Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Cet amendement vise à encourager une bonne pratique des actionnaires ou des fonds d’investissement qui souhaitent associer les salariés à la prise de valeur de l’entreprise dans laquelle ils investissent et reconnaître ainsi que la plus-value produite tient largement à la contribution de ces salariés.
Cet amendement prévoit ainsi la formalisation sur une base volontaire d’un accord entre l’investisseur et l’entreprise dans laquelle il investit, par lequel celui-ci s’engagerait à reverser une fraction de la plus-value au terme de la période d’investissement. L’entreprise serait chargée de redistribuer ces sommes aux salariés ou anciens salariés au prorata de leur durée de présence dans l’entreprise.
D’un point de vue fiscalo-social, les sommes versées s’apparenteraient à un abondement unilatéral de l’employeur sur le plan d’épargne d’entreprise, qui jouit du même traitement fiscalo-social que l’intéressement : forfait social pour l’employeur, défiscalisation pour le salarié dans la limite du plafond de droit commun.
Les sommes seraient également soumises au forfait social, qui serait directement déduit par l’entreprise des sommes versées pour le compte de l’investisseur, de sorte qu’aucune charge nouvelle ne pèserait sur elle. Des mesures de coordination fiscale sont également prévues pour éviter toute double imposition des sommes ainsi versées.
Ce dispositif permettra de développer le partage de la valeur au profit des salariés dans l’industrie de la gestion d’actifs, en particulier dans des opérations où, comme vous le savez, la rémunération peut être concentrée sur un petit nombre de managers, alors que l’ensemble des salariés ont contribué à l’amélioration sensible de la performance de l’entreprise. Il s’agit donc de mieux partager la valeur et la création de richesses entre l’ensemble des salariés, sans faire prendre de risques à ceux-ci, comme c’est le cas pour les managers, lesquels doivent investir sur leurs deniers propres et peuvent donc connaître des pertes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Michel Canevet, rapporteur. La commission avait émis un avis favorable sur le premier amendement déposé par le Gouvernement, qui a été légèrement modifié. Nous maintenons le même avis.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Je remercie Mme Primas, car nous avons eu un débat politique. Au moment de discuter de la réforme de la Constitution, il faudra revoir notre façon de travailler : je pense qu’il faut avoir de grands débats politiques et trouver un moyen pour voter ensuite les amendements.
Monsieur le rapporteur, le débat que nous avons nécessite de rappeler un fait : depuis trente ans, dans tous les pays de l’OCDE, 3 points par décennie sont passés en moyenne du travail au capital. Cela signifie que, pendant cette période, le travail a perdu 10 points au profit du capital. Ce n’est pas une vision dogmatique, c’est, j’y insiste, un fait. C’est dû à plusieurs facteurs : la hausse de la productivité, l’intensification de la compétition internationale, l’affaiblissement du pouvoir de négociation des travailleurs, etc. Mais c’est la réalité ! Quand on veut remettre de la justice dans le système, il faut partir de là : 10 points sont passés du travail au capital. Je suis désolé de vous le dire !
Par ailleurs, nous sommes face à un problème : cela creuse les inégalités et met à mal notre cohésion nationale. C’est la raison pour laquelle je veux avoir un débat comme avec Mme Primas, qui a posé correctement le sujet sur lequel nous pouvons ensuite débattre : la différence entre le salaire brut et le salaire net, c’est la part socialisée qui permet de financer notre sécurité sociale.
M. Loïc Hervé. Eh oui !
M. Fabien Gay. Je le redis, c’est la sécurité sociale qui fonde notre modèle social et fait de notre pays l’un des plus compétitifs. Car un salarié bien soigné, c’est un salarié qui est bien au travail, qui est productif : il est l’un des éléments de la compétitivité.
Il est vrai que nous semblons parfois être à contre-courant, et nous sommes d’ailleurs à contre-courant de l’idéologie globale qui règne ici. Ce n’est pas grave, mais nous avons besoin d’argumenter avec vous, mes chers collègues, et d’aller plus avant dans le débat.
