M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Je ne reviendrai pas sur le rôle et les fonctions qui seraient assignés aux missions locales, mais j’aurais voulu connaître votre vision, monsieur le ministre, concernant les élèves de 16 ans à 18 ans en situation de handicap, auxquels il faut réellement offrir un service particulier. Est-il envisageable de mobiliser Cap Emploi ? Quelles sont les démarches visant ce public spécifique ? Comment est prise en charge cette orientation ?
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour explication de vote.
M. Stéphane Piednoir. Je veux, d’abord, me féliciter de la prise de conscience collective du fait que cet article n’est pas bon. Nous sommes en première lecture, il faut se donner le temps. Si nous estimons qu’il y a un certain nombre de failles s’agissant de la mission de contrôle confiée aux missions locales alors que tel n’est pas du tout leur cœur de métier, c’est l’un des motifs de rejet de l’article.
Avec ce texte, on est sur le point de créer une norme qui va coûter 100 millions d’euros. Une dépense publique qui ne sera assortie d’aucune contrepartie ni sanction.
Je veux ensuite revenir sur les écoles de la deuxième chance dont on a parlé pour dire qu’il faut attendre d’avoir 18 ans pour y entrer. Or elles fonctionnent très bien et obtiennent des taux d’insertion extraordinaires partout où elles sont implantées sur le territoire.
Au lieu de dépenser 100 millions d’euros en créant une norme, donnons ces 100 millions d’euros aux écoles de la deuxième chance en leur permettant d’intégrer des enfants de 16 ans, et là, on aura une vraie efficacité !
Encore une fois, nous sommes en première lecture. Rien ne nous empêche ici au Sénat de dire que la rédaction de cet article ne nous convient pas et que nous y reviendrons en deuxième lecture !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 222 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe La République en marche.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 102 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 8 |
Contre | 333 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 275 rectifié, présenté par Mmes Monier, Blondin et Lepage, M. Antiste, Mme S. Robert, M. Assouline, Mme Ghali, MM. Lozach, Magner, Manable, Kanner, Bérit-Débat, Durain, Féraud et Fichet, Mme G. Jourda, M. Marie, Mme Meunier, M. Montaugé, Mme Taillé-Polian, M. Tourenne, Mme Van Heghe, MM. Kerrouche, Courteau et Daunis, Mme Préville, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après les mots :
public ou privé,
insérer les mots :
lorsque le jeune est instruit dans sa famille,
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Il me semble qu’il y a un oubli dans le chapitre du projet de loi consacré à l’obligation de formation pour tous les jeunes jusqu’à 18 ans. En effet, la liste qui figure à l’alinéa 6 de l’article 3 bis ne comporte pas les jeunes instruits dans leur famille.
Lors du débat en commission, durant lequel j’avais déjà présenté cet amendement, j’ai bien entendu l’argument de notre rapporteur. Il estime que, contrairement à la situation des jeunes jusqu’à 16 ans, il s’agit non plus d’instruction obligatoire, mais d’une obligation de formation. Pour ma part, je ne vois pas pourquoi un jeune ne pourrait pas préparer un diplôme en se présentant en candidat libre, par exemple.
Par ailleurs, cette omission signifie que cette situation n’exposerait pas aux mêmes exigences, pour le contrôle des familles en particulier.
En vertu du dispositif tel qu’il est proposé, si un jeune choisit de poursuivre sa formation à domicile et dans sa famille, peut-être ne serait-il pas considéré comme satisfaisant à l’obligation de formation. Y a-t-il un vide juridique ? Merci de nous le dire et, dans l’affirmative, de le combler en votant l’amendement !
M. le président. L’amendement n° 245 rectifié, présenté par MM. Leleux, Magras et Schmitz, Mme Berthet, M. Meurant, Mmes Gruny et Duranton, M. Chaize, Mme Deromedi, M. Houpert, Mme L. Darcos, M. Savin, Mme Imbert, MM. Sido, Saury, Laménie et H. Leroy, Mme Lamure, MM. Pointereau, Longuet et Gremillet, Mme Boulay-Espéronnier et M. B. Fournier, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après les mots :
et des familles,
insérer les mots :
lorsqu’il est instruit dans sa famille,
La parole est à M. Jean-Pierre Leleux.
M. Jean-Pierre Leleux. Cet amendement, qui va dans le même sens que celui de Mme Monier, vise à offrir la possibilité à un jeune entre 16 ans et 18 ans de préparer son baccalauréat ou un autre diplôme en candidat libre, en étudiant à domicile en famille ou à l’aide de professeurs particuliers.
