M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-74 rectifié, présenté par MM. Guené et Raynal, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

…° L’article L. 1211-2 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Pour chaque membre du comité, titulaire ou suppléant, à l’exception des représentants de l’État et des membres du Parlement, est désigné un remplaçant destiné à participer aux réunions du comité en cas d’empêchement temporaire du membre pour quelque cause que ce soit. Ce remplaçant est désigné en son sein par l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’établissement public de coopération intercommunale présidé par le membre. Le remplaçant d’un membre titulaire ne peut prendre part au vote que si le membre suppléant n’est pas présent.

« En cas de vacance définitive d’un siège appartenant à un membre élu du comité, l’association nationale d’élus locaux représentative du collège concerné désigne un nouveau membre, dans le respect des conditions prévues aux quatrième à septième alinéas du présent article. » ;

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Cet amendement vise à corriger les problèmes de quorum qui se posent quelquefois au sein du comité des finances locales, le CFL, du côté des parlementaires et des représentants de l’État. Il arrive en effet que certains maires ou présidents d’exécutif local ne puissent assister au CFL.

L’amendement tend, d’une part, à prévoir des remplaçants et, d’autre part, en cas de vacance définitive d’un siège appartenant à un membre élu du Comité, à autoriser l’association nationale d’élus locaux représentative à désigner un nouveau membre jusqu’aux élections suivantes.

M. le président. L’amendement n° II-238 rectifié ter, présenté par M. L. Hervé, Mme Billon, MM. Bockel, Canevet, Henno, Kern, Longeot et Moga, Mme de la Provôté et M. Lafon, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

…° Après l’article L. 1211-2, il est inséré un article L. 1211-2-… ainsi rédigé :

« Art. L. 1211-2-. – En l’absence de suppléant désigné lors de l’élection des membres du comité des finances locales, les membres titulaires élus de ce comité peuvent, en cas d’absence, se faire représenter par un membre de l’exécutif de la collectivité qu’ils président.

« En cas de décès ou de démission, en cours de mandat, d’un membre élu du comité des finances locales, celui-ci peut être désigné par l’association d’élus représentative du collège concerné. » ;

La parole est à M. Loïc Hervé.

M. Loïc Hervé. Cet amendement vise à répondre exactement à la même problématique que celle qu’a soulevée à l’instant Claude Raynal à propos du comité des finances locales, le CFL.

Il s’agit d’une instance extrêmement importante, lieu de discussions entre le Gouvernement et les associations d’élus sur les questions relatives aux finances et à la fiscalité locale.

Le Comité est composé de représentants de l’État et d’élus des différentes catégories de collectivités territoriales.

Compte tenu des obligations importantes incombant aux exécutifs des collectivités, il paraît nécessaire de leur permettre de se faire représenter par un de leurs adjoints ou de leurs vice-présidents, en vue d’assurer un fonctionnement optimal du comité des finances locales.

En outre, cet amendement tend également à instaurer une procédure visant à ouvrir la possibilité de pourvoir les sièges laissés vacants en cas de décès ou de démission d’un membre élu du CFL avant son renouvellement général, tous les trois ans.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cet amendement ?

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. La commission demande à M. Hervé de bien vouloir retirer son amendement au profit du sien.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Ces amendements, pleins de bon sens et pragmatiques, correspondent à un véritable besoin.

Le Gouvernement est tenté de faire preuve d’une sagesse bienveillante et favorable, pour vous inciter, mesdames, messieurs les sénateurs, à porter cette réflexion au sein du CFL. Il faut faire preuve à la fois de pédagogie et de la plus grande concertation sur cette modification.

Au bénéfice de cette pédagogie, le Gouvernement est favorable à l’amendement de la commission et demande le retrait de l’amendement n° II-238 rectifié ter.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-74 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° II-238 rectifié ter n’a plus d’objet.