Madame la secrétaire d’État, vous m’avez dit que l’augmentation des salaires n’était pas à l’ordre du jour, mais, depuis dix-huit mois, avec ce gouvernement, elle ne l’a jamais été ! Si nous avons bien compris, le Président de la République a expliqué que, dans les trois ans à venir, ce point ne serait pas à l’ordre du jour. C’est bien le problème !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. On nous explique que l’actionnariat salarié est la bonne méthode pour intéresser, adosser les salariés à leur entreprise, pour les motiver… Je rappelle que, en Allemagne, la cogestion ou plutôt la codétermination est fixée comme un principe lié au fait non pas d’être actionnaire, mais d’être partie prenante comme salarié de la création de richesses dans l’entreprise.
Il existe donc des modèles permettant d’impliquer les salariés et de les intéresser aux arbitrages et à la vie de l’entreprise en leur reconnaissant des droits en tant que salariés, et non pas en leur faisant miroiter la perspective d’un impact au travers de leur rôle d’actionnaire salarié. Car la réalité, c’est que cela représente des clopinettes les trois quarts du temps, même si je partage l’idée de M. Gabouty de regrouper les salariés pour essayer de peser.
Par ailleurs, vous dites que l’actionnariat français est faible. Nous avons effectivement un problème de capitalisation de nos entreprises. Historiquement, la part des capitaux publics dans le capitalisme français était extrêmement importante – cela nous renvoie au débat sur les privatisations. En les faisant disparaître, nous ne leur avons pas substitué un capital national, à la limite privé. Au contraire, si l’on fait le bilan sur une longue durée, c’est du capitalisme financier, via des fonds de pension, qui s’est substitué au traditionnel capitalisme productif. L’Allemagne a une solution : ce sont les landesbanken qui, la plupart du temps, possèdent des fonds de capitaux qu’elles investissent dans les industries ou dans les entreprises.
En plus, nous avons peu d’ETI – ce sont soit des PME, soit de très grandes entreprises. Ces dernières, qui étaient historiquement nationalisées, sont devenues hyperfinanciarisées.
Le débat doit être beaucoup plus global. Ce n’est pas parce que l’on développera le capitalisme salarié que l’on répondra à la question : comment faire du capitalisme national pour que nos entreprises soient le moins possible vulnérables à la finance et à l’étranger ? Cela ne signifie pas que nous fermions nos portes.
Je considère que ce dispositif est de la poudre aux yeux pour régler les problèmes des formes que doit prendre notre capitalisme national. Par ailleurs, il est trompeur sur les droits des salariés.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. On parle de l’OCDE, mais, comme nous sommes au sein d’une chambre du Parlement français, je citerai une note du Trésor qui reprend le rapport de l’OCDE : « La part du travail dans la valeur ajoutée a reculé depuis les années 1990 dans la plupart des grands pays de l’OCDE au profit généralement d’une amélioration du taux de marge, sauf en France. »
M. le président. C’est un fait, comme dirait M. Gay. (Sourires.)
M. Fabien Gay. Parti pris ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. Je voudrais répondre à M. Gay : la France, c’est 1 % de la population mondiale, 2 % du PIB mondial et 8 % des dépenses sociales mondiales. Ce n’est pas vraiment un modèle apparemment…
Dans d’autres pays, c’est l’accumulation de capital, autrement dit l’épargne, qui permet l’investissement et donc le travail. Voilà une piste pour faire baisser le chômage !