M. le président. L’amendement n° 238, présenté par M. Malhuret, Mme Mélot et MM. Bignon, Capus, Chasseing, Decool, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Laufoaulu, A. Marc et Wattebled, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après les mots :
formation professionnelle
insérer les mots :
, lorsqu’il est instruit en famille et déclaré selon les modalités en vigueur
La parole est à M. Joël Guerriau.
M. Joël Guerriau. Il s’agit, là aussi, d’inclure l’enseignement en famille au sein du nouveau dispositif, dans le respect, bien sûr, des modalités en vigueur pour les jeunes de 16 ans à 18 ans, lesquels peuvent, à ce titre, trouver une formation de qualité auprès de leur famille.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Max Brisson, rapporteur. Je suis bien sûr tout à fait d’accord sur le fait qu’il y a une difficulté juridique.
Le problème, c’est que l’instruction en famille concerne, par définition, les seuls enfants soumis à l’instruction obligatoire, laquelle s’étendra, lorsque la loi sera votée, de 3 ans jusqu’à 16 ans. On ne peut pas étendre le contrôle aux jeunes qui ont dépassé l’âge de 16 ans.
Ainsi, un jeune de 17 ans qui prépare le baccalauréat chez lui en candidat libre n’est pas, à proprement parler, instruit en famille.
Avant d’entendre le point de vue de M. le ministre, je dirai que cette éventualité, qui me semble importante, pourrait être incluse dans les motifs d’exemption fixés par le décret d’application.
J’émets donc un avis défavorable, car il est difficile de prendre en compte la notion d’instruction en famille qui n’existe pas au-delà de 16 ans. Attendons de voir comment on pourra résoudre par la voie réglementaire le vrai problème posé par ces trois amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Je suis du même avis que M. le rapporteur. Nous n’avons pas dit que nous étendions l’instruction obligatoire jusqu’à 18 ans. Cela fait quelques différences, même si cela a pu être déploré par Mme la sénatrice.
Si nous voulons cette obligation de formation de 16 ans à 18 ans, c’est bien parce que nous visons autre chose que l’instruction obligatoire jusqu’à 18 ans. Cette solution me paraît raisonnable. Outre qu’elle permet des souplesses, elle présente surtout l’avantage d’être adaptée à cet âge. Il serait inapproprié de considérer que les obligations incombant aux jeunes de 16 ans à 18 ans sont de même nature qu’auparavant.
Bien sûr, il y a tout un travail à faire pour amener ces jeunes à la formation. Pour autant, je ne pense pas que l’on puisse considérer que la notion d’instruction en famille s’applique dans ce cas.
Après, il peut y avoir des intersections de situations : par exemple, si un jeune suit une formation au CNED et qu’il réside chez ses parents, cela ressemble à de l’instruction en famille et cela correspond aux situations de résolution du problème que nous pouvons souhaiter. Toutefois, ce n’est pas juridiquement de l’instruction en famille.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 404, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer les mots :
ou dans une unité d’enseignement créée au sein des établissements ou services mentionnés au 2° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles
et les mots :
ou recherche
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Par cet amendement, le Gouvernement souhaite revenir à une rédaction simplifiée de l’article 3 bis. Il n’est pas nécessaire d’inscrire dans la loi une liste des établissements ou de catégories d’établissements dans lesquels une scolarisation permettrait de remplir l’obligation de formation. La formulation « établissements d’enseignement public ou privé » permet de couvrir une large gamme de situations de scolarisation. Il s’agit de tous les établissements d’enseignement du second degré ou du supérieur, d’enseignement agricole, de formation à distance ou des unités d’enseignement du médico-social qui accueillent des jeunes en situation de handicap.
C’est ensuite par un décret en Conseil d’État que l’on pourra préciser les situations permettant de satisfaire à l’obligation de formation, qu’il s’agisse des situations de formation, d’emploi, d’accompagnement ou d’insertion sociale et professionnelle ou d’engagement, ainsi que celles dans lesquelles les jeunes pourraient être dispensés de leur obligation de formation ou se voir proposer un aménagement de celle-ci.
Cet amendement simplifie la rédaction de l’article et supprime l’ajout souhaité par la commission de la recherche d’emploi dans la liste des situations permettant de satisfaire à l’obligation de formation. En effet, le critère de recherche d’emploi ne correspond pas à un statut administratif, sauf si le jeune est suivi par un opérateur du service public de l’emploi. C’est justement une situation couverte par la rédaction de l’article, qui précise que le jeune satisfait à l’obligation de formation « lorsqu’il bénéficie d’un dispositif d’accompagnement ou d’insertion sociale et professionnelle ».
