Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Sophie Taillé-Polian, la ministre du travail, n’ayant pas pu se rendre au Sénat ce matin, m’a confié le soin de vous répondre.
Vous avez raison : les missions locales sont un maillon essentiel du service public de l’emploi, qui repère, accueille, oriente et accompagne les jeunes en difficulté. Comme vous l’avez souligné, elles sont en première ligne dans le plan massif d’investissement dans les compétences auquel nous consacrons 15 milliards d’euros, notamment au travers de la garantie jeunes, qui bénéficie désormais à 100 000 jeunes par an.
À ce titre, la ministre du travail a souhaité que l’effort financier de l’État en faveur des missions locales soit préservé en 2019, malgré la contrainte budgétaire que nous connaissons tous. En Île-de-France, cette décision se traduit par une quasi-stabilité des moyens qui leur sont attribués, en baisse limitée de 1,8 %. La répartition de ces crédits reste à la main des services en région, selon des critères prenant en compte les résultats, mais aussi le contexte dans lequel s’inscrit l’action des missions locales.
La ministre du travail a aussi souhaité que soit mise en œuvre à partir de cette année une globalisation des crédits de la subvention socle aux missions locales, ainsi que des crédits d’accompagnement de la garantie jeunes. Vertueuse et source de simplification dans son principe, cette réforme a pu entraîner des difficultés ponctuelles comme celles que vous évoquez.
Aussi la ministre du travail a décidé de procéder à un versement exceptionnel aux missions locales en octobre prochain. Ce versement soldera le précédent système et permet d’ores et déjà de résoudre les difficultés observées.
Madame la sénatrice, nous partageons tous le même objectif : l’emploi des jeunes. Pour mener cette bataille, il faut que les missions locales poursuivent et amplifient leurs actions auprès des jeunes et qu’elles soient bien connectées avec les problématiques d’apprentissage, d’accès à la formation et d’emploi, pour permettre à ces jeunes d’accéder à un avenir radieux, un avenir épanouissant !
Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour la réplique.
Mme Sophie Taillé-Polian. Je ne sais pas comment on peut parler d’avenir radieux pour les jeunes Franciliens quand, pas plus tard qu’hier, l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région d’Île-de-France a souligné dans un rapport la très forte paupérisation des quartiers populaires de la région…
J’ai compris que la baisse serait maintenue, ce qui est extrêmement grave dans la situation sociale actuelle : ce n’est pas ainsi qu’on mobilisera les salariés des missions locales pour les jeunes, ni les jeunes eux-mêmes pour qu’ils trouvent les moyens de construire correctement leur avenir !
structures d’accueil de jeunes
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, auteure de la question n° 800, adressée à Mme la ministre du travail.
Mme Monique Lubin. Madame la secrétaire d’État, j’attire l’attention du Gouvernement sur les difficultés que pourrait entraîner pour certains lieux de vie et d’activités, définis notamment par l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, l’absence de décret d’application des modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés, pourtant prévu au cinquième alinéa de l’article L. 433-1 du même code.
Dans mon département, l’association L’Escale est tout particulièrement concernée. Cette structure accueille des jeunes préadolescents à titre temporaire ou selon un mode séquentiel, à temps complet avec hébergement en internat et encadrement par des équipes qualifiées. Ce travail est mené en partenariat avec le conseil départemental, l’éducation nationale et la protection judiciaire de la jeunesse. L’association bénéficie d’un autre agrément, pour accueillir, pendant les week-ends et les périodes de vacances scolaires, six enfants ou préadolescents âgés de 8 à 14 ans.
Pour cette mission, elle dispose de deux équipes de deux éducateurs permanents, aidées d’un salarié en contrat emploi d’avenir. Du fait de la spécificité de leur mission, les emplois du temps de ces personnels présentent des amplitudes horaires très importantes, rendant impossible l’application des règles de droit commun. L’association devrait en conséquence bénéficier du dispositif dérogatoire prévu à l’article L. 433-1 du code de l’action sociale et des familles, aux termes duquel les permanents responsables de la prise en charge exercent sur le lieu d’accueil un accompagnement nécessairement continu et quotidien des personnes accueillies.
