M. Christian Manable. Je conclus en deux mots, monsieur le président ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
On se gargarise des termes « devoir de mémoire ». Pour ma part, je préfère les termes « devoir d’histoire ».
M. le président. Entendu, mon cher collègue !
M. Christian Manable. La mémoire est subjective. Elle est parfois défaillante. L’histoire est une science !
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Je soutiens l’amendement d’Hervé Maurey, qui est bien rédigé.
Monsieur le rapporteur, vous dites qu’il n’est pas nécessaire de prévoir ces jardins dans la loi, qu’ils existent en pratique. Effectivement, il en existe, mais ils ne sont pas très nombreux. Ils procurent en revanche beaucoup de bonheur.
Ainsi, dans la commune d’Arradon, dans le Morbihan, une petite école publique, l’école La Touline, a créé un jardin pédagogique, un potager, dont on m’a demandé d’être le parrain en tant que parlementaire. Je suis depuis son évolution et je me dis que les enfants de cette école élémentaire ont beaucoup de chance de bénéficier d’une telle éducation. Cette éducation est absolument nécessaire.
Si rien ne bouge en la matière, nous créerons des injustices entre enfants. J’ai neuf petits-enfants. J’aurais bien aimé que l’un d’entre eux au moins puisse bénéficier d’une telle éducation à l’école.
Pour faciliter les votes, je retire le sous-amendement n° 501, qui tend à imposer ces jardins – vous dites, monsieur le ministre, qu’on ne peut pas les imposer –, mais non le second, qui tend à prévoir que l’éducation à l’environnement « peut » se traduire par la création de jardins botaniques et potagers dans les écoles élémentaires. Ce serait une incitation forte.
Je me prends parfois à rêver. Je me dis que, lorsqu’on fait preuve de bon sens et qu’on parie sur l’avenir, on doit pouvoir trouver des majorités. Les graines que nous semons sont en effet les graines de l’espoir. Nos enfants ont drôlement besoin d’espoir, et nous aussi d’ailleurs !
Je ne sais pas comment vous inciter à voter le sous-amendement n° 502. Purement incitatif, il est sans incidence. En outre, il n’est pas anticonstitutionnel. Sur ce coup-là, mes chers collègues, je compte sur vous !
M. le président. Le sous-amendement n° 501 est retiré.
La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Monsieur le ministre, je suis un peu resté sur ma faim. Je vous ai interpellé assez précisément sur la question du référent développement durable dans les collèges. Pourriez-vous me répondre, s’il vous plaît ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Je vous prie de m’excuser, monsieur le sénateur. Je comptais bien vous répondre lorsque j’ai évoqué la concertation avec les lycéens. Cette concertation a permis de prendre connaissance des bonnes pratiques existantes, comme le référent développement durable, et de la qualité du label E3D, attribué depuis quelques années aux établissements répondant à différents critères, comme l’existence de ce référent, mais aussi la mise en œuvre de mesures pédagogiques, éducatives ou d’organisation.
L’objectif est la généralisation de ce label. Il est encore trop tôt pour en parler, car il nous faut en discuter avec de nombreux interlocuteurs, mais c’est en tout cas clairement ce que souhaitent les élèves qui ont travaillé sur ces questions. Je suis très favorable à la généralisation des référents, sans attendre la généralisation du label. Nous allons donc y travailler.
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.
M. François Bonhomme. Je souscris globalement au projet d’inscrire les considérations environnementales dans le code de l’éducation. À cet égard, l’amendement de notre collègue Maurey me semble parfaitement adapté.
Cela étant, je tiens à dire à nos collègues que l’ajout continuel de phrases ou de mots supplémentaires dans le code de l’éducation ne fera pas tout. Notre société est aujourd’hui saturée de messages sur le réchauffement climatique.
M. Martin Lévrier. Oh !
M. François Bonhomme. Il n’y a pas un journal télévisé, pas un support de presse écrite qui n’évoque qui la reproduction des tortues aux Galapagos, qui la fonte des glaciers. En cinq ou dix ans, le réchauffement climatique, et c’est un progrès, est devenu une question majeure, l’objet principal des sujets ou des articles des médias. Il faut prendre acte de cette situation, plutôt positive, qui nous laisse espérer que les nouvelles générations sont sensibles à cette problématique. Le fait est qu’elles le sont.