M. le président. L’amendement n° 427 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Artano et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Corbisez, Dantec, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Menonville, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer les mots :
ou recherche
et les mots :
ou lorsqu’il bénéficie d’un dispositif d’accompagnement ou d’insertion sociale et professionnelle
La parole est à Mme Mireille Jouve.
Mme Mireille Jouve. Cet amendement vise à supprimer la recherche d’emploi et l’inscription dans un dispositif d’accompagnement personnalisé vers l’emploi ou d’insertion sociale et professionnelle des cas permettant de considérer que l’obligation de formation professionnelle des jeunes de 16 ans à 18 ans est satisfaite.
En effet, le critère de recherche d’emploi peut recouvrir des situations très variées, allant de la recherche active à un affichage sans grand effet pour retrouver réellement un emploi.
Par ailleurs, le critère d’inscription dans un dispositif d’accompagnement personnalisé vers l’emploi ou d’insertion sociale et professionnelle permettrait qu’un jeune mineur bénéficiant de la garantie jeunes ou du parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie soit considéré comme étant en formation, ce qui ouvre un champ considérable de confusions.
Cet amendement permet de simplifier la rédaction de l’alinéa relatif aux situations permettant de satisfaire à l’obligation de formation. Les différentes situations de dérogation, comme celles qui viennent d’être mentionnées, seront inscrites et explicitées dans le décret en Conseil d’État prévu à l’alinéa 8 de l’article 3 bis.
M. le président. L’amendement n° 37, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer les mots :
ou recherche
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. Cet article 3 bis crée une obligation de formation pour les jeunes de 16 ans à 18 ans. Aujourd’hui, de nombreux jeunes de 16 ans à 18 ans sont démunis de solution pour retrouver une place dans un établissement scolaire à la suite d’une exclusion définitive, d’un décrochage ou d’une rupture dans leur parcours, voire une maladie. Cette nouvelle obligation sera considérée comme satisfaite notamment si le jeune occupe ou recherche un emploi.
Ajouté en commission, le critère de recherche d’emploi risque de vider de sa substance cette nouvelle obligation en permettant au jeune de s’y soustraire très facilement. Je vous propose donc de la supprimer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Max Brisson, rapporteur. L’amendement n° 404 du Gouvernement vise à supprimer la référence à la recherche d’emploi – je suis d’accord, c’était « l’égarement » qu’avait signalé Mme Brulin –, mais aussi l’accueil dans les unités d’enseignement du secteur médico-social, comme le suggérait l’amendement de notre collègue Philippe Mouiller. Je préfère à la proposition du Gouvernement l’amendement n° 37 de M. Grand, qui ne porte que sur la suppression de la référence à la recherche d’emploi et ne met pas en cause l’accueil dans les unités d’enseignement du secteur médico-social, protégeant ainsi l’apport de notre collègue Philippe Mouiller.
L’amendement n° 427 rectifié vise à supprimer les critères de recherche d’emploi – je n’y reviens pas, j’ai fait mon mea culpa –, mais aussi le dispositif d’accompagnement ou d’insertion sociale et professionnelle. Or la mention d’un dispositif d’accompagnement ou d’insertion sociale et professionnelle a justement pour objet de prendre en compte les jeunes accompagnés dans l’insertion professionnelle, par exemple grâce à l’école de la deuxième chance, dont on peut être membre à partir de 16 ans et non de 18 ans. Il appartiendra au décret d’application de déterminer les dispositifs éligibles.
Pour l’ensemble de ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 427 rectifié et 37 ?
M. le président. Madame Laborde, l’amendement n° 427 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 427 rectifié est retiré.
Monsieur Grand, l’amendement n° 37 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Grand. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 38 rectifié, présenté par MM. Grand et Gremillet, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après le mot :
emploi
insérer les mots :
incluant une formation qualifiante
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. Cet amendement vise à mieux définir la notion d’occupation d’un emploi. Se pose en effet la question de savoir si tous les types d’emploi peuvent être considérés comme une formation, notamment les emplois précaires.
Il convient de s’assurer que cette nouvelle obligation ne soit pas contournée par la déscolarisation et l’emploi d’un jeune de 16 ans dans l’entreprise familiale, par exemple, pour ne citer que ce cas.
