M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, sur l’article.
Mme Patricia Schillinger. Nous avions déposé un amendement sur cet article, mais il est tombé sous le couperet de l’article 40, ce qui ne me permettra pas de vous le présenter. Je souhaitais juste avoir, madame la ministre, votre avis sur un point, maintenant ou à un autre moment.
La loi prévoit trois situations ouvrant droit à un complément de mode de garde majoré : un parent doit être à temps partiel, avoir des horaires de garde spécifiques ou encore être porteur d’un handicap. Cette dernière possibilité est prévue depuis 2012. La majoration s’applique sur le montant maximal de la prise en charge de la rémunération du professionnel. Néanmoins, ce complément ne concerne que les bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, et non ceux d’une pension d’invalidité. Pourtant, la loi de 2005 établit un lien direct entre l’attribution d’une pension d’invalidité et la reconnaissance d’un handicap.
Pourquoi ne pouvons-nous pas considérer ces deux situations familiales sous le même prisme, pour plus d’équité et de transparence ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 45.
(L’article 45 est adopté.)
Article 46
I. – Le livre V du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le IV de l’article L. 531-5 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, pour les enfants ayant atteint l’âge limite mentionné au premier alinéa de l’article L. 531-1 entre le 1er janvier et le 31 août de l’année, la prestation demeure versée intégralement. » ;
2° Le septième alinéa de l’article L. 531-6, dans sa rédaction résultant de l’article 45 de la présente loi, est complété par les mots : « dans les conditions prévues au même IV » ;
3° Le même article L. 531-6 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa du présent article, le complément de libre choix du mode de garde de la prestation d’accueil du jeune enfant peut être versé directement à l’association ou à l’entreprise qui assure la garde de l’enfant, sur demande de la famille bénéficiaire et après accord de l’association ou de l’entreprise précitée, dans des conditions précisées par décret. » ;
4° Le premier alinéa de l’article L. 543-1 est ainsi modifié :
a) Les mots : « inscrit en exécution de l’obligation scolaire » sont remplacés par les mots : « qui, ayant atteint un âge déterminé, est inscrit » ;
b) Sont ajoutés les mots : « , jusqu’à la fin de l’obligation scolaire ».
II. – L’avant-dernier alinéa du b du 6° de l’article 11 de l’ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 précitée est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, pour les enfants ayant atteint l’âge limite mentionné au premier alinéa de l’article L. 531-1 entre le 1er janvier et le 31 août de l’année, la prestation demeure versée intégralement. »
III. – Au premier alinéa de l’article 8 de l’ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l’extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte, après la seconde occurrence du mot : « scolaire, », sont insérés les mots : « à compter de l’entrée dans l’enseignement élémentaire ».
IV. – Le 4° du I et le III du présent article s’appliquent à compter du 1er janvier 2019. Les 1° et 2° du I et le II s’appliquent aux gardes d’enfants réalisées à compter du 1er janvier 2020. Le 3° du I s’applique aux gardes d’enfants réalisées à compter du 1er janvier 2022.
M. le président. La parole est à M. Antoine Karam, sur l’article.
M. Antoine Karam. Monsieur le président, madame la ministre, l’article 46 prévoit d’accompagner l’abaissement à trois ans de l’âge de la scolarisation obligatoire d’une prolongation du droit au CMG à taux plein, le complément de libre choix du mode de garde, pour les familles dont l’enfant n’a pu être accueilli en école maternelle jusqu’à la rentrée scolaire suivant son troisième anniversaire.
Si ces mesures vont dans le bon sens, elles suscitent une inquiétude grandissante dans certains territoires, où, faute de places disponibles dans les écoles, la scolarisation avant six ans est encore loin d’être généralisée. Vous le savez, à l’échelon national, 98 % des enfants âgés de trois ans sont déjà scolarisés, contre moins de 70 % en Guyane et à Mayotte.