L’amendement n° II-665 rectifié, présenté par Mme Gatel, MM. Janssens, Laugier et Henno, Mmes N. Goulet et Férat, M. Kern, Mmes Vullien, Doineau et Billon et MM. Prince, L. Hervé et Maurey, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer onze alinéas ainsi rédigés :

…° L’article L. 2113-20 est ainsi modifié :

a) Le II est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Au cours des trois premières années suivant leur création, les communes nouvelles dont l’arrêté de création a été pris entre le 2 janvier 2019 et le 1er janvier 2021 en application de délibérations concordantes des conseils municipaux regroupant une population inférieure ou égale à 150 000 habitants perçoivent une attribution au titre de la dotation forfaitaire prévue au même article L. 2334-7 au moins égale à la somme des dotations perçues par chacune des anciennes communes l’année précédant la création de la commune nouvelle. » ;

b) Le II bis est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Au cours des trois premières années suivant leur création, les communes nouvelles dont l’arrêté de création a été pris entre le 2 janvier 2019 et le 1er janvier 2021 en application de délibérations concordantes des conseils municipaux regroupant une population inférieure ou égale à 30 000 habitants bénéficient, en outre, d’une majoration de 5 % de leur dotation forfaitaire calculée dès la première année dans les conditions prévues aux I et II du présent article. » ;

c) Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Au cours des trois premières années suivant le 1er janvier de l’année de leur création, les communes nouvelles dont l’arrêté de création a été pris entre le 2 janvier 2019 et le 1er janvier 2021 en application de délibérations concordantes des conseils municipaux regroupant toutes les communes membres d’un ou de plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la population globale est inférieure ou égale à 150 000 habitants perçoivent une part “compensation” au moins égale à la somme des montants de la dotation de compensation prévue au même article L. 5211-28-1 et perçus par le ou les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre l’année précédant la création de la commune nouvelle. » ;

d) Le IV est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Au cours des trois premières années suivant leur création, les communes nouvelles dont l’arrêté de création a été pris entre le 2 janvier 2019 et le 1er janvier 2021 en application de délibérations concordantes des conseils municipaux regroupant toutes les communes membres d’un ou de plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la population globale est inférieure ou égale à 150 000 habitants perçoivent une dotation de consolidation au moins égale à la somme des montants de la dotation d’intercommunalité perçus par le ou les établissements publics de coopération intercommunale l’année précédant la création de la commune nouvelle. » ;

…° Avant le dernier alinéa de l’article L. 2113-22, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Au cours des trois années suivant le 1er janvier de l’année de leur création, les communes nouvelles dont l’arrêté de création a été pris entre le 2 janvier 2019 et le 1er janvier 2021 en application de délibérations concordantes des conseils municipaux et regroupant une population inférieure ou égale à 150 000 habitants perçoivent des attributions au titre des deux parts de la dotation nationale de péréquation, de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale et des trois fractions de la dotation de solidarité rurale au moins égales aux attributions perçues au titre de chacune de ces dotations par les anciennes communes l’année précédant la création de la commune nouvelle. » ;

La parole est à Mme Françoise Gatel.

Mme Françoise Gatel. Il s’agit d’un amendement de cohérence et de frugalité qui vise tout d’abord à étendre aux communes nouvelles, créées entre le 2 janvier 2019 et 1er janvier 2021, le bénéfice du pacte de stabilité financière.

Je rappelle que les communes nouvelles qui vont être effectivement créées au 1er janvier 2019 le seront sur la base des dispositions financières existantes, à savoir la certitude de bénéficier du pacte de stabilité financière que ce projet de loi de finances propose justement de supprimer.

Il s’agit aussi d’un amendement de frugalité. Aujourd’hui, le pacte de stabilité financière s’applique aux communes ne dépassant pas le seuil de 150 000 habitants, ce qui nous semble déraisonnable.