Mme Cartron a dit que les élèves étaient très fiers de pouvoir coconstruire les programmes. J’aimerais qu’on ne cède pas à une forme de démagogie sur ces questions. Vous savez mieux que moi que la transition écologique est un sujet extrêmement compliqué. Laisser entendre à la jeunesse que cette transition va se faire du jour au lendemain et qu’« il n’y a qu’à… », c’est manquer de considération pour elle. On peut lui tenir un langage d’adulte.
Monsieur le ministre, le Président de la République a reçu, à la suite de la mobilisation internationale des jeunes, une certaine Greta Thunberg, qui est devenue une sorte de « ludion médiatique ». Cette jeune Suédoise de 15 ans est venue participer à la grève le vendredi et expliquer à tous les chefs d’État ce qu’il faut faire. Le Président de la République a ensuite beaucoup communiqué dans les médias sur cette rencontre.
Pour ma part, je pense qu’il faut tenir un langage de vérité aux jeunes. On se demande souvent quelle planète nous allons leur laisser demain, mais il est une autre question qu’il faudrait se poser : quels jeunes allons-nous laisser à notre planète ? (Exclamations sur plusieurs travées.) J’y insiste : nous devons tenir le langage de la vérité.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Roux. Monsieur le président, je retire mon amendement au profit de l’amendement d’Hervé Maurey et de Jean-François Longeot.
M. le président. L’amendement n° 452 rectifié bis est retiré.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Bien évidemment, je soutiendrai l’amendement de M. Maurey, mais également le sous-amendement de notre collègue Labbé.
François Bonhomme vient de dire qu’on est saturé d’informations sur le changement climatique ou sur le déclin de la biodiversité. Dans l’écume des choses, c’est vrai : nous sommes abreuvés, ici ou là, de commentaires tous les deux jours. Le rôle de l’école, c’est de favoriser l’appréhension des sujets, de transmettre des savoirs, pour faire comprendre ce qui est en cause, c’est-à-dire, s’agissant de la biodiversité, ce qu’elle est, comment elle est menacée et comment on peut agir.
J’ai été élue d’une ville qui avait lancé un agenda 21 local. On s’était rendu compte que les enfants connaissaient très bien une certaine biodiversité, c’est-à-dire les éléphants, les rhinocéros, les orangs-outans, en clair les espèces menacées, mais qu’ils ignoraient tout de la faune et de la flore de leur ville de banlieue. En outre, leur comportement pouvait parfois surprendre. Je me souviendrai toujours de leurs réactions au retour des grenouilles dans la rivière Orge, une fois qu’elle avait été dépolluée. Tout le monde demandait que les grenouilles soient tuées parce qu’elles faisaient du boucan le soir !
Il faut se rendre compte que la maîtrise des enjeux liés au changement climatique et au déclin de la biodiversité constitue bien un savoir, qui doit être transmis dans le cadre d’une pratique.
L’ajout que propose M. Labbé est à l’image des textes sur le logement. Dans 90 % d’entre eux, il est indiqué qu’on « peut » faire des choses. Le fait de mentionner dans le code de l’éducation la référence à des pratiques susceptibles de transformer une vague sensibilisation en une capacité à agir sur le réel ne me paraît pas négligeable. Je renvoie notamment à ce qu’on disait sur l’éducation manuelle. Un tel ajout n’alourdira pas excessivement le code de l’éducation. Si c’était le cas, beaucoup d’autres choses pourraient être supprimées…
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Je soutiens bien évidemment le sous-amendement de Joël Labbé. J’ai moi aussi fait partie de la mission sénatoriale d’information sur le développement de l’herboristerie et des plantes médicinales. Comme je l’ai dit hier concernant l’éducation manuelle, jardiner et mettre les mains dans la terre sera très bénéfique et positif pour nos enfants. Cela me paraît essentiel, car c’est quelque chose de concret.