M. le président. L’amendement n° 78 rectifié, présenté par M. Adnot, Mme Imbert et MM. Savary, Cuypers et Rapin, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
… – Le sixième alinéa de l’article L. 3332-15 du code du travail est ainsi rédigé :
« Les actifs de ces fonds peuvent également comprendre des parts ou titres de capital d’entreprises régies par la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération lorsque ces fonds sont souscrits par les salariés desdites entreprises ou par les salariés d’entreprises qui leur sont liées au sens du second alinéa de l’article L. 3344-1 et de l’article L. 3344-2 du présent code. »
… – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° À la première phrase du sixième alinéa du I, à la seconde phrase du même sixième alinéa (trois fois), au IV, à la première phrase du premier alinéa du V, au deuxième alinéa du même V (deux fois) et à la première phrase du dernier alinéa dudit V (deux fois) de l’article L. 214-164, après le mot : « titres », sont insérés les mots : « ou parts » ;
2° Au I de l’article L. 214-165, après le mot : « titres », sont insérés les mots : « ou parts ».
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Cet amendement a pour objet de permettre aux fonds communs de placement d’entreprise de détenir des parts d’une société coopérative.
Aujourd’hui, les parts sociales des banques coopératives et des coopératives dans leur ensemble sont des actifs spécifiques qui ne sont pas éligibles à un FCPE. Par conséquent, alors que les salariés d’entreprises de droit privé peuvent détenir des actions de leur entreprise en épargne salariale, les salariés des entreprises coopératives sont privés de cette faculté.
À cette observation, la commission spéciale m’a répondu que cet amendement était satisfait par le droit existant. J’ai indiqué que j’allais faire une analyse juridique comparative, que j’ai apportée. Malheureusement, il semblerait, monsieur le rapporteur, que vous ayez fait une confusion en ne prenant pas en compte le fait que ces parts sont obtenues à partir de l’épargne salariale.
Je vous donne mes sources, car je ne suis pas concerné par l’amendement : la CFE-CGC a exposé très clairement à partir de quel rapport international elle a élaboré cette proposition ; les arguments que j’avais développés sont donc exacts. Il vous appartiendra de savoir quoi faire, puisque vous m’avez demandé de faire une analyse comparative. Je vous confirme que vous n’avez pas convenablement analysé la situation. Il serait dommage de priver les personnes qui travaillent dans les sociétés coopératives des mêmes droits que les autres.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Michel Canevet, rapporteur. Monsieur Adnot, il est dommage que vous ne nous ayez pas communiqué les éléments d’analyse en votre possession, parce que nous aurions eu le temps, depuis le début de la semaine, de les examiner de façon à pouvoir y apporter une réponse.
Par précaution, comme j’avais considéré que votre amendement était satisfait par trois articles du code monétaire et financier, je reste sur cette position. Si jamais il y avait un problème, nous pourrions revoir la question. L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. J’ai la même analyse technique sur les articles L. 214-164 et L. 214-165 du code monétaire et financier.
Si je comprends bien, les schémas existants de FCPE confirment la faisabilité actuelle de ce dispositif.
L’avis est donc défavorable en l’absence d’éléments complémentaires.
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. Je vais retirer mon amendement, mais je veux avoir l’engagement, madame la secrétaire d’État, que, si l’on s’aperçoit que votre analyse n’est pas exacte, vous reviendrez sur la question. Êtes-vous d’accord ?…
M. Philippe Adnot. Dans ce cas, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 78 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 59, modifié.
(L’article 59 est adopté.)
Article 59 bis
(Non modifié)
Le deuxième alinéa du I de l’article L. 225-197-1 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ne sont pas prises en compte dans ces pourcentages les actions qui n’ont pas été définitivement attribuées au terme de la période d’acquisition prévue au sixième alinéa du présent I ainsi que les actions qui ne sont plus soumises à l’obligation de conservation prévue au septième alinéa. »
M. le président. L’amendement n° 679 rectifié, présenté par M. Gay, Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Gréaume, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
À la première phrase du 2° du II de l’article L. 137-13 du code de la sécurité sociale, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 30 % ».
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. L’objet de cet amendement est de supprimer l’article 59 bis, qui élargit la possibilité offerte aux entreprises de distribuer des actions gratuites, tout en proposant une réécriture afin de revenir sur l’allégement de la fiscalité applicable à ces actions entériné lors du précédent projet de loi de financement de la sécurité sociale et en rétablissant à hauteur de 30 % le taux de la contribution.