Il est vrai que le taux de scolarisation remonte ensuite fortement : il est d’environ 94 % pour les enfants âgés de quatre à cinq ans, ce qui peut se comprendre. Mais compte tenu des difficultés rencontrées dans ces académies à chaque rentrée scolaire, l’abaissement à trois ans pose mécaniquement un défi immense, tant en termes d’infrastructures que de ressources humaines. Rappelons que Mayotte est le seul territoire de la République où la double vacation existe.
Dans ce contexte, j’ai d’abord pensé à amender cet article, afin de prévoir le cas où, malgré l’abaissement à trois ans de l’âge de la scolarisation obligatoire, nous ne serions pas encore en mesure de scolariser des enfants de quatre ans et plus, puis j’y ai renoncé.
Je me suis ensuite rappelé, avec regret, que ce même CMG n’était pas encore applicable à Mayotte, en dépit du plan « Mayotte 2025 », qui prévoit justement de favoriser la garde d’enfants.
Enfin, il eut été finalement trop défaitiste de proposer un tel amendement, car je veux croire que nous serons en mesure d’accueillir tous ces enfants dans nos écoles à la prochaine rentrée. J’ai récemment interpellé à ce sujet le ministre Jean-Michel Blanquer, qui m’a assuré de son volontarisme.
En simplifiant l’accès des familles au mode d’accueil individuel et en étendant le CMG à taux plein, nous réduisons, nous le savons, l’éloignement total ou partiel des femmes du marché du travail.
Aussi, madame la ministre, j’attire votre attention sur cette situation. Il ne faudrait pas que les familles soient doublement pénalisées : que leurs enfants ne soient pas scolarisés et qu’elles ne puissent bénéficier du CMG à taux plein.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 2 rectifié bis, présenté par Mmes Malet, Dindar, Micouleau, Lassarade, L. Darcos, Renaud-Garabedian et Garriaud-Maylam, MM. Charon et Mouiller, Mmes de Cidrac, Gruny, Procaccia et Raimond-Pavero, M. Sol, Mmes Lanfranchi Dorgal et Guidez, MM. Lefèvre, D. Laurent, Joyandet, Gilles, Rapin et L. Hervé, Mme Bories, MM. Mandelli et Magras, Mmes N. Delattre, Boulay-Espéronnier, Berthet et de la Provôté et MM. Moga, Segouin, Sido et Gremillet, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 6 à 8 et 10
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
IV. – Les 1° et 2° du I et le II s’appliquent aux gardes d’enfants réalisées à compter du 1er janvier 2020 et celles issues du 3° du I s’appliquent aux gardes d’enfants réalisées à compter du 1er janvier 2022.
La parole est à Mme Viviane Malet.
Mme Viviane Malet. Cet amendement vise à conserver la logique actuelle du versement de l’allocation de rentrée scolaire, l’ARS, dès le début de la scolarité obligatoire, sous condition de ressources, afin que les familles continuent à être aidées lors de la rentrée scolaire.
La scolarisation des enfants entraîne des frais que certaines familles peuvent avoir des difficultés à prendre en charge, et ce dès l’école maternelle. Je pense notamment aux frais d’assurance, de cantine, de déplacement, de garderie et aux frais vestimentaires. Il est donc cohérent de maintenir la concordance entre le versement de cette allocation et le début de la scolarité.
Tel est l’objet du présent amendement.
M. le président. L’amendement n° 419 rectifié, présenté par Mme Féret, MM. Lurel et Tourenne, Mme Rossignol, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier, Van Heghe et Blondin, M. Fichet, Mme Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, J. Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Corinne Féret.
Mme Corinne Féret. Mon amendement étant presque similaire, je partage les arguments qui viennent d’être avancés.
Pour autant, j’ajouterai quelques mots. Bien évidemment, vous l’avez compris, nous sommes opposés à la décorrélation entre le versement de l’allocation de rentrée scolaire et l’âge de la scolarité obligatoire.
L’allocation de rentrée scolaire n’étant pas aujourd’hui versée aux parents d’enfants scolarisés dès l’âge de trois ans dans 97 % des cas, on aurait pu s’attendre à ce que l’abaissement de l’âge de la scolarité obligatoire s’accompagnerait de celui de l’âge de versement. Or l’article 46 vise à déconnecter l’ARS de l’âge de la scolarité obligatoire, aujourd’hui fixé à six ans, contre trois ans dès la rentrée 2019.