Je vous propose de préciser que l’emploi devra inclure une formation qualifiante, ce qui peut s’apparenter à de l’apprentissage, et de bien définir les emplois répondant à cette nouvelle obligation de formation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Max Brisson, rapporteur. Mon cher collègue, à la différence de l’amendement précédent, la commission ne vous a pas suivi sur cette proposition.
Votre amendement restreint le champ des emplois satisfaisant à l’obligation de formation aux emplois incluant une formation qualifiante, ce qui semblerait désigner l’apprentissage, comme vous l’avez confirmé. Je pense que l’on ne peut pas avoir une vision aussi restrictive et limiter autant les emplois permettant de satisfaire à cette obligation d’instruction. Dans tous les emplois, on se forme en travaillant. Comme le dit l’adage, c’est en forgeant qu’on devient forgeron !
Je demande le retrait de l’amendement. Sinon, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Grand, l’amendement n° 38 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Grand. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 38 rectifié est retiré.
Mes chers collègues, il est minuit. Je vous propose de prolonger la séance jusqu’à zéro heure quarante-cinq afin de poursuivre l’examen de ce texte.
Il n’y a pas d’observation ?…
Il en est ainsi décidé.
L’amendement n° 287 rectifié, présenté par Mmes Taillé-Polian, Monier, Blondin et Lepage, M. Antiste, Mme S. Robert, M. Assouline, Mme Ghali, MM. Lozach, Magner, Manable, Kanner, Bérit-Débat, Durain, Féraud et Fichet, Mme G. Jourda, M. Marie, Mme Meunier, MM. Montaugé et Tourenne, Mme Van Heghe, MM. Kerrouche, Courteau et Daunis, Mme Préville, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. L’article 3 bis nouveau instaure une obligation de formation pour les jeunes de 16 ans à 18 ans – ce qui est louable.
Selon l’alinéa 7, le contrôle du respect de l’obligation de formation devra être assuré par les missions locales. Or je suis déjà intervenue pour rappeler que tel n’est pas le rôle premier des missions locales, car cela ne correspond pas à l’esprit dans lequel elles travaillent habituellement. De plus, cela demanderait une transformation radicale de leurs pratiques.
Les auteurs de cet amendement estiment que cette obligation de formation doit incomber soit au service public de l’éducation nationale, car il faut permettre la rescolarisation, soit aux conseils régionaux, qui doivent avoir la charge de la formation des jeunes, soit aux conseils départementaux quand il s’agit de mineurs protégés.
Cette obligation devrait également être assortie de la mobilisation de financements adéquats dans la durée et la globalité. L’article 3 bis n’apporte aucune garantie en ce sens.
En conséquence, les auteurs de cet amendement vous proposent de supprimer l’alinéa 7 de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Max Brisson, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer le contrôle exercé par les missions locales ; elles ne seraient pas chargées du traitement de l’ensemble des jeunes concernés, mais seulement de leur repérage.
Les représentants des missions locales que nous avons reçus ne nous ont pourtant pas fait part d’une opposition systématique à cette nouvelle mission, qui recoupe en partie le travail que les missions effectuent au titre de la lutte contre le décrochage scolaire. Ils y voient plutôt une reconnaissance de leur rôle stratégique en la matière.
Supprimer cette mission remettrait également en question le financement supplémentaire que le Gouvernement a promis à ce titre et dont les missions locales ont bien besoin.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.
M. Jacques Bigot. Les missions locales sont financées, d’une part, par l’État et, d’autre part, par les collectivités locales – les régions et, souvent, les métropoles. Chaque fois que l’État n’a pas été au rendez-vous des besoins des missions locales, ce sont les collectivités locales qui, une fois de plus, ont dû prendre le relais du financement, car les élus locaux se préoccupent de l’insertion des jeunes, souvent plus que l’éducation nationale.
Que les missions locales participent à l’insertion, pourquoi pas ? Cela dit, monsieur le ministre, l’article 3 bis que vous nous proposez d’adopter n’a pas pour objet la formation : il s’agit d’imposer une obligation d’activité à des jeunes de moins de 18 ans, pour éviter leur oisiveté. C’est intéressant, mais s’il s’agit de formation, laissons tout de même à l’État et à l’éducation nationale leur responsabilité en la matière !
Ma collègue Marie-Pierre Monier a évoqué le rôle des CIO. Ils peuvent être les premiers à s’occuper d’un jeune qui est en décrochage complet et qui ne sait pas de quoi l’avenir sera fait. Ce sont eux qui sont chargés de l’orientation.