Alors que la mise en œuvre de ce dispositif dérogatoire est subordonnée à l’application de modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés définies par voie de décret, mentionné au cinquième alinéa du même article, il semble à ce jour qu’aucun décret n’ait été publié, ce qui pourrait susciter des difficultés d’application et favoriser l’émergence de contentieux de nature à remettre en cause l’existence même de ces structures.
Madame la secrétaire d’État, ces lieux d’accueil doivent être sécurisés : le décret d’application va-t-il paraître ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Monique Lubin, je vous réponds en lieu et place de Muriel Pénicaud, ministre du travail, qui n’a pas pu se présenter devant le Sénat ce matin.
Vous vous inquiétez de la situation des lieux de vie et de leurs salariés permanents et assistants permanents, dont la réglementation en matière de durée du travail dépend d’un régime spécifique, inscrit à l’article L. 433-1 du code de l’action sociale et des familles. Cet article renvoie à un décret, qui à ce jour n’a pas été pris, relatif aux modalités de suivi de l’organisation du travail de ces salariés.
Vous vous interrogez aussi sur la nécessité d’adaptations législatives ou réglementaires afin de sécuriser le régime prévu à cet article.
Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a considéré que l’absence de décret d’application de l’article L. 433-1 du code de l’action sociale et des familles fait obstacle à l’application du régime prévu par ce texte pour ces salariés. Elle a estimé que, faute de mise en place de modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés par un décret, comme la loi le prévoit, l’exigence constitutionnelle de droit à la santé et au repos des salariés n’était pas assurée.
Or la présence de permanents auprès des publics fragiles est une nécessité et justifie des dérogations. C’est donc à raison que vous souhaitez une fondation juridique solide à ce régime dérogatoire, d’autant plus nécessaire depuis l’arrêt que j’ai mentionné.
Je rappelle que la directive 2003-88-CE concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail organise la protection des salariés en matière de durée du travail et permet des dérogations dans le droit national, notamment pour les activités de garde, de surveillance et de permanence caractérisées par la nécessité d’assurer la protection des biens et des personnes. Les activités visées par l’article L. 433-1 du code de l’action sociale et des familles semblent entrer pleinement dans ce cadre.
Les services du ministère du travail, en liaison avec ceux du ministère des solidarités et de la santé, étudient actuellement les possibilités de sécuriser ce dispositif.
renouvellement des concessions hydroélectriques et conséquences territoriales
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 757, adressée à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
M. Jean-Yves Roux. La Commission européenne a lancé voilà quelques semaines une procédure d’infraction contre huit pays européens, dont la France, pour réattribuer et renouveler les marchés publics dans le secteur de l’énergie hydroélectrique. Sur 399 ouvrages hydroélectriques français concernés, 150 verront leur concession arriver à échéance d’ici à 2023.
Or la ressource en eau et la contractualisation de ses usages ne constituent pas un bien commun comme les autres, soumis, comme les autres, à la concurrence. L’efficacité de notre politique énergétique en dépend, l’eau étant la première source d’énergie renouvelable.
L’efficacité de notre politique d’adaptation au réchauffement climatique, comme Ronan Dantec et moi-même le soulignons dans le rapport d’information que nous venons de publier au nom de la délégation sénatoriale à la prospective, dépend, elle aussi, de notre capacité à préserver pleinement la ressource en eau, notamment dans le sud de la France.
En outre, des bassins d’emplois et de vie dépendent aussi des choix de gestion qui pourraient être retenus sur le long terme.
Dans les Alpes-de-Haute-Provence, le barrage de Serre-Ponçon, édifié sur la Durance, est l’une des principales centrales hydrauliques de notre pays. Or, même si le métier historique de cette centrale est la production électrique, les barrages participent de la gestion de l’eau destinée à l’irrigation, à la régulation des crues et à l’eau potable. Les retenues d’eau suscitent aussi une importante activité touristique en été autour du lac de Serre-Ponçon. Ces activités multiusages font vivre toute une économie locale. Elles constituent également une source de revenus non négligeable pour les collectivités territoriales, qui connaissent mieux que quiconque la valeur de la ressource en eau.