Cela étant, monsieur le président, je retire mon amendement au profit de celui d’Hervé Maurey.
M. le président. L’amendement n° 410 rectifié bis est retiré.
La parole est à Mme Nelly Tocqueville, pour explication de vote.
Mme Nelly Tocqueville. Je souhaite réagir aux propos de M. Bonhomme. Pour ma part, je ne peux que me féliciter du fait que nous soyons saturés d’informations sur les enjeux climatiques et sur les risques pesant sur la biodiversité, lesquels constituent non pas un danger, mais une menace. Les scientifiques évoquent même une sixième extinction. Je pense donc qu’on n’en parle pas encore assez !
Ce qui compte, c’est la façon dont on en parle. Si les jeunes nous alertent, c’est peut-être parce qu’ils sont plus sensibles aux dangers immédiats. Surtout, ils nous demandent, à nous, les adultes, ce que nous avons fait et ce que nous allons leur transmettre. Il nous revient de les aider à appréhender l’avenir.
Nous sommes tout à fait d’accord avec vos propos, monsieur le ministre : il faut inscrire des référents dans le code de l’éducation.
Cela étant, nous devons faire très attention à ce que nous disons. Si on commence à véhiculer ce type de message selon lequel on serait saturé de discours sur le changement climatique et le déclin de la biodiversité, on risque d’ouvrir grand la porte aux climatosceptiques. Ce serait là prendre un très grand risque.
Je ne retire pas l’amendement n° 319 rectifié bis.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote.
Mme Françoise Cartron. Monsieur le président, je retire mon amendement au profit de celui de M. Maurey.
Monsieur Bonhomme, je me suis mal exprimée : il ne s’agit pas de faire croire aux lycéens qu’ils vont faire les nouveaux programmes. Lors d’un débat, ils ont juste demandé plus d’informations et de débats sur ces problématiques, qui sont parfois schématisées. Loin de nous l’idée de prendre pour argent comptant tout ce qu’ils nous ont dit et de considérer que tout ce qu’ils disent est bien. Je tenais à le préciser.
M. François Bonhomme. Dont acte !
Mme Françoise Cartron. Nous avons participé aux débats et au dialogue. Nous avons aussi parfois placé les jeunes devant leurs contradictions, car elles existent sur ces questions.
M. le président. L’amendement n° 467 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je dirai à mon tour quelques mots sur l’importance aujourd’hui de la sensibilisation aux questions de la transition énergétique et de la préservation de la biodiversité.
L’argument de la saturation n’est pas recevable. En fait, c’est l’inverse. Je pense qu’on mesure mal la situation dans laquelle nous sommes. Récemment, on a entendu sur une chaîne d’information des intervenants remettre en cause de façon péremptoire et violente l’idée même du réchauffement climatique et la menace qu’il représente pour la planète au motif qu’il faisait froid dehors ! Ils se sont montrés insultants et ont déclaré qu’ils avaient le droit d’avoir cette opinion. Bien sûr ! Or il faut dire, comme sur les questions de racisme, que ce n’est pas juste une opinion. Ce faisant, on nie quelque chose qui va nous tuer et empêcher les êtres humains d’exister sur Terre !
Nous n’en sommes plus au stade où nous ne savions pas, où on évaluait la situation et où on faisait de la recherche. Les meilleurs spécialistes – nous sommes ici pour valoriser la connaissance et la science – nous disent aujourd’hui que, si nous ne prenons pas des mesures drastiques au cours des dix prochaines années, la situation sera irréversible.
Si on en a conscience, on se dit que, s’il y a bien un endroit où on doit sensibiliser les jeunes générations à ces questions et leur donner tous les outils qui leur permettront de faire ce que nous n’avons pas fait, c’est l’école. Il faut modifier les comportements et la manière d’appréhender ces sujets, faire des jeunes des citoyens éclairés qui puissent agir en conséquence.
