Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur le rapporteur général, la mesure proposée visait à aménager la hausse de 1,7 point de la CSG pour les ménages dont le revenu fiscal de référence se situait juste au seuil et de façon intermittente. Elle visait à stabiliser les personnes assujetties lorsqu’elles dépassaient ce seuil deux années d’affilée. Le Gouvernement et le Premier ministre s’étaient engagés à permettre à ces 300 000 foyers d’attendre deux années successives de dépassement du seuil pour être assujettis au taux majoré.
Ce que vous proposez, monsieur le rapporteur général, n’est pas lié à la mesure précédente du Gouvernement puisque les personnes assujetties au premier seuil au taux réduit de 3,8 % n’ont pas du tout été impactées par la hausse de la CSG. Le Gouvernement ne s’est pas engagé à revenir sur une situation qui préexiste depuis des années.
Votre proposition va bien au-delà d’une mesure de correction qui serait issue de la loi de financement de la sécurité sociale votée en 2018. Elle concernerait énormément de foyers qui n’ont nullement été touchés ni impactés par les hausses récentes de la CSG. Même si ce n’est pas un argument formel, je veux souligner que ce franchissement du seuil de 0 à 3,8 % est moins important que celui du taux de 3,8 % au taux majoré.
Il nous semble que la mesure proposée déstabilise de nouveau un système stabilisé depuis des années. Nous souhaitons en rester à la proposition du Gouvernement, qui touche 300 000 foyers assujettis entre le taux de 3,8 % et le taux majoré.
Aussi, l’avis du Gouvernement est défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Les titulaires de pensions de retraite les plus modestes peuvent se voir appliquer un taux de CSG de 3,8 %. Entre 3,8 % et 8,3 %, le saut est important. Le Gouvernement propose d’assouplir cet effet de seuil : il faudrait, pendant deux années de suite, avoir franchi le seuil de revenus auxquels s’applique le taux de 3,8 % pour que les pensions soient assujetties au taux supérieur, qui est de 8,3 %. Nous soutiendrons cette mesure, qui va dans le bon sens.
Dans cet esprit, je veux saluer l’amendement de la commission, qui a entrepris un travail de lissage entre un autre seuil, c’est-à-dire le taux nul de la CSG et le taux de 3,8 %, qui touche des personnes encore plus modestes.
Je suis donc favorable à cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 441 rectifié bis, présenté par Mme Espagnac, MM. Lurel et Tissot, Mme Taillé-Polian, MM. Antiste et J. Bigot, Mmes Conconne et Jasmin, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret et Grelet-Certenais, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes S. Robert et M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, MM. Duran, Féraud et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 5
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… Après le III de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Par dérogation aux I et au II, sont assujettis à la contribution sociale au taux de 6,6 % les revenus visés au 2° du III de l’article L. 136-2, perçus par les personnes dont les revenus de l’avant-dernière année, définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts :
« 1° D’une part, excèdent 14 375 € pour la première part de quotient familial, majorée de 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 15 726 € pour la première part, majorés de 4 221 € pour la première demi-part et 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 16 474 €, 4 414 € et 3 838 € ;
« 2° D’autre part, sont inférieurs à 33 000 € pour la première part de quotient familial, majorée de 8 810 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 36 101 € pour la première part, majorés de 9 6891 € pour la première demi-part et 8 810 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 37 819 €, 10 133 € et 8 810 €.
« Les seuils mentionnés au présent III bis sont revalorisés au 1er janvier de chaque année, conformément à l’évolution en moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, constatée pour l’avant-dernière année, et arrondis à l’euro le plus proche, la fraction d’euro égale à 0,50 étant comptée pour 1. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Frédérique Espagnac.
Mme Frédérique Espagnac. Avec cet article 11, le Gouvernement propose de corriger les effets néfastes à la marge, pour certains Français modestes, de la hausse de la CSG de 1,7 point votée l’année dernière. Nous avions déjà dénoncé ces effets pervers qui ont eu des conséquences diverses sur le pouvoir d’achat des Français.
Je pense d’abord aux fonctionnaires : le Gouvernement avait prévu une compensation à hauteur de 3 milliards d’euros, c’est-à-dire en dessous de la hausse de la CSG, ce qui s’est traduit par une perte de pouvoir d’achat.
Je pense ensuite aux retraités : la hausse concernait celles et ceux qui sont actuellement assujettis au taux de 6,3 %. Ainsi, pour une personne seule, cette hausse s’applique dès que le revenu fiscal de référence dépasse 14 375 euros – soit 1 289 euros par mois si la personne a moins de 65 ans et 1 394 euros par mois si elle a plus de 65 ans.