Madame la secrétaire d’État, la gestion optimale des usages de l’eau du barrage de Serre-Ponçon semble à ce jour incompatible avec le morcellement des acteurs qui pourrait être lié à une éventuelle privatisation. Nous avons besoin du Gouvernement français aux côtés des élus des Alpes-de-Haute-Provence pour défendre une gestion ambitieuse des activités multiusages et du bassin de vie de la centrale hydraulique de notre département.
Où donc en est la procédure d’infraction, et quelle position le Gouvernement va-t-il tenir auprès de la nouvelle Commission européenne ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Roux, vous soulevez une question tout à fait fondamentale et sur laquelle nous travaillons beaucoup et dialoguons tout autant avec la Commission européenne.
Le droit français prévoit que les concessions hydroélectriques échues doivent être renouvelées par mise en concurrence. J’y insiste : il ne s’agit pas d’une privatisation, puisque l’État demeurera propriétaire des ouvrages et exercera un contrôle fort sur l’exploitation, via le contrat de concession.
Eu égard aux enjeux sociaux, économiques et écologiques liés à l’hydroélectricité, les gouvernements successifs se sont donné le temps de préparer la mise en concurrence des concessions hydroélectriques avec l’ensemble des acteurs.
Ces réflexions et les travaux parlementaires sur le sujet ont abouti à plusieurs mesures inscrites, sous le précédent gouvernement, dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte : la possibilité pour les collectivités territoriales d’être associées à la concession dans le cadre d’une société d’économie mixte hydroélectrique ; la possibilité de prolongations contre travaux dans le respect de la directive Concession ; l’option de regrouper des concessions hydrauliquement liées pour faciliter leur exploitation et leur sûreté. Cette dernière possibilité répondra, monsieur le sénateur, à votre préoccupation sur la Durance.
Le barrage de Serre-Ponçon, ouvrage de tête de la chaîne hydroélectrique de la Durance, joue un rôle essentiel, aussi bien pour la production électrique que pour l’irrigation et l’alimentation en eau potable, dans une région marquée par un fort déficit en eau pendant l’été. Le fonctionnement de ses aménagements a aussi un effet sur les nombreuses activités touristiques du lac, que nous connaissons tous, de Serre-Ponçon. Leur regroupement permettrait de prendre en compte les enjeux que vous soulevez, monsieur le sénateur, en assurant leur exploitation par un concessionnaire unique.
En ce qui concerne la procédure de mise en concurrence prévue par le code de l’énergie, elle prévoit une démarche d’écoute, de dialogue et de concertation. Ainsi, les différents enjeux, comme le tourisme ou le soutien à l’irrigation, pourront être discutés, et les différents usages intégrés, le cas échéant, à la nouvelle concession.
J’ajoute que les personnels, bien sûr, resteront en place.
Tel est, monsieur le sénateur, l’état d’esprit dans lequel nous poursuivons les discussions avec la Commission européenne. La France se bat pour ses barrages hydroélectriques, et notre position n’est pas toujours conforme à ce que souhaite la Commission européenne. Il faut continuer à défendre les positions françaises, et je vous remercie de votre vigilance à cet égard.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour la réplique.
M. Jean-Yves Roux. Je vous remercie de cette réponse rassurante, madame la secrétaire d’État. J’espère que vous veillerez à nous tenir informés, nous les élus, qui sommes très inquiets par rapport à ces aménagements.
navigation fluviale dans le département des ardennes
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, auteur de la question n° 780, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
M. Marc Laménie. Madame la secrétaire d’État, je souhaite vous faire part de mes vives inquiétudes quant aux menaces qui pèsent actuellement sur la voie d’eau dans le département des Ardennes et à l’échelon national, compte tenu de la réduction des moyens humains et financiers mis à la disposition des services de Voies navigables de France, ou VNF.