Cette mesure purement comptable est en totale contradiction avec le plan de lutte contre la pauvreté. Nous le déplorons. Le versement de l’ARS et l’âge de la scolarité obligatoire doivent donc être couplés sur la même base.
Néanmoins, parce que nous sommes réalistes, nous prenons en considération le fait que les dépenses liées à l’entrée en maternelle sont inférieures à celles qui résultent de l’entrée en primaire. Par conséquent, le décret fixant le montant de l’ARS doit considérer une nouvelle tranche d’âge de trois à six ans, pour laquelle le montant de ladite allocation sera inférieur à celui qui est prévu pour les enfants de plus de six ans.
Nous pensons que l’équité est à la base de la pyramide de l’égalité. C’est la raison pour laquelle nous vous soumettons cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille. Je trouve que les amendements de nos collègues sont tout à fait justifiés. Cependant, je souhaite revenir sur quelques points.
En réalité, vous le savez – cela a d’ailleurs été dit par Antoine Karam et par vous, madame Féret –, 97 % des enfants de trois ans et 100 % des enfants de quatre et cinq ans sont scolarisés. Les parents de ces enfants ne perçoivent pas, aujourd’hui, l’allocation de rentrée scolaire.
Si la demande qui est formulée peut paraître justifiée, la commission a néanmoins émis un avis défavorable sur ces amendements, et ce pour trois raisons.
La première, c’est que les frais de scolarité pour des enfants entrant à la maternelle, on peut l’admettre, sont beaucoup moins importants que pour les enfants faisant leur entrée à l’école primaire.
La deuxième, c’est que si l’on accorde l’ARS au titre des enfants de trois ans à six ans, sans recettes supplémentaires, on va finalement diminuer l’ensemble des allocations attribuées à tous les enfants, quel que soit leur âge.
La troisième et dernière raison, c’est que la commission ayant voté pour une revalorisation des prestations familiales à l’article 44, les dispositions cet amendement ne correspondent pas à l’ambition et à l’objectif de la commission.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 46.
(L’article 46 est adopté.)
Article 47
I. – Le livre VI du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 623-1 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi rédigé :
« I. – Les assurées auxquelles s’appliquent les dispositions du présent titre bénéficient à l’occasion de leur maternité, à condition de cesser leur activité pendant la durée minimale prévue à l’article L. 331-3 :
« 1° D’une allocation forfaitaire de repos maternel ;
« 2° D’indemnités journalières forfaitaires.
« Les femmes dont il est reconnu que la grossesse pathologique est liée à l’exposition in utero au diéthylstilbestrol bénéficient d’indemnités journalières forfaitaires à compter du premier jour de leur arrêt de travail dans les conditions prévues à l’article 32 de la loi n° 2004-1370 du 20 décembre 2004 de financement de la sécurité sociale pour 2005. » ;
b) Au II, la référence : « deuxième alinéa » est remplacée par la référence : « 2° » ;
b bis) Au 2° du III, la première occurrence de la référence : « deuxième alinéa » est remplacée par la référence : « 2° » et, à la fin, la référence : « deuxième alinéa du I » est remplacée par la référence : « 2° du I du présent article » ;
c) Au 1° du III, la référence : « premier alinéa » est remplacée par la référence : « 1° » ;
d) Au premier alinéa du IV, la référence : « premier alinéa » est remplacée par la référence : « 1° du I » et la référence : « deuxième alinéa » est remplacée par la référence : « 2° du même I » ;
2° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 623-4, la référence : « deuxième alinéa » est remplacée par la référence : « 2° » et la référence : « premier alinéa » est remplacée par la référence : « 1° » ;
3° À la fin du premier alinéa de l’article L. 663-1, les mots : « proportionnelles à la durée et au coût de ce remplacement » sont supprimés.