C’est la raison pour laquelle, dans la logique des préconisations du rapport de M. Darnaud, au nom de la commission des lois, sur le contrôle et le suivi de la mise en œuvre des lois de réforme territoriale, nous proposons, pour être raisonnables et frugaux, que le bénéfice de cette majoration soit réservé aux communes de 30 000 habitants ou moins.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Mon cher collègue, votre amendement n’a pas paru suffisamment ciblé à la commission, notamment parce qu’il ne comporte aucun seuil démographique.

Il existe aujourd’hui un projet de commune nouvelle à proximité de Tourcoing – je ne cite pas Tourcoing pour le plaisir de citer cette ville, mais parce qu’il s’agit du projet le plus important en termes de taille, à savoir 150 000 habitants. Une paille !

En l’occurrence, le coût de votre amendement pourrait se révéler extrêmement important et ne plus correspondre à l’esprit même du dispositif que vous proposez et qui vise à venir en aide aux petites communes rurales.

Par ailleurs, nous débattons ici du projet de loi de finances pour 2019, et je ne suis pas sûr que beaucoup de projets de communes nouvelles sortiront en 2019, c’est-à-dire juste avant 2020…

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement, dont elle comprend l’esprit.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je comprends l’amendement de Mme Gatel : il y a toujours eu une incitation à créer des communes nouvelles, sur la base du volontariat. Or, en 2019, pour une raison évidente – l’entrée en phase préélectorale de « protection » en quelque sorte, juste avant les élections municipales –, aucune commune nouvelle ne verra le jour.

Cet amendement vise à maintenir, au moins symboliquement – j’espère que vous ne m’en voudrez pas de le dire ainsi, madame la sénatrice – cette incitation, de peur qu’elle ne réapparaisse pas après les élections municipales.

Si telle est bien la philosophie de votre amendement, madame Gatel, sachez que j’y suis favorable.

En effet, il n’est pas question pour le Gouvernement de supprimer cette incitation à la création de communes nouvelles, dès lors que nous restons dans une logique de volontariat et de liberté locale. Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.

Pour reparler de Tourcoing, qui semble vous tenir à cœur (Sourires.), monsieur le rapporteur, sachez que ce cas n’a pas grand-chose à voir avec le dispositif proposé dans cet amendement qui concerne surtout les communes nouvelles dans leur ensemble. (Mme Françoise Gatel applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.

Mme Françoise Gatel. Je me retrouve à vous applaudir pour la deuxième fois, monsieur le ministre, et je vous remercie. Je pense que nos encouragements peuvent vous stimuler dans le bon sens. (Sourires.) Sachez que j’aime assez les symboles.

Monsieur Raynal, la seconde partie de mon amendement est empreinte d’une grande frugalité, puisque je propose de limiter cette bonification aux communes nouvelles de 30 000 habitants. Je vous invite donc à trouver un meilleur exemple…

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Tel qu’il est rédigé, votre amendement ne porte que partiellement sur une petite partie des communes nouvelles – celles de moins de 30 000 habitants.

La position que j’ai exprimée était déjà plus ouverte que celle de la commission, ce matin. Ne me le faites pas regretter.

M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour explication de vote.

M. Mathieu Darnaud. Je veux abonder dans le sens de Mme Gatel.

Cet amendement n’a pas qu’une portée symbolique. Comme nous l’avons encore souligné ce matin, en commission des lois, nous ne sommes pas plus attachés que cela à l’incitation financière, qui peut avoir parfois des effets pervers. La seule incitation financière est une mauvaise raison de créer une commune nouvelle.

En revanche, si incitation financière il doit y avoir, nous sommes absolument convaincus qu’elle doit bénéficier aux communes nouvelles de plus petite taille en termes démographiques. Je ne suis pas sûr qu’elle ait un sens profond pour une commune comprise, par exemple, entre 30 000 et 150 000 habitants.

En tout cas, nous ne souhaitons pas que cette incitation puisse devenir le fait générateur de communes nouvelles.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Il semblerait que nous soyons condamnés soit à nous répéter soit à nous contredire. Pour ma part, je ne me contredirai pas.