Le rapport d’activité de VNF pour l’année 2018, intitulé Pensez fluvial, souligne que « le fluvial est un écosystème vertueux », qui « répond aux trois piliers écologique, social et économique du développement durable. » L’établissement public précise d’ailleurs qu’il « assure un service public essentiel. »
Depuis juin 2018, depuis un an donc, le trafic fluvial est totalement interrompu sur le canal des Ardennes entre Le Chesne et Attigny à la suite de l’effondrement de l’écluse n° 21, située dans la commune de Neuville-Day, dont j’ai été le maire durant seize ans, et ce à cause du débordement d’un ruisseau après de fortes pluies d’orage.
Les délais de reconstruction de cette écluse ne sont toujours pas connus. Cette situation a des conséquences dramatiques pour l’économie locale en raison de l’arrêt total de la navigation qui soutient le tourisme fluvial dans cette vallée de vingt-six écluses.
Par ailleurs, une branche du canal de Vouziers est totalement inutilisable du fait de l’absence d’entretien et de l’envasement.
Le canal des Ardennes, qui relie les bassins de la Meuse à la Seine, est indispensable à l’activité économique et au tourisme. Il s’inscrit dans le cadre du pacte stratégique Ardennes 2022, qui a été signé le 15 mars 2019 avec l’État, et qui prévoit le prolongement de la voie verte et le contrat de canal.
Parallèlement, de vives inquiétudes subsistent sur le devenir de la navigation fluviale – notamment en ce qui concerne le fret – sur le fleuve Meuse, depuis le sud de Verdun jusqu’à Givet à la frontière belge.
En effet, même si l’on déplore l’arrêt du trafic français de fret par péniches, le tourisme fluvial constitue une priorité importante, comme en témoignent les efforts consentis par l’ensemble des collectivités locales : conseil départemental, intercommunalités, communes, région et Europe.
De plus, la voie verte Sedan-Charleville-Mézières-Givet, pour laquelle le conseil départemental des Ardennes s’est beaucoup investi, est un équipement extrêmement remarquable.
Enfin, il convient de rappeler le programme d’investissement portant sur la modernisation des barrages sur la Meuse et sur l’Aisne, soit plus de 300 millions d’euros dans le cadre d’un partenariat public-privé.
Au regard de cette situation, madame la secrétaire d’État, je souhaite connaître les mesures que l’État et VNF comptent prendre pour maintenir le trafic fluvial à la fois sur le canal des Ardennes et sur la Meuse.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Laménie, le réseau de voies navigables géré par Voies navigables de France a souffert de décennies de sous-investissement et compte, pour cette raison, nombre de faiblesses, comme en témoigne l’avarie de l’écluse de Neuville-Day.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement, dans le cadre du projet de loi d’orientation des mobilités, augmente significativement les subventions versées par l’Afitf, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, à VNF.
En plus d’accroître les ressources propres de l’opérateur, cette hausse devra marquer un point d’arrêt à la dégradation du réseau. L’objectif est en effet de renforcer sa fiabilité. Ainsi, VNF a déjà pu engager les premières phases de remise en état de l’écluse de Neuville-Day.
Par ailleurs, dans son rapport remis au début de l’année 2018, le Conseil d’orientation des infrastructures pointe le fait que certaines voies navigables n’ont plus vocation à transporter du fret et n’ont plus de réel potentiel touristique. On y circule très peu, voire pas du tout.
Néanmoins, ces voies conservent de nombreux usages : patrimoine paysager, véloroute, alimentation hydraulique ou encore activités nautiques. Il est donc légitime d’examiner, pour chaque voie, les usages en cours et ceux qui pourraient se développer, afin d’adapter les niveaux de service et les priorités d’investissement.
C’est la démarche prospective qui a été engagée par VNF dans le cadre de la préparation de son contrat d’objectifs et de performance. La Meuse, de Charleville-Mézières à Givet et jusqu’à la frontière belge, fait l’objet d’une véritable structuration touristique que VNF souhaite pérenniser.