Il faut donc soutenir tous les amendements qui vont dans ce sens.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Boyer. Nous discutons de sujets très importants depuis un certain temps. Dans cette assemblée, il y a des parents, des grands-parents, qui ont des enfants et des petits-enfants. Pour ma part, je m’interroge. Faisons preuve de bon sens : si j’ai bien compris – le Président de la République l’a dit, vous aussi, monsieur le ministre –, l’objectif de l’enseignement à l’école primaire aujourd’hui, c’est l’acquisition des savoirs fondamentaux – lire, écrire, compter. J’ajouterai l’éducation psychomotrice.
M. Pierre Ouzoulias. Et la morale !
M. Jean-Marc Boyer. Or, toutes les études le montrent, le niveau des petits Français à la fin de l’école primaire les place non pas les derniers à l’échelon européen, mais presque. C’est un constat.
Je pose la question : va-t-on continuer à mettre en avant l’importance des savoirs fondamentaux, compte tenu de tout ce qui est proposé aujourd’hui ?
Je veux bien, car c’est important, que l’on sensibilise les jeunes au développement durable, à la protection de la biodiversité, de la faune et de la flore, du patrimoine, voire, comme cela a été dit lors de l’examen du projet de loi d’orientation des mobilités, qu’on leur apprenne à faire du vélo. Pourquoi pas ? Cela étant, quand on connaît le rythme des élèves à l’école primaire, quand on les voit rentrer chez eux leur cartable chargé sur les épaules, on se demande quand ils vont matériellement trouver le temps d’assimiler tout cela. Et je ne parle pas des sorties sportives ou dans la nature, notamment des cours de natation ! Mme la ministre a en effet indiqué vouloir renforcer l’apprentissage de la natation, qui est essentiel en effet, compte tenu du nombre d’accidents mortels que l’on déplore tous les étés.
Ces petits vont droit au burn-out. Il va bien falloir faire des choix à un moment donné : allons-nous nous concentrer sur les savoirs fondamentaux ou nous disperser et enseigner aux élèves tout ce qui leur est proposé aujourd’hui ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. Monsieur le ministre, je ne peux rester silencieuse à la suite de l’appel émouvant, solennel et grave de notre ami Labbé.
Cela me donne l’occasion d’émettre un avis, si je puis dire, sur les débats très importants que nous avons depuis le début de l’après-midi. Je pense, cher collègue breton, que votre appel à la sensibilisation et à l’éducation au développement durable est essentiel. Nul ne peut le nier. Toutefois, il me semble que l’amendement de notre collègue Maurey, défendu par M. Longeot, y répond.
D’une manière générale, nous évoquons tous, avec beaucoup de sérieux, de gravité et de raison, de nombreux thèmes auxquels nous devons sensibiliser nos enfants. Toutefois, il me semble que nous reprochons aussi très souvent à la loi d’être trop bavarde, d’être trop chargée, d’imposer des contraintes aux collectivités. Or il existe dans le code de l’éducation – M. le rapporteur, M. le ministre, Mme la présidente de la commission l’ont rappelé – un certain nombre d’outils et de programmes grâce auxquels on va pouvoir sensibiliser les jeunes à tous les thèmes que nous avons évoqués.
Pour ma part, depuis le début de l’après-midi, je vote contre ces amendements de précision. Cher Joël Labbé, si je ne voterai pas votre sous-amendement, c’est donc non pas parce que je ne suis pas sensible au développement durable – l’adoption de l’amendement de M. Maurey permettra de répondre à la problématique –, mais parce qu’il faut selon moi laisser les choses se faire là où elles doivent être faites. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Martin Lévrier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.
M. Olivier Paccaud. Notre collègue Jean-Marc Boyer a insisté sur le fait que l’on demande peut-être un peu trop à l’école primaire : qui trop embrasse mal étreint ! L’école primaire doit enseigner, outre ce qu’il a évoqué, les langues étrangères, l’informatique… C’est effectivement de plus en plus compliqué.
Néanmoins, l’éducation au développement durable est importante. Je trouve l’amendement n° 353 rectifié bis, que j’ai cosigné, très sage. Il n’est pas envisagé d’ajouter, par exemple, une « semaine de sensibilisation ».
Sachons raison garder. Comme disait le philosophe, il faut « cultiver notre jardin ». Encore faut-il qu’il reste des jardins ; un jour, il n’y en aura peut-être plus…
Quoi qu’il en soit, il faut voter cet amendement très sage.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.