Si les communes ont des raisons de fusionner, si elles ont intérêt à créer une commune nouvelle, elles n’ont pas besoin d’une incitation financière, à moins que l’objectif recherché soit de réduire le nombre des communes en France.

Et ce d’autant plus qu’il suffit de regarder nos enveloppes pour comprendre que c’est un jeu à somme nulle : ce qui est donné à l’une est forcément pris sur les dotations des autres.

Je regrette ces incitations financières. Les communes qui avaient intérêt à se transformer en communes nouvelles auraient pu le faire spontanément, comme cela est arrivé. Jusqu’à quand les mesures transitoires vont-elles durer ?

D’un côté, vous défendez les communes ; de l’autre, vous défendez tout ce qui peut contribuer à leur suppression. Peut-être faudrait-il faire preuve d’un peu de cohérence.

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. Nous avons discuté ce matin, en commission des lois, des communes nouvelles.

Pour nous, elles ne sont que des communes, comme d’autres, et ne doivent pas déroger au régime général sur de nombreux points.

Un argument qui nous est souvent opposé – il le sera encore au cours de nos débats – consiste à dire que ce qui est donné à certains est pris sur les dotations des autres. En l’espèce, l’adoption de cet amendement se fera vraiment au détriment des autres communes.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Je suis favorable à cet amendement.

Il faut bien évidemment recueillir l’accord des populations et des conseils municipaux pour créer des communes nouvelles, mais il faut aussi inciter les toutes petites communes de nos départements ruraux à se regrouper.

Cet amendement, qui vise à maintenir une incitation financière, va dans le bon sens.

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour explication de vote.

Mme Agnès Canayer. Le débat que nous avons eu ce matin, en commission des lois, montre qu’il y a une véritable volonté de faciliter la création de communes nouvelles.

Or les élus, lors de cette création, ont une montagne de choses à mettre en place. Dans un premier temps, la création d’une commune nouvelle a un coût. Il n’est possible de mutualiser les moyens et de réaliser des économies d’échelle que dans un second temps.

A priori, ce sont les petites communes qui se regroupent. C’est la raison pour laquelle je soutiendrai l’amendement de Mme Gatel que je trouve extrêmement sensé.

Mme Françoise Gatel. Je vous remercie !

M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.

M. Jean-François Longeot. Je voterai l’amendement de Mme Gatel.

Il ne s’agit pas d’obliger les communes à se regrouper. Nous avons créé de grandes intercommunalités de 25 000 habitants, par exemple, qui comprennent des communes de 100 ou 150 habitants qui, malheureusement, ne s’y retrouvent pas toujours.

Les petites communes ne se regroupent donc pas uniquement en raison de cet effet d’aubaine, de cette sorte de prime au regroupement, mais simplement pour pouvoir peser sur les décisions des grandes communautés de communes dont elles font partie.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Sans rallonger le débat, je veux simplement relever, comme l’a fait Didier Marie, que l’on nous oppose souvent le fait que donner à certains revient à enlever à d’autres.

À cet égard, pour que votre information soit complète avant de procéder au vote, mes chers collègues, sachez que cette incitation financière a représenté 35 millions d’euros en 2017, soit près de la moitié de la hausse totale de la DSR.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Mais ce sera zéro l’année prochaine !

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. De fait, ce sera bien zéro l’année prochaine, monsieur le ministre, mais je voulais que tout le monde ait ce chiffre en tête.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-665 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-609, présenté par M. Saury, Mme A.M. Bertrand, MM. B. Fournier, de Nicolaÿ, Cambon et Cardoux, Mme Malet, MM. Brisson, Perrin, Raison et Paccaud, Mme Procaccia, M. Danesi, Mmes Berthet et Puissat, MM. Meurant, Segouin, Revet, Vogel et Lefèvre, Mme Sollogoub, M. H. Leroy, Mme Deromedi, M. Luche, Mme Gruny, MM. Savary, Genest, A. Marc et Mizzon, Mme Noël et MM. Bonne, Courtial, Maurey, Sido, Guerriau et Charon, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° L’article L. 2334-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque des communes intègrent un nouveau groupement de communes à la suite d’une dissolution ou par fusion d’établissements publics de coopération intercommunale, elles ne peuvent être pénalisées sur leur dotation globale de fonctionnement communale par le seul fait d’intégrer une intercommunalité plus favorisée. » ;

La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.