Pour les autres secteurs, un travail collaboratif avec les collectivités doit permettre de dégager des partenariats et de redynamiser certaines voies. Ces politiques partenariales pourraient utilement figurer dans le contrat d’objectifs et de performance que VNF est en train d’élaborer.
Je tiens, enfin, à souligner que toute adaptation des niveaux de service et des itinéraires dans le cadre de ce contrat d’objectifs et de performance ne pourra se faire qu’en liaison avec les collectivités locales, en fonction des projets que celles-ci portent et des partenariats qu’elles proposent. Ces changements se feront donc sous votre regard vigilant, monsieur le sénateur, puisque je vous sais très attentif à ce sujet.
projets de fermetures de gares et guichets de la sncf dans le calvados
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, auteure de la question n° 788, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Mme Corinne Féret. Madame la secrétaire d’État, nombreux sont les élus locaux et les citoyens, usagers de la SNCF, qui s’inquiètent des évolutions relatives à la présence du service public ferroviaire dans les territoires. Dans mon département du Calvados, on déplore déjà des fermetures de guichets et des réductions d’horaires : ceux-ci voient donc naturellement d’un mauvais œil les nouvelles menaces pesant sur plusieurs guichets et gares, notamment à Vire, Dives-Cabourg ou Pont-l’Évêque.
Le motif généralement invoqué pour justifier la fermeture des guichets est une sous-fréquentation de ces espaces au profit de la vente de billets par internet. D’une part, il est possible de considérer que, si la vente par internet augmente, c’est justement parce qu’il y a moins de points de vente. D’autre part, il est important de rappeler la réalité des zones blanches et de la fracture numérique dans notre pays, puisque 13 millions de Français n’utilisent pas ou peu internet, en raison des difficultés que son usage leur pose.
Dans le Calvados comme ailleurs, ces projets de fermetures contreviennent aux politiques d’aménagement du territoire. Ils posent la question de la présence ferroviaire de proximité en termes de lignes, de dessertes, de gares et de guichets dans des territoires où les habitants doivent évidemment pouvoir se déplacer pour aller travailler ou se soigner, et n’ont souvent pas d’autre choix que de prendre le train.
Cette situation renforce l’éloignement et le délitement des services publics, accentuant le sentiment d’abandon des populations, particulièrement en zone rurale. Il est regrettable de priver progressivement les usagers de la SNCF de la possibilité d’avoir un accueil physique de proximité, et de pouvoir échanger avec des interlocuteurs formés.
Ce faisant, je souhaiterais connaître l’intégralité des projets de la SNCF dans le Calvados, à savoir les gares menacées de fermeture, mais aussi celles qui sont concernées par des suppressions ou des réductions du nombre de leurs guichets.
De même, à l’heure où le projet de loi d’orientation des mobilités est en débat à l’Assemblée nationale, pouvez-vous me préciser les mesures que le Gouvernement entend prendre pour enrayer le démantèlement du service public ferroviaire de proximité et renforcer la concertation entre les régions, autorités organisatrices des services ferroviaires régionaux, SNCF Mobilités et les élus locaux, afin qu’aucune fermeture de gare ou de guichet ne soit plus décidée sans accord préalable, et sans que des solutions de substitution raisonnables et adaptées au territoire soient proposées ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Féret, permettez-moi de rappeler que la politique d’ouverture des guichets et des bâtiments des gares régionales relève de la contractualisation entre l’opérateur et les régions.
En effet, en tant qu’autorités organisatrices des services ferroviaires régionaux, ce sont les régions qui supportent les coûts de distribution. Compte tenu de la transformation des comportements d’achat des clients et dans un contexte d’optimisation de la dépense publique, il est compréhensible que celles-ci veillent à un équilibre satisfaisant entre l’intérêt du service offert aux voyageurs et son coût pour les contribuables.
