 2022, comme l’a fait la Commission européenne s’agissant des zones d’aides à finalité régionale, AFR, ou encore d’avoir une démarche plus progressive, avec adaptation des mesures et report des révisions de zonage après 2022 ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice Loisier, la France connaît aujourd’hui huit régimes zonés, dont un zonage européen et sept régimes zonés d’initiative nationale.
Le zonage européen est celui des aides à finalité régionale, les AFR, qui permet d’accorder des aides à l’investissement aux entreprises, voire des aides au fonctionnement dans les outre-mer.
Parmi les sept régimes zonés d’initiative nationale, on trouve : les ZRR, les zones de revitalisation rurale, les zones franches urbaines, les quartiers prioritaires de la politique de la ville, les zones de restructuration de la défense, les bassins d’emploi à redynamiser – j’essaie d’éviter les acronymes… –, les bassins urbains à dynamiser et les zones de développement prioritaire.
Parmi ces huit régimes zonés, six expirent en 2020, vous l’avez rappelé. Il s’agit des ZRR, des zones de restructuration de la défense, des bassins urbains à dynamiser, des zones de développement prioritaire, des bassins d’emploi à redynamiser, des ZFU, les zones franches urbaines. Les deux autres, AFR et quartiers prioritaires de la politique de la ville, ont été prolongés jusqu’en 2022.
Vous l’avez souligné, ces régimes sont très importants pour les territoires, car ils ouvrent droit à des mesures d’exonérations fiscales en faveur des entreprises ainsi que des mesures d’exonérations de charges sociales patronales. Ils sont également pris en compte pour l’octroi de certaines aides, comme c’est le cas concernant les agences de l’eau.
Si le Gouvernement est attaché à ces dispositifs, il convient de procéder à une évaluation fine de la situation dans la perspective des échéances post-2020.
Pour ce faire, le Gouvernement se nourrira naturellement des travaux conduits par les parlementaires, qui sont d’ores et déjà nombreux. Ainsi le dispositif des ZRR a-t-il fait l’objet de plusieurs rapports. Je citerai celui des députés Alain Calmette et Philippe Vigier, et celui, plus récent, des députées Anne Blanc et Véronique Louwagie.
En outre, vos collègues sénateurs Bernard Delcros et Frédérique Espagnac réalisent en ce moment même une mission de contrôle budgétaire des ZRR pour la commission des finances, et ce conjointement avec la mission d’information de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable confiée à votre collègue Rémy Pointereau.
Enfin, dans le cadre de la mission portant sur l’élaboration d’un agenda rural, les services du ministère de la cohésion et des territoires ont demandé aux membres de la mission d’étudier les dispositifs de zonage, dont les ZRR et les BER, afin de faire des propositions en la matière.