Le dispositif d’actions gratuites avait été inscrit dans la loi Macron de 2015. Il avait pour objectif de permettre à un créateur d’entreprise n’ayant pas les moyens de recruter un ingénieur, par exemple, de lui attribuer des actions gratuites afin de l’intéresser au développement de la société.
Initialement, l’esprit qui a présidé à la création de ce dispositif était de permettre aux petites entreprises d’être plus attractives pour leurs salariés. Cet esprit a été dévoyé, puisque le dispositif a été étendu à toutes les entreprises du CAC 40, pour lesquelles la logique, vous en conviendrez, est bien différente. En effet, ces entreprises disposent de moyens suffisants, qu’elles peuvent parfaitement mettre en œuvre afin d’attirer les salariés. Elles n’ont pas besoin de bénéficier d’un allégement de la contribution, contrairement aux petites et moyennes entreprises.
Dans le cadre de la loi de finances rectificative de 2016, un taux de 30 % avait été fixé pour les grandes entreprises, tandis qu’un taux zéro était appliqué pour les PME. Ce taux a été abaissé à 20 % lors du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 et confirmé lors du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019. Or cette mesure constitue un manque à gagner pour les finances publiques qui s’élèverait à 120 millions d’euros. Ce manque à gagner s’ajoute aux dispositions de ce projet de loi relatives au forfait social – je suis déjà intervenue sur la question.
Nous nous opposons à ces décisions successives qui vident progressivement les caisses de la sécurité sociale, comme en attestent les chiffres que nous vous avons fournis, quoi que vous en disiez, madame la secrétaire d’État.
Puisque cette section du projet de loi a pour objet de rendre les entreprises plus justes et d’assurer un meilleur partage de la valeur, il ne nous paraît que justice que les entreprises continuent de participer à notre système de solidarité nationale à hauteur de leurs moyens. C’est pourquoi nous vous proposons de rétablir le taux de 30 % de la contribution applicable aux grandes entreprises.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Michel Canevet, rapporteur. Je suis résolument pour l’actionnariat des salariés dans les entreprises, comme je suis pour la participation des salariés aux fruits de la croissance de celles-ci. Je considère qu’il s’agit d’un mode d’intéressement particulièrement vertueux qui permet à tous de s’assurer du bon fonctionnement des entreprises. Car ce bon fonctionnement permet la création d’emplois et donc des cotisations supplémentaires à la sécurité sociale. Bref, c’est un système vertueux, qu’il faut encourager.
Alors, a fortiori, il ne faut pas se priver de la distribution d’actions gratuites aux salariés. Pourquoi vouloir taxer plus les entreprises qui décident de le faire ? Cela conduit à pénaliser les salariés ! Or nous voulons favoriser ces derniers, car nous disons que, si les salariés sont bien dans l’entreprise, celle-ci fonctionnera bien et ses résultats seront meilleurs.
La rémunération des salariés ne comprend pas seulement le salaire direct : elle inclut d’autres modes de rémunération, que ce soit la participation aux chèques vacances, les tickets restaurant, la protection sociale complémentaire et, bien entendu, l’épargne salariale et l’actionnariat salarié. Il faut être enthousiaste sur le sujet et se dire qu’il profitera à tout le monde et à notre pays.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. L’avis est également défavorable. Le dispositif d’actions de performance existe depuis des années, ce n’est pas la loi Macron qui l’a institué. Il ne faut pas confondre le BSPCE, qui est précisément orienté vers les start-up qui ont des difficultés à recruter des cadres, et le dispositif d’actions de performance ou, si vous préférez, d’actions gratuites.