M. Yves Détraigne. J’irai dans le même sens. Il est utile, voire nécessaire de sensibiliser les enfants aux enjeux environnementaux. Mais n’en rajoutons pas en permanence. À mon sens, l’école doit d’abord leur apprendre à lire, à écrire et à compter. Elle doit en faire de bons citoyens. Certes, l’écologie et le respect de la nature font aussi partie de la citoyenneté. Mais, si nous ne voulons pas que les enfants dorment en classe ou fassent semblant d’écouter, sachons raison garder quant à la lourdeur des programmes.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Max Brisson, rapporteur. Je voudrais rassurer mon collègue Jean-Marc Boyer, dont l’intervention était fort intéressante.
L’amendement n° 353 rectifié bis vise simplement à moderniser la rédaction du code de l’éducation en fonction des enjeux contemporains. En cela, il est bienvenu.
Comme l’a noté notre collègue Olivier Paccaud, il ne s’agit pas de charger la barque ou, pour reprendre l’image utilisée par M. le ministre, d’ajouter une fée supplémentaire autour du berceau de l’école ; d’ailleurs, les fées y sont déjà très nombreuses ! (Sourires.)
L’amendement tend à faire clairement figurer le développement durable dans le code de l’éducation. Il est déjà largement présent – et c’est heureux ! – dans les disciplines enseignées. Je pense notamment aux sciences de la vie et de la Terre ou à la géographie, dont le programme accorde une large place au développement durable ; je dirai même qu’il en constitue l’épine dorsale. L’école intègre donc cette problématique dans le cadre des matières existantes ; c’est comme cela qu’il faut procéder.
Nos débats sur toutes ces différentes formes d’éducation ont été très riches. Je souhaite attirer l’attention du Sénat sur une très belle formule que j’essayais de faire mienne comme enseignant lorsque les parlementaires de l’époque avaient, déjà – ce n’est pas nouveau ! –, tendance à vouloir trop charger la barque par leurs injonctions. Comme l’avait justement écrit Jean Zay, les « querelles des hommes » doivent rester à la porte de l’école pour permettre à celle-ci de remplir ses missions essentielles : enseigner les savoirs fondamentaux, ceux qui construisent durablement le citoyen et lui donneront les outils pour aborder demain les enjeux de son époque ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er bis F, et les amendements nos 319 rectifié bis, 471 rectifié ter, 472 rectifié ter, 351 rectifié bis et 113 rectifié bis n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 330 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 289 rectifié bis, présenté par Mmes Blondin, Monier et Lepage, M. Antiste, Mme S. Robert, M. Assouline, Mme Ghali, MM. Lozach, Magner, Manable, Kanner, Bérit-Débat, Durain, Féraud et Fichet, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Marie, Mme Meunier, M. Montaugé, Mme Taillé-Polian, M. Tourenne, Mme Van Heghe, MM. Courteau et Daunis, Mme Préville, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 1er bis F
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la deuxième phrase de l’article L. 442-1 du code de l’éducation, il est inséré une phrase ainsi rédigée : « L’établissement doit veiller à la mixité sociale des élèves qu’il accueille et met en place une politique tarifaire différenciée. »
La parole est à Mme Maryvonne Blondin.
Mme Maryvonne Blondin. Cet amendement vise à compléter l’article L. 442-1 du code de l’éducation, aux termes duquel les établissements d’enseignement privés ayant passé un contrat d’association avec l’État doivent, tout en conservant leur caractère propre, assurer un enseignement dans le respect total de la liberté de conscience. Tous les enfants, sans distinction d’origine, d’opinion ou de croyance, doivent y avoir accès.
Cet amendement tend à porter obligation aux établissements privés sous contrat de favoriser la mixité sociale. Un tel parallélisme des formes avec l’obligation à laquelle sont soumis les établissements d’enseignement publics se justifie d’autant plus que les établissements privés sous contrat recevront de la part de leur commune de rattachement les ressources nécessaires à la prise en charge de la nouvelle obligation scolaire dès l’âge de 3 ans.