Le groupe socialiste et républicain a estimé qu’appliquer une telle hausse sans compensation aux retraités n’était pas acceptable en termes de pouvoir d’achat.
Or le correctif proposé actuellement par le Gouvernement est insuffisant puisqu’il ne couvre que les hausses de CSG exceptionnelles, celles qui sont dues à des variations extraordinaires de revenu des foyers modestes – par exemple, la plus-value lors de la vente d’un bien. Ce rectificatif ne corrige donc pas – ou très à la marge – la perte de pouvoir d’achat pour les Français modestes.
Telles sont les raisons pour lesquelles, afin d’obtenir un équilibre entre le maintien du pouvoir d’achat des retraités français et l’exigence de sérieux dans la gestion des finances publiques, nous proposons d’introduire plus de progressivité dans le taux de la CSG. Nous proposons que la hausse de CSG pour les retraités ne s’applique pas pour les montants de retraite inférieurs au coût moyen d’une maison de retraite médicalisée.
Nous proposons également que cette progressivité prenne en compte des seuils de revenus adaptés à la situation socioéconomique spécifique de la métropole, en premier lieu, de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Réunion, en deuxième lieu, de la Guyane et de Mayotte, en troisième lieu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission est défavorable à cet amendement dont le coût est sans doute élevé. Il accentuerait le caractère progressif de la CSG sur les seuls retraités. De plus, la commission, comme on l’a dit précédemment, a déposé un amendement à l’article 44 qui contient des propositions pour améliorer le pouvoir d’achat des retraités. Je vous demande plutôt de soutenir les propositions que fera alors la commission.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 441 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 11, modifié.
(L’article 11 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 11
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 101 rectifié quinquies, présenté par Mmes Morin-Desailly et Laborde, MM. Leleux, Marseille et Dallier, Mmes Perrot et Berthet, MM. Moga et de Nicolaÿ, Mmes Duranton, Jouve, Guidez et Billon, M. Brisson, Mme de la Provôté, MM. Le Nay, Grand et B. Fournier, Mme L. Darcos, MM. Guerriau, Guérini, Schmitz, Savin, Raison, Perrin, D. Laurent, Houpert, Morisset, Laugier et Prince, Mmes Bruguière et M. Mercier, MM. Henno et Kern, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Détraigne, Bonhomme, Janssens et Piednoir, Mme N. Delattre, MM. Babary, Gremillet et Fouché et Mmes Dumas et Létard, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les personnes mentionnées au premier alinéa de l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale bénéficient d’une réduction du taux de la cotisation mentionnée à l’article L. 241-3 du même code.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Mes chers collègues, l’amendement que je vous soumets, ou plutôt que nous vous soumettons – ses cosignataires sont en effet très nombreux – reprend un amendement adopté par le Sénat l’année dernière dans un très large consensus. Je vous ferais d’ailleurs remarquer qu’il est cosigné par Mme Françoise Laborde, rapporteur pour avis de la commission de la culture pour le programme « Livre et industries culturelles » du projet de loi de finances, ainsi que par M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur pour avis pour l’audiovisuel. Mme Sylvie Robert défendra quant à elle un amendement similaire juste après celui-ci.
Notre amendement a pour objet de prévoir le principe d’une compensation de la hausse de la CSG pour les artistes auteurs.
Il faut rappeler que, comme les auteurs ne cotisent pas au titre de l’assurance chômage, ils n’ont pas bénéficié des mesures de compensation de la hausse de la CSG. Ils ont donc subi une perte nette de revenus, à la différence du reste de la population. Lors des débats sur ce sujet, l’année dernière, à l’Assemblée nationale, le Gouvernement avait reconnu cet oubli et s’était engagé à prévoir un système permettant une compensation pérenne. Pour 2018, un décret a été pris le 15 mai dernier instituant une mesure de soutien au pouvoir d’achat des artistes auteurs ; 18 millions d’euros ont été prévus à cet effet sur les crédits du ministère de la culture.
Or que se passe-t-il, un an après l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 et six mois après la parution de ce décret ? Aucune compensation n’a encore été versée et aucune solution pérenne n’a été proposée pour les années suivantes.
Le ministère de la culture et le ministère des affaires sociales ont reçu, le 21 juin dernier, l’ensemble des organisations d’artistes auteurs pour un échange autour de cette problématique, mais aucune décision n’a apparemment été prise à ce stade.