II. – Le livre VII du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° À la première phrase du second alinéa du 1° de l’article L. 722-10, les mots : « des prestations en nature de l’assurance maladie et maternité » sont remplacés par les mots : « de la prise en charge des frais de santé en cas de maladie ou de maternité » ;
2° L’article L. 732-10 est ainsi rédigé :
« Art. L. 732-10. – Les assurées mentionnées aux 1° et 2°, au a du 4° et au 5° de l’article L. 722-10 qui cessent leur activité en raison de leur maternité pendant la durée minimale prévue à l’article L. 331-3 du code de la sécurité sociale bénéficient, sur leur demande et sous réserve de se faire remplacer par du personnel salarié, d’une allocation de remplacement pour couvrir les frais exposés par leur remplacement dans les travaux de l’exploitation agricole.
« Lorsque le remplacement prévu au premier alinéa du présent article ne peut pas être effectué, les assurées mentionnées au 1° de l’article L. 722-10 du présent code qui cessent leur activité pendant la durée minimale prévue à l’article L. 331-3 du code de la sécurité sociale bénéficient, dans des conditions déterminées par décret, d’indemnités journalières forfaitaires.
« L’allocation de remplacement ou les indemnités journalières sont accordées à compter du premier jour de leur arrêt de travail, dans des conditions fixées par décret, aux assurées mentionnées aux premier et deuxième alinéas du présent article dont il est reconnu que la grossesse pathologique est liée à l’exposition in utero au diéthylstilbestrol. » ;
3° L’article L. 732-10-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, au début, les mots : « Lorsqu’elles » sont remplacés par les mots : « Lorsque les assurés », les mots : « personnes mentionnées » sont remplacés par les mots : « assurés mentionnés » et, à la fin, sont ajoutés les mots : « ou des indemnités journalières prévues au deuxième alinéa de l’article L. 732-10, attribuées sans condition de durée minimale d’interruption d’activité. » ;
b) Au second alinéa, après le mot : « allocation », sont insérés les mots : « de remplacement ou des indemnités journalières » ;
4° L’article L. 732-12-2 est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase du premier alinéa, le mot : « prévue » est remplacé par les mots : « de remplacement ou des indemnités journalières dans les conditions prévues » ;
b) Au dernier alinéa, après le mot : « allocation », sont insérés les mots : « de remplacement ou des indemnités journalières ».
III. – Le I du présent article s’applique aux allocations mentionnées à l’article L. 623-1 du code de la sécurité sociale dont le premier versement intervient à compter du 1er janvier 2019.
Le II du présent article s’applique aux allocations ou indemnités relatives à des arrêts de travail pour maternité débutant après le 31 décembre 2018.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. L’article 47 prévoit d’harmoniser les modalités d’indemnisation du congé maternité, en particulier pour les travailleuses indépendantes et les exploitantes agricoles, avec celles du régime plus avantageux des salariées.
Le projet de loi prévoit d’aligner la durée minimale d’arrêt pour les travailleuses indépendantes sur celle des salariées, soit huit semaines, dont deux de congé prénatal. En outre, la durée de versement maximale des indemnités journalières sera portée par décret à 112 jours, comme pour les salariées.
Cet article va globalement dans le bon sens et tente de répondre à un problème que nous avions déjà soulevé, notamment dans un rapport de la délégation aux droits des femmes consacré aux agricultrices.
Si cet article n’a donné lieu à aucun débat, à aucune remarque à l’Assemblée nationale, il a en revanche suscité quelques doutes de la commission des affaires sociales, via notre rapporteur Catherine Deroche, et de la délégation aux droits des femmes, qui se sont interrogées sur la pertinence de ce dispositif au regard de la réalité des contraintes concrètes et quotidiennes de ces femmes.
La question qui nous est posée est la suivante : comment assurer à ces femmes une plus grande protection, tant pour leur santé et celle de leur bébé que pour la pérennité de leur activité ? En résumé, doit-on ou non les contraindre à cesser leur activité durant une période minimale pour bénéficier d’indemnités journalières ? Nous sommes face à un certain dilemme.