Mme Michelle Gréaume. Eh oui !
M. Jacques Bigot. Donnons donc aux CIO la possibilité d’assumer cette responsabilité, quitte à ce qu’ils la délèguent, dans le cadre d’un accord local, aux missions locales ; cette délégation ne doit pas pour autant être une obligation légale, et les missions locales doivent recevoir les moyens nécessaires pour l’exercer. Il faut que les CIO soient là pour travailler avec les jeunes sur un projet de réinsertion. Cela les amènerait peut-être à comprendre que ce travail doit commencer dès la classe de quatrième ou de troisième.
Je vous parle ainsi, mes chers collègues, à partir de mon expérience en tant que maire, il y a une dizaine d’années. Le CIO de ma commune souhaitait quitter le collège où il était installé. J’ai mis à la disposition de la mission locale de Strasbourg, qui intervenait dans ma commune de la banlieue strasbourgeoise, et du CIO un local commun, en leur suggérant de travailler ensemble, car leurs missions sont les mêmes. Il faut donner aux jeunes l’idée que l’orientation, qui dure tout au long de la vie, commence dès le jeune âge. Cela n’a pas marché, malgré le soutien de principe apporté, au départ, par l’éducation nationale.
J’estime, mes chers collègues, qu’il faut que les missions locales puissent être interpellées. Un décret d’application pourra s’en assurer. En revanche, il est inacceptable qu’une obligation leur soit imposée dans la loi, alors qu’en 2019 encore on leur a retiré des moyens financiers, même si on leur en promet de nouveaux ; leur situation reste délicate, parce qu’elles doivent s’occuper de jeunes en grande difficulté.
C’est pourquoi, mes chers collègues, l’amendement que nous vous proposons mérite d’être soutenu en dépit des avis défavorables émis par la commission et le Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Je veux à mon tour intervenir au sujet de cet amendement afin de placer le Gouvernement, très concrètement, face à ses contradictions.
Monsieur le ministre, dans le cadre de la discussion budgétaire pour 2019, on nous avait annoncé une diminution des subventions attribuées aux missions locales. Nous avons été un certain nombre, sur ces travées, à dénoncer cette décision et à tenter de faire entendre raison au Gouvernement, en argumentant que ces moyens étaient nécessaires aux missions locales alors même qu’elles subissaient une montée en charge de leur cœur de métier, l’accompagnement des jeunes, en particulier dans un contexte de développement du dispositif de la garantie jeunes. Force est de constater que nous n’avons pas été entendus : les subventions ont diminué de plus de 8,25 millions d’euros.
De la même façon, dans le cadre de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, il a été décidé et voté – sans le soutien de notre groupe – que les centres d’information et d’orientation réintégreraient les établissements publics d’enseignement du second degré. Les CIO auraient pu participer au contrôle de la formation des jeunes de 16 ans à 18 ans. Mais quand ces jeunes sont déjà sortis des établissements scolaires, pour différentes raisons, comment les y faire revenir ? Ils pourraient trouver au CIO un accompagnement, y être entendus, alors qu’ils sont dans une situation difficile.
Je voulais insister sur ces contradictions qui nous mènent aujourd’hui dans l’impasse – cela a été dit –, parce que demander encore plus aux missions locales sans leur en donner les moyens me paraît impossible.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. Je veux brièvement revenir sur l’audition du représentant des missions locales à laquelle j’ai participé. Il nous a fait part de son inquiétude quant au fait que les jeunes qui s’adressaient aux missions locales n’avaient pas d’obligation de venir, que leur démarche reposait sur le volontariat. Or on nous propose d’instaurer une obligation de contrôler.
Je souhaite en outre réitérer l’argument qu’a formulé notre collègue Jacques Bigot : indirectement, les obligations qu’on ferait peser sur les missions locales engendreraient, par ricochet, de nouvelles obligations pour les collectivités locales. En effet, M. Bigot a clairement rappelé que les moyens n’étaient pas à la hauteur des enjeux qu’on demanderait aux missions locales d’assumer ; elles devraient donc se retourner vers les communes ou les régions.
M. le président. L’amendement n° 428 rectifié bis, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Menonville, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 13
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le dernier alinéa de l’article L. 313-8 du code de l’éducation est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cet entretien permet également de rappeler au jeune et à son représentant légal l’obligation de formation définie à l’article L. 114-1. »
La parole est à Mme Françoise Laborde.