Nous sommes nombreux à vous alerter, madame la ministre. Il faut que le Gouvernement élabore enfin une solution pérenne et définitive afin de compenser cette hausse de la CSG pour l’année 2018 comme pour les années suivantes. Vous conviendrez que la situation est tout à fait anormale ! (Mmes Michèle Vullien et Françoise Gatel applaudissent.)
Mme la présidente. L’amendement n° 427 rectifié bis, présenté par Mme S. Robert, MM. Kanner, Antiste, J. Bigot et Assouline, Mmes Blondin, Ghali et Lepage, MM. Lozach, Magner et Manable, Mme Monier, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Guillemot, MM. Kerrouche, Tissot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Pour l’année 2019, les personnes mentionnées au premier alinéa de l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale bénéficient d’une réduction de 0,95 point du taux de la cotisation mentionnée à l’article L. 241-3 du même code.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Certains débats, malheureusement, reviennent régulièrement. Comme l’a dit notre collègue Catherine Morin-Desailly, le débat auquel cet amendement est lié en fait partie : nous avions en effet déposé, l’année dernière, un amendement stricto sensu presque identique afin d’alerter le Gouvernement sur la situation des artistes auteurs, qui ont vu leur pouvoir d’achat diminuer à la suite de la hausse de la CSG.
Comme l’a rappelé Mme Morin-Desailly, les artistes auteurs n’ont pas bénéficié de mesures de compensation, puisqu’ils ne cotisent pas à l’assurance chômage. Le Gouvernement avait reconnu un oubli et promis d’agir. Cela a été fait – la manière employée est étonnante, mais pourquoi pas ! – lors des États généraux du livre, en mai dernier : le Gouvernement a alors institué une mesure de soutien au pouvoir d’achat des artistes auteurs.
Toutefois, ce dispositif n’est absolument pas satisfaisant, et ce pour trois raisons. D’abord, il ne s’agit pas d’un mécanisme pérenne, compensant sur le long terme l’augmentation de la CSG. De surcroît – il est important de le souligner –, il ne concerne que les auteurs affiliés, et non l’ensemble des auteurs assujettis. Enfin, l’assiette prise en compte pour le calcul de l’aide financière est vraiment incomplète.
Il est vrai que nous avons été alertés. Nous avons auditionné aujourd’hui M. le ministre de la culture et nous lui avons redit qu’il est absolument impossible qu’une catégorie de notre population – les artistes auteurs – ne puisse pas bénéficier, comme l’ensemble des actifs de notre pays, de la compensation de la hausse de la CSG.
Je pense, madame la ministre, qu’il est vraiment temps d’agir et, surtout, de mettre en place un mécanisme de compensation viable. En effet, aujourd’hui, la situation des artistes auteurs se précarise. On sait que, dans le secteur culturel et, singulièrement, dans celui de la création artistique, de telles mesures vont vraiment dans le mauvais sens en fragilisant la situation de ces personnes.
Il faut savoir – Mme Morin-Desailly l’a dit avant moi – qu’à ce jour aucune compensation n’a encore été versée aux artistes auteurs. Ils attendent toujours, alors que ces 18 millions d’euros sont au budget de l’État, sans qu’on sache s’ils ont été réellement affectés.
Comme l’année dernière, nous tirons la sonnette d’alarme. Il est vraiment important que le Sénat puisse à nouveau se rassembler sur ce sujet ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste. – Mme Françoise Laborde applaudit également.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous avons parfaitement entendu les arguments avancés par les auteurs de ces amendements. Elles ont rappelé que, l’année dernière déjà, nous avions posé au Gouvernement la même question, et que nous attendions de sa part une réponse opérationnelle.
C’est pourquoi, avant de nous prononcer, nous souhaitons entendre Mme la ministre nous expliquer ce qu’elle propose pour répondre à ces interrogations. Cela dit, ces amendements n’ont pas de caractère opérationnel ; tel est, aux yeux de la commission, leur défaut.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Madame Morin-Desailly, madame Robert, je comprends que ce sont probablement des amendements d’appel, parce que je puis vous apporter la réponse que vous attendez concernant la situation des artistes auteurs face à l’augmentation de la CSG.
Pour l’année 2018, à titre transitoire, le Gouvernement a souhaité garantir une égalité de situation entre les artistes auteurs et les salariés en prévoyant une modalité de compensation adaptée à la situation spécifique de ces personnes.