M. le président. L’amendement n° 558 rectifié, présenté par M. Gay, Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Gréaume, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Au début de cet article
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 225-94 du code du commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La rémunération variable accordée aux personnes mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article ne peut être supérieure à leur rémunération fixe. »
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Selon le code de gouvernance arrêté par l’AFEP et le MEDEF, « le conseil débat des performances des dirigeants mandataires sociaux exécutifs, hors la présence des intéressés.
« La détermination de la rémunération des dirigeants mandataires sociaux exécutifs relève de la responsabilité du conseil d’administration qui les nomme et se fonde sur les propositions du comité des rémunérations. Le conseil motive ses décisions prises en la matière.
« La rémunération de ces dirigeants doit être compétitive, adaptée à la stratégie et au contexte de l’entreprise et doit notamment avoir pour objectif de promouvoir sa performance et sa compétitivité sur le moyen et long terme en intégrant un ou plusieurs critères liés à la responsabilité sociale et environnementale.
« La rémunération doit permettre d’attirer, de retenir et de motiver des dirigeants performants.
« Le conseil peut décider d’attribuer une rémunération variable annuelle dont le paiement peut, le cas échéant, être différé.
« Les règles de fixation de cette rémunération doivent être cohérentes avec l’évaluation faite annuellement des performances des dirigeants mandataires sociaux exécutifs et avec la stratégie de l’entreprise. Elles dépendent de la performance du dirigeant et du progrès réalisé par l’entreprise.
« Les modalités de la rémunération variable annuelle doivent être intelligibles pour l’actionnaire et donner lieu chaque année à une information claire et exhaustive dans le rapport sur le gouvernement d’entreprise.
« Le conseil définit les critères permettant de déterminer la rémunération variable annuelle ainsi que les objectifs à atteindre. Ceux-ci doivent être précis et bien entendu préétablis.
« Il doit être procédé à un réexamen régulier de ces critères dont il faut éviter les révisions trop fréquentes. »
À la vérité, ce code se substitue, dans les faits, à la moindre disposition tendant à réduire ou encadrer la rémunération des dirigeants d’entreprise. Tout, dans ce code de gouvernance, fait de chaque situation un cas d’espèce, uniquement résolu par les décisions du conseil d’administration de l’entreprise, où, de manière générale, on peut coopter ceux qui sont, ailleurs, en situation de dirigeant salarié.
Sans autre règle que celle de la décision interne de l’aréopage des dirigeants de l’entreprise, nous aboutissons aux situations excessives maintes fois dénoncées et dont l’affaire Ghosn est une sorte de point d’orgue. C’est donc pour poser des règles claires de salubrité publique et sociale que nous vous invitons à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Michel Canevet, rapporteur. Notre collègue Olivier Cadic pourrait vous expliquer beaucoup mieux que moi qu’il faut plus de liberté dans les entreprises.
Vous voulez introduire des contraintes, ce à quoi, vous le comprendrez, nous ne pouvons être favorables.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Je ne comprends pas du tout cet amendement, qui vise la rémunération des administrateurs et des membres du conseil de surveillance. Or la majorité d’entre eux ne sont pas comme M. Carlos Ghosn – pour reprendre votre exemple –, puisqu’ils ne dirigent pas l’entreprise ; ils participent à la décision stratégique.
En fait, le variable et le fixe sont en règle générale fondés sur des règles de présence au conseil d’administration. Si vous ne venez pas, vous n’êtes pas payé, ce qui ne me paraît pas illégitime.
Tout cela est très clairement précisé dans le document de référence, qui est consultable en ligne. Pour le public, la transparence est donc totale.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.
Mme Michelle Gréaume. Il s’agit simplement d’encadrer les salaires. Je vais vous dire ce que j’ai sur le cœur.
Prenons un exemple concret, celui de Vallourec, où le directeur pompe carrément la société, malgré le CICE et toutes les autres aides. Ce sont les salariés qui pâtissent de la situation ! Il s’agit donc, à mes yeux, d’un amendement très important.
M. le président. Je mets aux voix l’article 59 bis.
(L’article 59 bis est adopté.)