La décision que nous allons prendre est évidemment importante, car il ne faudrait pas que la mesure proposée induise des effets pervers et conduise ces femmes à renoncer à des indemnités. À l’inverse, il ne faudrait pas que la souplesse introduite par le Sénat soit perçue comme un renoncement à accorder à ces femmes un droit supplémentaire.
Si l’amendement de notre collègue Catherine Deroche devait être adopté, nos deux collègues Alain Milon et Annick Billon devront prendre attache avec leurs homologues à l’Assemblée nationale, afin que cette modification soit bien interprétée.
À ce stade, j’en profite pour redire que nous regrettons et que nous ne comprenons pas le refus du Gouvernement de s’engager en faveur de la directive européenne sur le congé maternité.
Pour rappel, le texte prévoit d’allonger de quatorze à vingt semaines la durée minimale du congé maternité dans l’Union européenne. Les dispositions prévues par cette directive permettent des avancées concrètes en faveur de l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Cette directive est déterminante pour garantir l’autonomie économique des femmes, leur égal accès au marché du travail et un autre partage des tâches, sachant que la maternité et la parentalité sont parmi les premiers facteurs discriminants dont souffrent les femmes.
En conclusion, le Gouvernement est favorable à plus d’égalité entre les femmes, mais on a l’impression qu’il va nous falloir attendre encore un petit moment l’égalité entre les femmes et les hommes !
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, sur l’article.
Mme Patricia Schillinger. Cet article prévoit de porter à huit semaines la durée minimale d’arrêt pour les travailleuses indépendantes et les exploitantes agricoles, dont deux semaines de congé prénatal, à l’instar de la durée appliquée aux salariées, pour bénéficier d’une indemnisation de leur congé maternité.
Améliorant l’attractivité du dispositif, cet article prévoit également de supprimer le versement de la CSG et de la CRDS par les exploitantes agricoles bénéficiant de l’allocation de remplacement.
L’article prévoit ensuite l’instauration d’une indemnité journalière forfaitaire en cas de maternité ou d’adoption. Cette indemnité strictement subsidiaire, accordée uniquement dans les cas où l’allocation de remplacement ne peut être versée, constituera un revenu de remplacement au même titre que pour les salariées et les travailleuses indépendantes non agricoles.
L’objectif de ces dispositions est de permettre à l’ensemble des femmes, en France, de bénéficier d’un congé maternité complet et effectif. En ce sens, cet article répond à l’engagement du Président de la République de réformer le congé maternité.
Il importe de rendre ce droit effectif sachant que, dans les faits, seuls 58 % des agricultrices non salariées sont en mesure d’être remplacées. Ces femmes font face à des freins financiers – les contributions sociales : la CSG et la CRDS –, mais aussi culturels, car elles sont encouragées à continuer de travailler coûte que coûte.
Cet article prévoit donc une évolution du cadre et des mesures incitatives. Il met ainsi en œuvre une harmonisation de droit nécessaire, et « par le haut », entre travailleuses de professions et de statuts différents, certes, mais bel et bien toutes confrontées à la nécessité de concilier contraintes professionnelles et impératifs familiaux.
M. le président. L’amendement n° 95, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 2 à 12
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéas 17 et 18
Remplacer les mots :
pendant la durée minimale prévue à l’article L. 331-3 du code de la sécurité sociale
par les mots :
pendant une durée minimale fixée par décret
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Cet amendement vise à mieux protéger les travailleuses indépendantes pendant leur congé maternité, en revenant sur la mesure proposée par le Gouvernement, qui conditionne le bénéfice des prestations de maternité pour ces travailleuses à une durée minimale d’interruption d’activité de huit semaines. Cette formulation peut apparaître paradoxale.
Le dispositif que vous défendez, madame la ministre, est présenté comme étant plus protecteur de ces travailleuses, en ce qu’il aligne la durée minimale de leur congé maternité sur celle du congé des salariés. Il répond donc en théorie à un objectif de santé publique et d’harmonisation des droits que je ne puis que saluer.