M. Jean-Noël Cardoux. Je présente cet amendement au nom de M. Saury, qui ne pouvait être présent aujourd’hui.

L’intercommunalité à marche forcée a donné lieu à des mariages non souhaités, puis à des enfants non désirés. Je pense en particulier à certaines petites communes, contraintes d’adhérer à des EPCI beaucoup plus importants et beaucoup plus riches que leurs EPCI d’origine, qui ont vu leur part de dotation globale de fonctionnement diminuer de manière drastique.

Je prendrai un seul exemple : Tigy, petite commune du Loiret – bien évidemment – connue pour sa foire aux asperges, a dû adhérer à un EPCI beaucoup plus riche. Avant cette adhésion, Tigy bénéficiait de 437 000 euros au titre de la DGF. Cette subvention a diminué à 319 000 euros en 2018, du fait de cette adhésion quelque peu forcée.

On a beaucoup interrogé, beaucoup gesticulé, avant de recevoir la réponse : c’est comme ça, nous a-t-on rétorqué, il s’agit de l’application pure et simple des textes.

Normalement, l’EPCI plus riche devait compenser ce manque à travers une dotation directe supplémentaire. Or, dans la pratique, les relations au sein des EPCI n’étant pas toujours au beau fixe, ce manque à gagner n’est pas compensé.

Nous parlons ici d’une commune qui fait aujourd’hui face à des difficultés financières insurmontables et qui se trouve au bord de la cessation de paiement.

Cet amendement vise à contrecarrer ce mécanisme un peu pervers de réduction sensible de la dotation des petites communes du fait de leur adhésion à un EPCI à richesse fiscale supérieure.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Cet amendement vise à mettre en place un mécanisme de garantie permettant aux communes intégrant un EPCI plus favorisé, à la suite d’une dissolution ou d’une fusion, de ne pas subir de diminution de DGF.

Sans surprise, la commission est défavorable à cet amendement, dont l’adoption aurait des effets contraires à la péréquation.

Il nous semble justifié que le montant de DGF perçu par une commune tienne compte de la réalité de sa situation.

Par ailleurs, ce n’est pas à la loi de couvrir d’éventuels désaccords locaux. Il suffit que l’on travaille convenablement au sein de l’EPCI concerné pour régler cette question, comme cela se fait dans beaucoup d’autres EPCI.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Le Gouvernement partage la philosophie de la commission.

Il est toujours délicat de créer par la loi des garanties de sortie pour des situations particulières. Je ne suis pour autant pas opposé, par principe, à ces garanties de sortie. Ainsi, à l’Assemblée nationale, j’ai renforcé la garantie de sortie de la DSR « cible » reposant sur une échelle dégressive. Il ne s’agit donc pas d’un obstacle intellectuel.

Plutôt que de déresponsabiliser les acteurs locaux, ou de vouloir corriger des situations locales qui sont inégales par définition – même si tout dépend des modes de gestion –, je reprendrai les travaux de votre questeur Rémy Pointereau, sur le devoir d’information en amont des élus en cas de modification du périmètre intercommunal.

Beaucoup de maires n’ont pas été correctement informés, non seulement, certes, par les services de l’État, mais aussi, et pardon de m’inspirer de ce qui se passe dans mon département – je parle sous le contrôle de Mme Duranton –, par les communautés d’agglomération qui disposaient pourtant de l’ingénierie financière suffisante pour informer, sinon éduquer, les EPCI de plus petite taille qu’ils accueillaient.