Article 59 ter A
(Non modifié)
Le VII de l’article 135 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois les sociétés peuvent prévoir dans leurs statuts que les actions nominatives détenues directement par les salariés et régies par l’article L. 225-197-1 du code de commerce dont l’attribution a été autorisée par des assemblées générales extraordinaires antérieurement à la publication de la présente loi sont également prises en compte pour la détermination de la proportion du capital détenue par le personnel en application de l’article L. 225-102 du code de commerce. » – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 59 ter A
M. le président. L’amendement n° 500 rectifié, présenté par Mme Deromedi, MM. Retailleau, Bas, Bascher et Bazin, Mmes Berthet et A.M. Bertrand, M. Bizet, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bonhomme, Mmes Bories et Boulay-Espéronnier, MM. Bouloux et Brisson, Mme Bruguière, MM. Buffet et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Chatillon, Chevrollier, Courtial, Cuypers, Danesi, Darnaud, Daubresse et Dériot, Mmes Deseyne et Di Folco, M. Dufaut, Mmes Dumas, Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. B. Fournier, Frassa et Genest, Mme F. Gerbaud, M. Ginesta, Mme Giudicelli, MM. Grand et Gremillet, Mme Gruny, MM. Houpert et Hugonet, Mme Imbert, MM. Karoutchi et Kennel, Mmes Lanfranchi Dorgal et Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge et Leleux, Mme Lherbier, M. Longuet, Mme Malet, MM. Mandelli et Mayet, Mmes M. Mercier et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller et de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Paccaud, Paul, Pellevat, Pemezec, Piednoir, Pierre, Pillet et Poniatowski, Mmes Primas et Ramond, MM. Rapin, Regnard, Reichardt, Revet, Savary, Savin, Segouin et Sido, Mme Thomas et MM. Vaspart, Vogel et Gilles, est ainsi libellé :
Après l’article 59 ter A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Aux première et deuxième phrases de l’article L. 225-179 du code de commerce, le mot : « extraordinaire » est remplacé par le mot : « ordinaire ».
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Les attributions d’options d’achat d’actions, à la différence des attributions d’options de souscription d’actions, ne donnent pas lieu à augmentation du capital social, puisque les actions remises aux bénéficiaires sont des actions existantes rachetées par la société. De telles attributions n’étant pas dilutives, une autorisation par une assemblée générale extraordinaire ne se justifie pas.
Il est rappelé que, par l’ordonnance du 31 juillet 2014, la compétence pour décider de l’émission de valeurs mobilières non dilutives, comme les obligations convertibles en actions existantes, a été transférée de l’assemblée générale extraordinaire vers le conseil d’administration de la société émettrice. De la même manière, les conditions d’autorisation des attributions d’options d’achat d’actions existantes pourraient être allégées, favorisant ainsi le développement de l’actionnariat salarié.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Michel Canevet, rapporteur. Les opérations relatives à l’actionnariat relèvent normalement de l’assemblée générale extraordinaire. Sur ce point, que je ne sais comment appréhender, je souhaiterais connaître l’avis du Gouvernement.
En tout état de cause, la commission a émis un avis défavorable, considérant que l’amendement, mal rédigé, n’était pas applicable en l’état.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. La compétence de l’assemblée générale extraordinaire est justifiée dans toutes les opérations d’accès au capital.
Vous avez raison de distinguer les attributions d’options d’achat d’actions et les attributions d’options de souscription d’actions, qui conduisent à une augmentation de capital. Néanmoins, il s’agit bel et bien du même instrument. L’adoption de votre proposition créerait une nouvelle charge pour l’entreprise, alors que l’autre type d’attribution est dilutif pour les actionnaires, ce qui n’est pas illégitime.
Cet amendement introduit un biais entre options d’achat et actions de performance, mais aussi entre options d’achat et options de souscription. Je ne crois pas que cela soit justifié. Par ailleurs, ce serait la porte ouverte au contournement de l’assemblée générale extraordinaire.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.