Je crains toutefois que, en pratique, il ne conduise certaines de ces travailleuses à se trouver contraintes de renoncer à toute forme d’indemnisation. Les conditions d’activité des travailleuses non salariées ne sont pas comparables, en effet, à celles des salariées. Certaines doivent assurer une activité dans les semaines qui précèdent leur accouchement pour garantir la viabilité de leur entreprise. Leur situation n’est donc pas comparable à celle des salariées, qui retrouvent leur poste à l’issue de leur congé.
Je pense donc que la mesure proposée pourrait se révéler désincitative. Elle pourrait conduire certaines femmes à privilégier la poursuite de leur activité plutôt que le bénéfice des prestations de maternité afin de sauvegarder leur outil de travail pour l’avenir. Il pourrait au total en résulter une dégradation de l’indemnisation du congé de maternité pour ces travailleuses, à rebours de l’objectif affiché.
En l’état actuel du droit, elles bénéficient d’une allocation de repos maternel d’un montant de 3 300 euros, sans condition d’interruption d’activité, et d’indemnités journalières de 54 euros par jour, à condition de s’arrêter au moins 44 jours. Désormais, celles qui s’arrêteront moins de 56 jours n’auront plus droit à rien. Je considère que c’est un recul de leurs droits.
En d’autres termes, si l’alignement de la durée maximale de versement des prestations apparaît tout à fait souhaitable et plus protecteur, il n’en va pas de même s’agissant de la durée minimale d’interruption d’activité conditionnant le versement des prestations.
Au regard de ces observations, et pour rester dans le cadre fixé par l’article 40 de la Constitution, l’amendement de la commission vise à régler les situations des travailleuses indépendantes et des exploitantes agricoles de manière différenciée.
Pour les travailleuses indépendantes, il est proposé de revenir au droit existant, plus protecteur en ce qu’il ne conditionne pas le versement des prestations à une durée minimale d’interruption d’activité.
Pour les exploitantes agricoles, pour lesquelles le présent article comprend par ailleurs des avancées, nous proposons de renvoyer la définition de la durée minimale de cessation d’activité à la voie réglementaire. Afin de ne pas pénaliser les femmes qui pourraient se trouver contraintes de reprendre leur activité rapidement pour garantir la pérennité de leur entreprise, j’estime que cette durée minimale devrait être plus proche de trois à quatre semaines.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Vous proposez de réduire la durée minimale d’activité. Cela nous semble en contradiction avec l’objectif de préservation de la santé de la mère et de l’enfant visé par cet article 47.
En effet, le Gouvernement a souhaité, afin de préserver la santé des mères et des enfants, les inciter à prendre un véritable congé maternité et à renforcer leurs droits, selon les préconisations du rapport de Mme Marie-Pierre Rixain sur le congé de maternité, lequel a fait l’objet d’une large concertation.
Les préconisations étaient, d’une part, d’aligner la durée globale du congé maternité sur celle dont bénéficient les salariées de 74 à 112 jours, et, d’autre part, d’augmenter la durée minimale d’interruption obligatoire de l’activité de 44 à 56 jours, soit 12 jours de plus, pour des motifs de protection de la santé de la mère et de l’enfant. Il faut savoir que, en moyenne aujourd’hui, les travailleuses indépendantes ont une durée d’interruption de 70 jours, soit une durée bien supérieure dans les faits.
Cependant, le Gouvernement a évidemment été attentif à la spécificité du travail indépendant. Un amendement a été adopté lors des débats à l’Assemblée nationale, sur l’initiative de Mme Rixain, visant à permettre de concilier congé maternité et reprise d’activité. Après l’arrêt obligatoire de huit semaines, les travailleuses indépendantes ont la possibilité de reprendre leur activité à temps partiel.
Votre proposition, au contraire, conduirait les travailleuses indépendantes à renoncer à tout ou partie de leur congé, au détriment parfois de leur santé et de celle des enfants, plutôt qu’à essayer de l’aménager.
C’est la raison pour laquelle je sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, j’y serais défavorable.