Reprendre les travaux de M. Pointereau nous aidera à améliorer les choses, notamment sur le devoir d’information en amont. Le conseil municipal qui décide de rejoindre un EPCI doit pouvoir disposer de toutes les données pour se prononcer. Cela me semble plus responsabilisant et moins déstabilisateur.

Pour ces raisons, monsieur Cardoux, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, que je vois comme un amendement d’appel pour améliorer la situation à l’avenir.

M. le président. Monsieur Cardoux, l’amendement n° II-609 est-il maintenu ?

M. Jean-Noël Cardoux. Il est toujours délicat de retirer l’amendement d’un collègue. Je l’ai fait une fois, voilà bien longtemps, et on me l’a reproché… (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Je maintiens donc cet amendement, mais je ne manquerai pas de transmettre vos arguments, monsieur le ministre, à l’auteur premier de cet amendement.

M. Loïc Hervé. Cet amendement est très bien, nous allons le voter !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-609.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-672 rectifié, présenté par MM. Roux, Requier et Gabouty, Mme M. Carrère, MM. Gold et Guérini, Mmes Guillotin, Jouve et Laborde et MM. Vall et Collin, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

1° Remplacer les mots :

de 0,5

par les mots :

d’un

2° Remplacer les mots :

au potentiel fiscal

par les mots :

à 1,5 fois le potentiel fiscal

La parole est à M. Jean-Yves Roux.

M. Jean-Yves Roux. Avec votre permission, monsieur le président, je défendrai également l’amendement n° II-667 rectifié.

M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° II-667 rectifié, présenté par MM. Roux, Requier et Gabouty, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mmes Guillotin, Jouve et Laborde et MM. Vall et Collin, et ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

de 0,5

par les mots :

d’un

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

M. Jean-Yves Roux. Ces deux amendements visent à revaloriser la population DGF dans certaines communes.

Lors de l’examen de ce projet de loi de finances à l’Assemblée nationale, nos collègues députés ont adopté, sur l’initiative de leur rapporteur général, un amendement tendant à mieux prendre en compte les charges importantes auxquelles font face certaines petites communes touristiques peu riches.

Pour ces dernières, de moins de 3 500 habitants, dont le potentiel fiscal par habitant est inférieur à celui des communes de la même strate et dont la part des résidences secondaires est supérieure à 30 %, la population DGF serait majorée de 1,5 habitant par résidence secondaire, au lieu de un actuellement.

Le montant estimé de cette mesure est contenu à environ 7 millions d’euros.

Toutefois, ce dispositif ne permet pas de répondre aux difficultés rencontrées par certaines communes, notamment certaines petites stations de montagne.

Ces dernières, qui comptent un grand nombre de résidences secondaires et qui connaissent donc de fortes variations saisonnières de population, doivent mettre en place des équipements et des infrastructures adaptés occasionnant un surcoût parfois très important.

Pour ces communes souvent isolées, le secteur touristique constitue une composante essentielle de l’activité économique. Le bulletin d’information statistique de la DGCL, la direction générale des collectivités locales, de janvier 2017 relevait d’ailleurs que les dépenses de fonctionnement étaient plus élevées dans les communes touristiques ou de montagne comptant un grand nombre de résidences secondaires et que, parmi ces dernières, les dépenses étaient plus élevées encore dans les petites communes, notamment dans les petites stations de sports d’hiver.

Ces deux amendements visent à tirer les conséquences de cette situation. Leurs auteurs prévoient de majorer la majoration de population DGF en la portant à deux habitants par résidence secondaire, ce qui correspond mieux aux réalités du terrain.

L’amendement n° II-672 rectifié tend à aller un peu plus loin et à rendre éligibles les communes dont le potentiel fiscal par habitant est inférieur à une fois et demie celui des communes de la même strate. Le nombre de communes concernées étant au demeurant limité, cette modification aurait des conséquences insignifiantes à l’échelle de l’enveloppe DGF.

L’adoption de ces assouplissements permettrait à certaines communes de mieux faire face aux importantes et particulières contraintes qui pèsent sur elle.