Il convient donc de mettre en place une tarification différenciée en fonction des revenus des familles. Je sais que certains établissements le font déjà. Mais nous proposons de l’inscrire dans le volet du code de l’éducation relatif aux établissements d’enseignement privés.
M. le président. L’amendement n° 381 rectifié bis, présenté par Mme Cartron et MM. Haut, Cazeau, Théophile, Yung, Karam, Mohamed Soilihi, Hassani, Bargeton, Marchand, Buis et de Belenet, est ainsi libellé :
Après l’article 1er bis F
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La dernière phrase de l’article L. 442-1 du code de l’éducation est complété par les mots : « et tous les établissements veillent en leur sein à la mixité sociale ».
La parole est à Mme Françoise Cartron.
Mme Françoise Cartron. Cet amendement porte sur le même sujet : la mixité sociale dans les établissements scolaires, qu’ils soient publics ou privés.
Depuis quelques années, nous sommes confrontés à une vraie difficulté.
Dans l’enseignement public, la non-mixité s’est aggravée sur certains territoires. Certes, cela dépend de la carte scolaire, donc de l’action plus ou moins volontariste des départements. Pour ma part, au regard de la carte élaborée par le ministère de l’éducation nationale, je suis désolée de constater que la Gironde est l’un des départements avec le moins de mixité sociale dans ses établissements.
Il faudrait pouvoir intégrer un critère de mixité sociale dans les évaluations des établissements, qu’ils soient publics ou privés, afin de pouvoir ensuite mener des actions d’encouragements et mettre en place des institutions.
Ayons un vrai débat. Voilà quelques années, j’avais souligné que l’abolition de la carte scolaire pouvait ouvrir la porte à une ghettoïsation « par le haut ou par le bas », en fonction des établissements.
Dès lors que l’État accorde une participation financière aux établissements privés, il me semblerait intéressant d’envisager avec eux une modulation en fonction de la réalité de la mixité sociale.
Il ne m’apparaît pas totalement juste que les établissements accueillant des publics très défavorisés en grande quantité aient la même dotation que ceux qui reçoivent seulement des publics très favorisés.
Par cet amendement, je pose donc le problème de la mixité sociale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Max Brisson, rapporteur. L’objectif des auteurs de ces deux amendements est louable. Mais la rédaction proposée me semble porter atteinte à la liberté d’organisation des établissements privés sous contrat.
Je partage la préoccupation relative à l’implication des établissements en matière de mixité sociale ; d’ailleurs, l’enseignement privé sous contrat, en particulier l’enseignement privé catholique, la partage également.
La commission préfère que nous adoptions l’amendement que notre collègue Laurent Lafon défendra après l’examen de l’article 8 bis. Il s’agit de permettre la conclusion de conventions entre l’État et les établissements privés sous contrat pour les inciter à diversifier leur recrutement.
J’émets donc un avis défavorable sur les deux amendements dont nous sommes saisis, mais nous pourrons reprendre ce débat lors de l’examen de l’amendement de M. Lafon.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Je souscris en grande partie aux arguments de M. le rapporteur. Au demeurant, nous avons déjà eu cette discussion hier soir à propos d’un autre amendement.
L’objectif de mixité sociale figure dans le code de l’éducation. Nous devons évidemment continuer de chercher à l’atteindre, par le dialogue et, éventuellement, par des incitations.
Les deux amendements me semblent donc satisfaits. À l’instar de M. le rapporteur, je pense que l’objectif est partagé par les partenaires. À nous d’avancer concrètement pour mieux l’atteindre.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour explication de vote.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Je vois depuis hier des amendements dans lesquels on oppose le public au privé ; c’est le retour de la « petite guéguerre » entre la droite et la gauche !
M. Pierre Ouzoulias. Hier, ce n’était pas entre la droite et la gauche !
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Je suis extrêmement choquée par certains propos.
Venez en région parisienne : beaucoup d’établissements d’enseignement privés accueillent des enfants de toutes origines ! La mixité sociale existe.
Et la non-mixité sociale est aussi frappante dans les écoles publiques.