Le Gouvernement reste par ailleurs attaché à ce que SNCF Mobilités, en liaison avec les régions et les élus locaux, examine les moyens de substitution pour accompagner les usagers en cas de fermeture de guichets : il peut s’agir, par exemple, de confier la distribution des titres de transport régional à des partenaires implantés à proximité de la gare, tels que, entre autres, un office de tourisme ou un marchand de journaux.
Cela dit, l’État, en application du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales, n’intervient pas dans ces choix.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour la réplique.
Mme Corinne Féret. J’entends bien votre réponse, madame la secrétaire d’État, mais il me semble que le Gouvernement, en particulier la ministre des transports, pourrait influencer et insister auprès des collectivités régionales pour que la demande de proximité et d’écoute et que la réponse attendue dans nos territoires ruraux puissent être prises en compte.
relations commerciales au sein des réseaux de distribution dans le secteur du bricolage
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canevet, auteur de la question n° 804, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. Michel Canevet. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les relations commerciales au sein des réseaux de distribution dans le secteur du bricolage.
Ces dernières décennies, on a observé la fermeture de nombreuses quincailleries dans nos communes au profit de moyennes et grandes surfaces dédiées au bricolage et à l’aménagement. Il me semble pourtant impératif que des enseignes de proximité demeurent pour des considérations d’aménagement du territoire et de service à la population.
Plusieurs adhérents au réseau de l’enseigne Weldom se sont trouvés mis en difficulté par des pratiques du réseau leur étant préjudiciables. Beaucoup de magasins ont fermé dans l’ouest, notamment dans les villes de Crozon, Châteaubriant, Brest et Plouarzel, ce qui est particulièrement regrettable.
Ces adhérents ont été amenés à saisir les services déconcentrés de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, afin d’apprécier les difficultés et, surtout, la non-application de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie.
Le rapport de l’enquête diligentée par les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi – la Direccte – de Bretagne depuis 2016 ayant été transmis à la DGCCRF et, donc, au ministère de l’économie et des finances, je souhaite connaître les suites concrètes qui y ont été données, en particulier pour ce qui concerne les pratiques commerciales dans le secteur du commerce du bricolage.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Canevet, vous interrogez le Gouvernement sur les relations commerciales au sein des réseaux de distribution dans le secteur du bricolage.
Garante de l’ordre public économique, la DGCCRF veille à l’équilibre des relations commerciales au bénéfice de nos entreprises et de l’économie française dans son ensemble. Les relations équilibrées entre les entreprises sont en effet indispensables au développement et, parfois, à la survie de nos PME et, donc, au dynamisme de notre économie. C’est pourquoi elles sont l’une des priorités que le ministère de l’économie a fixées à cette direction.
La DGCCRF est également fortement mobilisée pour garantir le contrôle de la loyauté des relations commerciales et s’assurer que les déséquilibres dans le pouvoir de négociation n’engendrent pas de déséquilibres contractuels, synonyme de difficultés économiques pour les filières. C’est évidemment le cas dans le domaine de la distribution alimentaire, secteur dans lequel le ministère s’est particulièrement impliqué avec les États généraux de l’alimentation.
Mais au-delà de cette action emblématique, la DGCCRF est également mobilisée dans d’autres secteurs : le numérique, tout d’abord, mais aussi la franchise, que vous avez évoquée. Des enquêtes ont ainsi été réalisées dans le secteur de l’habillement, du chocolat ou encore de la restauration rapide, et ont conduit à ce que le ministre de l’économie et des finances assigne de grands franchiseurs devant le tribunal de commerce de Paris, comme Subway l’année dernière.
Concernant le cas particulier auquel vous faites allusion et qui concerne la relation franchiseur-franchisé dans le domaine du bricolage, la question a d’ores et déjà été tranchée par un tribunal qui a rendu un jugement, devenu définitif, ayant donné tort aux plaignants.
Au-delà de cet exemple, je peux vous assurer de la pleine mobilisation du ministère de l’économie et des finances pour protéger les entreprises dans le secteur du bricolage comme dans tous les autres secteurs de notre économie.