Une aide de l’État a été créée, égale à 0,95 % du revenu artistique. Elle sera versée avant la fin de l’année 2018. Ce montant est à la hauteur de la perte de pouvoir d’achat issue de la hausse de la CSG.
En 2019, le même dispositif sera reproduit, élargi à l’ensemble des artistes auteurs qui se feront connaître auprès des organismes agréés. Il n’est en effet pas possible de mettre en œuvre un dispositif pérenne dès 2019, comme vous le souhaitez, en raison du transfert de recouvrement des cotisations URSSAF, qui se fera en deux temps en 2019 et en 2020.
En revanche, à partir de 2020, le Gouvernement a retenu une solution pérenne, à savoir la prise en charge d’une partie des cotisations vieillesse, afin de compenser la perte de pouvoir d’achat de manière individualisée et contemporaine à l’acquittement des prélèvements sociaux. La prise en charge budgétaire de cette compensation reviendrait à l’État, pour un montant annuel estimé à 18 millions d’euros.
Le décret mettant en œuvre ce projet est issu d’une mission conjointe de l’IGAS, l’inspection générale des affaires sociales, et du ministère de la culture. Il a fait l’objet d’une concertation extrêmement large entre les artistes auteurs, le ministère des affaires sociales et le ministère de la culture. Il prévoit le principe et la modalité de la prise en charge des cotisations retraite, tels que je viens de vous les exposer. Il est rédigé ; il sera publié avant la fin de l’année.
L’objet de vos deux amendements, mesdames les sénatrices, est donc satisfait. Je vous invite donc à les retirer.
Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’aimerais désormais entendre la réaction des auteurs de ces amendements aux propos de Mme la ministre. Nous partageons le constat et l’analyse qu’elles ont faits. La réponse de Mme la ministre, que nous attendions, me paraît intéressante, mais je souhaite entendre l’avis des spécialistes que sont en la matière Mme Robert et Mme Morin-Desailly.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.
Mme Laure Darcos. J’entends bien vos explications, madame la ministre, mais j’ai un petit doute. Vous avez reconnu que les artistes auteurs attendaient toujours leur compensation pour 2018 ; plusieurs d’entre eux nous l’ont également confirmé. Elle n’arrivera qu’à la fin de l’année, alors qu’il reste un mois avant les fêtes.
Vous avez déclaré qu’on ne peut pas établir un dispositif pérenne dès l’année prochaine, en raison d’un problème de mise en route d’un mécanisme. J’imagine donc qu’un versement de compensation identique à celui de cette année interviendra l’an prochain, en attendant la pérennisation. (Mme la ministre opine.) Je vous remercie, madame la ministre.
Je voterai néanmoins en faveur de ces amendements, sauf si nos collègues décidaient de les retirer. Il est important de marquer le coup, car ces professions sont très originales et à l’écart des autres actifs. Le prélèvement à la source suscite chez eux une angoisse épouvantable, parce qu’ils peuvent recevoir un cachet à n’importe quel moment de l’année et qu’ils ne peuvent absolument pas prévoir, contrairement à tous les salariés et même à certains artisans, ce qui se passera au cours de l’année. J’imagine que beaucoup d’entre eux ont attendu toute l’année cette compensation, qu’on leur a promise il y a un an.
Dès lors, pour marquer le coup symboliquement, si ces amendements sont maintenus, je voterai en leur faveur.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote.
Mme Françoise Laborde. En tant que rapporteur pour avis de la commission de la culture, j’ai auditionné, en compagnie de mes collègues, les représentants des artistes auteurs. Alors que nous sommes déjà en novembre, ils n’ont toujours rien touché et ressentent donc une certaine inquiétude.
Nous avons abordé ce sujet, bien sûr, avec M. le ministre de la culture, que nous avons rencontré tout à l’heure. Il nous a donné les réponses que vous venez également de nous offrir, madame la ministre, même si vous avez sans doute été plus précise. Il y a quelques jours, comme nous n’avions pas encore reçu de réponse du Gouvernement, nous pouvions croire qu’il s’agissait d’une façon d’économiser 18 millions d’euros sur le dos des artistes auteurs.
Aujourd’hui, madame la ministre, vous prenez des engagements en nous déclarant que les organismes qui doivent verser ces sommes le feront. Je l’entends. Comme ma collègue Laure Darcos, je relève que vous avez aussi pris un tel engagement pour 2019, et qu’un système sera mis en place pour la suite.
Je vais voir ce que nous décidons de faire, mais je suis contente de cette réponse précise.
Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Madame la ministre, je m’apprête à répéter quelque peu les propos de mes collègues Laure Darcos et Françoise Laborde, mais j’y mettrai sans doute un peu plus de colère !
En effet, si je comprends bien, en novembre 2017, il y a un an, le Sénat a adopté un amendement qui n’a pas été par la suite retenu par l’Assemblée nationale. Une inspection conjointe du ministère de la culture et de l’IGAS a ensuite été diligentée. Un décret a été publié au mois de mai. Et vous nous annoncez un an plus tard, comme si c’était normal, qu’aucun euro n’a été versé !
Ces artistes, pour leur part, ils paient leurs salles ! Ils doivent vivre ! Dans quel monde vivons-nous ? On trouve normal, ce soir, au Sénat, qu’aucun versement n’ait eu lieu et que ces 18 millions d’euros destinés à des artistes, à des créateurs, dorment dans un coin à Bercy !
Je veux bien entendre votre engagement, madame la ministre. On va repartir dans le même système et dans un an, s’il n’y a pas de colère ici, on trouvera à nouveau tout à fait normal d’envisager de ne verser ces sommes qu’à la fin de l’année.
Je souhaite donc vivement que ces amendements soient maintenus. Certes, il s’agit d’amendements d’appel, mais je crois honnêtement que, au vu du fonctionnement de l’État, ils sont extrêmement nécessaires. (Mmes Marie Mercier et Laure Darcos applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. J’ai simplement une question à poser à Mme la ministre, sans doute due au fait que j’ai mal compris son propos, puisque son explication était sûrement très claire.
Vous nous avez déclaré, madame la ministre, que 18 millions d’euros avaient été prévus pour 2018 afin d’essayer de compenser une partie de la hausse de la CSG subie par les artistes auteurs et de les aligner ainsi sur les salariés. Vous avez également annoncé prévoir la même enveloppe de 18 millions d’euros pour 2019, si j’ai bien compris. Vous avez enfin ajouté, pour répondre d’ailleurs à une demande, que vous élargirez l’éventail des bénéficiaires potentiels de cette mesure.
Cela signifie que vous diviserez les 18 millions d’euros entre davantage de personnes. Chacun recevra donc moins en 2019 qu’en 2018.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Je veux moi aussi adresser une question à Mme la ministre. Je l’ai entendue dire que ces artistes auteurs devraient se signaler auprès des organismes agréés. Le versement de cette compensation ne sera donc pas automatique. Cette rétribution ne se fera pas de manière tacite : il faudra faire une demande et attendre qu’elle soit versée. J’aimerais qu’on me précise si j’ai bien compris ce point.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Je ne souhaite pas retirer cet amendement : c’est une question de principe.
L’année dernière, nous avons eu ce même débat. On nous avait promis qu’il serait suivi d’effets dans les mois à venir. Or il s’est avéré qu’aux États généraux du livre, comme par hasard, c’est-à-dire au moment où tous ces artistes auteurs se réunissaient, tout d’un coup, alors que rien n’avait été fait jusqu’alors, un décret est soudainement apparu ! Seulement, ce décret n’est pas là pour vraiment compenser la hausse de la CSG et régler le problème du pouvoir d’achat des artistes auteurs.
Un autre point, important, a fait l’objet d’un débat lorsque les dispositions issues de notre amendement ont été examinées l’année dernière par l’Assemblée nationale : nous avions souhaité que ces dispositions concernent l’ensemble des auteurs assujettis, alors que le décret finalement publié ne s’adresse qu’aux auteurs affiliés à l’AGESSA, l’Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs, et à la Maison des artistes. Il ne s’agit pas de l’ensemble des artistes auteurs ! Ce périmètre – vous le savez bien – comprend des auteurs, des écrivains, des dessinateurs, des illustrateurs, des artistes visuels, ou encore des graphistes. Ce sont tous les artistes que nous voyons travailler sur l’ensemble de nos territoires.
Nous pouvons vous faire confiance, madame la ministre. Nous n’avons pas eu connaissance du rapport de l’IGAS et du ministère de la culture. Apparemment, des préconisations y sont formulées, mais je n’ai pas encore pu disposer de ces éléments.
Vous allez reconduire le même système l’année prochaine. Dont acte. Mais nous ne disposons à ce jour d’aucun élément précis quant à la compensation pérenne de la hausse de la CSG pour l’ensemble de cette catégorie d’actifs que sont les artistes dans notre pays.
Pour toutes ces raisons, je maintiens mon amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.